Gestion de la santé en entreprise

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Gestion de la santé en entreprise
HR Today Special                  2016

Gestion de la santé
en entreprise
Le supplément thématique de la revue HR Today

Stratégie: Une GSE flexible pour faire face à l’accélération des rythmes de travail – Best Case Axa Winterthur
Processus: Comment Romande Energie s’est soumise à un test d’évaluation du niveau de stress avec l’outil S-Tool
Résultats: Micarna et ses recettes de succès éprouvées
Gestion de la santé en entreprise
Le label Friendly Work Space est un label de qualité octroyé aux
                                                                                              entreprises qui ont intégré avec succès dans leur stratégie la gestion de
                                                                                              la santé en entreprise (GSE). La GSE implique la création de structures
                                                                                              internes et de processus qui garantissent des conditions favorables à la
                                                                                              santé des collaborateurs de manière durable et contribuent ainsi au
Une GSE systématique s’avère payante                                                          succès de l’entreprise.

LES DIFFÉRENTES ÉTAPES MENANT À UNE GSE SYSTÉMATIQUE

                                                                                         CONCEPT /
   I    SENSIBILISATION                  II      ANALYSE                           III   CONCRÉTISATION                   IV   MISE EN ŒUVRE

                                                                                         Fixation des objectifs de la
        Présentation de la GSE                   Analyse de la situation                                                       Self-assessment
                                                                                         GSE / définition d’indicateurs

        Visite clients et
                                                 Analyse des lacunes                     Atelier                               Readiness-test
        présentation

        Acquisition des                          Enquête auprès des                      Elaboration du concept                Assessment
        connaissances                            collaborateurs

        Formation continue                       S-Tool                                  Conseil                               Conseil
        Sensibilisation de la
                                                 Analyse des chiffres
        Direction / des cadres /
                                                 de la santé
        des collaborateurs

        Atelier                                  Conseil

        Engagement de
        la Direction pour                        Analyse globale                         Concept GSE                           GSE systématique
        le projet GSE

  V     ÉVALUATION / PROCESSUS D’AMÉLIORATION CO                             AC

        COMMUNICATION GSE

       A faire              Produits / mesures                Conseil facultatif
Gestion de la santé en entreprise
Sommaire / Editorial Gestion de la santé en entreprise

Sommaire
Introduction
04 C
    ulture de la santé Ancrer stratégiquement la gestion de la
   santé du personnel constitue le prérequis au développement
   d’une culture d’entreprise saine. Une contribution de Thomas
   Mattig, directeur de Promotion Santé Suisse.

05 J ob Crafting Le travail devient-il meilleur et plus sain si on
   l’organise soi-même? Professeur en psychologie du travail et de
   l’organisation, Gudela Grote plaide en faveur d’une participati-
   on active des collaborateurs dans l’organisation de leur travail.

06 B
    e healthy! Beaucoup d’entreprises sont malades. Les symp­
   tômes: des collaborateurs peu impliqués ou résignés. Michael        Chères lectrices, chers lecteurs,
   Sonntag, médecin spécialiste en psychiatrie et psychothérapie,
   préconise un rejet des systèmes de gestion traditionnels.           Rien n’influe autant sur la santé des collaborateurs que le comporte-
                                                                       ment et le style de management de leurs supérieurs. La culture
                                                                       d’entreprise joue là un rôle important qu’il convient de ne pas sous-
Stratégie
                                                                       estimer: soit elle est favorable à la santé des individus, c’est-à-dire
08 B
    est Case Axa Winterthur Une GSE pour tous? Les straté-            qu’elle les valorise et leur donne des signes de reconnaissance, soit
   gies commerciales évoluent. La vie privée des collaborateurs        elle les laisse se vider intérieurement. En ces temps où beaucoup
   aussi. D’où la nécessité de mettre en place un système de           d’entreprises peinent à trouver de la main-d’œuvre qualifiée, celles
   gestion de la santé en entreprise (GSE) flexible, expliquent        qui remporteront la course aux meilleurs talents seront celles qui
   Regula Keller et Esther Graf, responsables GSE de la compagnie      auront investi dans le développement de leur culture d’entreprise
   Axa Winterthur.                                                     pour humaniser cette dernière.

Processus                                                              Mais alors, pourquoi tant d’entreprises ont-elles de la peine à créer
                                                                       une culture d’entreprise saine? Pour Michael Sonntag, médecin spé-
11 B
    est Case Romande Energie L’outil S-Tool permet aux                cialisé en psychiatrie et psychothérapie, ainsi que pour Gudela Grote,
   entreprises de mesurer le niveau de stress du personnel. Jean-      professeur en psychologie du travail et de l’organisation, la cause du
   Georges Walter, Jean-Daniel Habegger et Christian Bieri se sont     problème est à rechercher dans la fausse représentation de l’humanité
   livrés à cet exercice de mise à nu.                                 qui prévaut encore trop souvent dans les entreprises organisées de
                                                                       manière traditionnelle. Celles-ci se fondent sur la conception de
Mesures                                                                l’humain explicitée dans la théorie X de McGregor, selon laquelle les
14 Les nouveaux espaces bureautiques Pour dépasser la «pen-           travailleurs ne se prennent pas eux-mêmes en charge et doivent par
    sée en silo» qui prévaut souvent, les entreprises misent de plus   conséquent être récompensés, poussés ou même punis (pages 5/6).
    en plus sur les bureaux multi-espaces. Daniel Schweingruber,
    directeur des nouveaux mondes de travail chez Witzig, et           Certes, les valeurs, normes et convictions véhiculées ne sont pas di-
    Nathalie Bourquenoud, directrice Human Development à la            rectement mesurables, mais elles sont perceptibles et ont des consé-
    Mobilière, en témoignent.                                          quences. Notamment sur la capacité d’innovation et donc la survie
                                                                       de l’entreprise. Trois exemples, celui d’Axa Winterthur, de Romande
                                                                       Energie et de Micarna, témoignent de cette perceptibilité de la cul-
Résultats
                                                                       ture d’entreprise.
16 Best
       Case Micarna Tandis que beaucoup d’entreprises en
   sont encore au stade des tentatives en matière de promotion         Promotion Santé Suisse mise aussi sur le changement culturel. Ainsi,
   de la santé au travail, Micarna s’est déjà vu décerner trois fois   le Congrès national pour la gestion de la santé en entreprise qui aura
   le label Friendly Work Space. Les explications de Stefan Harder,    lieu le 24 août à Zurich s’inscrira sous le signe de la culture d’entreprise.
   directeur RH, sur les raisons de ce succès.
                                                                       Nous vous souhaitons une lecture riche en découvertes.
19 L a GSE au service de l’image employeur Les plates-formes          Au nom de la rédaction
   d‘emploi jobs.ch et jobup.ch ont entamé une collaboration
   avec Promotion Santé Suisse. Interview de Renato Profico, CEO       Corinne Päper, rédactrice HR Today, responsable de l’édition spéciale
   de Jobcloud.                                                        «Gestion de la santé en entreprise»

HR Today Special 2016                                                                                                                             3
Gestion de la santé en entreprise
Gestion de la santé en entreprise Stratégie

Culture de la santé
Ancrer stratégiquement la gestion de la santé du personnel constitue la première étape vers le développement d’une culture
d’entreprise saine. Toutefois, cela ne suffit pas pour atteindre cet objectif. Un tel changement requiert un examen approfondi de
la façon dont la culture existante est vécue. Une contribution de Thomas Mattig, directeur de Promotion Santé Suisse.

                                  A quoi fait-on référence lorsqu’on parle de culture     gement culturel. Par exemple, il a pu être établi qu’une
                                  d’entreprise? Si l’on consulte la littérature écono-    bonne approche de la santé en entreprise entraînait in-
                          mique, on constate des divergences dans les définitions.        directement une diminution des absences pour cause de
                          Pour certains, il s’agirait de «l’ensemble des valeurs, nor-    maladie. Les sondages révèlent alors généralement une
                          mes et représentations communes». L’ethnologie, elle,           augmentation de la satisfaction des collaborateurs.
                          voit la culture comme un phénomène social «fonction-                 Mais ce ne sont là que certains aspects de la culture
                          nel, assimilable et changeant». La culture d’une organi-        d’entreprise. S’il est possible d’observer les comporte-
                          sation ou d’une entreprise pourrait même être comparée          ments humains et même de les mesurer, tel n’est pas le
                          à la personnalité d’un individu…                                cas des «valeurs, normes et convictions» qui, selon la
                               Une chose est toutefois claire: la culture est faite par   littérature économique, forment la culture d’entreprise.
Dr Thomas Mattig
                          les hommes. Les hommes sont des êtres complexes, et la          Or, bien que ces éléments ne soient pas directement
Thomas Mattig,
docteur en droit, est     complexité augmente dès lors qu’ils travaillent ensem-          mesurables, ils n’en sont pas moins perceptibles. Ils co-
directeur de la Fonda-    ble. Nous devons tenir compte de cette réalité si nous          lorent l’ambiance de travail, s’expriment à travers
tion Promotion Santé      voulons introduire un changement culturel en entreprise.        l’aménagement des locaux et se manifestent même dans
Suisse et chargé de            En soi, la notion de culture renvoie à l’agriculture.      les interactions entre les collaborateurs.
cours à l’Université de
                          Autrement dit: la culture, c’est quelque chose qui a pous-
Genève. Il a signé plu-
sieurs travaux et pu-     sé. Et derrière chaque culture d’entreprise se cache une        Pas une monoculture
blié dernièrement         histoire. La question est: comment pouvons-nous décou-          Dès lors, comment peut-on changer une culture
l’ouvrage «Healthy        vrir et appréhender cette histoire pour la prendre pleine-      d’entreprise? Promotion Santé Suisse propose un «Road-
Economy – Réflexions      ment en considération?                                          map» aux entreprises. La première étape consiste à dres-
pour une économie
                                                                                          ser un état des lieux. Les pas suivants doivent être adap-
saine», aux Editions
Neue Zürcher Zeitung.     Le changement culturel nécessite du temps                       tés à l’entreprise concernée – la culture de la santé n’est
                          Depuis environ dix ans, Promotion Santé Suisse s’occupe         pas une monoculture transposable telle quelle dans
                          intensivement de la gestion de la santé en entreprise. Des      toutes les entreprises. L’élément-clé est la communica-
                          instruments d’analyse ont été peaufinés et développés           tion. Il ne faut pas croire qu’on peut imposer le change-
                          de manière systématique. Des sondages ont permis                ment, avec des phrases bien enchâssées, depuis le som-
                          d’identifier des facteurs de stress, puis de les étudier. Les   met de la hiérarchie. Il convient en revanche de s’efforcer
                          entreprises des secteurs les plus divers reconnaissent          de créer des conditions-cadres qui favorisent les échanges
                          aujourd’hui l’importance de la santé et exploitent un           de vue et le débat contradictoire. Car une saine culture
                          système de gestion de la santé en entreprise (GSE).             d’entreprise aide à bien vivre les conflits en acceptant
                              La GSE constitue une étape importante sur la voie du        l’autre comme un être complexe et en reconnaissant que
                          changement culturel. Cependant, pour beaucoup,                  la productivité peut précisément résulter de la mise à
                          l’ancrage dans la réalité n’est pas encore totalement           profit des différences individuelles.                   n
                          abouti. Si l’on admet que la culture d’entreprise se                                                     Thomas Mattig­
                          construit sur des années, cela signifie implicitement que
                          le changement nécessite du temps. Dans une culture                Promotion Santé Suisse
                          d’entreprise – comme dans la personnalité d’un individu
                                                                                            Promotion Santé Suisse est une fondation de droit
                          – il y a des soubassements difficiles à cerner. Ainsi,            privé soutenue par les cantons et les assureurs. Elle a
                          l’expression «gestion de la santé» laisse entendre que la         pour mandat légal d’initier, de coordonner et
                          santé peut se gérer comme n’importe quel autre objectif           d’évaluer des mesures visant la promotion de la santé
                          entrepreneurial. On s’attend alors à ce que les résultats         et la prévention les maladies. La fondation est sou­
                          soient mesurables et comparables.                                 mise au contrôle de la Confédération. Avec une
                                                                                            ­contribution de vingt centimes par mois prélevée par
                                                                                             les assureurs-maladie, chaque personne en Suisse sou­
                          Valeurs, normes et convictions                                     tient la promotion de la santé. Le siège de Promotion
                          Il est vrai que des progrès ont été réalisés sur ce point.         Santé Suisse se trouve à Berne et à Lausanne.
                          Les effets de la GSE ont pu être démontrés. Cependant,             www.promotionsante.ch
                          les chiffres ne reflètent souvent qu’une partie du chan-

4                                                                                                                           HR Today Special 2016
Gestion de la santé en entreprise
Stratégie Gestion de la santé en entreprise

                              Job Crafting
                              Le travail devient-il meilleur et plus sain si on l’organise soi-même?
                              Gudela Grote aborde la question dans son exposé lors du Congrès
                              national pour la gestion de la santé en entreprise.

       Madame Grote, vous soutenez                                                                   leur disposition. Il est également important
       une culture d’entreprise «favora-                                                             qu’ils apprennent à sentir si on leur en de-
ble à la santé». Qu’entendez-vous par                                                                mande trop (ou trop peu), ou si c’est eux qui
là?                                                                                                  placent la barre trop haut. La culture
    Gudela Grote: La culture d’entreprise                                                            d’entreprise ne peut toutefois exercer
comprend tous les principes de base éla-                                                             qu’une influence ciblée. Par exemple, on
borés au cours du traitement des problèmes                                                           peut essayer de répandre de nouvelles va-
quotidiens. Ces principes sont jugés valides                                                         leurs dans une section précise du personnel.
par les travailleurs, et donc transmis aux nou-                                                      Mais lorsqu’une nouvelle culture prend
veaux employés. Lorsque des valeurs comme                                                            forme, c’est souvent suite à un processus
le respect mutuel, l’apprentissage commun                                                            long et difficile. L’examen des critères de
et l’évaluation adéquate des forces et des
faiblesses des employés sont présentes, c’est                                                           «Les gens sont toujours perçus, un
un bon point de départ pour créer des                                                                  siècle après les travaux de Frederick
­conditions de travail adaptées aux besoins et                                                           Taylor, comme des machines qui
 aux capacités des employés.
                                                                                                          devraient pouvoir fonctionner
Quelles sont les conditions pour voir ap-
                                                                                                              tout le temps à 100%.»
paraître une culture favorable à la san-                                                              Gundela Grote, professeur en psychologie
té?                                                                                                   du travail et de l’organisation, ETH Zurich
    Les principes de base auxquels je viens de
faire allusion doivent pouvoir évoluer et se                                                         base du bien-être en entreprise est en revan-
développer. En plus de cela, il est utile de                                                         che assez simple: arrêts de travail pour cause
trouver des modèles qui, au sein de               Gudela Grote est professeur en psycholo-           de maladie, présentéisme et démissions sont
l’entreprise, incarnent ces idées et témoig-      gie du travail et de l’organisation.               des critères négatifs, tandis que l’engagement
nent que les comportements qui en décou-                                                             personnel, l’esprit d’équipe, l’apprentissage
                                                  Job Crafting: le travail est-il meilleur et
lent seront récompensés.                          plus sain lorsqu’on l’organise soi-même?           permanent et l’amélioration continue sont
                                                  «Les hypothèses sur la façon dont les              des indicateurs positifs.
A votre avis, où se trouve le plus sou­           hommes  et les valeurs
vent la «faille» dans la pratique?                qui en dérivent dans la vie quotidienne            Quel est le rôle des RH?
    Je pense que les gens sont toujours per-      de l’entreprise déterminent précisément
                                                                                                          Il incombe aux professionnels des res-
                                                  la gestion de l’entreprise. Si ces valeurs
çus, un siècle après les travaux de Frederick     encouragent le respect mutuel,                     sources humaines de refléter le processus du
Taylor, comme des machines qui devraient          l’apprentissage commun et une juste                changement de culture afin de l’organiser de
pouvoir fonctionner tout le temps à 100%.         évaluation des forces et des faiblesses,           manière plus consciente. Le fait que le chan-
                                                  nous détenons une bonne base pour                  gement soit accepté ou même souhaité est
Comment peut-on changer la situation?             ­configurer le travail de telle sorte que les
                                                                                                     intimement lié à la culture existante. Chan-
                                                   exigences opérationnelles et le Job Craf-
     Les organisations développent toujours        ting se complètent. En outre, le Job Craf-
                                                                                                     ger une culture est un processus qui
une dynamique propre. L’une des tâches             ting devrait être ouvert à tous les colla-        s’apparente parfois à un exercice consistant
principales – et l’une des plus difficiles – de    borateurs et pas seulement aux           à se tirer soi-même d’une situation difficile.
la direction est d’observer, de réfléchir, et      ou aux personnes-clés.»                           Si les spécialistes RH veulent exercer une in-
d’influencer cette dynamique. Les décideurs                                                          fluence, ils doivent le faire en tenant compte
                                                  Congrès national pour la gestion de la
sont responsables de veiller à ce que les         santé en entreprise 2016
                                                                                                     de la culture existante. Mais ils doivent
­conditions de travail ne nuisent pas à la san-   Date: 24 août 2016                                 également changer les représentations qui
 té physique et psychique des collaborateurs      Heure: 11 h 45                                     circulent lorsque les valeurs de l’entreprise
 – mieux, de faire en sorte qu’elles y soient     Lieu: Université Irchel, Zurich                    mènent à des conditions de travail qui nui-
 favorables. Les employés doivent participer à    www.promotionsante.ch                              sent à la santé des employés.              n
 cet effort en utilisant tous les moyens mis à                                                                         Interview: Corinne Päper

HR Today Special 2016                                                                                                                               5
Gestion de la santé en entreprise
Gestion de la santé en entreprise Stratégie

                             Be healthy!
                             Pourquoi les entreprises qui ne remettent pas radicalement en question leur
                             système de management ne peuvent pas être saines: les explications de Michael
                             Sonntag au Congrès national pour la gestion de la santé en entreprise.

       Monsieur Sonntag, vous vous êtes                                                                         Cela ne peut réussir que si nous travail-
       engagé en faveur de «cultures                                                                       lons en accord avec la nature humaine, et
d’entreprise saines». Qu’entendez-vous                                                                     non contre elle. De par la génétique et la
par là?                                                                                                    neurobiologie, des principes fondamentaux
     Michael Sonntag: Dans un système sain,                                                                sont ancrés au plus profond de tous les
il n’y a pas de contradiction entre la santé                                                               hommes depuis des centaines de milliers
d’un collaborateur et celle de l’entreprise.                                                               d’années. Ces principes nous incitent à col-
L’un et l’autre se renforcent mutuellement.                                                                laborer avec nos semblables pour trouver des
Avec des conditions-cadres favorables, les                                                                 solutions à nos problèmes. Si nous voulons
collaborateurs s’investissent et restent en                                                                travailler en harmonie avec notre nature hu-
bonne santé. Dans la plupart des entreprises,                                                              maine, nous devons connaître ces règles de
cependant, on observe l’opposé. Souvent,                                                                   base de notre bien-être et créer en consé-
l’environnement de travail empêche les col-                                                                quence des structures et des processus adap-
laborateurs de s’engager. Cela entraîne pas-                                                               tés.
sablement de stress chronique et le taux
d’absence pour cause de maladie augmente                                                                   Où se situe pour vous la responsabilité
en conséquence.                                                                                            de la direction et du management?
                                                                                                                 La direction et le management ont pour
Avez-vous un exemple?                             Michael Sonntag est médecin spécialisé en psychi-        responsabilité d’organiser l’entreprise de
     Si un collaborateur reçoit un avertisse-     atrie et psychothérapie auprès de la société Sonn-       ­telle sorte que les collaborateurs aient à dé-
                                                  tag Consulting, à Berne.
ment parce qu’il a développé avec un client                                                                 penser le moins d’énergie possible pour pro-
une solution simple et bon marché sans en         Be healthy! Pourquoi notre système de gestion ne          duire un maximum de valeur ajoutée. Les
référer à son supérieur, sa motivation chute-     peut pas guérir?                                          systèmes de gestion traditionnels sont, de ce
ra immédiatement. Il se comportera de ma-         «Les entreprises manifestent souvent des symp­            point de vue, hautement inadéquats. Ils sont
nière passive et résignée, ce qui nuira à long    tômes de maladie: beaucoup de collaborateurs se           inefficaces, coûteux, et ils entravent
                                                  montrer résignés, ceux qui s’investissent sont ra-
terme à sa santé. Sans compter que le client                                                                l’adaptation rapide. En outre, ils étouffent le
                                                  res, leurs capacités d’adaptation sont faibles et
sera sans doute déçu et tenté de chercher         l’on observe un blocage au niveau de la culture de        potentiel des collaborateurs. La direction
ailleurs un meilleur partenaire en affaires.      l’innovation. En partant de l’examen de systèmes          doit commencer par reconnaître cet état de
                                                  dynamiques sains, les participants seront amenés          fait et décider de faire le nécessaire pour y
A quoi tout cela est-il dû?                       à reconnaître les méthodes de gestion traditi-            remédier.
                                                  onnelles et à comprendre pourquoi elles engen­
    L’un des grands problèmes, à mon avis,
                                                  drent souvent ce genre de manifestations. Il s’agit
c’est qu’on se base encore et toujours sur un     dès lors d’instaurer des conditions-cadres qui favo-     Quel est le rôle des RH?
modèle de représentation de l’humain dis­         risent la cohésion des collaborateurs, au lieu d’aller       Le responsable RH doit comprendre les
tordu, erroné et simplificateur. Bien sûr, vous   à l’encontre de la nature humaine – ceci non seu-        contextes sociaux et représenter la notion
ne trouverez certainement aucun chef pour         lement dans l’intérêt de leur santé, mais aussi pour     «working with human nature» dans tous les
                                                  rester compétitif. Sans changement de paradigme
vous dire qu’il souscrit à la théorie X de Mc                                                              secteurs de l’entreprise. Il s’agit de transmet-
                                                  et sans un refus clair des méthodes traditionnelles,
Gregor, selon laquelle il faut pousser la plu-    un rétablissement s’avère pour le moins compro-          tre explicitement la façon dont une culture
part des gens parce qu’ils ont du mal à se        mis, même avec beaucoup de bonne volonté.»               favorable à la santé agit. Les processus de
motiver eux-mêmes. Mais dans la pratique,                                                                  gestion qui répondent à cette nécessité sont
la plupart de nos décisions, procédures et        Congrès national pour la gestion de la santé en          tout à fait différents des processus traditi-
                                                  entreprise 2016
systèmes sont issus de ce modèle de repré-                                                                 onnels. Une compréhension globale de ce
                                                  Date: 24 août 2016
sentation.                                        Heure: 11 h 15                                           que représente une organisation «saine» est
                                                  Lieu: Université Irchel, Zurich                          nécessaire. Dans ce cas, le responsable RH
Comment peut-on changer cette situati-            www.promotionsante.ch                                    devient un partenaire actif.                 n
on?                                                                                                                         Interview: Corinne Päper

6                                                                                                                                HR Today Special 2016
Gestion de la santé en entreprise
Congrès national pour la gestion de la santé en entreprise 2016

 Culture d’entreprise et gestion de la santé.
  Comment les entreprises réussissent à se
          positionner à long terme
                       Mercredi 24 août 2016, Université Irchel, Zurich

09 h 15                             09 h 45                          10 h 15                              16 h 30
Vers une culture de la santé:       «Ma Trisa» ou comment la         Le bonheur au travail? Avant         Une culture d’entreprise
composantes et ancrage              culture d’entreprise peut        tout donner du sens, du plai-        favorable à la santé: entre
Norbert Thom, Prof. ém., ancien     avoir un impact sur le taux      sir et de la fierté à chaque         optimisation et renouvelle-
directeur de l’Institut d’organi-   d’absentéisme                    fonctionnaire!                       ment
sation et de personnel (IOP) de     Lucien Baumgaertner, directeur   Véronique Lagrange, directrice       PD Dr Georg Bauer, responsable
l’Université de Berne.              des ressources humaines,         Mobilité, Service public fédéral     de service, Institut d’épi-
                                    Trisa AG, Triengen.              Mobilité et Transports, Bruxelles.   démiologie, de biostatique et de
                                                                                                          prévention, Université de Zurich.

                 Trente autres symposiums économiques et scientifiques
                                    www.promotionsante.ch/congres-gse

Partenaires du congrès                                    Sponsors principaux
Gestion de la santé en entreprise
Gestion de la santé en entreprise Stratégie

           Best Case Axa Winterthur
           Profondément enraciné
           Pour répondre aux besoins du personnel, il est indispensable de se doter d’un système de gestion de la
           santé en entreprise (GSE) flexible. Nous avons demandé aux responsables GSE de la compagnie Axa Winterthur,
           Regula Keller et Esther Graf, d’expliquer leurs priorités stratégiques.

         Des femmes et des hommes de tout            l’apprentissage par essais-erreurs; des mo-       autres le nombre de cas absolus, les heures
         âge, des clients privés, des entreprises:   dèles de travail flexibles; des structures «fa-   de consultation effectuées et les prestations
la clientèle d’Axa est bigarrée – à l’image du       mily friendly».                                   en matière de GSE qui ont été les plus plébis-
personnel de l’entreprise. Ce mélange ref-                                                             citées. Enfin, les collaborateurs et leurs supé-
lète d’ailleurs assez fidèlement la compositi-       Intégration du système GSE                        rieurs hiérarchiques sont régulièrement
on de la population suisse, selon les deux           Une entreprise aussi hétérogène ne se laisse      sondés sur leurs prestations comme sur leur
responsables GSE de la compagnie                     pas diriger depuis un seul et unique service.     santé. Il est important «que le système GSE
d’assurances, Regula Keller et Esther Graf.          Huit collaborateurs au sein du département        soit intégré et non pas utilisé comme un ex-
Les collaborateurs proviennent de 33 nations         RH sont responsables en matière de GSE,           tra. C’est à cette condition seulement qu’il
différentes; environ 26% d’entre eux travail-        mais un groupe de pilotage se charge de           est possible de se faire entendre», estime
lent à temps partiel et, ensemble, ils repré-        garantir qu’il puisse y avoir entre deux et       Regula Keller. Au sein d’Axa, la gestion de la
sentent une centaine de corps de métier.             cinq échanges par année entre les divers          santé se diffuse donc à différents niveaux:
Cette diversité trouve sa justification écono-       secteurs impliqués (comme l’école interne         dans la charte de l’entreprise, dans le règle-
mique dans la nécessité de s’adapter                 «Axa Academy» pour les collaborateurs et          ment du personnel, dans les formations pour
­cons­tamment aux besoins de la clientèle et         les cadres, le Diversity Management, la dé-       les cadres... avec, à chaque fois, l’objectif
 de trouver sans cesse des solutions inno-           légation de personnel, le Corporate Respon-       d’ancrer les comportements.
 vantes. Il s’agit pour cela de s’ouvrir à diffé-                                                           Jusqu’à quel point les besoins des colla-
 rents points de vue et de faire preuve de                                                             borateurs diffèrent-ils les uns des autres en
                                                       «Il est important que le système GSE
 souplesse – sans pour autant perdre des yeux                                                          matière de flexibilité du travail? Toutes les
 les besoins des collaborateurs.                     soit intégré et non pas utilisé comme un          personnes ne se ressemblent pas; toutes les
      C’est dans la «culture bleue» que réside       extra. C’est à cette condition seulement          personnes âgées de 55 ans et au-delà non
 la recette du succès d’Axa: cette culture ou-        qu’il est possible de se faire entendre.»        plus, explique Esther Graf. Et de préciser:
 verte, directe et respectueuse constitue en                Regula Keller, responsable GSE,
                                                                                                       «Cela dépend moins de l’âge que du con-
 effet l’un des «piliers de la gestion de la san-                  Axa Winterthur                      texte ou des conditions de vie.» Ainsi, cer-
 té en entreprise», affirment Regula Keller et                                                         tains collaborateurs ont souhaité partir tra-
 Esther Graf. Elle détermine si les travailleurs                                                       vailler à l’étranger à l’âge de 55 ans, tandis
                                                                                                                                                          Photos: Jeroen Singer

 parviendront à concevoir le sens de leur tra-       sibility et le Case Management). «Cette mise      que d’autres ont eu des enfants à passé 40
 vail et à le trouver gérable, précisent-elles.      en réseau nous aide à reconnaître de bonne        ans. «Moi-même, je n’ai commencé à étu-
 Au cours de l’interview, certains concepts et       heure les éventuels problèmes», souligne          dier qu’à partir de 39 ans», confie Regula
 mots-clés reviennent cycliquement: estime,          Esther Graf. En outre, une fois par année, les    Keller. A noter que pour beaucoup de colla-
 confiance, discours franc. Mais aussi: une          deux spécialistes GSE livrent à la direction un   borateurs d’un certain âge, l’ascension pro-
 culture      d’entreprise       qui     favorise    «Health & Safety Report» indiquant entre          fessionnelle «n’occupe pas une place pré-

8                                                                                                                            HR Today Special 2016
Gestion de la santé en entreprise
Strategie Betriebliches Gesundheitsmanagement

                                                                   Une évidence: chez Axa Winterthur,
                                                                   l’intérêt de la diversité ne fait aucun
                                                                   doute pour Regula Keller et Esther
                                                                   Graf, coresponsables de la GSE.
Photos: Jeroen Singer

                        HR Today Special 2016                                                      9
Gestion de la santé en entreprise
Gestion de la santé en entreprise Stratégie

                                                                                                  indifféremment plébiscitées par les collabo-
                                                                                                  rateurs, quel que soit leur âge, les séminaires
                                                                                                  ont surtout la cote auprès des plus âgés.
                                                                                                  Esther Graf a une hypothèse: en début de
                                                                                                  carrière, on veut que tout aille vite et la san-
                                                                                                  té est reléguée au second plan des préoccu-
                                                                                                  pations, parce qu’on la considère comme
                                                                                                  quelque chose de normal.
                                                                                                       A la question de savoir quelles sont les
                                                                                                  dernières tendances en matière de GSE, Re-
                                                                                                  gula Keller répond que «la santé n’est pas un
                                                                                                  sujet nouveau. Ce qu’il faut pour rester en
                                                                                                  bonne santé n’a pas grandement changé au
                                                                                                  fil du temps.» Plutôt que de tendances, la
                                                                                                  spécialiste préfère parler de classiques ou
                                                                                                  «Evergreens»: activité physique, alimentati-
                                                                                                  on, détente et prévention du stress. Ce der-
                                                                                                  nier point a pris de l’importance. La multipli-
                                                                                                  cation des options offertes par les nouvelles
                                                                                                  technologies se trouve à l’origine de cette
                                                                                                  évolution. «Autrefois, il y avait des cadres
                                                                                                  fixes qui se chargeaient de mettre des limites
                                                                                                  aux collaborateurs», remarque Esther Graf.
                                                                                                  Il n’y avait pas ou peu de flexibilité: soit on
                                                                                                  allait au bureau, soit on n’y allait pas; et la

                                                                                                   «Aujourd’hui, beaucoup de collabora-
                                                                                                   teurs pensent que tout doit être possi-
                                                                                                       ble. Ils tassent leur calendrier.»
                                                                                                        Esther Graf, responsable GSE, Axa
                                                                                                                   ­Winterthur

pondérante» d’après Esther Graf: ils veulent    pendant la pause de midi au check-up médi-        porte restait fermée le dimanche.
simplement éprouver du plaisir à travailler –   cal en passant par un lunch assorti d’un          «Aujourd’hui, beaucoup de collaborateurs
tout comme les jeunes –, se sentir valorisés    cours sur la pleine conscience ou une initia-     pensent que tout doit être possible. Ils tas-
et tendre à un équilibre entre vie professi-    tion à l’ergonomie. Par ailleurs, l’entreprise    sent leur calendrier.» Chaque minute de la
onnelle et vie privée. Au fond, tout le monde   offre des cours de formation et de perfec-        journée est planifiée. Il ne reste quasiment
attache de l’importance au fait de pouvoir      tionnement qui permettent aux collabora-          plus de temps pour le repas de midi, alors
travailler de manière flexible, et tout le      teurs de s’orienter à différentes étapes de       qu’autrefois, on rentrait à la maison pour
monde est sensible à une bonne culture          leur carrière ou phases de leur vie. Pour les     prendre le temps de faire ceci ou cela. En
d’entreprise et à une «culture de l’erreur».    collaborateurs qui s’approchent de l’âge de       conséquence, certains collaborateurs ont
                                                la retraite, des séminaires spécifiques ont été   l’impression de courir comme un hamster
Une offre de GSE en réponse à                   mis sur pied. Les parents aussi peuvent se        dans une roue: «Ils se précipitent d’échéance
des besoins multiples                           retrouver sur le coup de midi pour un «lunch      en échéance.» Il s’agit de se réaligner avec
En plus d’une vaste palette d’offres            parents» où ils ont l’occasion de discuter,       ses propres valeurs et de s’interroger sur ses
d’accompagnement et de conseil – par ex-        par-delà les niveaux hiérarchiques, de sujets     propres limites. C’est ici que les entretiens
emple en vue d’une réintégration professi-      variés comme la garde des enfants pendant         réguliers avec les supérieurs hiérarchiques
onnelle après une maladie ou un accident,       les vacances.                                     prennent tout leur sens – car il n’est pas dés­
en cas de conflits interpersonnels, ou encore                                                     honorant d’avouer qu’on est épuisé. «Cela
lorsqu’un collaborateur est confronté à des     Utilisation des offres et                         peut arriver à tout le monde », assure Esther
difficultés de performances –, Axa met des      pyramide des âges                                 Graf. Le dialogue ouvert n’en devient alors
outils à disposition de l’ensemble du person­   Tandis que les offres telles que séances de       que plus important.                         n
nel. Cela va des séances d’activité physique    massage ou abonnements de fitness sont                                         Corinne Päper

10                                                                                                                      HR Today Special 2016
Processus Gestion de la santé en entreprise

              Best Case Energie Romande
              Une entreprise au courant
               La société Romande Energie a toujours beaucoup investi pour la sécurité et la santé de ses quelque 700 collabora-
               teurs. Son engagement dans la prévention des risques psychosociaux s’est récemment manifesté à travers
               l’utilisation de l’outil d’évaluation du stress S-Tool, de la Fondation Promotion Santé Suisse.

                                                                              En tandem: Jean-Georges Walter,
                                                                              responsable de la gestion RH et
                                                                              Christian Bieri, responsable de la
                                                                              gestion de la santé au sein de
                                                                              Romande Energie.

HR Today Special 2016                                                                                                      11
Gestion de la santé en entreprise Processus

       Un soleil étincelant au milieu d’un ciel    sique et ergonomique. C’est une question          Etant donné les nouveaux défis qui nous at-
       sans nuages se reflète dans les parois      plus profonde de bien-être général», souli-       tendent sur le marché des énergies, nous
vitrées du siège social de l’entreprise Roman-     gne Jean-Daniel Habegger. Ce n’est pas une        avons décidé de mesurer le niveau de stress
de Energie, à Morges. Jean-Georges Walter,         fin en soi non plus: «Nous espérons que les       au sein de l’entreprise. Pour ce faire, avons
responsable du management opérationnel             activités extraprofessionnelles favorisent la     choisi l’outil S-Tool de Promotion Santé Suis-
au sein d’une équipe HR de six personnes,          culture de résolution des conflits, ce qui peut   se», explique Jean-Georges Walter. «Le
nous accueille chaleureusement dans un bu-         contribuer indirectement à faire diminuer le      stress possède une composante psychoso-
reau avec vue sur le lac Léman et les Alpes,       taux d’absences.» Le fait que ces opportuni-      ciale qui se laisse analyser via le sondage S-
occupé par Jean-Daniel Habegger, directeur         tés soient effectivement saisies par              Tool. Cet outil permet en effet d’examiner les
RH. Ce dernier prend place autour de la table                                                        différents facteurs impliqués – par exemple,
avec Christian Bieri, responsable de la santé                                                        le stress lié au changement avec un senti-
et de la sécurité (SST) au travail de Romande          «Il ne s’agit pas uniquement de               ment d’insécurité de l’emploi, ou le stress
Energie – la plus grande entreprise de pro-             promouvoir la santé dans une                 induit par une surcharge de travail.»
duction, de distribution et de commercialisa-       perspective physique et ergonomique.                 Aussi, la profonde mutation de
tion d’énergie de Suisse romande.                                                                    l’économie énergétique n’épargne pas
                                                     C’est une question plus profonde de
                                                                                                     Romande Energie. L’entreprise détenue en
Les absences: indicateur de stress                            bien-être général.»                    majorité par le canton et les communes vau-
«Dans notre business, les erreurs survenant                   Jean-Daniel Habegger                   dois a pu opérer pendant de longues années
sur le lieu de travail sont susceptibles d’avoir         Directeur RH, Romande Energie               – tout comme n’importe quelle autre com-
des conséquences graves», déclare Jean-                                                              pagnie d’électricité dans le même cas – sur
Georges Walter, qui a travaillé en tant                                                              un marché protégé. La libéralisation du mar-
qu’ingénieur dans le domaine des réseaux à         l’ensemble des collaborateurs est régulière-      ché de l’électricité la confronte actuellement
haute tension avant de rejoindre les RH de         ment vérifié, indépendamment de l’évolution       à une concurrence accrue et à un change-
Romande Energie. «Une conscience accrue            de l’absentéisme, par des sondages internes.      ment des attentes de la clientèle. Cette nou-
de la sécurité fait partie intégrante de notre     «Nous avons constaté que ce sont les dépar-       velle configuration lui impose d’adapter con-
culture d’entreprise. Elle constitue une bon-      tements qui affichent les taux de satisfaction    stamment ses processus afin de rester com-
ne base pour prendre des mesures favora-           les plus élevés qui présentent aussi les taux     pétitive – ce qui accroît encore la nécessité
bles à la santé dans le domaine des risques        d’absences les plus bas», dit Jean-Georges        de développer de nouvelles compétences et
psychosociaux», estime Christian Bieri, qui        Walter. «Il y a là une corrélation. Les ab-       de trouver de nouveaux profils. Ces facteurs
s’occupe depuis 2006 du service SST menant         sences n’ont pas toujours une cause médica-       peuvent avoir une influence sur le bien-être
notamment diverses campagnes de préven-            le; souvent, elles comportent aussi une di-       au travail des collaborateurs.
tion touchant la santé ou la sécurité (et allant   mension sociale en rapport avec les condi-            À noter que la moyenne d’âge au sein de
de la promotion de l’activité physique aux         tions de travail et la qualité des relations      Romande Energie est de 48 ans. «Comme
conseils diététiques en passant par des ac-        dans l’équipe et avec les supérieurs.» Or, les    S-Tool permet de mesurer le niveau de stress
tions de sensibilisation anti-tabac). «Nous        statistiques de ces dernières années mont-        et la qualité de la vie sur le lieu de travail,
cultivons aussi une culture d’entreprise qui       rent une constante tendance à la baisse – un      nous pouvons mieux connaître les répercus-
encourage les échanges et la coopération au        signal très encourageant.                         sions des changements internes et ce, dans
sein du personnel par-delà les échelons hié-                                                         chaque département», poursuit Christian
rarchiques et les secteurs – et ce même en         Mesurer le stress avec «S-Tool»                   Bieri.
dehors du travail, grâce à des activités spor-     Loin de Romande Energie l’idée de se repo-
tives et culturelles», précise Jean-Georges        ser sur ses lauriers: «Ces dernières années,      Approche bottom-up
Walter. «Il ne s’agit pas uniquement de pro-       nous avons eu de plusieurs cas d’épuisement       Jean-Georges Walter va avoir un nouveau
mouvoir la santé dans une perspective phy-         professionnel, à divers niveaux hiérarchiques.    rôle à jouer: «Après avoir présenté les résul-

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Processus Gestion de la santé en entreprise

Fotos: Jeroen Singer

                             «Grâce à une analyse comparative au niveau suisse,                        «Une conscience accrue de la sécurité fait partie intégrante
                               basée sur des indices de référence, nous savons                         de notre culture d’entreprise. Elle constitue une bonne base
                              maintenant où nous nous situons exactement par                             pour prendre des mesures favorables à la santé dans le
                                      rapport aux autres entreprises.»                                   domaine de la prévention des risques psychosociaux.»
                                                Jean-Georges Walter,                                                               Christian Bieri
                                               Responsable Gestion RH                                                      Responsable Santé et Sécurité
                                                  Romande Energie                                                           au Travail Romande Energie

                       tats du sondage à la direction, je vais perso-      atéliers spécifiques avec le personnel.» Ob-        davantage sur les risques psychosociaux et
                       nnellement rencontrer chaque directeur              jectif: élaborer avec les collaborateurs, dans      les facteurs de stress qui peuvent toucher
                       pour lui restituer les résultats détaillés de son   une approche bottom-up, des idées de solu-          nos collaborateurs. Ensuite, quelques idées-
                       unité.» Ainsi, les champs du sondage qui            tions qui seront ensuite présentées au ma-          clé se sont dégagées, par exemple sur la fa-
                       sont surlignés en orange appellent des éc-          nagement. Une douzaine d’atéliers de ce             çon dont il est possible d’induire un meilleur
                       laircissements. L’outil de la Fondation Pro-                                                            équilibre travail-vie professionnelle, ou sur
                       motion Santé Suisse est en effet construit de                                                           notre manière de gérer nos craintes en ma-
                       telle sorte qu’il permet de visualiser avec des        «Nous sommes convaincus que les                  tière de sécurité de l’emploi», affirme Chri-
                       couleurs (vert, orange ou rouge), sur une            activités extraprofessionnelles favori-            stian Bieri qui tire un bilan intermédiaire po-
                       échelle allant de 1 à 100, le degré d’urgence       sent la culture de résolution des conflits,         sitif.
                       d’un besoin d’intervention. À partir de 60,                                                                  Jean-Georges Walter ajoute: «Cet outil
                                                                             ce qui peut contribuer indirectement
                       on entre dans la zone orange; au-delà de 90,                                                            nous a donné plus d’informations que nous
                       on bascule dans le rouge.
                                                                             à faire diminuer le taux d’absences.»             ne pensions pouvoir en obtenir. Grâce à une
                            «Les champs qui s’avèrent critiques dans                   Jean-Daniel Habegger                    analyse comparative au niveau suisse, basée
                       notre entreprise varient d’une unité à                     Directeur RH, Romande Energie                sur des indices de référence, nous savons
                       l’autre», révèle Jean-Georges Walter. «Si l’on                                                          maintenant où nous nous situons exacte-
                       se met d’accord sur le fait qu’une mesure                                                               ment par rapport aux autres entreprises. Fi-
                       particulière s’impose dans un secteur, nous         genre sont prévus jusqu’au mois d’août.             nalement, cette démarche a confirmé une
                       avons la possibilité de faire appel à des con-          Pour Romande Energie, trois champs de           réalité que nous connaissions déjà, à savoir
                       seillers externes de Promotion Santé Suisse,        réflexion se sont cristallisés grâce à l’outil S-   que nous avons de bonnes antennes.» n
                       lesquels sont habilités à mettre sur pied des       Tool. «Tout d’abord, nous en avons appris                                           Simon Bühler

                       HR Today Special 2016                                                                                                                               13
M
Gestion de la santé en entreprise Mesures

Les nouveaux espaces bureautiques
Pour devenir à la fois plus innovantes, plus agiles, et aussi pour dépasser la «pensée en silo», beaucoup d’entreprises trans-
forment leurs bureaux en espaces de travail «multipostes» qui doivent faciliter les échanges interpersonnels. Celui qui opte
pour ce concept doit cependant adapter sa ligne de conduite et sa culture d’entreprise en conséquence. Nous en avons parlé
avec Daniel Schweingruber, directeur du Centre des nouveaux mondes de travail chez Witzig The Office Company.

        A quoi ressemble l’environnement                                                             qu’il sache s’organiser pour les mettre à pro-
        de travail optimal?                                                                          fit. Agir de manière responsable et auto­
     Daniel Schweingruber: Cet espace                                                                nome représente toutefois un défi important
idéal comporte différents endroits où les col-                                                       pour les collaborateurs qui sont habitués
laborateurs peuvent, selon leurs besoins, se                                                         depuis des années à recevoir des missions et
concentrer, trouver l’inspiration, commu-                                                            des consignes claires. De ce fait, les RH et les
niquer avec les collègues ou se retirer. En                                                          supérieurs doivent faire preuve de sensibilité
tous les cas, les collaborateurs devraient                                                           et proposer des formations continues aux
pouvoir choisir eux-mêmes où ils vont tra-                                                           collaborateurs pour que ces derniers puis-
vailler. Cela peut être au sein de l’entreprise,                                                     sent travailler de manière productive dans les
mais aussi à la maison ou dans un centre de                                                          bureaux multipostes. Les effets d’une telle
location de bureaux en co-working. Beau­               «Laisser des surfaces de bureau               modification sont sous-estimés dans la pra-
coup d’entreprises ont reconnu le potentiel                                                          tique, parce que la direction a tendance à
                                                   inoccupées ne fait aucun sens du point
de ce concept et mettent en place les condi-                                                         partir du principe que les collaborateurs vont
tions préalables nécessaires. Mais il y a en-        de vue écologique et économique.»               aisément s’habituer aux bureaux multi-
core passablement de rattrapage à faire.            Daniel Schweingruber, directeur du Centre        postes. Là, une opportunité est gaspillée.
                                                    des nouveaux mondes de travail et Work-
                                                     space Consulting chez Witzig The Office
Quels sont les principaux avantages de                                                               A quoi ressembleront nos locaux de tra-
                                                                    Company
ces nouveaux espaces de travail?                                                                     vail en 2020?
     Nous savons que plus de 30% des postes                                                              La fonction des bureaux est en train
de travail en Suisse ne sont pas utilisés, soit                                                      d’évoluer fortement du lieu de travail vers un
parce que les collaborateurs sont en réunion,      agenda aidera à ne pas oublier de parler de       espace de rencontre, d’échanges interper-
soit parce qu’ils se trouvent à l’extérieur avec   points importants ou délicats. Par ailleurs, on   sonnels et de co-création. Tandis que la par-
des clients ou encore parce qu’ils sont en         entend souvent dire que les collaborateurs        celle dédiée au travail de bureau en soi se
vacances, en arrêt maladie ou en formation.        qui n’ont pas de bureau souffrent de man-         réduit, les zones de communication et de
Laisser ces surfaces de bureau inoccupées ne       quer de «point d’ancrage». Une solution           travail créatif gagnent en importance. Avec
fait aucun sens du point de vue écologique         consiste à libérer un secteur pour les laisser    la digitalisation, le besoin en espaces de ran-
et économique. Cela ne veut pas dire qu’il         installer leurs propres meubles de bureau,        gement se réduit toujours plus. A l’avenir,
faille impérativement économiser de la             par exemple, ou à prévoir des casiers pour        des écrans de tous types seront insérés dans
place. Mais les espaces disponibles peuvent        leur permettre de ranger leur matériel.           les tables de travail et les parois, et l’inter­
être utilisés comme zones de communica-                                                              activité en deviendra encore plus attrayante.
tion pour permettre à une nouvelle dyna-           La variété des options offertes n’est-elle        Peut-être aussi verrons-nous arriver les pre-
mique de travail de surgir de manière infor-       pas déconcertante?                                miers robots dans les bureaux...             n
melle et spontanée. Cela procure de grands              Les collaborateurs pourront se sentir dé-                       Interview: Corinne Päper
avantages aux entreprises, notamment en            passés s’ils ne voient pas le sens de ces es-
termes de qualité de la communication et de        paces de travail, ou s’ils ne comprennent pas
                                                                                                       Littérature
force d’innovation…                                le concept. Ils devraient donc être préparés à
                                                   utiliser, dès le début du projet, toutes les        «Nouveaux espaces bureautiques – déve-
… et les désavantages?                             nouvelles possibilités qui leur seront propo-       loppement de compétences pour un plus
                                                                                                       faible niveau de stress». Tel est le titre du
     Selon la taille et le concept multi-espaces   sées. Si ces espaces sont introduits et que la      document de travail élaboré en allemand
choisi, il n’est plus certain que les supérieurs   culture d’entreprise est modifiée en consé-         par Promotion Santé Suisse en collabora-
et leurs collaborateurs puissent se rencontrer     quence, les options augmentent considé-             tion avec la société Witzig. On y trouve
tous les jours. C’est pourquoi l’échange réci-     rablement. Ainsi, chaque collaborateur              des points de repère pour l’organisation
proque doit être planifié. Pour ce faire, il est   pourra décider x fois par jour quand et où il       du travail et la direction.
important de ne pas se limiter à des réunions      travaillera. Evidemment, il est nécessaire          www.promotionsante.ch
informelles autour d’un lunch. Tenir un            qu’il connaisse les options à sa disposition et

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Mesures
                                                                                                                 Mesures Gestion de la santé en entreprise

                               Les bureaux multi-espaces vus par la Mobilière
           En décembre 2015, 160 collaborateurs de                                                                 Bourquenoud. Aujourd’hui, les collaborateurs
           la Mobilière ont pris possession de leurs                                                               ne travaillent pratiquement plus avec le pa-
           nouveaux bureaux. La directrice du                                                                      pier, ils n’ont pas de place de travail fixe et ils
           secteur Human Development du Groupe                                                                     expérimentent la culture du «clean and clear
           parle de ses expériences avec les nou-                                                                  desk policy».
           veaux espaces de travail.                                                                                    La conduite managériale a également
                                                                                                                   fortement changé. «La performance compte
           Ce ne sont pas seulement les collaborateurs                                                             aujourd’hui davantage que le temps de pré-
           et cadres de quatre secteurs différents (déve-                                                          sence.» Plus personne n’en est réduit à tra-
           loppement d’entreprise, communication                                                                   vailler assis au bureau, les collaborateurs peu-
           d’entreprise, Corporate Social Responsibility
                                                                   «Nous n’avons pas seulement                     vent choisir l’endroit qui leur convient. Ré-
           et Human Development) qui ont abandonné                démonté des parois, nous avons                   seauter et communiquer est devenu possible
           leurs places de travail fixes. Le CEO de la com-       également créé les conditions de                 à partir de n’importe quel endroit grâce aux
           pagnie d’assurances, Markus Hongler, a                   base nécessaires à la culture                  nouvelles technologies. Jusqu’à ce que ce
           également troqué son ancien bureau pour le                  du travail de demain.»                      projet-pilote aboutisse, un team interdiscipli-
           nouvel espace de travail ouvert. Quelle a été                                                           naire a travaillé pendant près d’une année à
                                                                        Nathalie Bourquenoud,
           la raison de ce changement radical? «Avec                                                               sa réalisation. L’équipe englobait des mem-
                                                                      directrice du secteur Human
           l’avènement de la digitalisation, de nouvelles               Development, Mobilière                     bres de la direction du secteur Human Deve-
           formes de travail sont apparues. Les collabo-                                                           lopment (qui a coordonné le projet), mais
           rateurs réclament de la flexibilité et souhai-                                                          également des représentants de plusieurs
           tent pouvoir travailler sans contrainte de         un second temps, d’autres surfaces du même           autres services: Facility Management,
           lieu», explique Nathalie Bourquenoud, direc-       bâtiment ainsi que le siège de la direction à        construction, informatique et Corporate Res­
           trice du secteur Human Development. En ou-         Nyon seront également transformés. Le                ponsibility. Pour Nathalie Bourquenoud, la
           tre, les nouvelles technologies ont changé les     ­concept des nouveaux paysages bureautiques          valeur ajoutée de ces nouveaux espaces bu-
           professions, les processus et les modes de          a été pleinement exploité: pour créer une am-       reautiques transparaît dans «l’enthousiasme
           communication.                                      biance propice au travail, des parois ont été       des collaborateurs». Le taux d’occupation des
                Tout cela exige de faire preuve de qualités    supprimées et remplacées par du bois, avec des      locaux de 80% semble prouver que la Mobi-
           telles que la curiosité et l’ouverture d’esprit.    couleurs chaudes et des lignes incurvées. Ce        lière ne se contente pas d’utiliser les surfaces
           Le nouvel environnement de travail doit «ins­       nouvel environnement comprend des zones             disponibles de manière optimale: elle pour-
           pirer les collaborateurs et leur permettre de       aménagées spécifiquement pour favoriser la          suit aussi une ligne directrice claire tout en
           continuer à se développer, à participer et à        concentration, permettre le repos ou stimuler       investissant pour l’avenir. «Nous n’avons pas
           innover», souligne Nathalie Bourquenoud. En         les échanges et le travail en groupe, par exem-     seulement démonté des parois, nous avons
           six mois, environ 2000 m2 de surface de bu-         ple. Cette redéfinition de l’environnement se       également créé les conditions de base néces-
           reau au siège social bernois ont été convertis      répercute sur la cohabitation. «L’espace déter-     saires à la culture du travail de demain.» ■
           en paysage bureautique multi-espaces. Dans          mine la culture du travail», estime Nathalie                                         Corinne Päper

                                                                                                                     Evénement
                                                                                                                     Congrès national pour la gestion de la
                                                                                                                     santé en entreprise 2016
                                                                                                                     «Move, Speed und Inspiration im Work-
                                                                                                                     space der Mobiliar-Versicherung». Anna
                                                                                                                     Coradi, directrice de projet Workspace
                                                                                                                     Solutions chez Witzig The Office
                                                                                                                     Company, Claudia Giorgetti Del Monte,
                                                                                                                     directrice du secteur Développement de
                                                                                                                     l’organisation et de la culture de la
                                                                                                                     Mobilière Suisse.
           Photo: Nik Hunger

                                                                                                                     Date: 24 août 2016
                                                                                                                     Lieu: Université Irchel, Zurich
                                                                                                                     Informations complémentaires:
                                                                                                                     www.promotionsante.ch

          HR Today Special 2016                                                                                                                                     15
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