Arte, la télé " dé-chaînée " qui gagne toujours plus de téléspectateurs - les echos le parisien medias
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Arte, la télé « dé-chaînée » qui gagne toujours plus de téléspectateurs C’est la chaîne qui gagne des téléspectateurs quand les autres en perdent, avec un ton toujours intelligent mais plus mordant qu’avant. Décoincée, ultra-connectée, Arte a été pionnière sur Internet et en récolte aujourd’hui les bénéfices. 26/04/2020 Emissions d’actu, films d’auteur, formats courts désopilants, documentaires, séries… Arte offre culture et réflexion avec une touche d’humour. Pierre-Emmanuel RASTOIN ; YUZU Productions ; Carole Bethuel ; Alleycats Tv ; artE ; Mike Kollšffel ; ARTE ; Jean-Philippe BALTEL ; Stéphanie Branchu Et si Arte devenait tendance, plus encore en ces temps confinés? Elle seule peut dégainer un concert de Christophe ou un film culte avec Simone Signoret, imposer un thriller social avec Éric Cantona, s'attarder sur « Un monde obèse » ou la « culture » du muscle. Capable aussi de donner la parole à des vieilles dames délurées à 20h40 tout en dissertant sur l'air du temps chaque soir, la chaîne franco-allemande n'en finit pas de muer et de marquer des points. Elle devient salle de cinéma, auditorium ou passeport découverte notamment sur son site Internet où les Français reclus se ruent : les vidéos vues ont fait un bond de 70 % depuis le confinement.
Fini donc le temps où la chaîne imaginée pour consolider le lien franco- allemand cultivait une image trop sérieuse, froide et élitiste. Arrivée en 2011, la présidente Véronique Cayla a cassé les murs, ouvert les portes à un large public, imposé des respirations « qui montrent que nous ne sommes pas déconnectés du monde contemporain », dit-elle. La recette de la patronne qui quittera ses fonctions en juillet ? Revisiter les fondamentaux — la culture et la réflexion — tout en apportant une touche d'humour au gré de formats courts désopilants (« La minute vieille », « Silex and the City »), de fictions détonantes (« Mytho », « Dérapages »), de magazines d'actualité (« 28 minutes »), d'un JT centré sur l'international et de documentaires. Tapis rouge pour le cinéma d'auteur Le public suit, deux fois plus accro. Alors que les autres chaînes égarent des téléspectateurs au profit des plates-formes, Arte est l'une des rares à voir son audience progresser. En 2019, elle atteignait 2,6 % de part d'audience contre 1,5 % en 2011. Ce mois d'avril, elle pointe à 2,8 % de PDA en moyenne et ses prime time ont gagné 350 000 téléspectateurs de plus par rapport à la même période l'an dernier. Elle s'est même offert un record historique jeudi avec sa série « Dérapages » (2,1 millions de curieux). Bobos, ses fidèles ? Non. Ils la regardent depuis la France entière et 42 % résident dans des villes de moins de 50 000 habitants et des communes rurales. CQFD : « Arte s'adresse à tous », se réjouit Véronique Cayla, passée par le Centre National de la Cinématographie et le Festival de Cannes et qui ne jure que par « la démocratisation culturelle », parade à l'exclusion. Véronique Cayla, présidente d’Arte.LP/Olivier Corsan Devenue maître dans l'art du pas de côté, la chaîne mise sur des documentaires moins axés sur les problématiques nationales que sur le reste du monde.
Côté séries, pas de productions américaines mais des pépites européennes ( « Peaky Blinders », « Il miracolo », « Borgen »). Et tapis rouge pour le cinéma d'auteur et patrimonial qui fait mouche : 2 millions de curieux devant « La chambre bleue » de Mathieu Amalric fin mars, 1,9 million pour « La veuve Couderc » ou « Barry Lyndon » ces dernières semaines. « Je passe mon temps à ne pas faire comme les autres chaînes avec le désir de montrer que culture et plaisir vont de pair », revendique Véronique Cayla. « La chaîne n'ayant pas de comptes à rendre au niveau des audiences, elle peut se permettre de prendre des risques et de proposer ce qu'on ne trouve pas ailleurs », complète Philippe Nouchi, expert médias chez Publicis Medias. « Arte entretient la différence : c'est devenu aussi une façon de se protéger des médias plus agressifs comme les chaînes info, les réseaux sociaux. On la regarde pour y trouver comme un refuge, décrypte pour sa part Isabelle Veyrat-Masson, directrice de recherche au CNRS, historienne et sociologue des médias. Des formats populaires de qualité Parallèlement, la chaîne s'est ouverte à des formats populaires comme les séries en gardant qualité et exigence. Elle a changé son image en multipliant les signaux pour montrer qu'on peut la regarder sans s'ennuyer ». À l'antenne, on parle donc de tout : « religieuses abusées », solitude des seniors (la fiction « Huguette »), culture pop, histoire, sexualité, fantastique. « C'est comme une boutique multimarques où vous savez que vous dénicherez un contenu qui vous retiendra, résume Marie Lhérault, enseignante et sociologue des médias. En outre, depuis la mort de l'esprit Canal +, il y avait un créneau à prendre : Arte a su s'y engouffrer en apportant un côté transgressif, du divertissement avec du sens pour créer une connivence avec le public, notamment celui qui suivait la chaîne cryptée et qui a mûri ». Pour élargir son auditoire, Arte a surtout pris le train du numérique avant les autres, première à investir les réseaux sociaux, à proposer dès 2017 le rattrapage de contenus déjà diffusés et désormais le « preview » pour découvrir des séries avant leur arrivée à l'antenne. 60 % de ses programmes sont disponibles en replay plus de 7 jours, voire jusqu'à 2 mois! « On peut regarder un programme d'Arte quand on veut, ou l'on veut, comme on veut. On a offert la liberté aux téléspectateurs, se réjouit la présidente en évoquant une « télé dé-chaînée qui n'est plus accrochée à un menu obligatoire ». À terme, « l'antenne sera notre vitrine pour faire des recommandations », prédit-elle. En attendant, l'âge moyen des fidèles est passé à 54 ans en incluant antenne (64 ans) et usages numériques. Prochain pari ? Asseoir la vocation européenne de la chaîne déjà accessible en six langues sur la toile.
Et bientôt un feuilleton ! Ce sera l’événement début 2021 : Arte lancera « En thérapie », un feuilleton en 35 épisodes de 26 minutes coréalisé par les cinéastes Éric Toledano et Olivier Nakache. Adapté de la série israélienne « Betipul », il pénétrera, après les attentats du 13 novembre 2015, dans le cabinet d’un thérapeute (Frédéric Pierrot) en séance avec ses patients (Mélanie Thierry, Reda Kateb,…) et sa propre analyste (Carole Bouquet). Parmi les autres fictions, la chaîne mise d’ici là sur le polar danois « Kidnapping » où Charlotte Rampling enquêtera en juin sur la disparition d’un enfant. Dès le 2 juillet et tout l’été, place à la rediffusion des 3 saisons de la série danoise « The killing ». À la rentrée, « No man’s land », entre thriller d’espionnage et drame familial avec Félix Moati et Mélanie Thierry, pourrait surprendre. Côté documentaires, les sujets de société seront à l’honneur avec « Auguste Escoffier ou la naissance de la Gastronomie Moderne », « On achève bien les gros » en juin ou les « Violences sexuelles dans le sport ». Carine Didier
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