Comment réussir l'intégration des soins pour les personnes âgées ?
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Auteurs Stefaan Coenen - Consultant Probis Didier Steinbach - Consultant Probis+ José Pincé - Professeur à l’Université libre de Bruxelles - Manager, Probis+ Prof. Jeroen Trybou - Professeur à l’Université de Gand - Teamleader, Probis Group Comité de rédaction Luc De Lat, Annemie Nolf Edition Isabella Venosi Maquette et mise en page Gilles Gander, Cédric Roland, Christel Widart Remerciements Nous tenons à remercier les experts qui ont pris part au projet et nous ont fait profiter de leurs connaissances et de leur expérience. Ils nous ont permis d’étayer les conclusions de cette étude du point de vue de l’expérience sur le terrain. • Christian Bellaert – Directeur de la Maison de Repos « Jardins de Scailmont » à Manage. • Marc Bouteiller – Directeur de la Maison de Repos « Sylvie Mouzon » du CPAS de Saint-Josse- ten-Noode • Dr. Pierre Busquin – Médecin généraliste à Quaregnon et Coordinateur à l’Institut Psychiatrique Saint Bernard à Manage • Françoise Marie Collignon – Infirmière-chef aux « Sittelles » à Chastres (SLG - Korian) • Johan De Muynck – PDG de Zorgbedrijf Antwerpen • Véronique De Schaepmeester - Administrateur délégué de VLOZO • Valérie Dubois – Directrice de la Maison de repos « le Gibloux » à Waterloo • Dr. Christophe Dumont – Gériatre au Grand Hôpital de Charleroi • Thierry Ghobert, Directeur de la Maison de repos « le Val du Héron à Rixensart » • Benoît Lambert – Directeur de la « Résidence du Lac » à Ottignies • Dirk Lips - Directeur général de l’ASBL Curando • Dr. Leslie Mathonet – Médecin généraliste et MCC à Bruxelles • Dr. Gérard Marin – Médecin généraliste à Soignies, ex-Président de l’Association Francophone des MCC (AFRAMECO) • Gautier Marlot – Directeur de la Maison de repos et Résidence Service « Les Glycines » à Hornu • Koen Michiels - Directeur délégué d’AZ Nikolaas • Dr. Alex Peltier - Médecin directeur de l’alliance des mutualités chrétiennes • Dominique Roodhooft - PDG de l’ASBL Zorg-Saam ZKJ • Véronique Saelens – Directrice de la « Résidence d’Arenberg » à Rebecq • Prof. Dr. Didier Schoevaerdts – Gériatre à l’Hôpital Saint Vincent à Dinant (UCL) • Pieter Van Herck – Conseiller senior Politique bien-être et santé VOKA • Tom Verhaeghe - CIA SPF Santé publique • Ida Verleyen – Directrice générale de « GZA Zorg en Wonen » • Jean-Yves Wilkin – Directeur de la Maison de Repos « Saint Antoine » à Saint Mard (Vivalia) Nous tenons également à remercier les personnes qui travaillent sur le terrain d’avoir répondu aux questionnaires soumis dans le cadre de l’enquête. 2
Comment réussir l’intégration des soins pour les personnes âgées ? Comment réussir l’intégration des soins pour les personnes âgées ? | février 2020
Préambule Comment réussir l’intégration des soins pour les personnes âgées ? est le nouvel opus des études réalisées par ING en collaboration avec le Groupe Probis pour la troisième année consécutive. Dans chacune de ces études, nous nous concentrons sur les maisons de repos et de soins, ainsi que les acteurs de soins connexes, qui constituent ensemble des maillons importants du secteur des soins. Ce secteur est en pleine évolution et doit trouver des solutions créatives à de nombreux défis. Le nombre de personnes âgées, de malades chroniques augmente en raison du vieillissement de la population, les patients s’expriment davantage et sont au centre du processus de soins, la réglementation s’intensifie, les attentes sont plus importantes, la gestion budgétaire doit être de premier ordre et assortie de toujours plus de justification. Chapeau bas pour les nombreux acteurs de terrain et leurs dirigeants, qui tous se dévouent chaque jour corps et âme. Début 2019, ING publiait l’étude Health Prospecting 2019 en collaboration avec Antares Consulting. À cette occasion, nous avions déjà mis en lumière un système de soins trop fragmenté et principalement axé sur la prestation de soins aigus. La conclusion appelait à une nécessaire évolution vers un système centré sur la continuité et l’intégration, toutes deux essentielles pour assurer un avenir des soins qui soit au service du patient de demain. Alors que Health Prospecting 2019 abordait l’intégration des soins du point de vue des hôpitaux, nous voulons ici analyser de près la situation sur le terrain, du point de vue de la grande variété de prestataires de soins. En tant que conseiller et partenaire important de nombreux acteurs du secteur des soins de santé, ING entend participer positivement au débat public et développer une vision d’avenir pour soutenir l’écosystème des soins de santé. Par le biais de cette nouvelle étude, notre objectif reste, comme à chacune de nos publications, de contribuer avec passion et conviction au développement des soins de santé en Belgique. Nous remercions vivement tous ceux qui ont participé à l’élaboration de cette étude pour leur précieuse contribution. Bonne lecture ! Au nom de la Healthcare team d’ING Belgique, Saskia Bauters Head of Public Sector & Social Profit Midcorporates & Institutionals, Wholesale Banking ING Belgique Vous trouverez nos précédentes études réalisées en collaboration avec le Groupe Probis sur ing.be/healthcare Le secteur des résidences services : défis et facteurs de succès (2017) https://www.ing.be/fr/retail/my-news/economy/probis-serviceflat Maisons de repos et de soins : tendances et défis du secteur (2018) https://www.ing.be/fr/business/my-business/daily-management/probis-studie
Table des matières Préambule 5 1. Introduction 9 2. Intégration des soins 11 3. Aspects-clés de l’intégration des soins 21 4. Bonnes pratiques 33 5. Enquête 45 6. Avis des experts 53 7. Conclusions 61 8. Sources 62 Comment réussir l’intégration des soins pour les personnes âgées ? | février 2020 7
Cette étude tente de brosser un portrait clair de ce que peut représenter l’intégration des soins pour les personnes âgées. Elle examine également dans le détail ce que sont les soins dispensés hors de l’hôpital et les parcours de soins envisageables. Le plus grand défi pour les prestataires de soins en Belgique consiste à développer pour les malades chroniques une offre de soins, qui soit un ensemble complexe et cohérent en adéquation avec leur demande de soins. 8
1I Introduction Les soins de santé en Belgique sont confrontés à de nombreux défis. En raison du vieillissement de la population, le nombre de malades chroniques augmente, en particulier chez les personnes âgées (65 ans et plus), et plus spécifiquement encore parmi les personnes vulnérables de plus de 85 ans. Par conséquent, la comorbidité ou multimorbidité dans ce groupe augmente et rend les demandes de soins toujours plus complexes. Dans la pratique, cette situation engendre de nombreuses difficultés et obstacles pour les prestataires de soins qui doivent garantir des soins continus et de qualité. Cette évolution a été si rapide que le système de soins de santé en Belgique a été pris de vitesse. Par conséquent, l’offre actuelle de soins ne semble plus rencontrer la demande de soins des bénéficiaires. Ainsi, les personnes en situation de recevoir des soins sur le long terme sont admises dans des cadres destinés à la prestation de soins aigus, donc inadaptés à leurs demandes, besoins et exigences spécifiques. Cela entraîne une perte de temps précieux, une utilisation inefficace des ressources et une charge de travail accrue pour les prestataires des soins. Il est urgent de développer des initiatives qui visent la continuité des soins, une meilleure qualité des soins et une utilisation plus efficace des ressources afin de mieux répondre à la demande des bénéficiaires atteints de maladies chroniques. De plus, la multimorbidité et la complexité accrue des soins entraînent une augmentation du coût des soins de santé. On estime qu’actuellement 70 à 80 % des coûts totaux des soins de santé sont consacrés au dépistage, à la gestion et au traitement des maladies chroniques. La nécessité d’apporter des changements dans le système de soins de santé semble évidente. Le système fragmenté actuel, au sein d’un modèle médical davantage axé sur la prestation de soins aigus, devra évoluer vers un système centré sur la continuité et l’intégration où la multidisciplinarité sera privilégiée. Une intégration réussie des soins impose certaines règles de départ : • Les différents services doivent pouvoir coopérer grâce à un partage d’information, une coordination et une concertation efficaces. • La prise en charge doit pouvoir être organisée, quel que soit le lieu de vie du bénéficiaire. • L’offre de soins doit être centrée sur la demande, où le bénéficiaire joue un rôle actif. Cette étude a pour but de mettre en lumière les clés de la réussite d’une intégration des soins pour les personnes âgées. Quels sont les obstacles et les opportunités ? Quels aspects sont prioritaires et quelles conditions doivent être remplies pour mettre en œuvre ou développer l’intégration des soins ? Elle s’articule autour de 3 volets : • un rappel théorique des notions essentielles liées au concept d’intégration des soins • la présentation des résultats de l’enquête • un résumé des entrevues avec les experts 1 La question de l’utilisation du terme approprié s’est posée. Nous avons opté pour l’utilisation de « bénéficiaire » en lieu et place de patient, malade, usager ou encore client. Comment réussir l’intégration des soins pour les personnes âgées ? | février 2020 9
2I Intégration des soins 2.1 Qu’est-ce que l’intégration des soins ? L’intégration des soins est un ensemble cohérent de divers modèles et méthodes, axés notamment sur les systèmes de financement, l’administration, les structures organisationnelles, la prestation de services et l’administration de soins cliniques. Elle a été conçue pour assurer la solidarité, la coopération et la coordination dans les différents secteurs des soins de santé. Elle influe également sur différents niveaux au sein du système de santé. La définition qu’en donne l’Organisation mondiale de la santé (OMS) est la suivante : « La gestion et la prestation de services de santé, sans discontinuité, par la promotion de la santé, la prévention, le diagnostic, le traitement, le suivi continu, la réintégration, les soins palliatifs ; à différents niveaux et en différents lieux, adaptés aux besoins des patients. » Le concept est indissociable de l’évolution citée plus haut vers des soins plus complexes et plus chroniques. Cette approche place les besoins, les exigences et les demandes (de soins) du bénéficiaire au cœur des soins de santé. Lorsque les soins sont continus, un bénéficiaire évolue sans rupture entre les différents secteurs et niveaux de soins. Cela implique également que le bénéficiaire gère activement son parcours de soins. En réalité, il s’agit plutôt d’une responsabilité partagée : les intervenants professionnels assistent le bénéficiaire et ses aidants proches dans la coordination et l’organisation des soins. Ces intervenants professionnels agissent à partir d’un réseau pluridisciplinaire, dans lequel les différents acteurs se consultent, en concertation avec le bénéficiaire, pour proposer des soins intégrés de qualité. Pour que cette approche soit un succès, la collaboration et l’harmonisation continues des soins, la coordination entre les différents professionnels et organisations de soins, tout en tenant compte de la demande de soins du bénéficiaire, sont essentielles. L’intégration des soins se situe donc à différents niveaux. Comment réussir l’intégration des soins pour les personnes âgées ? | février 2020 11
• Niveau 1 : les services offerts directement au bénéficiaire C’est en fait le produit fini de l’intégration des soins : une prestation continue de soins de qualité. À ce niveau, les prestataires de soins fonctionnent essentiellement dans le cadre de leurs rôles et responsabilités propres, leurs activités professionnelles étant complétées par l’aide apportée par des prestataires de soins informels. Ce niveau vise la satisfaction du bénéficiaire, la réalisation d’objectifs et de résultats spécifiques en matière de soins ainsi que l’amélioration de la santé et du bien-être individuels. Ici, le bénéficiaire a surtout besoin de prestataires de soins compétents, qui atteignent les objectifs des soins. Les prestataires de soins veillent à assurer le nécessaire « empowerment » du bénéficiaire par son implication active et participative dans le processus de soins. • Niveau 2 : l’intégration professionnelle On entend ici la coordination des soins prodigués par les différentes disciplines professionnelles d’une équipe de soins, au sein de l’organisation où elles s’exercent. Il est important qu’il existe à cet égard une coordination, une concertation et un partage d’informations entre les différents prestataires de soins. C’est à cette fin que l’on désigne souvent un interlocuteur spécifique pour les soins propres à un bénéficiaire en particulier. • Niveau 3 : l’intégration organisationnelle Il s’agit ici de la manière dont les organisations de soins Afin d’obtenir des soins coordonnent leurs services ou leur offre en collaboration intégrés, chaque niveau avec d’autres organisations. Des organisations supérieur doit faciliter le complémentaires peuvent s’adresser les unes aux autres niveau inférieur. pour certains services, ou des organisations peuvent mettre en commun leur expertise et leurs connaissances pour obtenir de meilleurs soins. Exemples : les réseaux de première ligne, ou les partenariats entre les maisons de repos et de soins et les hôpitaux. Pour réussir l’intégration à ce niveau, la coordination et la concertation à l’échelon de la direction des différentes organisations concernées sont d’une importance capitale. La coopération, le partage de l’information et la confiance sont à ce niveau également des aspects essentiels. • Niveau 4 : l’intégration systémique Cette intégration constitue le point de départ de l’approche globale. L’élaboration de règles et la mise au point de la politique sont les principaux objectifs de ce niveau. Ce niveau se situe souvent sur le plan politique, où les décisions ont une influence directe sur le niveau inférieur. Sans vision ni communication claires et communes au niveau politique, il ne peut être question d’intégration optimale des soins. 12
Valentijn et al. (2013) ajoute quatre dimensions supplémentaires à cette approche des soins, qui reflètent bien la complexité de soins intégrés de qualité. Ces dimensions sont des conditions préalables à la réussite de l’intégration dans tous les domaines des soins et du bien-être. Deux d’entre elles sont axées sur la prestation de services au bénéficiaire : 1. Intégration horizontale de niveaux de soins similaires. Par exemple, la collaboration entre une maison de repos et un organisme de soins à domicile peut être considérée comme une intégration horizontale lorsqu’il s’agit de soins peu complexes. 2. Intégration verticale de niveaux de soins différents. Par exemple, la collaboration entre un hôpital de soins aigus, où sont dispensés des soins très complexes, et une maison de repos, où la postcure des soins aigus peut être poursuivie. Une distinction est donc faite entre complexité et spécialisation. Les deux autres dimensions concernent le soutien aux soins ainsi que les valeurs et normes véhiculées dans le cadre d’une collaboration. 3. Conditions préalables fonctionnelles, c’est-à-dire le degré de coordination des services de soutien et de l’administration. S’ils ne sont pas intégrés, les soins ne peuvent pas être prodigués de manière optimale. Cela affectera principalement l’efficacité et la continuité des services. 4. Conditions préalables normatives, c’est-à-dire le degré de partage des valeurs et des normes au sein d’un réseau ou d’un système, ainsi que la vision et la mission. Sans ces conditions formelles, il est difficile de réaliser l’intégration des soins. Tous les regards doivent porter dans la même direction, en prêtant attention aux normes et aux accords communs auxquels tous les partenaires du système doivent adhérer. Triple Aim Le triple objectif des soins intégrés, aussi appelé dans la littérature « Triple Aim », peut ainsi se résumer en : • une amélioration de l’état de santé, au niveau individuel et dans l’ensemble de la population • une amélioration de la qualité des soins et de la perception des soins par le bénéficiaire • une efficacité accrue et une meilleure utilisation des ressources dans le domaine des soins, qui se traduisent souvent par une réduction des coûts ou « more value for money ». Comment réussir l’intégration des soins pour les personnes âgées ? | février 2020 13
2.2 Intégration des soins pour les personnes âgées Cette étude porte sur l’intégration des soins pour les personnes âgées atteintes de maladies chroniques. Selon l’OMS, une maladie chronique peut être définie comme « une affection de longue durée à progression généralement lente ». Il s’agit d’une définition large, qui inclut diverses affections telles que le diabète, les maladies cardiovasculaires et la maladie de Parkinson, mais aussi des affections psychiques, comme la dépression. Outre les conséquences physiques et psychologiques de la maladie chronique, le bénéficiaire est également confronté à des aspects tels que la perte d’emploi et de revenu, la diminution des contacts sociaux... Souvent, la personne atteinte d’une maladie chronique peut gérer sa situation elle-même, mais certaines personnes se trouvent aussi dans des situations plus complexes et ont besoin d’une aide et d’une coordination professionnelles. Ces soins chroniques sont devenus de plus en plus importants au cours des dernières années/décennies. On estime même que 70 à 80 % des coûts totaux des soins de santé sont consacrés à la gestion et au traitement des maladies chroniques. Les maladies chroniques constituent la principale cause de mortalité chez les personnes âgées : 68 % au niveau 80 % des personnes de plus mondial. En Europe, ce pourcentage s’élève à plus de 80 %. de 80 ans ont une maladie En Belgique, les personnes âgées vulnérables constituent chronique le groupe le plus important parmi les malades chroniques, groupe chez qui l’on observe souvent une multimorbidité. Pas moins de 33 % des personnes de plus de 65 ans ont deux maladies chroniques ou plus et 10 % en ont même trois ou plus. 80 % des personnes de plus de 80 ans ont une maladie chronique. Les affections les plus courantes sont l’hypertension, la dépression et le diabète. Les personnes âgées souffrant d’une maladie chronique sont aussi nettement plus susceptibles d’être admises à l’hôpital, bien que cette admission puisse être évitée ou ne soit absolument pas nécessaire. 14
Ceci est le résultat d’un net vieillissement de la population en Belgique et d’une forte évolution au niveau médical dans le domaine des traitements au cours des dernières décennies. Toutefois, l’augmentation du nombre de personnes âgées souffrant de maladies chroniques a été si rapide que le système des soins de santé en Belgique a été pris de vitesse. Par conséquent, les malades chroniques sont souvent admis dans des cadres destinés à la prestation de soins aigus, inadaptés aux besoins de soins spécifiques. Cela conduit à une utilisation inefficace des ressources et du personnel. Il est donc nécessaire d’adopter en Belgique une nouvelle approche en ce qui concerne les soins aux malades chroniques. Il faut passer à des systèmes de soins qui peuvent s’appliquer à de multiples pathologies. De la sorte, il sera possible d’augmenter l’efficacité et de réduire les coûts. Le tableau ci-dessous reprend les évolutions nécessaires en Belgique pour que les personnes âgées souffrant de maladies chroniques bénéficient de soins intégrés de qualité. Tableau 1 I Soins aux personnes âgées : quelles sont les évolutions nécessaires ? De Vers Fragmentation Continuité et intégration Soins réactifs Soins proactifs et planifiés Soins axés sur la pathologie Soins axés sur la personne Modèle médical Modèle pluridisciplinaire Dicté par l’offre Dicté par la demande Patient passif Patient actif Comment réussir l’intégration des soins pour les personnes âgées ? | février 2020 15
2.3 Soins en dehors de l’hôpital On l’a vu plus haut, en Belgique, les maladies chroniques sont trop souvent prises en charge dans un cadre destiné à la prestation de soins aigus, ce qui entraîne inefficacité, coûts supplémentaires et pression de travail accrue. Les hôpitaux sont essentiels au bon fonctionnement du système de santé, y compris pour les soins intégrés, mais ils devraient se concentrer sur les soins aigus. Les soins dispensés en dehors de l’hôpital sont axés sur la (ré)orientation, le rétablissement et la prévention des complications des maladies chroniques. Il est essentiel d’éviter les hospitalisations inutiles par une intervention thérapeutique opportune. Le bénéficiaire peut être pris en charge dans un environnement différent, tel que son domicile et les résidences de soins pour personnes âgées. Cela permet de travailler de manière personnalisée et de mettre en œuvre une politique d’admission hospitalière responsable, entraînant des coûts moindres, des séjours plus courts, un flux de bénéficiaires plus rapide et une diminution des admissions inutiles. Dans cette approche, trois parcours sont possibles : • Les soins d’évitement de l’hospitalisation par la prévention. • Les soins de substitution à l’hospitalisation qui se concentrent sur les soins complexes pour des actes spécifiques tels que l’hémodialyse, les soins intensifs de plaies complexes, l’administration de médicaments par voie intraveineuse... • Les soins de suivi après une hospitalisation qui consistent en un processus de postcure tels que les consultations gériatriques, par exemple. Dans la pratique, on observe souvent une combinaison des parcours afin d’en maximiser les avantages. En déplaçant les soins hors de l’hôpital, on obtient : • une diminution des hospitalisations d’urgence au départ des maisons de repos et de soins, • une diminution des hospitalisations programmées, • une réduction de la durée du séjour hospitalier, • une implication accrue de tous les acteurs des soins, et • une expertise accrue en dehors de l’hôpital. Ces résultats entraînent une utilisation plus efficace des ressources, une amélioration de la qualité des soins et une meilleure prévention au sein de la société. Comme l’intégration des soins fixe également ces objectifs, il est clair que les soins hospitaliers à domicile doivent avoir leur place dans cette nouvelle approche des soins. 16
2.4 Les positions politiques Les différents niveaux de pouvoir ont confirmé l’importance de l’intégration des soins dans leurs accords de gouvernement respectifs. • Le gouvernement fédéral a prévu dans son accord précédent un cadre réglementaire adéquat pour développer de nouvelles formes de soins. Toutes les entraves réglementaires à la collaboration axée sur les patients auxquelles sont confrontés les dispensateurs de soins dans les réseaux horizontaux ou verticaux seront inventoriées et classées. Le gouvernement s’inspire des principes de base de la note d’orientation « Vision intégrée des soins aux malades chroniques en Belgique » approuvée le 24 février 2014 par la Conférence interministérielle Santé publique et par le rapport « Organisation des soins pour les malades chroniques en Belgique » du KCE (rapport 190A du KCE). • Le gouvernement flamand souhaite repartir du concept de socialisation des soins précédemment envisagé, pour les soins de santé durant la législature 2019-2024, Par exemple, des travaux sont en cours pour décloisonner le secteur des soins et du bien-être sur la base de cinq thèmes : qualité, accessibilité, innovation, « Santé et bien-être dans toutes les politiques » et lutte contre la pauvreté. On accordera notamment de l’attention aux soins aux personnes âgées par un contrôle plus strict des tarifs journaliers, l’investissement dans davantage de personnel et des budgets de soins supplémentaires pour les personnes âgées qui ne sont plus en mesure de payer les services d’une maison de repos. L’utilisation du BelRAI deviendra toujours plus courante dans les soins aux personnes âgées au cours des prochaines années. De plus, les efforts se poursuivent en matière de prévention et de soins de première ligne. Un nouveau décret sur la qualité sera également rédigé, dans lequel des indicateurs plus nombreux et plus faciles à gérer seront utilisés, si possible également de manière intersectorielle dans les domaines de la santé, du bien- être et des soins. Il en résultera un cadre de référence adapté pour la qualité des soins, y compris dans les établissements où des soins spécialisés sont fournis. Pour les soins de santé mentale, l’offre sera identifiée et précisée. La note de Wouter Beke, ministre flamand du Bien-être, de la Famille, de la Santé publique et de la lutte contre la Pauvreté, contient des thèmes qui concernent l’intégration des soins. Les objectifs qui ont été fixés faciliteront directement ou indirectement la réussite de l’intégration des soins en Belgique. Comment réussir l’intégration des soins pour les personnes âgées ? | février 2020 17
• Les autorités bruxelloises ont formulé leurs intentions en ce qui concerne les orientations majeures en matière d’accès aux soins de santé et de soutien aux personnes dépendantes ou en perte d’autonomie dans leur déclaration de politique générale. Les éléments essentiels en lien avec notre étude sont les suivants : đ apporter des réponses intégrées et transversales à la problématique du report de soins : le Gouvernement accompagnera et soutiendra financièrement l’installation de la médecine générale et des pratiques de groupes pluridisciplinaires đ intégrer des normes relatives à la qualité dans les hôpitaux đ poursuivre les efforts en matière de développement de l’e-santé afin de garantir la continuité des soins, par exemple par le partage de données entre les différents prestataires de soins đ garantir à toute personne en perte d’autonomie l’accès aux soins et services grâce à un modèle intégré d’aide et de soins de proximité đ garantir aux bénéficiaires : ■ une qualité de la formation du personnel intervenant à domicile ■ une prestation de services sur mesure ■ une diversité institutionnelle (public, asbl, petites associations, etc.) ■ une approche globale des besoins du bénéficiaire, qui prend en compte les aidants proches ■ une accessibilité des soins, à la fois financière, physique et sociale đ soutenir les aidants proches par l’intermédiaire des professionnels de la première et de la deuxième ligne 18
• En Région wallonne, la déclaration de politique régionale 2019 – 2024 a souligné l’importance d’une vision à long terme de la politique sociale et de santé. Le Gouvernement veut répondre aux défis que sont l’accès à la santé pour toutes et tous sur l’ensemble du territoire wallon et la liberté de choix du bénéficiaire. Un organe de conseil et d’orientation de la stratégie au sein duquel toutes les parties prenantes de l’autorité fédérale, des Communautés et des Régions pourront, en concertation, élaborer des objectifs de santé interfédéraux et préparer des accords de coopération reste une priorité. Le Gouvernement veillera à : đ soutenir l’amélioration de la qualité des soins đ renforcer et encadrer l’offre de première ligne d’aide et de soins en favorisant le développement des pratiques pluridisciplinaires de première ligne đ rechercher une meilleure collaboration entre la première ligne et les soins spécialisés, en ce compris les futurs réseaux hospitaliers et les soins de santé mentale đ soutenir l’implémentation de la transdisciplinarité en redéfinissant le rôle et le partage des tâches entre les acteurs de première ligne, en y intégrant les soins transmuraux đ favoriser la coopération entre les hôpitaux, en tenant compte de l’accessibilité géographique et de la continuité des soins dans le respect des choix éthiques du patient đ adapter l’offre de lits à l’évolution des besoins en concertation avec l’autorité fédérale pour notamment reconvertir les lits aigus en lits de revalidation, lits résidentiels pour personnes âgées, favoriser l’hospitalisation à domicile, les développements en santé mentale et les formules d’habitats communautaires ou de proximité, etc. đ développer plus avant la participation du bénéficiaire : le considérer comme un partenaire, tout en assurant le respect des droits fondamentaux, des règles en matière de consentement éclairé, de la vie privée, des droits à accéder à son dossier et la garantie de la sécurité des données đ développer un canal qui donne au bénéficiaire l’accès à toutes les données concernant sa santé (eHealth) đ améliorer la continuité et la qualité des soins par le développement du réseau de santé wallon, et ainsi favoriser la collaboration avec toutes les parties prenantes du système de santé ; le réseau de santé wallon proposera, en concertation avec la plateforme eHealth et l’AViQ, des pistes de réflexion et d’action pour inclure au maximum tant les citoyens que les prestataires dans cette évolution sociétale majeure đ stimuler un partenariat coopératif entre les professionnels wallons de la santé et les acteurs du numérique đ renforcer le soutien à domicile des personnes en perte d’autonomie Comment réussir l’intégration des soins pour les personnes âgées ? | février 2020 19
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3I Aspects-clés de l’intégration des soins Le 19 octobre 2015, la ministre 3.1 Empowerment du bénéficiaire fédérale de la Santé publique Dans l’optique de l’intégration, le bénéficiaire joue et les ministres de la Santé des un rôle actif dans son parcours de soins. Il faut entités fédérées ont approuvé, donc chercher à renforcer l’empowerment du au cours de la conférence bénéficiaire afin de favoriser son implication. interministérielle, le plan Nous utiliserons la définition suivante : conjoint en faveur des malades chroniques intitulé : « Des soins « L’empowerment est un processus intégrés pour une meilleure multidimensionnel qui aide les santé ». Un ensemble personnes à prendre le contrôle de leur d’aspects-clés de l’intégration vie et augmente leur capacité d’agir sur des soins ont été déf inis sur la des questions qu’ils considèrent eux- base du document de synthèse mêmes comme importantes. » et de la littérature. Le succès de l’intégration repose sur ces Dans un contexte de soins, cela peut se traduire éléments. par un processus où le bénéficiaire développe sa résilience et devient plus fort sur le plan personnel et social. Il prend ainsi le contrôle de sa vie et de son parcours de soins. Selon l’OMS, une partie de la responsabilité, du contrôle et de la liberté se déplace du médecin vers le bénéficiaire. Il s’agit de soins de santé durables, où tous les acteurs des soins participants doivent viser l’autonomie, la satisfaction du bénéficiaire, l’observance thérapeutique, la prévention et la qualité de vie dans une culture participative. Le processus décisionnel part du bénéficiaire, mais il est partagé et dicté par les acteurs professionnels des soins, afin d’atteindre les objectifs de traitement et de soutenir l’autogestion. L’empowerment est un processus d’influence mutuelle, de pouvoir et de responsabilité partagés. Au sein d’une organisation, l’empowerment peut se décliner dans la manière dont les soins sont organisés et dans l’attitude du prestataire de soins. Il s’agit pour l’intervenant professionnel, celui qui responsabilise, d’un processus d’information, de formation, de direction, de coaching et d’accompagnement. Comment réussir l’intégration des soins pour les personnes âgées ? | février 2020 21
3.2 Soutien aux aidants proches Le soutien apporté par les aidants proches devient Aux fins de la présente essentiel pour pouvoir répondre aux demandes de soins, étude, nous définissons aux besoins et aux exigences du bénéficiaire. Compte l’aidant proche comme tenu de la rareté des professionnels de la santé, ces soins « une personne qui fournit complémentaires pourraient à l’avenir occuper une place des soins non rémunérés à plus importante à domicile et dans d’autres secteurs de la une personne atteinte d’une santé. Le soutien aux aidants proches doit se traduire par maladie chronique, d’une une reconnaissance, une mise en valeur, une implication, invalidité ou ayant un autre une information, un suivi et des collaborations avec les besoin de santé ou de soins professionnels de la santé. de longue durée, en dehors La contribution et l’impact des aidants proches sur la d’un cadre professionnel ou politique de soins sont énormes. Les aidants proches formel ». Dans la loi belge du qui s’occupent de personnes handicapées fonctionnelles 12 mai 2014, l’aidant proche permettent d’éviter l’hospitalisation en améliorant, par est défini comme exemple, la prévention des chutes, en veillant à une « la personne qui apporte alimentation adéquate et à une intervention médicale une aide et un soutien en temps utile en cas de problèmes. Ils permettent donc continus ou réguliers à de réaliser des économies dans le domaine des soins de une personne reconnue en santé, en réduisant le recours aux soins professionnels plus situation de dépendance ». coûteux. Intervenants de première ligne, les aidants proches sont plus exposés aux risques d’isolement, d’épuisement et de solitude sur les plans familial, social et professionnel. La majorité des aidants proches estiment que leur qualité de vie est affectée. Le fait d’apporter un soutien à ces précieux acteurs des soins peut contribuer à une intégration réussie des soins. Il sera donc important pour l’intervenant professionnel d’investir dans la relation avec ces aidants. 3.3 Concertation et coordination La complexité des soins chroniques implique que ce groupe de bénéficiaires a également besoin de différents types de soins, qui doivent se soutenir et se compléter. Une coordination claire, accompagnée d’une concertation suffisante, devrait assurer les soins les plus appropriés, au bon moment, en veillant à ce que le bénéficiaire dispose de suffisamment de temps (de soins). Le modèle des soins intégrés se déroule à différents niveaux et dans différentes dimensions. Cette coordination et la concertation qu’il requiert sont complexes. La coordination doit également permettre de faciliter l’échange d’informations entre les acteurs des soins. Dans ce modèle, le bénéficiaire participe aux moments de concertation et assume en outre un rôle actif dans la coordination de ses propres soins (surtout dans le cas d’une faible dépendance). À chacun des niveaux, il convient également de réfléchir à la personne qui assurera la coordination. Cette tâche implique une certaine responsabilité et détermine souvent aussi la réalisation ou non des objectifs fixés et, donc, le taux de réussite des soins intégrés. En d’autres termes, la coordination est un élément primordial de l’intégration. Les initiatives et structures existantes et les sensibilités déjà connues devraient donc également être prises en compte. La réalisation de cette coordination aux différents niveaux prendra des années et constitue un processus de changement de grande envergure. 22
3.4 Case management Le case management (gestion de cas) est le suivi de tous les soins (médicaux, paramédicaux, psychologiques, sociaux et de bien-être général) nécessaires pour répondre aux demandes et aux besoins d’une personne atteinte d’une affection chronique. On peut donc soutenir que le case management est une forme de coordination et de suivi individuel d’un bénéficiaire. Il est important que les besoins et les demandes de soins du bénéficiaire constituent le point de départ. Un case manager prend donc en charge la coordination des soins pour un bénéficiaire, s’il n’est pas en mesure de le faire lui-même. Il supervise un processus complet où l’analyse et l’évaluation des besoins et de la demande de soins, la planification, la coordination des soins directs, l’évaluation et la défense des intérêts du bénéficiaire sont les éléments-clés. Il existe de nombreuses variantes autour de l’interprétation du case management, tant en termes d’organisation, de financement que de contenu de l’accompagnement quotidien. La force de cette pratique réside dans le fait que les case managers répondent à la situation unique de leurs bénéficiaires et de l’organisation pour laquelle ils travaillent. Comment réussir l’intégration des soins pour les personnes âgées ? | février 2020 23
3.5 Continuité transmurale Il est difficile de trouver une définition univoque pour les soins transmuraux. Par conséquent, le terme devient plutôt un terme fourre-tout pour décrire les formes intégrées de soins entre le bénéficiaire, l’aidant proche, les soins de première, deuxième et troisième lignes et les autres prestataires de services sociaux. La continuité des soins n’est possible que si ces acteurs sont en parfaite harmonie les uns avec les autres. L’OMS écrit que les soins transmuraux ne sont qu’un aspect partiel des soins intégrés. Les habitudes, les méthodes de travail et les objectifs par discipline de soins sont parfois si différents que des malentendus et des erreurs de communication peuvent facilement survenir, avec pour conséquences des erreurs médicales, la répétition d’examens déjà pratiqués, la mauvaise utilisation de moyens et d’outils, des hospitalisations inutiles... Le manque de continuité peut être considéré comme une rupture dans le plan de soins, qui constitue pourtant un accord entre le bénéficiaire et les intervenants professionnels. De bons soins transmuraux peuvent assurer la continuité nécessaire et la réalisation (plus rapide) des objectifs de soins. Il est ainsi possible d’éviter les réhospitalisations, de limiter les coûts qui y sont associés et de surcharger les prestataires de soins (pas d’anamnèses supplémentaires, pas d’examens supplémentaires, un meilleur suivi grâce à des observations partagées...). Les soins intégrés ne se terminent ni ne commencent à la porte d’un hôpital ou d’une maison de repos. Ils doivent aller au-delà des murs de l’hôpital et des environnements de vie et de travail des bénéficiaires. Pour bien gérer les maladies chroniques, les bénéficiaires et les familles ont besoin des services et du soutien de leur communauté. Celle-ci peut en outre combler des vides importants au niveau des services qui ne sont pas fournis par les soins de santé organisés. Il existe aujourd’hui un ensemble d’organisations et de professionnels qui assurent la coordination transmurale. Ceci étant, cette mission est fragmentée car ciblée sur une catégorie spécifique de bénéficiaires ou un évènement particulier du traitement. Pour que ce soit une réussite, il faut un changement culturel fondamental, il faut briser les cloisonnements et revoir radicalement les relations de partenariat. La communication et le partage de l’information sont essentiels dans la continuité (des soins) transmurale. Un dossier bénéficiaire intégré deviendra donc un moyen important pour y parvenir. 24
3.6 Culture de la qualité Le passage de soins dictés par l’offre aux soins dictés par le bénéficiaire est important pour créer une nouvelle culture de la qualité dans les soins. Une culture est l’ensemble des habitudes et des règles qui appartiennent à une société, une organisation ou un peuple. Elle comprend les us et coutumes qui caractérisent une organisation. Cela comprend les normes et les valeurs, les attitudes et les comportements. Une culture ne peut pas être imposée et un changement de culture devra donc être soutenu par tous les acteurs concernés. Ce qui n’est pas facile, surtout dans le domaine des soins de santé. L’objectif est que les prestataires de soins d’une organisation collaborent à un objectif commun, où la qualité est au centre des soins dispensés au quotidien. Il existe de nombreuses mesures de la qualité, mais le bénéficiaire doit lui aussi indiquer qu’il est satisfait des soins qui lui sont administrés. Tous les acteurs devront donc collaborer et soutenir cette culture. La recherche de la qualité est un processus continu, dans lequel certains prestataires de soins et autres acteurs seront amenés à adapter leur comportement et leur façon de penser. Il est important que les prestataires de soins se sentent impliqués et qu’ils soient satisfaits des soins qu’ils prodiguent. 3.7 Leadership Cette composante est étroitement liée à celle de la coordination. Par « leadership », nous entendons principalement l’initiative dans le cadre d’une nouvelle approche de soins. Il y a une différence essentielle entre la coordination, où l’accent est mis sur la gestion des processus, et le leadership, où les tâches sont axées sur la prise de décisions (finales). Le leadership concerne principalement la capacité de motiver les autres à faire des choses qu’ils ne feraient pas de leur propre chef. Cela peut être de récompenser ou sanctionner afin d’ajuster le comportement et d’influencer le résultat de certains processus. Le leadership est donc fortement axé sur l’orientation du comportement et des prestations. Les leaders ont une forte personnalité et osent prendre l’initiative. Il faut aussi un certain degré de diplomatie pour trouver un équilibre entre sanctions et récompenses. Le comportement et la motivation sont influencés non seulement par des facteurs extrinsèques, mais aussi par des facteurs intrinsèques, tels que le processus qui aboutit à un produit pour l’employeur et à une récompense pour le travailleur. Un leader doit donc être en mesure de permettre aux collaborateurs d’appliquer les mêmes valeurs et normes. Ces aspects de leadership personnel influencent donc d’autres éléments constitutifs de l’intégration des soins, tels que le développement d’une culture de la qualité, la concertation et la coordination. Comment réussir l’intégration des soins pour les personnes âgées ? | février 2020 25
Ce qui précède s’applique assurément au niveau micro des soins intégrés, où un dirigeant mène les membres de son équipe pour qu’ils atteignent les objectifs communs au niveau des soins individuels et de l’organisation dans son ensemble. Cependant, il est également important que les dirigeants se révèlent au niveau méso et macro pour assurer la réussite de l’intégration des soins dans la pratique. Qu’ils prennent des initiatives, qu’ils osent prendre des décisions et que, pour ce faire, ils recherchent des informations correctes, travaillent de manière proactive, convainquent leur entourage et fasse du réseautage et de la médiation de conflits dans le cadre de relations avec des partenaires. Lorsque le leadership est insuffisant, les collaborateurs ou les partenaires se montreront rapidement négatifs, ce qui est préjudiciable au processus et au résultat escompté. Un bon leader garde toujours à l’esprit les objectifs des soins intégrés, en particulier pour le niveau auquel il travaille. Un bon leadership sera donc certainement un facteur facilitant l’intégration des soins. 26
3.8 Dossier bénéficiaire intégré Un dossier bénéficiaire intégré est essentiel dans le cadre des soins intégrés. Néanmoins, en 2020, il apparait qu’il n’y a pas de large consensus sur ce qu’est un tel dossier et sur ce que doit être son contenu. Un bon dossier doit d’abord et avant tout être basé sur les besoins du prestataire de soins dans le cadre de son contact avec le bénéficiaire. L’analyse documentaire montre que le nombre de données doit être fonctionnel. Plus il y a de données disponibles, moins le tout est clair. Ceci s’applique au dossier dans son ensemble ainsi qu’à chacune des différentes parties. Le partage structuré des données dans le secteur de la santé est donc fortement dépendant de la structure sous-jacente du support utilisé. Le dossier électronique, bien que celui-ci n’ait pas encore trouvé sa place dans tous les organismes de santé, constitue un outil indispensable pour l’intégration des soins, afin de faciliter le partage d’informations et l’échange de données entre les différents prestataires de soins et les organisations de soins. Chaque prestataire de soins doit pouvoir travailler dans le dossier : cela offre la plus grande chance d’un enregistrement et d’un soutien consciencieux. Il est important, tant sur le plan administratif que sur le plan des soins, que l’échange d’informations soit au service du bénéficiaire dans un premier temps et au service des différents prestataires de soins impliqués dans un deuxième temps. L’échange de données valorise également la participation de tous les prestataires de soins, ce qui est important dans le cadre des soins intégrés. La mise en œuvre d’un tel dossier devra, pour garantir l’assentiment général à son sujet, à minima veiller à : • Un traitement des données avec la confidentialité nécessaire. Il est essentiel que cela se fasse automatiquement, c’est-à-dire sans intervention supplémentaire du médecin ou du prestataire de soins, sur la base de la structuration ‘normale’ de ces données. • Garantir un consensus sur le contenu du dossier de soins, sur les données qui peuvent être partagées avec l’extérieur et sur les personnes qui y ont accès. Il appartient aux autorités de fixer le contenu minimum du dossier et la manière dont les différents acteurs doivent le gérer. Conformément à la législation et à la réglementation, les autorités ont également une mission de contrôle en ce qui concerne les données à caractère personnel et médical. Le terme « à caractère personnel » signifie ici non seulement « lié à un bénéficiaire », mais aussi « lié à un médecin ou à un autre prestataire de soins ». • La possibilité pour chaque bénéficiaire d’avoir accès à son propre dossier. Certaines questions se posent. Si un bénéficiaire n’est plus capable d’exprimer sa volonté, un représentant est-il autorisé à consulter le dossier ? L’aidant proche peut-il examiner le dossier, même si le bénéficiaire est toujours capable d’exprimer sa volonté ? Un bénéficiaire doit-il avoir accès à toutes les données ? Peut-il établir comment un médecin est arrivé à une certaine décision (sur la base de résultats d’examens ou d’hypothèses) ou le bénéficiaire doit-il seulement être au courant de la décision prise ? Ces données sont-elles perturbantes ou utiles pour le bénéficiaire ? • L’usage d’une communication en ‘termes simples’. Bien entendu, cela s’applique non seulement aux développeurs de logiciels, mais aussi aux prestataires de soins. Le jargon médical n’aide pas les bénéficiaires et peut conduire à plus de questionnements inutiles. Comment réussir l’intégration des soins pour les personnes âgées ? | février 2020 27
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