Clin d'oeil Avec concours lecteurs - SBV-FSA

 
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Clin d'oeil Avec concours lecteurs - SBV-FSA
Clin d’œil
                Journal des membres de l’organisation nationale
                d’entraide des personnes en situation de handicap visuel

                Mars 2020 • No 1

   Avec
concours
 lecteurs

            Point fort:
            habiter au
            quotidien
Clin d'oeil Avec concours lecteurs - SBV-FSA
Table des matières

Éditorial3                                    Maîtriser la domotique                15
                                               Un quotidien autonome, ça se prépare 18
Forum4                                        Évaluation de la contribution
ICC 2020 à Aveiro                 4           d’assistance AI – Autonomie renforcée 19
Participez au «Prix de la Canne
blanche 2020»                     4           La vie de la fédération                    21
Plus qu’une simple carte d’assuré 5           Point de vue: Anne Perrier                 21
Donnez votre mail à la Défense des             Retrouver le goût de l’invitation          22
intérêts5                                     Manifestations et agenda culturel          24
Les gens                                  6
Silvan Spycher: Croire en soi             6   FSA interne                                28
                                               Vers une direction stratégique de
Point fort                         10         la fédération                              28
Importance de l’optimisation de la             Est-ce la fin de l’entraide?               29
lumière10                                     Assemblée des délégués 2020                30
Une brûlante envie d’un «chez-soi» 13         Concours lecteurs                          31

Impressum
Journal des membres de la Fédération suisse des aveugles et malvoyants. Paraît 4 fois
par année en grands caractères, en braille, sur CD en format DAISY, sur www.sbv-fsa.ch,
sur VoiceNet rubrique 2 5 1, sur le kiosque électronique et par e-mail, en français et en
allemand («der Weg»). Membres FSA: inclus dans le statut de membre, non-membres
(Suisse): CHF 28.–, (étranger) CHF 34.–

Éditeur:               Fédération suisse des aveugles et malvoyants FSA,
                       Könizstrasse 23, CP, 3001 Berne, www.sbv-fsa.ch
Rédaction:             FSA, 3001 Berne, 031 390 88 00, redaction@sbv-fsa.ch,
                       Hervé Richoz (hr), Roland Erne (rer)
Traduction:            Apostroph Bern AG, Jolanda Schoenenberger
Photo page titre:       algré la cécité dans son enfance, Silvan Spycher vit depuis des
                       M
                       années de façon autonome dans son propre appartement et a
                       longtemps été habitué à prendre soin de lui. Photo: Patrick Lüthy
ISSN:                  2296-1925 (écriture noire), 2296-1933 (braille), 2296-1941 (CD)
Layout et impression: Ediprim SA, Bienne
Version braille:       Bibliothèque Braille Romande
Version audio:         Bibliothèque Sonore Romande
Délai de rédaction pour la prochaine édition de «Clin d’œil»: 1er mai 2020

                                            Imprimé sur papier FSC
2                                           respectueux de l’environnement
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Éditorial

Chères lectrices, Cher lecteurs,
Qui ne rêve pas de son propre «chez-
soi» où il fait bon se ressourcer, d’un
cocon sécurisant où il fait bon se
retirer, d’un domicile fixe d’où partir à
la conquête de nouvelles autonomies,
d’un logement ouvert à la fête ou à la
rencontre? Passé la porte cochère, le
thème de ce numéro de «Clin d’œil»
revêt également une notion plus in-                                  Hervé Richoz.
time, plus secrète, celle d’habiter son                              Photo: Isabelle
«soi», son handicap, son espace inté-                                Favre
rieur, ses peurs, ses envies, ses es-
poirs. L’espoir, c’est un moteur qui fait   2012) permettant l’engagement d’assis-
avancer Silvan Spycher dans son             tants personnels. Découvrez que le
incroyable parcours de vie. Pour la         quota des bénéficiaires n’est de loin
personne à domicile ou en institution,      pas atteint et que vous aussi pourriez
l’existence ou la survenue d’un handi-      rendre plus simples tous vos actes de
cap visuel modifie en profondeur son        la vie journalière. Ainsi, par-delà le
habitat, son entourage et ses modes         développement de compétences tech-
opératoires. Shanti en sait quelque         niques, la participation à un cours de
chose, elle qui a fait appel à la justice   cuisine de la FSA redonne à certains
de paix pour se départir d’une institu-     confiance et dignité, comme le rappelle
tion au profit d’un «chez-soi» en           Fani, membre de la FSA, qui ose à
couple. S’il y a bien un facteur que l’on   nouveau inviter du monde «chez elle».
sous-estime largement dans la qualité       Notre fédération a aussi pour rôle de
de vue et de vie, c’est bien la lumière,    concrétiser les missions qui l’habite.
tout comme la domotique qui est             C’est ce dont nous parle notre secré-
en train de révolutionner notre lien à      taire général en évoquant douze
l’habitat, à l’ambiance et à la décora-     champs d’action stratégiques pour
tion. Un projet de vie est une sacrée       la période 2020-2023. Enfin la parti­
entreprise et tout entrepreneur sait que    cipation au concours lecteurs pourrait
«seul on ne va jamais très loin». Heu-      bien changer quelque chose dans
reusement, il existe des soutiens dans      votre vie.
chaque canton avec les ergothéra-           Je vous souhaite une agréable lecture.
peutes des services spécialisés ou
avec la mise en place d’une «contribu-      Hervé Richoz,
tion d’assistance» de l’AI (introduite en   rédacteur «Clin d’œil»

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Forum

ICC 2020 à Aveiro
Les jeunes atteints d’un handicap vi-       cations pour smartphones et tablettes
suel et âgés de 16 à 21 ans ont à nou-      (www.icc-camp.info). Par ailleurs, les
veau l’occasion de se familiariser avec     interactions sociales et les diverses
les dernières technologies de l’informa-    activités de loisirs ne manqueront pas
tion et des moyens auxiliaires au Inter-    non plus. Il est indispensable de bien
national Camp on Communication and          maîtriser l’anglais pour s’inscrire (coût:
Computers (ICC). La ville universitaire     max. EUR 500.–). En tant que parte-
d’Aveiro (Portugal), au sud de Porto,       naire de l’ICC, la FSA prend en charge
est l’hôte de cette 26e édition (du 21 au   les frais de voyage des membres et
30 juillet 2020). Comme l’explique          met gratuitement un accompagnement
Christoph Käser, responsable tech-          à leur disposition. Pour de plus amples
nique et secrétaire du comité ICC, cet      informations et pour s’inscrire (jusqu’au
événement à succès promouvant l’in-         15 avril 2020): Rahel Escher, assistante
clusion depuis 1993 comporte une            du secrétaire général, 031 390 88 00
vingtaine d’ateliers ainsi que des appli-   ou rahel.escher@sbv-fsa.ch.            rer

Participez au «Prix de la Canne blanche 2020»
Le Prix de la Canne blanche, décerné        secteurs techniques ou électroniques
par l’association faîtière UCBA, ré-        ainsi que la recherche et les publi­
compense des projets innovants en           cations dans les domaines des
faveur des personnes aveugles ou            sciences médicales, sociales ou hu-
malvoyantes. Les organisations, les         maines (règlement: www.ucba.ch/
institutions et les particuliers peuvent    canne-blanche). Pour la première fois,
proposer des initiatives jusqu’au 23        le public désignera en septembre
mars 2020. Cette distinction honore         2020 le projet gagnant parmi trois
des projets issus de différents do-         nommés préalablement sélectionnés
maines tels que la construction adap-       par un jury professionnel.
tée aux personnes handicapées, la           Le Prix de la Canne blanche, remis
communication, l’information, la poli-      cette année pour la huitième fois,
tique sociale, la culture ou l’engage-      reconnaît les efforts d’entreprises,
ment idéologique exceptionnel de            d’institutions, d’organismes publics
personnes, d’entreprises et d’organi-       et d’individus qui s’engagent de ma-
sations en faveur des personnes             nière remarquable en faveur de l’inté-
concernées, ou encore le développe-         gration de personnes aveugles ou
ment de moyens auxiliaires dans les         malvoyantes.                        rer

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Forum

Plus qu’une simple carte d’assuré
Olivier Maridor, collaborateur Défense des intérêts

À l’instar de la plupart des sociétés
d’assurance, l’AVS/AI délivre aussi
une carte d’assuré. Depuis 1996, les
offices AI confirment également la
perception d’une rente AI au moyen
d’une carte AI, dont la remise à l’assu-
ré est obligatoire et s’effectue d’office,
simultanément à la décision de rente.
Depuis mai 2015, les offices AI confir-
ment en outre la perception d’une
allocation pour impotent pour les mi-
neurs et adultes à la demande de
l’assuré ou de ses représentants lé-         mensions qu’une carte de crédit et est
gaux. Pour des raisons d’économies,          acceptée par de nombreux lieux de
ce certificat d’allocation pour impotent     loisirs, culturels ou sportifs, et donne
n’est pas envoyé automatiquement,            droit à des réductions ou des presta-
mais doit être demandé à l’office AI         tions complémentaires. Dans les trans-
cantonal responsable en tant qu’attes-       ports publics, la carte permet d’acqué-
tation officielle de handicap en vertu       rir un AG Voyageurs souffrant d’un
de la Loi fédérale sur l’assurance-          handicap au tarif réduit de CHF 2480.–
invalidité (LAI).                            (versement annuel) au lieu de
Nous recommandons aux assurés qui            CHF 3860.–. Y ont droit les personnes
ne disposent que d’une allocation pour       percevant une rente AI, une allocation
impotent de demander ce justificatif         pour impotent (API) ou des subven-
officiel. La carte AI a les mêmes di-        tions pour un chien-guide.

 Donnez votre mail à la Défense des intérêts
 Chaque fin de mois depuis novembre 2017, 1600 membres de la FSA re-
 çoivent un sticker d’information de la Défense des intérêts (DI) qui rend
 compte par e-mail des résultats de son activité sur le terrain et des nouvelles
 de politique et de société. Les membres qui n’ont pas encore enregistré leur
 adresse e-mail auprès de la FSA sont invités à le faire, en envoyant un mes-
 sage à l’adresse: interessenvertretung@sbv-fsa.ch.

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Les gens

Silvan Spycher
Croire en soi
Roland Erne, rédacteur «der Weg»

Un coup du sort a totalement fait             jardin, dans la forêt ou dans l’étable de
dérailler la vie de Silvan Spycher.           sa famille d’accueil, où il se rend gran-
Atteint de cécité à un jeune âge, il a        dement utile. Avant l’accident, il était
tout de même suivi son propre che-            d’ailleurs toujours vissé sur la selle de
min et n’a jamais perdu l’espoir d’un         son BMX, peu importe la météo. Ce
avenir épanouissant. Son stoïcisme            fils de mécanicien automobile est rapi-
et le soutien indéfectible de la FSA          dement devenu un mordu de moto et a
l’ont aidé à y parvenir. Portrait.            hérité de la fibre du bricolage pater-
                                              nelle. Il préfère clairement manier des
La vie de Silvan Spycher prit un tour-        outils à rester assis derrière un bureau.
nant dramatique dans son enfance: le          Ce n’est donc pas un hasard s’il a
10 août 1986, alors qu’il est âgé de          monté des meubles IKEA pour la coo-
presque neuf ans, il survit à une tragé-      pérative VEBO et s’il a toujours aidé
die familiale, mais perd non seulement        ses proches à déménager, démontrant
la vue et l’odorat, mais aussi son frère      toutes les ressources dont il sait faire
et ses parents. Après plusieurs se-           preuve malgré sa cécité, même quand
maines d’hospitalisation et des opéra-        il s’agit de porter des charges lourdes.
tions complexes, il est confié à une          Silvan Spycher ne cache pas avoir
famille d’accueil bernoise établie à Hin-     traversé une période très difficile lors
terfultigen et quitte donc Lotzwil (BE) où    de sa formation. L’impossibilité de pour-
il est né pour poursuivre sa scolarité à      suivre ses véritables intérêts personnels
Zollikofen (BE). Lors de sa formation         et professionnels lui donnait l’impres-
commerciale à Berne chez Telecom              sion de stagner et l’envie de se rebeller.
PTT, société rebaptisée Swisscom en           Grâce au soutien de son maître d’ap-
1997, il reste à l’internat de l’École pour   prentissage, il a achevé une formation
aveugles. Il choisit cette voie principale-   d’employé de bureau sur deux ans,
ment en raison du manque d’opportuni-         sans toutefois trouver ensuite un travail.
tés professionnelles qui s’offraient à lui    Il s’est donc tourné vers l’office régional
dans le secteur artisanal.                    de placement (ORP).
                                              À cette époque, il cherchait en fait un
Mordu de moto et fibre du bricolage           travail présentant un défi physique. Il
Fasciné par la nature, il apprécie pour-      considéra le métier de matelot. Ses
tant davantage de passer du temps au          candidatures se soldèrent toutefois par

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Les gens

des refus, d’autant plus qu’il n’avait pas
effectué son école de recrue ni appris
un métier manuel. Plus tard, une forma-
tion complémentaire de téléphoniste
suivie sur les recommandations d’un
conseiller d’orientation de l’AI le mena à
Bâle, bien qu’il ne soit «pas un citadin».

Une nouvelle vie avec Alisha et
James
L’inversion des rôles qu’il observa lors
de sa participation au projet «Blinde­
kuh», où personnes aveugles et mal-
voyantes guidaient des personnes
voyantes à travers des dédales dans
le noir, dans le cadre d’Expo.02 à
Morat lui fit du bien. Comme il le ra-
conte avec son calme caractéristique,
son intérêt pour un chien-guide s’éveil-
la aussi à ce moment-là. Un désir no-
tamment nourri par son passage dans
les programmes germanophones
«Aeschbacher» ou «Quer» ainsi que
par ses entretiens avec l’auteure
Christine Brand pour son récit de véri-
tables affaires criminelles «Schatten-
taten» (2008) et le roman policier
«Blind» (2019). Toutefois, il ne voulait
pas un labrador, mais un berger alle-
mand. Alisha, un chien au pelage gris
de la Verein für Blinde­hunde und Mobi-
litätshilfen (VBM) de Liestal, était pour
lui, en tant que «loup solitaire», un
choix évident. Sa personnalité «bien à       Entraînement à la locomotion par
elle», son tempérament et sa nature          tous les temps: Nadine Struss,
joueuse ont marqué rien moins que le         spécialiste O&M du service FSA de
début d’une «nouvelle vie». Une              Zurich, accompagne Silvan Spycher
équipe de choc était née. À l’instar du      jusqu’à la gare de Soleure.
duo qu’il forma ensuite avec James, un       Photos: Sibylle Meier

                                                                             7
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Les gens

autre berger allemand, dont le décès        pris plus d’importance. Par le biais de
soudain des suites d’une opération          Facebook, il a notamment pu établir
nécessaire a bouleversé Silvan Spy-         le contact avec un groupe de conduc-
cher. Il apprit la triste nouvelle début    teurs de Harley lausannois et Cédric
2017 lors d’une excursion à moto avec       Hiltebrand, un cascadeur à moto. En
les «Broncos». Les souvenirs lui re-        outre, il a été exceptionnellement
viennent rapidement: «Il m’a fallu long-    admis à l’été 2019 comme membre
temps pour surmonter cette perte»,          du Indian Motorcycle Riders Group
avoue Silvan Spycher.                       (IMRG) du Mittelland, à Bellach (SO)
Un jour, il espère toutefois avoir à nou-   où il habite désormais depuis un an
veau un berger allemand à ses côtés.        après avoir vécu à Lupfig (AG) et
La compagnie lui tient à cœur, et ce        Aarwangen (BE). Il apprécie par ail-
depuis sa scolarité à Zollikofen. Il a      leurs le blues et le rock, joue de la
notamment longtemps apprécié la             guitare et de la batterie, et exerce
ca­maraderie des Black Flash, une           aussi comme DJ. De plus, en tant que
équipe de Torball, puis celle du TCB        mem­bre de longue date, il a gardé
Basel. Sa défaite en demi-finale avec       contact avec la FSA non seulement
l’équipe nationale lors de l’édition 2015   au travers des cours de Torball et de
du Championnat du monde de Torball          sports d’hiver, mais aussi grâce aux
à Macolin était inattendue, car les         entraînements en orientation et mobi­
Suisses avaient clairement dominé le        lité. «Je suis content de profiter de
tournoi. Depuis, les excursions en          ces aides», souligne cet homme âgé
moto en tant que passager et l’ex-          de 42 ans.
cellent encadrement des motards ont
                                            Plan tactile de la vieille ville
                                            de Soleure
                                            Depuis son déménagement à Bellach,
                                            Silvan Spycher reconnait d’autant plus
                                            la valeur des unités O&M, qui lui per-
                                            mettent de se déplacer de manière plus
                                            sûre. Que ce soit dans son nouveau
                                            village de résidence ou dans la vieille
                                            ville de Soleure voisine, pour profiter
                                            des promenades sur le Land­hausquai et
                                            des nombreux bars. Pour ce faire, il
Silvan Spycher découvre le plan             peut compter sur le soutien de Nadine
tactile de la vieille ville de Soleure      Struss, l’instructrice O&M qui connaît le
créé par Nadine Struss et se pré-           mieux les ruelles de cette ville baroque
pare à y aller. Photo: Sibylle Meier        et qui a préparé pour lui un plan tactile

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Annonce

de la vieille ville fin 2019. Des bases
qu’elle a dessinées elle-même pour des
«devoirs» que son protégé, également
formé à l’utilisation d’applications de         Vos lunettes savent lire
navigation, peut explorer du bout des         Nouvelle version sans fil!
doigts avant de sortir. «Silvan possède
encore et toujours une capacité de re-
présentation visuelle ainsi qu’un sens de
l’orientation correspondant à la perspec-
tive aérienne», explique Nadine Struss,
spécialiste O&M en formation du ser-
vice de consultation de la FSA à Zurich.
Son orientation acoustique, elle aussi        Faites-vous lire à haute voix des
élémentaire, est considérablement af-         textes par vos lunettes, ou lais-
fectée par un parapluie ouvert, qui peut      sez-les reconnaître les visages
                                              de vos vis-à-vis, des objets, des
bloquer le son, comme le démontre une         couleurs et des billets!
promenade par une grise journée hiver-        Désignez simplement du doigt du
nale. Dans ces conditions, il est facile de   texte dans des journaux ou des
ne pas bifurquer à temps.                     revues, dans des livres ou sur la
                                              carte des menus au restaurant,
Pour Silvan Spycher, ce n’est en aucun        sur les descriptions des produits,
cas un prétexte pour perdre son calme.        sur les écriteaux dans la rue, etc.
Il reste, avec raison, fidèle à son stoï-     OrCam MyEye vous fait la lecture
cisme de toujours. Il est prêt à affronter    à haute voix par un petit haut-
ce que l’avenir lui réserve, que ce soit      parleur directement dans l’oreille.
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avec ses intérêts.                            OrCam MyEye est disponible en
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Clin d'oeil Avec concours lecteurs - SBV-FSA
Point fort

Importance de l’optimisation de la lumière
Roland Erne, rédacteur «der Weg»

Un éclairage adapté aux besoins personnels de chacun est fondamental. En
effet, une luminosité optimale peut non seulement améliorer l’acuité visuelle,
la perception des contrastes, et la capacité de lecture, mais surtout contri-
buer à une plus grande autonomie. Entrons dans le vif du sujet avec Chris-
toph Galli, expert en basse vision aux services de consultation de la FSA.

Ce que l’on décrit communément                ces pièces misérablement éclairées
comme un bon éclairage est générale-          par des ampoules à filaments. Les
ment devenu une évidence dans le              abats-jour avaient pour seule variable
monde professionnel. Plafonniers et           le verre sur les tables de nuit et le tissu
lampes de table performants font partie       filtrant dans la cuisine et au salon.
de l’équipement standard d’un poste de        C’était normal, explique Christoph
travail. La luminosité choisie et installée   Galli, expert en basse vision, en par-
de manière ciblée dans le domicile est        lant de cet éclairage qu’il compare à la
tout aussi essentielle. L’anecdote d’un       lueur d’une bougie. Il ajoute: «La quali-
premier entretien aux services de             té de la lumière a drastiquement pro-
consultation de la FSA à Lucerne illus­       gressé au cours des trente dernières
tre toute la pertinence d’un éclairage        années.» Les ampoules à incandes-
adéquat. Une Uranaise, qui bien que           cence, qui dégageaient une chaleur
d’un âge avancé ne manquait ni de             impressionnante, furent suivies par les
vigueur ni de vivacité, vint expliquer ses    tubes fluorescents (communément
difficultés croissantes à lire le journal     appelés néons), puis par les lampes
assise à la table de son salon, sous          halogènes, utilisées pour l’éclairage
une ancienne lampe suspendue munie            indirect et très énergivores. Plus tard
d’une ampoule à incandescence.                vinrent les lampes fluorescentes com-
Miracle: la lecture redevint possible         pactes, plus connues sous le nom de
lorsqu’elle délaissa sa vieille lampe         lampes à économie d’énergie. Depuis,
suspendue pour une lampe de table             les lampes LED et leurs diodes élec-
diffusant une lumière d’une intensité et      troluminescentes sont l’incarnation de
d’une couleur adéquate!                       la devise «beaucoup de lumière, peu
                                              d’énergie». Durée de vie inégalée en
Évolution significative de la lumière         prime.
Le souvenir des visites chez les              Cette technologie aujourd’hui des plus
grands-parents dans les années                sophistiquées et pouvant être modulée
soixante évoque immanquablement               électroniquement permet non seule-

10
Point fort

ment de proposer un vaste éventail de
produits abordables, mais surtout de
trouver «au moins partiellement, une
solution lumineuse» pour environ 95
pour cent des clients dont l’acuité vi-
suelle est réduite, déclare Christoph
Galli. Trois paramètres sont au cœur
d’un conseil en basse vision: la lumino-
sité, le contraste et l’éblouissement.
L’agrandissement intervient seulement
ensuite comme moyen auxiliaire. Fort
de ses nombreuses années d’expé-
rience, ce conseiller de 63 ans connaît
également bien la problématique des
luminaires encastrés dans les pla-
fonds, comme c’est notamment le cas
dans les magasins, «qui éclairent uni-
quement vers le bas et non depuis les
côtés ou vers le haut.» Si les distances
entre les lampes sont trop importantes,
les yeux doivent constamment s’adap-
ter entre les zones très lumineuses et
très sombres. «C’est fatigant», observe    En consultation avec sa cliente
Christoph Galli, qui ajoute un constat     Stéphanie Mosimann, l’expert en
fondamental: «Les personnes en situa-      basse vision Christoph Galli com-
tion de handicap visuel sont déjà forte-   mente le test de mesure de la vision
ment éblouies avant ces circonstances      des contrastes à l’aide de cartes
aggravantes.»                              imprimées. Photo: Sibylle Meier

Examen de la vision fonctionnelle          clients, Christoph Galli réalise des
En général, son expertise s’appuie sur     tests avec des lampes de table dont on
un examen de la vision fonctionnelle et    peut moduler la luminosité, exprimée
sur les déficits visuels associés. Sa      en lumens (watts multipliés par 10) à
démarche s’oriente autour d’une ques-      l’ère des LED, la couleur de la lumière
tion centrale, par exemple: «Quelles       et la température de la couleur. Cette
sont les conséquences de la lumino­        dernière se mesure en kelvins: de
sité en fonction de la maladie qui en-     5300 à 6500 K pour un blanc lumière
gendre la perte de la vision?» En se       du jour (bureau, plafond), 4000 à 4500
fondant sur les réponses de ses            K pour un blanc neutre (salle de bain

                                                                                11
Point fort

et cuisine) et 2700 à 3500 K pour un         Sur la base de ces sources lumi-
blanc chaud (salon). Ce paramètre            neuses sont menés des tests de lec-
détermine aussi la couleur de la lu-         ture ou de distinction de fruits notam-
mière, qui indique si une lampe (LED)        ment pour déterminer la perception
diffuse une lumière d’un bleu froid ou       des contrastes. Que ce soit pour
d’un jaune chaud.                            l’évaluation de solutions d’éclairage
Le critère déterminant est toujours le       adaptées au logement autonome in-
seuil critique où l’on ressent de            cluant des lampadaires intelligents à
l’éblouissement, explique Christoph          détection de mouvement et munis
Galli. Il précise: «80 pour cent des         d’un capteur de luminosité ou pour
clients estiment qu’une lumière à 5500       l’utilisation de lampes portables, par
kelvins est clairement la plus confor-       exemple à la table à manger de ré­
table pour lire au bureau ou à table         sidences pour personnes âgées,
ainsi que pour la cuisine. Les 20 pour       Christoph Galli, qui œuvre aussi à la
cent restant sont répartis entre les         formation et à l’accompagnement
autres couleurs.» Pas question de            pratique de futurs experts en basse
parler de juste ou de faux. Il s’agit plu-   vision, prodigue inlassablement ses
tôt de trouver quel éclairage minimise       précieux conseils en mettant l’accent
l’éblouissement tout en offrant une          sur l’autonomie. Car l’optimisation de
bonne luminosité ainsi qu’un rendu des       l’éclairage fait au final toute la diffé-
contrastes et des couleurs satisfaisant.     rence.

Test de lecture au Service spécialisé FSA de Zurich: Stéphanie Mosimann
peut expérimenter une luminosité et des couleurs claires sans éblouisse-
ment pour elle, sitôt que Christophe Galli a adéquatement réglé la lampe de
table. Photos: Sibylle Meier

12
Point fort

Une brûlante envie d’un «chez-soi»
Hervé Richoz, rédacteur «Clin d’œil»

Quoi de plus naturel que d’avoir son propre chez-soi, son autonomie
et pouvoir s’autodéterminer sur ses envies et son style de vie? Pour les
personnes en situation de handicap, c’est rarement simple, en particulier
pour celles vivant en internat. La Fribourgeoise Shanti Plancherel en sait
quelque chose, elle qui a dû se battre pour gagner le droit de vivre en
couple. Rencontre.

La nuit est tombée sur les 5 ateliers de
la Fondation Ateliers Résidence Adultes
(FARA), entreprise sociale et solidaire
bien connue des Fribourgeois. Pour la
trentenaire Shanti Plancherel, c’est
également la fin de sa journée à l’atelier
bougies/cartes. Aveugle, elle arrive par
un autre chemin plus accessible, traver-
sant la cafétéria et longeant l’atelier de
menuiserie. Dehors, froid et neige sai-
sissent le corps. Rien ne semble freiner       Shanti Plancherel à l’atelier décora-
cette Shanti rayonnante qui dans une           tion: préparation des sacs cadeaux
heure aura retrouvé son appartement            qui seront vendus à la boutique de
douillet à Estavayer-le-Lac.                   la FARA. Photo: Hervé Richoz

Une ardente impatience                         permettre d’avancer dans la vie. Arrivée
Impossible de rester insensible à cette        d’Inde à l’âge de cinq ans, Shanti a été
joie intérieure qui émane de tout son          adoptée et confesse: «C’était pas facile
corps, cette fraîcheur qui illumine ses        la vie de famille, même si maintenant ça
paroles et cet humour qui éclate en de         va mieux.» Elle n’en dira pas plus avant
petits rires. Tous les intervenants qui        d’ajouter: «Je suis depuis 8 mois à la
gravitent autour de ses projets sont una­      FARA et franchement j’aime.»
nimes: «Cette fille a quelque chose de
très attachant. Elle est consciente de         Une vie normale au présent
ses limites, fait ses choix et ose deman-      Aujourd’hui, l’équipe bougies/cartes a
der de l’aide.» En sanskrit, Shanti signifie   rejoint l’atelier impression/déco car leur
paix, absence de passion, calme, tran-         responsable d’atelier est grippée. C’est
quillité, prospérité, félicité. Elle incarne   rarement un problème pour Shanti qui
véritablement ces valeurs qui vont lui         s’attelle, positive, à la décoration des

                                                                                       13
Point fort

emballages qui seront les sacs ca-            naires à franchir en douceur pour me-
deaux vendus à la boutique. Car elle          ner à bien son projet et faire en sorte
est comme ça Shanti. Quand soudain            que l’équilibre autonomie, activité, mobi-
une envie de changement croise son            lité soit maintenu. Elle a surtout appré-
présent, elle se prend d’une véritable        cié l’accompagnement d’un psychothé-
passion pour son projet qui l’anime et        rapeute qui lui a permis de s’affirmer
mobilise toutes ses ressources. Elle          adéquatement et d’oser dire «non». À
avoue en rigolant: «Je deviens impa-          Estavayer, ces derniers 14 ans, Shanti
tiente, je veux que tout se passe tout        était une résidente heureuse à La Ro-
de suite.» Si aujourd’hui Shanti avoue        sière et avait collaboré à la biscuiterie.
que c’est «trop bien» d’être libre de se      Elle avait auparavant fréquenté les
coucher à l’heure qu’elle choisit, de         écoles spécialisées, comme le CPHV à
pouvoir décider de ses soirées ou de          Lausanne, le CEP à Estavayer et
son week-end, d’aménager son lieu de          l’École pour aveugles de Zollikofen.
vie avec Stéphane, elle rappelle égale-       Alors que son projet de vie en apparte-
ment que ce fût un long chemin. Elle a        ment avait enfin abouti, Shanti a eu
dû se battre pour faire entendre son          l’envie d’autres activités, ce qui l’amène
envie d’indépendance et complète en           aujourd’hui à la FARA. Paradoxalement
riant: «Je suis du signe du Lion.» Cette      très craintive dans sa mobilité au quoti-
détermination impressionne les inter-         dien, elle continue de cheminer vers
venants de la FSA qui la suivent dans         d’autres enjeux liés aux déplacements
ses projets, comme son instructeur en         qu’elle aborde avec la complicité de son
locomotion ou son assistant social qui        compagnon. Pour l’heure, l’indépen-
observent: «Elle a besoin d’une impul-        dance signifie surtout qu’il faut faire les
sion pour démarrer mais fait ensuite          commissions et se préparer de quoi
les choses par elle-même. Quand elle          manger, avant de goûter au plaisir du
fait appel à nos services, elle nous          délassement et de la lecture.
surprend dans sa capacité de réalisa-
tion.» Et Shanti a de quoi être fière
d’elle: «C’est moi qui ai écrit à la juge.»
                                                                     Dans le salon
Un long chemin de battante                                           aménagé avec
Shanti a emménagé il y a 2 ans avec                                  son compa-
son compagnon Stéphane, après avoir                                  gnon, Shanti
dû faire appel à la justice de paix. En                              goûte aux plai-
effet, son premier curateur n’était pas                              sirs de la lec-
favorable à l’idée de son indépendance.                              ture du soir.
Avec sa deuxième curatrice, Shanti a                                 Photo:
pu envisager quelques étapes prélimi-                                Stéphane M.

14
Point fort

Maîtriser la domotique
Roland Erne, rédacteur «der Weg»

Les appareils intelligents favorisent       Intérêt pour l’informatique
incontestablement l’autonomie               Ce n’est pas un hasard si Daniele
des personnes aveugles et mal-              Corciulo, responsable depuis dix ans
voyantes. Pour Daniele Corciulo,            des questions liées à l’emploi des
né avec une faible acuité visuelle,         jeunes au sein du comité de la section
l’utilisation à domicile de dispositifs     Zurich-Schaffhouse, a des affinités
et de systèmes connectés fait par-          avec les objets connectés. Bien que
tie de la routine au même titre que         les mathématiques n’aient jamais été
la cuisine ou le rangement régulier.        son fort, l’informatique l’a toujours
Il nous fait visiter son habitat intelli-   intéressé et ne l’a jamais quitté,
gent.                                       comme l’explique ce Bernois vivant
                                            aujourd’hui dans le quartier zurichois
Que ce soit pour allumer la lumière,        d’Affoltern et qui a effectué toute sa
mettre en marche un appareil ménager        scolarité à l’École pour aveugles de
ou enclencher la stéréo, chacun de          Zollikofen en raison de son lourd han-
nous a pour habitude d’appuyer machi-       dicap visuel. Après l’obtention d’une
nalement sur un interrupteur. Ce n’est      maturité professionnelle à l’école de
désormais plus indispensable. L’ère du      commerce de Berne, il accède à un
smartphone rend l’habitat intelligent.      stage à l’Office fédéral des migrations
Les systèmes de domotique tels Ama-         puis travaille neuf ans dans la concep-
zon Alexa, Apple HomeKit ou Google          tion web pour la fondation «Accès pour
Home Assistant en prouvent la réalité.      tous». Depuis novembre 2018, Daniele
Daniele Corciulo connaît bien le sujet.     Corciulo occupe un poste similaire à
À peine a-t-il accueilli un invité et lui   l’Université de Zurich, un emploi qu’il
a-t-il proposé un café qu’il dégaine son    considère comme la perle rare, et
Google Pixel 3 pour contrôler la cafe-      utilise comme moyen auxiliaire une
tière automatique à l’aide du Bluetooth     plage braille ainsi que le lecteur
et d’une application développée par le      d’écran JAWS.
fabricant. «La domotique passe par un       Par ailleurs, il dédie son temps libre
smartphone et le téléchargement d’ap-       à ses hobbies, qui incluent le tir au
plications», explique-t-il, sachant que     fusil à air comprimé à assistance
depuis le lancement du premier iPhone       acoustique, la musique, des leçons de
en 2007, il y a plus de dix ans, le terme   chant, les échanges avec ses collè-
«téléphone intelligent» parle de lui-       gues, malvoyants et voyants, ainsi que
même.                                       les nouveaux objets connectés en

                                                                                 15
Point fort

Passé et présent se côtoient. Clé de la domotique pour Daniele Corciulo,
son smartphone Google Pixel 3 pilote la télécommande universelle Logitech
ou les ampoules intelligentes, mais ne peut rien pour le juke-box hérité de
son papa. Photo: Roland Erne

lien avec la domotique et les appareils    «Une sorte d’espion chez soi»
ménagers. Il a notamment équipé            Daniele Corciulo utilise à la fois Ama-
son appartement de 3 pièces, qu’il         zon Alexa, un système de domotique à
partage avec sa compagne, d’am-            commande vocale, et les haut-parleurs
poules LED intelligentes, d’un robot-      intelligents Google Home équipés d’un
aspirateur à fonction vocale et, sur-      microphone. Il suffit de leur parler.
tout, de dispo­sitifs électroniques tous   Google Home Assistant intègre intelli-
pilotables avec une commande uni-          gence artificielle, reconnaissance vo-
verselle comme un «pont optimal»,          cale et fonction «multiroom» et réagit
une pièce maîtresse de son habitat         aux mots «Hey Google» ou «Okay
intelligent. Il possède aussi un télévi-   Google». Si notre hôte de 34 ans est
seur imposant muni d’une barre de          assis à la table de sa cuisine ouverte,
son et de plusieurs haut-parleurs qui      où est placé un haut-parleur connecté,
forment un système audio intelligent       il peut dire à son assistant vocal qu’il
dont les performances donnent l’im-        souhaite utiliser son téléviseur. En un
pression d’être au cinéma. Une brève       clin d’œil, la lumière du salon diminue
démonstration suffit à s’en rendre         d’intensité, l’écran plat s’allume et, par
compte.                                    exemple, le lecteur DVD se met en

16
Point fort

marche. Il est aussi possible de            d’essais et d’erreurs. En d’autres
connecter l’environnement à Google          termes, il faut se montrer patient et
Agenda et d’accéder à sa boîte mail en      persévérer. En outre, le marché évo-
demandant à l’assistant de lire les         luant à un rythme effréné, on ne peut
messages, par exemple pour gérer            écarter le risque presque inévitable
une réservation d’hôtel. Ces fonctions      que la nouvelle version d’une applica-
sont très pratiques, mais pas ano-          tion ne soit plus compatible avec cer-
dines, car les données sont enregis-        taines commandes vocales. Ces ré-
trées sur les serveurs de Google, qui       serves ne l’empêchent toutefois pas de
est souvent comparé à une pieuvre           disposer d’une station météo dont les
dont les tentacules envahissent notre       relevés de température et d’humidité
vie privée. Daniele Corciulo en est         sont annoncés par l’assistant intelligent
parfaitement conscient: «Quand on           ou de confier la commande de l’éclai-
utilise un assistant numérique, on in-      rage à son smartphone. En fin de jour-
troduit une sorte d’espion chez soi.»       née, les lampes de son appartement
Les questions de protection des don-        s’allument ainsi automatiquement.
nées et de surveillance ont toutefois       Quand il sort de chez lui, elles s’étei-
poussé Google à prendre certaines           gnent toutes seules. Son haut-parleur
mesures. Depuis l’année dernière, le        connecté lui sert aussi depuis long-
système comprend notamment l’ins-           temps déjà de moteur de recherche. Il
truction «Okay Google, supprime tout        lui donne des réponses précises à ses
ce que j’ai dit la semaine dernière».       questions, par exemple concernant les
Depuis peu, la phrase «Okay Google,         heures d’ouverture d’un supermarché.
ce n’était pas pour toi!» indique à l’as-   Bien sûr, il n’ignore pas non plus que
sistant vocal qu’il doit oublier ce qu’il   des prises intelligentes suffisent à
vient d’entendre et la question «Okay       transformer en objets connectés d’an-
Google, enregistres-tu mes données          ciens appareils ménagers, comme une
audio?» permet de modifier les para-        cafetière à filtre.
mètres de protection des données. Il        Toute cette technologie ne diminue
ne faut pas non plus sous-estimer les       cependant en rien la passion de
risques liés au piratage informatique       Daniele Corciulo pour les vinyles. Il
que représentent les haut-parleurs          possède une vaste collection de
connectés à internet.                       singles, qu’il joue sur un authentique
                                            juke-box dans son salon, dont le
Joli juke-box                               son analogique grésillant crée un
Daniele Corciulo ne nie pas non plus        contraste intéressant avec son attrait
que le choix juste et le fonctionnement     pour les nouveautés numériques, qui
sans accroc des objets et systèmes          se multiplieront encore sans doute
intelligents sont largement le résultat     chez lui.

                                                                                   17
Point fort

Un quotidien autonome, ça se prépare
Daniele Corciulo ou Josef Egger-            besoins entre 2009 et 2011. Ce suivi
schwiler (cf. numéro de décembre            lui a appris à utiliser une machine
2019), des membres de longue date           à laver, à cuisiner des plats simples
de la FSA ayant opté pour un habitat        comme du risotto, à nettoyer les
autonome, ont cherché et trouvé de          toilettes, à repasser des chemises
l’assistance pour franchir le pas. Tous     ou encore à effectuer des tâches
deux ont fait appel à l’offre «Mobile –     administratives.
accom­pagnement à domicile» de              En raison d’une diminution croissante
la fondation Mühlehalde à Zurich-           des inscriptions, l’offre «Mobile» n’est
Oerlikon. Il s’adresse aux personnes        pas en mesure de continuer. «Derniè-
atteintes d’un handicap visuel et, de-      rement, nous avons dû nous battre
puis 2015, aux voyants souffrant de         pour chaque client», explique Barbara
lésions cérébra­les. Les clientes et        Portmann. Les raisons sont multiples:
clients sont logés seuls ou par deux        la modification des exigences et des
dans quatre appartements où, selon          conditions qui encouragent la vie et
Barbara Portmann, la directrice, ils        l’autonomie en appartements partagés,
bénéficient d’un accompagnement             les contributions d’assis­tance AI de
individuel, quel que soit leur âge ou       moins en moins compliquées à obtenir
leur situation. Le séjour met l’accent      (cf. pages 19) et la concurrence impli-
sur la tenue du ménage, l’aménage-          cite des nouvelles offres d’apparte-
ment du quotidien, l’adaptation au          ments protégés de l’École pour aveu­
suivi d’une formation ou à l’exercice       gles de Zollikofen (BE) ou de l’École
d’une activité professionnelle, l’orga­     et centre de consultation en pédagogie
nisation des loisirs et la gestion finan-   curative Sonnenberg à Baar (ZG).
cière.                                      «Mobile» n’était plus viable et suite à
Une expérience «Mobile» sert surtout        la décision du Conseil de fondation,
à tester et vérifier les aptitudes du       fermera ses portes fin mai.           rer
client en répondant à des questions
telles que «Qu’est-ce qui est à ma           Spécialistes orientation et mobilité,
portée?» ou «Suis-je capable d’ac-           basse-vision, activités de la vie jour-
complir cette tâche?». À cet égard,          nalière, assistants sociaux: en
Sepp Eggerschwiler a fait figure             Romandie, auprès des services de
d’élève exemplaire lors de son pas-          consultation cantonaux, des profes-
sage chez «Mobile» en 2017, souligne         sionnels répondent à vos besoins et
Barbara Portmann. Quant à Daniele            vous accompagnent dans vos de-
Corciulo, il se souvient de la prise en      mandes d’autonomie.                  hr
charge et des objectifs adaptés à ses

18
Point fort

Évaluation de la contribution d’assistance AI
Autonomie renforcée
Christina Eggenberger et Frédéric Widmer, collaborateurs scientifiques, OFAS, Tâches
spéciales et Recherche et évaluation

La contribution d’assistance fait
l’objet d’une évaluation par un pro-
gramme de recherche sur l’assu-
rance-invalidité. Les résultats dis-
ponibles indiquent que les objectifs
sont atteints. Bilan intermédiaire.

La contribution d’assistance a été in-
troduite avec la révision 6a de la LAI et         Christina Eggenberger, Frédéric
est en vigueur depuis le 1er janvier              Widmer. Photos: BSV
2012. Cette prestation vise à favoriser
l’autodétermination, permettre de me-             publication récente d’un rapport inter-
ner une vie autonome, promouvoir                  médiaire2). L’évaluation, qui porte en
l’insertion sociale et professionnelle et         premier lieu sur la réalisation des ob-
alléger la tâche des proches. Les bé-             jectifs, fournit des résultats positifs
néficiaires peuvent engager directe-              dans tous les rapports déjà dispo-
ment un assistant pour les aider au               nibles: les objectifs principaux pour le
quotidien.                                        groupe-cible ont été atteints.
Comme toute nouvelle prestation im-
portante de l’assurance-invalidité, la            Amélioration du cadre de vie
contribution d’assistance est aussi               Les personnes sondées indiquent que
évaluée par le biais d’un sondage au-             la contribution d’assistance AI a favori-
près de toutes les personnes qui en               sé leur autonomie et que l’aide, les
bénéficient. La première phase d’éva-             possibilités financières et les contacts
luation a pris fin en 2017 avec un rap-           sociaux ont été améliorés. La plupart
port final complet1), et la deuxième              des bénéficiaires précisent être satis-
phase s’étend jusqu’à mi-2020, avec la            faits de leur situation, et trois quarts

1
     uggisberg, Jürg; Bischof, Severin (2017):
    G                                             2
                                                      Guggisberg, Jürg; Bischof, Severin (2019):
    Evaluation Assistenzbeitrag 2012–2016.            Evaluation Assistenzbeitrag 2012 bis
    Berne: OFAS. Aspects de la sécurité so-           2018. Zwischenbericht 2019. Berne:
    ciale: rapport de recherche n° 8/17.              OFAS.

                                                                                              19
Point fort

soulignent que la contribution d’assis-    ment toucher plus souvent une contri-
tance a amélioré leur cadre de vie. En     bution d’assistance que les personnes
outre, une grande majorité des per-        plus jeunes: les 60-65 ans constituent
sonnes sondées estiment que la             le plus grand groupe de bénéficiaires
charge de leurs proches a été allégée,     (22%), suivi par les 55-59 ans (18%),
ce qui est un des objectifs centraux de    les 50-54 ans (16%) et les 45-49 ans
cette prestation.                          (11%). En moyenne (médiane), une
Malgré ce bilan positif, la contribution   contribution de quelque 2000 francs
d’assistance peut être améliorée sur       par mois est promise à un bénéficiaire,
plusieurs points. Une grande partie        alors que 1300 francs environ sont
des sondés souhaitent ainsi une ré-        sollicités en moyenne.
duction de la charge administrative,       L’évolution du nombre de bénéficiaires
par exemple avec un règlement élec-        et la question des fourchettes allouées,
tronique des factures. Une autre pro-      de même que d’autres questions quali-
position souvent citée concerne un         tatives et quantitatives sur la contribu-
décompte sans barrière, notamment          tion d’assistance AI, font l’objet d’ana-
pour les personnes en situation de         lyses approfondies, dont les résultats
handicap visuel. L’OFAS va chercher        seront publiés à l’été 2020 avec le
des solutions adéquates en collabora-      rapport final de l’évaluation actuelle de
tion avec les partenaires.                 la contribution d’assistance.

Prestation de plus en plus sollicitée       N’attendez pas la retraite!
Il n’est pas encore possible d’estimer      Quel que soit l’âge, les personnes
précisément comment évoluera le             nouvellement confrontées au handi-
nombre de personnes qui toucheront à        cap visuel rechignent à demander la
l’avenir une contribution d’assistance      contribution d’assistance de l’AI, esti-
AI. Le nombre de bénéficiaires conti-       mant pouvoir encore «se débrouiller
nue d’augmenter. Mais le nombre ac-         seules». Ce faisant elles prennent le
tuel de 2324 adultes bénéficiaires AI       risque de se retrouver démunies
(2018) est nettement inférieur aux          d’assistance en âge AVS. Il n’y a pas
3000 bénéficiaires pronostiqués. La         de quotas en matière d’attribution de
majeure partie des bénéficiaires est        la contribution d’assistance. Toutefois,
atteinte d’une infirmité en lien avec le    il est impératif que celle-ci soit déjà
système nerveux (40%), avec ensuite         fonctionnelle à la retraite, idéalement
les personnes ayant une infirmité           au moins un an avant. Ainsi, la vision
congénitale (25%) et celles atteintes       se péjorant, vous serez au moins
d’un trouble psychique (11%).               assuré du maintien de votre autono-
Si l’on considère les tranches d’âge,       mie dans la vie de tous les jours. hr
les plus de 40 ans semblent relative-

20
La vie de la fédération

Point de vue
Anne Perrier, vice-présidente de la section vaudoise

Chère lectrice, cher lecteur,
En 2017, sans savoir exactement la
tâche qui m’attendait, je me présente
au comité de la section vaudoise, et
suis élue! À la lecture des statuts je
constate que seules les personnes                                 Anne Perrier.
aveugles et malvoyantes peuvent être                              Photo: Tornow
membres, comment est-ce possible?                                 Lausanne
Après 60 ans de vie personnelle, d’en-
gagements professionnels bien rem-          pathie et je suis certaine que nous pour-
plis, j’ai été contrainte d’abandonner      rions avoir dans nos instances régio-
brusquement voiture, travail, ski alpin,    nales des voyants actifs et influents. On
etc. La reconversion, l’«après», nombre     m’a déjà expliqué l’historique de ce
d’entre vous savent de quoi je parle.       concept fédératif. Intellectuellement je le
Désormais disponible, ayant eu la           comprends, mais je ne peux m’empê-
chance de faire des études, j’ai voulu      cher de le regretter. Peut-être ne suis-je
mettre mes compétences au service           pas assez malvoyante ou pas depuis
des autres. Après un premier bénévolat      assez longtemps dans ce milieu? Au
dans le domaine de la santé, je me suis     sein de la FSA, je rencontre des gens
engagée à la FSA. J’ai petit à petit dû     formidables, des personnes coura-
découvrir le fonctionnement de notre        geuses, volontaires, bien intentionnées
fédération, son organisation, sa hié-       et je les admire sincèrement. Toutefois il
rarchie et le nombre d’organismes qui       en faut plus. Les lignes de guidage sont
gravitent autour du handicap visuel.        encore méconnues, les commandes
Même moi, si impliquée, j’avoue ne pas      tactiles des ascenseurs ou les escaliers
connaître tous les intervenants, leurs      gris sont problématiques, les formations
rôles respectifs et leurs interactions.     et places de travail adaptées font encore
J’observe que le public nous confond et     défaut... La liste est longue, il y a encore
même nos membres ne savent pas              tellement à faire! Dans un souci d’effica-
toujours à qui s’adresser. Affaire de       cité, je trouve dommage de se priver de
communication me direz-vous, mais je        la collaboration étroite de compétences
me rends bien compte de la peine que        «voyantes». Aujourd’hui, l’intégration est
j’ai aujourd’hui à faire ce que j’accom-    à l’ordre du jour, ne devrions-nous pas,
plissais en un tour de main autrefois.      nous aussi, mieux intégrer les voyants
Notre handicap génère beaucoup d’em-        dans nos comités?

                                                                                     21
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