Droit bancaire et financier - Doctrine
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Droit bancaire et financier Doctrine La Directive sur le crédit hypothécaire 2014/17/EU portant sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel Jean-Pierre BUYLE1 Avocat au barreau de Bruxelles Pierre PROESMANS2 Avocat au barreau de Bruxelles ........................................................................................................................................................................................... ...................................................................................................................... TABLE DES MATIÈRES Summary Introduction 4 This contribution comments on the mortgage credit Présentation 5 1. Objet, champ d’application et définitions 5 directive 2014/17/EU on credit agreements for con- 2. Obligations incombant aux prêteurs, aux sumers relating to residential immovable property, intermédiaires de crédit et aux représentants désignés 6 adopted by the European Parliament and the Coun- 3. Informations et pratiques précédant la conclusion cil of the European Union on 28 February 2014. d’un contrat de crédit 6 These new regulations have to be transposed by the 4. Prêts en monnaie étrangère et taux d’intérêt variable 9 5. L’exécution des contrats de crédits 9 Member States by March 2016. The Directive intro- 6. Exigences applicables à l’établissement et à la duces two major elements which will require the in- surveillance des intermédiaires de crédit 10 depth adaptation of certain legislation and the IT ap- 7. Coopération entre les autorités nationales 10 plications used by mortgage companies: the annual 8. Dispositions finales 11 percentage rate of charge and the European stan- Conclusion 11 dardised information sheet. ...................................................................................................................... Introduction Résumé 1. La Directive de l'Union européenne relative au cré- La présente contribution commente la directive sur dit résidentiel vise à créer un marché du crédit hypo- le crédit hypothécaire 2014/17/Eu portant sur les thécaire à l’échelle de l’Union avec un niveau élevé contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux de protection des consommateurs. Elle est issue d’un biens immobiliers à usage résidentiel adoptée par le long processus de réflexion. Parlement européen et le Conseil européen le 28 fé- vrier 2014. Dès mars 2001, la Commission européenne a adopté Cette nouvelle réglementation doit être transposée une recommandation définissant des lignes direc- par les Etats membres d’ici mars 2016. La Directive trices relatives à l’harmonisation de l’information à introduit deux éléments importants qui nécessite- fournir aux consommateurs en matière de prêts au lo- ront une adaptation profonde de certaines législa- gement. Ces lignes directrices visaient à faciliter la tions et les applications informatiques des entre- comparaison des possibilités d’emprunts proposées prises hypothécaires: le taux annuel effectif global et par les différents prêteurs présents sur le marché, y l’affiche d’information standardisée européenne. compris les prêteurs d’un autre État membre, de ma- nière à permettre aux consommateurs d’opérer un choix en connaissance de cause. Les lignes directrices .............................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................. 1. L’auteur peut être contacté à l’adresse jpbuyle@buylelegal.eu. 2. L’auteur peut être contacté à l’adresse pproesmans@buylelegal.eu. 4 – R.L.B. 2014/4 Revue luxembourgeoise de bancassurfinance – Kluwer
Doctrine intégrées à la recommandation avaient été convenues plus transparent, efficace et compétitif grâce à des entre le secteur du crédit hypothécaire et les associa- contrats de crédit cohérents, flexibles et équitables re- tions de consommateurs et prenaient la forme d’un latifs aux biens immobiliers, tout en encourageant la code de conduite volontaire. Ce code, toujours en vi- viabilité des prêts et des emprunts, le tout dans une gueur, comprend à la fois un volet relatif à l’informa- optique de protection des consommateurs. tion générale et un volet relatif à l’information indivi- duelle au moyen d’une fiche européenne d’informa- Dans cette perspective, le législateur a mis l’accent sur: tion standardisée ou ESIS (European Standardised – les règles de conduite applicables aux prêteurs et Information Sheet). aux intermédiaires de crédit, plus particulièrement au cours de la phase précontractuelle; En mars 2003, la Commission a entrepris de recenser – une obligation d’évaluation de la solvabilité du les obstacles au marché intérieur des contrats de cré- consommateur; dit relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel – les exigences en matière de connaissance et de et d’en analyser leur impact. compétences du personnel des prêteurs et intermé- diaires de crédit; En 2007, elle a adopté un livre blanc sur l’intégration – le passeport pour les intermédiaires de crédit qui du marché européen du crédit hypothécaire. Elle y remplissent les conditions d’admission dans l’Etat annonçait son intention de soumettre à des analyses membre d’origine. d’impact notamment les options envisagées en ma- tière d’information précontractuelle, de bases de don- Les États membres doivent transposer ces dispositions nées sur le crédit, d’évaluation et de solvabilité, de dans leur droit national d’ici mars 2016. taux annuel effectif global et de conseil. En juin 20083, la Directive 2008/48/UE “on credit agreements for consumers” visant à harmoniser les ré- Présentation glementations nationales relatives aux contrats de cré- dits à la consommation, connue sous son abréviation 1. Objet, champ d’application et définitions CCD, du 23 avril 2008 entrait en vigueur4. 2. La Directive sur le crédit hypothécaire a pour am- bition de créer un cadre légal et réglementaire com- Eu égard aux problèmes révélés par la crise financière, mun pour les contrats de crédit garantis par une hypo- et en vue de garantir le bon fonctionnement et le ca- thèque ou une autre sûreté comparable communément ractère concurrentiel du marché intérieur, la Commis- utilisée sur les biens immobiliers à usage résidentiel7 sion a proposé, dans sa communication du ou par un droit lié à un bien immobilier à usage rési- 4 mars 2009 intitulée “l’Europe, moteur de la re- dentiel ainsi qu’aux contrats de crédit destinés à per- lance”5, des mesures visant à garantir à l’avenir des mettre l’acquisition ou le maintien de droits de pro- marchés fiables et responsables et de restaurer la priété sur un terrain ou un immeuble existant ou à confiance chez les consommateurs. construire8 9. Le 31 mars 2011, la Commission publiait une proposi- Le législateur européen a arrêté des dispositions à tion de directive relative aux contrats de crédit au lo- harmoniser au maximum, notamment en ce qui gement, qui, après de longues discussions avec le Par- concerne la communication d’informations précon- lement européen et le Conseil européen, a finalement tractuelles. Compte tenu de la spécificité des contrats abouti, le 28 février 2014, à la publication de la direc- de crédit relatifs aux biens immobiliers, la Directive tive 2014/17/UE6. n’empêche toutefois pas les États membres de mainte- nir ou d’adopter des dispositions plus strictes visant à Outre le renforcement du marché intérieur par la pro- protéger les consommateurs pour autant qu’elles motion des activités transfrontières, le législateur eu- soient compatibles en vertu du droit de l’Union euro- ropéen a entendu restaurer la confiance dans le sec- péenne. teur financier fortement érodée à la suite de la crise. La directive ambitionne d’établir un marché intérieur .............................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................. 3. J.O., 22 mai 2008, L133, p. 66. 4. En vertu de l'article 27 de la Directive, les États membres adoptent et publient avant le 12 mai 2010 les dispositions nécessaires pour se conformer à la présente directive. Ils en informent immédiatement la Commission. Ils appliquent ces dispositions avant le 12 mai 2010. 5. Communication au Conseil européen de printemps du 4 mars 2009 intitulée “l’Europe, moteur de la relance – Volume 1” [COM(2009) 114 final – Non publié au Journal officiel. 6. J.O., 28 février 2014, L62, p. 34. 7. Le mandat hypothécaire et la promesse d’hypothéquer sont concernés. 8. A noter qu’il n’est pas fait de distinction entre le logement propre, une seconde résidence et un immeuble de rapport. 9. En revanche, la Directive ne s’applique notamment pas à certains contrats de crédit sous forme d’hypothèque rechargeable, aux contrats de crédit qui sont accordés par un employeur à ses salariés à titre accessoire, sans intérêt ou à un TAEG inférieur à celui pratiqué sur le marché, et qui ne sont pas proposés au public en général, aux contrats de crédit au titre desquels le crédit est accordé sans intérêts et sans autres frais que ceux couvrant les coûts directement liés à la garantie du crédit ou encore aux contrats de crédit accordés sous la forme d’une facilité de découvert, remboursable dans un délai d’un mois. Kluwer – Revue luxembourgeoise de bancassurfinance R.L.B. 2014/4 – 5
Droit bancaire et financier Il est également prévu que les États membres pro- octroyer des contrats de crédit au logement. La même meuvent des mesures encourageant l’éducation des obligation vaut pour les services auxiliaires, comme consommateurs en matière d’emprunt responsable et les assurances et les placements, en rapport avec le de gestion de l’endettement, en particulier en ce qui contrat de crédit. concerne les contrats de crédit hypothécaire. Le de- voir d’éducation financière à charge des profession- Les États membres établissent ces exigences mini- nels est de plus en plus présent dans la réglementa- males de connaissances et de compétences conformé- tion financière. ment à l’annexe III de la Directive (connaissance suf- fisante des formules de crédit, connaissance suffisante La Directive prévoit 28 définitions, dont celle du de la législation relative aux contrats de crédit à la consommateur. consommation, en particulier la protection des consommateurs, connaissance et compréhension des L’article 4.1. définit celui-ci comme tout consomma- procédures d’achat de biens immobiliers…). teur au sens de l’article 3, point a), de la Directive 2008/48/CE, soit toute personne physique qui, pour Les autorités compétentes doivent surveiller le respect les transactions régies par la présente directive, agit de ces exigences et être habilitées à en exiger la preuve dans un but étranger à son activité commerciale ou de la part des prêteurs. professionnelle. Lorsque le service est fourni dans un autre Etat 2. Obligations incombant aux prêteurs, aux membre, l’état d’origine établit des exigences mini- intermédiaires de crédit et aux représentants males relatives au niveau de connaissances et de com- désignés pétences du personnel des prêteurs, intermédiaires de crédit et représentants désignés, actifs sur le territoire 3. a) Règles de conduite pour la fourniture de crédits d’un autre Etat membre. aux consommateurs (articles 7 et suivants). 3. Informations et pratiques précédant la Les États membres veillent à ce que les prêteurs et les conclusion d’un contrat de crédit intermédiaires agissent de manière honnête, équi- table, transparente et professionnelle, en tenant 5. a) Dispositions générales applicables à la commu- compte des droits et des intérêts des consommateurs. nication commerciale et publicitaire (article 10). Ceux-ci ont l’obligation de s’informer sur la situation du consommateur et d’évaluer les risques pouvant Outre les exigences imposées par la Directive relative survenir au cours de la durée du contrat de crédit. aux pratiques commerciales déloyales, les États membres exigent que toute communication publici- La manière dont les prêteurs rémunèrent leur person- taire et commerciale relative aux contrats de crédit soit nel et les intermédiaires de crédit ne doit pas porter loyale, claire et non trompeuse et qu’elle ne fasse pas atteinte à la bonne exécution de ces obligations. On naître chez le consommateur de fausses attentes pense notamment aux pratiques de vente abusive ou concernant la disponibilité ou le coût du crédit. aux politiques de rémunération qui encourageraient à conclure un certain nombre ou type de contrats de 6. b) Informations de base à inclure dans la publicité crédit et à offrir aux consommateurs des services au- (article 11). xiliaires, sans tenir dûment compte des intérêts et des besoins de ceux-ci. Toute publicité relative à un contrat de crédit doit mentionner certaines informations de base faciles à Il est également prévu que les États membres peuvent lire ou, le cas échéant, clairement audibles au titre interdire ou imposer des limitations quant aux paie- desquelles on retrouve notamment l’identité du prê- ments versés par un consommateur à un prêteur ou à teur, le taux débiteur, en précisant s’il est fixe ou va- un intermédiaire de crédit avant la conclusion d’un riable, le montant total du crédit ou encore le taux an- contrat de crédit. nuel effectif global (le “TAEG”)10 qui doit figurer sur la publicité au moins aussi visiblement que tout taux 4. b) Connaissances et compétences du personnel (ar- d’intérêt. ticle 9). Certaines de ces informations doivent être mention- Les États membres s’assurent que les prêteurs et inter- nées à l’aide d’un exemple représentatif. médiaires de crédit exigent de leur personnel de pos- séder et de maintenir un niveau de connaissances et Lorsque la conclusion d’un contrat portant sur un ser- de compétences approprié pour élaborer, proposer ou, vice auxiliaire, notamment une assurance, est obliga- .............................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................. 10. Voir infra n° 11. 6 – R.L.B. 2014/4 Revue luxembourgeoise de bancassurfinance – Kluwer
Doctrine toire pour obtenir le crédit ou pour l’obtenir aux destinations possibles du crédit; les types de taux dé- conditions annoncées, et que le coût de ce service ne biteurs proposés, en précisant s’ils sont fixes et/ou va- peut être déterminé préalablement, l’obligation de riables; un exemple représentatif du montant total du conclure ce contrat est mentionnée de façon claire, crédit, du coût total du crédit pour le consommateur, concise et visible, avec le TAEG. du montant total dû par le consommateur et du TAEG; l’éventail des différentes modalités de remboursement 7. c) Ventes liées et groupées (article 12). possibles, y compris le nombre, la périodicité et le montant des versements réguliers; les conditions di- Alors que la vente groupée est autorisée, le législateur rectement liées à un remboursement anticipé, … européen interdit la vente liée. 9. e) Informations précontractuelles (articles 14 et 16). Toutefois, les États membres peuvent permettre la vente liée si le prêteur peut prouver à son autorité Après s’être enquis de sa situation et de ses besoins, compétente que les produits liés présentent des avan- le prêteur ou l’intermédiaire fournit au consomma- tages évidents pour le consommateur en tenant teur, avant la conclusion du contrat de crédit ou avant compte de la disponibilité et du prix de pareils pro- la soumission de l’offre, une information personnali- duits sur le marché. sée afin de lui permettre de comparer les crédits dis- ponibles sur le marché et de prendre une décision en Les États membres peuvent prévoir que les prêteurs connaissance de cause. puissent demander au consommateur, à un membre de sa famille ou à un de ses proches: Une période d’au moins 7 jours doit être accordée au – d’ouvrir ou de tenir un compte de paiement ou consommateur pour lui permettre de comparer les d’épargne pour assurer le paiement des charges du offres, d’évaluer leurs implications et de prendre une crédit et d’éviter le défaut de paiement; décision en connaissance de cause. Cette période est – d’acquérir ou de conserver un produit d’investis- soit un délai de réflexion avant la conclusion du sement ou un produit de retraite privé si ce pro- contrat de crédit (dans ce cas, l’offre engage le prê- duit procure à l’investisseur un revenu pendant sa teur), soit un délai pour l’exercice d’un droit de rétrac- retraite et servant de garantie complémentaire afin tation après la conclusion dudit contrat, soit enfin une d’éviter le défaut de paiement; combinaison des deux. – de conclure un contrat de crédit distinct en rela- tion avec un contrat de crédit à risque partagé afin Cette information est fournie sur un support papier ou d’obtenir le crédit. sur un autre support durable au moyen de la fiche d’information standardisée européenne (FISE) ou Enfin, les États membres peuvent également autoriser ESIS (European Standardised Information Sheet)11, les prêteurs à exiger du consommateur qu’il souscrive développée à l’annexe II de la Directive12. Les États une police d’assurance appropriée en rapport avec le membres ne peuvent modifier le modèle de FISE à contrat de crédit. Dans ce cas, les États membres l’exception des modalités prévues à l’annexe II, toutes doivent veiller à ce que le prêteur accepte la police les informations complémentaires que le prêteur ou d’assurance d’un prestataire autre que le prestataire l’intermédiaire de crédit souhaite communiquer au préconisé par le prêteur si la police présente un ni- consommateur sont fournies dans un document dis- veau de garantie équivalent. tinct. 8. d) Informations générales (article 13). Les États membres veillent à ce que le prêteur ou le cas échéant l’intermédiaire de crédit fournisse au Les prêteurs, les intermédiaires de crédit liés ou leurs consommateur un exemplaire du projet de contrat de représentants désignés doivent mettre à disposition en crédit au moment de la soumission d’une offre enga- permanence, sur papier, sur un autre support durable geant le prêteur. ou sous forme électronique, des informations géné- rales claires et compréhensibles sur les contrats de Par ailleurs, le prêteur et l’intermédiaire de crédit crédit. doivent fournir au consommateur des explications adéquates relatives au(x) contrat(s) de crédit et aux Ces informations doivent à tout le moins mentionner éventuels services auxiliaires, comme des assurances. 14 éléments énumérés par le législateur parmi lesquels Le consommateur doit être à même de déterminer si figurent notamment l’identité et l’adresse géogra- le produit de crédit proposé est conforme à ses be- phique de la partie qui fournit les informations; les soins et sa situation financière. .............................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................. 11. Comparable aux informations européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs imposées par la Directive 2008/48/CE du Parlement européen concernant les contrats de crédit aux consommateurs, J.O., 22 mai 2008, L 133, p. 66. 12. Le législateur européen renforce ainsi la recommandation de la Commission 2001/193/CE du 1er mars 2011 relative à l’information précontractuelle devant être fournie aux consommateurs par les prêteurs offrant des prêts au logement auxquels les entreprises pouvaient adhérer sur une base volontaire. Kluwer – Revue luxembourgeoise de bancassurfinance R.L.B. 2014/4 – 7
Droit bancaire et financier 10. f) Exigences d’informations applicables aux inter- contrat de crédit restera valable pendant la durée médiaires (article 15). convenue et que le prêteur et le consommateur rem- pliront leurs obligations selon les conditions et aux Avant d’exercer ses activités, l’intermédiaire de crédit dates précisées dans le contrat de crédit. fournit au consommateur sur papier ou un autre sup- port durable les informations relatives à son identité Le TAEG a été mis en place afin de lutter contre les et son adresse, au registre dans lequel il est inscrit, à abus de certains banquiers (taux usuraires). Il vise à la rémunération due par le consommateur pour ses standardiser le mode de calcul du taux d’intérêt d’un services, au fait qu’il soit un intermédiaire lié13 ou non crédit et d’y intégrer la totalité des frais annexes afin lié, etc… de permettre la comparaison par le consommateur des différents crédits proposés par différentes banques. Les intermédiaires non liés fournissent sur demande Bien qu’il vise à renforcer et à améliorer l’information du consommateur les informations relatives aux com- reçue par le consommateur, il complexifie fortement missions payables par les différents prêteurs avec les- la rédaction et la lisibilité des contrats de crédit. quels ils entretiennent des relations commerciales. S’ils facturent au consommateur certains frais, ils lui 12. h) Examen de la solvabilité de l’emprunteur et ex- indiquent si la commission sera ou non déduite, en pertise du bien immobilier (articles 18,19, 20 et 21). partie ou intégralement des frais. Le prêteur doit procéder, avant la conclusion du L’intermédiaire de crédit communique au prêteur les contrat de crédit, à une évaluation rigoureuse de la frais dus par le consommateur aux fins de calculer le solvabilité du consommateur. Cette évaluation ne se TAEG. fonde pas essentiellement sur le rapport entre le mon- tant du crédit et la valeur de l’immeuble. Elle s’effec- 11. g) Calcul du TAEG (article 17). tue sur la base d’informations nécessaires, suffisantes et proportionnelles relatives aux revenus et dépenses Le taux annuel est l’indicateur permettant de compa- du consommateur ainsi que d’autres critères écono- rer les différents produits de crédit hypothécaire. Il miques et financiers. est comparable à celui prévu par la Directive 2008/ 48/CE relative aux crédits à la consommation. Ces informations sont obtenues par le prêteur auprès de sources internes (consommateur) ou externes per- Le TAEG est défini comme “le coût total du crédit pour tinentes (intermédiaire de crédit). Ces informations le consommateur, exprimé en pourcentage annuel du sont vérifiées de façon appropriée en se référant à des montant total du crédit, en tenant compte le cas documents vérifiables de manière indépendante. L’in- échéant des frais visés à l’article 17, paragraphe 214, termédiaire de crédit y contribue largement. et qui correspond sur une base annuelle, à la valeur actualisée de l’ensemble des engagements (prélève- Les prêteurs précisent quelles informations utiles et ments, remboursements et frais) existants ou futurs quelles pièces justificatives le consommateur doit convenus par le prêteur et le consommateur” (ar- fournir et dans quel délai. Le prêteur peut demander ticle 4.15). des précisions à ce sujet. Par ailleurs, le coût total du crédit pour le consomma- Le contrat de crédit pourra être résilié s’il s’avère que teur est défini comme étant “le coût total du crédit le consommateur a dissimulé ou falsifié des informa- pour le consommateur au sens de l’article 3, point g), tions. de la directive 2008/48/CE, y compris le coût de l’éva- luation du bien immobilier lorsque cette évaluation Les Etats membres veillent à ce que le prêteur: est nécessaire pour obtenir le crédit mais hors frais – accorde uniquement le crédit au consommateur si d’enregistrement liés au transfert de propriété du bien le résultat de l’évaluation de solvabilité indique immobilier. Ce montant exclut tous les frais à la que le consommateur sera capable de respecter les charge du consommateur en cas de non-respect des obligations découlant du contrat de crédit; obligations prévues dans le contrat de crédit.” – informe à l’avance le consommateur de ce qu’une base de données sera consultée; Il est calculé selon une formule mathématique figu- – en cas de rejet de la demande de crédit, il en in- rant dans la Directive. forme le consommateur sans tarder. Le prêteur n’est pas obligé de motiver le rejet. Le calcul du TAEG repose sur l’hypothèse que le .............................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................. 13. Au sens de l’article 4 de la Directive, les intermédiaires liés sont les intermédiaires qui agissent pour le compte ou sous la responsabilité entière et inconditionnelle d’un seul prêteur, d’un seul groupe ou d’un nombre de prêteurs ou de groupes de prêteurs qui ne représente pas la majorité du marché. 14. “Les frais d’ouverture et de tenue d’un compte donné, d’utilisation d’un moyen de paiement permettant d’effectuer à la fois des opérations et des prélèvements à partir de ce compte ainsi que les autres frais liés aux opérations de paiement sont inclus dans le coût total du crédit pour le consommateur, dans tous les cas où l’ouverture ou la tenue d’un compte est obligatoire pour obtenir le crédit ou pour l’obtenir aux conditions annoncées”. 8 – R.L.B. 2014/4 Revue luxembourgeoise de bancassurfinance – Kluwer
Doctrine La Directive prévoit que chaque Etat membre veille à taux débiteur soit clair, accessible, objectif et véri- ce que tous les prêteurs disposent d’un accès non dis- fiable; criminatoire aux bases de données privées ou pu- – le prêteur ou le pourvoyeur de ces indices de réfé- bliques utilisées dans cet Etat aux fins d’évaluation de rence archive les indices utilisés. la solvabilité des consommateurs lors de l’octroi du crédit et du contrôle du respect des engagements de En Belgique par exemple, les indices de référence sont crédit en cours de crédit. fixés actuellement par la loi du 4 août 1992 et de ses arrêtés royaux d’exécution par le Fonds des rentes au Pour la Belgique, il s’agit de la Centrale des Crédits sein de la Banque Nationale de Belgique. aux Particuliers (CCP) au sein de la Banque Nationale de Belgique (BNB) et des conservations des hypo- 5. L’exécution des contrats de crédits thèques. En revanche, une telle base de données n’existe pas encore au Luxembourg. 16. a) Remboursement anticipé (article 25). Enfin, les Etats membres veillent à la mise au point, Le législateur européen prévoit que le consommateur sur leur territoire, de normes d’évaluation fiables des dispose du droit au remboursement anticipé intégral immeubles résidentiels aux fins de prêts hypothé- ou partiel de son crédit, auquel cas le consommateur caires. a droit à une réduction du coût total du crédit -intérêts et frais- pour la durée résiduelle du contrat. 13. i) Services de conseil (article 22). Ce droit peut être assorti de certaines conditions, Le conseil constitue un service distinct de l’octroi de comme la limitation dans le temps ou à un nombre crédit, rémunéré ou non. restreint de circonstances permettant le rembourse- ment anticipé. Le prêteur et/ou l’intermédiaire de crédit doivent in- diquer explicitement au consommateur si des services En contrepartie, les Etats membres peuvent prévoir de conseil seront fournis ou non. S’ils fournissent des que le créancier a droit à une indemnisation équitable services de conseils, il devront: et objectivement justifiée, qui ne peut dépasser la perte – préciser si leur recommandation se fonde unique- financière subie par le prêteur. ment sur leur propre gamme de produits ou sur une large gamme de produits provenant de l’en- Si le consommateur envisage un remboursement anti- semble du marché; cipé, le prêteur doit lui communiquer sans tarder sur – indiquer les frais dus par le consommateur pour ce papier ou autre support durable les informations né- service. cessaires à l’examen des conséquences pour qu’il puisse décider en connaissance de cause. Dans le cadre de l’exercice de ce service de conseil, le prêteur et/ou l’intermédiaire doi(ven)t respecter diffé- Si le remboursement intervient dans une période à rentes obligations mises à sa/leur charge par le légis- taux fixe, l’exercice de ce droit peut être subordonné lateur et énumérées à l’article 22 de la Directive. à l’existence d’un intérêt légitime dans le chef du consommateur. 4. Prêts en monnaie étrangère et taux d’intérêt variable 17. b) Variation du taux débiteur (article 27). 14. a) Prêts en monnaie étrangère (article 23). Le prêteur doit informer le consommateur de toute modification du taux débiteur sur un support papier La Directive prévoit des règles spécifiques en matière ou tout autre support durable avant que cette modifi- de prêts octroyés en monnaie étrangère. Les Etats cation n’entre en vigueur. Cette information indique membres doivent mettre en place un cadre réglemen- les nouveaux montants des versements à effectuer taire approprié afin de garantir au minimum que le ainsi que toute modification éventuelle quant au consommateur ait le droit de convertir le contrat de nombre ou à la périodicité des versements. crédit dans une autre monnaie dans des conditions déterminées ou que des modalités soient prévues pour 18. c) Retards de paiement et saisies (article 28). limiter le risque de change auquel le consommateur est exposé dans le cadre du contrat de crédit. En cas de défaut de paiement, les prêteurs doivent faire preuve d’une tolérance raisonnable avant d’en- 15. b) Crédits à taux variable (article 24). gager une procédure de saisie. En cas de crédit à taux variable, les Etats membres A titre exemplatif, la procédure prévue en Belgique veillent à ce que: semble correspondre au critère édicté par le législa- – tout indice de référence utilisé pour le calcul du teur européen. En effet, préalablement à l’exécution Kluwer – Revue luxembourgeoise de bancassurfinance R.L.B. 2014/4 – 9
Droit bancaire et financier forcée, différentes étapes sont imposées: la mise en retirer l’admission si l’intermédiaire de crédit renonce demeure par envoi recommandé, la conciliation à son admission; lorsqu’il a obtenu l’admission au amiable devant le juge des saisies, la signification du moyen de déclarations fausses ou trompeuses ou par commandement et de la saisie ensuite et enfin la vente tout autre moyen irrégulier; lorsqu’il ne remplit plus judiciaire par le notaire désigné par le juge des saisies. les conditions d’octroi d’admission; ou enfin lorsqu’il a gravement ou systématiquement enfreint les dispo- 6. Exigences applicables à l’établissement et à sitions arrêtées en application de la directive. la surveillance des intermédiaires de crédit Dès que l’admission de l’intermédiaire de crédit est 19. L’intermédiaire de crédit doit obtenir auprès de retirée par l’Etat membre d’origine, celui-ci en informe l’autorité compétente de son Etat membre d’origine les autorités compétentes des Etats membres d’accueil l’admission nécessaire. aussitôt que possible mais dans un délai maximal de quatorze jours. Cette admission est délivrée si l’intermédiaire est cou- vert par une assurance en responsabilité civile profes- Les intermédiaires de crédit dont l’admission a été re- sionnelle, s’il dispose d’une parfaite honorabilité15 et tirée sont immédiatement rayés du registre. a un casier judiciaire vierge16 et s’il dispose de connaissances et de compétences suffisantes dans le 7. Coopération entre les autorités nationales domaine des contrats de crédit conformément aux principes énoncés à l’Annexe III de la Directive. 20. Les Etats membres doivent désigner les autorités nationales compétentes pour assurer l’application et Une fois admis, les intermédiaires sont enregistrés au- l’exécution de la directive et veillent à ce que ces au- près de l’autorité compétente et inscrits sur un re- torités soient dotées des pouvoirs d’enquête et d’exé- gistre. cution ainsi que des ressources nécessaires pour s’ac- quitter de leurs fonctions de manière effective et L’admission d’un intermédiaire de crédit par l’auto- efficace. Il s’agit essentiellement d’instances pu- rité compétente de son Etat membre d’origine est va- bliques dont le personnel est tenu au secret profes- lable pour l’ensemble du territoire de l’Union. sionnel. L’intermédiaire de crédit qui envisage d’exercer une Les Etats membres informent la Commission et l’Au- activité dans un ou plusieurs Etats membres en in- torité Bancaire Européenne (ABE) de la désignation forme les autorités compétentes de l’Etat membre des autorités compétentes et de toute modification à d’origine. Ces autorités compétentes notifient dans le cet égard, y compris en ce qui concerne la répartition mois l’intention de l’intermédiaire de crédit aux auto- éventuelle des fonctions entre différentes autorités. rités compétentes des Etats membres d’accueil concer- nés et en informent en même temps l’intermédiaire de Les autorités compétentes des différents Etats crédit. Ce dernier peut entamer son activité dans l’Etat membres coopèrent entre elles et échangent des infor- d’accueil un mois après cette information. mations dans le cadre d’enquêtes ou d’activités de surveillance. Les Etats membres veillent à ce que les autorités com- pétentes de l’Etat membre d’origine surveillent les ac- Les autorités compétentes peuvent saisir l’ABE si une tivités des intermédiaires de crédit et que les autorités demande de coopération a été rejetée ou n’a pas été compétentes de l’Etat membre où l’intermédiaire de suivie dans un délai raisonnable et solliciter son assis- crédit a une succursale surveillent le respect des dis- tance. positions de la directive. L’ABE agit conformément aux pouvoirs qui lui sont Tant les autorités compétentes de l’Etat membre d’ori- conférés. Toute décision contraignante prise par l’ABE gine que celles où l’intermédiaire a une succursale est dotée de force obligatoire pour les autorités com- peuvent en cas de non-respect des dispositions de la pétentes concernées qu’elles soient membres ou non directive exiger dans un premier temps que l’intermé- de l’ABE. diaire de crédit mette fin à la situation irrégulière et l’empêcher dans une seconde phase d’effectuer encore des opérations de crédit17. L’autorité compétente de l’Etat membre d’origine peut .............................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................. 15. Il en est de même pour les membres du conseil d’administration d’un intermédiaire de crédit établi en tant que personne morale et les personnes physiques exerçant des tâches équivalentes chez un intermédiaire de crédit établi en tant que personne morale mais dépourvu de conseil d’administration. 16. Il n’est fait référence qu’aux sanctions pénales et non aux éventuelles sanctions administratives qui auraient été prononcées à l’encontre d’un intermédiaire. 17. Lorsque l’autorité compétente de l’Etat membre d’origine n’est pas d’accord avec les mesures prises par l’autorité compétente de l’Etat membre d’accueil, elle peut saisir l’ABE. 10 – R.L.B. 2014/4 Revue luxembourgeoise de bancassurfinance – Kluwer
Doctrine 8. Dispositions finales 25. e) Clause de réexamen (article 44). 21. a) Sanctions (article 38). La Commission procède au réexamen de la Directive avant le 21 mars 2019. Ce réexamen porte sur l’éva- Les États membres fixent les règles relatives aux sanc- luation de l’efficacité et la pertinence des dispositions tions en cas d’infraction aux dispositions nationales relatives aux consommateurs et au marché intérieur, adoptées en vertu de la Directive. Ces sanctions et notamment sur les points suivants: doivent être effectives, proportionnées et dissuasives. – l’utilisation et la satisfaction des consommateurs à l’égard de la FISE; Les États membres veillent à ce que les autorités com- – les autres informations précontractuelles obliga- pétentes rendent publique toute sanction administra- toires; tive à moins que cette publication ne risque de pertur- – l’analyse du développement de l’activité transfron- ber gravement les marchés financiers ou de causer un tière des intermédiaires de crédit et des prêteurs; préjudice disproportionné aux parties en cause. – l’analyse de la nécessité de mesures supplémen- taires comme le passeport pour les prêteurs autres 22. b) Mécanisme de règlement des litiges (article 39). que les institutions de crédit; – etc… Les États membres veillent à ce que des procédures adéquates et efficaces de réclamation et de recours soient instaurées en vue du règlement extrajudiciaire des litiges entre prêteurs, intermédiaires de crédit et Conclusion consommateurs relatifs aux droits et obligations résul- 26. Comme la Directive 2008/48/EC, la Directive cré- tant de cette directive. Ils peuvent faire appel à des dit hypothécaire vise à renforcer la protection des organes existants. consommateurs. Elle est le fruit des réflexions enta- mées après la crise financière qui a mis en avant cer- Les États membres veillent à ce que ces organes coo- taines pratiques jugées irresponsables notamment à pèrent activement pour résoudre les litiges transfron- l’occasion de la proposition de crédits libellés en de- tières. vise étrangère. 23. c) Caractère impératif de la Directive (article 41). La Directive 2014/17/EU ne devrait pas bouleverser la matière, tant différents États membres avaient déjà mis Les États membres veillent à ce que le consommateur en place des procédures visant à protéger les consom- ne puisse renoncer aux droits qui lui sont conférés en mateurs. vertu du droit national transposant la Directive. Toutefois, elle introduit deux éléments importants qui Les États membres veillent à ce que leur législation nécessiteront une adaptation profonde de certaines nationale transposant cette directive ne puisse être législations et des pratiques de certains dispensateurs contournée par le biais du libellé des contrats de cré- de crédit: l'obligation de mentionner le taux annuel dit de sorte qu’ils n’entrent pas dans le champ d’ap- effectif global (TAEG) et la fiche d'information stan- plication de la Directive. dardisée européenne (FISE) qui sera légalement impo- sée. 24. d) Entrée en vigueur et transposition (articles 42 et 49). Bien que l’objectif de protection du consommateur via l’instauration de normes de qualités et la promotion La Directive est entrée en vigueur le 21 mars 2013, soit de bonnes pratiques doit être salué, on peut regretter le 20ième jour suivant celui de sa publication au Jour- que cette protection passe une nouvelle fois par l’in- nal Officiel de l’Union européenne. flation de la documentation précontractuelle et contractuelle déjà abondante. Il n’est pas exclus de Les États membres adoptent et publient, au plus tard penser que l’augmentation du formalisme, cumulée le 21 mars 2016, les dispositions législatives, régle- avec une rentabilité déjà trop faible et à nouveau affai- mentaires et administratives nécessaires pour se blie par les restrictions relatives aux contrats liés, ainsi conformer à la Directive. Ils communiquent immédia- que le risque de voir édicter de nouvelles sanctions, tement à la Commission le texte de ces dispositions. ne soient pas de nature à pousser certains acteurs à délaisser ce secteur pour le laisser aux mains de La Directive ne s’applique pas aux contrats de crédit quelques entités au détriment des consommateurs. en cours au 21 mars 2016. Kluwer – Revue luxembourgeoise de bancassurfinance R.L.B. 2014/4 – 11
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