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http://portaildoc.univ-lyon1.fr Creative commons : Paternité - Pas d’Utilisation Commerciale - Pas de Modification 2.0 France (CC BY-NC-ND 2.0) http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/2.0/fr FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
MEMOIRE DE DIPLÔME D’ÉTAT DE SAGE-FEMME Réalisé au sein de L’Université Claude Bernard– Lyon 1 UFR de Médecine et Maïeutique Lyon Sud Charles Mérieux Symptomatologie pendant les règles avec port de protections intimes et choc toxique staphylococcique menstruel en France Enquête quantitative menée auprès de jeunes femmes françaises, âgées de 18 à 30 ans. Mémoire présenté par Julie FORISSIER Née le 1er septembre 1998 En vue de l’obtention du diplôme d’état de sage-femme Promotion 2022 Gérard Lina, professeur d’université, praticien hospitalier en bactériologie, Centre national de référence des staphylocoques – Institut des agents infectieux – Hôpital de la Croix Rousse Directeur de mémoire Madame Marie Lafuente, sage-femme enseignante Référente mémoire 1 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
Symptomatologie pendant les règles avec port de protections intimes et choc toxique staphylococcique menstruel en France Enquête quantitative menée auprès de jeunes femmes françaises, âgées de 18 à 30 ans. 2 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
Remerciements Aux membres du jury. A Gérard Lina, professeur d’université, praticien hospitalier en bactériologie, et directeur de ce mémoire. Un grand merci pour votre réactivité, disponibilité et tous vos conseils qui m’ont guidée et accompagnée jusqu’ici. A Laurent Gaucher, sage-femme et enseignant chercheur, pour son accompagnement, son enseignement et sa bienveillance. A Marie Lafuente, sage-femme et référente de ce mémoire. A Sandrine Graneau, infirmière, mère de trois enfants et victime du choc toxique, pour l’échange que nous avons eu, pour votre gentillesse, pour l’écriture de votre livre qui nous confie votre témoignage et pour vos conseils avant la distribution des questionnaires de ce mémoire. A Claudine Colozzi, journaliste indépendante spécialisée dans la thématique du handicap, pour le partage de certaines études et rapports sur le sujet. Mais aussi, un immense merci à ma famille et amis, Merci à ma mère, toi qui m’as tout appris, qui m’as toujours soutenue dans ce rêve d’enfant d’être sage-femme. Merci à Sonia, qui a toujours été là, tout a démarré avec toi, ce matin où tu m’as accompagnée jusqu’à ce terrible concours… Merci à mes frangins, pour toutes nos discussions détente et rigolades à la maison. Sans vous je n’aurais sûrement pas réussi. Merci à mes meilleures amies, plus ou moins de vraies princesses qui aiment les bouffes aux Caraïbes, Esther, Lisa, Laure, Pauline, Anaïs, pour tous nos moments si précieux, qui nous ont fait grandir ensemble et à tous ceux qui vont arriver. Le WEI, Sainte-Maxime, L’Alpe D’huez, l’Ardèche, la semaine ski, nos soirées pour combien / raclette / tu préfères / déguisées / à la maison / au Barberousse / 3D / diner presque parfait / d’inté / Fajitas / en visio / d’anniversaires…, les nouvel ans, la Guadeloupe, Marseille, le camping, Monaco, Milan… Vous avoir rencontré a été un des meilleurs cadeaux que la vie pouvait me faire. En plus d’être des femmes extraordinaires, vous serez des professionnelles en or. Je vous souhaite que du bonheur sur votre chemin et de vous éclater dans votre boulot, ça y est, on l’a fait !!! Merci à ma sœur de cœur, ma Flo, ma Zezette, mon acolyte de vie, dans les bons comme dans les mauvais moments. Notre amitié est une âme en deux personnes. Je ne te remercierai jamais assez. 3 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
Glossaire Ac : Anticorps ANSES : Agence Nationale de Sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail CAT : Conduite à tenir CDC : Centre for Disease Control and Prevention CES : Comités d’Experts Spécialisés CNR : Centre National de Référence Codex Alimentarius : Programme commun de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) consistant en un recueil de normes, codes d'usages, directives et autres recommandations relatifs à la production et à la transformation agroalimentaires qui ont pour objet la sécurité sanitaire des aliments, soit la protection des consommateurs et des travailleurs des filières alimentaires, et la préservation de l'environnement CPK : Créatine Phosphokinase CTSm : Choc Toxique Staphylococcique menstruel DGCRF : Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes DGS : Direction Générale de la Santé EDANA : Association : European Disposables and Nonwovens EVA : Echelle Visuelle Analogique FDA : Food and Drug Administration FdR : Facteur de risque Group’Hygiène : Syndicat français des fabricants de produits à usage unique pour l'hygiène, la santé et l'essuyage H0 : Hypothèse nulle H1 : Hypothèse alternative IC : Intervalle de Confiance 4 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
LCR : Liquide Céphalo-Rachidien LFGB : Norme qui atteste qu'il ne se produit pas de migration chimique en cas de contact direct d'une personne avec le produit sec, en conditions normales d'utilisation ou en cas de contact avec les muqueuses NSN : Nombre de Sujets Nécessaires OR : Odd Ratio P : P-value PAD : Pression Artérielle Diastolique PAS : Pression Artérielle Systolique PEC : Prise En Charge PV : Prélèvement Vaginal S. aureus : Staphylococcus aureus (staphylocoque doré), bactérie cocci à gram + SCT : Syndrome du Choc Toxique TSST-1 : Toxic Shock Syndrom Toxin 1 5 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
Table des matières I – Introduction............................................................................................................ 8 1. Historique et présentation du choc toxique menstruel ...................................... 8 a) Historique ................................................................................................... 8 b) Epidémiologie en France............................................................................ 9 c) Définition, mécanisme d’action et conséquences sur la santé ................... 9 d) Législation européenne et française sur les protections périodiques, oscillation entre médecine et consommation..................................................... 11 2. Problématique, objectifs et hypothèses de travail ............................................. 13 a) Problématique .......................................................................................... 13 b) Objectifs ................................................................................................... 13 c) Hypothèses de travail............................................................................... 14 II – Matériel et méthode ............................................................................................ 14 1. Type d’étude ................................................................................................... 14 2. Population....................................................................................................... 14 3. Elaboration du questionnaire .......................................................................... 16 4. Analyses statistiques ...................................................................................... 16 a) Données générales .................................................................................. 16 b) Tests statistiques ..................................................................................... 17 III – Résultats............................................................................................................ 17 1. Symptômes observés au cours des règles ..................................................... 17 2. Différence de symptômes observés en fonction du type de protection ........... 17 3. Symptômes déclarés spontanément............................................................... 19 IV- Analyse et discussion.......................................................................................... 20 1. Points forts de l’étude ..................................................................................... 20 2. Points faibles de l’étude, limites et biais ......................................................... 21 3. Perspectives ................................................................................................... 21 a) A propos de l’étude .................................................................................. 21 b) Précarité menstruelle, enjeu de société et de santé publique .................. 22 c) Formation des professionnels de santé.................................................... 22 d) Décret proposé par Olivier Véran et nouvelle réglementation .................. 22 V - Conclusion .......................................................................................................... 23 Bibliographie............................................................................................................. 24 Annexes.................................................................................................................... 28 1. Questionnaire ................................................................................................. 28 2. Tableaux de contingence................................................................................ 29 6 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
3. Flow – Chart représentant l’échantillonnage................................................... 31 4. Synopsis de mémoire ..................................................................................... 32 7 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
I – Introduction 1. Historique et présentation du choc toxique menstruel a) Historique L’expression « choc toxique staphylococcique » est la traduction adoptée en français, à la suite de la publication de Rapin et coll., pour désigner le « toxic- shock syndrom » des anglo-saxons. Il a été décrit pour la 1 ère fois en 1978 chez l’enfant et l’adolescent par Todd et coll. chez sept patients âgés de 8 à 17 ans. Le syndrome clinique est caractérisé par ; un état fébrile à 39-41°C d’installation brutale, accompagné de céphalées et de troubles psychiques à type de confusion, d’une éruption cutanée scarlatiniforme desquamant après quelques jours, d’injection conjonctivale, de dysphagie, de troubles digestifs, de signes de choc et dans certains cas, d’ictère et d’œdème pulmonaire. (1) En 1980, un syndrome identique est décrit chez des femmes jeunes au cours de leurs règles. Après l’identification de 772 cas de CTSm dont 38 décès aux Etats – unis, le syndrome a rapidement gagné en importance. (2) Une étude épidémiologique du CDC montre alors un lien statistique avec l’usage des tampons périodiques et confirme la présence du Staphyloccocus aureus dans la quasi-totalité des PV étudiés. La production de la toxine TSST-1 par les souches de S. aureus responsable de ces chocs sera identifié dans un second temps. (2) Conjointement, les tampons Rely, à haute capacité d’absorption, commercialisés par Procter and Gamble, sont retirés du marché. Alors que les tampons sont entièrement faits de coton jusqu’au milieu des années 1970, les Rely sont fabriqués avec des matières synthétiques telles que le polyester et la carboxyméthylcellulose. De plus, la FDA impose que des recommandations soient ajoutées sur les notices, incite les femmes à sélectionner les tampons les moins absorbants, adaptés à leurs besoins et supprime l’utilisation du polyacrylate. (3) L’ensemble de ces mesures a permis une diminution considérable du nombre de cas entre 1979 et 1996 aux Etats-Unis mais étaient insuffisantes pour limiter la survenue de nouveaux cas. Parallèlement aux études scientifiques, plusieurs victimes du choc toxique menstruel communiquent et participent à la médiatisation du syndrome. En 2015, Lauren Wasser, mannequin, activiste américaine et actrice raconte son histoire afin de sensibiliser les femmes et demande la transparence sur la composition des tampons. Atteinte du CTSm en 2012, âgée de 24 ans au moment des faits, elle a dû être amputée de ses 2 jambes. De même, les parents d’une jeune femme belge de 17 ans, Maëlle, décédée d’un CTSm en janvier 2020, ont décidé de partager leur histoire et appellent les adolescentes et femmes à rester vigilantes sur leurs protections périodiques. La jeune femme décédée au bout de 48h, avait d’abord été prise en charge à l’hôpital avec un tableau clinique de gastro-entérite, puis transférée en soins intensifs où le diagnostic de CTSm avait été posé. 8 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
b) Epidémiologie en France La première publication française sur le SCT date de 1985 (Melconian et al.) après l’identification de 26 cas entre 1981 et mars 1983 dont 14 cas étaient des femmes âgées entre 17 et 67 ans. Dans notre pays, la surveillance épidémiologique du CTSm est réalisée à Lyon par le CNR des staphylocoques en liaison étroite avec Santé Publique France. Il s’agit d’une surveillance passive (absence de déclaration obligatoire) avec 4 objectifs ; - Evaluer les tendances du CTSm au cours du temps - Décrire les caractéristiques épidémiologiques du CTSm - Différencier les cas probables, cas possibles et cas confirmés - Contribuer à l’alerte Le CNR a recensé en moyenne, 20 cas par an depuis 2010 (2) avec un risque maximal chez les moins de 19 ans. Entre 1990 et 2016, près de 86% des cas signalés au CNR avaient moins de 24 ans, l’âge s’étendait de 12 à 45 ans avec une moyenne de 19.5 ans et une médiane de 18 ans. Le taux de mortalité du CTSm est estimé à moins de 1% contre 20% pour la forme non menstruelle. Cependant, le nombre de cas et le taux d’incidence sont encore mal connus car ; - Le CTSm n’est pas une maladie à déclaration obligatoire - Le CTSm peut être confondu avec d’autres pathologies - Le rôle du CNR dans la surveillance et l’aide au diagnostic est mal connu - La fréquence des cas de CTSm signalés est très probablement sous-estimée. Pour autant, on observe une augmentation continue des déclarations avec : - 5 cas déclarés en 2004 - 19 en 2011 - 22 en 2014 - 24 en 2017 Cette hausse du nombre de cas pourrait être expliquée par plusieurs hypothèses : une augmentation réelle du nombre de cas, une meilleure sensibilisation des professionnels de santé, la notoriété croissante du CNR. D’après les données épidémiologiques actuelles, une minorité de femmes présente un profil à risque, néanmoins, l’incidence estimée du CTSm est comprise entre 0.7 et 3 cas pour 100 000 femmes. (4) c) Définition, mécanisme d’action et conséquences sur la santé Le choc toxique staphylococcique menstruel est une pathologie infectieuse aigue, potentiellement mortelle, causée par une toxine super-antigénique (TSST-1 ou entérotoxine) qui pénètre dans la circulation sanguine après une infection par S. aureus. Cette forme de choc toxique est à distinguer du choc septique dont la physiopathologie est associée à la production d’autres types de toxines et aussi à l’action directe de la bactérie sur le système immunitaire. Le CTSm est uniquement provoqué par la toxine TSST-1. Naturellement, S. aureus colonise 30 à 40% des individus, principalement : le nez, la gorge, le vagin et la peau. La colonisation vaginale est de 30% et environ 20% des souches de S. aureus sont capables de produire la toxine TSST-1. Le port prolongé de dispositifs intravaginaux favorise la prolifération du S. aureus en retenant le flux menstruel dans le vagin. 80% des femmes possèdent des Ac anti TSST-1 et ce, dès l’adolescence. (2) Seules, les femmes présentant un faible taux 9 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
d’Ac sont susceptibles de développer un CTSm. C’est ce qui expliquerait le faible nombre de cas. Trois facteurs sont ainsi requis pour la constitution d’un CTSm ; - Un portage vaginal de S. aureus TSST-1 positive (4% des femmes) - Une quantité suffisante de TSST-1 ayant dépassé l’épithélium vaginal - Une quantité insuffisante voire une absence d’Ac anti TSST-1 De même que le port prolongé de protection intravaginale, l’équilibre de la flore, la teneur vaginale en O2 et CO2, le pH, la concentration en magnésium, la température, les microtraumatismes des parois et la manipulation des protections intravaginales avec des mains contaminées par S. aureus pourraient aussi jouer un rôle considérable dans le développement du CTSm. Figure n°1 ; Physiopathologie du CTSm (2) Le diagnostic clinique est actuellement difficile car la symptomatologie clinique est non spécifique et les diagnostics différentiels nombreux. En 2016, le CDC a défini des critères standardisés ; 1. Fièvre > 38.9C 2. Eruption cutanée 3. Desquamation (++paumes des mains et plantes des pieds) 1 à 2 semaines après le début de la maladie 4. Hypotension ; PAS < 90mmHg, baisse > 15 mmHg de la PAD à l’orthostatisme, syncope à l’orthostatisme 5. Atteinte multi systémique (3 ou plus) : ¾ Gastro-intestinale (vomissements, diarrhée) ¾ Musculaire (myalgies sévères ou CPK > 2N) ¾ Muqueuse ¾ Rénale (hyperuricémie > 2N ou créatininémie > 2N ou pyurie aseptique) ¾ Hépatique (ASAT / ALAT > 2N ou bilirubine > 2N) ¾ Hématologique (thrombocytes < 100G/L) ¾ Nerveuse (désorientation, altération de la conscience sans déficit neuro- focal) Selon le Center of Disease Control, un cas présentant 4 des 5 critères cités ci-dessus est considéré comme probable tandis qu’un cas présentant les 5 critères est considéré comme confirmé. (2) 10 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
Figure n°2 ; Chronologie des symptômes du CTSm (2) Quant au diagnostic biologique, il ne peut pas reposer sur la mise en évidence de la toxine au niveau du sérum car aucune technologie n’est disponible actuellement pour détecter directement TSST-1 dans le sang du fait des très faibles concentrations. La constatation de signes négatifs est également essentielle ; hémocultures négatives, LCR stérile, absence de streptocoque bêta-hémolytique du groupe A dans les prélèvements pharyngés, sérologies négatives pour les maladies virales exanthématiques et les leptospiroses. Il est assez paradoxal de remarquer que dans ce syndrome de choc toxique staphylococcique, dont la dénomination fait expressément référence à la notion de « choc », les troubles hémodynamiques se résument en réalité dans 40% des cas à une hypotension sans signes cliniques d’insuffisance circulatoire périphérique. (1) À la suite d’un SCT menstruel, le patient est hospitalisé (en réanimation si le tableau clinique est très sévère). La prise en charge se fait par le retrait du tampon, un traitement symptomatique et anti-infectieux avec une antibiothérapie anti- staphylococcique et anti-toxinique. La résistance antibiotique de cette bactérie est variable selon les souches, mais les souches responsables du CTSm sont, pratiquement tout le temps, sensibles à la méticilline. Il est également possible d’essayer d’éliminer ou neutraliser la TSST-1 via des anticorps anti-TSST-1 ou une épuration extra-rénale. L’efficacité de ces traitements n’est pas encore démontrée. Cette maladie est le plus souvent non immunisante et le risque de récidive est de 10 à 45%... d) Législation européenne et française sur les protections périodiques, oscillation entre médecine et consommation En France, l’âge moyen des 1ères règles est de 12 ans et 3 mois. L’utilisation des tampons est généralisée et concerne environ 70% des femmes aux Etats-Unis, au 11 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
Canada et en Europe occidentale (5). L’ANSES a été saisie en 2016, par la DGS et la DGCRF pour la réalisation d’une expertise sur la sécurité des produits de protections intimes. Aujourd’hui, en Europe il n’existe pas de réglementation spécifique encadrant la composition, la fabrication ou l’utilisation de ces produits (2). En comparaison ; - Aux Etats-Unis, la FDA a qualifié ces produits en « dispositifs médicaux » et leur commercialisation est contrôlée depuis les années 70 - En Autriche, les produits d’hygiène sont inclus dans le codex alimentarius - En Allemagne, ils sont considérés comme des commodités en contact prolongé avec le corps et doivent donc respecter l’article 2 du LFGB -En Suisse, ils sont réglementés comme des objets usuels et doivent se conformer à l’ordonnance sur les denrées alimentaires de 2017 En France, les exigences de sécurité sont définies par la directive sur la sécurité générale des produits (CE) (2). Les tampons constituent 20% des protections périodiques utilisées par les Françaises. Selon le Group’Hygiène, 4.3 milliards de protections périodiques ont été vendues en 2015 dont 44% de protège-slips, 39% de serviettes et 17% de tampons. Quant aux cups, on observe une nette augmentation des ventes avec un taux de plus de 212% entre 2014 et 2016. Cette protection étant d’ailleurs considérée comme la plus sûre par les interrogées de l’expertise. Cette même source estime qu’une femme utilise en moyenne 13 produits par cycle soit entre 6 000 et 13 000 au cours de sa vie, avec pour les tampons, une durée moyenne de port d’environ 5.2 h soit 100h par cycle. La majorité des fabricants recommande un temps de port maximal de 6h à 8h. Dans son rapport, l’ANSES rappelle qu’il existe aujourd’hui une confusion entre les risques microbiologiques (le CTSm) et les potentiels risques dus à la présence de substances chimiques. Le principal risque documenté lié au port de protections intimes internes (tampon, coupe menstruelle) est le syndrome de choc toxique menstruel. Les protections intimes externes (serviettes, protège-slips) n’ont jamais été impliquées dans le SCT menstruel. « Aucun dépassement des seuils sanitaires n’a été mis en évidence, par voie cutanée, pour les substances chimiques détectées ou quantifiées dans les tampons, les coupes menstruelles, les serviettes hygiéniques et/ou les protège-slips. Cependant, le CES note que les procédés de fabrication des matières premières et des produits finis ne sont pas clairement détaillés et que nous manquons d’informations sur les colles, encres, parfums, sensibilisants cutanés et perturbateurs endocriniens ». (2) 12 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
Figure n°3 : Schéma de tampon avec et sans applicateur (EDANA) 2. Problématique, objectifs et hypothèses de travail a) Problématique Actuellement, la rareté de ce syndrome, la pluralité des symptômes et le manque de moyens diagnostics spécifiques, font du CTSm une pathologie avec un nombre important de retards de diagnostics et, in fine, de retards à la prise en charge. La mise en évidence de prodromes pourrait permettre une PEC plus précoce par le retrait des dispositifs intravaginaux (facteur de risque majeur), véritables environnements propices au développement de la bactérie et limiter les PEC en unité de soins intensifs et réanimation. Par conséquent, il nous a semblé pertinent de se demander quelle était la symptomatologie pendant les règles chez les femmes en bonne santé et s’il existait une différence entre celles utilisant des protections périodiques internes et celles, utilisant des protections externes. b) Objectifs L’objectif principal de cette étude était de mettre en évidence des signes cliniques observés par les femmes âgées de 18 à 30 ans, en bonne santé, pendant leurs règles et utilisatrices de protections intimes. Quant aux objectifs secondaires, leur fonction était de consolider l’étude de ces symptômes en les comparant en fonction du type de protection utilisé. De plus, cette étude a permis de faire de la prévention auprès de ces jeunes femmes ; très peu étaient informées de cette pathologie. 13 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
c) Hypothèses de travail Au cours de cette étude, plusieurs hypothèses ont pu être formulées : ¾ Il pourrait exister une différence de symptomatologie en fonction du type de protection utilisé ¾ Certains symptômes assez associés au diagnostic du CTSm pourraient aussi être présents dans la population générale. II – Matériel et méthode 1. Type d’étude Ce travail de recherche constitue une étude quantitative transversale analytique avec utilisation d’un questionnaire. (Annexe 1) 2. Population Ce questionnaire a été distribué à 138 femmes, âgées de 18 à 30 ans, en bonne santé, dans la ville de Lyon du 30/06/2021 au 02/03/2022. 124 sujets ont pu être retenus pour l’étude, 8 questionnaires ont été écartés car des pathologies gynécologiques (SOPK, endométriose, malformation utérine…), pouvant potentiellement interférer avec l’étude, ont été déclarées sur les questionnaires et 6 n’ont pas souhaité participer. Un Flow-chart représentant l’échantillonnage est disponible en annexe 3. Ces femmes ont reçu le questionnaire en main propre, par mail et par téléphone. Il s’agissait de femmes de toutes catégories sociales, contactées par liens professionnels et personnels. La population générale était donc composée de 124 femmes avec une moyenne d’âge de 23.09 et une médiane de 23 ans. Répartition de l'échantillon en fonction des âges 30 25 26 20 20 Effectifs 15 16 10 7 8 8 8 7 7 5 5 4 4 4 0 18 ans 19 ans 20 ans 21 ans 22 ans 23 ans 24 ans 25 ans 26 ans 27 ans 28 ans 29 ans 30 ans Age des sujets Figure n°4 ; Répartition de l’échantillon en fonction des âges 14 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
Deux sous-groupes de femmes ont ainsi été constitués en fonction du type de protection utilisé ; soit interne : tampons et/ou cups (7) soit externe ; serviettes hygiéniques et/ou culotte menstruelle et/ou protège-slips. Le groupe utilisant les protections internes était considéré comme le groupe « exposé ». Ce groupe était composé de 67 femmes dont les extrêmes d’âge sont 18 et 30 ans, la moyenne de 23.9 et la médiane de 23 ans. Pour le groupe utilisant des protections externes, considéré comme le groupe « contrôle », il comptait 57 femmes considérées comme non exposées ; les extrêmes d’âge étaient 18 et 29 ans, la moyenne était de 22.14 et la médiane de 22 ans. Les critères d’inclusion étaient : ¾ D’accepter de participer à l’étude ¾ L’âge, devait être compris entre 18 et 30 ans car environ 98% des cas de CTSm ont lieu entre 13 et 30 ans (4), les mineures n’ont pas été inclues dans l’étude afin de faciliter les démarches ¾ D’avoir ses règles ¾ De porter des protections durant celles-ci ¾ Ne pas avoir de pathologie gynécologique Répartition de l'échantillon en fonction du type de protection utilisé Nombre de sujets ; N = 124 13 13 10 10 9 7 7 7 6 6 6 5 4 3 1 2 2 2 2 1 0 2 2 2 2 0 18 ANS 19 ANS 20 ANS 21 ANS 22 ANS 23 ANS 24 ANS 25 ANS 26 ANS 27 ANS 28 ANS 29 ANS 30 ANS Age des sujets Protections externes ; N = 57 Protections internes ; N = 67 Figure n°5 : Répartition de l’échantillon en fonction du type de protection utilisé 15 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
Figure n°6 ; boites à moustache des 2 groupes 3. Elaboration du questionnaire Le questionnaire a été réalisé en avril 2021 et se présentait sous forme de brochure. Les questions interrogeaient les femmes sur les symptômes qu’elles ont pu percevoir au cours de leurs dernières règles uniquement, afin de limiter le biais de mémoire. Certains symptômes abordés dans les formulaires restituaient ceux décris par le CDC et d’autres étaient basés sur la littérature. De plus, les questionnaires consultaient les interrogées sur d’autres symptômes, non évoqués, qu’elles auraient pu ressentir. Enfin, une dernière partie, était consacrée à informer les femmes et reprenait les recommandations de l’ANSES et du CNR des staphylocoques. Sur les 72 questionnaires distribués en main propre, seules 11 avaient connaissance du syndrome et ce, principalement via les réseaux sociaux. 4. Analyses statistiques a) Données générales A la suite de la distribution, chaque questionnaire a été repris et analysé afin de saisir toutes les données et les exposer avec des tableaux et graphiques après utilisation du logiciel Excel. 16 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
b) Tests statistiques L’analyse des résultats a consisté en une comparaison de proportions. Le test associé est le test de Fisher, ainsi on a pu comparer les deux groupes et évaluer s’il existait une différence significative entre les deux. Les valeurs attendues des tableaux de contingence (cf annexe 2) étaient souvent inférieures à 5, nous avons donc fait le choix du Fisher car le Chi-2 de Pearson n’était pas valable. Nous avons effectué les Odd Ratio et les tests statistiques pour différencier la significativité clinique de la significativité statistique et les fréquences afin d’établir une comparaison avec la littérature. Chaque calcul a été vérifié avec le logiciel biostats TGV. 2 hypothèses ont été formulées pour les 22 symptômes interrogés : ¾ H0 = hypothèse nulle : il n’existe pas de différence statistiquement significative entre les proportions des 2 groupes ¾ H1 = hypothèse alternative : il y a une différence avec un risque d’erreur p. III – Résultats 1. Symptômes observés au cours des règles Tout d’abord, au sein de la population de l’étude, nous avons étudié les symptômes d’une façon générale. Le plus fréquent est la douleur, déclarée à 80.6%, par les sujets, avec une moyenne de l’EVA à 4.7 et une médiane à 4. Ensuite, il s’agit des céphalées, retrouvées dans 48.4% des questionnaires puis les éruptions cutanées avec 44.4%. Les autres symptômes déclarés sont, par ordre décroissant : de la fatigue (43.5%), des diarrhées (37.1%), une sensation de pesanteur périnéale (34.7%), une gêne locale (30.6%), des nausées (17.7%), de la constipation (16.9%), de l’irritation cutanée (12.9%), des frissons (8.9%), des malaises (8.1%), de la fièvre (5.6%), des douleurs en urinant (5.6%), des démangeaisons (5.6%), des rougeurs sur les muqueuses (4.8%), des ganglions (4.8%), un gonflement des extrémités (4%), des maux de gorge (3.2%) et enfin, des vomissements (2.4%). Finalement, nous retrouvons, principalement, chez les 124 sujets interrogés : douleur, céphalées, fatigue et diarrhées décrits par le CDC. 2. Différence de symptômes observés en fonction du type de protection Les personnes exposées présentaient, le plus fréquemment, comme la population générale, de la douleur (76.1%), des céphalées (44.8%) et de la fatigue (41.8%). En revanche, les diarrhées ne concernaient que 26.9% de ce groupe. Les sujets contrôle, aussi, présentaient majoritairement ces symptômes ; douleur (86%), céphalées (52.6%), diarrhées (49.1%) et fatigue (45.6%). En comparaison des deux groupes, les personnes exposées, par rapport aux sujets contrôle, présentaient plus de vomissements (3% versus 1.8%, p = 1) et plus de malaises (9% versus 7%, p = 0.75). 17 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
Selon les Odds Ratio, les malaises, vomissements et pesanteur périnéale sont les symptômes pour lesquels l’exposition aux protections internes semble être un facteur de risque bien que les résultats ne soient pas statistiquement significatifs. L’exposition ne semble pas être un FdR pour les diarrhées et cela est significatif. On observe des différences statistiquement significatives entre les 2 groupes pour les diarrhées, la fièvre et le gonflement des extrémités (p = 0.015, p = 0.047 et p = 0.019 respectivement). En ce qui concerne la douleur, évaluée par le ressenti sur 10 (EVA), nous avons pu calculer : ¾ Moyenne chez les exposés = 4.7 ¾ Médiane chez les exposés = 4 ¾ Moyenne chez les non-exposés = 4.8 ¾ Médiane chez les non-exposés = 4 Cela correspond à ce qui était observé de façon générale. Symptômes Nombre (fréquence) des P OR et IC symptômes observés Protections Protections internes externes (n=67) (n=57) Fièvre 1 (1.5%) 6 (10.5%) p = 0.047 OR = 0.13 IC95% = [0.003 ; 1.13] Frissons 4 (5.9%) 7 (12.3%) p = 0.34 OR = 0.46 IC95% = [0.093 ; 1.91] Fatigue 28 (41.8%) 26 (45.6%) p = 0.72 OR = 0.86 IC95% = [0.4 ; 1.86] Douleur 51 (76.1%) 49 (86%) p = 0.18 OR = 0.52 IC95% = [0.18 ; 1.44] Nausées 8 (11.9%) 14 (24.6%) p = 0.098 OR = 0.42 IC95% = [0.14 ; 1.18] Diarrhées 18 (26.9%) 28 (49.1%) p = 0.015 OR = 0.38 IC95% = [0.17 ; 0.86] Vomissements 2 (3%) 1 (1.8%) p=1 OR = 1.72 IC95% = [0.087 ; 103.4] Constipation 9 (13.4%) 12 (21%) p = 0.34 OR = 0.58 IC95% = [0.2 ; 1.66] Dysurie 3 (4.5%) 4 (7%) p = 0.70 OR = 0.62 IC95% = [0.087 ; 3.86] 18 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
Céphalées 30 (44.8%) 30 (52.6%) p = 0.47 OR = 0.73 IC95% = [0.34 ; 1.57] Malaises 6 (9%) 4 (7%) p = 0.75 OR = 1.3 IC95% = [0.29 ; 6.61] Étourdissements 7 (10.4%) 14 (24.6%) p = 0.054 OR = 0.36 IC95% = [0.11 ; 1.05] Maux de gorge 2 (3%) 2 (3.5%) p=1 OR = 0.85 IC95% = [0.06; 12.04] Rougeurs sur 2 (3%) 4 (7%) p =0.41 OR = 0.41 les muqueuses IC95% = [0.036 ; 2.99] Ganglions (Tous 2 (3%) 4 (7%) p =0.41 OR = 0.41 ont été déclarés IC95% = [0.036 ; 2.99] dans la gorge) Eruptions 25 (37.3%) 30 (52.6%) p = 0.10 OR = 0.54 cutanées IC95% = [0.25 ; 1.17] Gonflements 0 5 (8.8%) p = 0.019 des extrémités Irritation de la 7 (10.4%) 9 (15.8%) p = 0.43 OR = 0.62 peau IC95% = [0.18 ; 2.04] Démangeaisons 3 (4.5%) 4 (7%) p = 0.70 OR = 0.62 IC95% = [0.087 ; 3.86] Gênes 0 0 p=1 respiratoires Gêne locale 18 (26.9%) 20 (35%) p = 0.34 OR = 0.68 IC95% = [0.29 ; 1.57] Pesanteur 25 (37.3%) 18 (31.6%) p = 0.57 OR = 1.29 périnéale IC95% = [0.57 ; 2.92] Tableau n°1 ; Tableau récapitulatif des fréquences, test de Fisher et OR pour chaque symptôme 3. Symptômes déclarés spontanément La dernière question de la brochure consistait à demander aux femmes si d’autres symptômes avaient été observés au cours de leurs dernières règles que nous n’aurions pas évoqués. Protections Protections Total internes (N=67) externes (N=57) Jambes lourdes 0 3 3 Augmentation de 1 3 4 l’appétit Ballonnement 1 1 2 intestinal Irritabilité 3 7 10 19 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
Migraines 0 1 1 Asthénie 2 0 2 Mastodynies 6 4 9 Augmentation 1 0 1 pilosité Crampes 1 2 3 musculaires Récurrence 2 0 2 herpétique Bouffées de 0 3 3 chaleur Perte des cheveux 0 1 1 Sommeil perturbé 0 1 1 Sueurs nocturnes 0 2 2 Hémorroïdes 1 1 2 Gonflement des 0 1 1 paupières Tableau n°2 ; Tableau récapitulatif des effectifs des symptômes déclarés spontanément IV- Analyse et discussion L’objectif premier de cette étude était de mettre en lumière des signes cliniques remarqués par des femmes jeunes, en bonne santé, pendant leurs règles. Pour réaliser l’étude, nous avons utilisé un questionnaire interrogeant les femmes sur la présence ou non de certains symptômes au cours de leurs dernières menstruations. Les principaux résultats montrent que les symptômes les plus déclarés dans l’étude sont : douleur (80.6%), céphalées (48.4%), fatigue (43.5%), diarrhées (37.1%). Ainsi, le ressenti de signes cliniques au cours des règles est fréquent, et ceci, quel que soit le type de protection périodique utilisé. De façon intéressante, plusieurs de ces signes cliniques correspondent à ceux ressentis au début du CTSm. Nous pouvons donc concevoir une possible confusion entre une symptomatologie banale de règles et celui de CTSm à l’origine de retard diagnostic et donc de prise en charge et cas de réel CTSm. En revanche, le CTSm est lié à l’utilisation de protection interne et aucun symptôme n’a été observé plus fréquemment chez les femmes utilisant ces protections intimes. Cependant, la diarrhée, la fièvre et le gonflement des extrémités était statistiquement plus fréquemment observé chez les femmes utilisant des protections externes que celles utilisant des protections internes. En l’absence d’information sur le choix du type de protection périodique par les participantes, il n’est pas possible d’interpréter de façon fiable ce résultat inattendu. Était-ce que ces femmes de peur de développer un CTSm se sont rabattues sur les protections externes ? 1. Points forts de l’étude Il existe très peu d’études s’intéressant à la symptomatologie pendant les menstruations. Notre étude a été conduite pendant que le sujet était d’actualité. Réseaux sociaux, médias (TV, radio, journaux), gouvernement ont fréquemment 20 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
communiqué à ce sujet. Cela a eu pour effet de renforcer l’intérêt des interrogées pour l’étude. Elle a permis de nombreux échanges et de faire passer un message de prévention auprès de ces jeunes femmes. Le taux de réponse sur les 138 questionnaires distribués était de 90%. 2. Points faibles de l’étude, limites et biais La taille de l’échantillon fausse très certainement les résultats. Nous avons calculé le NSN avec Biostats TGV ; pour un risque d’erreur α fixé à 0.05 et un pouvoir séparateur 1-β à 0.9, le NSN est de 1638 sujets avec 819 sujets dans chaque groupes…Par ailleurs, nous avons été confrontés à un biais de sélection car nous avons interrogé les 18 – 30 ans afin d’alléger les démarches que nécessite l’inclusion des mineures or, entre 1990 et 2016 près de 86% des cas signalés en France avaient moins de 24 ans. (4) De plus, la sélection était soumise au biais de volontariat ; certaines femmes, six, n’ont pas souhaité participer à l’étude. Cette étude est aussi biaisée par le fait des déclarations spontanées ; en effet, les sujets étaient libres de sélectionner les informations à rapporter. Uniquement basée sur les perceptions des symptômes à postériori, l’étude aurait pu être plus précise en suivant les interrogées au moment même de leurs règles avec prise de température etc. Les éruptions cutanées sont sûrement sur-déclarées (44.4%), très probablement due à une confusion entre acné et éruption cutanée observée dans le cadre du choc toxique. A postériori, la question aurait mérité d’être plus précise sur le type d’éruption cutanée. La plupart des symptômes déclarés spontanément à la dernière question, sont très certainement liés aux modifications hormonales. D’autre part, nous observons très certainement une situation confondante avec l’épidémie de covid 19. On observe, à travers les résultats, que très souvent, plus de symptômes sont déclarés chez les non exposées, symptômes qui pourraient s’apparenter à une infection covid. L’étude n’a pas interrogé les femmes à ce sujet. Sur la période de l’étude, correspond la 4ème vague (juillet – aout 2021) avec le variant delta. Les plus jeunes, par ailleurs peu vaccinés à cette époque, ont été les plus touchés par le SARS-CoV-2. (9) Cette étude, transversale analytique, ne permet pas d’établir de lien de cause à effet entre les protections utilisées et la symptomatologie observée mais seulement de souligner la constatation de différence d’apparition des symptômes entre les deux groupes. 3. Perspectives a) A propos de l’étude Cette étude pourrait être reconduite sur de plus grands effectifs, incluant les mineures, avec une analyse plus fine des symptômes et des mesures précises plutôt que seulement la consultation des perceptions. De même, il pourrait être intéressant de suivre les femmes sur plusieurs cycles en s’assurant de l’absence de pathologie aigüe comme le covid pouvant interférer dans les résultats. 21 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
b) Précarité menstruelle, enjeu de société et de santé publique Selon l’association « Règles élémentaires », 1ère association française de lutte contre ce type de précarité, 2 millions est le nombre estimé de femmes en France qui sont victimes de la précarité menstruelle et qui manquent de produits d’hygiène intime en 2021. Cette association définit la précarité menstruelle comme : « des difficultés à se procurer des produits d’hygiène intime de première nécessité et de vivre dignement ses règles. Certaines personnes victimes de précarité menstruelle n’ont pas accès à suffisamment de produits, d’autres n’y ont pas accès du tout. » (12) Cela interroge beaucoup dans le cadre du CTSm, car si autant de femmes françaises n’ont pas suffisamment accès aux protections périodiques on peut aisément imaginer que les recommandations de l’ANSES et du CNR ne puissent pas être appliquées par toutes les femmes. Par ailleurs, le fait que les règles soient encore un sujet tabou dans nos sociétés occidentales, accroit le manque d’informations les concernant et in fine, accroit le manque d’informations à propos du CTSm. L’association nous informe que 76% des Françaises estiment que cette précarité est un sujet de santé publique. c) Formation des professionnels de santé De nos jours, trop peu de médecins traitants, gynécologues et sage-femmes sont documentés et formés sur le sujet. En février 2020, l’Assemblée nationale rédige un rapport d’informations sur les menstruations et souligne le fait que les études actuelles montrent que le risque est principalement lié aux conditions d’utilisation et qu’il est donc primordial que les professionnels de santé informent les jeunes filles. La DGOS et la DGS ont insisté sur les trois rendez-vous prévus pour les enfants de plus de 6 ans. Remboursés par l’assurance maladie, ces RDV doivent être exploités pour évoquer la question des règles. De même, une information, par ces professionnels, dans les écoles lors d’interventions sur l’éducation sexuelle est dans les recommandations (13). Selon « Règles élémentaires », 57% des françaises affirment n’avoir reçu aucun enseignement formel à propos des règles. d) Décret proposé par Olivier Véran et nouvelle réglementation En mars 2022, le ministre de la Santé, Olivier Véran, a communiqué à propos de sa proposition de décret visant à mieux informer les consommatrices. Il s’agirait d’une nouvelle réglementation qui entrerait en vigueur au 1 er janvier 2023 et qui aurait pour objectif d’imposer aux industriels la publication de la teneur précise, exhaustive, en transparence de tout ce qui compose les protections périodiques. Une négociation doit encore avoir lieu avec les fabricants. (14) 22 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
V - Conclusion Le choc toxique staphylococcique menstruel est un syndrome rare mais grave, engendré par la production de la toxine TSST-1 par la bactérie staphylococcus aureus, naturellement présente chez 30 à 40% des individus. Il concerne des femmes jeunes et en bonne santé ; l’âge médian est de 19 ans. Aujourd’hui, on estime l’incidence entre 0.7 et 3 cas pour 100 000 femmes. Néanmoins, on pense les données sous- estimées en l’absence de déclaration obligatoire des cas. L’objectif principal de cette étude était de mettre en évidence des signes cliniques observés par les femmes âgées de 18 à 30 ans, en bonne santé, pendant leurs règles et utilisatrices de protections intimes. Nous avons pu constater que les principaux symptômes déclarés par les femmes de cette étude sont douleur, fatigue, céphalées et diarrhées. Nous avons ensuite divisé notre échantillon en 2 groupes, en fonction du type de protection périodique utilisé (intravaginale ou extra-vaginale). Nous avons alors observé que la fièvre et les diarrhées étaient plus souvent observées chez les femmes utilisant des protections externes. Ce court travail de recherche ouvre de multiples perspectives, sur de plus grands échantillons, avec de meilleures puissances d’étude mais aussi concernant l’étude des symptômes liés aux règles et ceux liés aux CTSm, les critères du CDC étant actuellement insuffisant pour établir un diagnostic clinique. En effet, la recherche concernant cette pathologie est encore limitée, et les femmes sont peu informées du danger, lié la plupart du temps, à une méconnaissance des précautions d’utilisation. L’ANSES recommande, dans son rapport (2) : - De ne pas porter de tampons plus de 4 à 8h selon les fabricants - Mais aussi de se laver les mains (savon ou gel hydroalcoolique) avant l’utilisation de la protection et avant de la retirer - Pour les cups, les décontaminer avant chaque insertion (un simple lavage à l’eau et au savon ne suffit pas) - Se servir de protections à l’absorption minimale adaptée aux pertes - Ne pas utiliser de tampon en dehors des menstruations - Ne pas en utiliser la nuit - Eviter leur usage en cas de lésions ou irritations vaginales. Toutes les femmes et leurs entourages devraient être informées de l’existence du CTSm et du fait que des symptômes non spécifiques imitant la grippe au cours des règles peuvent être les premiers signes du CTSm. (18) Dans la phase aigüe de la maladie, tous les critères de diagnostic du CDC peuvent ne pas être remplis, le CTSm devrait donc être toujours envisagé pour les jeunes femmes présentant un choc septique. La CAT dans un cas de choc septique chez une femme avec un contexte de menstruations, utilisant ou non des tampons est (18) : - L’examen d’un diagnostic de CTSm - L’initiation d’une antibiothérapie anti-staphylococcique - Et l’élimination de tout dispositif intravaginal. Ce syndrome gagne de plus en plus en importance. Dernièrement, le gouvernement a annoncé une proposition de décret concernant l’obligation d’inscription des compositions des dispositifs périodiques sur les boites et l’information claire et lisible par les femmes sur les notices d’utilisation. 23 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
Bibliographie 1. Choc toxique staphylococcique. Annales Françaises d’Anesthésie et de Réanimation. 1 janv 1984;3(4):241Ǧ3. 2. Protections intimes: l’Anses demande une information « plus claire » sur le choc toxique. Veille et Actualité. 20 janv 2020; 3. Graneau S. Colozzi C. Choc toxique faut-il avoir peur des protections hygiéniques ? Flammarion. Paris (3166). 2021 4. Billon A, Lina G. Usage inapproprié des tampons périodiques et choc staphylococcique menstruel en France : étude cas-témoins dans la population. 2018. 5. Parsonnet J, Hansmann MA, Delaney ML, Modern PA, Dubois AM, Wieland- Alter W, et al. Prevalence of toxic shock syndrome toxin 1-producing Staphylococcus aureus and the presence of antibodies to this superantigen in menstruating women. J Clin Microbiol. sept 2005;43(9):4628Ǧ34. 6. Gaubert J, Gentile A, Lina G, Rager G, Fontaine B. Le choc toxique staphylococcique : y penser, c’est le traiter ! Anesthésie & Réanimation. juill 2020;6(4):400Ǧ4. 7. Mitchell MA, Bisch S, Arntfield S, Hosseini-Moghaddam SM. A confirmed case of toxic shock syndrome associated with the use of a menstrual cup. Can J Infect Dis Med Microbiol. 2015;26(4):218Ǧ20. 8. Barataud D, Tristan A, Ranc AG, Liet JM, Joram N, Launay E, et al. Signalement de cas groupés de syndromes de choc toxique staphylococcique d’origine menstruelle, Pays de la Loire, 2013 et 2016. Bull Epidémiol Hebd. 2018;(2):32-7. http://invs.santepubliquefrance.fr/beh/2018/2/2018_2_1.ht 9. Point épidémiologique COVID-19 du 7 octobre 2021. La quatrième vague a eu un impact moindre sur les admissions à l’hôpital et les décès en comparaison aux vagues précédentes Disponible sur : https://www.santepubliquefrance.fr/presse/2021/point-epidemiologique-covid- 19-du-7-octobre-2021.-la-quatrieme-vague-a-eu-un-impact-moindre-sur-les- admissions-a-l-hopital-et-les-deces-en-comparai 10. Rhône. À 16 ans, elle écrit une BD pour alerter sur le choc toxique lié aux règles Disponible sur: https://www.leprogres.fr/sante/2021/10/10/a-16-ans- elle-ecrit-une-bd-pour-alerter-sur-le-choc-toxique-lie-aux-regles 11. Protections hygiéniques : l’affichage de la composition bientôt obligatoire, une demande du Sénat depuis 7 ans. Public Senat. 2022 Disponible sur : 24 FORISSIER (CC BY-NC-ND 2.O)
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