Book Reviews / Recensions
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Book Reviews / Recensions Museum Education, History, Theory and Practice par N. Berry et S. Mayer Reston, VA: National Art Education Association, 1989. 257 pages. RECENSION PAR NADIA BANNA, UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL L’anthologie de Berry et Mayer offre dix textes de réflexion destinés à ceux qui s’intéressent à l’éducation muséale. L’histoire et la théorie sont la case de départ à partir de laquelle on explore la pratique. Les objectifs donnent le ton dès l’introduction: nous devons continuer à croître et pour cela, nous avons besoin de connaître les racines historiques et théoriques de l’éducation muséale. Cet impératif transparaît dans la succession des textes et dans la suggestion de les lire dans leur ordre d’apparition dans l’ouvrage. Publiés pour la première fois, les dix essais abordent l’éducation dans les musées d’art. Chaque spécialiste communique ses connaissances et ses expériences par le biais d’une analyse systématique d’un aspect de l’éducation muséale. T. Zeller explore les bases historiques et philosophiques de la mission éducative des musées d’art américains. La documentation chronologique met en lumière les racines sociales, économiques et politiques de cette mission. Celle-ci ne se limite pas aux activités proposées par les éducateurs. Elle souscrit aux idées et aux valeurs qui régissent la culture de la classe domi- nante. L’étude exhaustive des principes de l’éducation dans les musées américains révèle que diverses considérations informelles ont façonné la philosophie et la pratique de l’éducation. Cette philosophie existe et peut être identifiée, bien que les écrits pertinents n’aient pas été rédigés par des éducateurs de musée. E. Bourdon Caston, pour sa part, expose un modèle, une approche multidisciplinaire et humaniste facilitant l’exploration, la compréhension de l’expérience humaine. En équilibrant les deux domaines de la muséologie et de l’éducation de façon adéquate, l’identité et l’intégrité des deux compo- santes est assurée. Cette approche met en lumière la nécessité d’appuyer les programmes muséaux aussi bien sur une philosophie du musée que sur des méthodes éducatives. Ce qui importe, c’est d’identifier un cadre philoso- phique et de développer son programme en rapport avec ce cadre. Le texte de M. Cheff vise justement à supporter la planification et l’implantation des programmes, à encourager les éducateurs à analyser, comprendre et influencer leur environnement. Pour un maximum d’effica- cité, cette planification et cette implantation doivent découler d’une stratégie. Les étapes de l’élaboration d’une telle stratégie sont l’identification des 392 REVUE CANADIENNE DE L’ÉDUCATION 16:3 (1991)
BOOK REVIEWS / RECENSIONS 393 principes de base de gestion, l’analyse minutieuse de l’environnement muséal, l’identification d’une stratégie, sa formulation, sa réalisation. Ce modèle se veut un outil pragmatique, flexible, adaptable selon les situations. Après avoir résumé l’évolution de la formation du rôle des éducateurs de musée, A. El Omami constate que ceux-ci ont oeuvré dans des contextes qui ne favorisent pas l’acquisition d’une grande crédibilité aux yeux de la gent muséale. En conséquence, elle propose un programme de formation interdis- ciplinaire joignant l’histoire de l’art à une spécialisation en éducation. Un recyclage sous forme de séminaires complèterait au besoin cette formation. Quant à S. Mc Coy, qui traite elle aussi de formation continue et spéciali- sée, elle aborde celle des guides bénévoles. Après un bref historique, elle évalue le recrutement, la sélection, la formation, l’encadrement et l’efficacité des guides. Elle élabore une série de propositions dont le but est de renou- veler la formation des guides, de donner à ceux-ci un entraînement plus personnalisé qui permette d’offrir un support professionnel de qualité. Le défi lancé par S. Sternberg est d’équilibrer les programmes éducatifs de façon à “motiver le visiteur par une expérience englobant la pensée et l’émotion.” Sternberg suggère de diversifier les techniques pour répondre aux styles individuels d’apprentissage et pour faire découvrir de nouveaux domaines. L’expérience muséale pourrait ainsi constituer une formation permanente, à la condition de substituer à l’approche didactique habituelle une approche perceptuelle interactive. R.W. Ott traite de la critique d’art dans les musées, en expose les théories et l’évolution. À la lumière de cet exposé, il propose une méthode qui devrait aider à comprendre les oeuvres par un contact direct avec celles-ci. Le rôle de l’éducateur serait, dans ce cas, un rôle de catalyseur. K. Walsh-Piper préconise le partenariat entre le musée et l’école. Pour assurer ce partenariat, elle suggère au musée de faire la formation des enseignants. Pour stimuler une meilleure utilisation des ressources du musée, elle recommande des pratiques qui favorisent l’échange, la coordination et l’efficacité. W. Howze élabore une description des technologies utilisées dans les musées d’art. Il passe en revue les caractéristiques de chacune dans le but d’exposer les options qui présentent un défi mais qui sont un puissant outil si elles sont adéquatement utilisées. Enfin, R. Korn considère que l’évaluation est essentielle à l’amélioration des activités du musée. Elle décrit des types et des méthodes d’évaluation. Elle expose des approches théoriques et méthodologiques empruntées à d’autres domaines, les décrit dans leur contexte original et, au besoin, les adapte au milieu muséal. Le contenu de ce livre tente d’établir l’éducation muséale sur des bases solides, claires et nettes. Le cheminement du théorique au pratique, qui commence par la philosophie, se poursuit avec la gestion, la conception de ce programme, la formation, la méthodologie et l’évaluation, est subtil et stimulant. L’impression de décousu que l’on éprouve diminue au fur et à
394 BOOK REVIEWS / RECENSIONS mesure de la lecture car un fil conducteur se dessine peu à peu. On ressent la volonté d’établir des structures pour mettre en valeur la consistance et la continuité des efforts. Il est vrai que les sujets traités sont propres aux musées d’art et aux jeunes. Néanmoins, il est possible de transférer certaines observations et de les adapter à des contextes différents. Les tendances qui ressortent de tous les essais convergent en effet vers la flexibilité et l’interdisciplinarité. L’anthologie que nous venons de présenter illustre l’essor de la profession d’éducateur de musée. Un de ses buts était d’affirmer en quoi nous croyons et pourquoi. Cette profession de foi devrait en somme être reprise par toute la gent muséale, car on voudrait que la mission éducative du musée touche tous les professionnels oeuvrant dans cette institution. Cet ouvrage n’a pu traiter tous les problèmes posés par l’éducation muséale. Il reste à souhaiter que ceux-ci soient abordés dans de nouvelles recherches tout aussi enrichis- santes que celles qui ont servi de base aux dix textes analysés. Rethinking the Museum par Stephen E. Weil Washington et London: Smithsonian Institution Press, 1990. 173 pages RECENSION PAR MARIE-ANDRÉE BRIÈRE, MUSÉE D’ART DE JOLIETTE L’ouvrage de Weil s’inscrit sous l’angle de la remise en question de l’insti- tution muséale. Présentant le musée comme une création humaine malléable, transformable, l’auteur considère que les ressources potentielles que cette institution représente sont mal utilisées. Il place le musée sur un continuum en constante évolution où le tout représente bien plus que la somme des parties. La multiplication des musées, leur croissance phénoménale nous amènent à une homogénéité dans la perception que nous avons d’eux. Grands ou petits, nous aurons, face à ces musées, les mêmes exigences, que nous parlions de recherche, de collection ou d’exposition. Ils répondent pourtant à des réalités bien différentes et mettent parfois de l’avant un dynamisme exclusif à leur taille. Pourquoi tendre vers une normalisation, alors que la diversité des sociétés et de leurs besoins sont des sources importantes de richesse culturelle? Les grandes institutions et les petites sont complémentaires les unes des autres et elles sont mutuellement essentielles au développement culturel de nos sociétés. Weil questionne cette croissance effarante du nombre de musées et les problèmes qu’elle entraîne. Le directeur de musée doit-il être davantage un gestionnaire qu’un historien d’art? Le musée est une entreprise certes, mais il est également le dépositaire d’un savoir culturel très vaste. L’équilibre serait entre les deux
BOOK REVIEWS / RECENSIONS 395 termes selon Weil: ni un gestionnaire, ni un historien mais un être sensibi- lisé à l’un et l’autre de ces champs de spécialisation qui sont essentiels à la croissance des institutions muséales. Weil explique les raisons de la croissance effarante des musées. Notre rythme de consommation et de production de biens fait en sorte que nous convertissons de plus en plus de biens en objets de collection. Les réserves des institutions sont vite insuffisantes et la construction d’autres musées s’impose. Weil pose la question de la fin de cette logique. Où nous arrête- rons-nous? Avec la dégradation de l’environnement, il devient urgent de préserver, de sauver du péril les biens témoins de nos sociétés, de nos cultures. Certes il y a urgence, mais les musées ont-ils été créés à cette fin? Sont-ils des bouées de sauvetage face à notre démesure? Tous les objets collectionnés sont-ils véritablement d’intérêt muséal? Comment, dès lors, disposer de ces objets désuets ou de moindre importance? Comment aliéner sans créer un préjudice à notre patrimoine collectif? La prudence est de rigueur non seulement dans le champ de l’aliénation des objets, mais dans celui de l’acquisition de ces derniers. La mise en place de politiques et de procédures claires devrait être garante de décisions adéquates, prises après consultation. Le collectionnement d’objets, qui s’étend sur des millénaires, pose la question du rôle social du musée. Gérer par des professionnels qui protègent ces biens précieux, l’accès aux collections se fait parfois très difficilement. Le musée est-il un univers concentrationnaire de spécialistes, de profession- nels, qui évacue sa mission sociale comme dépositaire du patrimoine de l’humanité? Certes, le musée a besoin des professionnels et ces derniers ont un rôle de première importance à jouer dans le maintien des collections, mais ce rôle n’exclue en rien le fait que le musée a également pour fonction de diffuser, de communiquer aux autres, aux non spécialistes, le fruit de ses recherches. Il se doit de rendre accessible à tous les objets qui de fait appartiennent à tous. À parler d’objets, nous en venons presque à oublier que ces derniers véhiculent aussi des idées. Toute présentation, toute mise en exposition d’objets reflète un discours, une idéologie. Le musée apparaît ainsi comme un instrument dialectique très important où l’objet devient sujet du discours et vice versa. De par sa mise en exposition d’objets, il devient un lieu éminemment discursif. Il mettra en scène tour à tour l’objet et le sujet. Le musée se fait médium, porteur de message. Mais de quel message? La responsabilité du communicateur est ici soulevée. Le musée lieu de com- munication ne doit pas être le seul à parler, il se doit de permettre au visiteur de faire son propre discours, de porter sa parole. Mais l’auteur souligne qu’à l’intérieur de l’institution muséale, c’est à travers un processus de collaboration et d’échanges entre les différents spécialistes et partenaires que l’émergence d’une véritable communication sera possible. Le musée que Stephen Weil observe et critique, c’est celui de notre quotidien aux prises avec les problèmes de la croissance de ses collections,
396 BOOK REVIEWS / RECENSIONS les problèmes éthiques reliés au champ de l’acquisition et de l’aliénation des objets, les problèmes du marché de l’art également. L’intervention des gouvernements via la fiscalité dans le champ de l’art crée un accroissement des dons d’oeuvres d’art de la part des collectionneurs privés, soucieux d’obtenir une déduction pour fins d’impôt. La gestion des acquisitions se fait ainsi plus délicate et combien plus difficile. En contrepartie, les collections des petits musées sans budget d’acquisition en tirent de grands avantages. Il n’y a pas, comme le souligne Weil, de situation idéale et la solution aux problèmes des musées se fait plurielle. Saurons-nous gérer convenablement la croissance des musées et de leurs collections? Saurons-nous utiliser le potentiel inépuisable de ces collections pour permettre à chacun de se réapproprier sa propre histoire, celle de l’humanité? La question est posée à chacun d’entre nous et les éducateurs ont un rôle important à jouer dans l’élaboration d’une réponse.
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