Cancer et nutrition chez la personne âgée - Pr Xavier Hébuterne Gastro-entérologie et Nutrition CHU de Nice
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Cancer et nutrition chez la personne âgée Pr Xavier Hébuterne Gastro-entérologie et Nutrition CHU de Nice
Prévalence de la dénutrition en fonction de la localisation tumorale n 2005 = 1903 patients n 2012 = 2155 patients Pancréas 67% % de malades dénutris Oeso/estomac 60% Rein/vessie 52% ORL 49% Gynéco 45% Poumons 45% Côlon/rectum 39% Hémato 34% Autres 30% Sein 21% Prostate 14% Nombre de patients Prévalence de la dénutrition : 39% Prévalence de la dénutrition : 39% Une photographie de la dénutrition en oncologie un jour donné en 2005 et 2012 2 Hébuterne et al. JPEN J Parenter Enteral Nutr. 2014 Gian et al. JPEN J Parenter Enteral Nutr. 2017
Prévalence de la dénutrition en fonction de l’âge : étude Nutricancer 2 (2.076 patients) 60 P 80 ans Prévalence de la dénutrition en fonction d e l’âge chez les malades atteints de cancer Laucau St Guily et al. J Geriatr Oncol 2017
Causes de la dénutrition au cours du cancer La perte d’appétit (anorexie) Les troubles métaboliques liés à la tumeur Les conséquences des traitements
Alimentation au cours du cancer Pr ise a lim e n t a ir e ( n = 1 0 4 9 ) Impression de manger plus qu'avant Plus qu’avant 8% Impression Autant de manger qu’avant Impression de autant qu'avant manger moins 37% qu'avant 55% Hébuterne et al. JPEN J Parenter Enteral Nutr. 2014
EVA de la prise alimentaire 35 Pourcent age des malades 2 9 ,5 30 2 7 ,3 2 7 ,5 25 20 1 5 ,7 15 10 5 0 0 à3 3 à6 6 à9 10 Hébuterne et al. JPEN J Parenter Enteral Nutr. 2014
Causes de la baisse des ingesta alléguées par des malades atteints de cancer de plus ou moins de 70 ans Laucau St Guily et al. J Geriatr Oncol 2017
Physiopathologie des troubles du contrôle de l’appétit chez le malade atteint de cancer Stimule la Noyau arqué prise Hypothalamus alimentaire Signaux périphériques postéro-ventral Insuline Faim Ghréline Leptine NPY/AgRP CCK - Hypothalamus Orexine A latéral et Orexine B PYY POMC/CART TRH Malonyl-CoA + ventro-médian intracellulaire + Satiété Inhibe la prise alimentaire IL1 + Sérotonine IL6 NPY : neuropeptide Y TNF- AGRP : Agouti-related peptide POMC : pro-opiomelanocortin CART : cocaine and amphetamin regulated transcript TRH : thyrotropin-releasing hormone
Modification pondérale et apports énergétiques après restriction alimentaire chez des sujets jeunes et des sujets âgés Roberts et al. JAMA 1994
Prise d'un "repas cafétéria" après différents apports énergétiques en aveugle 60-84 ans 18-35 ans Rolls et al. Am J Clin Nutr 1995
Evolution des taux de Ghréline totale plasmatique chez des sujets jeunes et âgés dénutris ou non 5000 P < 0,01 vs. * jeunes, † normonutris 4500 Collation 4000 3500 3000 † n g/ L 2500 2000 1500 * 1000 500 0 7h 7h30 8h 8h30 9h 9h30 10h 10h30 11h 11h30 12h 11 Jeunes normonutris Jeunes dénutris Âgés normonutris Âgés dénutris Schneider et al Clin Nutr 2008
Influence de la dénutrition sur le pronostic en cancérologie Augmentation du risque d’infection nosocomiale Augmentation du risque de complications mineures et majeures post-opératoires Augmentation des complications de la chimiothérapie et de la radiothérapie Diminution de la réponse à la chimiothérapie Diminution de la résécabilité des cancers digestifs Augmentation de la mortalité après chimiothérapie ou greffe de cellules souches Diminution de la qualité de vie après chirurgie, radiothérapie ou chimiothérapie Augmentation du coût des soins
La dénutrition est un facteur de risque indépendant d’infection nosocomiale chez un malade hospitalisé une infection nosocomiale (%) Evaluation de la dénutrition par le NRI Pourcentage de malades avec P=0,009 Dénutrition sévère : OR : 4,98 (4,6-6,4) Schneider et Hébuterne Br J Nutr 2004
Un IMC bas est associé à une réduction de la survie globale et de la survie sans progression au cours du cancer colo-rectal métastatique Analyse groupée de 23 études de 1ère ligne de la base de données de l’ARCAD (Aide et Recherche en Cancérologie Digestive) : 20 078 patients (1997-2009). IMC = 28 IMC = 28 Renfro et al., J Clin Oncol 2016
Dénutrition et survie chez des enfants atteints de leucémie aiguë lymphoblastique 43 enfants (≤ 15 ans) porteurs d’une LAL Même protocole de chimiothérapie Etude pronostique d’une dénutrition sévère Pas de prise en charge nutritionnelle Lobato-Mendizabal et al. Leuk Res 1989
Explication ? Lobato-Mendizabal et al. Leuk Res, 1989
La dénutrition est associée à une mortalité précoce chez la personne âgée en première ligne de chimiothérapie 348 malades d’âge moyen 77,5 ans Première ligne de chimiothérapie Lymphome, cancers du poumon, de l’ovaire, de la vessie, du pancréas ou de la prostate Evaluation gériatrique standardisée Mortalité précoce (< 6 mois) Soubeyran et al. J Clin Oncol 2012
Cancer Sujet âgé Troubles du Anorexie contrôle de l’appétit Diminution des ingesta Troubles du Troubles du métabolisme métabolisme Dénutrition/ cachexie Perte de chance
Composition corporelle de malades porteurs d’un cancer bronchique 3% des hommes et 12% des femmes avaient un IMC< 18,5 25% avaient une perte de poids > 10 % au cours des 6 derniers mois 46,8% étaient sarcopéniques Baracos et al. Am J Clin Nutr 2010
Survie de malades obèses porteurs d’un cancer digestif ou pulmonaire en cours de chimiothérapie en fonction de leur masse musculaire HR 4·2 [2·4–7·2], p
Composition corporelle chez des sujets dénutris jeunes et âgés 60 60 MCA VEC MG MCA VEC MG 50 50 Poids corporel (kg) 40 40 30 30 20 20 46,8 ± 45,9 ± 41,1 ± 6,4 % 42,5 ± 5,5 % 6,4 % 10 6,5% 10 31,4 ± 23,9 ± 5,8 % 9,2 % 0 0 18, 5- 20 16- 18, 5
La prise en charge : Recommandations nutrition et cancer de la SFNEP http://www6.inra.fr
Objectifs de la nutrition thérapeutique en cancérologie Le but de la nutrition thérapeutique est de maintenir l’état nutritionnel, à but préventif et curatif de la dénutrition, pour éviter l’apparition de complications en rapport avec l’état carentiel et diminuer les comorbidités des traitements oncologiques. En situation curative, la nutrition thérapeutique a pour but de favoriser la faisabilité complète des protocoles thérapeutiques, donc de réduire ainsi l’incidence des complications des traitements tout en limitant les complications propres du support nutritionnel. En situation palliative, la nutrition thérapeutique a pour objectif principal le maintien ou l’amélioration de la qualité de vie. 23
Apports protéino-énergétiques chez le malade atteint de cancer : les recommandations ► Pour le patient atteint de cancer, les besoins protéino- énergétiques totaux (indépendamment de la voie d’administration, orale, entérale ou parentérale) sont d’environ 30 kcal/kg/j en péri-opératoire et de 30 à 35 kcal/kg/j en oncologie médicale. ► Les besoins en protéines sont de 1,5 g de protéines/kg/j en péri-opératoire et de 1,2 à 1,5 g de protéines/kg/j en oncologie médicale (1 g d’azote = 6,25 g de protéine). ► Il est recommandé, en cancérologie d’atteindre au minimum ces besoins (grade C). 24
PPS 9 : recommandations pour la personne âgée atteinte de cancer Senesse P, Hébuterne X et le groupe de travail Nutr Clin Mebab 2012;26:159–64
Quelle prise en charge nutritionnelle chez la personne âgée atteinte de cancer en France en 2014 ? Laucau St Guily et al. J Geriatr Oncol 2017
Le G8 : un bon outils de dépistage de la dénutrition chez la personne âgée atteinte de cancer Soubeyran et al. PloS ONE 2014
Ce qu’il faudrait faire chez tous les malades Envisager le problème nutritionnel dès l’annonce du diagnostic : Expliquer l’importance de ce problème aux malades Leur demander de se peser une fois par semaine Faire un diagnostic nutritionnel de départ - Poids, taille, IMC, perte de poids, ingesta (EVA) - NRI, SGA, … Donner des conseils de base (exemple : comment manger pendant la chimiothérapie) Définir un objectif nutritionnel (30 à 35 kcal/j, 1,2 à 1,5 g/kg/j de protéines) + maintien du poids Réévaluer l’état nutritionnel et les ingesta à chaque visite Envisager une prise en charge nutritionnelle adaptée à chaque situation nutrition@chu-nice.fr
Stratégie de prise en charge nutritionnelle chez une personne âgée Statut nutritionnel Normal Dénutrition Dénutrition sévère Apports alimentaires spontanés Normaux surveillance Conseils diététiques Conseils diététiques Alimentation enrichie Alimentation enrichie Réévaluation à 1 mois + CNO Réévaluation à 15 j ⇓ Conseils diététiques Conseils diététiques Conseils diététiques Alimentation enrichie Alimentation enrichie Alimentation enrichie > ½ apports Réévaluation à 1 mois + CNO + CNO habituels Réévaluation à 15 j Réévaluation à 1 sem Si échec CNO Si échec NE ⇓ ⇓⇓ Conseils diététiques Alimentation enrichie Conseils diététiques Alimentation enrichie + CNO Alimentation enrichie < ½ apports + CNO et NE d’emblée Réévaluation à 1 sem habituels Réévaluation à 1 sem Si échec NE Réévaluation à 1 sem Si échec CNO Raynaud-Simon A, Revel-Delhom C, Hébuterne X, Clin Nutr 2011
Quand et comment prendre en charge une personne âgée atteinte de cancer ? Quand ? Dés le début de la prise en charge, le plus tôt possible En pré- et post-opératoire Pendant les traitements médicaux A domicile Comment Par voie orale (conseils diététiques, CNO), Par voie entérale si la voie orale est insuffisante ou en cas de dénutrition sévère Par voie parentérale uniquement si le tube digestif ne fonctionne pas
La renutrition est moins efficace chez une personne âgée qu’un sujet plus jeune Effets de 27 jours de renutrition par voie entérale sur les paramètres nutritionnels chez des sujets jeunes et âgés (apports énergétiques et protéiques identiques) kg 7.0 g/L 1.0 NS 6.0 P
En radiothérapie et radio chimiothérapie à visées curatives ► Ravasco et al. ont mené deux études évaluant l'efficacité des conseils diététiques (six consultations en un mois et demi) comparés à des CNO donnés seuls et à un groupe contrôle (patients en cours de RT pour cancer des VADS et CCR) – Augmentation et maintien des apports énergétiques et protéiques jusqu'à trois mois après l'arrêt du traitement avec les conseils diététiques Diminution des complications de la radiothérapie 32 Ravasco et al. J Clin Oncol 2005 ; Ravasco et al. Head Neck 2005
Suivi à long terme des malades de l’étude de Ravasco et al. : effets secondaires de la radiothérapie et survie Effets secondaires de la radiothérapie Survie Groupe 1 : prise en charge diététique, Groupe 2 : CNO seuls, Groupe 3 : pas de prise en charge. Ravasco et al. Am J Clin Nutr 2012
Effets de la prise en charge diététique chez le sujet âgé atteint de cancer en cours de chimiothérapie 341 sujets âgés de plus de 70 ans traités par chimiothérapie pour divers cancers, pour bénéficier ou non d’une prise en charge diététique (six consultations pendant la période de chimiothérapie). Bourdel-Marchasson et al. PLoS ONE 2014
Effets de la prise en charge diététique sur la mortalité : objectif principal Bourdel-Marchasson et al. PLoS ONE 2014
Chimiodiet (PHRC national) Objectif principal: évaluer l'impact d'une prise en charge nutritionnelle précoce et active sur la survenue d’effets secondaires grade 3 et plus chez des patients non dénutris traités par chimiothérapie pour un adénocarcinome colo-rectal métastatique Patients: 179 patients traités en 1ère ligne de chimiothérapie et thérapie ciblée pour adénocarcinome colorectal, métastasique non résécable
Effets de la prise en charge diététique précoce sur les ingesta et la variation pondérale au cours de la chimiothérapie Energie (kcal/j) Protéines (g/j) Poids (kg)
Toxicité de la chimiothérapie grade 3 et plus chez les malades porteurs d’un cancer colorectal métastatique Besnard, Schneider, Hébuterne et al. En préparation
Messages clés 85% des malades qui ont un cancer en cours de traitement ont perdu du poids Plus le patient est âgé, plus il est à risque nutritionnel. L’anorexie est une cause majeure de la dénutrition au cours du cancer surtout chez la personne âgée Une perte de masse musculaire est également associée à une altération du pronostic en cancérologie Une évaluation systématique de l’état nutritionnel et des ingesta est recommandé chez tous les malades Le conseil diététique précoce a fait la preuve de son efficacité en radio et chimiothérapie des cancers digestifs Le choix de la voie d’administration du support nutritionnel dépend de l’état nutritionnel du patient et de l’état du tube digestif
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