HOWARD GRIFFITHS - Clic Musique !

 
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Clic Musique !                                     ClicMag n° 46
       Votre disquaire classique, jazz, world           Février 2017

             HOWARD GRIFFITHS
                   Un chef rare, à la direction de l’inconnu

                                                                      © Peter Hundert

Retrouvez les 25 000 références de notre catalogue sur www.clicmusique.com !
HOWARD GRIFFITHS - Clic Musique !
Discographie Howard Griffiths

   Bach à Brandebourg : Œuvres              Brahms : Symphonies n° 1 et 2             J. Brahms : Symphonies n° 3 et 4 B. Britten : Variations sur un thème L. Cherubini : Symphonie en ré            Franz Danzi : Les symphonies
orchestrales de J.S. et C.P.E. Bach         Brandenburgisches Staasorchester            Brandenburgisches Staatsorchester      de Bridge; Saint Nicolas        majeur; Il Giulio Sabino; Lodoiska Orchestra della Svizzera Italiana; Howard
  Brandenburgisches Staatsorchester             Frankfurt; Howard Griffiths                 Frankfurt; Howard Griffiths   Mark Tucker; Zucher Kammerorchester; Orchestre de Chambre de Zurich; Howard             Griffiths
      Frankfurt; Howard Griffiths                                                                                                   Howard Griffiths                          Griffiths
     KL1502 - 1 CD Klanglogo                   KL1513 - 1 CD Klanglogo                     KL1514 - 1 CD Klanglogo                  CLA2302 - 1 CD Claves                    CPO999521 - 1 CD CPO                    CPO777351 - 2 CD CPO

 Happy Go Lucky : Strauss, Offen-         Franz A. Hoffmeister : Symphonies           Joseph Holbrooke : Amontillado; Joseph Holbrooke : «The Raven»; Concertos pour instruments tradi- Salomon Jadassohn : Symphonie
     bach, Gershwin, Bizet…                        en do et ré majeur                       The Viking; Ulalume               «Auld Land Syne»; Concerto violon tionnels suisses de J. Daetwyler, H.                             n° 1-4
 Brandenburg State Orchestra Frankfurt;   Orchestra della Svizzera Italiana; Howard   Brandenburg State Orchestra Frankfurt; J. Ingolfsson, violon; Brandenburgisches               Marti, P. Huber                Brandenbourgisches Staatsorchester
           Howard Griffiths                               Griffiths                             Howard Griffiths             Staatsorchester Frankfurt; Howard Griffiths Orchestre de Chambre de Zürich; Griffiths     Frankfurt; Howard Griffiths
     KL1516 - 1 CD Klanglogo                    CPO777895 - 1 CD CPO                        CPO777442 - 1 CD CPO                    CPO777636 - 1 CD CPO                MGB6167 - 1 CD Mus. Suisses                  CPO777607 - 2 CD CPO

    Rudolf Kelterborn : Concerto           Gustave Kerker : Opérettes «Die Musique de films : Star Wars, Liste Orchestra Lollipops : Elgar, Nielsen, Dora Pejacevic : Concerto pour Ignaz J. Pleyel : Symphonies B 115,
violoncelle et orchestre; Namenlos; oberen Zehntautend», «Burning to de Schindler, James Bond, Pirates                      Gershwin, Strauss II...           piano et œuvres orchestrales                          126 et 140
   Concerto pour clarinette basse          Sing», «The Belle of New York»         des Caraïbes, Apocalypse Now…         Brandenburgisches Staatsorchester Oliver Triendl, piano; Ingeborg Danz, alto; Orchestre de Chambre de Zurich; Howard
 Monighetti; Müller; OS de Bâle; Griffiths Kottmair; Stefanoff; Wiemer; Griffiths  Brandenburgisches Staatsorchester...     Frankfurt; Howard Griffiths           Howard Griffiths, direction                         Griffiths
  MGB6182 - 1 CD Mus. Suisses                   CPO777509 - 2 CD CPO                       KL1518 - 1 CD Klanglogo                 KL1506 - 1 CD Klanglogo                   CPO777916 - 1 CD CPO                    CPO999759 - 1 CD CPO

Ferdinand Ries : Die Räuberbraut F. Ries : Intégrale des symphonies F. Ries : Ouvertures «La Fiancée                  F. Ries : Symphonies n° 3 et 5      F. Ries : Symphonies n° 4 et 6      Ahmed A. Saygun : Concertos pour
     op. 156, opéra en 3 actes          Orchestre de Chambre de Zurich; Howard de Messine», «Don Carlos», «Bar- Orchestre de Chambre de Zurich; Howard Orchestre de Chambre de Zurich; Howard            piano n° 1 et 2
Ruth Ziesak; Thomas Blondelle; OS de la                Griffiths                     dique», «L’Apparition»                       Griffiths                           Griffiths                G. Onay, piano; OS de Bilkent; Howard
  radio de Cologne; Howard Griffiths                                             OS de la radio de Cologne; Griffiths                                                                                         Griffiths
      CPO777655 - 2 CD CPO                      CPO777216 - 4 CD CPO                        CPO777609 - 1 CD CPO                    CPO999547 - 1 CD CPO                     CPO999836 - 1 CD CPO                    CPO777289 - 1 CD CPO

 Ahmed A. Saygun : Concerto pour           M. Schütter : Concerto piano;           L. Spohr : Symphonies n° 3 et 10;    L. Spohr : Symphonies n° 2 et 8          L. Spohr : Symphonies n° 4 et 5;              Louis Spohr : Symphonies n° 7 et 9
            alto, op. 59               Pastorale clarinette et orchestre / H.           Grand Concert Ouverture       OP de la radio allemande; Howard Griffiths     Ouverture «Der Matrose»                     OP de la radio de Hanovre; Howard
  Mirjam Tschopp, alto; OS de Bilkent; Schaeuble : Concerto piano, op. 50              OP de la NDR; Howard Griffiths                                               OP de la NDR; Howard Griffiths                             Griffiths
           Howard Griffiths            A. Rebstein; Orchestre de Zürich; Griffiths
      CPO777290 - 1 CD CPO                  MGB6162 - 1 CD Mus. Suisses                   CPO777177 - 1 SACD CPO                  CPO777178 - 1 SACD CPO                   CPO777745 - 1 SACD CPO                   CPO777746 - 1 SACD CPO

 L. Spohr : Symphonies n° 1 et 6 ;         A. Tansman : Concertino, Stele,            Johann B. Vanhal : 2 Symphonies;         Pavel Vranicky : Grande sinfonie,        C.M. von Weber : Intégrale des        Johann W. Wilms : Symphonies n° 1
        Ouverture, op. 12                   Elégie pour piano et orchestre                 Concerto pour violoncelle              op. 31; Symphonie, op. 52                        ouvertures                    et 4; Ouverture en ré majeur
    OP de la NDR; Howard Griffiths        C. Seibert; Brandenburgisches Staatsor-       István Várdai, violoncelle; Camerata    OP de la radio de Hanovre; Howard       OS de la radio de Cologne; Howard         OP de la NDR; Howard Griffiths
                                             chester Frankfurt; Howard Griffiths             Schweiz; Howard Griffiths                        Griffiths                               Griffiths
     CPO777179 - 1 SACD CPO                     CPO777449 - 1 CD CPO                        CPO777612 - 1 CD CPO                  CPO777054 - 1 SACD CPO                     CPO777831 - 1 CD CPO                   CPO777209 - 1 SACD CPO

2  ClicMag février 2017  www.clicmusique.com
Artiste du mois

Une présence forte, en disque ou en concert, l’anglais Howard
Griffiths, actuellement chef principal de Brandenburgisches
Staatsorchester Frankfurt et souvent à la tête des plus grands
orchestres aux quatre coins du monde, s’est donné comme
mission la découverte de répertoires et de compositeurs peu
connus, allant du 18è siècle à nos jours.

                                                   merveille les multiples qualités de cette
                                                   musique : notamment le charme des
                                                   mélodies et la finesse de l’orchestration.
                                                   (Jérôme Angouillant)

Louis Spohr (1784-1859)
Symphonies n° 1-10
                                                                                                  Howard Griffiths
                                                                                                  son exploration du gigantesque cata-
Orchestre Philharmonique de la radio de Hanovre;                                                  logue de cette figure majeure du renou-
Howard Griffiths, direction                                                                       veau de la musique britannique au XXe
CPO555105 • 5 SACD CPO                                                                            Siècle (Jean-Charles Hoffelé)

S    aluons l’heureuse initiative du label         Joseph Holbrooke (1878-1958)
     CPO de faire paraître en un seul cof-         Variations pour grand orchestre, op. 60;
fret les cinq volumes des symphonies               Concerto pour violon et orchestre, op. 59;
du compositeur allemand Louis Spohr                Poème pour orchestre n° 1, op. 25
interprétées par Howard Griffiths et le            Judith Ingolfsson, violon; Brandenburgisches
NDR RadioPhilarmonie (Hanovre). Les                Staatsorchester Frankfurt; Howard Griffiths                                                          Johannes Brahms (1833-1897)
amateurs de Spohr (ils sont nombreux)              CPO777636 • 1 CD CPO                                                                                 Symphonies n° 3 et 4

                                                   J
devaient se contenter jusque-là de                     osef Holbrooke demeure le génie                                                                  Brandenburgisches Staatsorchester Frankfurt;
l’intégrale d’Alfred Walter (chez Marco                maudit de la musique britannique                                                                 Howard Griffiths
Polo, désuète et assez mal enregistrée)            comme le fut Rued Langaard pour la                                                                   KL1514 • 1 CD Klanglogo
et celle d’Howard Shelley chez Hyperion                                                           Franz Krommer (1759-1831)
                                                                                                                                                        P
                                                   musique danoise : des originaux abso-                                                                    our cet enregistrement des Troi-
de meilleure qualité mais dispersée. Né            lus, libres dans la marge, maudits par         Symphonies n° 1-3
                                                                                                                                                            sième et Quatrième Symphonies de
à Brunswick en 1784, Ludwig Spohr                  l’institution malgré leurs succès publics      Orchestra della Svizzera Italiana; Howard Griffiths
débute sa carrière comme violoniste (il                                                                                                                 Brahms, Howard Griffiths s’est appuyé
                                                   et l’admiration des lettrés, réfugiés dans     CPO555099 • 1 CD CPO                                  sur la dernière édition de l’Urtext tout en
écrira quinze concertos) avant d’être un

                                                                                                  L
                                                   leurs œuvres qui les rédimeront pour               e Tchèque Franz Krommer est l’un                  intégrant les travaux d’un certain Fritz
chef d’orchestre et pédagogue réputé en
                                                   la postérité. C’est à peu prés entendu             des principaux compositeurs ger-                  Steinbach (1855-1916), chef allemand
Angleterre puis à Vienne et à Kassel où
                                                   pour les Symphonies de Langaard, bien          maniques de la période classique                      reconnu et cité par le compositeur lui-
il restera le musicien attitré du Prince
                                                   moins pour Holbrooke dont le génie             aux côtés de Haydn, Mozart, Gluck
Electeur jusqu’à sa mort en 1859. Il                                                                                                                    même comme étant, à l’époque, son
                                                   orchestral est pourtant saisissant. Com-       et CPE Bach. Violoniste, organiste et
compose beaucoup de musique de                                                                                                                          meilleur interprète. Directeur musical de
                                                   mencez donc le disque par son dernier          chef d’orchestre, il devient en 1813 le
chambre avant de se consacrer à l’or-                                                                                                                   la Hofkapelle de Meiningen (Thuringe)
                                                   opus, ce Corbeau (The Raven). Les au-          compositeur officiel de la Cour Impé-
chestre. Outre les concertos (pour vio-                                                                                                                 entre 1886 et 1903, il inscrit les œuvres
                                                   diteurs du Crystal Palace le découvrent        riale d’Autriche. Bien qu’il soit alors
lon et pour clarinette), dix symphonies                                                                                                                 de Brahms au répertoire de cette forma-
                                                   un soir de 1900, conte noir inspiré par        considéré comme l’égal de Haydn et
et quelques oratorios verront le jour.                                                                                                                  tion alors très renommée : travaillant
                                                   Poe, l’opus 1 d’un jeune homme qui             que son imposante production (plus
Ces œuvres témoignent avant tout d’un                                                                                                                   sans cesse ses partitions d’orchestre
                                                   n’a pas encore passé ses 22 ans. Sen-          de 300 œuvres répertoriées) soit reçue
métier sûr, sans révéler de véritable per-                                                                                                              au point de les couvrir d’innombrables
sonnalité. Fidèle à la grande forme, ama-          sation devant cet orchestre fuligineux,        favorablement par la critique, sa mu-
                                                   sombre, génialement composé qui dis-           sique souffre de la concurrence locale                notes, commentaires et observations, il
teur de contrepoint, Spohr puise dans le
                                                   tille un malaise. Des dames se seraient        (Beethoven notamment) et se démode                    instaure par sa manière de diriger ces
répertoire classique (Mozart était son
                                                   évanouies dit-on. En tous cas la carrière      rapidement : sitôt après sa mort son                  symphonies une « tradition de Meinin-
dieu) pour composer des symphonies
riches de mélodies fluides et orches-              s’ouvrait devant le jeune compositeur.         nom tombe dans l’oubli. Ecrites entre                 gen » cautionnée par Brahms et perpé-
trées toujours efficacement. Privilégiant          Il restera fidèle à Poe, proposant sa          1797 et 1807, ces trois symphonies de                 tuée ensuite par ses élèves et succes-
pupitres ou solistes à la manière de               propre version des Carillons qui tient         jeunesse (sur un total de douze) se dis-              seurs. L’apport de Steinbach consiste
concertos. Si le pédagogue, interprète             tête fièrement à celle de Rachmani-            tinguent par un style alerte et inventif,             essentiellement à s’autoriser de légères
et compositeur Spohr fréquente des                 nov, dressant le portrait de l’écrivain        et un brillant traitement des vents (fruit            variations liées aux tempi (plutôt enle-
musiciens aussi différents que Weber,              américain dans sa Première Sympho-             de quelques années de service auprès                  vés) et à l’équilibre des ensembles et
Liszt, Berlioz, Wagner ou Paganini, il             nie. Le fantastique, l’étrange furent sa       d’un général d’infanterie) qui met en                 des voix, permettant ainsi d’accentuer
restera toujours étanche aux nouveau-              vraie nature. Et qui entendra ici « The        valeur leurs couleurs et leurs timbres,               le phrasé de certains thèmes et de
tés de son époque et à l’influence de              Raven » dans la lecture crépusculaire et       particulièrement lors des dialogues                   nuancer ou contraster certaines cou-
ces derniers. On entend dans ce classi-            fantasmagorique qu’en délivre Horward          avec les cordes. Alors que la Première                leurs tonales. Même si cette version ne
cisme élégant et hautain le raffinement            Griffiths et son orchestre ne pourra être      Symphonie opère une habile synthèse                   bouleverse pas une discographie déjà
d’un Mendelssohn, quelques échos                   que saisi par l’art suggestif du compo-        des styles de Haydn et Mozart, les deux
                                                                                                                                                        pléthorique, le résultat est toutefois
beethovéniens et des réminiscences ro-             siteur : rien ne s’était vu en Albion de si    suivantes s’émancipent de ces modèles
                                                                                                                                                        intéressant et probant : ces deux sym-
mantiques (Schubert). La Sixième sym-              sombre, de si prégnant, de si singulier.       et adoptent un langage plus personnel
                                                   Le reste du disque illustre l’autre face,                                                            phonies gagnent en effet sensiblement
phonie dite « Historique » offre ainsi un                                                         où pointent déjà des accents préro-
                                                   celle du compositeur adoubé, installé,                                                               en fluidité, vigueur et clarté, bénéfi-
panel d’emprunts stylistiques de Bach                                                             mantiques : les thèmes s’affirment, les
à Auber. Les dernières symphonies                  qui sait aussi briller, cycle de varia-        contrastes deviennent plus marqués et                 ciant d’une lecture analytique et d’un
s’orientent plus spécifiquement vers le            tions habilement troussée ou Concerto          des effets dramatiques apparaissent :                 orchestre d’une grande ductilité dont
chromatisme. Le chef anglais Homard                pour violon bavard et jouissif, jouant         notes répétées, silences, chromatismes,               la pâte sonore s’éclaircit en adoptant la
Griffiths est le spécialiste d’un certain          des clichés avec une certaine ironie.          dissonances... Vive, ardente et précise,              disposition spatiale d’origine (premiers
répertoire, souvent méconnu, à la char-            Mais le vrai visage d’Holbrooke est tout       l’interprétation d’Howard Griffiths à la              et seconds violons séparés), autant de
nière entre classicisme et romantisme.             entier dans le coup de maître de « The         tête de l’Orchestre de la Suisse Italienne            détails qui rafraîchissent et renouvellent
Aidé d’un orchestre rodé, il rend à                Raven ». Puisse CPO poursuivre dans            est superlative. (Alexis Brodsky)                     notre écoute. (Alexis Brodsky)

                                                                                                                                            www.clicmusique.com  ClicMag février 2017  3
Alphabétique

Sélection ClicMag !                               L   es trois cantates qui font l’objet de
                                                      ce disque ont été composées pour la
                                                  période de Noël selon le calendrier litur-
                                                                                                         peu raide de Dominik Wörner) offre
                                                                                                         encore un des plus beaux airs de can-
                                                                                                         tate composés par Bach « Ich wünschte
                                                                                                                                                            publiées par Bach comme opus 1. Le
                                                                                                                                                            pianiste Charles Owen qui s’est distin-
                                                                                                                                                            gué outre-Atlantique par des disques
                                                  gique et ont en commun d’être pour les                 mir den Tod » (La mort est mon désir).             Fauré (Intégrales des Barcarolles et des
                                                  deux solistes soprano et basse. Johann                 Extraordinaire Hana Blazikova (Une                 Nocturnes), joue sur un piano moderne
                                                  Sebastian Bach conçoit ces cantates                    fidèle de l’intégrale Suzuki).Timbre déli-         (Un Steinway D). Les tempi sont modé-
                                                  « en dialogue » comme un dialogue spi-                 cat, expression soignée, incarnation à la          rés, l’articulation est soignée sans au-
                                                  rituel entre le Christ (Personnifié par la             fois sensuelle et émouvante. Elle fournit          cune affectation (zéro ornementation).
                                                  basse) et l’âme (Chanté par la soprano).               dans ses quatre airs une interprétation            Cette interprétation fluide et languide
                                                  S’y ajoute presque naturellement, pour                 de référence. Dominik Wörner s’avère               comme un discret courant d’eau claire,
                                                  un enregistrement signé du hautboïste                  ensuite bien plus convaincant dans                 vaut surtout pour sa lisibilité, comme si
                                                  Alfredo Bernardini, un concerto pour                   l’agitation et la frénésie du « Ja ja ich          l’auditeur lisait simultanément les notes
                                                  hautbois d’amour et orchestre qui per-                 kann die Feinde schlagen ». Le Kirch-              sur la partition. A contrario, si les indi-
Johann Sebastian Bach (1685-1750)
                                                  met aussi un dialogue concertant. La                   heimer Bach Consort n’a rien à envier              cations (et les reprises) sont respec-
Cantates en dialogue BWV 32, 57 et 58;            cantate BWV 32 montre ainsi quelques                   aux autres ensembles baroques actuels              tées, chaque mouvement dansé n’est
Concerto hautbois d’amour et orchestre,           exemples de dialogue voix-instrument :                 qui font les beaux jours des cantates
                                                                                                                                                            pas vraiment caractérisé et ce malgré
BWV 1055a                                         Soprano-hautbois dans le sublime                       du Cantor (Collegium Japan ou Ricer-
                                                                                                                                                            le beau timbre du piano. Toccatas et
Hana Blazikova, soprano; Dominik Wörner, basse;
                                                  air d’ouverture « Liebster Jésus mein                  car Consort) même articulation, même
                                                                                                                                                            Sinfonias d’ouverture sont abordées
                                                  Verlangen », Basse violon (Numéro                      rayonnement, et même intrépidité chez
Kirchheimer BachConsort; Alfredo Bernardini,                                                                                                                platement, et les « galanteries », ces
                                                  3) et enfin un tonique duo Basse-So-                   le soliste improvisé chef : Alfredo Ber-
hautbois, direction                                                                                                                                         danses brèves et bigarrées, sont ternes
                                                  prano. La cantate BWV 57 « Selig ist                   nardini (Concerto BWV 1055). (Jérôme
CPO555068 • 1 CD CPO                                                                                                                                        et dénervées. A la longue, cette absence
                                                  der mann » (chanté ici par la basse un                 Angouillant)
                                                                                                                                                            de parti-pris, d’atmosphère, gomme
                                                                                                                                                            les contrastes entre les Partitas et plus
                                                                                                                                                            embêtant, entre chaque section (un
                                                                                                                                                            prélude d’une bourrée, une allemande
                                                                                                                                                            d’une courante). Exemple : la gigue
                                                                                                                                                            fuguée de la Cinquième Partita, ébou-
                                                                                                                                                            riffante sous les doigts d’un Scott Ross
                                                                                                                                                            ou d’un Glenn Gould, s’avère ici bien
                                                                                                                                                            prosaïque. A réserver aux amateurs de
                                                                                                                                                            beau piano. (Jérôme Angouillant)

Marco Dall’ Aquila (?1480-?1538)                  Johann Sebastian Bach (1685-1750)                      Johann Sebastian Bach (1685-1750)
9 Ricercars pour luth; Préambule n° 71;           Suites pour luth, BWV 995-997 et 1006A                 Partitas n° 1-6, BWV 825-830
Fantaisies sur « Vous usurpes » et n° 29;         (version guitare)                                      Charles Owen, piano
C’est a grand tort; J’ayme le cueur de            Giacomo Copiello, guitare; Victor Valisena, guitare;   AVIE2366 • 2 CD AVIE Records
m’amye; La traditora; Bernardo non puol           Michele Tedesco, guitare; Giacomo Susani, guitare
stare
Sandro Volta, luth
                                                  STR37055 • 1 CD Stradivarius                           L  es cinq Partitas de Bach composées
                                                                                                            entre 1726 1731 sont des suites

BRIL95261 • 1 CD Brilliant Classics               I ls sont quatre guitaristes du conserva-
                                                    toire de Vicenza (Italie), jeunes (de 20
                                                                                                         de mouvements dansés dans le but,
                                                                                                         indique l’incipit, « … D’enchanter les

A    près son volume 1 paru en 2014               à 25 ans), talentueux, et représentent,                esprits des amateurs de musique »
     (BRIL94805) le luthiste italien San-         sous l’égide de Stephano Grondona, la                  par leur charme « cosmopolite » et la              Johann Sebastian Bach (1685-1750)
dro Volta, grand expert de la période             nouvelle école de guitare italienne et,                sophistication de leur écriture. Elles             Le clavier bien tempéré, livre 1 et 2
                                                  assurément, placent la barre bien haut.                constituent le premier recueil du Cla-             Sviatoslav Richter, piano (Innsbruck, 1973)
Renaissance, poursuit son travail sur ce
répertoire en enregistrant une série de           Pour preuve cette heureuse parution du                 vier-Ubung et furent intégralement                 PDVA1501 • 1 DVD Audio Parnassus
« Recercar » (traduisez par recherche)            label stradivarius où chaque guitariste
composée par Marco Dall’Aquila qui                interprète une des quatre suites les
                                                                                                                                                            Baker, ont mis leurs timbres uniques
bien qu’originaire d’Aquila, vécut prin-          plus emblématiques pour luth de Bach,
                                                  BWV995 pour G.Copiello, BWV996 pour
                                                                                                         Sélection ClicMag !                                mais surtout leurs génies. Révolu-
cipalement à Venise où il obtint, en                                                                                                                        tion de l’interprétation historiquement
privilège de son talent exceptionnel de           V.Valisena, BWV997 pour M.Tedesco et                                                                      informée oblige, les altos masculins
compositeur et luthiste, la vente d’im-           BWV1006a pour G.Susani. Bach à la                                                                         s’en sont emparés – Iestyn Davies y
pression pour tablatures de luth durant           guitare, c’est merveilleusement beau                                                                      ajoute « Ich habe genug »; mais dès
une période de dix ans. Le Recercar est           mais extrêmement complexe dans                                                                            l’entreprise pionnière de Nikolaus Har-
                                                  l’interprétation et l’expression, pié-                                                                    noncourt et de Gustav Leonhardt, Paul
une forme musicale instrumentale ty-
                                                  geant nombre de guitaristes parmi les                                                                     Esswood importa ici son allemand
pique de cette période basé sur un pro-
                                                  plus grands, s’imaginant, à tort, qu’il                                                                   exotique : le contre-ténor allemand
cédé d’imitation qui enchaîne différents
                                                  faut jouer vite, afficher une virtuosité                                                                  n’existait alors simplement pas, ou du
épisodes musicaux. C’est une forme
                                                  hors norme pour asseoir sa notoriété,                                                                     moins plus. Iestyn Davies, plus formé
plus ancienne et moins élaborée que la                                                                   Johann Sebastian Bach (1685-1750)                  à Haendel, que ce soit à la chapelle ou
                                                  entraînant des surenchères techniques
fugue qui lui succèdera. Outre ces Re-                                                                   Cantates BWV 52, 54, 82, 170 et 174                au théâtre comme l’a prouvé récem-
                                                  où la musique est ramenée au second
cercar, Volta interprète, avec expression                                                                Iestyn Davies, contre-ténor; Ensemble Arcangelo;   ment un désarmant David, y rappelle
                                                  plan. Cet aparté posé, ces magnifiques
et maîtrise, de très belles fantaisies, déjà                                                             Jonathan Cohen, direction                          plutôt Deller qu’Eswood, question de
                                                  pages, illustrant au mieux les potentiali-
très structurées, et termine ce disque                                                                   CDA68111 • 1 CD Hyperion                           timbres, d’art du mot, de ligne, et même
                                                  tés polyphoniques de la guitare, exigent

                                                                                                         I
par deux intéressants et rares duos de                                                                     ls ont franchis le guet. Après deux              d’aigus, agile et lunaire à la fois, comme
                                                  un haut niveau instrumental ce qui ne
luths avec l’apport de Fabio Refrigeri. A                                                                  albums consacrés à l’empire des cas-             si, à l’imitation de Deller justement, il
                                                  fait nullement défaut aux interprètes.
l’instar du célèbre Francesco da Milano,                                                                 trats (Guadagni, puis Porpora), Iestyn             mettait dans les textes paraboliques
                                                  Mais la réussite de ces solistes, c’est
Marco Dall’Aquila a considérablement                                                                     Davies, Arcangelo et Jonathan Cohen                des Kantaten les émotions des Songs
                                                  précisément leur exceptionnelle musi-
                                                                                                         entrent chez Bach. Pour les seconds                de Dowland ou de Purcell. Certains
contribué à l’essor de la musique ita-            calité, leur profonde sensibilité, où la
                                                                                                         ils y sont depuis leur fondation, mais             crieront au détournement, pas moi, qui
lienne pour luth au XVIe siècle et les            technique est au service de la musique                 l’enfant du Yorkshire y est venu au                entends ce timbre magique et cet art
vingt pièces présentées offrent un sur-           et non le contraire. Malgré un jeu en-                 disque voici relativement peu, contre-             discret se fondre dans les (trop ?) jolis
prenant aperçu de l’inventivité remar-            core perfectible, on reste très agréa-                 ténor dans une Johannes Passion pour               décors d’Arcangelo. Refermant l’album,
quable de ce polyphoniste sur le luth à           blement surpris par l’homogénéité et la                le même éditeur. Le voici gravant trois            me prends une irrésistible envie de
six chœurs. Un magnifique voyage dans             grande qualité des interprétations par-                Cantates dont deux où les contralto, d’            réentendre « Vergnügte Ruh’, beliebte
le temps avec cette musique intimiste et          ticulièrement pour Tedesco et Susani.                  Hilde Rössel-Majdan à Aafe Heynis en               Seelenlust » par Deller et Leonhardt….
apaisante. (Philippe Zanoly)                      (Philippe Zanoly)                                      passant par Maureen Forrester et Janet             (Jean-Charles Hoffelé)

4  ClicMag février 2017  www.clicmusique.com
Les deux pianistes y font preuve d’une
Sélection ClicMag !                               belle connivence. Ils soignent particu-
                                                  lièrement les ambiances, quitte à perdre
                                                  en mordant rythmique. Car l’habillage
                                                  orchestral pare le mouvement lent
                                                  d’appels de trompettes inquiétants mais
                                                  adoucit la percussivité de l’instrumen-
                                                  tation originale. Comme Bartók, Victor
                                                  Babin a fui l’Europe en guerre pour les
                                                  États-Unis. Mais contrairement à son                 Johannes Brahms (1833-1897)                     Max Bruch (1838-1920)
                                                  aîné, sa carrière d’enseignant prendra le            Symphonie n° 1, op. 68                          Concerto pour violon n° 2, op. 44; Pièce
                                                  pas sur sa composition, bien que son                 Orchestre du Gewandhaus de Leipzig; Franz       de concert, op. 84; In Memoriam, op. 65;
Béla Bartók      (1881-1945)
                                                                                                       Konwitschny                                     Adagio Appassionato, op. 57
                                                  concerto pour deux pianos soit joué à
Concerto pour 2 pianos, percussion et                                                                  0300839BC • 1 CD Berlin Classics                Jack Liebeck, violon; BBC Scottish Symphony
                                                  Cleveland par George Szell. L’écriture,
orchestre / V. Babin : Concerto pour 2                                                                                                                 Orchestra; Martyn Brabbins, direction

                                                                                                       L
pianos et orchestre                               résolument néoclassique, assimile                        e label Berlin Classics poursuit son
                                                                                                                                                       CDA68055 • 1 CD Hyperion
Dobri Paliev, percussion; Plamen Todorov, per-    diverses tendances de son époque :                       hommage à l’emblématique chef
cussion; Piano duo Genova & Dimitrov; Orchestre
Symphonique de la Radio Nationale Bulgare;
Yordan Kamdzhalov, direction
                                                  la musique française dans le premier
                                                  mouvement, l’énergie motorique de
                                                                                                       d’orchestre du Gewandhausorchester
                                                                                                       Leipzig avec la réédition d’un enregis-        P    ourquoi le Deuxième Concerto de
                                                                                                                                                           Max Bruch, qui élève dans ses pre-
                                                                                                                                                       mières mesures une des plus belles
                                                  Prokofiev dans le brillant second mou-               trement de 1962. L’excellente prise de
CPO555001 • 1 CD CPO                              vement tout juste interrompu par une                 son pour l’époque permet de rendre              suppliques jamais écrite pour le violon,
                                                                                                                                                       est-il resté dans l’ombre du démonstra-
A   part le tube de Poulenc, peu de               ironie à la Chostakovitch. L’intermezzo              honneur à un type de direction au-
                                                  lent avec son large choral aux cordes                jourd’hui disparu. Ayant débuté comme           tif Premier Concerto ? Mystère auquel
    Concertos pour deux pianos ont                                                                                                                     je n’ai jamais su répondre. Bruch l’écri-
connu la célébrité. Pourtant, le duo              évoque les compositeurs américains                   altiste dans ce même orchestre de Leip-
                                                                                                       zig sous la direction du légendaire Wil-        vit pour Sarasate qui le créa le 2 février
Genova & Dimitrov en a déjà enregistré            (Barber, Copland) avant une fugue
                                                                                                       helm Furtwängler, Konwitschny a repris          1877 à Francfort. Son ton effusif, le
plusieurs disques. L’œuvre de Bartók est          joyeuse, plus proche de Poulenc que
                                                                                                       cette approche organique des oeuvres.           caractère assez libre de sa structure,
un arrangement de la Sonate pour deux             de Bach. Remercions CPO de publier ce
                                                                                                       Défenseur farouche du grand répertoire          correspondent à la nature du violoniste
pianos et percussions, qu’il a réalisé à la       concerto chatoyant qui s’écoute avec un
                                                                                                       allemand et autrichien, peu enclin à la         espagnol. Jack Liebeck, lancé dans
fin de sa vie pour son éditeur américain.         réel plaisir. (Thomas Herreng)                                                                       une intégrale des opus concertants de
                                                                                                       musique « moderne », il a toujours fait
                                                                                                       passer la recherche de coloration so-           Bruch, y est magnifique de subtilité, de
                                                  version, dont le charme poétique reste               nore avant la précision analytique. Son         sens des apartés, il fait paraitre avec
                                                  en quelque sorte encore nostalgique                  interprétation de la première symphonie         son archet inventif un vrai personnage,
                                                                                                       de Brahms en est un parfait exemple.            un héros romantique, fidèle à l’art évo-
                                                  d’un romantisme à la Mendelssohn, et
                                                                                                       Oeuvre emblématique du XIXe siècle,             cateur qui fait tout le prix de la musique
                                                  qui laisse l’auditeur à la fois perplexe
                                                                                                       présentée par Hans von Bülow (à tort ou         de Bruch, et Martyn Brabbins avec ses
                                                  et un peu frustré. On sent comme une
                                                                                                       à raison) comme la « Dixième sympho-            Ecossais lui composent des paysages
                                                  réticence du chef à s’engager pleine-                                                                admirables, car Bruch écrivait son or-
                                                                                                       nie de Beethoven », elle est un cheval
                                                  ment dans le « programme littéraire »                                                                chestre avec un art de peintre, sfumato
                                                                                                       de bataille sur-mesure pour le chef alle-
                                                  de l’œuvre. Bernstein est à mon sens                                                                 compris. La plus belle version depuis le
                                                                                                       mand. Chef d’orchestre excentrique et
                                                  autrement plus convaincant dans cette                                                                modèle de style laissé par Salvatore Ac-
Hector Berlioz (1803-1868)                                                                             attachant, pleuré par un cortège de plu-
                                                  symphonie. (Bertrand Abraham)                        sieurs kilomètres lors de ses obsèques          cardo et Kurt Masur, rien moins, et dont
Symphonie fantastique, op. 14
                                                                                                       à Leipzig, Konwitschny est un musicien          l’espressivo me semble aller plus loin.
Dresdner Philharmonie; Herbert Kegel
                                                                                                       que tout mélomane se doit de connaître.         Deux des trois opus qui complètent ce
0300840BC • 1 CD Berlin Classics                                                                                                                       concerto-poème ne sont pas d’une eau
                                                                                                       (Charles Romano)

C    ette Fantastique de 1984 rééditée                                                                                                                 si pure, mais le métier de Bruch y est
     fin 2016 est probablement la plus                                                                                                                 si parfait que l’ajout d’un soliste aussi
lente de la discographie. Mais c’est                                                                                                                   inspiré leur donne une toute autre sta-
moins dans les relations entre chacun                                                                                                                  ture. Ténébreux le « Konzerstück »
des mouvements que cette disten-                                                                                                                       prend ici un ton d’opéra, murmuré, « In
sion surprend, que dans le rapport, à                                                                                                                  memoriam » déploie son élégie sur un
l’intérieur d’un mouvement donné, des                                                                                                                  archet incroyablement ductile. Quant au
« séquences » et des tempi ménagés                                                                                                                     ténébreux « Adagio appassionato » écrit
                                                  Ernest Bloch (1880-1959)                                                                             pour Joachim, c’est un chef d’œuvre. Le
par le compositeur. (cf. « Rêveries et
                                                  Schelomo, rhapsodie hébraïque; Avodath                                                               compositeur le savait bien, qui écrivait
passions » et « Un Bal »). Lecture très
                                                  Hakodesh, service hébraïque                                                                          à son éditeur Symrock « C’est l’une de
personnelle, extrêmement analytique;                                                                   Johannes Brahms (1833-1897)
distancée, cérébrale, trop policée. La
                                                  José Fardilha, baryton; Luigi Marzola, récitant;                                                     mes meilleures œuvres ». Poème élé-
                                                  Rocco Filippini, violoncelle; Gruppo vocale Cante-   Quintette à cordes en fa mineur; Trio pour      giaque qui dit ses vers d’une seule ligne,
rêverie l’emporte nettement sur la                mus; Orchestre et choeur della Svizzera Italiana;    piano et cordes en la majeur
passion. Du même coup la passion                                                                                                                       il est l’alpha des nombreuses pièces
                                                  Alexander Vedernikov; Diego Fasolis, direction       Amati Chamber Players                           libres pour violon et orchestre qui élar-
n’apparaît plus vraiment ici comme
                                                  MGB6230 • 1 CD Musiques Suisses                      BID80227-2 • 1 CD Biddulph                      giront le répertoire de l’instrument à
l’exacerbation maladive d’une rêverie
déjà contaminée par elle. La musique
de Berlioz est sertie dans un écrin qui                                                                AVIE2294 • 1 CD AVIE Records                    à vous dans votre salon) et de vérité
la magnifie en arrondissant les angles,           Sélection ClicMag !                                                                                  des timbres est impressionnante. Tant
en pacifiant les fureurs. Métaphorique-
ment parlant, le parquet du Bal est un
                                                                                                       U   ne nouvelle version des sextuors de
                                                                                                           Brahms dans une discographie riche
                                                                                                       en gravures de référence ? Pour affron-
                                                                                                                                                       mieux, car les Cypress et leurs amis
                                                                                                                                                       donnent aux deux œuvres une ampleur
peu trop verni et stratifié (dans tous les                                                                                                             symphonique. Leur Brahms est véhé-
                                                                                                       ter ces deux monuments de la musique
sens du terme). C’est trop serein, plus                                                                                                                ment, au risque d’être un peu brouillon
psychédélique que proprement fantas-                                                                   de chambre, le Cypress String Quartet a
                                                                                                                                                       par endroits (allegro de l’opus 18), mais
tique. La « Scène aux champs » est                                                                     choisi ses partenaires préférés : l’altiste
                                                                                                                                                       cette interprétation solaire, cette dé-
trop étale, l’on n’y sent pas suffisam-                                                                Barry Shiffman et le violoncelliste Zuill       bauche de couleurs nous vaut des mo-
ment la pulsion qui annonce les orages                                                                 Bailey. Ce sera le dernier témoignage de        ments de pur hédonisme sonore (an-
à venir. Si la « Marche au Supplice »                                                                  ce quatuor qui se sépare après vingt an-        dante de l’opus 18, le deuxième thème,
et le « Songe d’une nuit de sabbat »                                                                   nées d’activité. Exceptionnel, ce disque        à se damner). C’est tout juste si un brin
paraissent plus engagés, la compacité,                                                                 l’est aussi par sa réalisation : enregis-       de nostalgie (fin du poco adagio de
                                                  Johannes Brahms (1833-1897)
de timbres et une certaine solennité un                                                                trement en studio dans les conditions           l’opus 36) vient tempérer cette ivresse.
peu scolaire dans les vents font l’effet          Sextuors à cordes n° 1 et 2                          du live, public présent, la réussite en         Une très belle proposition, émouvante
d’un frein. Pas de visions à la Goya, de          Barry Shiffman, alto; Zuill Bailey, violoncelle;     termes de spatialisation (vous aurez            par sa charge symbolique même.
sarcasme et de grotesque dans cette               Quatuor Cypress                                      l’impression d’avoir les musiciens face         (Olivier Gutierrez)

                                                                                                                                             www.clicmusique.com  ClicMag février 2017  5
Alphabétique
compter des années 1890. Jack Liebeck             G. Fauré/A. Messager : Messe des                assez proche de celui de Chopin, mais
le magnifie, écoutez un peu ce violon             pêcheurs de Villerville / J.S. Bach/G.B.        sa sonorité est moins raffinée, sa vir-
qui déclame (Jean-Charles Hoffelé)                Pergolesi : « Tilge, Höchster, meine Sün-
                                                  den », BWV 1083 (d’après le Stabat Mater        tuosité moins complexe, moins inven-
                                                  de Pergolesi) /                                 tive ». Tentez, pour preuve, le rappro-
                                                  Chœur de filles d’Hanovre; Sharon Kam & Fauré   chement entre l’étude op. 10 n° 6 du
                                                  Ensemble; Arte Ensemble; Gudrun Schröfel
                                                                                                  second et son probable inspirateur, le
                                                  ROP6119 • 1 CD Rondeau                          nocturne n° 3 du premier… De plus, si

                                                  C   ’est un programme plutôt éclectique
                                                      qui nous est proposé ici, associant
                                                  une œuvre coécrite en 1881, par Gabriel
                                                                                                  Field est crédité de l’invention du genre,
                                                                                                  ses nocturnes ne sont pas encore tota-          Dynam-Victor Fumet (1867-1949)
                                                                                                  lement libérés des formes antérieures.          Prélude et Fugue; Le Rouet de la Vierge;
                                                  Fauré et son élève André Messager,                                                              Le Réveil des Farfadets; La Souplesse de
                                                  dans un style assez « fin de siècle », et       Le 1 fleure bon son Clementi (hommage           l’Arpège; Valse tragique; Rêve de faune;
                                                  un motet pénitentiel baroque aux effets         de l’élève au maître?), certains sont de        Caprice / R. Fumet : L’Ange des bois; 5
César Cui (1835-1918)                             contrastés (sur le texte du Ps. 50/51                                                           improvisations
                                                                                                  véritables études (le 7, avec son legato
20 Poèmes de Jean Richepin, op. 44                Miserere) que Johann Sebastian Bach                                                             Ienissei Ramic, piano
                                                                                                  main gauche et son « riff » main droite),
Jean Bermes, basse-baryton; Denis Ivanov, piano   composa en 1740 à partir de la parti-                                                           POL113123 • 1 CD Polymnie
                                                                                                  les clichés du bel canto sont parfois
KL1411 • 1 CD Klanglogo                           tion du « Stabat Mater » de Giovanni

F  ils d’un officier de la Grande Armée
   qui épousa une lituanienne, ingénieur
                                                  Battista Pergolesi. Si l’univers religieux
                                                  du sceptique maitre de chapelle de La
                                                                                                  tout proches... Ces 18 pièces, sou-
                                                                                                  vent classées « easy listening » et que         P   ar l’intercession éditoriale du petit-
                                                                                                                                                      fils Gabriel (le flûtiste), au nom du
                                                                                                                                                  père Dynam-Victor et du fils Raphaël...
                                                  Madeleine, et du futur compositeur de           pourtant Liszt déclarait adorer, n’ont
spécialiste des fortifications, major                                                                                                             Ce dernier préféra la province à une car-
dans l’armée, professeur, écrivain, cri-          « Véronique » semble assez éloigné de           pas beaucoup attiré les pianistes et les        rière parisienne prometteuse. A l’école
tique et… musicien à ses heures, Cesar            celui du Cantor de Leipzig, la fonction de      enregistrements sont rares. Raison de           de musique d’Angers, il lutta contre
Cui nous légua quinze operas et une               chacune des deux œuvres diffère égale-          plus pour s’intéresser à l’intégrale de         notre autodidactisme pianistique. Im-
respectable quantité de mélodies et de            ment puisque la première est initiale-                                                          provisateur comme son père, il nous
                                                                                                  Roberte Mamou : plus simple et plus
pièces pour piano qui n’encombrent pas            ment vouée à être interprétée au cours                                                          éblouissait le dimanche à l’orgue de
                                                  d’un concert donné dans une petite pa-          élégiaque que John O’Connor (au sur-
les programmes des salles de concerts.                                                                                                            l’église Saint-Joseph. Nous ne sûmes
                                                  roisse normande au profit des pêcheurs          plus incomplet), plus libre que Miceal
Qu’un disque lui soit exclusivement                                                                                                               pas qu’il composait. Hors mode, il avait
                                                  et de leur famille ; quant à la seconde,        O’Rourke, elle replace les œuvres dans          renoncé à toute création de ses œuvres.
consacré est déjà un événement en
                                                  elle ne fut redécouverte qu’au cours du         ce qui me paraît la juste perspective des       Formé par d’Indy, ce fut le musicien fin
soi. Pour son opus 24, le compositeur
                                                  20e siècle. Ce qui rassemble ici les deux       témoignages d’époque : Field ne sem-            et savant d’un monde englouti de la
choisit vingt poèmes de Jean Riche-
                                                  pièces, c’est l’approche décomplexée                                                            tradition française, auteur d’une « Sym-
pin, épigone de Verlaine et Rimbaud,                                                              blait pas jouer pour éblouir le public,
                                                  qu’en offrent les interprètes, à savoir                                                         phonie de l’âme ». Elève de Franck, son
des textes sérieux, drôles ou canailles,                                                          mais pour lui. Peut-on mieux dire que
                                                  deux solistes, un chœur féminin plutôt                                                          père Dynam-Victor, lui, entre Scriabine
magnifiés par l’excellente diction de la                                                          Liszt, dans sa préface à l’édition Schu-
                                                  aérien et un ensemble de chambre, tous                                                          et Oboukhov, avait signé un « Sabbat
basse luxembourgeoise Jean Bermes.
                                                  dirigés par une musicienne non moins            berth & Co : « Où rencontrerions-nous           mystique ». Passant du petit orgue de
Le volume, l’autorité de la projection
                                                  talentueuse. L’aspiration à l’authenti-         ailleurs une telle perfection d’incompa-        Sainte-Clotilde (évidemment) au cabaret
sont là, mais le timbre nasal et les
                                                  cité qu’ambitionne cette production est         rable naïveté ? » (Olivier Eterradossi)         du Chat noir (!), cet anarchiste, ami de
aigus détimbrés, quand ils ne sont pas
                                                  principalement à chercher dans la frai-                                                         Satie, versa dans le spiritisme. Des Fu-
franchement à côté de la note finissent
                                                  cheur avec laquelle elle nous est livrée.                                                       met, on avait déjà au disque, outre leurs
par lasser, et l’attention se reporte sur
                                                  (Alain Monnier)                                                                                 intégrales pour orgue, de Dynam-Victor
l’accompagnement imaginatif de Denis
Ivanov, qui réussit avec naturel et délié                                                                                                         le piano par Akiko Ebi et (deux fois)
la très schumanienne Causerie opus                                                                                                                « La nuit » pour orchestre à cordes (à
40. Un projet courageux, une redécou-                                                                                                             ne pas confondre avec sa « Nuit », pour
verte nécessaire, mais inaccomplie.                                                                                                               orgue), puis de Raphaël la musique de
                                                                                                                                                  chambre (dont un quatuor à cordes).
(Olivier Gutierrez)
                                                                                                                                                  Magnifique, original, leur piano est de
                                                                                                                                                  deux créateurs que la comédie sociale
                                                                                                                                                  isola. Alors le fils avoua ne plus croire
                                                                                                  Polibio Fumagalli (1830-1900)                   au succès de la « musique sérieuse ».
                                                                                                  Ascetica Musicale, op. 235; Sonates pour        (Gilles-Daniel Percet)
                                                  John Field (1782-1837)                          orgue en ré et si bémol; Emulazione;
                                                  Intégrale des nocturnes                         Ripieno; Scherzino; Marcia villerecia
                                                  Roberte Mamou, piano                            Marco Ruggeri, orgue (Orgues Bernasconi des
                                                  ADW7555/6 • 2 CD Pavane                         églises de Vaprio d’Adda et San Bernardino de

                                                  D
                                                                                                  Vercelli)
                                                      ixit le pianiste Charles Rosen : « Il
Gabriel Fauré (1845-1924)                             arrive que Field ait un sens du son         BRIL95468 • 2 CD Brilliant Classics

                                                  ment enregistré et joué sur les grandes         Caprice, Feuille d’Album...) tout à fait
Sélection ClicMag !                               scènes internationales, on est bien             plaisants et agréables, résolument
                                                  en peine aujourd’hui de citer d’autres          ancrés dans un romantisme persistant            Johann Wilhelm Hassler (1747-1822)
                                                  ouvrages du vériste Francesco Cilea.            où l’on perçoit parfois l’influence de          6 sonates pour clavier (versions 1776,
                                                  Restée confidentielle et partiellement          Chopin (telle Mazurka) et de Schumann           1779 et 1780); Fantaisies; Das Glück in
                                                  inédite jusqu’à ces dernières années,                                                           Verleumdung; Menuets n° 1 et 2; Alla
                                                                                                  (tel Scherzo). Pas de chefs d’œuvre             Polacca; Rondeau; Die Zukunft; Der Bauer;
                                                  son œuvre pour piano jalonne pourtant           injustement méconnus ni de pages                Die Hoffnung; Selig, wer mit; Sonate pour
                                                  toute sa période créatrice (1883-1930)          vraiment faibles au sein de ces recueils        clavecin et violon
                                                  et révèle un autre visage, plus léger,
                                                                                                  sans prétention, manifestement des-             Michele Benuzzi, clavecin, piano-forte, clavicorde
                                                  intime et secret de ce musicien qui s’est
                                                                                                  tinés à un usage didactique ou privé,           BRIL95225 • 4 CD Brilliant Classics
                                                  plutôt illustré dans les grands drames
                                                                                                  mais quelques pépites glanées ici et là,
Francesco Cilea (1866-1950)
                                                  lyriques. Elle compte une cinquantaine
                                                  de pièces rassemblées sur ce double
                                                  album : il s’agit essentiellement de
                                                                                                  morceaux étonnamment profonds ou
                                                                                                  inspirés qui retiennent plus particuliè-
                                                                                                                                                  N   é en 1747 à Erfurt, Johann Wilhelm
                                                                                                                                                      Hassler est un compositeur de tran-
                                                                                                                                                  sition, entre période baroque et période
Intégrale de l’œuvre pour piano
                                                  miniatures (aucune ne dépasse quatre            rement l’attention et soutiennent une           classique. Il étudie auprès de Johann
Pier Paolo Vincenzi, piano
                                                  minutes) et de morceaux de carac-               écoute répétée. Sans jamais lasser, Pier        Christian Kittel (Ancien élève de Bach)
BRIL95318 • 2 CD Brilliant Classics               tère d’une grande variété (Mélodie,             Paolo Vincenzi nous entraîne avec talent        et sa musique reprend naturellement

H   ormis l’opéra « Adriana Lecou-
    vreur » qui est encore régulière-
                                                  Sérénade, Danse, Badinage, Nocturne,
                                                  Impromptu, Prélude, Berceuse, Valse,
                                                                                                  dans cette délicieuse promenade « fin
                                                                                                  de siècle ». (Alexis Brodsky)
                                                                                                                                                  l’héritage de Bach et de ses fils, alliant
                                                                                                                                                  la polyphonie, la rigueur du contrepoint

6  ClicMag février 2017  www.clicmusique.com
et l’Empfindsamkeit cher à Carl Philip.                                                              tout ce que, de son vivant, Ginastera                qui transfigurent la géniale Première
Au fil de sa carrière d’organiste (1794              Sélection ClicMag !                             aura publié pour le piano. C’est le choix            Sonate : tout le vocabulaire de Ginas-
Voyage à Riga, à St Petersbourg puis                                                                 pratique de Michael Korstick qui ainsi               tera, et jusqu’à celui radical des ultimes
à Moscou où il décède en 1822) et de                                                                 boucle en un disque généreux l’essen-                années, y parait déjà et il faut entendre
son évolution stylistique, Hassler aban-                                                             tiel de cette part du corpus du composi-             comment Korstick distille les mystères
donnera progressivement l’influence                                                                  teur argentin. Le jeu acéré, la virtuosité           sonores de l’Adagio avant de s’engager
baroque pour s’orienter vers un lan-                                                                 flamboyante, l’incroyable suractivité                dans la chasse obstinée du final. La fi-
gage ou sensibilité et classicisme se                                                                rythmique qu’y impose le pianiste alle-              délité au texte n’exclue jamais ici les au-
répondent. Ce coffret de quatre CD                                                                   mand rappelle tout ce que doit Ginas-                daces de l’interprétation : le formidable
embrasse l’oeuvre pour clavier du com-                                                               tera à Bartók, plus encore en ce qui                 « Homenaje a Aaron Copland » des
positeur à travers différents recueils de                                                            concerne sa musique de clavier. Entre                « Doce Preludios americanos », ostina-
                                                                                                     les recueils où le compositeur plie les              to frénétique, la langueur interrogative
sonates, écrits d’abord pour le clavecin             Alberto Ginastera (1916-1983)                   thèmes populaires à sa grande machine                du « Pastoral » qui suit, illustrent l’art
ou clavicorde puis dans les derniers
                                                     Danses Argentines; Milonga; 3 pièces;           d’ivoire et d’acier et le geste expérimen-           suggestif d’un des maitres-pianistes
opus, pour le pianoforte ; et quelquefois            Malambo; Petite danse; Pièces pour              tal de la Première Sonate, un grand                  d’aujourd’hui. Et gageons que demain,
destinés aux trois instruments, au choix             enfants; 12 préludes américains; Suite          écart pourrait menacer, mais non, car                dans un disque qu’il pourrait consacrer
de l’interprète. Le claveciniste italien             « Danzas criollas »; Rondo sur des thèmes       Michael Korstick entend la grammaire                 au piano sud-américain, Michael Kors-
Michele Benuzzi passe ainsi judicieu-                pour enfants argentins; Sonates piano n° 1
                                                                                                     du compositeur comme personne de-                    tick aura soin d’enregistrer les dix-sept
sement du clavecin au clavicorde pour                et 3; Toccata
                                                                                                     puis Barbara Nisman qui avait travaillé              minutes de la Seconde Sonate, en la
finalement opter pour deux pianofortes               Michael Korstick, piano
                                                                                                     toute l’œuvre de piano avec le composi-              couplant, pourquoi pas, avec quelques
aux caractères bien dissemblables ; un               CPO555069 • 1 CD CPO                            teur. A cela s’ajoute un imaginaire dans             Sonates de Claudio Santoro (et sur-

                                                     N
Broadwood (1798) et un Silbermann                        on, pas un intégrale, la Deuxième           les sonorités, un culte du pianissimo                tout la 4e, dédiée à Jacques Klein).
(1749). Le résultat est enthousias-                      Sonate manque, mais bel et bien             fuligineux et de l’attaque fulgurante,               (Jean-Charles Hoffelé)
mant, notamment grâce au jeu élégant
et varié de l’interprète. On y découvre
un compositeur particulièrement ins-                                                                 semblent juste sténographiés pour un                 particulièrement la légende dramatique
piré qui réussit à se forger son propre                                                              copiste connaissant déjà ses codes,                  Nicolas de Flue (1939), sorte d’oratorio
style, éliminant les scories baroques                                                                ses indications, ses abréviations. Pri-              sur un texte de Denis de Rougemont
                                                                                                     vilégiant l’inspiration du moment, en                (1906-1985), pour récitant, chœur
pour louvoyer au gré des influences de
                                                                                                     alléchant (sauf pour les menuets, genre              d’enfants, chœur mixte et orchestre
l’époque (Mozart, Haydn). Signalons
                                                                                                     jugé difficilement renouvelable) par                 d’harmonie, que le compositeur réécrira
en bonus, quelques charmants lieder
                                                                                                     des idées neuves, voire hardies. Un                  par après pour orchestre symphonique.
accompagnés au piano et une petite so-
                                                                                                     critique reprocha d’ailleurs quelques                Précisons d’emblée que la version pro-
nate pour violon, intéressante elle aussi.
                                                                                                     « embardées frappantes ». C’est aussi                posée ici est la partition originale avec
(Jérôme Angouillant)
                                                     Joseph Haydn (1732-1809)                        un moment charnière où notre musicien                harmonie. Arthur Honegger lui-même
                                                     Quatuors à cordes, op. 54 et 55                 chambriste quitte les salons nobles et               nous confie : « Nicolas de Flue est le
                                                     Quatuor Haydn de Londres                        bourgeois, s’ouvre à l’acoustique des                saint patron de la Suisse. Il vécut en
                                                                                                     grandes salles de concert. Pour sa pro-              ermite et ne se manifestait que pour
                                                     CDA68160 • 2 CD Hyperion
                                                                                                     mo sans frontières, Haydn fait confiance             empêcher les conflits et les guerre »

                                                     D   ’une rhétorique et parfois d’une
                                                         audace inouïes, ces quatuors vont
                                                     moins droit au sentiment que les
                                                                                                     à l’affairiste escroc Johann Tost, son
                                                                                                     ancien violoniste, d’où peut-être la place
                                                                                                                                                          Destinée à des chœurs d’amateurs, la
                                                                                                                                                          partition est écrite dans un style très
                                                                                                     privilégiée accordée au premier violon.              simple et populaire. L’édition sous
                                                     grands jalons des opus 20 ou 50. Au-            Dans le rare quatuor en fa mineur, écho              rubrique qui rassemble d’excellents
                                                     tour de 1788, Haydn désargenté prie             de celui de l’opus 20, l’allegro réintro-            amateurs, reprend fort judicieusement
                                                     son éditeur Artaria de faire sonner le          duit typiquement l’ambiguïté avec le                 et pour la première fois la partition
Joseph Haydn (1732-1809)                             florin. Il s’agit d’exploiter sa célébrité      majeur, et surprise, commence par des                originale pour harmonie. D’autre part,
Symphonies n° 6, 7, 8, 35, 46 et 51                  européenne sur le marché internatio-            variations. Dit du « rasoir » suite à un             le sympathique Jean-Luc Bideau aurait
Heidelberger Sinfoniker; Thomas Fey, direction;      nal (surtout français et britannique), en       cadeau de l’éditeur anglais John Bland.              pu donner plus de force expressive à
Benjamin Spillner, direction                         composant assez vite (étant pris ailleurs       Mais décidément, cette intégrale bien                un texte particulièrement redoutable,
HC16088 • 2 CD Hänssler Classic                      par l’opéra). Des fragments manuscrits          avancée sur « period instruments » est               tour à tour dramatique et méditatif, nar-
                                                                                                     toujours au poil. (Gilles-Daniel Percet)             ratif ou prophétique, comme le faisait
                                                                                                                                                          superbement dans la version Tzipine
                                                     dans la Vienne de Strauss et Lehár où                                                                un Jean Davy à la diction impeccable.
Sélection ClicMag !                                  elles se jouent encore : Comtesse Ma-                                                                Par contre, chœurs et orchestre sont
                                                     ritza, La princesse de cirque, Impéra-                                                               admirablement préparés et dirigés par
                                                     trice Joséphine... Comme tant de Juifs,                                                              Alois Koch qui s’acquitte avec profonde
                                                     l’artiste fuit en 1938 et s’installe à Paris,                                                        musicalité de sa tâche périlleuse, en
                                                     avant de partir durant la guerre aux                                                                 respectant cet esprit de fraîcheur popu-
                                                     États-Unis, y rencontrant Oscar Straus,                                                              laire, simple et dépouillée. Précisons
                                                     Korngold, Schoenberg ; puis revient à                                                                qu’il s’agit – et ceci explique proba-
                                                     Paris, où il s’éteint en 1953. Le vétéran                                                            blement la ferveur intense et l’extrême
                                                     Richard Bonynge a des états de service                                                               émotion – d’un enregistrement public
                                                     à faire valoir dans ce répertoire parti-        Arthur Honegger (1892-1955)
                                                                                                                                                          du 13 novembre 1998. (Michel Tibbaut)
                                                     culier, et pas seulement Chauve-souris          Nicolas de Flue, légende dramatique
Emmerich Kálmán (1882-1953)                          ou Veuve joyeuse : il a relancé Kál-            en français, entre musique de scène et
                                                                                                     oratorio, pour récitant, choeurs d’enfants,
La Bayadère, opérette en 3 actes                     mán en enregistrant dans la collection
                                                                                                     choeur et orchestre à vents
Susanne Daum; Rainer Trost; Anke Vondung;            Entartete Musik; Decca sa Duchesse de
                                                                                                     Jean-Luc Bideau, récitant; Akademiechor Luzern;
Stephan Genz; Miljenko Turk; Christian Sturm; Dirk   Chicago (encore un titre nobiliaire !).
                                                                                                     Chor des Collegium Musicum Luzern; Junge
Schmitz; Ulrich Jielscher; Choeur et Orchestre de    Naguère gravée en anglais par Newport           Philharmonie Zentralschweiz; Alois Koch, direction
la radio de Cologne; Richard Bonynge, direction      Classics, cette très parisienne Baya-
                                                                                                     MGB6154 • 1 CD Musiques Suisses
CPO777982 • 2 CD CPO                                 dère – l’action se déroule au Théâtre

L  e Hongrois Emmerich Kálmán, né
   Koppstein, élève de Bartók et Kodály,
                                                     du Châtelet – voit le chef australien
                                                     en pleine forme galvaniser une équipe           B  ien qu’il fût Parisien de cœur, Ar-
                                                                                                        thur Honegger n’a jamais renié sa
                                                                                                     nationalité suisse. Certaines de ses
                                                     homogène, majoritairement allemande,
demeure en France associé à l’une de                 au sein de laquelle on retrouve avec            œuvres témoignent de son attachement                 Giya Kancheli (1935-)
ses plus grandes gloires, « Princesse                plaisir Rainer Trost et Stephan Genz.           romand : Jour de Fête suisse, pour or-               18 Miniatures pour violon et piano; Rag-
Csardas » (1915). Longue est pourtant                À noter, l’apparition parlée d’Yvonne           chestre (1943), Le Cahier romand, pour               Gidon-Time
la liste de ses opérettes au chic mélo-              Kálmán... fille cadette du compositeur.         piano solo (1921-23), la Symphonie                   Andrea Cortesi, violon; Marco Venturi, piano
dique irrésistible, presque toutes créées            (Jacques Duffourg-Müller)                       n°4 « Deliciae Basiliensis » (1946), et              BRIL95267 • 1 CD Brilliant Classics

                                                                                                                                             www.clicmusique.com  ClicMag février 2017  7
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