Le Pool, une crise humanitaire négligée
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NATIONS UNIES UNITED NATIONS Bureau des Nations Unies Office for the Coordination pour la Coordination des of Humanitarian Affairs Affaires Humanitaires Brazzaville, Republic of Congo Brazzaville, République du Congo Le Pool, une crise humanitaire négligée Rapport d’évaluation humanitaire conjointe dans la région du Pool, République du Congo
Couvertures et photographies : © OCHA, Republique du Congo 2004 OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 2
TABLE DES MATIERES OBJECTIFS GLOBAUX 5 METHODOLOGIE 5 ROLE ET INTERVENTION D’OCHA 5 LOCALITES VISITES DANS LE CADRE DU TRAVAIL D’EVALUATION 6 CONTEXTE GENERAL 7 CONTEXTE REGIONAL 7 SITUATION HUMANITAIRE DU POOL PAR SECTEUR 9 POPULATIONS 9 Kinkala 9 Mindouli 10 Kindamba et Mayama 10 ACCÈS 10 Kinkala 11 Mindouli 11 Kindamba et Mayama 12 SÉCURITÉ 12 Kinkala 12 Mindouli 13 Kindamba et Mayama 13 SANTE ET NUTRITION 13 Kinkala 15 Mindouli 15 Kindamba et Mayama 15 EDUCATION, ENFANCE ET PROTECTION 16 Kinkala 17 Mindouli 17 Kindamba et Mayama 18 VIVRES ET SÉCURITÉ ALIMENTAIRE 19 Kinkala 19 Mindouli 20 Kindamba et Mayama 20 ABRIS ET NON-VIVRES 21 Kinkala 22 Mindouli 22 Kindamba et Mayama 22 EAU ET ASSAINISSEMENT 22 Kinkala 23 Mindouli 23 Kindamba et Mayama 23 CONCLUSIONS ET CONSÉQUENCES HUMANITAIRES 23 RECOMMANDATIONS 25 ANNEXES 28 ANNEXE I – TABLEAUX 29 ANNEXE II – CARTES 35 ANNEXES III – SOMMAIRE DES RENCONTRES ET VISITES EFFECTUEES 39 OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 3
Objectifs globaux Au cours de l’année 2004, des missions conjointes ont été conduites par le Bureau des Nations Unies pour la Coordination des Affaires Humanitaires (OCHA) et ses partenaires humanitaires. Les objectifs de ces missions étaient de permettre une évaluation de la situation humanitaire de la région du Pool, une région au sud de la capitale de la République du Congo (Voir Annexe I, carte 1.1), en vue d’apporter une réponse coordonnée et efficace aux besoins humanitaires de la population. Pour faire ce travail, les évaluations ont pris en ligne de compte les aspects liés à l’accès, la sécurité et la protection, la santé, la nutrition, l’éducation, l’agriculture et la sécurité alimentaire, les abris et l’assainissement, ainsi que la réhabilitation psychosociale. L’évolution démographique des zones affectées par le conflit a également été étudiée. L’état des infrastructures existantes a été constaté, et les consultations avec les partenaires humanitaires actifs dans le Département (Voir Annexe I, carte 1.2) ont permis d’obtenir une vision assez juste de la situation sur place. Les données fournies par l’ensemble des missions conjointes d’évaluation permettent la présentation d’un ensemble de recommandations touchant les divers secteurs étudiés. Ces recommandations permettent également l’exploration de possibilités d’initiation de programmes ou projets dans le Pool par les agences onusiennes. Elles offrent également une orientation supplémentaire aux divers partenaires humanitaires non gouvernementaux dans la planification et la poursuite de leurs activités sur le terrain. En bref, ce rapport se veut à la fois une synthèse de la situation vécue par les habitants du Pool, et un plaidoyer pour les actions humanitaires qui doivent être menées dans la région, dans l’objectif d’appuyer les populations dans leurs efforts de retour à une vie normale. Méthodologie de travail La méthodologie de travail choisie est la suivante : des visites sur le terrain permettant la collecte de données, basées sur différentes méthodologies soit par des rencontres avec les partenaires actifs dans les zones, des rencontres avec les services dans les sous-préfectures, des statistiques tirées au niveau des différents services régionaux et de districts, ainsi que des interviews avec des bénéficiaires, constitués de ménages choisi de façon aléatoire. Cinq districts du Pool ont été sélectionnés sur les neuf, de façon à obtenir un échantillon de référence valable. Il est important de noter que l’ensemble du travail effectué au cours des missions d’évaluation ne correspond pas à un travail à caractère scientifique mais se veut plutôt comme un outil de décision rapide, sous la forme d’enquêtes simples et de compilations de données. En conséquence, ce travail comporte certains risques et limites dont l’équipe est consciente. Rôle et intervention d’OCHA C’est dans une situation de crise humanitaire aiguë que OCHA a affecté en mars 2004 un Conseiller Humanitaire en République du Congo en vue de renforcer la coordination humanitaire. Dès lors, l’Unité de Coordination Humanitaire, avec le soutien du OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 5
Conseiller Humanitaire, s’est impliquée dans la coordination et l’organisation des missions conjointes et l’élaboration des stratégies communes d’évaluation et d’intervention. OCHA, dans sa stratégie, privilégie également l’échange d’informations entre différents acteurs, le plaidoyer tant au niveau national avec le gouvernement, qu’au niveau international avec les bailleurs de fonds, le renforcement des capacités du gouvernement et l’élaboration d’un plan de contingence. OCHA s’est également engagé à développer une cartographie de la situation humanitaire du Pool et à initier une série de missions conjointes d’évaluation dans le département du Pool en 2004 avec le PAM, l’UNICEF et la FAO. La première mission a été lancée du 27 au 29 avril 2004 dans le district de Kinkala (Chef Lieu du département), une deuxième mission conjointe à été organisée du 19 au 23 juillet 2004, dans le district de Mindouli, dans la partie ouest du Pool. Dernièrement, du 25 au 27 août 2004, une mission conjointe d’évaluation a été lancée dans le nord-ouest du Pool, dans les districts de Mayama et Kindamba. (Voir Annexe I, carte 1.3 et Annexe III) Localités visitées dans le cadre du travail d’évaluation Les zones visées présentent les caractéristiques les plus marquées du Département, les localités de Mindouli, Kindamba et Kinkala étant des centres régionaux ou des villages ruraux d’importances avant les conflits, administrativement appelés Communes. Ce travail d’évaluation a permis de constater l’ampleur des dégâts causés par les conflits sur cinq districts : Kinkala, Goma Tsé-Tsé, Mindouli, Kindamba et Mayama. Le district de Mindouli présente la spécificité d’avoir accueilli, essentiellement à Mindouli-Commune et à Missafou, la plupart des déplacés du terroir et des districts voisins. Mais c’est aussi le district le plus touché, principalement les localités longeant le Chemin de Fer (Loulombo, Kinkembo, Massembo-Loubaki, Kingoyi…). La spécificité de la zone Mayama-Kindamba tient à sa situation géographique, qui est proche du bastion des ex-rebelles de Loukouo. Il faut noter que la partie nord-ouest du Pool a reçu l’aide humanitaire plus tardivement que le Sud et l’Est de la région. Finalement, en tant que Chef-Lieu du Département, Kinkala rassemble tous les responsables régionaux des services gouvernementaux, que nous avons voulu consulter dans le cadre de notre travail d’évaluation. OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 6
Contexte général Il y a quelques décennies, la République du Congo était comptée au nombre des pays à revenu intermédiaire. Ce classement à connu un changement négatif ces dernières années. La dernière décennie en République du Congo a été marquée par la violence, et le pays a enregistré une baisse considérable de son revenu par habitant. En quinze ans (de 1984 à 2000), le PIB par habitat du Congo a baissé d’environ vingt pourcent. Cette baisse est accompagnée d’une détérioration des secteurs sociaux de base. À l’heure actuelle, plus de 70% de la population vit au-dessus du seuil de la pauvreté, et les indicateurs sociaux (taux de mortalité, espérance de vie, etc.) se sont déterriorés de façon dramatique. (Voir Annexe II, Tableau 2.1) En effet, les guerres civiles de 1997 et 1998 ont résulté en un déplacement massif des populations, estimé à plus de 800 000 personnes. Un premier cessez le feu conclu en décembre 1999 a contribué au rétablissement d’un certain ordre. Au même moment, une nouvelle constitution se dessine en parrallèle à l’organisation des élections de mars 2002. De nouveaux afrontements viennent toutefois briser les espoirs de paix, lorsque les forces gouvernementales tentent de maintenir leur assise face à des forces rebelles. Ce n’est qu’à la signature, le 17 mars 2003, d’un accord réaffirmant les accords de cessez-le-feu et de cessation des hostilités que la situation semble se résorber. Depuis, l’ensemble du pays se mobilise pour reconstruire ce que les conflits ont détruits. Signe d’espoir, mais aussi du retour d’une certaine stabilité, décembre 2004 marque l’appui des institutions internationales (FMI, Banque Mondiale, Banque Africaine de Développement, Club de Paris) dans la gestion de la dette extérieure du pays. Le pays possède également des ressources naturelles importantes, tel le pétrole, le diamant et le bois, qui pourraient jouer un levier au niveau de l’économie du pays. Toutefois, même si aujourd’hui le Congo semble se remettre des conflits passés, le Département du Pool fait toujours face à une situation humanitaire déplorable. En effet, les effets du conflit ont persisté dans le Département du Pool, qui entoure Brazzaville, la capitale. Théatre de dernières crises en 2002 et en 2003, la région subit encore aujourd’hui les conséquences de ces boulversements. Les derniers combats dans le département du Pool (mars-avril 2002, octobre 2002 et mars 2003) (Voir Annexe I, Carte 1.4) ont été aussi dévastateurs que le conflit de 1997–1998. Ce n’est qu’en mai 2003 qu’un couloir humanitaire a pu être ouvert dans la région, pour permettre le travail d’évaluation et d’assistance humanitaire aux populations. Dans cette région, les milices Ninja bien armées, sous la direction du Pasteur Ntoumi, ont continué les hostilités. Certaines zones subissent encore les exactions commises par des jeunes hommes en armes, incontrôlés mais opérant sous le couvert des Ninja. La paix et la sécurité du département, malgré les efforts fournis, aussi bien au niveau national que local, restent précaires. Contexte régional La région reste aujourd’hui marquée par ces évènements, qui ont provoqué des milliers de morts et le déplacement massif des populations aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur du pays, la destruction des infrastructures publiques et privées, une disparition des services de base (santé, éducation, accès à l’eau potable), la OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 7
recrudescence des maladies infectieuses, la multiplication des épidémies de fièvre hémorragique telles que Ebola, la violence chronique envers les populations civiles prévaut toujours. Certains développements politiques ont donné un espoir de retour à la paix, et ont motivé le retour des déplacés dans leurs localités d’origine. C’est le cas le 17 mars 2003, lors de la signature d’un accord réaffirmant les Accords de Cessez le feu et de cessation des hostilités. Malheureusement le processus politique continue de rencontrer des difficultés dans son aboutissement, et la situation du département du Pool reste précaire et préoccupante. Aujourd’hui, la région du Pool présente des indicateurs de développement bien en dessous de ceux présentés dans le reste du pays, et dans les pays d’Afrique centrale. Les destructions sont considérables : écoles, services et infrastructures sanitaires, routes, fourniture d’eau et d’électricité sont inexistants dans plusieurs localités et communautés du fait des conflits et des actes de pillages. Leur impact négatif sur les activités humanitaires dans la région est énorme, et influe sur le mouvement de retour des populations réfugiées. En effet, durant le plus fort des conflits, la population a trouvé refuge dans les forêts, dans la capitale et dans les départements voisins. On a noté le déplacement de plus de la moitié de la population du département du Pool à l’intérieur du pays et vers d’autres régions : Brazzaville, Bouenza, Lékoumou, Niari, Plateaux et Kouilou (Voir Annexe I, Carte 1.5). Le mauvais état des routes du Pool, combinée à une insécurité toujours prévalente, ont restreint l’accès aux acteurs humanitaires pendant les conflits, et ce, encore aujourd’hui. En conséquence, les besoins humanitaires demeurent une préoccupation, le contexte sécuritaire continue de se détériorer, spécialement entre juillet et août 2004, et dernièrement au cours du mois de décembre 2004. OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 8
Situation Humanitaire du Pool par Secteur Populations Les pratiques très répandues du pillage, du meurtre et des menaces armées ont contraint plus de la moitié de la population du Département du Pool à se déplacer. Des communautés entières ont été déracinées, les villages vidés de leurs habitants. Aujourd’hui, la plupart des villes et villages n’ont retrouvé que la moitié ou les deux tiers de leurs populations originelles : le Pool et sa population dépérissent progressivement. (Voir Annexe II, Tableau 2.2). Les communautés ont été rencontrées dans le cadre du travail d’évaluation des missions. Ici à Kinkala Kindamba. Avant le conflit, le district de Kinkala comptait environ 29 629 habitants pour les 52 villages dont 14 423 pour Kinkala- Commune, selon le recensement de 1996. Actuellement, plus de la moitié de cette population demeure en attente d’éventuels appuis pour redémarrer leurs activités traditionnelles : maraîchage, agriculture de subsistance, élevage. Mindouli Avant 2002, et sur la base des données du recensement de 1996, la population totale du district de Mindouli avoisinait les 46 276 habitants pour 31 villages et Mindouli- Commune comptait plus de 17 967 habitants. Durement touché par le conflit, le district de Mindouli a été partiellement détruit. Les populations, en majorité encore déplacées, ont fui vers les autres régions ou encore dans les forêts. Certaines localités, principalement celles situées le long de l’axe du CFCO, ont été détruites dans leur quasi-totalité. Selon les autorités locales, plus de la moitié des populations est retournée. D’autres ont fui vers les localités comme Mindouli-Commune et Missafou, qui ont servi de lieux d’accueil ou de zones de repli pour les populations déplacées, comme d’autres villages limitrophes de la Bouenza et de la RDC. Actuellement, on compte approximativement 38 000 habitants, en excluant la zone de Simou Loukouni, restée inaccessible depuis fort longtemps. Mindouli-Commune compte actuellement 11 153 habitants pour 4004 ménages. Ainsi, plus de la moitié de la population de la ville de Mindouli est déplacée et la ville est à moitié vide à cause du conflit. Cependant, à vue d’œil, l’image des maisons détruites et abandonnées à Mindouli-Commune ne donne pas l’aspect d’une ville qui a recouvert plus de 40% de sa population originelle. OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 9
Kindamba et Mayama Les populations des districts de Kindamba et Mayama ont été durement affectées par les évènements. Le nombre d’habitant des deux districts s’est vu considérablement diminué en raison des conflits intermittents qui ont affecté ces zones depuis 1998. La population de tout le district de Kindamba est passée de 18 053 habitants avant les guerres à 11 000 habitants après les hostilités, soit une diminution de plus de la moitié. La population ayant fui leurs localités, certains villages dans la circonscription de Kindamba sont demeurés vides et ont été rayés du district. Ainsi, sur l’axe routier Mayama-Kindamba, 4 villages n’existent plus. Une partie de la population des zones de Mayama et Kindamba s’est retirée vers le Nord à Mati, Ignié et à Brazzaville et l’autre partie reste dans les forêts. Toutefois, la ville de Kindamba a reçu des déplacés, estimés à environ 100 personnes, en provenance des zones où les combats étaient les plus acharnés. Selon les informations fournies par la préfecture, il manque toujours à la localité de Mayama la majeure partie de ses habitants. Auparavant estimée à environ 2800 personnes, on compte aujourd’hui 700 personnes pour la ville de Mayama. Le district a également perdu plus de la moitié de sa population, qui est passée de 7995 à 4100 personnes. Sur ces déplacés, environ 132 personnes se sont installées au Nord du pays, dans la localité d’Ignié. Accès Le manque d’accès et l’insécurité sont deux facteurs liés et dont les effets contribuent à l’aggravation de la situation humanitaire, en rendant inaccessible les zones où les urgences sont les plus grandes. Au niveau de l’accès, le manque de planification de l’entretien des infrastructures rend extrêmement difficile l’accès à l’ensemble du territoire du Pool. La Route Nationale N°1 est dans un état lui permettant difficilement de mériter son titre de « nationale », la vitesse moyenne d’un trajet, à bord d’un véhicule à 4 roues motrices, est en Conditions typiques d’une route du Pool : bourbier sur la route de Mindouli moyenne moins de 10 km/h. Le chemin de fer reste une alternative plus ou moins fiable, principalement pour le transport commercial. En effet, mis à part les irrégularités et les retards fréquents, le trafic ferroviaire est régulièrement perturbé par les attaques et les pillages de marchandises, qui menacent également les passagers du CFCO. De plus, en saison des pluies, le trafic peut être perturbé par des éboulements, des inondations ou autre désastre naturel, comme en décembre 2004, où l’interruption a paralysé la livraison de marchandises pour plusieurs semaines. La troisième alternative, au niveau de l’accès à la zone, demeure le transport aérien. Cette solution est toutefois peu pratique, étant donné son coût élevé et le peu de zones accessible par OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 10
avion. En effet, il n’existe qu’une seule piste d’atterrissage pour tout le Département, soit Kindamba. Alternativement, les localités de Mouyondzi et de Nkayi, toutes deux hors du Département, demeurent également des alternatives. Toutefois, pour atteindre Mindouli, un trajet de plus de 80 km sur une route secondaire est requis à partir de Mouyondzi, ou un trajet de plus de140 km sur la route nationale, à partir de Nkayi. L’interruption et l’augmentation du coût de transport impliquent que la pauvreté continue d’affecter les régions du Pool, autrefois à vocation agricole. Aujourd’hui, les populations ne peuvent prétende qu’à une agriculture de subsistance. Kinkala La Route Nationale N°1, route principale du Pool qui est presque inaccessible, la mission a emprunté une route secondaire Brazzaville – Mbanza- Ndounga – Kinkala à l’aller et au retour. La mission a parcouru en moyenne 6 heures de route pour environ 110 Km (Voir Annexe I, Carte 1.3). Kinkala est accessible par voies ferroviaires (via Madzia et Matoumbou) et par voie carrossable. Cependant, l’état actuel des routes ne favorise pas la libre circulation des biens et des personnes dans certains villages. En outre, certaines infrastructures détruites (ponts et traverses à gué) nécessitent des grandes et coûteuses réparations. Tronçon impraticable de la Route Mindouli Nationale 1, à la sortie de Kinkala, en direction de Brazzaville. Mindouli est accessible par les voies ferrée et carrossable, toutefois les déplacements se font avec beaucoup de difficultés et d’insécurité pour les populations. Pour les acteurs humanitaires et l’équipe de la mission conjointe, la Route Nationale N°1 constitue le principal moyen d’accéder à Mindouli. Pour les populations, la seule autre alternative d’accès au district reste le train. Certaines zones du district demeurent toutefois inaccessibles, et en conséquence non assistées, notamment Moulandou et Kimanika à plus de 50 Km de Mindouli. Les paysans de ces localités doivent courir de grands risques pour venir se ravitailler au centre de Mindouli. Il s’en suit ainsi un amoindrissement de l’économie de ces ménages. Les conditions de la Route Nationale N°1 sont extrêmement mauvaises sur tout son parcours. La mission a voyagé 8 heures et demi par un véhicule 4x4 pour couvrir une distance de 73 Km (Kinkala-Brazzaville) et 4 heures et demi pour la dernière portion de 70 Km (Kinkala-Mindouli). Le trajet Mbanza Ndounga-Voka- Kinkala, quoi que bien plus long, donne aussi accès dans le département du Pool. Il a été emprunté par certains membres de la délégation. OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 11
Mayama et Kindamba Les districts de Mayama et Kindamba sont difficilement accessibles par route. De Brazzaville à Kindamba, on compte environ 148 km, une distance parcourue en environ 9 heures par un véhicule à 4 roues motrices. La quasi-absence de routes est l’un des obstacles majeurs à l’action des acteurs humanitaires dans cette zone. Le district de Kindamba est également accessible par avion grâce à la piste d’atterrissage de Kindamba. Le CICR et MSF-Hollande, qui interviennent dans la zone, ont affrété chacun un avion durant les dernières semaines du mois d’août 2004 pour assurer un pont arien entre Brazzaville et Kindamba, palliant ainsi les difficultés d’accès liées à l’insécurité. Conditions typiques d’une route du Pool : Passage difficile sur la route de Kinkala par Mbandza- Sécurité Ndouga, où le pont est détruit. Au niveau de la sécurité, plusieurs facteurs contribuent à la dégradation générale de la situation régionale. Principalement, on note la paralysie du processus de réconciliation, depuis plusieurs mois. De plus, la prolifération des armes légères et lourde au sein de la population, ainsi que la circulation des armes parmi les jeunes, représentent un facteur potentiel de conflit. Finalement, l’instabilité persistante dans le Département, due aux hostilités intermittentes opposant l’armée aux éléments armés, contribue à l’atmosphère volatile qui persiste. De nombreux barrages routiers d’hommes armés font obstacle à l’accès et la circulation. De ces postes de contrôle, plusieurs incidents de sécurités ont été récemment rapportés, et dont les acteurs humanitaires ont notamment été victimes au cours des mois de juillet, août et décembre 2004. Le transport ferroviaire souffre également des effets de l’insécurité, les marchandises étant régulièrement sujettes à des pillages systématiques et les passagers à des opérations de rançonnage. De plus, la combinaison des facteurs sécurité et accessibilité influent grandement sur l’accès aux populations démunies par les humanitaires, le mouvement de retour des déplacés et des réfugiés vers leur communauté d’origine, ainsi que sur leur capacité reprendre leurs activités économiques. Ces facteurs laissent des populations entières isolés et dans un état de vulnérabilité extrême, amplifié par tous les manques socio-sanitaires laissés par les conflits. La protection de la population civile demeure un défi à relever. Kinkala Sur les routes menant à Kinkala, la présence des ex-combattants et leurs supplétifs désœuvrés est très visible. Leur habitude est d’ériger des check-points pour rançonner les véhicules des commerçants. Alors que le processus de lancement d’un nouveau DDR (Désarmement- démobilisation-réinsertion) avance lentement, la présence des hommes et femmes en OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 12
armes incontrôlés dans les mêmes zones que la force publique peut poser des sérieux problèmes de cohabitation avec un potentiel pour des incidents cycliques. Mindouli On note plusieurs bouchons des jeunes en armes incontrôlés et parfois soûls le long de la route. Entre Brazzaville et Mindouli, sur la Route Nationale, la mission a rencontré une douzaine de barrages érigés par les Ninjas. De plus, diverses altercations entre les forces armées et des jeunes en armes en plein centre de Mindouli, en décembre 2004, contribuent à créer un climat de peur au sein de la population. Mayama et Kindamba Sur le plan sécuritaire, il faut noter que la chaîne de commandement des ex-rebelles semble relativement plus solide dans la zone Kindamba-Mayama qu’elle ne l’est dans les districts de Kinkala et de Mindouli. Les barrages des ex-rebelles et des militaires sont en effet moins nombreux sur le tronçon Brazzaville-Kindamba. De plus, les milices Ninjas semblent plus organisées dans cette zone que partout ailleurs. Un code de bonne conduite a été adopté par les anciens belligérants selon lequel le port d’arme dans la ville de Kindamba est interdit aussi bien pour les militaires que pour les Ninjas. Toute infraction commise par un ex- combattant ou un militaire est examinée et sanctionnée par sa propre hiérarchie. Ces facteurs ont largement contribué à diminuer le nombre d’incidents dans la zone malgré la forte présence d’éléments des ex-rebelles et des militaires des Forces Armées Congolaises. Santé/Nutrition Les destruction et le pillage des postes et centres de santé dans le Département du Pool sont à l’origine du manque d’accès aux services de soins de santé de base, ainsi qu’à un état sanitaire lamentable des 100 000 personnes restées dans la région. Environ la moitié des postes de santé a été détruite ou son équipement, médicaments, toiture ont été pillés. Des 43 structures sanitaires existantes avant la guerre, seules 20 fonctionnent (Voir Annexe II, Tableau 2.3). Les structures qui sont opérationnelles le sont grâce à l’assistance des organisations humanitaires. Une grande partie de ces structures nécessite une réhabilitation et Les populations ont difficilement accès aux soins, un rééquipement. Dans certaines et en conséquence, des problèmes bénins restent localités, les locaux des centres de santé sans traitement avec de conséquences graves. sont encore en ruines, alors que dans OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 13
certains autres centres, notamment à Mindouli et Kindamba, les partenaires ont entrepris des travaux de réhabilitation pour plus de 50% des structures. Les structures opérationnelles ne parviennent toutefois pas à assurer des services de qualité. Les centres médicaux manquent d’équipements, de médicaments, de laboratoires, de banque de sang, de surveillance épidémiologique opérationnelle et de systèmes d’information socio-sanitaire pour assurer l’alerte en période d’épidémie. De plus, la situation d’insécurité dans certaines zones a conduit à la suspension des cliniques mobiles, qui sont importante pour les populations les plus éloignées et les plus vulnérables. Un autre problème majeur dans le Département demeure le manque de personnel médical. En effet, le personnel médical étatique n’est toujours pas disposé à pratiquer dans une zone affectée par un conflit. Les quelques hôpitaux qui fonctionnent dans le Pool le sont grâce à l’assistance des acteurs humanitaires (MSF F, MSF H, CICR, Alisei, CAM), tant au niveau de la rémunération et de la formation des agents de santé qu’au niveau de l’approvisionnement en médicaments et équipement de base, du suivi des opérations et de la réhabilitation des structures. Toutefois, malgré les efforts fournis par les partenaires humanitaires qui opèrent en apportant leur appui aux structures sanitaires de ces localités, la situation sanitaire dans les districts visités demeure critique. Leurs activités sont principalement financées par ECHO. En conséquence, le départ des principaux acteurs humanitaires, tels MSF- France, qui prévoient de se retirer du district de Mindouli au printemps 2005, privera la population de services sanitaires de base. Les conséquences de ces conditions sanitaires prévalentes sont importantes. Des maladies facilement traitées et prévenues, telles le paludisme, les maladies respiratoires, les maladies diarrhéiques et les dermatoses ont une large incidence dans le Département. Plus du tiers du taux de morbidité est lié au paludisme. Le mauvais état nutritionnel de la population, le peu d’hygiène sanitaire, auquel s’ajoute un affaiblissement des mécanismes de survie, ainsi que le manque de structures communautaires, ont contribué à l’augmentation du taux de mortalité lié aux maladies. De plus, le manque ou l’insuffisance de couverture vaccinale dans le Pool est à l’origine de l’élévation du taux de mortalité infantile. Estimée à un niveau inférieur du tiers de celui de tout le pays (soit 41% contre 61,5%), la couverture vaccinale moyenne de la région est jugée au dessous de celle des pays « à faible développement humain 1», soit les pays les plus pauvres d’Afrique subsaharienne et des pays en crise tel la Sierra Leone. Finalement, les structures de santé reproductive étant considérablement détériorées elles aussi, on a constaté une augmentation du taux de mortalité maternelle. De même, des milliers de femmes victimes des violences sexuelles et des traumatismes psychologiques n’ont pas accès à une assistance adéquate notamment des soins 1 Selon le Rapport mondial sur le développement humain 2004, PNUD, le Congo-Brazzaville est au 144e rang des pays selon le classement IDH (Indicateur de Développement Humain), sur 177. Toutefois, au niveau du taux de vaccination des enfants, le Congo, avec 37% d’enfants vaccinés pour la rougeole, se situe bien en deçà de pays classé aux derniers rangs tels le Burkina-Faso (175e rang) et la Sierra Leone, (177e rang) qui présentent respectivement 46% et 60% d’enfants vaccinés contre la même maladie. OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 14
psychologiques. La prévalence du VIH/SIDA dans la population générale est estimée à 5% dans le pays, mais les violences sexuelles observées dans la région cachent certainement des tendances évolutives de la maladie au niveau du Département. Kinkala Dans le district de Kinkala, à peine la moitié des centres de santé est opérationnelle. La mission a visité l’Hôpital de base de Kinkala et y a noté une faible couverture en personnel médical national qualifié: un seul médecin qualifié est assisté d’une sage femme et de volontaires/secouristes. Généralement, ces volontaires sont pris en charge par la communauté. Signalons également que l’Hôpital de Kinkala est opérationnel grâce à l’appui technique de MSF Hollande, du CICR et des volontaires de la CRC. L’apport de ces partenaires, qui s’étend sur tout le district de Kinkala, a atténué la souffrance des populations réduisant ainsi les risques de malnutrition à travers une surveillance nutritionnelle renforcée. Il est évident que, avec le déficit en personnel et le nombre décroissant des formations sanitaires dans le district, les populations ont des difficultés d’accès aux soins de base. Cette situation est inquiétante car dans ce district, on relève une forte prévalence des maladies vectorielles et endémiques. Mindouli Sur les 16 structures sanitaires que compte le district, 7 actuellement sont opérationnelles grâce à l’appui des acteurs humanitaires : MSFF, CICR, Atlas Logistique, ACTED. Le CICR poursuit son soutien et son appui au suivi médical dans les Centres de service intégré (CSI) de la région, soit dans les localités de Matoumbou, Madzia, Kibouendé, Massembo Loubaki et Missafou. De son côté, MSF–France soutien l’hôpital de la localité. Certains centres de santé fonctionnent toutefois en services limités. L’absence de personnel médical dans le district est accablante : aucun agent de santé de l’Etat n’est actif dans les centres de santé. (Voir Annexe II, Tableau 2.7). Les pathologies les plus courantes demeurent le paludisme, les diarrhées et les maladies gastro-intestinales, les infections respiratoires aiguës et les infections cutanées. Sur 204 consultations par mois à l’hôpital de Mindouli, il y a plus de 38% cas de paludisme confirmés (mois de référence : juin 2004). Kindamba et Mayama La situation sanitaire dans les districts de Kindamba et Mayama est critique. Ceci tient à plusieurs facteurs, notamment l’absence de personnel médical dans les centres de santé, l’état des locaux des centres de santé, toujours en ruines, et le manque des médicaments. OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 15
L’hôpital de référence de Kindamba est une illustration pertinente et caractéristique des défis sanitaires à l’Ouest de la région du Pool. L’hôpital a une capacité de 46 lits dont 30 seulement sont équipés de matelas. Le surveillant général de l’hôpital est un aide-soignant qui a fait valoir son droit à la retraite depuis janvier 2004 mais retenu par l’autorité administrative locale pour éviter la fermeture de l’hôpital. Le personnel de l’hôpital est composé de 6 agents dont 5 comme aides-soignants. Le sixième agent, une sage-femme est le seul agent qualifié de L’Hôpital de Kindamba fonctionne grâce à l’appui de Médecin Sans Frontières Hollande. l’hôpital alors que l’hôpital doit faire face à environ 100 consultations par jour dans une ville de 6000 habitants. Les districts de Kindamba et de Mayama ne possèdent aucun médecin affecté par l’Etat. Pour l’ensemble du district de Kindamba, les 7 dispensaires du district sont tenus par les bénévoles et des secouristes de la Croix Rouge. Les acteurs humanitaires opérationnels apportent leur appui aux structures sanitaires dans la zone. MSF-Hollande opère l’hôpital de Kindamba avec un personnel composé de 2 médecins expatriés et une infirmière expatriée. L’ONG procède aux soins de santé primaires, la petite chirurgie, le service de maternité et les cliniques mobiles (pour les localités situées à plus de 20 km de Kindamba). Le CICR et ALISEI contribuent à la réhabilitation des centres de santé dans le district de Kindamba et le Comité d’Aide Médicale dans celui de Mayama. En conséquences, les maladies les plus courantes, contribuant à l’élévation du taux de morbidité, sont comparables au reste du Département : le paludisme, les infections gastro-intestinales, les infections dermatologiques et les infections respiratoires. Education, Enfance, et Protection La grande majorité des enfants du Département du Pool a cessé de fréquenter l’école depuis 1999. Les enseignants ont quitté la région, les écoles ont été détruites et pillées, et les services nationaux responsables ne répondent pas à la situation. Les bancs, toitures, portes et fenêtres de la plupart des écoles ont été pillés ; 80% des bâtiments scolaires sont en mauvais état contre 22% dans l’ensemble du pays. Les écoles manquent non seulement d’équipement de base comme les bancs (une seule place assise pour 4 à 6 élèves) mais également de matériel didactique (un manuel pour 20 enfants). Outre les déficits matériels, le secteur souffre également d’un manque en ressources humaines. En effet, hormis les grands centres, où il y a quelques enseignants fonctionnaires, l’enseignement par le personnel qualifié n’a pas repris, la majorité des OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 16
enseignants ayant quitté la région pendant le conflit, et n’étant pas disposé à repartir dans la région étant donné la situation actuelle. Les conséquences de la guerre civile ont des effets secondaires important dans le secteur de l’éducation : faible taux de scolarisation, mauvaise qualité de l’enseignement. À l’heure actuelle, plus de la moitié des écoles restent fermées. (Voir Annexe II, Tableau 2.4). Au niveau des secteurs protection et Ruines d’une école dans le district de Kindamba enfance, d’autres conséquences importantes sont directement liée aux conflits : il s’agit de l’enrôlement des enfants dans les groupes armés et du port d’armes par les enfants. À ces faits, s’ajoutent les pires effets de l’exploitation sexuelle aboutissant à la sexualité et aux grossesses précoces chez les filles. Le manque de connaissances sur le Droit International, les Conventions sur le droit de la guerre et l’inexistence des programmes d’éducation civique, surtout au cours de sept années de conflits successifs, ont contribué à une violation fréquente des droits de l’homme. Autre conséquence importante liée à la disparition des structures administratives locales : la majorité des enfants nés dans le Département ne disposent pas d’actes de naissance. Kinkala Le secteur éducatif dans le district de Kinkala a beaucoup souffert ces quatre dernières années. Tout comme les structures sanitaires, les écoles ont été pillées et saccagées. Les quelques établissements qui fonctionnent sont dépourvus de l’essentiel : tables- bancs, toitures, ouverture, matériel didactique. Pour suppléer au manque de personnel, la communauté a créé une nouvelle catégorie de personnel appelé « Agents-Parents ». Cette catégorie est constituée de volontaires ou de vacataires payées par les parents d’élèves, quoique avec beaucoup de difficultés. Le Lycée de Kinkala n’a pas ouvert ses portes durant l’année scolaire 2002-2003. Pour l’année 2003-2004, seulement 74 candidats ont été présentés au Baccalauréat, alors qu’auparavant Kinkala présentait des centaines de candidats à cet examen d’état. En somme, on note dans le district une baisse considérable du taux de scolarité, l’insuffisance croissante d’enseignants actifs et le manque de moyens matériels des structures scolaires dans le district de Kinkala. Mindouli La situation scolaire dans le district de Mindouli reste toujours précaire. Après 2 ans d’interruption, le district n’a pu présenter qu’environ 1000 élèves aux examens d’état alors qu’avant les hostilités le district en présentait plus du double. OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 17
Le Lycée de Mindouli, le seul dans le district, n’a pu réouvrir ses portes qu’en février 2004 et n’a fonctionné que partiellement. Dans le district, seules dix écoles sont partiellement ouvertes en 2004, alors qu’il en existait 41 avant les conflits. Le nombre d’élèves a diminué de plus de la moitié dans le district : de plus de 10 000 élèves d’avant guerre, seuls 5 280 fréquentent actuellement l’école, soit une diminution de près de 50%. La plupart des élèves fréquentent les écoles situées dans la ville de Mindouli car dans le reste du district, la pauvreté des familles ne permet pas de subvenir à l’éducation des enfants. La situation est similaire et même pire dans d’autres districts du Département. On note un manque d’enseignants important dans l’ensemble du district. Des 82 enseignants et personnels éducatifs travaillant (censés travailler / mandatés) à Mindouli, seuls 38 sont actuellement actifs, et certains d’entre eux ne sont pas présents à leur poste de travail. Mais une chose est claire dans la majorité des localités du district, on note une incapacité des familles à assumer le coût de la scolarité, laissant leurs enfants d’âge scolaire sans éducation. Dans le cadre des entretiens effectués par l’équipe de l’UNICEF avec le Directeur Départemental des Affaires Sociales, il a été noté que 450 orphelins ont été recensés à Kinkala et dans les villages environnants. 106 d’entre eux vivent dans des familles d’accueil, tandis que 17 autres seraient encadrés par un ex-combattant dans le district de Mindouli. Mayama et Kindamba Le secteur de l’éducation dans les districts de Mayama et Kindamba est déplorable. La majorité des éducateurs, soit 80% du personnel enseignant, sont des bénévoles sans formation professionnelle qualifiée. La qualité de l’enseignement s’en ressent. Par exemple, sur un effectif de 1620 élèves, seulement 45 candidats se sont présentés au BEPC mais aucun n’a été admis en 2003-2004. De plus, même si un certain nombre de structures ont repris leurs activités, les moyens manquent toujours, 95% des étudiants sont assis par terre par manque de tables et de bancs. Au niveau du district de Mayama, des 14 écoles primaires d’avant la guerre, seulement 9 écoles fonctionnent actuellement. Les écoles qui sont ouvertes sont tenues par 2 enseignants agréés et le reste par des bénévoles, au nombre de 23. La ville de Mayama, qui possède 2 écoles, ne dispose que de 6 enseignants. Il faut noter qu’une des écoles est dirigée par un instituteur qui enseigne toutes les classes, en plus d’agir comme directeur de l’établissement. Sur les 26 écoles primaires du district de Kidamba, seul 20 ont partiellement réouvert cette année. La ville de Kindamba compte 7 enseignants au niveau primaire, dont seulement 2 sont agréés, les 5 autres enseignants étant des bénévoles. Afin de rémunérer ceux-ci, les parents d’élèves contribuent par une somme de 300 Fcfa mensuelle. Compte tenu de la situation financière difficile, cette modique somme est au-delà de la capacité financière de plusieurs ménages. Le non-enregistrement des naissances reste un fait très remarquable : plus de 70% d’enfants sont sans acte de naissance à Mayama. La guerre à détruit les OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 18
administrations et certains fonctionnaires de ces administrations ne sont pas retournés dans leurs zones de travail. Les habitants déclarent qu’à peu près 60% de leurs enfants ont intégré ce mouvement. Le phénomène des grossesses précoces a également été noté : des nombreuses jeunes filles sorties des forêts ont des bébés, souvent des pères inconnus. Il y a aussi un nombre significatif d’enfants-soldats mal encadrés (drogue, indiscipline, disqualification de l’autorité parentale). Vivres et Sécurité Alimentaire En conséquence directe de l’insécurité qui prévaut, les agriculteurs et éleveurs se limitent à une production d’autosubsistance et ne produisent qu’une quantité limitée de nature à ne pas attirer l’attention des éléments armés prêts à saisir leurs récoltes. Autrefois nombreux, le cheptel de la région a été décimé. Dans le district de Mindouli, les 6162 têtes existant avant la guerre ont été abattues ou pillées. Actuellement, les seuls animaux visibles dans le Pool sont les poulets. L’unique Champs de maniocs dans le district de Mayama, menacés par le parasite de la mosaïque. autre source de protéine animale est le poisson salé ou fumé en provenance de Pointe Noire ou de Brazzaville. Toutefois, la majorité de la population ne possède pas les moyens pour s’acheter ce type d’aliment. Le Pool, qui était une région exportatrice de produits agricoles, doit maintenant importer ses aliments. La petite quantité de produits actuellement disponible sur le marché provient de la capitale ou de la RDC voisine. Cependant, la plupart de ces aliments ne sont pas à la porté des agriculteurs du Pool, et la majorité des paysans sont contraints de faire du troc. En conséquence, le niveau d’insécurité alimentaire dans le Pool reste élevé et est la cause de l’élévation des taux de morbidité et de mortalité infantile. À l’heure actuelle, le Département du Pool possède le taux de malnutrition le plus élevé du pays : le PAM estime que 15% de la population du Pool souffre d’une malnutrition sévère. Kinkala Durant le passage de la mission à Kinkala, les membres de la mission ont noter que les marchés sont presque vides. Les quelques produits trouvés viennent essentiellement de Brazzaville et sont vendus à des prix qui ne sont pas à la portée de toutes les bourses. (Voir Annexe II, Tableau 2.5 ). Comparativement à Brazzaville, les produits de base coûtent plus chers à Kinkala qui ne se trouve pourtant qu’à 79 kilomètres de la capitale. Les difficultés d’approvisionnement lié aux conditions de la route et à l’insécurité expliquent cette différence. OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 19
Par ailleurs, la guerre ayant fait son œuvre de destruction, il reste peu de choses des cultures maraîchères et vivrières dans la région. De plus, comme mentionné plus haut, les familles ne peuvent prétendre à une agriculture de commerce, par peur des pillages, mais également par la difficulté d’acheminement aux marchés de la capitale. Par conséquence, la situation alimentaire du district est encore précaire. De façon générale, les conditions et coût de vie ne permettent pas aux familles de subvenir à leurs besoins de base. Pour des raisons de survie, certaines populations ont développé un autre secteur d’activités : la fabrication du charbon. Les populations se livrent à l’exploitation anarchique de la forêt, abattant même les arbres fruitiers, pour les utiliser comme bois de chauffe ou à la fabrication du charbon. De plus, il a été souligné par les services agricole du département que la surface culturale est détruite à 75 % à cause des cultures sur brûlis. D’autre part, les armes de chasse n’étant plus sous contrôle, on assiste à la déperdition de la faune. Si elles ne sont par rapidement contenues, les conséquences de ces activités peuvent s’avérer dramatiques. En effet, elles constituent une menace non seulement pour l’environnement et l’écologie locale, mais également pour la capacité des populations à subvenir à leurs besoins futurs. Mindouli Le district de Mindouli, qui occupait une place en tête du secteur agropastoral dans le Département, se retrouve aujourd’hui dans une situation angoissante. Les fermes, cheptel et plantations ont été détruits et pillés pendant les évènements. Ce qui est produit actuellement est réservé juste à l’autoconsommation des ménages. De plus, par manque de semences, la sécurité alimentaire est actuellement menacée. La relance de tout type d’élevage constitue une priorité pour le secteur agricole, en vue de reconstituer le cheptel. Le district importe la majorité de ses produits. Sur le marché de Mindouli, on note une monotonie de produits de consommation (poisson salé et poisson fumé). Tout vient de Pointe-Noire et Brazzaville via le CFCO, excepté les légumes et l’huile de palme. Le kilo de viande qui coûtait 1000 FCFA avant la guerre a doublé de prix et est vendu une fois toute les 2 semaines environ. Pour palier à leurs difficultés agricoles, les populations du district ont développé de façon particulièrement importante les activités de fabrication de charbon, de coupe forestière et de culture sur brûlis. Kindamba et Mayama Avant les hostilités, Kindamba était le grenier de la région du Pool. Sa population avait une vocation essentiellement agropastorale, avec environ 8 habitants sur 10 se définissant comme éleveur. Le district comptait environ 460 parcs de bovins, avec chaque éleveur possédant en moyenne 5000 têtes de bovins. Toutefois, l’ensemble du cheptel a été pillé pendant les hostilités. Une autre activité régionale, la pisciculture, n’a pas encore pu reprendre ses activités à cause du manque d’alevins pour les étangs. OCHA ROC LE POOL, UNE CRISE HUMANITAIRE NEGLIGEE 20
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