Le contentieux de la réparation des pratiques anticoncurrentielles - Concurrences

 
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Concurrences
REVUE DES DROITS DE LA CONCURRENCE | COMPETITION LAW REVIEW

Le contentieux
de la réparation des pratiques
anticoncurrentielles
(déc. 2019-mai 2020)
Pratiques                  l Concurrences N° 3-2020 l pp. 212-225

Rafael Amaro
rafael.p.amaro@gmail.com
Professeur
Université de Caen Normandie, Institut Demolombe (EA967)
Membre du réseau Trans-Europe-Expert

Bastien Thomas
bthomas@racine.eu
Avocat
Racine, Paris
Pratiques

Rafael Amaro
                                                                      Le contentieux de

                                                                                                                                                                                                                       constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection.
rafael.p.amaro@gmail.com

                                                                                                                                                                                                                       Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art.
                                                                                                                                                                                                                       L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document
Professeur

                                                                      la réparation des
Université de Caen Normandie,
Institut Demolombe (EA967)
Membre du réseau Trans-Europe-Expert

Bastien Thomas*
bthomas@racine.eu
                                                                      pratiques anti-
                                                                      concurrentielles
Avocat
Racine, Paris

ABSTRACT
La période sous commentaire confirme trois tendances
prégnantes, déjà mises en lumière dans nos précédentes
chroniques. Premièrement, le contentieux de la réparation
                                                                      (déc. 2019-mai 2020)
se diversifie. Deuxièmement, il s’internationalise au gré
de litiges qui posent avec acuité des questions
de compétence internationale. Troisièmement, il est
marqué par une forme d’activisme de la Cour de justice,
qui continue à développer sa jurisprudence résolument
“pro-demandeur”.
                                                                      1. Les six derniers mois confirment trois tendances prégnantes, déjà mises en lumière
The period reviewed in this chronicle confirms three key
trends, already highlighted in our previous chronicles.               dans nos précédentes chroniques. Premièrement, le contentieux de la réparation se
Firstly, private enforcement litigation is diversifying.              diversifie – ce qu’atteste l’essor du contentieux devant le juge administratif, ponctué
Secondly, private enforcement claims are more and more                notamment par deux récents arrêts du Conseil d’État1. Deuxièmement, il s’interna-
internationalizing in the course of claims raising
questions of international jurisdiction. Thirdly, private             tionalise au gré de litiges qui posent avec acuité des questions de compétence inter-
enforcement is marked by a form of activism from                      nationale2. Troisièmement, il est marqué par une forme d’activisme de la Cour de
the European Court of Justice, which keeps developing                 justice qui continue à développer sa jurisprudence résolument “pro-demandeur”3.
a resolutely “pro-claimant” case law.

                                                                      2. Par ailleurs, au rang des constats qui ne seront que mentionnés dans ce propos
                                                                      introductif, on observera que la jurisprudence récente de la Cour de cassation
Sélection de décisions rendues dans la période sous
commentaire. Les décisions commentées sont marquées
                                                                      sur la spécialisation4 commence à être bien intégrée par les juridictions du fond.
d’un astérisque, les autres sont simplement citées pour               Plusieurs décisions de juges non spécialisés jugent ainsi irrecevables les préten-
information et il est fait brièvement état de leur intérêt.
                                                                      tions fondées sur le droit des pratiques anticoncurrentielles, qu’elles soient pré-
1. C JUE, 12 déc. 2019, Otis, Schindler                              sentées au juge du fond – en demande5 ou en défense6 – ou au juge des référés7.
    Liegenschaftsverwaltung GmbH, Schindler Aufzüge
    und Fahrtreppen GmbH, Kone AG, ThyssenKrupp                       À la lisière du champ de cette chronique, on relève toujours l’existence d’un
    Aufzüge GmbH c/ Land Oberösterreich e.a. (“Otis II”),
    aff. C-435/18, ECLI:EU:C:2019:1069*                               contentieux de la nullité des contrats anticoncurrentiels. Il peut s’agir d’af-
2. Cass. com., 29 janv. 2020, Switch, no 17-15.156,                  faires relativement habituelles où les clauses de certains contrats de distribution
    inédit*                                                           sont suspectées d’être constitutives de restrictions verticales8 ou d’affaires plus
3. CE, ch. 7-2, 27 mars 2020, req. 421833, 421758 et
    420491*
4. CA Aix-en-Provence, ch. 3-1, 30 janv. 2020, Société
    Distriparfum LLC c/ SAS Coty France, RG 19/07904
5. CA Paris, ch. 5-4, 29 janv. 2020, SARL Alpha Taxis
    c/ SARL Viacab, RG 18/10059
6. CA Paris, ch. 5-4, 24 juin 2020, SARL Safirauto et al.
    c/ SAS Hyundai Motor France, RG 18/23867
7. CA Paris, ch. 5-5, 4 juin 2020, SAS Oxypark c/ SAS
   Espace Expansion, RG 17/22108
                                                                      1 V. infra no 6 et s. ; 16 et s.
8. CA Paris, ch. 5-8, 19 mai 2020, SAS Zehnder Group
    Participations c/ SARL Vasco Group, RG 16/06718                   2 V. infra no 27 et s. ; 49 et s.
9. C A Paris, ch. 5-16, 7 janv. 2020, Sport One c/ Nike
    Europe Operations Netherlands (NEON), RG 19/12209*                3 V. infra no 62 et s.
10. CA Paris, ch. com. inter., 7 janv. 2020, Google                  4 Not. Cass. com., 10 juill. 2018, no 17-16.365, Bull. civ. IV, no 696 ; ECLI:FR:CCASS:2018:CO00696 ; Concurrences no 4-2018,
      c/ LeGuide, RG 19/12553*                                          p. 227, note R. Amaro.
11. CA Paris, ch. com. inter., 14 janv. 2020, Enigma,
     RG 19/18332*                                                     5 P. ex. CA Nîmes, 1re civ., 28 mai 2020, SARL GMG c/ O., D., SAS VCR France et Société Vivai Cooperativi Rauscedo, RG 15/05027, qui
12. C  A Montpellier, ch. com., 22 mai 2020, SARL Il Venti             juge irrecevable la demande en réparation fondée sur les articles L. 420-1 du code de commerce et 1240 du code civil.
      Nove c/ SARL Balducci Di Piu, RG 17/05647                       6 CA Montpellier, ch. com., 22 mai 2020, SARL Il Venti Nove c/ SARL Balducci Di Piu, RG 17/05647, qui précise :“(…) le moyen tiré de l’exis-
13. CA Nîmes, 1re civ., 28 mai 2020, SARL GMG c/ O.,                   tence d’un abus de position dominante (…) à supposer même qu’il puisse être analysé comme un simple moyen de défense, (…) aurait échappé aux
      D., SAS VCR France et Société Vivai Cooperativi                   juridictions commerciales non spécialisées, empêchées de connaître de tout litige relatif à l’application des articles L. 420-1 à L. 420-5.”
      Rauscedo, RG 15/05027
14. T. com. Paris, .3e ch.,20 févr. 2020, SAS Provera                7 CA Aix-en-Provence, ch. 3-1, 30 janv. 2020, Société Distriparfum LLC c/ SAS Coty France, RG 19/07904 : le président du tribunal
      France et al. c/ SA Groupe Lactalis et al.,                       de commerce de Marseille (juridiction spécialisée) avait été saisi en référé sur le fondement des anciens articles 872 et 873 du code de
      RG 2017021571                                                     procédure civile et de l’ancien article L. 442-6, I, 5° du code de commerce. En appel, était aussi visé l’article L. 420-1 du code de
                                                                        commerce. La cour d’Aix-en-Provence juge toutefois l’appel de l’ordonnance du premier juge irrecevable au motif que l’appelant
                                                                        aurait dû saisir la cour d’appel de Paris.

                                                                      8 CA Paris, ch. 5-4, 24 juin 2020, SARL Safirauto et al. c/ SAS Hyundai Motor France, RG 18/23867.
* Avec l’assistance de Sabrina Noël, Baudoin Pillet,
   François Aubin, Avocats, Racine.

212            Concurrences N° 3-2020 I Pratiques I Rafael Amaro, Bastien Thomas I Le contentieux de la réparation des pratiques anticoncurrentielles (déc. 2019-mai 2020)
originales9. À titre anecdotique, on note également des                                                5. Bien qu’essentiellement centré sur l’évaluation du

                                                                                                                                                                                                                 constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection.
affaires où le droit des pratiques anticoncurrentielles est                                            préjudice, le jugement Provera comporte néanmoins un

                                                                                                                                                                                                                 Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art.
                                                                                                                                                                                                                 L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document
invoqué avec une légèreté parfois étonnante10.                                                         développement intéressant en matière d’intérêt à agir.
                                                                                                       Le tribunal juge, in limine litis, irrecevable l’action de
Enfin, hors du champ de la période sous commentaire, on                                                la SAS Provera France (“Provera”), qui ne “démontre
peut déjà faire état ici de la condamnation record pronon-                                             par avoir subi un quelconque préjudice du fait des pra-
cée par une juridiction française dans l’affaire Digicel. Un                                           tiques alléguées ni même un préjudice indirect dans l’exé-
arrêt du 17 juin 202011 de la cour d’appel de Paris condamne                                           cution de son mandat”. Provera est en effet une société
ainsi Orange à payer plusieurs centaines de millions de dom-                                           de référencement qui négocie les conditions tarifaires de
mages et intérêts en réparation des préjudices causés par un                                           la SASU Cora (“Cora”) et de SAS Supermarchés Match
abus de position dominante. Cet arrêt sera commenté dans                                               (“Match”) et qui ne réalise donc aucun achat en propre.
la prochaine livraison de cette chronique.                                                             Provera n’avait pas acheté les produits objet de l’entente
                                                                                                       et les avait seulement négociés en sa qualité de manda-
                                                                                                       taire de Cora et de Match. Le tribunal considère que
I. Droit d’agir                                                                                        seules Match et Cora sont recevables à agir.

(intérêt, qualité et                                                                                                                                                                        B. T. n

prescription)                                                                                          2. Point de départ et causes
                                                                                                       interruptives du délai de
1. Absence d’intérêt à agir d’un                                                                       prescription en cas de
mandataire (jugement Provera)                                                                          condamnation préalable (arrêts
4. Le jugement du tribunal de commerce de Paris du                                                     du Conseil d’État dans l’affaire
20 février 202012, dans l’affaire des produits laitiers, inter-
vient à la suite de la décision de l’Autorité de la concur-
                                                                                                       de la signalisation routière)
rence du 11 mars 2015 qui avait imposé un montant total                                                6. L’affaire de la signalisation routière illustre une nou-
de sanction de 192,7 millions d’euros à 11 producteurs                                                 velle fois la nécessaire patience des victimes de pratiques
pour une entente sur les produits laitiers vendus sous                                                 anticoncurrentielles. Le 22 décembre 201017, l’Autorité de
marque de distributeur (“MDD”)13. Plusieurs de ces sanc-                                               la concurrence avait en effet sanctionné huit entreprises
tions avaient ensuite été réduites très significativement par                                          actives dans le secteur de la signalisation routière verti-
la cour d’appel de Paris14. La Cour de cassation vient                                                 cale pour avoir mis en œuvre une entente ayant couvert
d’ailleurs de rejeter le pourvoi des sociétés Novandie et                                              l’ensemble du territoire national et la quasi-totalité des
Andros contre cet arrêt15. La décision du tribunal de com-                                             marchés lancés par les collectivités publiques pendant
merce de Paris est la première décision sur le fond rendue                                             près de dix ans (de 1997 à 2006). Les entreprises membres
en matière indemnitaire dans cette affaire16.                                                          de l’entente avaient été sanctionnées pour un montant
                                                                                                       total de plus de 52 millions d’euros18. La décision de l’Au-
                                                                                                       torité de la concurrence précisait que l’État, les collecti-
                                                                                                       vités territoriales ainsi que les sociétés d’autoroutes vic-
9 Ainsi d’un litige où une transaction conclue entre opérateurs dans le secteur du chauffage était
  attaquée par l’un de ses signataires, qui y voyait une entente. La prétention, mal étayée en fait,
                                                                                                       times du cartel disposaient du droit de demander répara-
  est logiquement rejetée, mais on observera que la cour prend soin de rappeler, en visant l’arrêt     tion du préjudice subi.
  Courage, que l’adage Nemo auditur… ne fait pas obstacle à ce que la partie à un contrat le
  dénonce au motif qu’il est le support d’une pratique anticoncurrentielle : CA Paris, ch. 5-8,
  19 mai 2020, SAS Zehnder Group Participations c/ SARL Vasco Group, RG 16/06718.                      7. À la suite de cette décision, un certain nombre de col-
                                                                                                       lectivités locales, dont les départements de la Manche
10 P. ex. à propos d’une très hypothétique entente dans le secteur du transport : CA Paris, ch.
   5-4, 29 janv. 2020, SARL Alpha Taxis c/ SARL Viacab, RG 18/10059 ; ou encore à propos de            et de l’Orne, avaient introduit des actions en réparation
   prétendus abus de la société gérant le Forum des Halles : CA Paris, ch. 5-5, 4 juin 2020, SAS       devant les tribunaux administratifs, donnant lieu à un
   Oxypark c/ SAS Espace Expansion, RG 17/22108.
                                                                                                       abondant contentieux19.
11 CA Paris, ch. 5-4, 17 juin 2020, SA Orange et SA Orange Caraïbe c/ SA Digicel Antilles
   Françaises Guyane, RG 17/23041.

12 T. com. Paris, 3e ch., 20 févr. 2020, SAS Provera France et al. c/ SA Groupe Lactalis et al.,       17 Aut. conc., déc. no 10-D-39 du 22 déc. 2010 relative à des pratiques mises en œuvre dans le
   RG 2017021571, Concurrences no 2-2020, note M. Chagny.
                                                                                                          secteur de la signalisation routière verticale.
13 Aut. conc., déc. no 15-D-03 du 11 mars 2015 relative à des pratiques mises en œuvre dans le         18 Le montant total des sanctions prononcées par l’Autorité de la concurrence (incluant éga-
   secteur des produits laitiers frais.
                                                                                                          lement des sanctions prononcées à l’encontre des sociétés 3M France et Sodilor pour abus
14 CA Paris, ch. 5-7, 23 mai 2017, Laïta et al., RG 2015/08224.                                           de position dominante) avait été ramené à environ 40 millions d’euros par la cour d’appel
                                                                                                          de Paris (CA Paris, ch. 5-7, 29 mars 2012, RG 2011/01228 et Cass. com., 28 mai 2013, req.
15 Cass. com., 24 juin 2020, Andros et Cie et Novandie, no 17-20.177.                                     no 12-18.195, 12-18.410 et 12-18.577).

16 L’affaire des produits laitiers a également donné lieu à une décision relative à la commu-          19 D’autres départements ont également introduit des recours. C’est le cas notamment du dépar-
   nication de pièces en 2018 : T. com. Paris, 15e ch., 26 mars 2018, SAS Provera France et               tement de l’Eure (cf. CE, ch. 7-2, 24 févr. 2016, req. 395194), du département de la Charente-
   al. c/ SA Groupe Lactalis et al., RG 2017021571, Concurrences no 4-2018, pp. 223-235,                  Maritime (cf. CAA Bordeaux, 12 déc. 2017, Signalisation France, no 17BX01530) ou encore
   note R. Amaro. Le tribunal y avait rejeté les demandes de pièce émises, non seulement par              du département du Calvados (cf. CAA Nantes, 4e ch., 27 avril 2018, no 17NT02571, et CAA
   les demanderesses, mais également, ce qui est plus rare, par les défenderesses. L’affaire des          Nantes, 4e ch., 2 févr. 2016, no 15NT01264). Ces affaires ne sont pas commentées dans la
   produits laitiers a également donné lieu à un désistement d’instance : T. com. Paris, 15e ch.,         présente chronique, qui se limite au commentaire des trois arrêts rendus le 27 mars 2020 par
   14 déc. 2018, Casino Guichard-Perrachon et al. c/ SAS Yoplait et al., RG 2017069290.                   le Conseil d’État.

                 Concurrences N° 3-2020 I Pratiques I Rafael Amaro, Bastien Thomas I Le contentieux de la réparation des pratiques anticoncurrentielles (déc. 2019-mai 2020)                               213
8. Le 27 mars 2020, le Conseil d’État s’est prononcé                                               aurait nécessairement été informé de la fin de l’entente

                                                                                                                                                                                                                 constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection.
      dans trois arrêts20 sur des actions en responsabilité intro-                                       par la chute des prix constatée lors de la passation du

                                                                                                                                                                                                                 Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art.
                                                                                                                                                                                                                 L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document
      duites par les départements de l’Orne et de la Manche21.                                           marché en 2009. Elles soutenaient également que le
      En substance, le Conseil d’État confirme l’analyse du tri-                                         département avait eu connaissance des pratiques avant la
      bunal administratif de Caen et de la cour administrative                                           décision, car il avait été interrogé dans le cadre de l’ins-
      d’appel de Nantes, qui avaient condamné :                                                          truction par les services de l’Autorité de la concurrence.
                                                                                                         Dans ces conditions, le délai de prescription de cinq ans
         – la société Signalisation France à verser au dépar-                                           aurait commencé à courir à compter du lendemain de la
           tement de la Manche la somme de 2 235 742 euros                                               publication de la loi du 17 juin 2008 qui avait réduit le
           assortie des intérêts légaux à compter de la date                                             délai de prescription à cinq ans, soit le 20 juin 2008, de
           d’introduction de la requête des frais d’expertise22 ;                                        sorte que le délai d’action du département de la Manche
                                                                                                         avait expiré le 20 juin 2013.
         –
          la société Signaux Girod Nord-Ouest à verser
          au département de la Manche la somme de
                                                                                                         12. Les juridictions administratives successivement saisies
          1 070 388 euros assortie des intérêts légaux et des
                                                                                                         de ce recours avaient adopté une approche in concreto
          frais d’expertise23 ;
                                                                                                         de l’article 2224 du code civil26. Dans deux jugements
         –
          les sociétés Signalisation France, Lacroix                                                     du 6 avril 201727, le tribunal administratif de Caen avait
          Signalisation, Signaux Girod et Franche-Comté                                                  totalement rejeté ces arguments. Il avait considéré que
          Signaux à verser au département de l’Orne la                                                   les articles de presse présentaient un caractère général
          somme de 2 239 819 euros assortie des intérêts                                                 qui n’avait pas permis au département de la Manche de
          légaux et des frais d’expertise24.                                                             connaître les manœuvres dolosives mises en œuvre par
                                                                                                         ses cocontractants ni leur ampleur. De plus, il n’était pas
      9. Les arrêts du Conseil d’État contiennent des déve-                                              établi que le département de la Manche avait été spécifi-
      loppements intéressants à plusieurs égards. En particu-                                            quement consulté dans le cadre de l’instruction, les ser-
      lier, l’arrêt Département de la Manche25 se prononce sur                                           vices d’instruction ayant consulté certains départements
      le point de départ de la prescription dans le cas où les                                           de manière aléatoire pour recueillir des données sur les
      demandeurs ont participé à l’instruction de l’Autorité de                                          attributaires des marchés passés pendant la période du
      la concurrence.                                                                                    cartel. En toute hypothèse, le tribunal administratif avait
                                                                                                         estimé qu’une telle consultation n’était pas de nature à
      10. Jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008,                                         permettre au département de la Manche d’identifier les
      les actions fondées sur la responsabilité quasi délictuelle                                        manœuvres dolosives dont il avait été victime. Enfin, la
      des auteurs de pratiques anticoncurrentielles se prescri-                                          baisse des prix intervenue en 2006, que le département de
      vaient en effet par dix ans à compter de la manifesta-                                             la Manche avait pu constater à l’occasion de la passation
      tion du dommage. Depuis l’entrée en vigueur de la loi,                                             du marché en 2009, n’était pas par elle-même susceptible
      la prescription de ces actions est de cinq ans à compter                                           de révéler les faits permettant au département d’exercer
      du jour où la victime a connu ou aurait dû connaître des                                           son action contre les membres du cartel.
      faits lui permettant d’exercer une action en responsabilité
      (article 2224 du code civil).                                                                      13. Ce raisonnement avait été confirmé par la cour
                                                                                                         administrative d’appel de Nantes dans deux arrêts du
      11. La question débattue était la connaissance des faits                                           16 mars 201828. Il est également validé par le Conseil
      par le département de la Manche avant la décision                                                  d’État, qui considère que le département de la Manche
      de l’Autorité de la concurrence du 22 décembre 2010.                                               n’avait pas eu connaissance “de manière suffisamment cer-
      Devant le tribunal administratif de Caen, les sociétés                                             taine” de l’étendue de l’entente dont il avait été victime
      Signalisation France et Société Signaux Girod Nord-                                                avant le 22 décembre 201029.
      Ouest avaient soutenu que l’action du département de
      la Manche, introduite le 16 février 2015, était prescrite                                          14. Cet arrêt confirme encore une fois la tendance des
      dans la mesure où le département avait eu connaissance                                             juridictions tant administratives30 que judiciaires31 à
      des pratiques en cause dès 2006 en raison d’articles parus                                         retenir comme point de départ du délai de prescription
      dans la presse. De plus, la chute des prix après la fin des                                        les décisions au fond32, nonobstant la participation de la
      pratiques aurait “révélé” l’entente et le département

                                                                                                         26 Qui pour mémoire dispose que “les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq
      20 CE, ch. 7-2, 27 mars 2020, req. 421833, 421758 et 420491.                                          ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui per-
                                                                                                            mettant de l’exercer”.
      21 Le département de l’Orne avait introduit une requête devant le tribunal administra-
         tif de Caen le 29 janvier 2015 à l’encontre de Signalisation France, Signaux Girod,             27 TA Caen, 6 avril 2017, no 1500353 et 1500352.
         Nadia Signalisation, Lacroix Signalisation et Franche-Comté Signaux. Le département
         de la Manche avait introduit deux requêtes devant le tribunal administratif de Caen le          28 CAA Nantes, 16 mars 2018, no 17NT01526 et 17NT01722.
         16 février 2015, l’une à l’encontre de la société Signaux Girod Nord-Ouest et l’autre à l’en-
         contre de la société Signalisation France.                                                      29 CE, ch. 2-7, ch. 7-2, 27 mars 2020, req. 420491. préc. note 26.

      22 TA Caen, 6 avril 2017, no 1500353 et CAA Nantes, 16 mars 2018, no 17NT01526.                    30 V. not. CE, ch. 2-7, 22 nov. 2019, SNCF Mobilités, req. 418645.

      23 TA Caen, 6 avril 2017, no 1500352 et CAA Nantes, 16 mars 2018, no 17NT01722.                    31 V. not. CA Paris, ch. 5-4, 6 mars 2019, SARL Arkeos et al. c/ SA EDF, RG 17/21261,
                                                                                                            Concurrences no 3-2019, p. 230, note R. Amaro et T. com. Paris, 1re ch., 1er oct. 2019,
      24 TA Caen, 6 avril 2017, no 1500227 et CAA Nantes, 27 avril 2018, no 17NT01719.                      CNAMTS c/ Sanofi, RG 2017053369, Concurrences no 1-2020, p. 220, note B. Thomas.

      25 CE, ch. 2-7, ch. 7-2, 27 mars 2020, req. 420491.                                                32 Concurrences no 1-2020, p. 222, note B. Thomas.

214   Concurrences N° 3-2020 I Pratiques I Rafael Amaro, Bastien Thomas I Le contentieux de la réparation des pratiques anticoncurrentielles (déc. 2019-mai 2020)
victime à l’instruction de l’Autorité de la concurrence,                                     obtenir paiement de sa créance. Le tribunal administratif

                                                                                                                                                                                                 constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection.
 comme l’avait d’ailleurs souligné le rapporteur public                                       de Caen comme la cour administrative d’appel de Nantes

                                                                                                                                                                                                 Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art.
                                                                                                                                                                                                 L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document
 dans ses conclusions prononcées sous l’arrêt commenté                                        avaient rejeté ce moyen.
 le 11 mars 2020.
                                                                                              18. Le Conseil d’État juge, dans deux des trois arrêts pro-
 15. On relèvera toutefois que, contrairement aux juri-                                       noncés le 27 mars 202036, que “si une personne publique
 dictions judiciaires qui dans les derniers arrêts commen-                                    est, en principe, irrecevable à demander au juge administra-
 tés avaient au moins dégagé une méthode d’analyse du                                         tif de prononcer une mesure qu’elle a le pouvoir de prendre,
 point de départ de la prescription fondée sur “la consis-                                    la faculté d’émettre un titre exécutoire dont elle dispose
 tance de [l’infraction], son imputabilité et sa durée”33 ou                                  ne fait pas obstacle, lorsque la créance trouve son origine
 encore sur la connaissance “des éléments de responsabi-                                      dans un contrat, à ce qu’elle saisisse le juge d’administratif
 lité civile lui permettant d’agir[,] à savoir l’existence du                                 d’une demande tendant à son recouvrement”. Et de pour-
 dommage, le fait générateur, le lien de causalité et l’iden-                                 suivre : “L’action tendant à l’engagement de la responsabi-
 tité de l’auteur”34, le Conseil d’État ne semble pas dégager                                 lité quasi délictuelle d’une société en raison d’agissements
 de principe d’analyse clair, exigeant uniquement que la                                      dolosifs susceptibles d’avoir conduit une personne publique
 connaissance des pratiques soit “suffisamment certaine”.                                     à contracter avec elle à des conditions de prix désavanta-
 Il n’en demeure pas moins que tant le juge judiciaire que                                    geuses, qui tend à la réparation d’un préjudice né du contrat
 le juge administratif prennent soin de mener une analyse                                     lui-même et résultant de la différence éventuelle entre les
 précise, au cas par cas, des circonstances spécifiques dans                                  termes du marché effectivement conclu et ceux auxquels il
 lesquelles une victime a pris connaissance des pratiques.                                    aurait dû l’être dans des conditions normales de concur-
                                                                                              rence, doit être regardée, pour l’application de ces prin-
                                                                                B. T. n       cipes, comme trouvant son origine dans le contrat.”

 II. Compétence interne                                                                       19. Le Conseil d’État réaffirme donc ici la solu-
                                                                                              tion dégagée dans l’arrêt Département de l’Eure du
                                                                                              24 février 201637 (déjà relatif à une action en réparation
 et internationale /                                                                          introduite à la suite de la décision no 10-D-39 de l’Auto-
                                                                                              rité de la concurrence), selon laquelle, lorsque la créance

“pouvoir juridictionnel”                                                                      trouve son origine dans un contrat, la faculté d’émettre
                                                                                              un titre exécutoire dont dispose une personne publique
                                                                                              ne fait pas obstacle à ce que celle-ci saisisse le juge admi-
                                                                                              nistratif d’une demande tendant à son recouvrement.
 1. Compétence du juge
 administratif (arrêts du                                                                     20. Cette solution est conforme à la solution dégagée par
                                                                                              le tribunal des conflits dans sa décision Région Île-de-
 Conseil d’État dans l’affaire                                                                France du 16 novembre 2015, qui avait reconnu la com-
 de la signalisation routière)                                                                pétence du juge administratif pour connaître de tous les
                                                                                              litiges, même non contractuels, nés à l’occasion de la pas-
 16. L’affaire de la signalisation routière verticale est                                     sation ou de l’exécution d’un marché public38. Cette solu-
 également l’occasion pour le Conseil d’État de confir-                                       tion avait également été reprise par la cour administra-
 mer la compétence du juge administratif pour connaître                                       tive d’appel de Paris dans son arrêt SNCF Mobilités du
 des actions en réparation introduites par les personnes                                      13 juin 201939.
 publiques, que la responsabilité recherchée soit celle de
 son cocontractant ou de tiers parties à l’entente.                                           21. Dans deux arrêts du 27 mars 202040, le Conseil
                                                                                              d’État était également amené à se prononcer sur l’ac-
 17. En l’espèce, les défendeurs avaient soutenu que l’ac-                                    tion introduite par le département de l’Orne à l’en-
 tion des départements de l’Orne et de la Manche était                                        contre de la société Signaux Girod, d’une part, et de la
 irrecevable au motif qu’une collectivité publique ne peut                                    société Lacroix Signalisation, d’autre part. La particula-
 demander au juge administratif, depuis l’arrêt Préfet de                                     rité de ces actions résidait dans le fait que ces deux socié-
 l’Eure du 30 mai 191335, de prononcer une mesure qu’elle                                     tés n’étaient pas des cocontractants du département de
 a le pouvoir de prendre, comme un titre exécutoire à l’en-                                   l’Orne. Ce dernier avait conclu avec Signalisation France
 contre de ses débiteurs tenant au recouvrement d’une                                         trois marchés à bons de commande en vue de l’acquisi-
 créance. Il s’agit là d’un moyen récurrent tendant à faire                                   tion de panneaux de signalisation routière et d’équipe-
 déclarer le département irrecevable faute d’avoir, préala-                                   ments annexes. La société Signaux Girod et la société
 blement à la saisine du juge, émis un titre exécutoire pour

                                                                                              36 CE, , ch. 7-2, 27 mars 2020, req. 421758 et 420491.

                                                                                              37 Cf. not. CE, ch. 7-2, 24 févr. 2016, req. 395194.
 33 CA Paris, ch. 5-4, 6 mars 2019, SARL Arkeos et al. c/ SA EDF, RG 17/21261, Concurrences
    no 3-2019, p. 230, note R. Amaro. préc. note 32.                                          38 T. conf., 16 nov. 2015, Région Île-de-France c/ M. N. et autres, no 4035 ; Concurrences
                                                                                                 no 1-2016, p. 251, note R. Amaro.
 34 T. com. Paris, 1re ch., 1er oct. 2019, CNAMTS c/ Sanofi, RG 2017053369, Concurrences no
    1-2020, p. 220, note B. Thomas.                                                           39 CAA Paris, 4e ch., 13 juin 2019, SNCF Mobilités, req. 14PA02419.

 35 CE, 30 mai 1913, Préfet de l’Eure, Rec. CE 1913, p. 583.                                  40 CE, ch. 7-2, 27 mars 2020, req. 421833 et 421758.

                Concurrences N° 3-2020 I Pratiques I Rafael Amaro, Bastien Thomas I Le contentieux de la réparation des pratiques anticoncurrentielles (déc. 2019-mai 2020)                215
Lacroix Signalisation avaient chacune présenté une                                          même qu’elles n’avaient présenté qu’une offre en 2002 et

                                                                                                                                                                                          constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection.
      offre (non retenue) pour le marché passé en 2002 mais                                       aucune en 1999 et 2005. Le Conseil d’État confirme ainsi

                                                                                                                                                                                          Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art.
                                                                                                                                                                                          L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document
      n’avaient pas soumissionné aux marchés de 1999 et 2005.                                     la recevabilité des recours formés à l’encontre des tiers
                                                                                                  aux contrats dès lors que l’implication de ces entreprises
      22. Devant le tribunal administratif de Caen41, la société                                  dans le cartel a affecté la procédure de passation.
      Signaux Girod avait soutenu qu’elle devait être mise hors
      de cause au motif que seul un cocontractant peut se voir                                                                                                                  B. T. n
      imputer des manœuvres dolosives. Le tribunal avait tou-
      tefois jugé que si le préjudice dont se prévalait le dépar-
      tement de l’Orne était bien né à l’occasion de la passa-
      tion de trois marchés, la cause de ce préjudice était l’or-
                                                                                                  2. Compétence internationale
      ganisation d’une entente d’une ampleur nationale qui a                                      du juge français (affaires
      faussé l’ensemble des marchés du même type en France.
      Le département de l’Orne était donc bien fondé à recher-                                    Google Shopping et Enigma)
      cher non seulement la responsabilité des entreprises qui
                                                                                                  27. Dans un arrêt du 7 janvier 202043, Google c/ LeGuide,
      avaient contracté avec lui mais aussi celle des entreprises
                                                                                                  la cour d’appel de Paris était saisie de la question de la
      qui avaient participé à cette entente et dont le compor-
                                                                                                  compétence du juge français dans l’une des premières
      tement avait concouru à la réalisation du préjudice subi.
                                                                                                  affaires concernant l’indemnisation du dommage allégué
      Le tribunal administratif de Caen avait donc condamné
                                                                                                  par un concurrent de Google à la suite de la décision de
      les sociétés Signalisation France, Lacroix Signalisation,
                                                                                                  la Commission européenne (la “Commission”) dans l’af-
      Signaux Girod et Franche-Comté Signaux à réparer le
                                                                                                  faire Google Shopping44.
      préjudice du département de l’Orne.
                                                                                                  28. La société LeGuide soutenait que l’abus de position
      23. La société Signaux Girod et la société Lacroix
                                                                                                  dominante de Google sur le marché des moteurs de com-
      Signalisation s’étaient chacune pourvues en cassation
                                                                                                  paraison de prix (“MCP”) avait causé un dommage à son
      contre l’arrêt du 27 avril 2018 par lequel la cour admi-
                                                                                                  service de comparaison de prix sur Internet. LeGuide
      nistrative d’appel de Nantes avait rejeté leur appel contre
                                                                                                  reprochait également à Google d’avoir abusé de sa posi-
      ce jugement.
                                                                                                  tion dominante sur le marché de la publicité liée aux
                                                                                                  recherches en ligne en l’empêchant d’accéder à des sites
      24. Les deux arrêts rendus le 27 mars 2020 sont l’occa-
                                                                                                  d’éditeurs pour placer ses publicités.
      sion pour le Conseil d’État de préciser que “lorsqu’une
      personne publique est victime, à l’occasion de la passation
                                                                                                  29. LeGuide a ainsi assigné les sociétés Alphabet Inc.,
      d’un marché public, de pratiques anticoncurrentielles, il lui
                                                                                                  Google LLC, Google Ireland (société de droit irlandais
      est loisible de mettre en cause la responsabilité quasi-dé-
                                                                                                  qui permet aux annonceurs de placer leurs annonces en
      lictuelle non seulement de l’entreprise avec laquelle elle
                                                                                                  France via un programme AdWords) et la SARL Google
      a contracté, mais aussi des entreprises dont l’implication
                                                                                                  France (ensemble “Google”) devant le tribunal de com-
      dans de telles pratiques a affecté la procédure de passation
                                                                                                  merce de Paris, en vue d’obtenir réparation du préjudice
      de ce marché, et de demander au juge administratif leur
                                                                                                  allégué.
      condamnation solidaire”.
                                                                                                  30. Par un jugement du 27 juin 2019, le tribunal de com-
      25. Cette solution étend ainsi considérablement les excep-
                                                                                                  merce de Paris s’était déclaré compétent pour statuer sur
      tions à la jurisprudence Préfet de l’Eure en permettant aux
                                                                                                  les demandes de la société LeGuide relatives aux sites
      plaignants de saisir directement le juge administratif pour
                                                                                                  Internet que celle-ci exploite depuis le territoire français,
      obtenir la réparation des dommages subis du fait de pra-
                                                                                                  que ces sites soient destinés au public français ou à des
      tiques mises en œuvre par des tiers, sans devoir au préa-
                                                                                                  publics européens. Google avait interjeté appel de ce juge-
      lable émettre un titre de recouvrement. Elle semble logique
                                                                                                  ment et contestait la compétence du juge français.
      dès lors que le tribunal des conflits avait déjà reconnu la
      compétence du juge administratif pour connaître de tous
                                                                                                  31. En premier lieu, Google soutenait que la mise en
      les litiges, même non contractuels, nés à l’occasion de la
                                                                                                  cause de la société Google France, qui n’avait pas été
      passation ou de l’exécution d’un marché public42.
                                                                                                  visée ni dans la décision de la Commission, ni même dans
                                                                                                  le cadre de son enquête, avait pour seule fin de créer artifi-
      26. Le Conseil d’État rejette ainsi les deux pourvois en
                                                                                                  ciellement un chef de compétence au profit du tribunal de
      considérant ,d’une part, que le comportement fautif de la
                                                                                                  commerce de Paris pour connaître des demandes indem-
      société Signaux Girod et de la société Lacroix Signalisation
                                                                                                  nitaires relatives à de prétendus préjudices subis hors de
      était en lien direct avec le surcoût supporté par le dépar-
                                                                                                  France.
      tement de l’Orne lors de l’exécution des marchés à bons
      de commande passés en 1999, 2002 et 2005 et, d’autre
      part, que leur responsabilité solidaire était engagée, alors

      41 TA Caen, 6 avril 2017, no 1500227.
                                                                                                  43 CA Paris, ch. com. inter., 7 janv. 2020, Google c/ LeGuide, RG 19/12553.
      42 T. conf. 16 nov. 2015, Région Île-de-France c/ M. N. et autres, no 4035 ; Concurrences
         no 1-2016, p. 251, note R. Amaro. préc. note 48.                                         44 Comm. eur., 27 juin 2017, Google Search (Shopping), aff. AT.39740.

216   Concurrences N° 3-2020 I Pratiques I Rafael Amaro, Bastien Thomas I Le contentieux de la réparation des pratiques anticoncurrentielles (déc. 2019-mai 2020)
32. En deuxième lieu, Google soutenait que les préjudices                                 sur ces MCP, et donc la perte de marge en résultant, à

                                                                                                                                                                                               constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection.
résultant de la perte de trafic et de redirection de clients vers                         la suite de pratiques constitutives d’un abus de position

                                                                                                                                                                                               Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art.
                                                                                                                                                                                               L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document
les sites Internet de LeGuide adressés à un public étranger                               dominante, peuvent constituer le dommage initial justi-
ne se manifestaient pas en France, mais dans d’autres États                               fiant la compétence des juridictions de l’État membre où
membres. Selon Google, lorsque le dommage est subi dans                                   elles ont été subies.
plusieurs États membres et que le demandeur choisit de
saisir le tribunal du lieu où le dommage se manifeste plutôt                              37. Selon la cour d’appel, au regard de ces éléments du
que celui du lieu du fait dommageable, conformément à                                     dommage soulevés par LeGuide, le dommage subi par
l’option ouverte par l’article 46 du code de procédure                                    cette dernière ne constitue pas une simple conséquence
civile et par l’article 7(2) du règlement (UE) no 1215/2012                               financière du dommage – étant précisé que les sites mar-
du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire,                                  chands référencés sur les MCP que LeGuide exploite,
la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière                                 quant à eux, auraient pu subir un tel préjudice financier –
civile et commerciale (le “règlement Bruxelles I bis”), la                                mais “est bien la conséquence immédiate des pratiques anti-
juridiction saisie n’est compétente que pour connaître des                                concurrentielles alléguées et constitue en conséquence un
dommages subis dans cet État.                                                             dommage direct permettant de fonder la compétence de la
                                                                                          juridiction dans le ressort de laquelle il s’est matérialisé”47.
33. Enfin, Google soutenait qu’en matière de dommages
subis sur Internet, la compétence territoriale ne devait                                  38. Au regard de la citation que la cour d’appel fait des
pas être déterminée en fonction du lieu du siège social de                                conclusions de l’avocat général Bobek dans l’affaire
la société détenant les droits sur ce site, mais en fonction                              flyLAL, selon lesquelles “la restriction de concurrence a
du territoire auquel le site Internet est destiné, et que, dès                            par nature un effet d’exclusion (perte de ventes et margi-
lors que le préjudice allégué consistait en une perte de                                  nalisation sur le marché)”48, on comprend que la perte de
trafic sur les marchés auxquels ce site est destiné, ce sont                              trafic sur les MCP qui se traduit par la perte de contrats
les juridictions de ces marchés qui ont compétence pour                                   avec les sites marchands partenaires puisse apparaître
connaître des demandes s’y rapportant.                                                    comme l’effet direct des pratiques abusives de Google, sur
                                                                                          le marché des services de comparaison de prix en favo-
34. La décision du 7 janvier 2020 est l’occasion pour la                                  risant son propre service dans les pages de résultats de
cour d’appel de Paris d’appliquer la jurisprudence de la                                  recherche générale, et sur le marché de la publicité liée
CJUE en ce qui concerne la localisation du lieu de maté-                                  aux recherches en ligne en empêchant LeGuide d’accéder
rialisation du dommage en cas de préjudice subi du fait                                   à des sites d’éditeurs pour placer ses propres publicités.
de pratiques anticoncurrentielles.
                                                                                          39. S’agissant du lieu de matérialisation du dommage, la
35. Au terme d’une analyse assez pédagogique, la cour                                     cour d’appel se réfère là encore à la jurisprudence de la
d’appel, citant en particulier les arrêts flyLAL45 et Tibor-                              CJUE. Après avoir rappelé que le lieu de matérialisation
Trans46, identifie les préjudices de la société LeGuide                                   du dommage est le lieu du ou des marchés affectés par les
pouvant être qualifiés de “dommage” aux fins de l’appli-                                  actes anticoncurrentiels, où la victime prétend avoir subi
cation de l’article 7(2) du règlement Bruxelles I bis, per-                               un préjudice initial, la cour d’appel indique que selon la
mettant de fonder, en principe, la compétence des juri-                                   jurisprudence flyLAL, relative notamment à des pratiques
dictions de l’État membre sur le territoire duquel le fait                                constitutives d’un abus de position dominante, lorsque
dommageable s’est produit, avant de se prononcer sur le                                   le marché affecté par le comportement anticoncurrentiel
lieu de matérialisation de ce dommage.                                                    se trouve dans l’État membre sur le territoire duquel le
                                                                                          dommage allégué est prétendument survenu, il y a lieu de
36. Le premier intérêt de cet arrêt consiste ainsi dans                                   considérer que le lieu de la matérialisation du dommage se
l’identification d’un type de dommage qu’un concurrent                                    trouve dans cet État membre49. La cour d’appel souligne
affecté par la restriction de concurrence constatée dans le                               encore, en citant de nouveau la CJUE, que cette solution
cadre de l’affaire Google Shopping est susceptible d’invo-                                répond aux objectifs de proximité et de prévisibilité des
quer aux fins de détermination de la compétence interna-                                  règles de compétence et est conforme aux exigences de
tionale. Après avoir rappelé la jurisprudence européenne                                  cohérence prévues par les règles relatives à la détermina-
établissant une distinction entre le préjudice financier                                  tion de la loi applicable. La cour d’appel se réfère égale-
consécutif à un dommage et le dommage initial à l’in-                                     ment à l’arrêt Tibor-Trans rendu en matière d’entente,
térêt protégé par le demandeur, seul pris en compte aux                                   dans lequel la CJUE a jugé que le dommage allégué se
fins de détermination du “lieu où le fait dommageable s’est                               matérialise au lieu du marché affecté par l’infraction visée,
produit”, la cour d’appel, citant à ce titre l’arrêt flyLAL                               à savoir le lieu où les prix du marché ont été faussés, au
précité et les conclusions de l’avocat général Bobek,                                     sein duquel la victime prétend avoir subi ce préjudice50.
constate que la perte de trafic sur des MCP en raison d’un
défaut de visibilité dans les résultats de recherche google.
fr concernant les utilisateurs français, qui se traduit par
la perte de contrats avec les sites marchands référencés                                  47 Pt 51 de la décision.

                                                                                          48 Conclusions de l’avocat général Michal Bobek présentées le 28 février 2018 dans l’affaire
                                                                                             flyLAL, préc., pt 76.

45 CJUE, 5 juill. 2018, flyLAL, aff. C-27/17.                                             49 CJUE, arrêt flyLAL, préc., pt 40.

46 CJUE, 29 juill. 2019, Tibor-Trans, aff. C-451/18. V. not. Concurrences no 1-2020,      50 CJUE, arrêt Tibor-Trans, préc., pt 37. V. not. Concurrences no 1-2020, pp. 218-232, note
   pp. 218-232, note R. Amaro.                                                               R. Amaro.

                Concurrences N° 3-2020 I Pratiques I Rafael Amaro, Bastien Thomas I Le contentieux de la réparation des pratiques anticoncurrentielles (déc. 2019-mai 2020)              217
40. La cour d’appel déduit de la jurisprudence de la                                    46. Par un jugement du 19 septembre 201952, le tribunal de

                                                                                                                                                                                    constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection.
      CJUE qu’en l’espèce, le marché affecté par l’abus de posi-                              commerce de Paris avait notamment rejeté les exceptions

                                                                                                                                                                                    Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art.
                                                                                                                                                                                    L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document
      tion dominante allégué engendrant une perte de trafic                                   d’incompétence et de litispendance soulevées in limine litis
      sur les MCP exploités par LeGuide doit être considéré                                   par les sociétés Z USA et Z Irlande au profit des juridic-
      comme celui de l’État membre dans lequel cette société                                  tions américaines. Les sociétés Z USA et Z Irlande avaient
      développe et exploite ses sites Internet de comparaison de                              donc interjeté appel de cette décision et demandé à la cour
      prix et enregistre le trafic sur ces sites, et non les marchés                          d’appel de Paris de déclarer le tribunal de commerce de
      des États membres auxquels les sites sont destinés.                                     Paris incompétent et, à titre subsidiaire, en cas de rejet de
                                                                                              l’exception d’incompétence, et eu égard à la litispendance,
      41. Dans chacune des affaires flyLAL et Tibor-Trans, il y                               de dessaisir le tribunal de commerce de Paris au profit du
      a avait, dans une certaine mesure, une identité entre l’État                            tribunal américain, et en tout état de cause de déclarer irre-
      membre dont la juridiction était saisie et le marché affecté                            cevable l’intervention volontaire d’EnigmaSoft.
      par les pratiques anticoncurrentielles alléguées. Une telle
      situation se retrouve dans la présente affaire, puisque la                              47. S’agissant de la compétence internationale du tri-
      société LeGuide a saisi les juridictions françaises, c’est-                             bunal de commerce de Paris, la cour d’appel centre son
      à-dire les juridictions concernées par au moins un des                                  analyse sur la détermination du lieu de matérialisation du
      marchés affectés par les pratiques anticoncurrentielles                                 dommage aux fins d’application de l’article 46 du code de
      alléguées, sur lequel elle détient une part de marché des                               procédure civile à la société américaine Z USA et de l’ar-
      comparateurs de prix d’environ 20 %. Dans cette perspec-                                ticle 7(2) du règlement Bruxelles I bis à Z Irlande. La cour
      tive, la cour d’appel reprend les conclusions de la CJUE                                d’appel rappelle à ce titre les arrêts de la Cour de justice
      dans l’arrêt flyLAL, et considère que le marché affecté est                             Concurrence53, flyLAL54 et Tibor-Trans55. Elle précise
      celui sur lequel la société LeGuide développe, exploite les                             notamment que, selon la jurisprudence flyLAL, lorsque
      MCP et enregistre le trafic de ses sites.                                               le marché affecté par le comportement anticoncurrentiel
                                                                                              se trouve dans l’État membre sur le territoire duquel le
      42. Toutefois, la cour d’appel n’indique pas, comme l’avait                             dommage allégué est prétendument survenu, il y a lieu
      fait la CJUE dans l’affaire flyLAL, que sa décision se jus-                             de considérer que le lieu de matérialisation du dommage
      tifie par le fait que la France, pour les raisons précitées,                            se trouve dans cet État membre56. En l’espèce, la cour
      est le “marché essentiellement affecté”. Cette précision                                d’appel relève que les faits en cause concernaient l’inter-
      ne nous semble pas être un détail. En effet, Google ne                                  férence du logiciel Z avec les logiciels des sociétés Enigma
      contestait pas que le marché français puisse faire partie                               pour les utilisateurs français, et qu’il n’est pas contesté
      des marchés affectés ; en revanche, elle soutenait qu’il                                que les demandes formulées par ces sociétés étaient limi-
      ne s’agissait pas du seul marché affecté par les pratiques                              tées à la réparation du préjudice subi en France et aux
      alléguées par LeGuide, et que la compétence des juges                                   mesures adéquates de réparation et de prévention de
      des autres marchés affectés devrait être établie concer-                                tout nouveau dommage sur ce territoire uniquement.
      nant les préjudices que LeGuide invoque les concernant.                                 Par conséquent, la cour d’appel conclut que s’il est exact
                                                                                              que la révision du logiciel Z conçu à Santa Clara (États-
      43. L’arrêt de la cour d’appel de Paris du 14 janvier 202051,                           Unis) constitue l’un des faits générateurs localisés aux
      dans l’affaire Enigma présente également des développe-                                 États-Unis ayant contribué au dommage allégué par les
      ments intéressants sur la compétence, même si elle ne                                   sociétés Enigma, le dommage que ces sociétés ont subi se
      porte pas sur des pratiques anticoncurrentielles.                                       caractérise par la perte subie sur le marché français du
                                                                                              fait de la commercialisation en France du logiciel Z, ce
      44. La société Enigma Software Group USA LLC                                            qui autorise les sociétés Enigma à choisir la juridiction
      (“Enigma”) avait assigné, sur le fondement de l’ar-                                     française, en tant que juridiction du lieu de la matériali-
      ticle 1240 du code civil, la société Z USA et sa filiale irlan-                         sation du dommage, au regard de l’article 46 du code de
      daise Z Irlande devant le tribunal de commerce de Paris,                                procédure civile et de l’article 7(2) du règlement Bruxelles
      afin d’obtenir réparation du préjudice qu’elle aurait subi                              I bis. Par conséquent, la cour d’appel confirme le juge-
      du fait d’un logiciel de la société Z USA qui faisait appa-                             ment rendu par le tribunal de commerce de Paris dans
      raître deux de ses propres logiciels comme potentielle-                                 toutes ses dispositions.
      ment indésirables et incitant l’utilisateur à les supprimer
      ou à ne pas les télécharger.                                                            48. L’affaire Enigma est intéressante en ce que la cour
                                                                                              d’appel semble aligner la question de la détermination du
      45. La société de droit irlandais EnigmaSoft, filiale                                   lieu de la matérialisation du dommage, aux fins de l’éta-
      d’Enigma, était intervenue volontairement à l’instance                                  blissement de la compétence internationale du juge fran-
      pour obtenir la réparation du préjudice qu’elle estimait                                çais, sur la jurisprudence de la CJUE en matière d’actions
      subir du fait des mêmes agissements, concernant un
      nouveau logiciel lancé sur le marché en juin 2018.
                                                                                              52 T. com. Paris, 19 sept. 2019, RG 18/04526.

                                                                                              53 CJUE, 21 déc. 2016, Concurrence SARL, aff. C-618/15.

                                                                                              54 CJUE, 5 juill. 2018, flyLAL, aff. C-27/17. préc.

                                                                                              55 CJUE, 5 juill. 2018, Tibor-Trans, aff. C-451/18. V. not. Concurrences no 1-2020,
                                                                                                 pp. 218-232, note R. Amaro. préc.

      51 CA Paris, ch. com. inter., 14 janv. 2020, Enigma, RG 19/18332.                       56 CJUE, arrêt flyLAL, préc., pt 40.

218   Concurrences N° 3-2020 I Pratiques I Rafael Amaro, Bastien Thomas I Le contentieux de la réparation des pratiques anticoncurrentielles (déc. 2019-mai 2020)
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