L'ANALYSE CRITIQUE DE L'ÉSOTÉRISME CONTEMPORAIN DANS LE GENRE ROMANESQUE D'AUJOURD'HUI: RÉFLEXIONS SUR SEPT JOURS
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Revue de l’Association nigériane des enseignants universitaires de français (RANEUF) No 19, octobre 2021 ISSN : 978-059-704-2 L’ANALYSE CRITIQUE DE L’ÉSOTÉRISME CONTEMPORAIN DANS LE GENRE ROMANESQUE D’AUJOURD’HUI: RÉFLEXIONS SUR SEPT JOURS POUR UNE ÉTERNITÉ DE MARC LEVY MALUMI Soni Omoloro sonimalumi@yahoo.com Department of Foreign Languages University of Jos Résumé La visée de cette étude, c’est de montrer la nouvelle dimension que le roman de notre société d’aujourd’hui a adopté à travers l’ésotérisme et les thèmes ésotériques. Il s’agit d’évaluer et d’analyser les nouvelles tendances vers l’usage des thèmes ésotériques dans le genre romanesque contemporain, c’est-à-dire, la fonctionnalisation des notions spirituelles. Marc Levy, dans le roman qui nous préoccupe, a mis à jour les outils importants pour améliorer le monde; mais d’autre part, il a ridiculisé les affaires spirituelles par la caricature de la croyance religieuse dans la société contemporaine. Notons que la littérature est le miroir de la société autant que la religion en est une identité. Par ailleurs, l’œuvre littéraire qui ridiculise la religion tente provoquer une crise religieuse comme partout dans le monde d’aujourd’hui. Ainsi, notre étude sert de paramètre pour analyser, évaluer et critiquer l’ésotérisme et les thèmes ésotériques comme présentés par Levy et puis trouver des solutions aux problèmes créés par l’Homme au nom de la religion. Sur ce, des recommandations ont été faites comme contributions à la connaissance et aux efforts déployés par des écrivains vis-à-vis du développement de la société. 237
MALUMI Soni Omoloro RANEUF- No 19, octobre 2021 Pp.237-252 http://dx.doi.org/10.17613/nsdf-ss33 Mots-clés ésotérisme, analyse critique, contemporain, genre romanesque, éternité. Introduction Il serait nécessaire d’expliquer d’emblée les termes qui portent le drapeau du libellé de notre recherche afin de comprendre l’orientation de notre analyse. Les trois mots qui méritent une explication sont: «ésotérisme», «critique» et «genre romanesque». L’ésotérisme était une terminologie qui a été inventée à but didactique dans le domaine de la philosophie afin de prêcher la doctrine de l’occultisme dans certaines écoles de la Grèce antique. Le terme apparait pour la première fois en 1890. Au XIXe, le terme parait florissant chez les occultistes pour définir l’astrologie, la magie, la théosophie, la divination et d’autres mystères de l’inconscient. Dans le monde d’aujourd’hui, le mot est vu d’une approche différente et dans une perspective psychologique. Le dictionnaire Le Petit Robert nous donne deux définitions de l’ésotérisme. D’abord, il s’agit d’une doctrine suivant laquelle des connaissances ne doivent pas être vulgarisées mais communiquées seulement à un petit nombre de disciples au sens didactique. Puis, le mot est vu comme le caractère de ce qui est impénétrable, énigmatique et de ce qui a un sens caché. Selon toutes probabilités, le mot «ésotérisme» indique une chose «énigmatique» et mystérieuse que l’on ne doit pas vulgariser. Dans l’Ésotérisme contemporain et ses lecteurs de Pierre Lagrange et Claudie Voisenat, on a cité l’œuvre d’Umberto Éco, le Pendule de Foucault où l’ésotérisme est décrit comme une chose dont on reconnait l’existence mais qu’on sait justifier: «C’est un savoir diffus, décousu, vieux comme le 238
Revue de l’Association nigériane des enseignants universitaires de français (RANEUF) No 19, octobre 2021 ISSN : 978-059-704-2 monde, qui remonte à Pythagore, aux magiciens, aux gymnosophistes et même aux barbares de l’extrême nord, aux druides des Gaules et des îles britanniques. Le monde était plein de merveilleuses correspondances, de ressemblances subtiles, il fallait les pénétrer » [341]. Dans l’ensemble, l’ésotérisme indique une chose cachée et les thèmes ésotériques comprennent le rôle des anges et des démons, l’enfer, l’éternité, le paradis, la sortie du corps, des mythes, de la magie, des fées et tout ce qui est mystérieux. De sa part, le mot critique provient du verbe «critiquer» qui veut dire, l’action de critiquer, de juger et de donner une impression sur quelqu’un ou sur quelque chose. Mais selon Le Petit Robert, le mot est défini comme l’art de «juger les ouvrages de l’esprit, les œuvres littéraires, artistiques ou bien le jugement porté sur un ouvrage de l’esprit, sur un œuvre d’art». D’une manière générale, la critique littéraire c’est tout simplement l’art d’évaluer, d’examiner, de passer un jugement sur une œuvre de l’esprit ou d’art selon certaines règles de critique. Depuis le XVIIIe siècle, le roman est devenu un genre connu; mais il a fait l’objet de plusieurs débats comme la question de la morale, du réalisme, de la contestation. Le genre romanesque est caractérisé par sa diversité définie par sa capacité à aborder tous les sujets; il comprend les romans d’amour, d’aventures, d’analyse, les romans policiers, les romans historiques, autobiographiques ou réalistes. Donc, nous pouvons définir un genre romanesque comme un ensemble, un système de moyens qui s’est octroyé de donner la plus grande somme de plaisir esthétique y compris l’espèce de plaisir que le public désirait lui-même, sans avoir nettement conscience de son décor. Autrement dit, un genre romanesque est une formule esthétique recherchée, et qui 239
MALUMI Soni Omoloro RANEUF- No 19, octobre 2021 Pp.237-252 http://dx.doi.org/10.17613/nsdf-ss33 exprime, pendant un temps, le plaisir que l’on demande à l’art. Dès lors, le thème de l’ésotérisme dans la fiction prend sa source dans la littérature traditionnelle orale où les hommes âgés racontaient des histoires fantastiques des fées et des animaux aux enfants pour les divertir et leur enseigner des leçons de morale; cela avait donc un but didactique. Cependant, avec la parution de la littérature écrite, on n’introduit plus ce phénomène dans les écritures parce qu’il y avait une volonté institutionnelle de codification comme les mouvements littéraires tels le classicisme, le romantisme, etc. Mais tout de même, comme la littérature écrite évolue, le genre littéraire se renouvelle à travers la psychanalyse de Sigmund Freud, la science, l’introduction du thème de l’évolution de Charles Darwin. Alors, l’imagination devient un outil de référence à l’inconscient et à ce qui est mystérieux dans le genre romanesque de la littérature. Notre cadre théorique est conçu sur la théorie anthropologique. Cette théorie culturelle cherche à comprendre l’unité de l’Homme à travers la diversité des cultures. Levy voulait utiliser l’amour comme un outil pour unifier le monde et pour le rendre plus supportable et idéal malgré la diversité dans la culture et dans la religion. L’approche anthropologique est l’inévitable tournant actuel des sciences humaines qui réfléchissent sur les caractéristiques de l’Homme, puis déconstruisent et critiquent leurs objets, leurs pratiques, ensuite redéfinissent le sujet et enfin représentent leurs fondements. À ce point, nous avons utilisé cette théorie représentative de l’ensemble des sciences humaines et sociales au cœur de ce qui fait leur vocation afin de comprendre l’être humain dans 240
Revue de l’Association nigériane des enseignants universitaires de français (RANEUF) No 19, octobre 2021 ISSN : 978-059-704-2 son unicité et sa diversité, sa genèse individuelle et sociale, ses particularités et ses potentiels d’évolution. Marc Levy: sa psychologie et sa philosophie Avant de faire le point sur la psychologie et la philosophie de notre romancier, nous allons jeter un coup d’œil dur sa biographie et dresser un aperçu sur le roman de notre étude: Sept jours pour une éternité. Marc Levy est Français, il est né le 16 octobre 1961 en France. Il s’engage à la Croix Rouge française à l’âge de dixhuit ans, et il y passe six ans. Parallèlement, il étudie la gestion et l’informatique à l’Université de Paris. En 1983, il crée une société spécialisée dans les images de synthèse et il fonde sa base en France et aux États-Unis. Malheureusement, il perd le contrôle majeur du groupe; puis, il démissionne. Après cet échec, il rentre à Paris pour fonder avec deux amis une société de travaux finitions. Le roman intitulé Sept jours pour une éternité est divisé en sept chapitres selon les jours de la semaine. Donc, le premier jour correspond au premier chapitre et ainsi de suite. C’est une parodie entre le Bien et le Mal. Il s’agit d’une bataille entre Dieu et Lucifer le Diable pour déterminer le vrai Décisionnaire ou Ordonnateur, c'est-àdire pour déterminer celui qui gouvernera le monde en tant que Maitre et qui possèdera le pouvoir absolu de l’Univers. Pour montrer leur supériorité, Ils envoient chacun leurs émissaires comme des êtres humains sur terre. Zofia, un ange est l’émissaire de Dieu et Lucas, un démon est l’émissaire du diable. Dieu et Lucifer choisissent la ville de Sans Francisco aux États-Unis comme lieu où les émissaires vont se rencontrer. La bataille va durer sept jours pour déterminer le vainqueur. Mais Dieu 241
MALUMI Soni Omoloro RANEUF- No 19, octobre 2021 Pp.237-252 http://dx.doi.org/10.17613/nsdf-ss33 et le diable n’ont pas prévu que leurs émissaires pourraient tomber amoureux. Suite à plusieurs événements, Lucas commet toutes sortes d’atrocités dans la ville de Sans Francisco, par contre Zofia fait du bien dans sa vie. Enfin les deux émissaires se rencontrent dans un restaurant et ils tombent amoureux. Dieu et Lucifer font la paix et s’apprêtent à devenir grandspères. De ce fait, le message principal dans ce roman, c’est le pourvoir absolu de l’amour sur l’humanité. Nous constatons que chaque écrivain a non seulement sa psychologie, c’est-à-dire, comment il pense, mais aussi, sa philosophie, c'est-à-dire, comment il aperçoît les choses. De plus, chaque écrivain est inspiré par un autre écrivain. Donc, ce que nous cherchons dans cette étude, c’est de trouver la source d’inspiration de notre romancier, sa psychologie et sa philosophie. Le mieux serait d’avoir un entretien avec lui mais puis qu’il ne nous est possible, nous allons jeter un coup d’œil sur des entretiens qu’il a eus pour découvrir sa vraie personnalité. D’abord, en lisant la biographie de Levy, on peut se demander, s’il est un bon père de famille. Certainement, c’est un père très présent. Rappelons-nous qu’il dédie ses livres à son premier fils, juste pour montrer son amour paternel à sa famille. D’après cet écrivain français, le monde où nous habitons n’est pas normal parce que c’est un monde informatisé et numérique, donc, on peut déduire que son observation l’a poussé à se plonger dans le cinéma afin de faire passer le message déjà écrit dans ses livres. Alors, Levy sait qu’aujourd’hui, peu de gens lisent pour le plaisir mais presque tout le monde aime regarder la télévision pour suivre un film ou une bande dessinée. 242
Revue de l’Association nigériane des enseignants universitaires de français (RANEUF) No 19, octobre 2021 ISSN : 978-059-704-2 De plus, Levy pense à une société multiculturelle et multilingue. Cela explique la traduction de ses œuvres en plusieurs langues, raison pour laquelle il voulait que son fils soit d’une double culture et bilingue. Il préfère une société qui accepte la diversité culturelle et dans laquelle les gens vivent harmonieusement ensemble et coexistent sans discrimination. Donc, pour lui, Sept jours pour une éternité n’est pas un livre sur le paradis et l’enfer. «J’écris des livres sur des rencontres amoureuses.» [41], disait-il. Si nous acceptons que l’amour est très important pour une coexistence pacifique dans la société, nous relevons l’absurdité dans l’emploi des figures ésotériques antithétiques [Dieu et le diable, les anges et les démons] pour illustrer l’idée de la coexistence amoureuse. Nous allons approfondir nos réflexions sur ces faits en traitant l’évolution de l’ésotérisme. Pour répondre à la question s’il est attiré par l’ésotérisme, il dit : « Pas plus qu’un auteur de roman policier n’est attiré par les crimes. L’ésotérisme c’est de penser que quelque chose d’absurde est une chose vraie. Entrer affirmer, «Je crois aux extraterrestres» et dire «Je n’y crois pas». Moi, je me dis «pourquoi pas ?». C’est vrai qu’il y a «des sujets sur lesquels je m’interroge» [15]. De cette affirmation, on voit que pour Levy, l’existence de Dieu et du diable est absurde mais vrai. Pourtant, il s’interroge sur leur existence. En s’exprimant à propos de la source de son imagination, il dit: « La vie, la vie a bien plus d’imagination que tous les auteurs du monde réunis, écouter, regarder _ c’est ma façon de travailler» [15]. L’usage des thèmes ésotériques dans le roman Sept jours pour une éternité n’est point accidentel. L’auteur les utilise pour illustrer son point du vue psychologique et philosophique. Selon lui, il voit une société où les gens ne lisent plus pour le 243
MALUMI Soni Omoloro RANEUF- No 19, octobre 2021 Pp.237-252 http://dx.doi.org/10.17613/nsdf-ss33 plaisir et ne réfléchissent pas sur ce qu’ils regardent comme émission. Notre romancier est attiré par les thèmes ésotériques parce qu’il croit à l’existence des extraterrestres dont leur état lui paraît absurde. L’analyse philosophique de l’œuvre Comme nous l’avons déjà précisé dans le résumé de l’œuvre, sept chapitres s’identifient en fonction de chaque évènement quotidien dans la semaine. Le huitième chapitre porte sur la conclusion. Le roman est une parodie entre le bien et le mal. C’est un roman de réflexion dans lequel l’auteur utilise le style du parallélisme. En littérature, un auteur peut adopter le style du parallélisme à quatre sphères: parallélisme par identité, par égalité, par différence ou par opposition. À cet égard, Levy adopte le style du parallélisme par opposition entre le Bien et le Mal, entre le diable et l’ange et finalement entre Dieu et Lucifer. D’ailleurs, l’auteur projette ses personnages du point de vue omniscient, celui qui sait tout et qui voit tout. Il ne participe pas à la narration car il se situe à l’extérieur de l’acte narratif. Ainsi, il mène la narration à la troisième personne. Pour justifier cela, il faut noter que, Levy utilise constamment « il », l’homme et « elle » dans sa narration. Il fournit au lecteur de nombreuses informations sur chaque personnage en ce qui concerne leurs habitudes, leurs pensées, leurs passées, comme s’il les connaissait. Il remarque que, Dieu envoie ses anges au monde en raison de mauvaises conduites des êtres humains. Les anges savent à l’avance que les hommes sont très rigides et que personne ne peut les changer facilement. Mais de toute façon, ils devraient poursuivre leur mission qui pourrait améliorer le monde. Cette évidence est avancée dans le roman: «La vie d’un homme devrait pourtant peser plus lourd … mais les 244
Revue de l’Association nigériane des enseignants universitaires de français (RANEUF) No 19, octobre 2021 ISSN : 978-059-704-2 hommes ne changeraient pas si non si rapidement, sinon elle [Zofia] n’aurait pas besoin d’être là » [17]. En effet, l’auteur intervient avec son opinion sur des êtres surnaturels sur la terre. Par exemple, la première préoccupation de Zofia, un ange et le protagoniste du roman et de faire gagner son camp dans la bataille entre Dieu et Lucifer. Pour ce faire, elle doit rechercher les âmes en peine pour les sauver dans une période de sept jours. D’autre part, Lucas le démon et l’antagoniste doit provoquer des désastres pour chambouler le monde. Il signe ce pacte avec le diable, son maitre pour faire triompher son camp. Son rôle est de rivaliser avec l’ange. Mais les deux pouvoirs surnaturels n’avaient pas prévu que leurs émissaires allaient se rencontrer et tomber amoureux. Alors, le fond du message de Levy, c’est d’être à la recherche des faits qui peuvent changer positivement la vision du monde. Ces faits sont l’amour, le soin et le sourire selon les principes qu’il avance. Levy exprime sa propre opinion par le truchement de Jules Minsky. Son opinion s’énonce clairement: la bienveillance fait partie des faits qui peuvent changer la vision du monde; selon lui, le sourire comme un acte de bienveillance pourrait donner du plaisir et de l’espoir à quelqu’un. Cela se comprend dans l’énoncé de Jules : «Tu as inventé une chose merveilleuse, tout à l’heure, sans même t’en rendre compte- --En passant devant mon arche, tu m’as souri---Tu as inventé une sorte de vaccin contre l’instant de mal-être. Si tout le monde faisait cela, rien qu’une seule fois par jour donner juste un sourire, imagines-tu l’incroyable contagion de bonheur qui filerait sur la terre.» (103). Alors, le sourire devient une invention comme un vaccin contre la malveillance par le porteur. Aussi, nous nous apercevons que l’amour triomphe de tous les obstacles. 245
MALUMI Soni Omoloro RANEUF- No 19, octobre 2021 Pp.237-252 http://dx.doi.org/10.17613/nsdf-ss33 Donc, Levy prêche l’amour. Il faut s’aimer les uns les autres afin de changer positivement notre vision du monde. L’analyse critique de l’ésotérisme contemporain dans l’œuvre L’ésotérisme demeure une cosmologie ou un ensemble global de connaissances sur le monde, la nature humaine et l’univers. Elle est donc une autre façon de penser le monde: les rapports entre immanence et transcendance, les relations avec la nature, l’histoire de l’humanité ou bien un autre mode de perception de ce qui inscrit l’Homme dans l’infini et dans l’espace du temps. L’idée de raconter une histoire d’amour avec le «Bien» et le «Mal» est assez géniale et également l’idée d’un défi entre ces deux camps ambivalents est encore plus originelle. Le livre part pourtant sur une bonne idée, l’affrontement sur terre du bien et du mal, à travers un garçon et une fille envoyés par les deux êtres suprêmes qui se disputent le monde. Nous avons beaucoup apprécié le motif de notre romancier qui voulait utiliser l’amour pour instaurer la paix dans un monde en désarroi. Levy veut nous faire partager un monde plein de sentiment d’amour. Cela posé, la vie n’est pas si horrible que l’on le supposerait. L’amour existe pour nous aider à surmonter les problèmes. L’auteur nous fait comprendre que tout le monde a besoin de l’amour. Nous apprécions Levy d’avoir créé un conte théologique fondé sur l’amour, la volonté et le respect. Le mal et le bien peuvent habiter ensemble malgré tout. Levy voulait un monde idéal dont le fondement est l’amour du prochain, un monde dépourvu de sentiment religieux et de vice social qui peuvent rendre la vie insupportable. Nous avons aussi apprécié sincèrement son désir de créer une société 246
Revue de l’Association nigériane des enseignants universitaires de français (RANEUF) No 19, octobre 2021 ISSN : 978-059-704-2 multiculturelle et multilingue afin d’éradiquer la discrimination à tout prix dans la société. Malgré que nous ayons reconnu l’amour, le sourire, la bienveillance et le soin comme des outils importants pour améliorer le monde, dans le même temps, nous trouvons irrévérencieux l’action de vulgariser les affaires spirituelles. Comment les thèmes ésotériques sont-ils abordés dans le roman ? La société contemporaine a certes besoin d’une littérature qui fait passer un message moral et didactique. Selon Bruno: «C’est vrai, notre programmation mentale est structurée par le livre» (67). Tout d’abord, comme déjà mentionné, caricaturer Dieu ou les anges constitue un manque de révérence. Selon Onyemelukwe : «La caricature est une description ou une peinture comique ou satirique qui s’effectue par l’accentuation de certains traits ridicules, déplaisant de la cible du caricaturiste.»(34). Retenons que dans le roman de notre communication, Levy présente Dieu et l’ange Michel comme des êtres humains ayant des attributs humains. Par exemple, en parlant de Dieu, il écrit: «Tous ses (Dieu) gestes trahissaient l’impatience qu’il contrôlait » (37). Dans un autre extrait du roman, il écrit que Dieu a «l’air soucieux » (36). Il présente Dieu comme l’homme politique ou bien un gérant et qu’il a une assemblée qui s’appelle Le Conseil. C’est drôle et ridicule que Dieu, «le Dieu» que l’auteur présente dans son roman a une réceptionniste et un bureau. En revanche, Lucifer aussi a ses propres membres de cabinet, selon Levy, c’est Le Conseil qui aide Dieu à prendre les décisions sur l’univers. C’est un blasphème ridicule de dire qu’il y a quelqu’un ou bien un groupe de personnes qui aident Dieu à prendre des 247
MALUMI Soni Omoloro RANEUF- No 19, octobre 2021 Pp.237-252 http://dx.doi.org/10.17613/nsdf-ss33 décisions ou à gérer l’univers. Alors, nous constatons que la présentation des idées ésotériques par Levy constitue un affront aux croyances des deux principales religions notamment le Christianisme et l’Islam. Selon La Bible dans «Genèse», Chapitre deux verset seize, c’est Dieu qui donna le commandement à Adam dans le jardin et c’est Lui aussi qui autorisa les dix commandements à Moïse dans «Exode vingt», Il n’a consulté qui que ce soit pour savoir si les lois sont en ordre ou non. Cette affirmation se confirme davantage par cette parole de Dieu à Moïse: «Je suis celui qui s’appelle ‘Je suis’ a envoyé vers vous». À travers cette ordonnance, Le Tout-Puissant n’a pas donné ou discuté avec personne avant de faire passer son message, c’est à dire, Dieu n’a pas donné les ordres en collaboration avec une assemblée ou un groupe de personnes, ou quelqu'un et il n’y a pas de question de troisième personne comme l’indique notre romancier. Cette idée formulée par Levy est donc un pêché contre l’humanité. D’autre part, le dogme de la religion Islam prêche l’unicité de Dieu avec le «Tawhid», c’est-à-dire que Dieu est unique. On l’appelle «Al-Wahid» (celui qui est unique) ou «AlAwal» (Le premier et le dernier). C’est synonyme à «Alpha et Omega» du Christianisme (Le commencement et la fin). Selon Le Coran, Dieu ou Allah est celui qui subsiste par luimême et qu’il ne compte sur aucune de sa création pour subsister. C’est toujours vrai que toute création dépend de lui. Donc, faire la caricature de Dieu constitue une hérésie. On l’appelle’’Al-Moukhâlafatou li al-hawadith’’, celui qui n’a pas de pareil. Selon Le Coran: «There is nothing like unto Him, and He is the hearing, the seeing» (9). Alors, les musulmans disent dans leurs prière ou lorsqu’ils sont surpris par un événement merveilleux: «Allahou Akbar», ce 248
Revue de l’Association nigériane des enseignants universitaires de français (RANEUF) No 19, octobre 2021 ISSN : 978-059-704-2 qui signifie «Dieu est le plus grand». Même la religion traditionnelle voit Dieu comme le créateur de tous créateurs, lui, qui détermine le destin de chaque individu sur terre. Donc, l’action de notre romancier de qualifier Dieu comme un politicien qui doit se réunir avec son Conseil des ministres est totalement condamné, c’est une insulte pour notre romancier d’avoir osé faire cela. Ensuite, Levy écrit que Dieu habite dans son bureau qu’il nomme «La centrale de l’intelligence des Anges», situé au Transamerica Building à Sans Francisco, en Amérique. De plus, il présente l’administration du bureau de Dieu dans une hiérarchie qui comprend Dieu, les anges et le Conseil. Donc, Dieu a ses ministres qui travaillent avec Lui selon Levy. Dans un autre extrait dans le roman, Dieu est vu comme quelqu'un qui habite avec les êtres humains sur terre. Nous avons eu vent de cette affirmation à travers cette parole: «Il (Dieu) regarda le ciel» (181). Alors, la question que nous voulons poser, c’est de savoir s’il y a un autre ciel à part celui que Dieu appelle son trône ? Nous avons eu l’assurance en tant que chrétiens que notre Dieu demeure tranquillement dans son trône majestueux au ciel dans Esaïe chapitre 66 verset un «Ainsi parle L’Éternel: le ciel est mon trône et la terre mon marchepied. Quelle maison pourriez- vous me bâtir, et quel lieu serait celui de mon repos ?». C’est donc ridicule pour Levy d’affirmer que Dieu, Le Tout-Puissant, habite sur terre avec les êtres humains. C’est scandaleux, c’est une aberration de la part de notre romancier d’avoir osé décrire Dieu en ces termes dérisoires, il mérite d’être interrogé. Dieu n’est pas limité dans un espace spécifique. Le Seigneur est partout. Et telle est une preuve de son Omniprésence. Celui qui voit tout et qui sait tout bien avant que Levy ne dise qu’il croyait que l’existence de Dieu est absurde. 249
MALUMI Soni Omoloro RANEUF- No 19, octobre 2021 Pp.237-252 http://dx.doi.org/10.17613/nsdf-ss33 De plus, le fait que Dieu et Lucifer signent un pacte est une idée qui touche au blasphème et à l’hérésie. Cette insolence atteint son apogée lorsque le démon et l’ange tombent amoureux et Dieu, Le Tout-Puissant, Le Créateur de l’Univers et Lucifer, le diable, pensent devenir grands-pères à l’écoute du narrateur: «Nous allons être grand-père» (307). Quel scandale, quelle insulte et quelle abomination ! La présentation de Levy ne tient pas debout. Décrire Dieu d’une telle manière dans un roman destiné au public est un sacrilège. D’ailleurs dans le christianisme, on disait que la bataille d’Armageddon, selon «l’Apocalypse», serait le combat final entre le Bien et le Mal comme nous montre La Bible dans «l’Apocalypse», Chapitre vingt, Verset un: «Puis je vis descendre chaine du ciel, un ange qui tenait la clef de l’abime et une grande chaine à la main. Il saisit le dragon, le serpent ancien qui est le diable et le Satan, et il le lia pour mille ans. Il (ange) le jeta dans l’abime---afin qu’il (Satan) ne séduise plus les nations ». La description de cet événement montre qu’il n’y a pas de réconciliation entre Dieu et Lucifer. Dans Le Coran aussi, Allah avertit les musulmans de ne pas suivre les traces de Shaytan, c’est-à-dire, Allah conseille à ses fidèles de s’éloigner de Lucifer. Allah montre qu’il existe le paradis (Jannah) pour ceux qui le (Allah) suivent où qu’ils soient et qu’il y a l’enfer comme punition pour Shaytan et ses fidèles. Ainsi, dans Le Coran aussi, il n’y a point d’intégration entre Allah et Shaytan. D’une part, l’usage des thèmes ésotériques pour décrire le combat final qui aurait eu lieu entre Dieu et Lucifer dans Sept jours pour une éternité de Levy est un blasphème, c’est juste pour ridiculiser Dieu. Cela n’a aucun fondement vis-àvis de La Bible et du Coran. Les idées avancées par notre romancier 250
Revue de l’Association nigériane des enseignants universitaires de français (RANEUF) No 19, octobre 2021 ISSN : 978-059-704-2 pour construire son imagination sont très orthodoxes et désagréables car le roman peut provoquer à son tour une crise religieuse. D’autre part, nous constatons que l’amour est plutôt réciproque et non pas égocentrique. Mais l’amour que prêche Levy semble avoir un intérêt personnel, donc notre romancier est égoïste. Pis encore, l’amitié entre Lucifer et Dieu est condamnable, c’est une amitié qui n’est pas justifiable. C’est un péché capital de penser que Dieu signe un pacte avec le diable. Surement, le désaccord entre Dieu et le diable reste éternel selon La Bible dans la seconde «Corinthiens», Chapitre six, Verset (14-16): «Ne formez pas avec les incroyants un attelage disparate. Car quelle association y a-t-il entre la justice et l’iniquité ? Ou quelle communion entre la lumière et les ténèbres ? Et quel accord entre Christ et Satan --- Quel rapproche entre le temple de Dieu et les idoles ? (1468) Presque tout lecteur aime la fin heureuse d’un récit mais dans ce roman, nous la trouvons vraiment bizarre, terrible et insupportable. Nous avons condamné entièrement la partie où Dieu avait posé sa main sur l’épaule de Lucifer et lui sourit. C’est une indignation et un affront contre Le Tout- Puissant. Nous trouvons maladroit cette partie de l’œuvre. Nous approuvons que l’amour est un instrument pour promouvoir ou faire avancer l’humanité, mais cet amour prêché par notre romancier entre Dieu et Satan n’a point de place dans les deux principales religions du monde. Conclusion Il faudrait prévenir l’écriture des œuvres littéraires aux thèmes ésotériques afin d’éviter la crise dans sa totalité. Nous recommandons aux dirigeants d’instaurer des sanctions contre les auteurs qui écrivent pour indigner 251
MALUMI Soni Omoloro RANEUF- No 19, octobre 2021 Pp.237-252 http://dx.doi.org/10.17613/nsdf-ss33 certaines religions. La liberté d’expression dans le genre romanesque de fiction ne devrait bouleverser ni la foi religieuse ni les valeurs morales, nous suggérons ainsi la mise en œuvre d’une politique littéraire pour soutenir le patrimoine culturel et moral. Pour rendre le monde confortable, il faudrait que chaque individu ait du respect pour les normes socioculturelles et religieuses du monde car les belles plumes font les beaux oiseaux. C’est à nous de construire une belle société pleine d’amour où les valeurs morales sont respectées. N’est-il pas temps de mettre fin aux crises religieuses depuis le XIVe siècle, voire des crises causées par la publication anti-islamique au Danemark en 2006 avec plus de 2000 personnes tuées dans les États de Borno, d’Anambra et de Bauchi du Nigeria, sans oublier le Verset satanique de Salman Rushdie ayant provoqué des émeutes en Iran, au Pakistan, en Égypte, en Afrique du Sud et en Amérique ? Œuvres citées Eco, Umberto. Le Pendule de Foucault. Paris : Grasset, 1990.Print. Lagarde et Michard. La Littérature française de XVIIIe siècle. Paris : Bordas, 1969.Print. La Sainte Bible. La Bible en France. Paris, 1997. Print. Le coran. Le Coran Traduit en anglais par Al-Muntada Alislami. Riyadh: Abul Qasim publishing House, 1997. Print. Lagrange, Pierre et Claudie Voisenat. «L’ésotérisme contemporaine et ses lecteurs», Renaissance d’un ésotérisme occident 1945-1960, Edition de la Bibliothèque 252
Revue de l’Association nigériane des enseignants universitaires de français (RANEUF) No 19, octobre 2021 ISSN : 978-059-704-2 . Web. 23 mai 2020. Lennox, Morrison, ‘’falling & starting anew’’ Wall Street Journal (on line edition) .Web. 14 Mai 2020. Levy, Marc. Sept jours pour une éternité. Paris : Robert Laffont, 2003.Print. ---. < http://fr.m.wikipedia.org/wiki/Marc-Lévy>Web. 23 Mai 2020. ---.Une autre idée du bonheur. Paris : Robert Laffont, 2014.Print Onyemelukwe, Ifeoma. The French Language and literary creativity in Nigeria. Zaria: Labelle Educational Publishers, 2004.Print Paul, Robert. Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue francaise.Paris: Nouvelles Editions Millénismes, 2012.Print. 253
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