F - pour l'asie et le pacifique
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
Février 2022 APRC/22/2 F CONFÉRENCE RÉGIONALE DE LA FAO POUR L’ASIE ET LE PACIFIQUE Trente-sixième session Dhaka (Bangladesh), 8-11 mars 2022 Situation de l’alimentation et de l’agriculture dans la région Asie et Pacifique, à la lumière de la pandémie de covid-19 Résumé L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a travaillé intensément sur le Programme d’intervention et de redressement dans le contexte de la covid-19 afin d’atteindre une plus grande partie des populations rurales et de relancer l’activité économique. Outre les interventions, le Programme s’efforce également de reconstruire en mieux et en plus solide pour transformer les systèmes agroalimentaires dans l’ensemble des quatre améliorations, en mettant l’accent sur ses sept domaines de travail prioritaires ainsi que sur la science et l’innovation, le changement climatique, les cadres juridiques et le renforcement des programmes existants. Le présent document examine la situation en Asie et dans le Pacifique pendant la pandémie de covid-19 en 2020 et 2021. Il passe en revue les effets de celle-ci sur la santé, l’économie, les moyens de subsistance et la sécurité alimentaire, au niveau tant régional que national, pour des groupes spécifiques tels que les pauvres et les segments les plus vulnérables de la population. Compte tenu de la vaste portée socioéconomique de la pandémie, il examine les incidences macroéconomiques et les effets sur l’emploi et les revenus, les migrations et le commerce, la croissance économique et la marge de manœuvre budgétaire des gouvernements, la sécurité alimentaire et la nutrition, la pauvreté et la faim. Il passe également en revue les différentes réponses apportées par les gouvernements à la pandémie de covid-19, couvrant la crise sanitaire, la macroéconomie, le chômage, les perturbations de l’approvisionnement alimentaire, les chocs de la demande alimentaire résultant de la pandémie, les fermetures, la mobilité réduite, les restrictions sur les voyages internationaux et les migrations internes et transfrontières. Ces interventions comprennent des investissements publics dans les services de santé, l’extension des mesures de protection sociale à de nouveaux groupes et bénéficiaires, des mesures visant à garantir la poursuite des échanges de produits alimentaires et de santé essentiels, et des mesures de soutien financier destinées à minimiser les pertes d’emplois et à réduire les perturbations de la chaîne d’approvisionnement alimentaire. Le rapport couvre également les nouvelles politiques et priorités d’investissement, y compris les technologies numériques, mises en œuvre pour reconstruire des systèmes agroalimentaires qui soient résilients, inclusifs et écologiques. Les documents peuvent être consultés à l’adresse www.fao.org. NH654/f
2 APRC/22/2 Suite que la Conférence régionale est invitée à donner Alors que la région Asie-Pacifique entre dans la phase de «vie avec» la covid-19, la FAO continuera d’appuyer les programmes techniques et politiques prioritaires mis en œuvre par les États Membres pour faire face à la pandémie. Compte tenu des effets transversaux de la covid-19 et de sa portée, la Conférence régionale pour l’Asie et le Pacifique est invitée à fournir à la FAO des indications sur les activités d’intervention et de redressement à mener face à la covid-19, mettant en avant ce qui suit: a. fourniture d’un appui technique et politique aux actions de redressement menées dans le contexte de la covid-19 selon les principes de «reconstruire en mieux» (redressement inclusif) et de transformation agroalimentaire verte (redressement durable et résilient); b. investissement dans les systèmes de production agroalimentaire afin de favoriser une gestion des ressources respectueuse du climat qui permette une alimentation saine, diversifiée et abordable pour tous, notamment pour les groupes les plus vulnérables; c. priorité accordée à la revitalisation rurale pour créer des opportunités d’emploi pour les jeunes et les migrants de retour, et renforcer l’amélioration des liens entre les zones rurales et urbaines grâce au commerce électronique, au marketing en ligne et aux petites et moyennes entreprises dirigées par des jeunes et alimentées par le numérique, contribuant ainsi à une transformation agroalimentaire résiliente; d. accélération des investissements dans les innovations numériques appliquées à la transformation des systèmes agroalimentaires, au commerce électronique, à la facilitation des échanges, à la promotion d’une alimentation saine et à l’extension des services et des innovations aux communautés rurales, aux villages et aux paysages ruraux, et intensification de leur utilisation; e. conception, renforcement et extension de politiques, programmes et initiatives de protection et de sécurité sociale incluant les groupes vulnérables (par exemple, les femmes, les jeunes, les enfants, les migrants, les populations autochtones, les travailleurs informels, les petits exploitants, les petites et moyennes entreprises) afin d’élargir le champ de la résilience socioéconomique, de réduire l’insécurité alimentaire et la malnutrition et de lutter contre la pauvreté conformément aux objectifs de développement durable. Pour toute question concernant le contenu du présent document, prière de s’adresser au: Secrétariat de la Conférence régionale pour l’Asie et le Pacifique APRC@fao.org
APRC/22/2 3 I. Introduction 1. Comme une grande partie du monde, la région Asie-Pacifique est au cœur de la nouvelle vague de la pandémie de covid-19, le variant Omicron s’ajoutant au variant Delta. En janvier 2022, plus de 65 millions de personnes avaient été infectées dans la région (figure 1) et plus d’un million de décès avaient été enregistrés. La crise sanitaire de la covid-19 s’est également transformée en une crise économique mondiale, mettant en péril les emplois et les revenus de millions de personnes à travers le monde. La pandémie a commencé à s’atténuer dans la région au cours de la seconde moitié de 2021, avec l’accélération du rythme de la vaccination. Début janvier 2022 , les taux de vaccination dans la région variaient de 20 pour cent à plus de 80 pour cent (figure 2). Figure 1. Nombre quotidien de cas de covid-19 en Asie et dans le Pacifique 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 Pourcentage de la population ayant reçu une Percent population PREMIÈRE with FIRST vaccine shot dose de vaccin Pourcentage Percent de la population population with TWO ayant reçu des rappels vaccines Pourcentage de la population Percent population ayant receiving reçu DEUX boosters doses de vaccin Figure 2. Taux de vaccination en Asie et dans le Pacifique (au 1er janvier 2022)1. Source: Our World in Data Covid-19 (https://ourworldindata.org/covid-vaccinations?country=OWID_WRL). II. Effets macroéconomiques Chômage 2. Les mesures d’endiguement adoptées par de nombreux pays – distanciation sociale, confinements, restrictions de voyage et fermeture des frontières – ont entraîné des pertes d’emploi et un chômage soudains et généralisés. Avant la pandémie, l’Asie et le Pacifique affichaient des taux de 1Our World in Data. 2021. Coronavirus (COVID-19) Vaccinations [en ligne]. [Consulté le 1er novembre 2021] https://ourworldindata.org/covid-vaccinations?country=OWIDWRL.
4 APRC/22/2 chômage légèrement inférieurs à la moyenne mondiale (4,1 pour cent contre 5,4 pour cent entre 2017 et 2018)2. Cependant, la pandémie a aggravé le paysage du chômage, les petits États insulaires en développement (PEID) du Pacifique étant les plus durement touchés, car ces petites îles isolées sont particulièrement vulnérables, compte tenu de leurs économies à petite échelle axées sur les services et le tourisme, et de leur accès limité aux facteurs de production (par exemple, la terre, la main-d’œuvre). Le secteur informel, qui prédomine dans la région et où les femmes sont plus actives que les hommes dans les secteurs non agricoles dans la plupart des pays (à l’exception du Brunéi Darussalam, de Kiribati et de la Mongolie), est également très touché. Revenu des ménages 3. La contraction des revenus des ménages due à la pandémie de covid-19 est généralisée en Asie et dans le Pacifique. Comme prévu, la pandémie a entraîné une perte de revenus et de moyens de subsistance pour les familles vulnérables et leurs enfants. Les enquêtes téléphoniques à périodicité élevée menées par la Banque mondiale3 fournissent des preuves de la baisse des revenus provenant d’activités agricoles, non agricoles ou salariées ou de transferts de fonds depuis le début de la pandémie. Les ménages du Cambodge, des Îles Salomon, de l’Indonésie, du Myanmar, de la Mongolie, des Philippines et de la République démocratique populaire lao ont subi des pertes de revenus, notamment agricoles et non agricoles, et une baisse des salaires et des envois de fonds. Au Cambodge, par exemple, environ 75 pour cent des personnes interrogées dans le cadre d’enquêtes téléphoniques ont mentionné une réduction de la consommation de biens pendant la pandémie. Aux Philippines, l’enquête menée par Zero Extreme Poverty Philippines 2030 et le Programme des Nations Unies pour le développement révèle que la pandémie a accru le nombre de ménages en situation de pauvreté monétaire, 83 pour cent des personnes interrogées ayant subi une baisse du revenu du ménage et 34 pour cent une perte totale de revenu. Aux Îles Salomon, la réduction de la consommation alimentaire est le principal problème pour environ 60 pour cent des personnes interrogées, suivie par la perte de revenus. L’aide gouvernementale occupe une place importante, 60 pour cent des personnes interrogées déclarant en avoir bénéficié. On observe également une variation frappante des effets sur le revenu dans les zones urbaines et rurales: les zones urbaines ont connu une perte de revenu, une inactivité et une consommation réduite plus importantes; les zones rurales ont connu une plus grande insécurité alimentaire. Pauvreté 4. L’accroissement de la pauvreté a fait suite au chômage et aux pertes de revenus des ménages dus à la pandémie. Les différentes estimations de la pauvreté se fondent sur la contraction estimée du produit intérieur brut (PIB). On compte en Asie et dans le Pacifique 640 millions de personnes en situation de pauvreté multidimensionnelle4, et la pandémie peut potentiellement doubler ce nombre, poussant 636 millions de personnes supplémentaires dans la pauvreté multidimensionnelle. En 2020, la région a connu une augmentation du chômage avec 15 millions de chômeurs supplémentaires et, par rapport à 2019, une réduction de 7,1 pour cent des revenus du travail. Les emplois et les revenus perdus à travers la région donnent à penser que pour les personnes qui vivent avec 1,90 USD par jour, 89 millions de plus seront poussées dans l’extrême pauvreté. Ce sera le cas pour 158 millions de personnes supplémentaires qui vivent avec 3,20 USD par jour et pour 172 millions de personnes qui vivent avec 5,50 USD par jour5. En Indonésie, la covid-19 a fait basculer, en septembre 2020, 2,76 millions de personnes dans la pauvreté, soit près d’un point de pourcentage de plus qu’en septembre 2019. Les citadins représentaient 80 pour cent des nouveaux pauvres. En Thaïlande, les 2 Organisation internationale du Travail (OIT ). 2021. APESO - Facts & figures: employment and unemployment in Asia- Pacific: trends and projections [en ligne]. [Consulté le 30 juin 2021] https://www.ilo.org/global/about-the-ilo/multimedia/ maps-and-charts/enhanced/WCMS_650035/lang--fr/index.htm. 3 Banque mondiale. 2021. High-Frequency Phone Surveys [en ligne]. [Consulté le 25 novembre 2021] https://microdata.worldbank.org/index.php/catalog/hfps. 4 La pauvreté multidimensionnelle englobe des privations et des désavantages qui vont au-delà du manque d’argent et comprennent, entre autres, une mauvaise santé, le manque d’éducation, un niveau de vie inadéquat, la déresponsabilisation, la mauvaise qualité du travail, la menace de violence et le fait de vivre dans des zones dangereuses pour l’environnement. 5 ONU. 2021a. Economic and social survey of Asia and the Pacific 2021: Towards post-COVID-19 resilient economies. Technical report [en ligne]. https://www.unescap.org/sites/default/d8files/knowledge-products/Survey%202021% 20Towards%20post-COVID-19%20resilient%20economies.pdf.
APRC/22/2 5 travailleurs informels, y compris les travailleurs migrants de la pêche, ont déclaré ne gagner que 27 pour cent de leur salaire mensuel moyen d’avant la pandémie, ce qui les place près du niveau d’extrême pauvreté de 1,90 USD par jour6, 7. Migrations 5. Les migrants sont apparus comme l’un des groupes les plus vulnérables face aux effets de la pandémie de covid-19. L’un de ces effets frappants est l’inversion du modèle dominant de migration des campagnes vers les villes en Asie et dans le Pacifique, qui provoque également une contraction générale de l’émigration, ce qui est une première ces dernières années. Il y avait environ 87 millions de migrants nés en Asie en 2019, soit environ 32 pour cent des immigrants recensés dans le monde8. Pour la première fois dans l’histoire récente, le nombre de migrants internationaux a été susceptible de diminuer en 2020, car les nouvelles migrations ont ralenti et les migrations de retour ont augmenté. Les sorties de migrants ont également diminué, car les canaux se sont contractés en raison des restrictions des mouvements transfrontières. Au Pakistan, le nombre d’émigrants n’a été que de 179 487 pour la période janvier-septembre 2020, contre 625 203 en 2019. Au Bangladesh, il n’a été que de 181 218 pour la période janvier-mai 2020, contre 700 159 en 2019. La baisse de la demande de main-d’œuvre dans les pays d’accueil a également entraîné une réduction de l’afflux de migrants. En Malaisie, les heures travaillées ont diminué de 28 pour cent au deuxième trimestre de 2020, et en Thaïlande, de 13 pour cent, ce qui a réduit le flux normal de migrants en provenance des pays voisins (Cambodge, Myanmar, République démocratique populaire lao et Viet Nam). 6. La migration inverse des zones urbaines vers les zones rurales a créé d’importants problèmes à plusieurs pays à revenu faible ou intermédiaire, qui ont rencontré des difficultés croissantes vis-à-vis des migrants de retour, notamment la crainte que le rapatriement ne déclenche une nouvelle propagation de la covid-19, en plus de mettre davantage à contribution les services de santé locaux et les ressources limitées des communautés. Les pays ont également été confrontés à des pressions financières du fait de la mise en place de robustes plans de rapatriement, car il existe des coûts de soins de santé et de quarantaine pour les rapatriés, ainsi que des coûts de réintégration. Des investissements publics et privés dans les secteurs de la santé, de l’éducation et de l’emploi, entre autres, sont nécessaires pour réintégrer les rapatriés dans leurs communautés. L’accès à des ressources locales telles que la terre et la sécurité sociale est essentiel pour obtenir des moyens de subsistance durables. 7. On estime que les envois de fonds vers la région Asie de l’Est et Pacifique ont diminué de 11 pour cent en 2020 et d’environ 4 pour cent en Asie du Sud, avec des taux différents selon les pays9. Les envois de fonds sont restés résilients pendant la pandémie pour la plupart des pays d’Asie et du Pacifique, bien que les migrations internationales aient diminué pour la première fois depuis des décennies. Les envois de fonds vers Kiribati et les îles Marshall ont été touchés par la pandémie, tandis que d’autres grands bénéficiaires de ces envois, comme le Bangladesh, l’Inde, le Pakistan, les Philippines et Sri Lanka, ont fait face aux effets négatifs de la pandémie. Au Bangladesh, le gouvernement a adopté, pour empêcher une baisse des envois de fonds, des politiques qui ont en fait accru le flux de ces envois pendant la pandémie. 6 Komin, W., Thepparp, R., Subsing, B. et Engstrom, D. 2021. «COVID-19 and its impact on informal sector workers: a case study of Thailand». Asia Pacific Journal of Social Work and Development, Volume 31, 2021 - Issue 1-2. DOI: www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/02185385.2020.1832564. 7 Marschke, M., Vandergeest, P., Havice, E., Kadfak, A., Duker, P., Isopescu, I. et MacDonnell, M. 2021. «COVID-19, instability and migrant fish workers in Asia». Maritime Studies, 20(1):87–99. DOI: https://link.springer.com/content/pdf/10.1007/s40152-020-00205-y.pdf. 8 Nations Unies, Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP). 2020. Asia-Pacific Migration Report 2020: Assessing Implementation of the Global Compact for Migration (ST/ESCAP/2801). Les déclarations ultérieures qui figurent dans ce paragraphe proviennent également de cette source. 9 Organisation internationale pour les migrations (OIM). 2021. Remittance Inflow Snapshot. IOM Asia Pacific Regional Data Hub. Avril 2021.
6 APRC/22/2 Inflation et prix 8. L’un des indicateurs clés à observer de près est l’évolution des prix et des niveaux d’inflation suite aux confinements mis en place dans le contexte de la covid-19 et des perturbations de la chaîne d’approvisionnement. Les données de la FAO révèlent que 2020 a été une année d’augmentation modeste des prix alimentaires par rapport à 2019; à quelques exceptions près, la plupart des pays de la région ont connu, en avril 2020, une inflation par rapport à avril 2019. Cette inflation a été plus prononcée avec une hausse des prix alimentaires en 2021 du fait de la relance de la croissance économique induite par les stimuli budgétaires et de la diminution du risque de contagion dans les économies occidentales. Au second semestre de 2021, les prix internationaux ont fortement augmenté pour la plupart des groupes d’aliments, plaçant l’indice FAO des prix alimentaires de novembre 2021 à son niveau le plus élevé depuis juin 2011. Chine, RAS de Hong Kong République de Corée Rép. dém. pop. lao Brunéi Darussalam Nouvelle-Zélande Afghanistan Timor-Leste Bangladesh Philippines Cambodge Singapour Thaïlande Indonésie Myanmar Mongolie Viet Nam Maldives Sri Lanka Australie Bhoutan Pakistan Malaisie Népal Japon Chine Inde 20 15 10 Pourcentage 5 0 -5 Inflation avril 2019/20 April19/20 Inflation avril Inflation 2020/21 April20/21 -10 Figure 3. Inflation des prix alimentaires entre avril 2020 et avril 202110. Source: Données de FAOStat, Indices des prix à la consommation, Inflation des prix alimentaires (consulté le 17 juillet 2021). Commerce 9. Pendant la pandémie, les pays d’Asie et du Pacifique ont mis en œuvre un certain nombre de mesures de politique commerciale combinant à la fois des mesures restrictives et des mesures de facilitation du commerce pour différents produits et pour les importations par rapport aux exportations. De nombreux gouvernements ont abaissé les barrières à l’importation et imposé des restrictions à l’exportation de produits et fournitures médicales et de produits agricoles et alimentaires afin de maximiser la disponibilité de ces produits essentiels à la lutte contre la pandémie11. L’activisme en matière de politique commerciale a connu un grand essor au premier trimestre de 2020 mais, dans l’ensemble, les mesures commerciales ont davantage visé le commerce des produits médicaux et des équipements de protection individuelle que celui des denrées alimentaires. Des mesures commerciales protectionnistes ont été adoptées jusqu’à la fin du mois de mai 2020, avec davantage de restrictions à l’exportation que de mesures de facilitation du commerce à l’importation, tant dans le commerce des produits alimentaires que dans celui des produits médicaux. En matière de politique commerciale, la plupart des pays se sont abstenus d’interdire les exportations, sauf dans certains cas à titre temporaire. 10 FAOSTAT. 2021. Indices des prix à la consommation - Inflation des prix alimentaires [en ligne]. [Consulté le 17 juillet 2021] https://www.fao.org/faostat/fr/#data/CP. 11 Evenett, S., Fiorini, M., Fritz, J., Hoekman, B., Lukaszuk, P., Rocha, N., Ruta, M., Santi, F. et Shingal, A. 2020. Trade policy responses to the COVID-19 pandemic crisis: Evidence from a new dataset. RSCAS Working Paper 2020/78, Novembre [en ligne]. https://ideas.repec.org/p/rsc/rsceui/2020-78.html.
APRC/22/2 7 Le Viet Nam a introduit, puis supprimé, des interdictions d’exportation de riz afin de maintenir les disponibilités en nourriture pour ses citoyens, appliquant des tarifs d’importation réduits pour les entreprises de transformation de l’agriculture, de la sylviculture et de la pêche. Le Pakistan a appliqué des réductions tarifaires sur les denrées alimentaires et un programme de secours pour les approvisionnements alimentaires. Le Népal a accordé des prêts pour l’importation et la distribution de produits alimentaires, tandis que la Mongolie a exempté les produits alimentaires de taxes et de droits d’importation. Cependant, après mai 2020, d’autres mesures de promotion des importations ont commencé à prendre effet dans de nombreux pays. 10. De nombreux pays de la région ont considéré que le commerce alimentaire faisait partie du redressement de l’après-covid-19. Pendant les confinements, le commerce transfrontières a ralenti ou s’est arrêté. Les effets ont été différents selon les produits: les céréales, les oléagineux, les graisses et les huiles ont été moins touchés que les animaux vivants, les fleurs coupées, le poisson et les produits périssables12. À court terme, les flux commerciaux des produits frais, des animaux vivants, des produits de l’élevage et du poisson frais ou sec ont été plus volatils, tous connaissant une baisse de la demande et des exportations annulées. Pour le commerce des produits alimentaires, la Chine et le Viet Nam ont principalement soutenu les importations. La Malaisie et, dans une moindre mesure, le Cambodge ont principalement imposé des restrictions à l’exportation. L’Indonésie, l’Inde, le Pakistan et la Thaïlande ont appliqué à la fois des restrictions à l’exportation et des mesures de facilitation des importations. Le Pakistan a interdit l’exportation d’oignons, de blé et de farine à différentes dates entre la fin avril 2020 et la mi-novembre 2020. L’Asie du Sud-Est et la Mongolie comptent parmi les principaux importateurs de céréales, comme le blé, ce qui a contribué à la levée des restrictions sur les importations de céréales, tandis que l’Indonésie a assoupli les restrictions à l’importation d’oignons et d’ail. De nombreux pays de la région ont mis en place des restrictions temporaires sur les exportations de riz, mais ont rapidement abandonné ces politiques13. Le Viet Nam élargit les opportunités commerciales par des innovations numériques en améliorant les normes de sécurité sanitaire/qualité des aliments et les politiques/infrastructures commerciales. Les États membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) ont établi des priorités commerciales régionales pour développer le commerce alimentaire régional pendant et après la covid-19. Dépenses et dette publiques 11. La politique budgétaire a été l’un des principaux moyens d’atténuer les effets dévastateurs de la pandémie sur la macroéconomie et l’économie des ménages. Le Japon a pris les devants en fournissant des fonds propres, des prêts et des garanties par le biais des canaux financiers habituels, tandis que la Nouvelle-Zélande a augmenté les dépenses publiques et renoncé aux recettes comme principal instrument fiscal. L’Indonésie a opté pour des dépenses supplémentaires telles que des transferts d’espèces aux ménages. La Thaïlande et le Viet Nam ont transféré des espèces aux ménages pendant la pandémie pour maintenir l’activité économique et les flux d’argent. Les plans de relance budgétaire et l’augmentation des dépenses de santé semblent être les principaux contributeurs aux dépenses publiques. La région dans son ensemble a enregistré un déficit budgétaire moyen de 5,7 pour cent en 2020, contre 0,56 pour cent en 2019. L’Asie de l’Est a alloué relativement plus de ressources pour la crise, avec une augmentation moyenne du déficit de 7,9 pour cent, suivie du Pacifique (6,3 pour cent), des PEID (5,9 pour cent), de l’Asie du Sud-Est (4,2 pour cent) et de l’Asie du Sud (3,6 pour cent)14. Toutefois, à part les pays asiatiques avancés, les autres sont soit des pays à faible revenu, soit des pays émergents dont les options budgétaires sont limitées. 12. La dette publique a augmenté alors que la pandémie continuait de s’aggraver avec, aux deuxième et troisième trimestres de 2021, d’importantes vagues qui ont vu réapparaître les confinements en Asie du Sud, au printemps, ainsi qu’en Asie du Sud-Est et dans une grande partie du reste de l’Asie à l’été 2021, prolongeant les restrictions et détériorant davantage le solde budgétaire 12 FAO. 2021. Agricultural trade & policy responses during the first wave of the COVID-19 pandemic in 2020. Rome. https://www.fao.org/3/cb4553en/cb4553en.pdf. 13 FAO. 2020. «Why export restrictions should not be a response to COVID-19: Learning lessons from experience with rice in Asia and the Pacific». FAO COVID-19 policy brief [en ligne]. http://www.fao.org/3/ca9362en/CA9362EN.pdf. 14 CESAP. 2020. An assessment of fiscal space for COVID-19 response and recovery in Asia-Pacific developing countries. MPFD Policy Brief N.116, Novembre 2020.
8 APRC/22/2 (recettes publiques totales moins dépenses totales). La région a connu une augmentation moyenne de la dette publique de 7,9 pour cent. Douze pays enregistrent la dette la plus importante: le Bhoutan, l’Inde, les Maldives et Sri Lanka en Asie du Sud; la Malaisie, les Philippines et la Thaïlande en Asie du Sud-Est; le Japon en Asie de l’Est; les Fidji et la Papouasie-Nouvelle-Guinée dans les PEID; et l’Australie et la Nouvelle-Zélande dans le Pacifique. Dans les pays d’Asie du Sud et d’Asie du Sud- Est, la forte croissance qui a eu lieu avant la covid-19 a permis d’amortir la pression fiscale et l’augmentation de la charge de la dette. Dans les PEID, déjà vulnérables aux catastrophes naturelles, l’évaporation instantanée du tourisme a vu leurs dettes publiques s’aggraver avec un besoin accru de financement extérieur. Produit intérieur brut 13. L’ensemble de la région Asie-Pacifique, à l’exception de la Chine, a connu une contraction du PIB en 2020 en raison du chômage massif et de la perte d’heures de travail. La contraction moyenne de 4,1 pour cent du PIB régional a annulé le taux de croissance de 4 pour cent de 201915. La perte de PIB a été inégale selon les pays, l’Asie du Sud enregistrant une réduction de 6 pour cent, à l’exception du Bangladesh, qui s’est relativement mieux comporté avec une croissance faible mais positive en 2020. Ce sont les Maldives, qui dépendent du tourisme, qui ont le plus souffert. L’Asie du Sud-Est a connu une réduction moyenne de 2,9 pour cent du PIB, certains pays (Cambodge, Malaisie et Philippines) s’en tirant moins bien que d’autres (Brunéi Darussalam, Myanmar et Viet Nam). L’Asie de l’Est a connu une réduction de 2,2 pour cent de son PIB, mais la Chine a enregistré une croissance, bien qu’inférieure à celle de 201916. C’est la Mongolie, dont les taux d’infection par le SARS-CoV-2 sont bien plus faibles, qui a connu la plus forte baisse de croissance de son PIB. Les PEID ont enregistré une réduction de 4,7 pour cent de leur PIB, leurs économies étant déjà vulnérables aux changements extérieurs avant le début de la pandémie, ce qui s’est traduit par de faibles taux de croissance en 2019. Le PIB de la région Pacifique a chuté de 2,7 pour cent, avec une baisse comparable en Australie et en Nouvelle-Zélande. La baisse du revenu réel par habitant de la région en 2020 a avoisiné en moyenne 600 USD, atteignant jusqu’à 2 000 USD dans certains pays. Effets différenciés selon que l’on est un home ou une femme 14. Les effets néfastes de la pandémie ont touché les femmes de manière disproportionnée. Les mesures de confinement ont durement touché les secteurs du commerce de détail, de la fabrication, de l’habillement et de l’agroalimentaire, secteurs qui emploient majoritairement des femmes. Entre décembre 2019 et juin 2020, le taux d’activité des femmes en Asie a diminué de 1,3 pour cent, contre une baisse de 1 pour cent pour les hommes17. Depuis le début de la pandémie, 50 pour cent des femmes occupant un emploi formel ont vu leurs heures de travail rémunérées réduites, contre 35 pour cent pour les hommes. Dans le secteur de l’alimentation et de l’agriculture, 66 pour cent des femmes et 57 pour cent des hommes de la région ont constaté une baisse des revenus provenant de l’agriculture et de la pêche. Les transferts de fonds informels de la Thaïlande vers les pays voisins (généralement le double des transferts de type formel) touchent les travailleuses migrantes de manière disproportionnée. En outre, la pandémie affecte davantage la santé des femmes que celle des hommes. Par exemple, l’augmentation des gardes non rémunérées et du travail domestique, la perte d’emploi et de revenu et l’augmentation de la violence sexiste pendant le confinement ont contribué à accroître le taux de stress chez les femmes. Bien que la pandémie présente d’importants risques socioéconomiques pour les femmes, il a été adopté, dans la région, très peu de politiques qui leur soient spécifiques. 15 Fonds monétaire international (FMI). 2021. Database of fiscal policy responses to COVID-19 [en ligne]. [Cité le 29 juin 2021] https://www.imf.org/en/Topics/imf-and-covid19/Fiscal-Policies-Database-in-Response-to-COVID-19. 16 FMI. 2021. FMI Datamapper - Datasets [en ligne]. https://www.imf.org/external/datamapper/datasets. 17 FMI. 2020. Regional economic outlook update. Asia and Pacific: navigating the pandemic: a multi speed recovery in Asia [en ligne]. https://www.imf.org/en/Publications/REO/APAC/Issues/2020/10/21/regional-economic-outlook-apd.
APRC/22/2 9 III. Effets de la covid-19 sur les chaînes d’approvisionnement alimentaire 15. La pandémie a perturbé tout un ensemble d’éléments du système alimentaire, du côté tant de l’offre que de la demande. Les perturbations de la chaîne d’approvisionnement alimentaire sont dues à la pénurie de main-d’œuvre agricole, à l’accès limité aux intrants agricoles en raison des perturbations des transports, à la diminution de la capacité de transformation des aliments, aux perturbations de la logistique et du commerce et à la réduction de la consommation alimentaire en raison de la diminution des activités sociales et économiques pratiquées en présentiel. Les pénuries de main-d’œuvre agricole au début de la pandémie peuvent avoir perturbé des opérations de terrain essentielles (comme la récolte, la plantation et l’irrigation). Par exemple, au Bangladesh, les perturbations des transports ont coïncidé avec une contraction de la production agricole et aquacole due à une pénurie d’intrants et à un accès limité au financement, notamment pour des produits périssables tels que le lait et les légumes, en raison d’une baisse de la demande. Toutefois, la main-d’œuvre des activités rurales et agricoles a été moins touchée que celle des activités économiques urbaines et non agricoles, car il y a eu des exceptions aux restrictions pour l’alimentation et l’agriculture, que les gouvernements jugeaient essentielles. L’afflux de migrants quittant les emplois urbains (pour retourner dans les zones rurales) ou retournant des pays d’accueil vers les pays d’origine a posé des difficultés aux pays recevant les migrants (qui ont maintenant une main-d’œuvre excédentaire à employer) tout en créant une pénurie de main-d’œuvre pour les activités agricoles essentielles dans d’autres (comme la Malaisie, la République de Corée, Singapour et la Thaïlande). 16. Dans de nombreux pays de la région, le travail agricole est jugé essentiel et exempté de restrictions de mouvement, de sorte que les agriculteurs de la plupart des pays sont bien moins gênés dans leur travail que d’autres secteurs. Conformément aux tendances mondiales, les restrictions sont plus ciblées géographiquement et celles appliquées à l’économie ne touchent qu’environ 50 pour cent des travailleurs agricoles. Toutefois, la covid-19 a eu un effet sur les travailleurs saisonniers. L’Australie et la Nouvelle-Zélande ont été confrontées à des pénuries, notamment les producteurs de fruits et légumes, les pépinières et les exploitations horticoles, qui dépendent fortement de travailleurs saisonniers de pays insulaires du Pacifique. En Thaïlande, les interruptions de travail ont touché de nombreux migrants employés dans la pêche, qui n’avaient pas accès aux services de santé publique. La fermeture progressive des frontières en mars 2020 a déclenché un exode rapide de ces migrants. Selon les informations recueillies, entre 60 000 et 200 000 de ces travailleurs originaires du Cambodge, de la République démocratique populaire lao et du Myanmar ont quitté la Thaïlande ce mois-là, lorsque la fermeture des frontières a été annoncée pour la semaine suivante. Lorsque la pêche a repris, le départ d’un si grand nombre de travailleurs migrants a entraîné une grave pénurie de main-d’œuvre. 17. Les restrictions mises en place dans le contexte de la covid-19 ont également affecté la distribution et la logistique des aliments, de l’achat local à la vente en gros et de la logistique interrégionale à la consommation dans les villes. En ce qui concerne les chocs au niveau de l’offre, la demande du marché pour certains produits agricoles a diminué en raison de la fermeture de restaurants, de traiteurs et de cantines publiques, ce qui a eu pour effet de laisser de grandes quantités de fruits et légumes de saison invendus, voire non cueillis. Les perturbations des chaînes d’approvisionnement en aval ont également entraîné des stocks alimentaires excédentaires, mettant à rude épreuve le stockage et augmentant les pertes d’aliments hautement périssables. La pandémie a particulièrement touché le secteur de l’élevage et les industries connexes en raison des restrictions imposées aux mouvements des animaux, de la perception des risques sanitaires, de la fermeture des usines de transformation et de la pénurie d’intrants de production. En raison de la baisse de la demande, les négociants en produits frais n’ont pas pu vendre leurs produits sur les marchés urbains ou internationaux et se sont rabattus sur la vente locale à des prix inférieurs. 18. Les chaînes de valeur du poisson ont également été sévèrement restreintes dans plusieurs marchés de la région. Au Bangladesh, les restrictions imposées dans le contexte de la covid-19 ont empêché les pisciculteurs de récolter leurs poissons et donc d’entamer un nouveau cycle de production, ce qui a entraîné une baisse significative de l’approvisionnement en poissons au premier semestre de 2020. En Malaisie, le secteur de la pêche est fortement dépendant du commerce
10 APRC/22/2 international, et les perturbations commerciales liées à la covid-19 l’ont considérablement affecté. Selon les estimations du gouvernement, les revenus des pêcheurs ont diminué de 50 pour cent en raison de la crainte de contracter le virus, ce qui s’ajoute à la faible demande des Malaisiens qui ont préféré rester chez eux pendant cette période. Les produits périssables échangés ont connu des perturbations supplémentaires, notamment en l’absence de protocoles sanitaires harmonisés dans les ports ou lorsque des infections par le SARS-CoV-2 se sont produites sur des navires. IV. Effets de la covid-19 sur l’insécurité alimentaire et la malnutrition Malnutrition 19. La pandémie de covid-19 a aggravé l’insécurité alimentaire et la malnutrition en Asie et dans le Pacifique. En 2020, le nombre de personnes sous-alimentées a augmenté de 17 pour cent, passant de 322 millions à 376 millions, soit une augmentation similaire à celle observée au niveau mondial (18 pour cent)18. La prévalence de la sous-alimentation dans la région était de 8,7 pour cent en 2020, en hausse par rapport aux 7,5 pour cent de 2019, mais en forte baisse par rapport aux 14,3 pour cent de 2000, ce qui reflète deux décennies de progrès qui se sont ralentis ces dernières années, avant même la covid-19. En 2020, c’est en Océanie, à l’exclusion de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, que la prévalence était la plus élevée, suivie de l’Asie du Sud (15,8 pour cent), de l’Asie du Sud-Est (7,3 pour cent) et de l’Asie de l’Est (moins de 2,5 pour cent). Le nombre de personnes sous-alimentées dans la région atteignait 375,8 millions en 2020, contre 321,9 millions en 2019 (avant la covid), mais 127,9 millions de moins (soit 25,4 pour cent) qu’en 2000. C’est en Asie du Sud qu’a été enregistrée la plus forte augmentation de la sous-alimentation en 2020 dans le sillage de la covid-19, avec 50,5 millions de personnes supplémentaires sur une augmentation de 53,9 millions au niveau régional. 30 600 25 500 20 400 Pourcentage Millions 15 300 10 200 5 100 0 0 2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012 2014 2016 2018 2020 Prévalence de la sous-alimentation (Asie et Pacifique) Prévalence de la sous-alimentation (monde) Nombre de personnes sous-alimentées (Asie et Pacifique) Figure 4. Prévalence de la sous-alimentation dans le monde et en Asie-Pacifique et nombre de personnes sous-alimentées en Asie-Pacifique19. Notes: Les valeurs pour 2020 sont des projections. Les barres indiquent la fourchette des estimations pour 2020. Source: FAO et UNICEF. 18FAO. 2021c. Asia and the Pacific Regional Overview of Food Security and Nutrition 2021: Statistics and Trends. 19FAO et UNICEF. 2021. Asia and the Pacific – Regional Overview of Food Security and Nutrition 2021: Statistics and Trends.
APRC/22/2 11 25 20 Pourcentage 15 10 5 0 2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012 2014 2016 2018 2020 Asie et Pacifique Asie de l’Est Asie de l’Est hors Chine Océanie Océanie hors Australie et Nouvelle-Zélande Asie du Sud-Est Asie du Sud Asie du Sud hors Inde Figure 5. Prévalence de la sous-alimentation en Asie-Pacifique, par sous-région20. Notes: Les valeurs pour 2020 sont des projections. Source: FAO et UNICEF. 600 500 400 Millions 300 200 100 0 2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012 2014 2016 2018 2020 Asie du Sud Asie du Sud-Est Océanie Asie de l'Est Total Asie et Pacifique Figure 6. Nombre de personnes sous-alimentées en Asie-Pacifique, par sous-région21. Note: La prévalence estimée de la sous-alimentation pour l’Asie de l’Est à partir de 2010 est inférieure à 2,5 pour cent de la population, soit la valeur la plus faible pouvant être rapportée de manière fiable en utilisant la méthodologie de la prévalence de la sous-alimentation pour calculer le nombre de personnes sous-alimentées. Les valeurs pour 2020 sont des projections. Source: FAO et UNICEF. 20 Ibid. 21 Ibid.
12 APRC/22/2 Malnutrition chez les enfants 20. Les enfants sont particulièrement exposés à une malnutrition accrue pendant la pandémie de covid-19. La réduction des revenus des familles, la fermeture des écoles et l’isolement ont eu un impact négatif direct sur l’état nutritionnel des enfants et sur leur santé physique et mentale. Une étude a estimé que la pandémie avait entraîné une augmentation de 14,3 pour cent de l’émaciation modérée ou grave chez les enfants de moins de 5 ans22. De plus, les perturbations des chaînes d’approvisionnement en vaccins pendant la pandémie peuvent avoir causé ou favorisé une augmentation de la mortalité infantile. Les pays qui luttaient déjà contre la malnutrition ont vu le problème s’aggraver avec la covid-19. À Sri Lanka, 15 pour cent des enfants étaient émaciés et 30 pour cent des femmes étaient obèses avant la covid-19, alors qu’on estime que la pandémie a accru de 60 pour cent l’émaciation et le surpoids chez les enfants et l’obésité chez les femmes. En République de Corée, 23,9 pour cent des enfants étaient obèses ou en surpoids avant la covid-19, taux qui est passé à 31,4 pour cent après six mois de fermeture des écoles23. Effets sur la diversité alimentaire 21. L’inflation des prix alimentaires et les pertes de revenus réduisent la capacité des ménages pauvres à accéder à la nourriture et à maintenir la diversité alimentaire. La hausse des prix a contraint les ménages pauvres d’Afghanistan à réduire leur consommation alimentaire de près de 30 pour cent, tandis que les consommateurs pakistanais ont dû faire face au doublement du prix de la farine de blé. Au début de 2020, 30 pour cent des personnes interrogées en République démocratique populaire lao et 63,7 pour cent de celles interrogées en Malaisie ont confirmé avoir réduit leur consommation d’aliments nutritifs, tandis que les perturbations commerciales ont entraîné une augmentation de près de 30 pour cent des importations de riz en Papouasie-Nouvelle-Guinée. En Malaisie, le chômage a contraint de nombreux ménages à se tourner vers des aliments riches en calories et moins chers. De même, au Cambodge, les ménages ont réagi à la réduction de l’accès à la nourriture en se tournant vers des aliments moins chers, plus de la moitié des ménages réduisant la taille des repas et la consommation d’aliments riches en protéines, en vitamine A et en fer. Dans une enquête menée au Bangladesh, 75 pour cent des personnes interrogées ont dit ne pas avoir un accès suffisant à la nourriture à la maison, tandis que 91 pour cent ont déclaré ne pas avoir assez d’argent pour acheter de la nourriture24. En Inde, une enquête a révélé que 62 pour cent des personnes interrogées étaient confrontées à une réduction de la diversité de leur alimentation en raison de la covid-1925. 22. Les PEID ont été confrontés à de graves problèmes d’insécurité alimentaire lors de la pandémie de covid-19 en raison de leur capacité limitée de production et de diversification alimentaires et de leur dépendance excessive vis-à-vis du commerce, qui a été perturbé pendant la pandémie. Ceux qui dépendent du riz et du blé importés ont été contraints de se tourner vers les fruits et légumes disponibles localement lorsque la covid-19 a perturbé le commerce avec la fermeture des frontières. Cependant, la plupart des consommateurs des Fidji (64 pour cent) et, dans une moindre mesure, des Tonga (43 pour cent) ont eu des difficultés à acheter des fruits et légumes frais. Aux Fidji, de nombreux ménages qui dépendent des fruits de mer pour leur sécurité alimentaire et leur nutrition se sont mis au jardinage domestique pour produire des racines, des légumes et des fruits avec l’aide du gouvernement. Cependant, la diversité du régime alimentaire des ménages a diminué, ceux-ci ne pouvant consommer que trois ou quatre groupes d’aliments par jour, alors qu’ils en consommaient quatre ou cinq avant la covid-19. Aux Îles Salomon, les données recueillies par enquête téléphonique montrent qu’environ 62 pour cent des personnes interrogées ont dit ne pas avoir suffisamment de 22 Headey, D., Heidkamp, R., Osendarp, S., Ruel, M., Scott, N., Black, R., Shekar, M. et al. 2020. «Standing together for nutrition consortium. Impacts of COVID-19 on childhood malnutrition and nutrition-related mortality». The Lancet. Août 2020, 22;396(10250):519-521. DOI: https://doi.org/10.1016/S0140-6736(20)31647-0. 23 Kang, H.M., Jeong, D.C., Suh, B et Ahn, M.B. 2021. «The impact of the coronavirus disease-2019 pandemic on childhood obesity and vitamin D status». Journal of Korean Medical Science. Janvier 2021 18;36(3): e21. DOI: https://doi.org/10.3346/jkms.2021.36.e21. 24 Termeer, E., Brouwer, I. et De Boef, W. 2020. The rapid country assessment in Bangladesh [en ligne]. www.wur.nl/en/show/COVID-19-Food-System-Rapid-Country-Assessment-Bangladesh.htm. 25 Harris, J., Depenbusch, L., Pal, A.A., Nair R.M. et Ramasamy, S. 2020. «Food system disruption: initial livelihood and dietary effects of COVID-19 on vegetable producers in India». Food Security. 12, 841–851. DOI: https://doi.org/10.1007/s12571-020-01064-5.
APRC/22/2 13 nourriture en raison d’un manque d’argent26. En Papouasie-Nouvelle-Guinée, les ménages urbains pauvres et non pauvres ont subi une baisse de la consommation de calories de 19,8 pour cent et 15,8 pour cent, respectivement, tandis que pour les ménages ruraux la consommation totale de calories a diminué de 5,5 pour cent pour les pauvres ruraux et de 3,7 pour cent pour les non pauvres ruraux, malgré le passage, induit par les prix, de la patate douce à d’autres racines et tubercules (taro, sagou, manioc). À Samoa, en revanche, la pandémie semble avoir eu peu d’impact négatif sur les consommateurs, qui ont mis en avant l’augmentation de l’offre de légumes provenant de jardins familiaux. Insécurité alimentaire 23. En Asie et dans le Pacifique, en 2020, la prévalence de l’insécurité alimentaire modérée ou grave a augmenté pour atteindre 25,7 pour cent, contre 18,7 pour cent en 2014. On a relevé une augmentation de 3,3 points de pourcentage entre 2019 et 2020, lorsque la covid-19 est apparue27. L’augmentation a été particulièrement importante en Asie du Sud: de 37,6 pour cent en 2019 à 43,8 pour cent en 2020. Si l’insécurité alimentaire dans la région est globalement inférieure à la moyenne mondiale de 30,4 pour cent, elle reste particulièrement élevée en Asie du Sud, avec 43,8 pour cent en 2020, contre 18,8 pour cent en Asie du Sud-Est, 12 pour cent en Océanie et 7,8 pour cent en Asie de l’Est. Dans l’ensemble de la région, on estime que 1,1 milliard de personnes ont connu une insécurité alimentaire modérée ou grave en 2020, soit une augmentation de 341,9 millions, ou 44,4 pour cent, par rapport à 2014. Une augmentation de 148,9 millions s’est produite de 2019 à 2020 seulement, lorsque la covid-19 a provoqué d’importantes perturbations socioéconomiques qui ont eu des effets néfastes sur la sécurité alimentaire. Pour l’indicateur «insécurité alimentaire grave», on estime que 443,8 millions de personnes dans la région ont connu une insécurité alimentaire grave en 2020, soit une augmentation de 127,3 millions, ou 40,2 pour cent, par rapport à 2014. 24. Dans les pays en développement d’Asie, l’insécurité alimentaire a été suivie au moyen d’enquêtes nationales périodiques, dont certaines utilisaient l’échelle de mesure de l’insécurité alimentaire vécue (FIES). À Sri Lanka, une étude utilisant l’échelle FIES a révélé que près de la moitié des ménages en situation de sécurité alimentaire avant la covid-19 étaient passés en insécurité alimentaire. Au Cambodge, des enquêtes FIES ont montré que l’insécurité alimentaire modérée ou grave parmi les ménages pauvres avait augmenté de 34 à 55 pour cent entre décembre 2020 et mars 2021. Aux Philippines, le taux de faim est passé de 8,8 pour cent en 2019 à 21,1 pour cent en 2020. Au Bangladesh, la situation de la sécurité alimentaire a été suivie tout au long de la pandémie28. Trois semaines après le début du confinement, quelque 90 pour cent des ménages ont subi un choc de revenu négatif, touchant surtout les travailleurs journaliers occasionnels. La proportion de ménages en situation de sécurité alimentaire et d’insécurité alimentaire légère a diminué de 10 points de pourcentage, et le nombre de ménages en situation d’insécurité alimentaire sévère a augmenté de façon spectaculaire de 30 points de pourcentage. Seuls 1,5 pour cent des ménages qui étaient en situation d’insécurité alimentaire lors de la première vague ont vu leur situation s’améliorer. L’insécurité alimentaire a augmenté lors des première et deuxième vagues. Les enquêtes ont révélé que, pendant la première vague, environ 67 pour cent des participants étaient en situation d’insécurité alimentaire modérée, tandis que pendant la deuxième ce pourcentage était de 56 pour cent. 25. L’accès à la nourriture pour de nombreux résidents urbains vulnérables a également été compromis pendant le confinement lié à la pandémie. La forte densité de la population urbaine, soumise à des restrictions de mouvement, la distanciation sociale et la fermeture de nombreux marchés ont rendu l’accès à la nourriture particulièrement difficile pendant la pandémie. Les pauvres et les habitants des bidonvilles n’ont pas pu faire de réserves de nourriture, et la fermeture des marchés de rue pendant les quarantaines a encore aggravé l’insécurité alimentaire des citadins pauvres. 26 Banque mondiale. https://www.worldbank.org/en/data/interactive/2020/11/11/covid-19-high-frequency-monitoring- dashboard. 27 FAO. 2021c. Asia and the Pacific Regional Overview of Food Security and Nutrition 2021: Statistics and Trends. 28 Rahman, T., Akter, S., Rana, R., Sabuz, A., Jubayr, F. 2022. «How COVID-19 pandemic is affecting achieved food security in Bangladesh: A perspective with required policy interventions». Journal of Agriculture and Food Research, Vol. 7, Mars 2022.
Vous pouvez aussi lire