Le Brexit : aujourd'hui et demain - Chambres d'agriculture
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Le Brexit : aujourd’hui et demain Etude régionale Brexit – Note de synthèse Après l’avoir voté par référendum en 2016, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord a finalement quitté l’Union Européenne en vertu de l’article 50 du Traité de Lisbonne le 1er février dernier. Le chemin avant la séparation est encore long et tout se jouera durant les négociations qui sont prévues au cours de l’année 2020. Le 1er février 2020 : la séparation politique A l’occasion du référendum du 23 juin 2016, la population britannique a voté en faveur d’une sortie du Royaume-Uni de l’Union Européenne (à 51,9 %). La demande de retrait a été enclenchée par le gouvernement britannique le 29 mars 2017 et celui-ci, initialement prévu le 29 mars 2019, a été repoussé à trois reprises, le Conseil européen ayant accepté de répondre favorablement aux demandes formulées en ce sens par le gouvernement britannique. Le Royaume-Uni est finalement sorti de l’Union de façon ordonnée le 31 janvier 2020 à minuit, trois ans et demi après le référendum et selon les modalités de l’article 50 du traité sur l'Union européenne. Celui-ci, introduit en 2007 par le traité de Lisbonne, définit la procédure au moyen de laquelle un Etat-membre peut se retirer de l'Union Européenne, si tel est son désir (voir en annexe). Le R-U n'est ainsi plus un Etat-membre de l'Union Européenne et de la Communauté européenne de l'énergie atomique depuis le 1er février 2020, date à laquelle s’est ouverte une période dite « de transition », selon les conditions actées par l’accord de retrait, ratifié in extremis par les deux parties. Celui-ci couvre les domaines suivants : les droits des citoyens. Une période de transition. Les questions de séparation. Un protocole sur l’Irlande et l’Irlande du Nord. Le règlement financier. La structure de gouvernance de l’accord. Un protocole sur les zones de souveraineté à Chypre. Un protocole sur Gibraltar. Pendant cette période, qui est prévue jusqu’au 31 décembre 2020 mais qui peut être étendue de un ou deux ans, le droit de l'Union Européenne s'applique au Royaume-Uni. Il doit ainsi continuer à appliquer et à bénéficier de la réglementation européenne sans avoir son mot à dire sur les décisions prises par les 27 puisque ses membres ont quitté le Parlement et l’ensemble des institutions européennes. 2020 : une année de transition La période de transition prévue par l’accord de retrait laisse le temps à chacun de préparer la mise en œuvre de l’accord de retrait et d’anticiper la relation future entre l’UE et le Royaume-Uni, qui doit encore être
négociée. A défaut d'accords trouvés au cours de cette période, la menace d'un no deal (un divorce sans accord) planerait de nouveau. En effet, depuis leur entrée dans la Communauté Economique Européenne lors du Traité de Bruxelles en janvier 1973, l’appartenance du Royaume-Uni à l’Union a donné lieu à un niveau élevé d’intégration dans les économies de l’Union et du Royaume-Uni, liant le passé et, dans une certaine mesure, l’avenir des deux entités. Ainsi, la période de négociations est très courte, tant les sujets sont nombreux. Le Royaume-Uni peut prolonger la période de transition au-delà de fin 2020 pour un ou deux ans mais doit informer l’UE de sa demande avant le 1er juillet. Le gouvernement britannique s’est engagé juridiquement à ne pas demander d’extension. Mais la Commission européenne juge le délai de la période transitoire très serré. Sa présidente Ursula von der LEYEN a averti qu’il serait impossible de s’accorder sur « tous les aspects » et qu’il faudrait choisir des « priorités ». Les négociations démarrent Londres s’est dit prêt à lancer ses négociations commerciales (industries, agriculture…) dès le 1er février mais les membres de l’UE discutent toujours pour déterminer leurs objectifs pour ces négociations. Le Premier Ministre Boris JOHNSON doit présenter ses ambitions d’arriver à un accord de libre-échange du même type que celui signé par l’UE avec le Canada récemment. Les négociations continueront d’être menées par Michel BARNIER. Le mandat européen devrait être approuvé au niveau ministériel pour le 25 février, selon des responsables européens, permettant aux pourparlers de démarrer autour du 1er mars. Outre le commerce, le Royaume-Uni et les 27 ne manquent pas de sujets sur lesquels ils devront s’accorder : la sécurité et la coopération judiciaire, l’éducation, l’énergie… Parallèlement, Londres compte lancer des négociations avec d’autres pays, Etats-Unis en tête, pour arriver à des accords de libre-échange peut-être autant voire plus poussés que celui qu’il signera avec l’UE. Quelle relation future entre l’UE et le Royaume-Uni ? Le Royaume Uni et l’UE ont défini ensemble leur conception du cadre de leurs relations futures ; celui-ci a fait l’objet d’une déclaration politique approuvée le 17 octobre 2019 qui accompagne l’accord de retrait. Après la sortie de l’UE, le Royaume Uni, devenu un Etat tiers, devra signer un ou plusieurs accords avec l’UE pour mettre en œuvre ce cadre. La déclaration politique n’a pas de valeur juridique contraignante mais prépare les futures négociations des accords. La déclaration politique du 17 octobre 2019 Dans la déclaration politique, signée par les deux parties et parue au Journal officiel de l’UE le 31 janvier dernier, les deux parties fixent le cadre des relations futures entre l’Union Européenne et le Royaume-Uni : « L’Union et le Royaume-Uni sont résolus à œuvrer de concert pour préserver l’ordre international fondé sur des règles, l’Etat de droit et la promotion de la démocratie, ainsi que des normes élevées en matière de commerce libre et équitable et de droits des travailleurs, de protection des consommateurs et de l’environnement, et de coopération face aux menaces intérieures et extérieures pesant sur leurs valeurs et leurs intérêts. » Elle précise notamment, en matière économique, qu'un partenariat « ambitieux, vaste et équilibré sera mis en place», comprenant « une zone de libre-échange ainsi qu'une coopération sectorielle plus large lorsqu'elle est dans l'intérêt mutuel des deux parties ». Une attention particulière sera portée aux conditions de concurrence loyale. Des dispositions sont également prévues pour la circulation des personnes. Des exemptions de visa pourront être prévues pour les pour les voyages de courte durée » et les « conditions d'entrée et de séjour à des fins de recherche, d'études, de formation et d'échanges de jeunes » seront examinées au cours des négociations. 2
Concernant la pêche, l'UE et le Royaume-Uni devront établir un nouvel accord de pêche, en particulier sur l'accès aux zones maritimes et sur la répartition des quotas de pêche des poissons. En matière de politique étrangère et défense, la déclaration envisage une coopération étroite entre le Royaume-Uni et l'UE, dans le respect de l’autonomie de décision de l’Union. Enfin, en matière de sécurité interne, des mécanismes d’échanges d'informations ADN, d'empreintes digitales et de données sur l'immatriculation des véhicules seront par exemple mis en place. Au-delà de la validation du mandat de négociation, le mois de février devrait aussi être consacré à convenir avec les Britanniques d’une « feuille de négociation partagée » (qui devra elle-même être validée par les institutions européennes) dans laquelle les grandes priorités seront fixées. En effet, il ne sera pas possible de se mettre d’accord sur tout en aussi peu de temps. Juste derrière la question de la pêche, qui semble être la toute première de ces priorités, vient la conclusion d’un accord de libre-échange (sur l’agriculture, l’industrie et les services) sans contingents tarifaires ni union douanière. Les sujets d’intérêt agricole Le retrait du Royaume-Uni représente des enjeux nombreux pour les secteurs de l'agriculture, de l'agroalimentaire, de la pêche et de la forêt. La pêche sera un sujet majeur sur lequel les Britanniques sont en position de force du fait de l’abondance de poissons dans leurs eaux territoriales. Mais, à l’inverse la plupart de leurs captures de poisson sont vendues vers l’UE. Ils peuvent utiliser cet atout comme monnaie d’échange. Les agriculteurs britanniques sont majoritairement pro-Brexit, excédés par la règlementation européenne, aussi les règlementations pourraient y évoluer. La fin de la libre circulation des marchandises et la mise en place d’exigences différentes de celles de l’UE en matière sanitaire et phytosanitaire pourraient entrainer des difficultés d’échange entre les deux entités et dans tous les cas, le retour des contrôles sanitaires aux frontières. Un autre dossier à traiter est celui de la clé de répartition entre l’UE et le Royaume-Uni des contingents tarifaires déjà prévue par tous les accords de libre-échange conclus par l’UE (une quarantaine au total). Les premières estimations prévoient que plus de 95 % de ces quotas reviennent à l’UE. Sur les indications géographiques protégées (AOP, IGP), une solution a déjà été trouvée : leur protection réciproque sera maintenue, avec cependant une interrogation sur des futurs accords entre le RU et des pays traditionnellement réticents à reconnaître les indications géographiques, comme les États-Unis ou l’Australie. Pour les producteurs européens, une autre question importante concerne l’indication d’origine dans les produits transformés : une viande ou du lait importés du Brésil et transformé au Royaume-Uni dans des plats préparés par exemple serait étiqueté comme produit au Royaume-Uni. 3
Les accords de libre-échange que le Royaume-Uni pourrait conclure sont une autre source d’inquiétudes pour le secteur agricole qui craint que le territoire britannique ne devienne une porte d’entrée vers l’UE. Sans accord sur des négociations, le RU pourrait fixer ses propres règles et ses droits de douane, ce qui impacterait les échanges trans-Manche et plus généralement les échanges avec le reste de l’UE, notamment l’Irlande. Ce seraient alors les règles de base de l’OMC qui s’appliqueraient par défaut, entre autres aux 47 milliards d’exportations agroalimentaires annuelles de l’UE à 27 vers le Royaume-Uni. Les flux actuels d’exportation vers le RU seraient remis en cause (cas du flux massif de viande bovine irlandaise vers le RU, qui devrait trouver acheteur sur le continent). Bibliographie Site français sur le Brexit : www.brexit.gouv.fr Site du Ministère de l’agriculture : www.agriculture.gouv.fr/brexit Elodie TURPIN – mise à jour le 17 février 2020 Service Economie Veille et Prospective ANNEXE Article 50 du Traité de Lisbonne 1. Tout Etat membre peut décider, conformément à ses règles constitutionnelles, de se retirer de l’Union. 2. L’Etat membre qui décide de se retirer notifie son intention au Conseil européen. À la lumière des orientations du Conseil européen, l’Union négocie et conclut avec cet Etat un accord fixant les modalités de son retrait, en tenant compte du cadre de ses relations futures avec l’Union. Cet accord est négocié conformément à l’article 218, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Il est conclu au nom de l’Union par le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, après approbation du Parlement européen. 3. Les traités cessent d’être applicables à l’Etat concerné à partir de la date d’entrée en vigueur de l’accord de retrait ou, à défaut, deux ans après la notification visée au paragraphe 2, sauf si le Conseil européen, en accord avec l’Etat membre concerné, décide à l’unanimité de proroger ce délai. 4. Aux fins des paragraphes 2 et 3, le membre du Conseil européen et du Conseil représentant l’Etat membre qui se retire ne participe ni aux délibérations ni aux décisions du Conseil européen et du Conseil qui le concernent. La majorité qualifiée se définit conformément à l’article 238, paragraphe 3, point b), du traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne. 5. Si l’Etat qui s’est retiré de l’Union demande à adhérer à nouveau, sa demande est soumise à la procédure visée à l’article 49. 4
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