ÉTAT DES LIEUX ET CARTOGRAPHIE DE LA MOBILITÉ ÉTUDIANTE EN FRANÇAIS DANS LES AMÉRIQUES

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ÉTAT DES LIEUX ET CARTOGRAPHIE
DE LA MOBILITÉ ÉTUDIANTE
EN FRANÇAIS DANS LES AMÉRIQUES
Guillaume Gibert (Universidad del Salvador, Argentine) et
Victor Montoya (Universidad Nacional de Tres de Febrero, Argentine)

Rapport de recherche

Réalisé à Buenos Aires, Argentine, d’avril à août 2021.
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  REMERCIEMENTS
  Nous tenons à remercier les services de Relations internationales des établissements membres de l’AUF
  dans la région ayant collaboré à l’enquête, ainsi que leurs étudiantes et étudiants ayant fait une mobilité
  en français. Nous adressons également un remerciement particulier aux chercheurs Guillaume Gibert et
  Victor Montoya pour la réalisation de ce projet.

              VICTOR MONTOYA                                                   GUILLAUME GIBERT
    Universidad Nacional de Tres de Febrero,                                  Universidad del Salvador,
                  Argentine                                                          Argentine

Victor Montoya réalise actuellement un Doctorat               Guillaume Gibert est économiste, diplômé de
en Études Internationales à l’Université Torcuato             l’Université de Montpellier (France). Il exerce depuis
Di Tella (Argentine) et en Économie à l’Université            2007 les fonctions de Coordinateur général du
Sorbonne Nouvelle Paris 3 (Centre de Recherche                Programme « La Condamine » au sein de l’Université du
et de Documentation sur les Amériques-UMR7277,                Salvador en Argentine, Programme qui met en œuvre à
France) dans le cadre d’une cotutelle. Ses recherches         Buenos Aires des filières franco-argentines de double
portent sur la coopération universitaire ainsi que            diplôme en Économie, Gestion et Droit.
l’internationalisation de l’enseignement supérieur et
des élites. Il travaille au Laboratoire de Recherche et
d’Innovation en Politique et Gestion des Langues de
l’Universidad de Tres de Febrero (UNTREF LINGUA,
Argentine) où il coordonne les activités de recherche.

                                    Publication de l’AUF, décembre 2021
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SOMMAIRE
Résumé.................................................................................................................................................................................. 3

Introduction........................................................................................................................................................................ 5

1. État des lieux des connaissances...........................................................................................................................7

2. Note méthodologique.............................................................................................................................................. 10

3. Structure géolinguistique des flux d’étudiant.e.s dans les Amériques...................................................16
      3.1. Étude de la mobilité sortante............................................................................................................................ 16
      3.2. Étude de la mobilité entrante........................................................................................................................... 20

4. La place de la mobilité étudiante en français dans les établissements membres de l’AUF des
   Amériques.................................................................................................................................................................... 23

5. Les étudiant.e.s des universités latino-américaines membres de l’AUF en mobilité en français.. 28
      5.1 Portrait................................................................................................................................................................ 28

        5.1.1      Description générale............................................................................................................................................................28
        5.1.2      Type de mobilité...................................................................................................................................................................29
        5.1.3      La langue française...............................................................................................................................................................30

      5.2 Améliorer l’accès................................................................................................................................................ 32

        5.2.1      L’enjeu linguistique...............................................................................................................................................................32
        5.2.2      L’enjeu socioculturel.............................................................................................................................................................33
        5.2.3      L’enjeu matériel....................................................................................................................................................................33

Conclusion.........................................................................................................................................................................34

Annexe A. Mobilité étudiante internationale : données disponibles.............................................................. 36

Annexe B. Agrégation des données pour la mobilité sortante......................................................................... 38

Annexe C. Agrégation des données pour la mobilité entrante........................................................................ 39

Annexe D. Estimation de la répartition des étudiant.e.s en mobilité entrante et sortante selon le type
  de mobilité en français (période 2015-2019, pour les membres AUF en Amérique latine)...............40

Annexe E. Estimation des effectifs annuels moyens étudiants en mobilité sortante en français des
  Universités membres de l’AUF en Amérique latine (période 2015-2019)................................................43

Annexe F. Détail et résultats statistiques de l’ACM.............................................................................................45

Bibliographie..................................................................................................................................................................... 47
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RÉSUMÉ
Le travail de recherche porte sur la mobilité étudiante internationale en français dans les Amériques.
Il consiste, par la construction d’outils et méthodes sur mesure, à établir une cartographie de la
mobilité étudiante en français aux Amériques, en global et pour les établissements membres de
l’AUF, et présenter un portrait de l’étudiant.e d’Amérique latine en mobilité internationale en français.

1. ÉTAT DES LIEUX DES                                            internationale de ces universités. Aussi, un recensement
   CONNAISSANCES                                                 des Programmes de soutien à la mobilité en français
                                                                 dans les douze pays du réseau de l’AUF des Amériques
Il existe très peu de données et d’études scientifiques          est réalisé. La dernière étape consiste à se focaliser sur
sur la mobilité universitaire en français dans les               les universités membres de l’AUF en Amérique latine
Amériques. Les données statistiques sont généralement            par l’intermédiaire de deux enquêtes réalisées auprès
structurées par pays et les études se limitent à                 de leur service de Relations internationales et leurs
l’analyse des principaux pays de mobilité. La dimension          étudiant.e.s ayant fait une mobilité en français.
linguistique des mobilités n’est habituellement pas prise
en compte : les données ne sont pas analysées sous
cet angle, même si, parfois, la question des langues est         3. STRUCTURE LINGUISTIQUE DES
mentionnée. La principale source de données est celle               FLUX D’ÉTUDIANT.E.S DANS LES
de l’Institut de Statistique de l’UNESCO qui fournit des            AMÉRIQUES
données brutes pour l’ensemble des pays. Cette source
est généralement celle qui est utilisée dans les rapports        Sur la période 1998-2019, le profil linguistique de
institutionnels et les études scientifiques.                     la mobilité étudiante des pays d’Amérique latine se
                                                                 différencie de celui de la mobilité étudiante des pays
                                                                 d’Amérique du Nord. Ainsi, la mobilité latino-américaine
2. NOTE MÉTHODOLOGIQUE                                           vers les principaux pays anglophones est de 48,2 %
                                                                 contre 72,7 % pour les pays américains anglophones.
L’approche proposée part du global vers le local. Tout           Aussi, 7,2 % de la mobilité sortante latino-américaine
d’abord, une analyse géolinguistique des flux de mobilité        a comme destination la France, contre 4,1 % pour les
entrante et sortante des Amériques est menée à partir            pays américains anglophones. L’analyse des principaux
des données publiées par l’Institut de Statistique de            pays francophones de destination de la mobilité des
l’UNESCO. Puis, un travail spécifique consiste à établir le      Amériques indique que la France est le premier pays
profil linguistique des établissements d’enseignement            de destination alors que la mobilité vers le Canada
supérieur membres de l’AUF dans les Amériques par                atteint un chiffre similaire à celui de la France. Les
un recensement de leurs partenariats internationaux              autres principales destinations francophones, avec
selon leurs caractéristiques géolinguistiques. Une base          des chiffres très inférieurs à ceux de la France ou du
de données spécifique des accords de coopération                 Canada, sont la Suisse, la Belgique et le Maroc. Si, au
actifs liés à la francophonie scientifique et universitaire      lieu d’étudier des pays, l’on procède à une analyse par
est créée pour connaître les opportunités de mobilités           agrégation géolinguistique, on observe que la mobilité
internationales en français proposées aux étudiant.e.s           vers les pays partiellement francophones dépasse
des universités membres de l’AUF dans les Amériques              légèrement celle vers la France. Pour la mobilité
et leur part relative dans la politique de coopération           entrante, les pays asiatiques apparaissent comme la
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principale origine des mobilités dans les Amériques,                     mobilité en français. Parmi les établissements qui ont
ces mobilités caractérisant surtout les États-Unis                       répondu à l’enquête adressée aux Services de Relations
et le Canada. L’Amérique latine, avec une mobilité                       internationales, les douze universités d’Amérique latine
essentiellement régionale, a un profil géolinguistique                   qui ont le plus d’étudiant.e.s en mobilité en français
très différent. Concernant la mobilité entrante dans les                 participent aux Programmes ERASMUS et/ou –FITEC.
Amériques, le premier pays francophone est le Canada
et le deuxième pays est la France ; en troisième position,
avec des chiffres nettement inférieurs, se trouve Haïti.                 5. LES ÉTUDIANT.E.S DES UNIVERSITÉS
Sur la période, près de 300 000 étudiant.e.s d’Afrique                      LATINO-AMÉRICAINES MEMBRES DE
francophone sont venus étudier dans les Amériques,                          L’AUF EN MOBILITÉ EN FRANÇAIS
soit la même quantité, au millier près, que d’étudiant.e.s
français.e.s.                                                            L’expérience de mobilité est pour une large part
                                                                         française avec plus de 90 % des répondant.e.s qui
                                                                         déclarent avoir fait une mobilité en France. Il s’agit
4. LA PLACE DE LA MOBILITÉ                                               d’un public plurilingue, qui est en mesure d’articuler
   ÉTUDIANTE EN FRANÇAIS DANS                                            différents espaces linguistiques. La grande majorité des
   LES ÉTABLISSEMENTS MEMBRES                                            mobilités sont intégrées aux cursus des étudiant.e.s
   DE L’AUF DES AMÉRIQUES                                                avec la reconnaissance des crédits, voire l’obtention
                                                                         d’un double diplôme (pour les doubles diplômes, 58,9 %
Les profils linguistiques des établissements membres                     réalisent une mobilité de deux ans). En ce qui concerne
de l’AUF des Amériques se différencient fortement                        le type de bourse, 41 % des étudiant.e.s partent avec
selon l’environnement linguistique au sein duquel                        des bourses 100 %, 32 % avec une bourse partielle et
ils sont immergés. Si la place des partenariats                          27 % sans bourse. Les bourses 100 % se concentrent
francophones est comparable pour les établissements                      sur les échanges les plus institutionnalisés. Pour les
des régions hispanophones et lusophones, les premiers                    répondant.e.s, les principaux lieux d’apprentissage
sont beaucoup plus tournés vers les établissements                       du français sont les instituts de langue, l’université et
d’Amérique latine et Caraïbe (langues latines) que les                   les cours particuliers. On constate aussi que dans de
établissements brésiliens. Le profil linguistique des                    nombreux cas l’apprentissage du français ne semble
établissements des régions francophones est très                         commencer qu’à l’université, ce qui signifie que ces
différent de celui des établissements des autres régions                 mobilités constituent l’occasion d’attirer un public qui
linguistiques avec une plus large part des partenariats                  n’était pas francophone avant d’étudier à l’université.
avec des universités francophones. Le bilinguisme                        Mais, après la mobilité, la continuité de l’étude de la
anglais-français se reflète clairement sur le profil                     langue et son utilisation dans le cadre académique n’est
linguistique des établissements situés dans des régions                  pas majoritaire, et l’utilisation en milieu professionnel
où les deux langues sont parlées couramment. Enfin,                      ne concerne que la moitié des répondant.e.s. Après
le profil linguistique des établissements situés dans                    les problèmes financiers et les difficultés matérielles,
des régions anglophones laisse comparativement peu                       la deuxième difficulté rencontrée lors de la mobilité
de place aux partenariats francophones alors que les                     est la socialisation dans le pays d’accueil, signalée
partenariats en Asie représentent plus d’un tiers de                     comme problématique dans 35 % des cas. Le retour
leurs relations à l’international. Pour les établissements               sur l’expérience de la mobilité est cependant largement
membres de l’AUF dans les Amériques, 2882 partenariats                   positif.
avec des établissements francophones et/ou membres
de l’AUF ont été dénombrés. Parmi eux, l’importance                      L’ensemble des résultats obtenus dans le cadre de ce
relative des partenariats avec des établissements                        travail de recherche constitue une base documentaire
français, canadiens, puis brésiliens est à souligner. Sur                qui permettra à l’AUF de mettre en œuvre de futurs
la période 2015-2019, on estime qu’en moyenne et                         programmes de soutien à la mobilité étudiante en
chaque année, plus de 1800 étudiant.e.s des universités                  français au plus proche des besoins de ses membres et
membres de l’AUF en Amérique latine réalisaient une                      leurs étudiant.e.s.
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INTRODUCTION

       « Je l’encouragerais à le faire. Dans mon cas, d’un point de vue universitaire et humain, cette mobilité
       étudiante en français a été très importante pour mon développement professionnel et personnel » ;
       conseil apporté1 par un étudiant de l’Université de La Plata (Argentine) à un.e étudiant.e qui
       s’apprêterait à entreprendre une mobilité en français similaire à celle qu’il a effectuée.

La mobilité étudiante peut être définie comme le                                                française sont plurielles. Par exemple, un.e étudiant.e
déplacement d’un.e étudiant.e de l’enseignement                                                 originaire d’une région francophone peut effectuer sa
supérieur, généralement dans un pays étranger,                                                  mobilité dans une université dont la principale langue
dans un contexte d’études ou d’apprentissage et                                                 d’enseignement est le français. Aussi, un établissement
pour une durée déterminée. Ainsi, on peut distinguer                                            d’enseignement supérieur d’une région francophone
plusieurs types de mobilités étudiantes : celles qui                                            accueille dans des formations entièrement en
se déroulent dans le cadre de formations ou de                                                  français des étudiant.e.s étranger.ère.s qui sont
programmes diplômants ou bi-diplômants (d’une durée                                             des utilisateur.trice.s élémentaires, indépendant.e.s
généralement supérieure à un an), celles organisées                                             ou expérimenté.e.s du français. Des étudiant.e.s
dans le cadre d’un programme d’échange avec ou sans                                             francophones peuvent réaliser une mobilité dans une
validation de crédits (de trois mois à un an), celles qui                                       université dont les cours sont donnés entièrement en
se réalisent dans le cadre d’un stage ou de programmes                                          espagnol.
de coopération spécifiques à l’étranger (de un à trois
mois) ou encore celles qui concernent les écoles d’été                                          L’introduction de la variable « langue » dans la mobilité
ou les voyages d’études qui sont généralement centrés                                           étudiante demande donc de définir certains concepts
sur la socialisation interculturelle et/ou l’apprentissage                                      et clarifier le niveau d’analyse. Ainsi et dans le cadre
d’une langue ou d’une spécialité (d’un à trois mois).                                           de ce travail de recherche, lorsque l’analyse porte
Aussi, un phénomène s’est amplifié depuis 2020 dans le                                          sur les pays, le terme de « mobilité francophone »
contexte de la pandémie liée à la COVID-19 : la mobilité                                        fait référence à des mobilités concernant des pays
« à domicile ». Elle peut concerner les quatre types                                            francophones ou partiellement francophones comme
de mobilité présentés ci-dessus, mais se déroule soit                                           pays de destination ou d’origine. L’analyse du point
dans son intégralité à distance, soit sous une forme                                            de vue pays implique en effet de travailler sur des
hybride (à la fois en distanciel et présentiel), grâce à                                        données agrégées pour lesquelles la langue spécifique
l’utilisation des Technologies de l’Information et de la                                        de l’étudiant.e ou le cadre linguistique de la mobilité ne
Communication pour l’Éducation (TICE).                                                          sont pas toujours connus. La mobilité de la France vers
                                                                                                la Colombie est alors, au niveau pays, définie comme
Pour se référer à des mobilités étudiantes                                                      une mobilité francophone même si le français n’est pas
« francophones » ou « en français », il est nécessaire                                          le vecteur de la mobilité. Lorsque l’analyse porte sur les
de caractériser le français en tant que « langue de la                                          étudiant.e.s au niveau individuel, une différenciation
mobilité étudiante ». Dans le cas de ces mobilités                                              peut être opérée selon la langue de l’étudiant.e et celle
étudiantes, les configurations d’utilisation de la langue                                       dans laquelle se fait la mobilité. En considérant dans

1   Ce conseil a été recueilli dans le cadre de l’enquête étudiante réalisée pour ce rapport.
ÉTAT DES LIEUX ET CARTOGRAPHIE DE LA MOBILITÉ ÉTUDIANTE EN FRANÇAIS DANS LES AMÉRIQUES
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ce cas que la langue d’attache principale de l’étudiant.e
est celle du pays d’origine de sa mobilité, une mobilité
étudiante « francophone » correspond alors à une
mobilité réalisée par un.e étudiant.e originaire d’une
région francophone vers une région non francophone
et une mobilité « en français » se réfère à celle
effectuée depuis une région non francophone vers
une région francophone. Le cas d’une mobilité depuis
et vers une région francophone correspond ici à une
mobilité « francophone et en français ». Ainsi, un.e
étudiant.e brésilien.ne qui fait une mobilité dans un
établissement francophone canadien réalise une
mobilité « en français ». À l’inverse, la mobilité d’un.e
étudiant.e haïtien.ne qui part en mobilité dans un pays
d’Amérique latine est une mobilité « francophone ». Si
un.e étudiant.e français.e fait une mobilité au Canada
dans une université francophone, sa mobilité est
caractérisée comme « francophone et en français ».

Le travail de recherche vise à mieux comprendre la
mobilité internationale francophone et en français des
étudiant.e.s. dans sa réalité, dans son environnement et
en particulier dans sa dynamique entre les universités
membres de l’AUF aux Amériques. Il consiste, par la
construction d’outils et méthodes sur mesure, à établir
une cartographie de la mobilité étudiante francophone
et en français aux Amériques, en global et pour les
établissements membres de l’AUF, et présenter un
portrait de l’étudiant.e d’Amérique latine en mobilité
internationale en français. Il apporte des données
indicatives des flux de la mobilité en français pour les
établissements membres de l’AUF en Amérique latine.

La structure du rapport de recherche est la suivante : un
état des lieux des connaissances (Partie 1) est d’abord
présenté, suivi d’une note méthodologique (Partie 2) et
la présentation des principaux résultats concernant la
structure linguistique des flux d’étudiant.e.s dans les
Amériques (Partie 3), la place de la mobilité étudiante
en français dans les établissements membres de l’AUF
des Amériques (Partie 4) et le portrait des étudiant.e.s
latino-américain.e.s des universités membres de l’AUF
en mobilité en français (Partie 5).
ÉTAT DES LIEUX ET CARTOGRAPHIE DE LA MOBILITÉ ÉTUDIANTE EN FRANÇAIS DANS LES AMÉRIQUES
ÉTAT DES LIEUX ET CARTOGRAPHIE DE LA MOBILITÉ ÉTUDIANTE EN FRANÇAIS DANS LES AMÉRIQUES. ― 7

1. ÉTAT DES LIEUX DES CONNAISSANCES
Cette partie est consacrée à l’état des lieux des                                                       secteur du Français Langue Étrangère, sans analyser
connaissances et des sources d’information concernant                                                   les mobilités francophones (Campus France, 2018).
les mobilités francophones et en français dans                                                          Du côté du Canada, la principale source identifiée est
les Amériques. Celui-ci a été effectué à partir de                                                      celle des résidents temporaires détenteurs de permis
l’exploration des sites institutionnels et d’une recherche                                              d’études qui donne des informations pour 221 pays
sur les moteurs de recherche académique à partir de                                                     sur la période 2017-2020 (Gouvernement du Canada,
différents mots-clefs2. Le principal constat est qu’il                                                  2021)5. De manière plus spécifique pour le Québec,
existe très peu de données et d’études scientifiques sur                                                il convient de mentionner les Données préliminaires
la mobilité universitaire en français et/ou francophone                                                 relatives aux inscriptions au trimestre d’automne 2020 du
dans les Amériques. Les données statistiques sont                                                       Bureau de la Coopération Interuniversitaire (BCI, 2020),
généralement structurées par pays et les études se                                                      qui fournit des données générales sur l’évolution des
limitent à l’analyse des principaux pays de mobilité.                                                   étudiant.e.s internationaux au Québec et le détail par
La dimension francophone des mobilités n’est donc                                                       université, mais ne donne pas d’information précise
généralement abordée dans ces documents qu’à                                                            concernant l’origine des étudiant.e.s ; et le document
travers la mobilité vers la France. De plus, la dimension                                               Statistiques sur les étudiant.e.s internationaux dans le
linguistique des mobilités n’est habituellement pas prise                                               réseau universitaire québécois (ME-MES, 2017), qui donne
en compte : les données ne sont jamais analysées sous                                                   des informations sur l’origine des étudiant.e.s. Selon ce
cet angle-là, même si, parfois, la question des langues                                                 document, pour l’année 2013, la France, avec 12 495
est mentionnée, plus particulièrement pour l’anglais. Il                                                étudiants, est le premier pays d’origine des étudiant.e.s
existe ensuite une série de documents concernant le                                                     internationaux dans le réseau universitaire québécois.
Français Langue Étrangère, qui se concentrent donc sur                                                  En ce qui concerne les pays d’Amérique latine, le
les questions de didactique plus que sur l’analyse des                                                  Mexique, avec 374 étudiant.e.s, est le treizième pays et
mobilités. Les principaux éléments qui ont été trouvés                                                  le Brésil, avec 344 étudiant.e.s, est quinzième. Pour ce
sont ceux qui sont mentionnés dans la synthèse qui                                                      qui est des États-Unis, la principale source identifiée est
suit.                                                                                                   l’Institut of International Education qui à travers son Open
                                                                                                        doors et Project Atlas6 offre des données très détaillées
En ce qui concerne les données, la principale source                                                    sur l’origine des étudiants, les destinations aux États-
est l’Institut de Statistique de l’UNESCO3 qui fournit                                                  Unis des mobilités entrantes, les disciplines, les
des données brutes pour l’ensemble des pays. Cette                                                      programmes d’anglais, etc. Il s’agit donc d’une source
source est généralement celle qui est utilisée dans                                                     de données riche et précise, mais dont l’utilité pour
les rapports institutionnels et les études scientifiques,                                               l’étude des mobilités en français est limitée, d’autant
et l’analyse statistique présentée dans ce rapport se                                                   plus que cette source ne concerne que les États-Unis.
base sur celle-ci. L’autre source privilégiée est Campus                                                Enfin, pour l’Amérique latine, il convient de mentionner
France qui possède un espace documentaire avec de                                                       l’Institut International pour l’Éducation Supérieure en
nombreux éléments (notes, chiffres clés, fiches pays,                                                   Amérique latine et la Caraïbe de l’UNESCO (IESALC)
etc.)4. Si beaucoup de documents de Campus France                                                       qui a récemment consacré une étude à la mobilité en
apportent des informations concernant la mobilité                                                       Amérique latine (IESALC, 2019). Ce document apporte
vers la France et la mobilité des pays américains, le                                                   de nombreuses informations, mais très peu sur les
seul document qui ait été trouvé qui aborde la langue                                                   questions linguistiques. S’il existe donc de nombreuses
française dresse un panorama de la langue française                                                     sources de données et des institutions qui produisent
dans le monde, analyse les mobilités vers la France                                                     des rapports et des études sur les mobilités, les aspects
pour l’apprentissage du Français puis l’impact du                                                       linguistiques sont rarement traités.

2    Moteurs de recherche utilisés : Cairn, Persée, Érudit, Jstor, Latindex, Scielo, google schoolar. Mots-clefs utilisés : mobilité, étudiant, universitaire, Amérique, francophone, français. Re-
    cherche réalisée en français, anglais et espagnol.
3   http://data.uis.unesco.org
4   https://www.campusfrance.org/fr/espace-documentaire
5   https://ouvert.canada.ca/data/fr/dataset/90115b00-f9b8-49e8-afa3-b4cff8facaee. Ces données sont malheureusement confuses et il n’a donc pas été possible de les exploiter dans cette
    étude.
6   Accessibles aux adresses suivantes: https://opendoorsdata.org et https://www.iie.org/Research-and-Insights/Project-Atlas.
ÉTAT DES LIEUX ET CARTOGRAPHIE DE LA MOBILITÉ ÉTUDIANTE EN FRANÇAIS DANS LES AMÉRIQUES
8 ― ÉTAT DES LIEUX ET CARTOGRAPHIE DE LA MOBILITÉ ÉTUDIANTE EN FRANÇAIS DANS LES AMÉRIQUES.

Ensuite, plusieurs rapports institutionnels qui apportent                contre 26 % pour les États-Unis et 18 % pour la Grande-
des informations spécifiques sur la francophonie                         Bretagne. De plus, six étudiant.e.s sur dix déclarent
universitaire américaine ont pu être identifiés.                         que le fait de pouvoir avoir des cours en français et en
Mentionnons tout d’abord le rapport de l’Assemblée                       anglais a été un élément motivant le choix du Canada.
parlementaire de la francophonie La mobilité étudiante                   Enfin, dans le cas des Collèges d’enseignement général
au sein de la francophonie (Godin, 2018), qui fait une                   et professionnel, une étude indique qu’en 2019, 46 %
synthèse concernant les programmes de mobilité et                        des projets internationaux ont été menés en Afrique
les flux par pays. Concernant la France, l’Atlas territorial             subsaharienne et 34 % en Amérique latine et aux
de la mobilité européenne et internationale apporte                      Antilles (Fédération des CÉGEPS, 2020). Il convient de
quelques informations sur la Guyane, où la mobilité                      signaler que dans ces documents institutionnels le mot
étudiante entrante est évaluée à 400 étudiant.e.s                        « francophonie » n’apparait généralement pas et qu’ils
(MESRI, 2020). Enfin, dans le cas du Canada, M. Julien                   mentionnent très peu les questions linguistiques.
a réalisé un rapport intitulé La mobilité internationale
au sein des Universités québécoises. Étude réalisée dans                 En ce qui concerne les études scientifiques, quelques
le cadre de l’avis « L’internationalisation : nourrir le                 articles ont pu être identifiés. Ces travaux sont dans
dynamisme des universités québécoises » (Julien, 2005).                  l’ensemble très spécifiques et basés sur des méthodes
Ce rapport est détaillé et exhaustif pour la période                     qualitatives. A. Gherbi et Ch. Belkhodja analysent de
1982-2003, mais est daté et n’apporte donc que                           manière détaillée le réseau universitaire montréalais à
peu d’informations utiles pour la présente étude. Le                     partir d’entretiens (Gherbi & Belkhodja, 2018), M. Yérou
rapport Les effectifs d’étudiant.e.s internationaux dans                 Baldé s’intéresse aux réorientations des mobilités
les programmes d’études postsecondaire avant la COVID                    sénégalaises de la France vers les États-Unis et le
donne des informations générales sur la proportion                       Canada (Baldé, 2014), A. Pilote et M. Canuel travaillent
d’étudiant.e.s étrangers, la répartition par discipline et               sur les mobilités francophones internes au Canada à
l’importance de la Chine et de l’Inde, mais sans préciser                partir d’entretiens (Pilote & Canuel, 2013), S. Garneau
l’origine des étudiant.e.s internationaux (Frenette et                   et C. Bouchard étudient de manière plus spécifique
al., 2020). Le document Les étudiant.e.s internationaux                  la difficulté que représente la langue française pour
dans les universités canadiennes, 2004-2005 à 2013-2014                  attirer les étudiant.e.s internationaux au Québec,
apporte une information plus détaillée, mais donne                       et comparent la France et le Québec, notamment
peu d’informations sur la mobilité francophone ou en                     à travers des statistiques concernant les mobilités
français des Amériques (Statistique Canada, 2016). Un                    maghrébines (Garneau & Bouchard, 2013). C. Beaudry,
autre document identifié est l’Évaluation du Programme                   J. Laflamme, A.-A. Deschênes et M. Aguir étudient
des étudiant.e.s étrangers, qui apporte également peu                    les mobilités francophones internes au Canada et
d’éléments (Citoyenneté et Immigration Canada, 2015).                    élaborent un modèle (régression) des facteurs de
En revanche, Le Canada au premier rang: l’enquête de                     mobilité (Beaudry et al., 2014). I. Violette étudie les
2009 sur les étudiant.e.s étrangers fournit quelques                     politiques d’internationalisation et signale l’intérêt
éléments plus intéressants (Humphries et al., 2014).                     que présente pour les francophones la migration
Cette enquête s’appuie sur l’étude de plus de cinq mille                 au Canada en tant que moyen d’acquérir l’anglais
questionnaires et prolonge des enquêtes similaires                       (Violette, 2015). A. Pilote et L. Brier s’intéressent
menées en 2004 et 1999. Elle permet d’établir le profil                  également aux mobilités francophones internes au
socioéconomique des étudiant.e.s et leur expérience de                   Canada à travers la réalisation d’entretiens (Pilote &
la mobilité. En ce qui concerne la langue, elle apporte                  Brier, 2013). S. Garneau, C. Bouchard et A. Pilote se
différents éléments très précis : avant de venir au                      sont intéressées plus particulièrement aux offres de
Canada, en ce qui concerne les étudiant.e.s d’université,                formation en lien avec les mobilités francophones
14 % des étudiant.e.s interrogé.e.s parlaient le français                internes au Canada (Garneau et al., 2013). M.-C.
dans leur famille, contre 25 % pour l’anglais, 22 % pour                 Bernard a également travaillé sur les offres de cours
le mandarin et le cantonais, et 6 % pour l’espagnol. 12 %                et l’insertion des étudiant.e.s universitaires en milieu
de ces étudiant.es ont un parent qui a étudié en France,                 francophone (Bernard, 2014). J. Jean-Pierre a travaillé
ÉTAT DES LIEUX ET CARTOGRAPHIE DE LA MOBILITÉ ÉTUDIANTE EN FRANÇAIS DANS LES AMÉRIQUES. ― 9

plus particulièrement sur l’insécurité linguistique (Jean-                                       M. Börjesson. En approfondissant l’analyse pour la
Pierre, 2017), et L. Sall a étudié les modes d’inclusion                                         mobilité sortante latino-américaine, il montre en outre
des étudiant.e.s francophones internationaux (Sall,                                              que les différents pays de cette région sont plus ou
2020). Deux constats peuvent être faits concernant                                               moins liés aux différents pôles identifiés.
cette littérature : d’une part, de nombreux articles qui
traitent de la mobilité francophone au Canada étudient                                           Il ressort de cette révision qu’il existe donc des données
la mobilité interne, et non internationale, du Canada.                                           statistiques sur les mobilités, mais que celles-ci sont
D’autre part, aucun article n’a été trouvé concernant la                                         rarement analysées sous l’angle linguistique, et encore
mobilité des étudiant.e.s latino-américains en milieu                                            moins pour traiter sous cet angle-là les flux dans les
francophone dans les Amériques 7.                                                                Amériques. Un des apports du travail qui est ici présenté
                                                                                                 est donc d’analyser la structure linguistique des flux
Enfin, il convient de signaler trois articles qui font une                                       d’étudiant au niveau mondial, c’est-à-dire de proposer
analyse globale des mobilités étudiantes en prenant en                                           une approche géolinguistique des flux, et d’apporter
compte les aspects linguistiques. Tout d’abord, l’article                                        ainsi certains éléments pour mieux connaître les
de R. Perkins et E. Neumayer Geographies of educational                                          dynamiques américaines.
mobilities: exploring the uneven flows of international
students qui montre à travers un modèle statistique                                              Un deuxième constat est qu’il n’existe apparemment
l’impact d’une langue commune sur les mobilités : celles-                                        pas de travaux d’ensemble ni sur les étudiant.e.s qui
ci constituent des variables explicatives de ces mobilités,                                      effectuent des mobilités en français ni sur les dispositifs
en plus du nombre d’universités dans les classements                                             institutionnels permettant ces mobilités dans les
internationaux, de la distance géographique, des                                                 Amériques, et plus particulièrement en Amérique
variables économiques, du type de régime et des liens                                            latine et les établissements membres de l’AUF. L’étude
coloniaux (Perkins & Neumayer, 2014). C’est donc un                                              réalisée pour ce rapport, à travers le recueil de données
article essentiel puisqu’il montre que l’existence d’une                                         concernant les accords des universités membres
langue commune influe sur la mobilité indépendamment                                             de l’AUF dans les Amériques ainsi que les dispositifs
des autres variables. Ensuite, l’article de M. Börjesson,                                        existants au niveau national, et à travers la réalisation
The global space of international students in 2010 qui                                           de deux enquêtes auprès des Secrétariats des Relations
met en évidence, grâce à une analyse factorielle des                                             Internationales des universités et des étudiant.e.s
mobilités, l’existence d’une structure linguistique des                                          ayant réalisé des mobilités, permet donc de contribuer
flux d’étudiant.e.s (Börjesson, 2017). Cet auteur montre                                         à combler une lacune sur ces questions-là.
que l’espace social des mobilités est structuré autour
de trois pôles : un pôle pacifique, dominé par l’anglais,
avec une logique de marché ; un pôle franco-ibérique,
dominé par le français, l’espagnol et le portugais, avec
une logique culturelle et coloniale ; et un pôle européen,
dominé par les langues slaves et germaniques, avec
une logique de proximité. Dans le prolongement de
ces différents travaux, V. Montoya reprend, dans
¿Dependencia bicéfala o autonomía? América Latina en
el espacio de la movilidad estudiantil internacional, la
méthode suivie par M. Börjesson pour l’année 2017
et obtient un résultat similaire (Montoya, 2021). Il
identifie néanmoins des éléments supplémentaires :
l’existence d’un pôle russe, continental et russophone,
avec la Russie comme centre et des mobilités mettant
en relation les pays de l’ex-URSS ; et d’un pôle latino-
américain, lié au pôle franco-ibérique identifié par

7 Il existe en revanche des travaux sur ces mobilités en France (Varela, 2020; García Garza & Wagner, 2015).
10 ― ÉTAT DES LIEUX ET CARTOGRAPHIE DE LA MOBILITÉ ÉTUDIANTE EN FRANÇAIS DANS LES AMÉRIQUES.

2. NOTE MÉTHODOLOGIQUE
La première partie du travail de recherche a été                                                   Ces données de l’Institut de Statistique de l’UNESCO
consacrée à l’étude géolinguistique des flux entrants                                              concernent les « étudiant.e.s qui ont quitté
et sortants des étudiant.e.s dans les Amériques, c’est-                                            provisoirement leur territoire national dans le but de
à-dire à une analyse des mobilités qui prenne en                                                   poursuivre leurs études et qui sont inscrits dans un
compte à la fois un critère géographique et linguistique.                                          programme d’enseignement dans un pays étranger »
Avec comme objectif de cartographier les mobilités                                                 (UNESCO, 2020). Il n’est donc pas possible d’établir de lien
francophones en Amérique latine et d’identifier et                                                 direct entre la mobilité observée et l’existence d’accords
documenter les flux entre zones francophones et                                                    interuniversitaires : les mobilités courtes n’apparaissent
non francophones, il est ainsi proposé de procéder                                                 pas dans ces données. Elles ne permettent donc
à une analyse des mobilités francophones dans les                                                  d’appréhender qu’une partie des mobilités et apportent
Amériques, celles-ci étant entendues ici comme les                                                 une information différente et complémentaire de
mobilités ayant pour origine ou destination un pays                                                l’étude des relations institutionnelles entre universités
francophone ou bien partiellement francophone.                                                     ou des politiques étatiques.
Bien évidemment, il n’est pas possible de savoir si ces
mobilités se font en français. Néanmoins, une telle                                                À ces limitations liées aux données s’ajoutent les
approche est utile dans la mesure où elle permet d’avoir                                           difficultés liées au travail de classification qu’implique
une vision d’ensemble et de situer, à partir de l’étude                                            une approche en termes géolinguistiques. S’il est,
de mobilités francophones dans les Amériques, les                                                  par exemple, simple de classer la France comme
éléments plus spécifiques présentés dans ce rapport                                                francophone, cela est plus difficile pour les pays
concernant les établissements membres de l’AUF et les                                              bilingues ou plurilingues comme le Canada ou la
étudiant.e.s réalisant des mobilités en français. Cette                                            Suisse. Certains pays peuvent en outre ne pas avoir
partie contribue aussi à combler la lacune signalée                                                le français comme langue officielle mais être dans
dans l’état des lieux des connaissances concernant le                                              la pratique au moins partiellement francophones,
manque d’études sur les mobilités étudiantes prenant                                               comme l’Algérie. Par ailleurs, les données concernant
en compte les aspects linguistiques.                                                               les pays, il est impossible de savoir si les étudiant.e.s
                                                                                                   en mobilité vont, par exemple dans le cas du Canada,
L’étude proposée vise à identifier la structure                                                    dans une région francophone et/ou une université
géolinguistique des flux de mobilité entrante et sortante                                          francophone, et quand bien même cette information
des Amériques pour la période 1998-2019. Les données                                               serait disponible il ne serait pas possible de savoir si
utilisées sont celles de l’Institut de Statistique de                                              l’étudiant en question est francophone ou pas. Plutôt
l’UNESCO, qui sont celles généralement utilisées par les                                           que de chercher à établir un système de pondération
organismes nationaux, tels que Campus France, dans                                                 qui aurait obligé à choisir une série de critères plus ou
leurs propres études. Comme l’indique l’Annexe A, ces                                              moins valables et à complexifier l’analyse, le choix a
données sont très incomplètes pour de nombreux pays                                                été fait de créer une catégorie spécifique pour les pays
en tant que pays de destination, mais satisfaisantes pour                                          partiellement francophones comme le Canada ou la
les principaux pays8. Dans la mesure où l’objectif est                                             Belgique (« AutresFranco »)9. En plus de la simplification
d’établir des tendances générales, il a semblé préférable                                          de l’analyse, cette démarche a l’avantage de mettre
de ne pas imputer de valeurs pour les données                                                      l’accent sur le fait que les étudiant.e.s qui vont dans
manquantes, ce qui aurait compliqué la démarche et                                                 ces pays, même s’ils ne parlent pas français et ne vont
la restitution des résultats sans nécessairement obtenir                                           pas dans une région ou une université francophone,
de résultats significativement meilleurs. Ceci permet                                              sont susceptibles d’entrer en contact avec la langue
par ailleurs de fournir des chiffres qui seront cohérents                                          française. La démarche prenant en compte les aspects
avec d’autres études utilisant cette source et facilite la                                         géographiques, une variable spécifique a été créée
reproduction des calculs.                                                                          pour l’Afrique (« AfrFranco »).

8    Il convient ici d’avoir à l’esprit que ces données sont incomplètes pour les pays de destination, et généralement pour des pays quantitativement peu importants. Pour les pays d’origine,
    ces données sont beaucoup plus complètes, notamment lorsqu’il s’agit de pays d’origine ayant comme destination des pays quantitativement importants. Ainsi, par exemple, si les don-
    nées pour l’Argentine en tant que pays de destination sont mal renseignées, les données en tant que pays d’origine sont bonnes, puisque les étudiants de ce pays vont aux États-Unis, en
    Espagne, en France, etc. On sait donc bien où vont les argentin.e.s mais pas qui va en Argentine.
9   Le détail des agrégations apparait dans l’Annexe B et l’Annexe C.
ÉTAT DES LIEUX ET CARTOGRAPHIE DE LA MOBILITÉ ÉTUDIANTE EN FRANÇAIS DANS LES AMÉRIQUES. ― 11

L’approche par la langue a également impliqué de faire                                             « AfrLuso ») ; l’Espagne, l’Italie et le Portugal ; l’Amérique
des choix dans les langues choisies dans la mesure                                                 latine ; les pays anglophones («Anglo ») ; les pays
où il était impossible de prendre en compte toutes                                                 d’Asie et d’Europe considérés comme partiellement
les langues concernées à moins de créer une grande                                                 anglophones (« AsieAnglo » et « ErpAnglo ») et les autres
quantité de variables, ce qui aurait nui à la clarté du                                            pays (« Autres »). La Chine a été considérée comme
propos. Il a donc fallu réaliser une série d’agrégations qui                                       une variable à part entière étant donné le volume de
sont bien évidemment discutables mais qui néanmoins                                                sa mobilité sortante qui augmentait considérablement
permettent de synthétiser les données. L’anglais a bien                                            la variable « Autre ». L’Inde a été classée dans
évidemment été retenu, particulièrement pour les pays                                              « AsieAnglo » étant donné le statut de l’anglais dans ce
anglophones comme les États-Unis. Un pays comme                                                    pays. Bien évidemment, les étudiant.e.s chinois doivent
le Canada n’a pas été inclus dans cette catégorie, mais                                            être largement anglophones : la classification implique
dans « AutresFranco ». Le dilemme de l’analyse de                                                  de faire des choix dont la justification a tenté d’être
résultats agrégés a été résolu en procédant à chaque                                               restituée dans cette présentation de la méthodologie.
fois à des analyses par pays puis par variables agrégées,
ce qui permet de considérer tantôt le Canada comme                                                 Les variables retenues permettent donc de mettre en
anglophone, tantôt comme partiellement francophone.                                                œuvre une analyse géolinguistique et de restituer, grâce
Une difficulté ici est que dans certains pays qui ne                                               à une démarche comparative, les caractéristiques des
sont pas officiellement anglophones, l’anglais est                                                 flux francophones d’étudiant.e.s dans les Amériques.
plus ou moins largement utilisé à l’université, et plus                                            Pour les pays membres de l’AUF11, une analyse détaillée
particulièrement dans les programmes dirigés aux                                                   a été réalisée et peut être consultée dans le Répertoire
étudiant.e.s internationaux ; et que la population                                                 qui accompagne le rapport de recherche. Les résultats
possède un bon niveau d’anglais, par exemple les pays                                              présentés n’aspirent aucunement à une exactitude qui
scandinaves ou l’Allemagne par rapport à d’autres                                                  prétendrait décrire la totalité de la réalité, mais plus
pays comme l’Albanie ou la Lettonie. Pour ces pays                                                 simplement à identifier des tendances générales qui
qui peuvent donc être, dans l’optique des objectifs                                                découlent de l’étude des données disponibles et dont
poursuivis par cette enquête, considérés comme                                                     l’imperfection doit être prise en compte tout au long de
partiellement anglophones, une variable spécifique                                                 l’analyse. Ces tendances générales s’avèrent cependant
a été créée (par exemple, pour l’Europe partiellement                                              de grande utilité pour comprendre l’environnement
anglophone, « ErpAnglo »). Si ce choix est discutable, il                                          géolinguistique lié à la mobilité étudiante et au sein
a semblé plus pertinent que de mettre ces pays dans                                                duquel sont immergées les Universités.
la catégorie « Autre », ou de créer une catégorie pour
chaque langue. Le même raisonnement a été appliqué à                                               Pour les établissements d’enseignement supérieur
l’Asie pour l’Inde, le Japon ou Hong-Kong (« AsieAnglo »)                                          membres de l’AUF dans les Amériques, un
par rapport au Laos ou aux Philippines (« Autre »). De                                             recensement des partenariats internationaux et
plus, étant donné que l’analyse concerne des pays de                                               de leurs caractéristiques géolinguistiques12 a été
langue latine et qu’il existe des liens académiques et                                             réalisé à partir des informations publiées sur les
culturels forts entre les pays d’Amérique latine et leur                                           sites Internet des membres de la région en avril ou
ancienne métropole, une variable spécifique pour                                                   en mai 202113. L’objectif de ce travail était de pouvoir
l’Espagne, l’Italie et le Portugal a été créée (« EspItaPrt »).                                    caractériser le profil linguistique de la politique
Les pays américains de langue latine (« ALClatine ») ont                                           de coopération internationale des établissements
été distingués de la Caraïbe anglophone (« CarbAnglo »).                                           avant de se concentrer plus précisément sur les
L’Arabe et le Russe ont également été pris en                                                      opportunités de mobilité étudiante en français
compte étant donné que ces langues concernent de                                                   auxquelles peuvent accéder leurs étudiant.e.s. La
nombreux pays. Les variables retenues sont donc la                                                 classification géolinguistique utilisée dans ce cadre est
France (« fra » ou « FRA »10) ; les pays partiellement                                             la même que celle présentée ci-devant. Cependant,
francophones (« AutresFranco »), l’Afrique anglophone,                                             pour les pays partiellement francophones comme la
francophone et lusophone (« AfrAnglo », « AfrFranco » et                                           Belgique, le Canada et la Suisse, une différenciation

10 Afin d’éviter les confusions dans le nom des variables et la lecture des graphiques, les minuscules désignent les pays d’origine et les majuscules désignent les pays de destination. Dans le
   souci de ne pas surcharger les graphiques, les codes ISO 3 ont été utilisés.
11 Dans la mesure où les données de l’UNESCO concernent les pays, la Guyane n’a pas pu être prise en compte.
12 13 911 accords de coopération ont ainsi pu être dénombrés.
13 La source de ces informations correspond aux accords de coopération publiés sur les sites Internet des établissements membres de l’AUF dans la Région des Amériques.
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