DIGITALISATION ET SOCIÉTÉ : CONCEPTS ET ENJEUX CRITIQUES
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SOCIÉTÉ NUMÉRIQUE OUTILS STRATÉGIQUES 02 DIGITALISATION ET SOCIÉTÉ : CONCEPTS ET ENJEUX CRITIQUES De quoi parle-t-on quand on parle de digitalisation de la société ? Derrière ce signifiant flou, adresse- t-on ce concept à l’économie digitale de notre so- ciété, ou bien veut-on désigner par-là un tournant social et politique plus large ? Notamment vécue au quotidien dans les entreprises, dans les institu- Analyse tions de service public ou dans la sphère domes- tique, la digitalisation semble désigner le renforce- 2019 ment de l’usage des technologies numériques afin d’optimiser certains processus précis. Mais – dès lors qu’on en analyse les concepts et les impacts NICOLAS – apparaissent l’idéologie et le projet que ces tech- nologies sous-tendent : cette analyse propose de MARION montrer les tenants et les aboutissants, notam- ment en revenant sur le sens des concepts d’infor- matique, d’algorithme et de digitalisation. UNE PUBLICATION ARC - ACTION ET RECHERCHE CULTURELLES ASBL
DIGITALISATION ET SOCIÉTÉ : CONCEPTS ET ENJEUX CRITIQUES 2
DIGITALISATION ET SOCIÉTÉ : CONCEPTS ET ENJEUX CRITIQUES INTRODUCTION donner des définitions qui soient en mesure de mettre en valeur les enjeux critiques qu’ils sous-tendent. Les outils numériques, par leur Nous pensons en effet qu’il est utile développement incessant autant de comprendre « le numérique » que par leur implantation de plus non pas seulement comme un en- en plus profonde au sein de toutes semble de techniques et de techno- les dimensions de la société, ont logies, mais bien comme une façon reconfiguré dans une très large de conceptualiser, de penser et de mesure la rationalité humaine à comprendre la société et notre en- partir de procédés et de concepts vironnement. Les associations so- singuliers et souvent difficiles à ap- cioculturelles qui réalisent un travail préhender. Parmi les symptômes sur et à partir de l’informatique et du les plus directs de ce bouleverse- numérique en général sont souvent ment, il convient de prêter particu- confrontées à la difficulté de devoir lièrement attention à la façon dont expliquer les opérations techni- prolifère le vocabulaire conceptuel co-pratiques nécessaires à l’usage qui désigne les spécificités de l’ère des outils informatiques avant de numérique. Les quelques concepts pouvoir exposer toute l’importance fondamentaux que désignent les sociale, culturelle et politique de termes « numérique », « digital », ce même usage. Cet état de fait « informatique », « données », « al- pose lui-même problème dans la gorithmes », « big data », etc., alors mesure où il contraint ses acteurs qu’ils sont désormais omniprésents à rester enfermés dans la question dans le langage courant, sont dif- du « comment accéder au numé- ficiles à distinguer ou à figurer rique », sans jamais avoir l’occasion concrètement. Pourtant, à l’heure où de poser celle du « pourquoi ». De- l’on parle de la digitalisation comme puis que la course au tout-numé- d’un « tournant épistémologique, rique semble devenir inévitable, il anthropologique et plus largement nous semble fondamental de s’ar- civilisationnel »1 de l’histoire hu- mer en conséquence pour y main- maine, la grande élasticité des réfé- tenir esprit critique et autonomie. Si rentiels disponibles pour penser les les ateliers de pratique informatique effets, sinon les impacts, de cette sont essentiels dans cette perspec- digitalisation sur notre société nous tive, s’outiller d’une compréhension empêche souvent de comprendre critique des nouvelles grilles de lec- l’immensité de la reconfiguration ture qu’impose le paradigme digital qu’elle implique. dans nos sociétés l’est tout autant : Cette analyse voudrait, dans ce qu’est-ce que la rationalité numé- contexte, revenir sur quelques-uns rique/digitale ? Qu’implique le fait de ces concepts et tenter d’en de penser en termes de logique 1 SADIN, E., La vie algorithmique. Critique de la raison numérique., Paris, L’échappée, 2015, p.30. UNE PUBLICATION ARC - ACTION ET RECHERCHE CULTURELLES 3
DIGITALISATION ET SOCIÉTÉ : CONCEPTS ET ENJEUX CRITIQUES algorithmique ? Peut-on parler de rations de traitement : le plus cou- nouvelles formes de gouvernance ramment, elle renvoie donc au trai- spécifiquement digitales ? tement automatique de l’information par ordinateur. L’histoire de cette Nous éviterons cependant de science est aussi complexe que la donner un simple glossaire du lan- diversité des concepts sur lesquels gage numérique : cette opération elle s’appuie. Gilles Dowek, par n’atteindrait pas l’exhaustivité qui exemple, associe à l’informatique rendrait l’exercice nécessaire et utile. au moins quatre concepts originels En revanche, nous voudrions expo- qui, tous, lui préexistent mais qui au- ser comment, à partir d’une simple raient été profondément renouvelés triade conceptuelle (digitalisation – et étendus par leur articulation à l’in- informatique – algorithmique), peut formatique : l’algorithme, la machine, être appréhendée de façon intégrée le langage et l’information. et critique la logique présente liant digitalisation et société. Nous espé- […] ces concepts sont tous antérieurs à l’informatique, mais […] l’informa- rons qu’avec cette base analytique, tique les a complètement renou- où nous serons forcés de simplifier velés et, surtout, articulés en une certains aspects techniques, nos science et une technique cohérente. lecteurs seront mieux outillés pour Cette pluralité conceptuelle, qui est formuler des formes de réponses al- peut-être la grande originalité de l’informatique, est à l’origine d’une ternatives à la question « quelle so- pluralité de visions de l’informatique ciété numérique voulons-nous ? ». et d’une pluralité de ses mythes fon- Une question qui, dès à présent et dateurs.2 dans les prochaines décennies, a La genèse de ce domaine nous toutes les chances de devenir aussi renseigne donc sur le fait que, d’un fondamentale que les deux autres point de vue général, le propre de nœuds problématiques essentiels l’ère de l’informatique et, nous le de notre présent, à savoir le pro- verrons, de ce que nous nommons blème écologique et le problème communément la digitalisation est de l’économie politique du capita- d’avoir reconfiguré et réarticulé des lisme. concepts, des domaines et des opé- L’INFORMATIQUE rations qui leur préexistaient mais qui, sous l’effet de cette réarticula- COMME SYSTÈME tion, ont profondément changé de sens. L’informatique désigne, dans son sens le plus basique, une science La science informatique peut technique centrée sur la probléma- donc être comprise comme la tique du traitement automatique science propre d’un système qui, du des informations par des machines monde, ne garde que ce qui peut être capables d’opérer ces mêmes opé- traité de façon automatique par une 2 DOWEK, G., « Les origines de l’informatique », dans Cahiers philosophiques, 2015|2, n°141, p.7. 4
DIGITALISATION ET SOCIÉTÉ : CONCEPTS ET ENJEUX CRITIQUES machine en général, et par un ordi- savoir une approche qui témoigne nateur spécifiquement. À cette fin, « dès son origine de la volonté d’en- elle dispose de méthodes et de lan- tretenir un rapport quantitatif au gages spécifiques (algorithmes et réel »3. Cette approche est, fonda- codes) capables de traiter des infor- mentalement et structurellement, mations. Ces informations doivent orientée par des exigences d’op- avoir un format adapté aux machines timisation et d’efficacité propres à qui assurent ces fonctionnalités, ce qui est automatisé, transformant soit être des données numériques ces exigences en valeurs en soi. En binaires. L’informatique suppose effet, l’architecture technique que donc un geste de conversion ou de définit l’informatique expose d’em- transcodage d’informations (au sens blée, sans trop d’ambiguïtés, que large du terme) en valeurs chiffrées ce que nous nommons couram- qui pourront alors être traitées par ment le « numérique » renvoie à ordinateur afin de réaliser, à partir un genre de rationalisation du réel d’elles, un certain nombre d’opéra- par les nombres, c’est-à-dire à un tions. Ce transcodage numérique grand exercice de quantification du de l’information correspond à la réel. Dans les mots d’Éric Sadin, les définition minimale des mots digita- technologies numériques changent lisation (digit signifiant « chiffre » en tout bonnement la façon dont on se anglais) et/ou numérisation (soit le rapporte au réel : processus de transformation d’infor- Le numérique, soit l’instauration d’un mations non numériques en valeurs rapport au réel placé sous le sceau numériques). Quant à lui, le traite- de la puissance objectivante et non ment des informations numériques ambiguë des mathématiques et des nombres.4 par un ordinateur afin de réaliser des opérations (soit calculer les « solu- C’est sur cette première base que tions » des « problèmes » posés à le rapport entre digitalisation et so- l’ordinateur) correspond à la défini- ciété peut être interrogé : si la so- tion minimale de l’algorithme numé- ciété se digitalise, il faut en conclure rique. qu’elle s’oriente vers des rapports Si ces définitions n’offrent pas un davantage polarisés par le quantita- concept très pratique de ce que l’on tif, l’optimisation et l’efficacité, tant il rencontre quotidiennement dans la est vrai que ce que l’on nomme par- société digitalisée, elles exposent fois la société de l’information « est en revanche le squelette tech- un idéal qui possède les mêmes at- nico-conceptuel de la rationalité tributs que la dynamique technique qu’impose la digitalisation progres- sur laquelle il repose »5. sive (et massive) de notre société, à 3 SADIN, E., La vie algorithmique, Op.Cit., p.45. 4 Ibid., p.34. 5 MONDOUX, A., Technique, individuation et (re)production sociale. La musique numérique MP3, thèse de doctorat en sociologie, Montréal, Université du Québec, 2007, p.425. UNE PUBLICATION ARC - ACTION ET RECHERCHE CULTURELLES 5
DIGITALISATION ET SOCIÉTÉ : CONCEPTS ET ENJEUX CRITIQUES Mais avant d’exposer la nature lettre du mot, et on la compare sociétale et politique de ce sys- avec celle des mots de la page que tème informatique, il nous faut dé- présente le dictionnaire ouvert. En velopper plus avant la spécificité de fonction de la position relative des l’approche algorithmique qu’il sup- deux lettres en question dans l’ordre pose : par la particularité des unités alphabétique, les pages sont tour- de base avec lesquelles elle fonc- nées en avant ou en arrière, jusqu’à tionne, soit les données numériques, ce que les premières lettres coïn- et par la réduction qu’elle opère cident. Puis on reproduit la même sur la complexité générale du réel procédure avec la deuxième lettre qu’elle traite. du mot, puis la troisième, etc. On obtient ainsi, de façon automatique, ALGORITHMES ET BIG la solution correcte au problème DATA initialement posé. Sans s’appesantir sur le fait qu’un certain nombre de ALGORITHMIQUE ET OPTIMISATION DU structures et de normes sont ici déjà CALCUL DES « SOLUTIONS » données (ici, l’objet dictionnaire, son classement par ordre alphabétique, Nous avons vu que l’algorithme etc.), l’intérêt d’un algorithme bien définissait, en informatique, une programmé est que ces tâches ré- méthode importante de résolution pétitives puissent être réalisées au- des problèmes qu’on demande aux tomatiquement, de la façon la plus machines informatiques de trai- efficace possible. Ceci est d’autant ter. Cette méthode repose sur la plus vrai qu’en informatique, la ca- structuration en séquence d’un en- pacité de traitement des ordinateurs semble d’opérations de traitement (bien qu’immense aujourd’hui) est de données afin d’aboutir à la so- limitée : lution visée. L’exemple extra-infor- matique le plus simple pour illustrer Quelle que soit leur puissance théorique, les machines informa- ce qu’est un algorithme peut être tiques réelles sont soumises à des celui de la recherche d’un mot dans limitations physiques touchant à la le dictionnaire. Prenons la totalité puissance de calcul, c’est-à-dire le des entrées du dictionnaire en tant nombre d’opérations élémentaires pouvant être effectuées chaque qu’elles forment les données de seconde, ainsi qu’à la mémoire dis- base du problème de trouver, de la ponible, c’est-à-dire la quantité d’in- façon la plus efficace possible (rapi- formations qu’un programme peut dement et sans erreur), la définition avoir à disposition, ou auxquelles il d’un mot donné. Dans cet exemple, peut accéder à tout moment en un temps raisonnable. On peut ainsi l’algorithme désigne la description évaluer le « coût » d’une opération précise des opérations simples à informatique ou d’un calcul, au sens accomplir (séquentiellement) pour large, par le temps et la mémoire trouver, de façon optimale, le résul- que nécessite son exécution. Une tat souhaité : on regarde la première part importante de la recherche en algorithmique consiste à élaborer 6
DIGITALISATION ET SOCIÉTÉ : CONCEPTS ET ENJEUX CRITIQUES des algorithmes de plus en plus ef- ser l’attention qu’un client fournira à ficaces, c’est-à-dire ayant un « coût mon produit ? », « comment orga- » le plus faible possible. Il apparaît niser l’information disponible pour souvent qu’un effort d’analyse im- portant au moment de la conception maximiser le vote pour tel candi- permet de mettre au point des algo- dat ? », etc. Ces problématiques rithmes extrêmement puissants vis-à- peuvent être l’objet d’un travail al- vis des applications, avec des gains gorithmique qui, sur base d’une de temps exceptionnels.6 collecte massive de données nu- On peut donc dire que la puissance mériques (soit des fragments de des algorithmes repose sur la qua- réel compilés sous la forme d’in- lité de la formulation logique de la formations numériques), va ten- structure d’opérations qu’ils traitent, ter de fournir automatiquement de la quantité de données qu’ils sont la meilleure solution au problème en mesure de mobiliser et du faible posé : par exemple (simplifié), en « coût » qu’ils représentent, au sens comparant systématiquement le précédemment défini. nombre d’occurrences d’éléments de langage (mots-clés, signes, Un algorithme est donc une sé- gestes, images, symboles, thèmes, quence d’opérations visant à per- etc.) avec le nombre d’interactions mettre la résolution systématique positives que ces occurrences des problèmes qu’il décrit. Nul be- génèrent (« like », « partages », soin d’entrer dans la complexité des « clics », temps d’attention, etc.) et multiples algorithmes existant au- en fournissant, comme solution, jourd’hui : dans notre perspective, il les éléments de langage les plus à est plus intéressant et suffisant de même de « séduire » telle assem- montrer que l’automatisation que blée d’auditeurs/téléspectateurs/ suppose l’algorithme conditionne la etc. ayant notifié en ligne qu’ils par- façon dont on pose, à l’ère de la digi- ticiperaient à tel meeting politique. talisation, les problèmes à résoudre. L’idée sous-jacente étant que plus La problématique est particulière- la quantité de données disponibles ment importante dans la mesure où, est grande, plus la pertinence de aujourd’hui, l’usage des algorithmes la solution trouvée par l’algorithme touche très fréquemment à la ré- (dont la performance est aujourd’hui solution de problématiques socié- telle qu’il sera en mesure d’optimiser tales. Prenons quelques exemples la solution qu’il propose en fonction simples : on peut faire un usage d’al- des solutions précédentes qu’il avait gorithmes pour résoudre des pro- déjà rendues possibles, soit d’amé- blèmes du type « comment rentabi- liorer per se la qualité de sa propre liser maximalement le processus de méthode de traitement) est forte. production de tel produit dans mon Sociétalement, cela signifie qu’il im- entreprise ? », « comment maximi porte de maximiser la capacité hu- 6 FLAJOLET, P., PARIZOT, É., « Qu’est-ce qu’un algorithme ? », sur interstices.info, mis en ligne le 24/02/2004. URL : https://interstices.info/quest-ce-quun-algorithme/ UNE PUBLICATION ARC - ACTION ET RECHERCHE CULTURELLES 7
DIGITALISATION ET SOCIÉTÉ : CONCEPTS ET ENJEUX CRITIQUES maine à capter des données sous un format numérique (digitalisation), d’améliorer systématiquement nos capacités de traitement et de stoc- kage de ces données (innovation informatique) et de penser la façon la plus optimale d’utiliser ces don- nées et cette capacité de traitement pour fournir des réponses adaptées aux problèmes que l’on se pose (al- gorithmique). En des termes plus simples, il s’agit d’une concentration sociétale très forte sur deux opéra- tions que l’on sait être aujourd’hui in- contournables : contrôler et anticiper. Ainsi, les problèmes dont la position est « autorisée » sont ceux dont la solution peut être anticipée en termes d’optimisation et d’efficacité sur base du contrôle permettant de capter le plus grand nombre pos- sible de données pertinentes. 8
DIGITALISATION ET SOCIÉTÉ : CONCEPTS ET ENJEUX CRITIQUES DU TRANSCODAGE AU BIG DATA sont décrits, dans les mots de Sadin, comme résultant du mariage en un Du fait même de la fonction de même fleuve de deux confluents traitement propre aux ordinateurs, venant le système informatique connec- té forme aussi un immense réseau continuellement en nourrir le flux : de machines à enregistrement d’in- Le premier [confluent] renvoie aux formations, suivant – comme nous gestes individuels et collectifs qui se le disions – un principe de « trans- réalisent de façon délibérée (conver- codage » d’informations de toutes sations téléphoniques, transmissions sortes en données numériques bi- de messages, navigations Inter- net, achats via des cartes de crédit, naires, traitables par ces maxi-cal- transactions bancaires, modalités culateurs que sont les ordinateurs. d’imposition, comptes de sécurité L’immense quantité de données sociale,…).9 aujourd’hui enregistrées et trai- Cette première catégorie d’activités tées en continu forme le résultat génératrices de données numé- de cet immense chantier d’enre- riques concerne en général des ac- gistrement qu’incarne la bien nom- tivités pour lesquelles des sociétés mée digitalisation contemporaine. – publiques et privées – proposent À titre d’exemple, si l’on veut se fi- des services numériques que les in- gurer la quantité de données que dividus sont amenés à utiliser, sou- peut représenter aujourd’hui l’acti- vent par choix délibéré, même s’il y a vité numérique mondiale, on peut d’importantes ambiguïtés quant à la se référer à l’illustration « Internet nature de cette liberté de choix (ces minute » publiée par World Econo- services peuvent par exemple être mic Forum et Visual Capitalist7, qui imposés par les pouvoirs publics, ou montre la quantité d’activités que former, à grand renfort de stratégies peut représenter, en particulier via de marketing, des intermédiaires les grandes plateformes privées indispensables à de nombreuses du web, une minute sur internet en fonctions sociales dont les individus 2018 : sachant que chacune de ces n’ont pas envie d’être dépossédés). activités est enregistrée sous forme Elles correspondent donc, en prin- de données et de métadonnées8, cipe, au niveau de transcodage en on peut aisément imaginer l’éten- données où les personnes ont le due colossale des informations pro- plus de marge de manœuvre pour duites par cet enregistrement digital choisir ce qu’ils acceptent de « dig- continu. Ces« océans » de données 7 Disponible en ligne sur https://www.weforum.org/agenda/2018/05/what-happens-in-an-in- ternet-minute-in-2018 (consulté le 06/03/2019). 8 La métadonnée est une donnée servant à décrire une autre donnée (par exemple, l’heure de son enregistrement, le temps nécessaire à son traitement, son format numérique, etc.) 9 SADIN, E., Op.Cit., p.23. UNE PUBLICATION ARC - ACTION ET RECHERCHE CULTURELLES 9
DIGITALISATION ET SOCIÉTÉ : CONCEPTS ET ENJEUX CRITIQUES taliser » ou non10. à travers le prisme du système in- formatique, de plus en plus intégral À cette production « active » de et global : celle d’une rationalisation données est aussi associée toute du monde et de son fonctionne- une capture « passive » de données ment par le numérique dans le but qui repose, en règle générale, sur la de l’inscrire dans un processus d’au- multiplication des capteurs qu’on to-adaptation continue en fonction associe à de plus en plus d’élé- de l’hyperréactivité des multiples ments de notre réalité quotidienne. capteurs capables de suggérer/ Le second [confluent] concerne les imposer algorithmiquement des ré- procédés « passifs », généralement actions « adaptées » à toutes les va- imperceptibles, qui enregistrent toutes sortes d’informations et té- riations du réel. Cela signifie poten- moignent de multiples états de la ré- tiellement que dans ce processus alité : trajets des personnes, images qu’on nomme « digitalisation », la de vidéosurveillance, physiologie réaction à adopter face à la diversité des corps via des bracelets connec- des situations que nous rencontrons tés, indications relatives aux condi- tions météorologiques, à la qualité appartiendra de moins en moins au de l’air, au trafic routier…11 libre arbitre de l’être humain et de plus en plus à l’optimalité de l’al- Cette deuxième forme d’enregis- gorithmique qui, sur les océans de trement du réel sous format numé- « data » aujourd’hui nommés « Big rique correspond à la forme à la fois Data », fournira automatiquement la plus insidieuse et la plus profonde les « solutions » aux problèmes de digitalisation : la transformation rencontrés au quotidien. Bien en- de plus en plus étendue (la visée tendu, les choix personnels sont est officiellement celle de la capture déjà visés par ce « solutionnisme » intégrale) du monde et de ce qui algorithmique : on imagine déjà des le compose en fonctions de calcul modèles numériques qui décide- numérique, mais sans que les algo- ront, à la place des individus, ce qui rithmes qui traitent ces données ne doit être fait chaque jour. On ima- puissent être l’objet d’une discus- gine surtout ces modèles comme sion, d’une délibération politique. des capacités privatisables et, de En effet, ce traitement de données fait, privatisées : ce système infor- ne nécessite aucun consentement, matique-algorithmique-digitalisa- les capteurs étant presque systé- tion n’est déjà plus (voire n’a jamais matiquement automatisés. Il y a ici, été) un bien commun appartenant à beaucoup plus radicalement encore chaque Homme, mais l’un des sys- que dans le premier « confluent », tèmes dont les acteurs qui le do- une vision de société qui se dessine minent se comptent sur les doigts 10 On parle bien de « marge de manœuvre » tant on sait qu’entre ce qui est « consenti » et ce qui est effectivement transcodé et enregistré existe un important différentiel. Bien plus, les utilisa- teurs n’ont aucune prise sur ce qui est produit sur base de ces données primaires. 11 SADIN, E., Op.Cit., p.23. 10
DIGITALISATION ET SOCIÉTÉ : CONCEPTS ET ENJEUX CRITIQUES d’une main. On revient ici à la ques- exclusive sur leurs effets et vers tion de la façon dont la digitalisation l’ajustement de nos choix, actes et structure les problèmes à résoudre. logiques sur la mesure et le calcul Dans la mesure où la manière dont de ces mêmes effets. L’ère digitale, le problème est formulé doit per- bien qu’on ne puisse affirmer qu’elle mettre d’aboutir à une solution à soit seule responsable de ce chan- travers une séquence algorithmique gement, contribue fondamentale- établie suivant des critères d’effica- ment à cette nouvelle polarisation cité et optimisation, c’est finalement sociétale dont le motif – la colonne la capacité même de problématiser vertébrale – repose sur un gouver- le monde – de choisir, individuelle- nement des effets, c’est-à-dire sur ment et collectivement, ce qui dans une forme de pouvoir qui agit sur monde fait problème –, qui risque à les effets que produisent les dis- terme d’être aliénée. positifs mis en place. Pour mieux comprendre ceci, on peut se référer CONCLUSION : à une thèse de Giorgio Agamben. LA POLITIQUE DES Il relevait, lors de sa conférence SOCIÉTÉS DIGITALI- de 2013 intitulée « Pour une théo- rie du pouvoir destituant », que SÉES cette convergence de la gouver- nementalité vers la gestion des ef- Nous avons pu voir que le renfor- fets était l’une des reconfigurations cement de l’intervention du système politiques les plus importantes de informatique dans notre quotidien ces dernières décennies. C’est ce suppose la mobilisation d’un cer- qu’il désigne comme le théorème tain nombre de concepts qui, bien de gouvernementalité de Quesnay, qu’ils semblent être purement tech- c’est-à-dire l’idée de renverser le niques, sont porteurs de logiques processus d’action du pouvoir : en qui, plus que de fournir une repré- prenant l’exemple de la famine, l’ap- sentation du monde, contribuent proche de ce théorème dirait qu’il largement à produire le monde. Dans n’est ni possible ni utile de prévenir le paradigme sociétal qui s’impose la famine, mais qu’en revanche le à travers la digitalisation, c’est à un bon gouvernement doit la laisser monde qui doit toujours davantage arriver et se rendre capable de la être numérisable, transcodable, op- gouverner une fois qu’elle est appa- timisable, que nous faisons face : rue. Plus que d’être l’un des motifs tous les problèmes qui s’y posent y classiques du libéralisme moderne, sont systématiquement envisagés à cela change toute la conception travers le prisme de leur « solution » classique du pouvoir : potentielle. On passe ainsi d’une Cela signifie une transformation his- logique d’analyse qui pourrait se torique de l’idée même de gouver- concentrer sur les causes des phé- nement, qui renverse la relation hié- nomènes vers une concentration rarchique traditionnelle entre causes UNE PUBLICATION ARC - ACTION ET RECHERCHE CULTURELLES 11
DIGITALISATION ET SOCIÉTÉ : CONCEPTS ET ENJEUX CRITIQUES et effets. Étant donné que la gestion œuvre de ce programme politique des causes est difficile et coûteuse, sous une forme technologique »15. il est plus sûr et utile d’essayer de contrôler les effets. […] L’Ancien Ré- Notre courte analyse des gime visait à gouverner les causes, quelques concepts spécifiques au la modernité prétend en contrôler les effets. Et cet axiome s’applique à « champ numérique » nous a fait tous les domaines : de l’économie à voir combien, dès lors que toutes les l’écologie, de la politique étrangère structures de la société tendent à se et militaire aux mesures internes de digitaliser, l’exigence d’efficacité et la police. Nous devons comprendre le culte de l’optimisation devenaient que les gouvernements européens ont aujourd’hui renoncé à toute ten- les données premières des poli- tative de règlement des causes, ils tiques censées réguler ces mêmes veulent seulement en régir les effets. structures. En focalisant l’attention Et le théorème de Quesnay rend éga- sur un « gouvernement des effets », lement compréhensible un fait qui la régulation par les algorithmes semble par ailleurs inexplicable : je parle de la convergence paradoxale renvoie à l’idée de devoir toujours d’un paradigme absolument libéral viser l’obtention du « résultat le plus dans l’économie, avec un paradigme efficace », tout en affirmant (non sans précédent et tout aussi absolu sans idéologie) que, grâce à l’enre- de contrôle étatique et policier. Si le gistrement et au traitement simul- gouvernement vise les effets et non les causes, il sera obligé d’étendre tanés des données captées sur l’in- et de multiplier les contrôles. Les tégralité du réel, notre système ne causes demandent à être connues, cessera de s’adapter « au mieux » tandis que les effets ne peuvent être à ce même réel et à sa régulation. que vérifiés et contrôlés.12 Selon Morozov, c’est de cette fa- Dans son livre Le mirage numé- çon que s’expose le principe fonda- rique. Pour une politique du Big Data, mentalement politique de la révolu- Evgeny Morozov avance que la po- tion numérique, qu’il nomme après litique menée par la Silicon Valley, d’autres « principe d’ultrastabilité », haut lieu de l’oligopole dirigeante c’est-à-dire un principe de régula- dans le domaine digital (les GAFAM13 tion « qui permet à un système de et quelques autres opérateurs), cor- rester stable tout en apprenant et respond directement à cette reconfi- en s’adaptant constamment à des guration de la logique du pouvoir14. circonstances changeantes »16. En Selon ses propres termes, « la régu- effet, ce que la digitalisation promet lation algorithmique est la mise en à la société, c’est de devenir un jour 12 AGAMBEN, G., « For a theory of destituent power », conférence à Athènes le 16/11/2013, publiée en ligne sur chronomageu.eu. URL : http://www.chronosmag.eu/index.php/g-agamben- for-a-theory-of-destituent-power.html (consulté le 07/03/2019). Notre traduction. 13 Soit Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft. 14 MOROZOV, E., Le mirage numérique. Pour une politique du Big Data, Paris, Éditions Amsterdam (coll. « Les prairies ordinaires »), 2015. Voir pp. 118-119. 15 Ibid., p.118. 16 Ibid., p.115. 12
DIGITALISATION ET SOCIÉTÉ : CONCEPTS ET ENJEUX CRITIQUES capable de mesurer en permanence aux effets anticipables et anticipés et en temps réel ce qui se passe de nos choix et des événements, en son sein (grâce au feedback de mêmes imprévisibles. Même si l’on données d’utilisateurs qui peuvent, croyait sérieusement que ce mou- n’importe quand, donner leur avis vement aboutisse effectivement à sur quelque chose et, en parallèle, une stabilisation du réel, il est clair grâce au feedback des mesures que ce qu’il empêcherait par là passives que réalisent les milliers de même est que le réel – ses causes capteurs qui, à longueur de temps, – soit critiqué et transformé. alimentent les océans de données On comprend bien-sûr que cette permettant aux algorithmes de vision de société comporte des biais fournir « la meilleure solution pos- très importants : elle ne demeure sible »), et par-là permettre une in- pertinente que tant qu’on maintient tervention politique toujours « fon- l’efficacité comme seul critère d’éva- dée sur les faits » et « axée sur les luation. Par exemple, appliquée à résultats ». La digitalisation désigne la question de la santé, cette vision donc, bien plus qu’une adapta- induit une obsession pour la pré- tion sociétale aux nouvelles tech- vention des risques. Pour ne pas nologies numériques, une trans- être malade, la meilleure solution formation de l’idéologie politique serait d’éviter ce qui rend malade néolibérale : Morozov l’exprime en et pour ce faire, il faudrait mesurer termes de « solutionnisme », soit à tout moment, grâce à de multiples l’idée pourtant simpliste qu’à tous capteurs, les effets de nos compor- les problèmes qui se posent, il y a tements sur notre santé. Cette ana- une solution et qu’il faut seulement lyse continue, prise dans le calcul optimiser nos calculs pour trouver algorithmique, nous permettra de automatiquement et systématique- recevoir une alerte sur les risques ment la « solution la plus efficace » encourus (« vous roulez trop vite », - ce qui constitue la manière la plus « vous êtes en train de fumer », efficace de ne pas poser la question « votre cœur bat trop vite », « votre de savoir quels sont les problèmes glycémie monte trop haut », « vous dont la position est politiquement avez regardé votre écran pendant pertinente et comment ils méritent plus de deux heures sans pause », d’être posés. Ce principe politique « vous écoutez la musique trop est derrière tout le mouvement fort », etc. ad nauseam). Dans une d’encouragement à la digitalisa- perspective plus dure, on pourrait tion : augmenter notre capacité à passer de cette régulation théo- transcoder le monde en données rique du comportement par des no- numériques binaires, « optimiser » tifications (alertes) à une régulation nos algorithmes pour les rendre plus directe (prise de contrôle de la plus efficaces, assurer l’ultrastabilité voiture à distance en cas de dan- de notre système en le rendant ca- ger, désactivation de fonctionnali- pable de s’adapter continuellement UNE PUBLICATION ARC - ACTION ET RECHERCHE CULTURELLES 13
DIGITALISATION ET SOCIÉTÉ : CONCEPTS ET ENJEUX CRITIQUES tés du téléphone quand quelqu’un sur ses effets) puissent y trouver une conduit, ou encore l’imposition de place quelconque : l’injustice, les conditions d’accès aux protections tensions culturelles, la subjectivité sociales, comme l’avait proposé un et les ambivalences existentielles, think tank anglais en recommandant les ambivalences idéologiques, les « de conditionner les allocations perspectives émancipatoires, tout logement à la fréquentation des ça est et demeure proprement non salles de gym »17). L’évaluation et le transcodable. D’un point de vue contrôle permanent des « modes de bien plus politique, en restant dans vies » en regard de normes socié- l’exemple du domaine de la santé, tales imposées par ceux qui paient la l’approche digitale ne pourrait que programmation de ces algorithmes manquer la responsabilité de l’in- deviennent l’horizon de la gouver- dustrie agro-alimentaire et de ses nementalité digitalisée, laissant par modes de production sur la faible ailleurs complètement tomber les qualité, par exemple, des nutri- valeurs propres à la problématisa- ments : en d’autres termes, elle invi- tion politique du réel. On peut, par sibilisera toujours totalement le fait exemple, s’accorder sur l’idée que que les comportements et les faits la sécurité, l’éducation, la démo- mesurables prennent, en réalité, cratie culturelle sont des résultats place dans une économie politique, désirés pour la société, mais ce que dans une culture, dans une histoire. manquerait l’approche digitale, c’est Face à cette inclusion indéfinie de que toute la question politique se l’existence humaine et du réel tout joue dans l’accord des individus sur entier dans des flux numériques, il « comment » atteindre ces résultats, n’y a certes pas lieu d’opposer une et non sur la qualité du résultat lui- technophobie idiote, teintée de l’an- même. En effet, même si l’on dispo- gélisme d’une ère pré-numérique sait, grâce à toutes les données du (« c’était mieux avant les ordina- monde et à de supers algorithmes, teurs »). Au contraire, ce que montre d’une cartographie intégrale et l’analyse des concepts ici mobili- complète du réel tel qu’il peut être sés, c’est que l’opération de trans- mesuré maintenant, cela ne per- codage de logiques politiques en mettrait que de formuler les « solu- logiques numériques est le fait de tions les plus efficaces » en fonction choix et d’idéologies portés par des de l’état présent du monde, sans acteurs identifiables, qui mobilisent qu’à aucun moment les problèmes énormément d’énergie à présenter qui demeurent insolvables numé- la « digitalisation » comme un bou- riquement (parce qu’ils supposent leversement naturel et inévitable de entre autres une transformation des l’histoire humaine. La technologie, causes de l’état présent du monde par définition riche d’importants po- et non seulement une intervention 17 Exemple rapporté par Morozov, voir Ibid., p.119. 14
DIGITALISATION ET SOCIÉTÉ : CONCEPTS ET ENJEUX CRITIQUES tentiels sociaux et d’ouvertures sur tique, juridique et citoyenne qui doit des types d’agencements créatifs émerger, ne consistant pas à réagir sur le moment à des révélations ou à nouveaux, doit plutôt être comprise, des événements marquants, mais à appropriée et – au besoin – détour- saisir la puissance d’intelligibilité du née dans ses usages. Nous rejoi- réel permise par le traitement com- gnons ici la position défendue par putationnel ainsi que l’étendue de Sadin lorsqu’il dit qu’il ses possibles effets.19 convient de marquer une distance, Ce travail, en Belgique du moins, d’être capable de saisir, au-delà de ne nous semble réalisable que par la vitesse et de la profondeur d’im- deux secteurs : le scolaire et l’asso- prégnation des technologies, la na- ciatif. C’est précisément l’ambition ture des structures qui se mettent en place. Il devrait revenir au pouvoir de cette analyse : proposer les élé- politique d’établir des cadres d’éva- ments nécessaires à poser la ques- luation et de décision non soumis à tion de la nécessité et de l’urgence la séduction ou au vertige des inno- vations et des discours.18 d’un tel chantier. Nous avons voulu ici exposer le squelette conceptuel permettant de Nicolas Marion, Chargé de recherche à l’ARC asbl saisir en quoi le digital est intrinsè- quement lié à une vision de société. Ce qui nous semble fondamental n’est pas de dire que la politique doit sortir de son « vertige » digital. Au contraire, il convient de mesurer et d’assumer que, d’emblée et de- puis l’origine, le numérique est de facto politique. Et que ce n’est pas à travers le prisme du vocabulaire technico-technologique qu’il faut appréhender l’évolution sociétale contemporaine désignée par le terme « digitalisation », mais bien directement à travers le prisme po- litique : de quel type de société di- gitale voulons-nous ? Voulons-nous confier nos modes de gouvernance à des logiques algorithmiques ? Pensons-nous que l’efficacité est la valeur première de nos sociétés ? C’est une nouvelle conscience poli- 18 SADIN, E., Op.Cit., p.224. 19 Ibid., p.226. UNE PUBLICATION ARC - ACTION ET RECHERCHE CULTURELLES 15
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Analyse 2019 L’ARC – Action et Recherche Culturelles asbl – s’est donné pour mis- sion de contribuer à la lutte contre les inégalités et d’oeuvrer à la pro- motion et à la défense des droits culturels. À travers notre travail d’éducation permanente, nous entendons par- ticiper à la construction d’une société plus humaine, démocratique, solidaire et conviviale. Offrir à notre public les outils de son éman- cipation, permettre à chacun de gagner en autonomie et en esprit critique, inviter tout un chacun à prendre une part active à la société sont autant de défis que nous tentons, avec d’autres, de relever. Ce travail passe par des projets et animations développés sur le ter- rain, mais aussi par des publications qui proposent une analyse des enjeux, une sensibilisation à certains facteurs d’exclusion, un encou- ragement à l’engagement citoyen, des clés de compréhension. Vous souhaitez contribuer à nos débats et enrichir nos réflexions ? Contactez-nous par mail : recherche@arc-culture.be Editeur responsable : Jean-Michel DEFAWE | ARC asbl - rue de l’Association 20 à 1000 Bruxelles Toutes nos analyses sont diponibles en ligne sur www.arc-culture.be/analyses
02 Analyse 2019 «Ce qui nous semble fondamental n’est pas de dire que la poli- tique doit sortir de son « vertige » digital. Au contraire, il convient de mesurer et d’assumer que, d’emblée et depuis l’origine, le nu- mérique est de facto politique. Et que ce n’est pas au à travers le prisme du vocabulaire technico-technologique qu’il faut appré- hender l’évolution sociétale contemporaine désignée par le terme « digitalisation », mais bien directement à travers le prisme poli- tique : de quel type de société digitale voulons-nous ?»
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