La question de développement - Dimanche 23 mai 2021 / Jacques Maillard Les mycorhizes

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La question de développement - Dimanche 23 mai 2021 / Jacques Maillard Les mycorhizes
La question de développement
                           Dimanche 23 mai 2021 / Jacques Maillard
                                                Les mycorhizes
Ce terme plutôt à la mode, on peut en trouver dans l’assortiment des jardineries en tant que « complément
alimentaire » à donner à nos plantes, a une connotation un peu mystérieuse. De quoi s’agit-il en fait et quels
sont leur bénéfice pour les plantes ? Certains ignorent peut-être qu’en cueillant de beaux cèpes en automne, ils
profitent d’une subtile collaboration entre arbres et champignons.

                 Filaments mycéliens d’amanite s’agglomérant autour des radicelles d’un arbre.

Histoire

Dans les territoires colonisés d’Amérique du Sud, d’Afrique, et d’Australie, les européens tentèrent de faire
germer des graines de pin, arbre prisé pour la qualité de son bois notamment dans le domaine de la marine. Or
les plantules se développaient difficilement, jaunissaient et mourraient. Empiriquement au XIXème siècle on
découvrit alors qu’en apportant un peu de sol européen ou directement des plants enracinés dans une portion
de sol d’ici, le résultat était tout autre : les plantes prospéraient… grâce à la présence de champignons non
présents dans les sols des territoires d’outre-mer… C’est un biologiste allemand, Albert Frank, qui à la fin du
XIXème siècle découvre cette symbiose entre arbre et champignon. Mandaté par le roi de Prusse pour
développer des méthodes de production de truffes, il met à jour ce qu’il appelle alors les mycorhizes, du grec
myco – « champignon » et rhiza- « racine », soit un subtil mutualisme qui va bouleverser la conception de
l’alimentation des plantes. Le mycélium des champignons s’associe aux radicelles des plantes dans un partenariat
où chacun sort gagnant.

Biologie

Ce mycélium est constitué de très fins filaments microscopiques, les hyphes d’un diamètre d’un 1/100 mm qui
forment un réseau très dense dans le sol. Dans une prairie, un cm3 de sol contient entre 100 et 1000 m d’hyphes
de champignon et la surface de contact avec le sol qu’offrent ces hyphes est 10 000 fois supérieure à la surface
de contact des racines. Les champignons fournissent à la plante, eau, minéraux principalement et la plante leur
fournit des molécules carbonées, principalement des sucres issus de la photosynthèse. On estime qu’entre 20 et
40% des produits de la photosynthèse sont transférés dans les racines pour nourrir la rhizosphère. On appelle
mycorhize l’imbrication des hyphes avec les radicelles qui forme souvent un épaississement de celles-ci, comme
un organe de «rencontre ». On a mis en évidence celles-ci tout d’abord chez les arbres des zones tempérées mais
par la suite on a découvert que 90% des végétaux terrestres sont concernés. Seules 10 % des espèces végétales
semblent ignorer cette collaboration, on les dit non mycorhizées, comme les plantes de la famille des choux, les

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La question de développement
                           Dimanche 23 mai 2021 / Jacques Maillard
Brassicacées. Les Chénopodiacées (épinards…) par ex. Des plantes qui poussent dans des sols plutôt riches et qui
peuvent se passer des champignons pour trouver leur nourriture.

On distingue deux types de mycorhizes :

    •    Les ectomycorhizes : les filaments du champignon forment comme un manchon à l’extrémité des
         radicelles et ne s’introduisent entre les cellules de la racine qu’en surface. Elles se rencontrent chez les
         arbres des climats tempérés, les arbres de nos forêts. Les champignons que nous cueillons sont les
         fructifications des espèces qui colonisent les racines de ces arbres : cèpes, girolles, morilles, etc… Ne
         sont pas présentes chez les arbres des climats chauds. Env 200 espèces de champignons.
    •    Les endomycorhizes : les filaments s’introduisent jusque dans les cellules des racines de la plante dans
         une imbrication beaucoup plus serrée. Elles concernent 80% des espèces végétales, dont les arbres des
         forêts tropicales et les plantes herbacées. Le nombre d’espèces de champignons connues à ce jour
         dépasse plusieurs milliers.

Chez les plantes mycorhizées, les poils absorbants ne durent que pendant la phase de germination et sont par la
suite remplacés par les hyphes de champignons. Pourtant, on présente encore dans l’enseignement, les poils
absorbants comme l’organe de la nutrition des plantes… Les hyphes des champignons sont capables de rendre
accessibles des minéraux insolubles dans l’eau- la plante ne peut absorber que des ions minéraux solubles- en
s’introduisant dans des infimes craquelures de fragments de roches en utilisant des acides organiques qui
dissolvent des minéraux comme le potassium contenu dans le feldspath.

Par ailleurs on découvre que les champignons ont un rôle qui va beaucoup plus loin que le rôle alimentaire, que
des associations avec des bactéries forment tout un « microbiote » qui joue entre autres un rôle dans la défense
contre les pathogènes et participe à la défense des plantes. Les recherches sont en plein développement. Des
biologistes ont créé le concept de « Wood Wilde Web » pour désigner ce réseau souterrain complexe comparable
à notre web… Chez les arbres notamment les hyphes constituent des réseaux complexes entre individus de la
même espèce, via les mycorhizes, voir avec d’autres espèces ligneuses et même herbacées. Ces réseaux
véhiculent des éléments nutritifs mais également des signaux d’alertes annonçant d’éventuels dangers. Dans ce
domaine les découvertes s’enchaînent…

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Les applications

La mycorhization est très utilisée dans la production de champignons comestibles. Par exemple, 80% de la
production de truffes provient d’arbres inoculés en pépinière. En sylviculture, on a obtenu des résultats très
intéressants avec des plants de douglas qui avaient été inoculés en pépinière avec une souche de champignon
sélectionnée : 60 % d’augmentation de croissance ! En agriculture, des souches de champignons propres à
certaines cultures ont été sélectionnées et les applications sont en plein développement. Bien sûr l’utilisation de
fongicides, d’engrais minéraux solubles directement assimilables par les plantes court-circuitent ces réseaux et
appauvrissent le sol en micro-organismes qu’ils soient champignons ou bactéries. Les méthodes biologiques sont
plus pertinentes et compatibles avec ces applications.

Conclusion

Tout un commerce se développe autour des mycorhizes, qui demande d’être prudent car l’utilité de cette
pratique n’est pas forcément pertinente pour l’amateur. Avoir un sol vivant, apporter de la matière organique,
renoncer aux intrants chimiques, aux désherbants, va apporter naturellement aux plantes certainement ce dont
elles ont besoin et induire une mycorhization naturelle probablement plus adaptée que des produits payés assez
chers… L’application de jus de compost à aération active comme déjà présenté va tout à fait dans le sens de
favoriser les champignons actifs dans les mycorhizes.

Sources
    -   « Jamais seul – ces microbes qui construisent les plantes, les animaux et les civilisations »
        Marc-André Selosse
    -   Wikipédia : Mycorhize

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