L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme (citations)

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L'éthique protestante et l'esprit
du capitalisme (citations)
Max Weber (1904)

Remarque préliminaire
1. « L'objectif premier est de saisir la spécificité du rationalisme
occidental ». p. 63.

2. « [Etudier] le rôle déterminant qu'ont joué certains contenus de
croyance religieux dans l'émergence d'une mentalité économique, de
l'ethos d'une forme économique ; l'exemple choisi ici sera celui du lien
entre l'ethos économique moderne et l'éthique rationnelle du
protestantisme ascétique ». p. 63.

3. Activité capitaliste : « acte fondé sur l'attente d'un gain par
l'exploitation d'opportunités d'échange : sur des chances de profit
(formellement) pacifique ». p. 53.

4. « Le capitalisme et les opérations capitalistes ont existé dans tous
les pays civilisés du monde ». p. 55.

5. « Mais l'occident connaît aussi, à l'époque moderne, une forme
toute différente de capitalisme, qui ne s'était jamais développée
auparavant dans le monde : l'organisation capitaliste rationnelle du
travail (formellement) libre ». p. 57.

6. « L'organisation rationnelle moderne de l'entreprise capitaliste
n'aurait pas été possible en l'absence de deux autres facteurs qui ont
joué un rôle important dans cette évolution : la séparation de la
gestion domestique et de l'entreprise (...), et la comptabilité
rationnelle, étroitement liée à ce premier facteur». p. 58.

7. « Le capitalisme d'entreprise moderne et rationnel exige non
seulement des outils de travail techniques aux effets calculables, mais
aussi une juridiction aux effets calculables et une administration régie
par des règles formalisées. (...) Seul l'occident a mis à la disposition de
ses gestionnaires économiques un droit et une administration ayant
atteint un tel degré d'achèvement technique et formel ». p. 62.

8. « Il s'avère en effet que la culture occidentale a développé un
rationalisme d'un type particulier. On peut cependant donner à ce
terme des acceptions fort différentes. Il existe, par exemple, des
rationalisation de la contemplation mystique, c'est à dire d'un
comportement spécifiquement irrationnel si on le considère à partir
d'autres sphères de la vie. On peut en outre rationaliser chacun de ces
domaines selon des perspectives et des orientations ultimes fort
variées. Il faut se demander quelles sphères ont été rationalisées, et
selon quelles orientations elles l'on été. (...) Liée à la rationalisation de
la technique et à celle du droit, l'émergence du rationalisme
économique fut en effet tributaire de la capacité et de la disposition
des hommes à adopter des formes spécifiques de conduite pratique et
rationnelle de la vie ». p. 63.

I. Le problème
1. Confession et stratification sociale
9. « [On constate] le caractère très majoritairement protestant des
détenteurs de capitaux et des chefs d'entreprise, ainsi que des couches
supérieures qualifiées de la main d'oeuvre ». p. 71.

10. « Se pose alors cependant la question historique : comment
expliquer cette prédisposition des régions économiquement les plus
développées à faire le choix d'une révolution dans l'église ? » p. 72.

11. « C'est la mentalité spécifique inculquée par l'éducation, en
l'occurrence l'orientation donnée à l'éducation par l'atmosphère
religieuse de la région d'origine et du foyer familial qui détermine le
choix du métier et la suite du destin professionnel ». p. 76.

2. L'esprit du capitalisme
12. « Pour comprendre quel furent les moteurs de l'expansion du
capitalisme moderne, il n'y a pas lieu de s'interroger d'emblée sur
l'origine des réserves d'argent qui purent être exploitées sur le mode
capitaliste ; il importe avant tout d'analyser le développement de
l'esprit capitaliste. Partout où il s'éveille et peut exercer son action, il
se procure les moyens de son action et non l'inverse ». p. 113.
13. « Le premier adversaire que l'esprit du capitalisme, entendu
comme style de vie régi par certaines normes et se présentant sous
l'apparence d'une éthique, eut à combattre, fut le type de sensibilité et
de comportements que l'on peut appeler traditionalisme. » p. 102.

14. « Il semblerait donc que le développement de l'esprit capitaliste
doive être tout simplement considéré comme un phénomène
spécifique au sein de l'évolution générale du rationalisme, et qu'il soit
le résultat de certaines prises de position fondamentales de ce dernier
sur les problèmes ultimes de l'existence. Le protestantisme ne jouerait
un rôle historique que dans la mesure où il aurait été le fruit précoce
de conceptions purement rationalistes de l'existence. Cette manière si
simple de poser le problème s'avère inadéquate, ne serait-ce que parce
que l'histoire du rationalisme n'impliqua en rien des progrès
simultanés dans les différentes sphères de la vie. Le rationalisme est
un concept historique qui enferme en lui un monde d'oppositions, et
nous aurons à nous demander quel esprit a donné naissance à la forme
concrète de pensée et de vie rationnelle qui a produit cette idée du
métier et cette propension à s'adonner au travail du métier, si
irrationnelle du point de vue purement eudémoniste de l'intérêt
personnel ». p. 126.

3. La conception luthérienne du métier [Beruf]
15. « [Il y a un] Dogme central de tous les courants protestants : (...) la
conviction qu'il n'est qu'un moyen de vivre qui agrée à Dieu : non le
dépassement de la moralité intramondaine dans l'ascèse monastique,
mais l'accomplissement exclusif des devoirs intramondains qui
découlent, pour chaque individu de la position qui est la sienne, et
constituent par là même son Beruf ». p. 135.

16. « La notion de métier conserva chez Luther une assise
traditionaliste. Le métier est ce que l'homme doit accepter comme un
décret divin, il est le destin auquel il doit se plier : l'accent est d'abord
mis sur cet aspect, qui prime sur l'idée, également présente, que le
travail professionnel est une mission ou plutôt la mission imposée par
dieu ». p. 145.

17. « On ne saurait prétendre, en vertu d'une thèse absurdement
doctrinaire, que l'esprit capitaliste a pu n'être qu'un épiphénomène de
certaines influences exercées par la réforme, ou même que le
capitalisme, comme système économique, est un produit de la
Réforme ». p. 151.

II. L'Ethique du métier dans le
protestantisme ascétique
1. les fondements religieux de l'ascèse intramondaine
18. « On considérait à l'époque et on considère généralement encore
aujourd'hui comme [le] dogme le plus caractéristique [du calvinisme]
la doctrine de la prédestination ». p. 159.

19. « Dans son inhumanité pathétique, cette doctrine devait influencer
l'état d'esprit d'une génération, qui se rendit à sa logique implacable :
elle fit naître en particulier un sentiment de solitude intérieure inouïe
de l'individu. Pour ce qui était la grande affaire de leur vie, la question
du salut éternel, les hommes de la réforme en étaient réduits à suivre
la voie solitaire qui les conduisait à un destin fixé de toute éternité.
Nul ne pouvait leur venir en aide. Ni un prédicateur ( ...). Ni un
sacrement (...). Ni une église (...). Ni, enfin, un dieu (...) ». p. 165.

20. « Dans l'histoire des religions, le grand processus de
désenchantement du monde (...) qui conduisit à rejeter tous les moyens
magiques de quête du salut comme autant de superstitions et de
sacrilèges, trouvait ici son aboutissement ». p. 167.

21. « Le travail social du calviniste dans le monde n'est rien d'autre
qu'un travail in majorem dei gloriam ». p. 173.

22. « Dès que la question du salut individuel se posait, il était en tout
cas impossible de s'en tenir à la conception de Calvin (...). Quand la
doctrine de la prédestination n'était pas réinterprétée, adoucie, et en
définitive abandonnée, deux types de conseils étaient délivrés dans la
cure des âmes. D'une part, on donnait pour un devoir de se considérer
comme élu, puisque le manque de certitude résultait d'un manque de
foi (...). D'autre part, le travail d'un métier exercé sans répit était
présenté comme le moyen le plus probant d'accéder à cette certitude
de soi. Le travail et lui seul était censé dissiper le doute religieux et
donner la certitude de l'état de grâce ». p. 181.

2. Ascèse et esprit capitaliste
23. « L'ascèse protestante intramondaine mit tout en oeuvre pour
combattre la jouissance spontanée de la fortune, elle restreignit la
consommation, en particulier les consommations de luxe. En
revanche, elle eut pour effet psychologique de libérer l'enrichissement
des entraves de l'éthique traditionnelle, de supprimer ce qui faisait
obstacle à la quête du profit (...). Si nous conjuguons à présent cette
restriction de la consommation et cette libération des entraves qui
pesaient sur l'aspiration au profit, le résultat coule de source :
constitution d'un capital par la contrainte ascétique d'épargne. Les
obstacles qui s'opposaient à la consommation et à la dépense de
l'argent acquis ne pouvaient que favoriser son usage productif :
l'investissement du capital ». p. 289.
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