Le retour du droit - CENTRES DENTAIRES DÉVIANTS - ACTU. CFAO : quelle réglementation ? - Ordre-Chirurgiens-Dentistes.fr
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FOCUS. La France, terre d’accueil ACTU. CFAO : quelle N° 2 0 3 / 2 3 des praticiens à diplôme UE réglementation ? JANV/FÉV Le retour du droit CENTRES DENTAIRES DÉVIANTS
SOMMAIRE ACTU 4 FOCUS 11 PRATIQUE 19 4. C entres dentaires : La France, terre 19. Formation restreinte : unanimité à l’Assemblée d’accueil des un dispositif pour nationale praticiens agir vite à diplôme UE JURIDIQUE 24. Le praticien face au défaut de paiement d’honoraires 6. C ongrès ADF : forte participation et échanges intenses 24. Le contrat de soins patient-praticien questionné devant un juge 8. CFAO : quelle réglementation ? TERRITOIRE 16 CAHIER ÉLECTIONS À Melun, des 27. Élection 9. Réunion des complémentaire CRO départements à faible chirurgiens-dentistes Corse et CRO PACA démographie au centre 15 du Samu Appel à candidatures 10. V iolences : la protection des femmes et des enfants TRIBUNE 30 ALEXANDRE FROMENTIN Président de l’Union nationale des étudiants en chirurgie dentaire (UNECD) #ONCD La Lettre n° 203 – Janvier-février 2023 Retrouver le journal en ligne Directeur de la publication : Philippe Pommarède. www.ordre-chirurgiens-dentistes.fr Ordre national des chirurgiens-dentistes – 22, rue Émile-Menier – BP 2016 – 75761 Paris Cedex 16 – Tél. : 01 44 34 78 80 – Fax : 01 47 04 36 55 – www.ordre-chirurgiens-dentistes.fr Conception, rédaction et réalisation : Texto Éditions Direction artistique : Ewa Roux-Biejat – Secrétariat de rédaction : Cécile Nielly Illustrations : Dume – Couv. : Ewa Roux-Biejat Restons Photos : Henri Perrot : p. 3. Shutterstock : pp. 8, 19, 32. DR : pp. 1, 4, 5, 15, 30. Daniel Mirisch : connectés pp. 6, 7, 9. ADF : p. 7. Geneviève Wagner : p. 10. Philippe Delacroix : pp. 16-18. Imprimerie : Graphiprint Management. www.ordre-chirurgiens-dentistes.fr Les articles sont publiés sous la seule responsabilité de leurs auteurs. Dépôt légal à parution. ISSN n° 2679-134X (imprimé), ISSN n° 2744–0753 (en ligne). 2 J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE
ÉDITO Le retour du droit Voilà un an, l’année 2022 débutait dans une dynamique de création de six nouvelles UFR d’odontologie. Une mesure sans précédent soutenue et accompagnée par l’Ordre. Mais 2022 s’ouvrait aussi, souvenons-nous, avec une ombre au tableau : le Conseil constitutionnel venait d’invalider une disposition législative visant à un meilleur encadrement des centres dentaires. Tout indique que 2023 sera l’année où ce dossier va enfin trouver une issue positive. Les députés ont adopté à l’unanimité en pre- mière lecture la proposition de loi portée par Mme Khattabi, présidente de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale. Il n’y a aucune raison de penser que ce processus n’ira pas à son terme. Dans ce texte, les députés ont repris certaines propositions de l’Ordre. Entre autres dispositions importantes de ce nouveau texte : le retour de l’autorisation administrative d’ouverture des centres ainsi qu’un rôle plus actif des conseils départementaux de l’Ordre. Concernant d’autres dossiers, des propositions du Conseil national qui visent à l’amélioration des soins bucco-dentaires sont enfin regardées avec intérêt. La création du statut d’assistant dentaire de niveau 2 est en bonne voie et devrait se concrétiser aux cours du premier trimestre 2023. Par ailleurs, l’enjeu de la prise en charge des actes de téléconsultation, porte d’entrée des soins dentaires dans les Ehpad, est enfin entendu par les décideurs, y compris et surtout par le ministre François Braun. D’autres chantiers nécessiteront une grande vigilance, tels que l’accrédita- tion périodique du praticien, dont l’articulation simple et aisée avec le DPC ne semble pour l’instant pas à l’ordre du jour. Du travail nous attend ! À toutes et à tous, nous souhaitons une excellente année 2023. Philippe Pommarède J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE 3
ACTU CENTRES DENTAIRES DÉVIANTS Centres dentaires : unanimité à l’Assemblée nationale 13 ans. Des années de dérives et de scandales pour arriver à ce constat : il est temps de réinstaurer l’agré- également au vert, le ministre François Braun ayant récemment apporté son sou- tien à l’adoption de cette loi (lire pp. 6-7). ment préalable des ARS à l’ouverture d’un Voilà ci-dessous les principales disposi- centre dentaire. C’est l’une des disposi- tions adoptées par les députés : tions phares, réclamée depuis 13 ans par Rétablissement de l’agrément préalable l’Ordre, qu’ont adoptées les députés le des ARS pour l’installation d’un centre de 30 novembre dernier. À l’unanimité, ils santé ; cet agrément est provisoire, validé ont voté en première lecture la proposi- par l’ARS au bout d’un an (assorti éven- tion de loi visant à mieux encadrer les tuellement d’une visite de conformité). centres de santé dentaire (et ophtalmolo- Création d’un comité de praticiens, res- gique) portée par Fadila Khattabi, prési- ponsable de la qualité et de la sécurité des dente de la commission des Affaires soins, et transmission de comptes rendus sociales de l’Assemblée nationale. Il reste réguliers à l’ARS. du chemin pour voir cette loi définitive- Transmission systématique des ment adoptée (elle doit passer par le Sénat diplômes et contrats de travail des prati- puis revenir à l’Assemblée nationale), mais ciens du centre à l’ARS et à l’Ordre dépar- tout indique que ce texte, sur lequel le temental. Conseil national a travaillé avec Interdiction, pour un dirigeant de Mme Khattabi, est en bonne voie. Du côté centre de santé, d’exercer une fonction du ministère de la Santé, les voyants sont dirigeante au sein de la structure gestion- 4 J A N V E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE
ACTU naire lorsque celui-ci a un intérêt direct ou indi- Création d’un registre national de fermeture des rect avec des entreprises privées délivrant des centres de santé afin de permettre aux ARS de prestations rémunérées à la structure gestion- vérifier les antécédents du gestionnaire. Aucun naire. agrément ne sera donné si une fermeture admi- Identification des praticiens par un numéro per- nistrative d’un précédent centre est relevée. sonnel et port obligatoire d’un badge nominatif. On pourra certes regretter que certains amende- Le gestionnaire du centre est, par ailleurs, tenu ments aient été rejetés comme celui sur les moyens d’afficher de manière visible l’identité de tous les donnés aux ARS afin d’assurer leurs missions, ou praticiens y exerçant. encore celui, suggéré par le Conseil national, por- Interdiction de demander aux patients le paie- tant sur l’interdiction faite à un praticien sanc- ment anticipé intégral des soins avant leur réali- tionné de gérer un centre dentaire. Mais s’agissant sation. de la sécurité des patients et de la santé publique, Transmission annuelle à l’ARS des comptes, pour le Conseil national, l’essentiel, dans l’immé- préalablement vérifiés par un commissaire aux diat, est que le législateur a enfin pris la mesure comptes, par le gestionnaire du centre de santé. des enjeux. UN REPORTAGE CHOC Surtraitements, surfacturations, soins fictifs, mutilations, performance économique : la diffusion de l’émission Cash Investigation, en pleine discussion parlementaire sur la proposition de loi encadrant les centres de santé, n’est pas passée inaperçue. Au menu : les fraudes à l’assurance maladie avec une place de choix donnée par les journalistes aux centres de santé dentaires. Deux « groupes » gérant des centres dentaires sont ciblés dans reportage. Logique financière, montages aux ce documentaire, Dentego et Cilaé Santé. ramifications transnationales : les éléments Les patients victimes témoignent devant les soulevés dans cette émission font en tout cas caméras de Cash Investigation de leur parcours écho aux affaires pénales qu’a déjà eues à traiter qui, au-delà des trajectoires personnelles l’institution ordinale (lire La Lettre n° 201). Au souvent poignantes, recoupent les propos moment où nous bouclons ce numéro, ajoutons d’autres patients déjà entendus dans le sillage que Cilaé Santé a publié un communiqué dans des scandales passés. Quant aux témoignages lequel il avance que les pratiques dénoncées des praticiens et secrétaires médicales ayant par le reportage sont « isolées, en totale exercé dans ces structures, sous couvert contradiction avec les valeurs portées par d’anonymat, ils sont à la fois glaçants et Cilaé Santé » et qu’elles se sont déroulées édifiants. Il appartiendra évidemment aux « à une période révolue (2019-2020) avant autorités judiciaires, si elles sont saisies, de l’arrivée en septembre 2021 de l’actuelle confirmer ou d’infirmer les faits exposés par ce équipe dirigeante ». Affaire à suivre. J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE 5
ACTU Congrès ADF : forte participation et échanges intenses F orte fréquentation cette année taire (UNECD), Alexandre Fromentin, sur le stand de l’Ordre au accompagné du bureau de l’UNECD, congrès de l’ADF. Les confrères et le président Philippe Pommarède ont ont pu obtenir des réponses à leurs pu échanger leurs points de vue sur les questions, notamment sur le contrat questions touchant aux études (lire aussi d’exercice le mieux adapté à leur situa- la Tribune d’Alexandre Fromentin en tion et leurs objectifs. On notera d’ail- p. 30). Sur les grandes questions comme leurs que beaucoup d’étudiants de 5e et la réforme de la R3C et l’éventuelle créa- de 6e année, et en particulier ceux qui tion de nouvelles spécialités ou encore sont dans une logique d’installation, l’ouverture des cinq UFR (bientôt six ont également sollicité les conseillers avec Amiens en 2023), les positions des nationaux et les juristes. Lieu d’instal- étudiants et de l’Ordre sont similaires. lation, démographie, statut juridique : Le président, Philippe Pommarède, a ils ont pu trouver sur notre stand, non également pu échanger avec le conseil pas tant des réponses toutes faites que national professionnel (CNP) des les bonnes questions à se poser. chirurgiens-dentistes, et notamment Toujours à propos des étudiants, le avec son président, Jacques Wemaere. nouveau président de l’Union natio- Il n’a pas été question que du dévelop- nale des étudiants en chirurgie den- pement professionnel continu (DPC) 6 J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE
ACTU puisque les CNP sont parties au dispo- sitif de la certification périodique, dont les contours restent encore aujourd’hui, hélas, assez flous. Il faut également noter qu’en ouverture de la journée nationale d’instruction organisée par la Fédération nationale des chirurgiens-dentistes de réserve (FNCDR), et sur l’invitation de son président, Jean-Pierre Fogel, Philippe Pommarède a pu présenter l’actualité (très dense) de la profession dentaire et les positions du Conseil national. Enfin et peut-être surtout, on ne man- quera pas de mentionner la soirée inau- gurale du congrès de l’ADF, au cours de laquelle le ministre de la Santé, François Braun, a rendu un hommage appuyé au Conseil national et à son président (lire l’encadré ci-contre). L’HOMMAGE APPUYÉ DU MINISTRE FRANÇOIS BRAUN Lors de la soirée inaugurale du congrès de l’ADF le 22 novembre dernier, le ministre de la Santé, François Braun, a déclaré que le gouvernement soutiendrait les propositions de loi visant à un meilleur contrôle des centres dentaires et à la création d’un statut d’assistant dentaire de niveau 2. Respectivement portées par les députées Fadila Khattabi et Stéphanie Rist, ces deux textes ont fait (et font) l’objet de discussions avec le Conseil national de l’Ordre, dont beaucoup de propositions ont été retenues. On notera que, lors de son discours, le ministre de la Santé a aussi évoqué le développement de la télémédecine bucco-dentaire. Le président du Conseil national a su le convaincre, a expliqué le ministre, que la téléconsultation constitue un levier de la santé bucco-dentaire, entre autres, pour les résidents des Ehpad et des personnes en situation de handicap. Il a aussi relevé le rôle moteur et régulateur du président du Conseil national lors des travaux du Clio Santé (réunion de tous les Ordres de santé) qui a présenté des propositions concrètes visant à améliorer l’accès aux soins des Français dans les territoires. Enfin, le ministre de la Santé a conclu en soulignant qu’il n’oubliait pas qu’il était aussi le ministre de la prévention. Ainsi, s’agissant de la prévention bucco-dentaire auprès Le président du Conseil national, Philippe des enfants, il a fait état d’un rapprochement entre son Pommarède, et le président de la Fédération ministère et celui de l’Éducation nationale pour travailler nationale des chirurgiens-dentistes de sur des propositions concrètes. réserve (FNCDR), Jean-Pierre Fogel. J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE 7
ACTU CFAO : quelle réglementation ? L es praticiens possédant leur propre laboratoire de pro- thèses au cabinet dentaire ainsi que ceux recourant à la CFAO sont-ils des « fabricants » et, à ce titre, doivent-ils se conformer à la réglementation européenne s’ap- pliquant aux prothésistes ? Cette question était le sujet central d’une réunion entre le Conseil national, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) et la Direc- tion générale de la santé (DGS). Pour les autorités sanitaires, la ré- ponse est oui, la réglementation sur les dispositifs médicaux sur mesure (DMSM) s’applique aux labora- toires « intégrés » et à la CFAO. Le Conseil national a pris acte de cette position des autorités sanitaires. Il invite les praticiens concernés à en faire de même. LA DISPARITION Pour autant, des questions importantes restent en suspens, qu’il appartiendra DE PIERRE ABAFOUR aux autorités de trancher. En effet, la réglementation ne s’applique pas aux Président du conseil départemental de dispositifs réalisés « in-house » par les la Meuse de 1984 à 2008, membre de la « établissements de santé », c’est-à-dire section disciplinaire du conseil régional fabriqués et utilisés à l’intérieur de ces de 2007 à 2022, Pierre Abafour est décédé structures. Question : un cabinet den- le 11 novembre dernier. Installé en libéral taire est-il un établissement de santé au à Bar-le-Duc, très engagé au service sens de la réglementation européenne ? de la profession, il était connu pour sa Cette interrogation a une incidence bienveillance mais aussi pour sa rigueur concrète importante non seulement pour les cabinets dentaires, mais aussi s’agissant de l’éthique et la déontologie. pour d’autres professions médicales. À son épouse, à ses trois enfants et Dans l’attente de réponses plus for- ses petits-enfants, le Conseil national melles et définitives des autorités sa- et le conseil départemental de la nitaires, le Conseil national invite les praticiens fabricant eux-mêmes leurs Meuse adressent leurs plus sincères dispositifs médicaux sur mesure à se condoléances. conformer strictement à la réglementa- tion européenne. 8 J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE
ACTU Réunion des départements à faible démographie E n novembre dernier, le président, Philippe Pom- marède, et les membres du bureau du Conseil national ont reçu les présidents des dépar- tements à faible démographie (de 34 à 196 chirurgiens-dentistes inscrits). L’objectif : assurer l’unité de l’institution ordinale et permettre une circulation de l’information entre les différents échelons de l’Ordre. Partage des responsabilités Philippe Pommarède a procédé à un tour d’horizon de l’actualité et des grands dossiers (les centres de santé dentaire et le statut d’as- sistant dentaire de niveau 2, entre Chambre disciplinaire nationale sur l’exercice multiple et les déro- autres sujets). Les secrétaires (l’instance d’appel des juridictions gations et a abordé la question des généraux, Catherine Eray-Declo- de première instance, situées au associés minoritaires dans les quement et Daniel Mirisch, ont niveau régional) est intervenu sur Selarl. ensuite abordé l’organisation et la les conciliations (une fonction Enfin, Marie-Anne Baudoui Mau- gestion des conseils départemen- essentielle des conseils départe- rel vice-présidente du Conseil taux. Ils ont insisté sur l’implica- mentaux) et a rappelé les préroga- national et présidente de la forma- tion de tous les élus, y compris tives des conseils départementaux tion restreinte de ce même les suppléants, avec un principe s’agissant de l’association à une conseil, a rappelé, précisément, de partage des responsabilités. plainte ou encore de leur possibi- les prérogatives des conseils Avec Geneviève Wagner, vice- lité de faire appel de décisions. départementaux sur ce sujet de la présidente, ils ont ensuite pré- Luc Peyrat, trésorier, a fait un formation restreinte. Les débats senté le vade-mecum ordinal, point sur le nouveau système de ont ensuite porté sur les centres un outil de consultation numé- répartition financière qui permet déviants, notamment ceux qui rique à l’usage des élus, donnant aux départements à faible démo- s’installent dans des zones com- des réponses immédiates aux graphie de bénéficier d’une aug- merciales, les questions pratiques interrogations les plus courantes. mentation de leurs ressources. sur la gestion au quotidien des Philippe Ingall-Montagnier, Estelle Genon, vice-présidente en conseils départementaux, et la conseiller d’État et président de la charge des contrats, a fait un point démographie. J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE 9
ACTU Violences : la protection des femmes et des enfants U n million de professionnels formés à la lutte contre les violences faites aux femmes : c’est le bilan que dresse la Mission interministérielle pour la protection des femmes (Miprof) dix ans après sa création. Un résul- tat loin de suffire à endiguer ce phénomène. Comme l’a rappelé Isabelle Lonvis-Rome, ministre déléguée chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, pour la seule année 2021, on recense la mort de 122 femmes victimes de violences conjugales. Auxquelles il faut ajouter 12 décès d’enfants, associés à ces violences. Et c’était bien là tout l’enjeu de ces ren- contres de la Miprof du 22 no- vembre dernier : les répercussions des violences conjugales sur les en- Le coup de crayon matière de formation à la prévention de Geneviève Wagner, fants. À cet égard, l’intervention du et à l’accompagnement des femmes vice-présidente du juge Édouard Durand sur l’impact victimes de violences et est acces- Conseil national, lors des des violences au sein du couple sur rencontres de la Miprof. sible en un clic (lien ci-dessous). les enfants a donné le ton de ces On reconnaît la ministre Deuxième axe de travail : la forma- rencontres auxquelles participait Isabelle Lonvis-Rome tion des « référents violence » des Geneviève Wagner, vice-prési- ou encore le magistrat conseils départementaux. Ainsi, le dente du Conseil national. Édouard Durand. 15 décembre dernier s’est tenue au ministère de la Santé, sous l’égide Formation des praticiens de la Miprof, une journée de travail et des référents violences avec, entre autres, des interventions Le Conseil national de l’Ordre est sur le repérage des violences au sein particulièrement impliqué sur cette du couple, la rédaction du certificat question avec un double axe de tra- médical (sujet présenté par les re- vail : la formation des praticiens et présentants du Conseil national) ou celle des « référents violence » au encore l’intervention des différents sein des conseils départementaux. acteurs dans l’accompagnement des Sur le premier point, une forma- victimes. tion gratuite en e-learning est mise à la disposition des praticiens. Elle Formation e-learning pour les praticiens : permet aux chirurgiens-dentistes https://formation.ordre-chirurgiens-dentistes.fr/ de satisfaire à leurs obligations en 10 J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE
FOCUS EUROPE La France, terre FOCUS d’accueil des praticiens à diplôme UE 19,5 % Le chiffre est sans appel : la France est devenue, entre 2018 et 2022, le pays QUID DES « EXPORTATEURS » DE DIPLÔMES ? de l’Union européenne accueillant Mais, dans l’autre sens, quid des le plus de praticiens à diplôme non pays « exportateurs » de diplômes ? national. Elle passe devant l’Italie, On sait en effet que la question de la qui compte environ 50 000 praticiens qualité de l’enseignement théorique en exercice, et la Belgique (10 400 et pratique reste une question pen- praticiens). La présentation de ces dante. La libre circulation des profes- données, le 2 décembre dernier, a sionnels suppose la confiance. constitué un des moments forts de Il faut ici relever l’intervention de la réunion des régulateurs dentaires Miguel Pavão, président, et Maria européens, réunis au sein de la Fed- João Ponces, membre de l’Ordre des car, dont la France assure le secré- « médecins-dentistes » du Portugal, tariat permanent avec Marie-Anne lors de la réunion du 2 décembre. Le Baudoui Maurel, vice-présidente du Portugal compte sept structures pri- Conseil national. vées et publiques formant des chirur- giens-dentistes, et l’Ordre portugais RÉPONSE FRANÇAISE a entrepris une étude sur la qualité de C’est d’ailleurs à l’initiative de Ma- l’enseignement dispensé. Les résul- rie-Anne Baudoui Maurel que cette tats de son enquête menée pendant étude a été conduite, reposant sur les un an auprès de 284 praticiens (la données des membres de la Fedcar moitié des primo-inscrits nationaux) issues des statistiques officielles na- ayant terminé leur formation en 2021 tionales. Selon les résultats de cette et s’étant inscrits au tableau portu- même étude (voir les graphiques gais entre août 2021 et juillet 2022 p. 12), les principaux pays « exporta- sont à cet égard intéressants. teurs » de diplômés sont la Rouma- nie, l’Espagne et le Portugal. Dans PRIMO-INSCRITS MAL À L’AISE une moindre mesure, la Pologne et Sur la base d’une centaine de ques- l’Allemagne figurent également dans tions, il apparaît que 38,7 % des ré- ce classement. pondants déclarent que l’enseigne- Dans ce contexte, la récente créa- ment « préclinique » ne leur permet tion des six nouvelles UFR en France de passer à l’application clinique prend tout son sens, l’enjeu étant de avec suffisamment de confiance « ré-internaliser » la formation ini- que dans certaines disciplines. Et tiale des chirurgiens-dentistes dans surtout, 14,1 % n’ont bénéficié d’au- notre pays avec une augmentation cun parcours de formation préa- significative du nombre de places lable à cette application clinique. ouvertes aux étudiants. Dans le cas de la formation cli- J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE 11
FOCUS EUROPE nique proprement dite, un quart de ces néo-inscrits déclarent ne pas avoir bénéficié Les pays « exportateurs » d’un enseignement les y préparant suffisam- de diplômés ment. Au total, 23 % contre 77 % de ces jeunes praticiens estiment ne pas être à l’aise sur le marché du travail. Jouant la carte de la trans- parence et, surtout, de la réforme, l’Ordre 22,6% portugais a présenté les résultats de son étude très détaillée aux élèves et aux instituts de 31,2% formation. Pour Miguel Pavão et Maria João Ponces, « l’impréparation » ressentie par les jeunes 21,4% chirurgiens-dentistes est claire, « causant un 4,8% énorme inconfort et insécurité » dans l’exer- 6,8% cice autonome de la profession. L’une des 13,3% plaintes récurrentes émises par ces jeunes praticiens étant que le temps de contact dans de nombreuses unités d’enseignement soit in- Roumanie Espagne férieur à celui annoncé dans les plans d’étude. Portugal Allemagne Humblement, des participants de la Fedcar Pologne Ensemble des autres pays ont souligné combien ce genre d’étude natio- nale serait aussi utile dans leur juridiction. Il n’existe pas aujourd’hui pour l’UE d’évalua- Les pays « importateurs » tion harmonisée de la qualité de la formation de diplômés QUID DU CONTRÔLE DES DIPLÔMES HORS UE ? 19,5% Lors de la réunion du 2 décembre, les membres 28,0% de la Fedcar ont abordé la question des diplômes obtenus hors Union européenne. Les procédures de reconnaissance de ces diplômes 18,1% hors UE sont très inégales d’un pays à l’autre. 7,1% Ainsi, certains Ordres comme ceux de la Croatie ou de la Tchéquie regrettent la faiblesse des 11,4% dispositifs de contrôle dans leur pays, quand 16,0% d’autres régulateurs, tels la Belgique ou les Pays-Bas, imposent des tests de connaissance puis des stages d’immersion. France Italie À la demande des confrères de la Fedcar et Belgique Suisse de Marie-Anne Baudoui Maurel, la Fedcar Norvège Ensemble des autres pays va travailler à une déclaration commune sur cette question. Pour la Fedcar en effet, cette reconnaissance des diplômes hors UE doit être au moins égale, sinon plus, aux dentaire (lire l’article « Accréditation des exigences de formation prévues par la directive études » p. 14). Mais la démarche de l’Ordre sur la reconnaissance des qualifications portugais est de travailler désormais avec professionnelles au sein de l’UE. les autorités en charge du contrôle de l’ensei- gnement supérieur, qui semblent avoir pris la mesure du problème. 12 J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE
FOCUS EUROPE Du financement de salons de coiffure… à celui de cabinets dentaires L ’un des grands sujets abordés le 2 décembre dernier par les régulateurs dentaires européens, QUEL ENCADREMENT DES CHAÎNES DENTAIRES ? selon les ordres, pas suffisant (par exemple en Espagne ou en Au Royaume-Uni, la compagnie Italie). Après une enquête menée réunis au sein de la Fedcar, a été My dentist, la plus importante au sein de la Fedcar à l’initiative la question des chaînes dentaires. du dernier recensement en date du Conseil national de l’Ordre Dans l’espace économique euro- sur la question réalisé en 2020, français, il apparaît que la Nor- péen, il y a indéniablement une compte 600 cabinets. En Suède, vège et le Danemark ont mis en tendance à la hausse du déve- le Praktikertjänst (en suédois, place le contrôle le plus effectif. Il loppement de ces chaînes. Les le « service des praticiens ») est comprend la désignation obliga- financeurs de l’une d’entre elles, devenu le plus grand fournisseur toire d’un directeur de la qualité d’ailleurs, étaient connus jusqu’à privé de soins dentaires en 2012 des soins, responsable devant le récemment dans leur pays pour avec 1 170 employés (praticiens régulateur, et, en cas de pratiques une chaîne de… salons de coif- et assistants dentaires) (1). En fautives, la sanction du retrait de fure. Ils viennent de diversifier Espagne, on est passé de 5 à 10 % la licence d’exercice. leur activité en entrant dans le de parts de marché entre 2015 « marché » des soins dentaires. et 2018 (2). (1) « Oral health care in Europe : Financing, Du point de vue ordinal, la access and provision », European Observa- PROGRESSION CONTINUE tory of Health, June 2022. DES CHAÎNES DENTAIRES grande question est celle de (2) KPMG, « The dental chain opportunity Au-delà de l’anecdote, la mon- l’encadrement et du contrôle de II - Value creation beyond a consolidation tée en puissance des chaînes ces compagnies. Dans certains strategy - Realizing value series » May dentaires concerne plusieurs pays, le contrôle existant n’est, 2020. pays représentés dans la Fed- car : la Belgique, le Danemark, l’Espagne, l’Italie, la Norvège Évolution des parts de marché et le Royaume-Uni. Dans ces des chaînes dentaires pays, cette présence de chaînes dentaires ne donne certes pas lieu à un raz-de-marée mais tend à s’affirmer progressi- vement. Lorsque l’on regarde l’étude de la société KPMG (voir le graphique ci-contre), la part de marché des chaînes dentaires connaît une progres- sion indéniablement continue, le cas le plus extrême étant celui du Royaume-Uni (de 10 % en 2015 à 20 % en 2018). Les quelques chiffres figurant dans le tableau ci-contre, donnent une idée intéressante sur ces nouveaux acteurs. J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE 13
FOCUS EUROPE Accréditation des études : avancer vite sans les pouvoirs publics C ’est une grande première dans notre discipline dentaire au niveau euro- péen. Les enseignants européens se sont Un tel programme permettrait d’aller plus loin que les demandes minimales de la directive sur les qualifications engagés à « développer un programme professionnelles. Pour exister, ce pro- d’amélioration de la qualité » pour les éta- gramme n’a besoin d’aucune autorisa- blissements et universités dentaires euro- tion des pouvoirs publics. péennes, qu’ils soient publics ou privés. Toujours dans le domaine de l’ensei- C’est ce qu’a annoncé le professeur Pål gnement, mais côté étudiants, et indé- Barkvoll (Oslo), président de l’ADEE, lors pendamment de la question de l’accré- de la réunion de la Fedcar du 2 décembre. ditation, il faut relever que Charlotte Rappelons que l’ADEE représente 145 des Carter, vice-présidente de l’EDSA 200 structures de formation dentaire re- (association dentaire européenne des censées dans l’Union européenne. Parmi étudiants en chirurgie dentaire) a sou- ces 145 établissements, les UFR françaises ligné la difficulté pour les étudiants en odontologie. européens de rejoindre le programme d’échange Erasmus+. UNE INITIATIVE TRÈS FORTE Il s’agit d’une initiative très forte. Si ce pro- gramme devait être appliqué, ce que tous les régulateurs dentaires et les enseignants ESPACE EUROPÉEN DONNÉES DE SANTÉ souhaitent, il se rapprocherait de ce qui a Le Conseil national de l’Ordre français cours dans d’autres secteurs, comme celui travaille en priorité avec les autorités des vétérinaires. Il s’agit d’un cahier des sanitaires françaises sur la question charges permettant d’accréditer (ou non) du futur « espace européen des données les établissements d’enseignement. Chez de santé ». Les questions, notamment celles les vétérinaires, historiquement, ce cahier liées au secret médical, à la protection des charges a été conçu et validé par les ac- des données et à leur exploitation, sont teurs de la profession (enseignants, profes- extrêmement sensibles et le Conseil national sionnels et régulateurs). Il porte sur la qua- est (et sera) très vigilant. Au niveau européen, lité de la formation dispensée dans toutes les membres de la Fedcar expriment la les écoles vétérinaires de l’UE. même position depuis que, en mai 2022, la Commission européenne a proposé ce ALLER PLUS LOIN QUE L’UE règlement créant l’espace européen des Lors de la réunion de la Fedcar, les données de santé. Théoriquement il est enseignants ont posé ainsi les objec- attendu pour 2025. Mais de nombreux tifs portés conjointement par la Fed- défis sont à résoudre, techniques d’abord car et l’ADEE : « En réponse à une de- (standardisation des dossiers médicaux et mande croissante des [établissements] des prescriptions électroniques pour dentaires européens, l’ADEE a pris 27 pays), financiers ensuite (digitalisation conscience de la nécessité de dévelop- des services) et, enfin et peut-être surtout, per un programme d’amélioration de éthiques (consentement du patient, la qualité qui pourrait être appliqué de secret professionnel lors de l’usage manière significative et utile par les secondaire des données). Affaire à suivre. [établissements] dentaires européens ». 14 J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE
FOCUS EUROPE Formation minimale : lettre à Thierry Breton L e texte d’un courrier commun des régulateurs de la Fedcar et des ensei- gnants de l’Association européenne de l’enseignement dentaire (ADEE) à Thierry Breton, commissaire européen du marché intérieur, a été validé lors de la réunion de la Fedcar le 2 décembre dernier. Signé par le président de la Fedcar, Massimo Fer- rero (Italie) et par la secrétaire générale de la Fedcar, Marie-Anne Baudoui Maurel (France), ce courrier, auquel s’est associé le président de l’ADEE, le Pr Pål Barkvoll (Norvège), demande à la Commission eu- ropéenne qu’un calendrier de travail soit enfin fixé pour mettre à jour la formation minimale. Tel qu’inscrit dans les textes, le programme de formation en odontologie date de 1978. Autant dire le précambrien quand on regarde les évolutions thérapeutiques et techniques dans notre discipline depuis la fin des années 1970. Certes, début 2022, une étude préparatoire à des recomman- dations de mise à jour de la formation a été publiée. Mais depuis, plus rien. Aucun calendrier fixant les étapes pour passer des recommandations à un acte législatif n’a été publié. Dans leur courrier, la Fedcar et l’ADEE rap- pellent, entre autres, que les « disparités de formation sont connues. La formation cli- nique, déterminante pour le patient comme pour l’étudiant, est inégale entre les pays. En outre, l’approche actuelle [...] basée sim- Les membres de la Fedcar lors de leur réunion annuelle au plement sur des sujets de programme est Conseil national, le 2 décembre dernier (certains membres, dépassée et ne tient compte ni des avancées comme la Belgique ou le Luxembourg, participant aux considérables de la pédagogie de l’éduca- échanges en distanciel). tion ni de l’évolution des programmes des de la santé restera à notre sens un vœu dernières décennies. La mise à jour de la pieux si les professionnels de santé circu- directive ne résoudra pas d’un coup ces lant dans le marché intérieur ne bénéficient problèmes mais elle est une étape incon- pas d’un minimum de formation théorique, tournable dont le retard, sans explication, pratique et, insistons-nous, clinique qui étonne. » soit commun à tous les pays et conforme La Fedcar et l’ADEE concluent : « L’Europe aux évolutions du XXIe siècle. » J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE 15
À Melun, TERRITOIRE des chirurgiens-dentistes au centre 15 du Samu Depuis avril 2022, En Seine-et-Marne, des chirurgiens- dentistes de la Seine- le dispositif expérimental et-Marne sont intégrés de régulation des urgences dans le centre 15 Samu, au centre dentaires s’est mis en place hospitalier de Melun via une permanence pour la régulation des urgences dentaires au centre opérationnel les dimanches et jours du Samu. fériés. 16 J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE
ÎLE-DE-FRANCE E n ce dimanche matin de novembre, le hall d’accueil principal du Santépôle de LE MOT DU D r FRANÇOIS DOLVECK, Melun est calme. En revanche, dans les entrailles du vaste centre hospitalier, médecin chef du SAMU 77 la salle de régulation du Samu 77 est déjà en pleine activité. Une douzaine Cette nouvelle offre de soins apporte une valeur de personnes sont au travail devant ajoutée importante qui, de toute évidence, modifie le leurs écrans d’ordinateur. Il y a là des traitement des dossiers dentaires. L’équipe du SAMU assistants de régulation médicale (ARM), qui prennent les appels arri- n’a pas forcément la connaissance des réseaux et vant sur le 15 et effectuent un premier se trouve parfois en difficulté pour traiter ces appels. tri, des médecins régulateurs hospita- Avec un chirurgien-dentiste, nous sommes sûrs liers, qui gèrent les dossiers relevant d’apporter les bons conseils, de proposer les bons d’une prise en charge hospitalière, et circuits et d’avoir un calendrier de prise en charge. enfin, des médecins praticiens libé- Cela soulage surtout le patient. Il a un avis spécialisé raux. Parmi ces derniers, le D r Marianne Petit, chirurgien-dentiste plus rapidement avec, derrière, une organisation dans le sud du département, a pris son permettant de faciliter la prise en charge. » poste à 8 heures. Depuis, elle n’a guère eu le temps de souffler. Il est 10 h 30, elle a déjà traité le cas d’une bonne vingtaine de patients orientés sur son santé (ARS) d’Île-de-France, cette poste par les ARM pour des problèmes expérimentation, d’une durée de deux dentaires. ans, a pour objectif de tester la perti- Comme d’autres confrères du départe- nence d’un tel dispositif pour structu- ment, le D r Petit participe, depuis Marianne Petit rer l’offre de soins dentaires d’urgence. avril 2022, à une expérimentation de fait partie des « La genèse de cette initiative remonte à régulation des urgences dentaires via le 17 chirurgiens- la période du Covid. Nos cabinets ont été dentistes du centre 15 les dimanches et jours fériés. fermés durant deux mois, et la profession département Financée par l’Agence régionale de s’est organisée pour mettre en place un assurant la régulation les service d’urgence », témoigne le Dr Yves dimanches et Vernet, président du conseil départe- jours fériés au mental de l’Ordre. centre 15 Samu En pratique, aujourd’hui, 17 régulateurs de Melun. chirurgiens-dentistes se relaient pour assurer ces permanences dans le centre opérationnel du Samu 77. « Notre souhait était de recruter des pra- ticiens avec au moins cinq ans d’expé- rience. J’ai été agréablement surpris par le nombre de candidats », poursuit Yves Vernet. Sur l’écran de l’ordinateur du Dr Marianne Petit, apparaît un numéro de téléphone. Elle coiffe son casque-micro et prend l’appel. « Bonjour, je suis le régu- lateur chirurgien-dentiste, explique-t- elle. Que puis-je faire pour vous ? » J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE 17
ÎLE-DE-FRANCE du département, le Dr Petit va adresser le patient au praticien le plus proche de son domicile. « Suivant ce qu’il a été convenu avec les praticiens de garde préalablement contactés, je préviens le chirurgien-dentiste concerné par SMS et gère son carnet de rendez-vous. J’estime quel sera le temps de trajet du patient et ainsi je programme le rendez-vous. C’est un avantage pour le praticien travaillant seul. Il n’a pas à gérer les appels, ni à renseigner sur l’itinéraire à suivre pour rejoindre le cabinet. D’autres praticiens préfèrent que je transmette le numéro du cabinet, le patient prend alors directement rendez-vous auprès de celui-ci », détaille le Dr Marianne Petit. À l’aide d’une carte pour situer le lieu de résidence du patient Il est presque midi et la fréquence des nécessitant un acte d’urgence, Marianne Petit ventile les appels diminue. Le Dr Marianne Petit consultations entre les deux chirurgiens-dentistes de garde ce noircit les dernières pages de son cahier jour-là, l’un au nord, l’autre au sud du département. à spirale où elle note le résumé de ses interventions et prépare le bilan de sa matinée. Sa permanence s’achève à Le ton est calme, rassurant, profes- 14 heures. sionnel. Au bout du fil, un jeune homme dont l’amie souffre d’une douleur aiguë. Les questions se succèdent. Où réside le patient ? Depuis combien de temps souffre-t-il et avec quelle intensité ? À quelle dent ? Tout indique qu’il s’agit d’une pulpite, l’un des cas les plus fré- quents parmi les appels reçus par les Yves Vernet, régulateurs chirurgiens-dentistes. Un président de geste technique est nécessaire. l’Ordre de la « Les appels peuvent porter sur des situa- Seine-et-Marne et tions très variées. Le chirurgien-dentiste cheville ouvrière est là pour faire un tri, rassurer le patient du déploiement et sa famille, repérer l’urgence relative de ce dispositif qui peut faire l’objet d’un rendez-vous expérimental différé, de l’urgence nécessitant l’inter- programmé vention rapide d’un confrère de garde ou sur deux ans et la délivrance d’une ordonnance. Dans financé par l’ARS. 60 % des cas, il faut en effet recourir à un praticien de garde », commente le D r Yves Vernet. Deux chirurgiens-dentistes sont de garde, l’un au sud, l’autre au nord de la Seine-et-Marne. Penchée sur une carte 18 J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE
PRATIQUE Formation restreinte : PRATIQUE un dispositif pour agir vite Q ue se cache-t-il derrière la mystérieuse formule « formation restreinte », peu connue des praticiens ? Ce dispositif, très encadré par 2 toute demande de suspension du droit d’exercer en cas de suspicion d’état pathologique ou d’infirmité rendant dangereux l’exercice de la profession ; les textes, a été mis en place pour 3 toute demande de suspension du droit répondre dans des délais resserrés d’exercer en cas d’insuffisance (généralement deux mois) à trois professionnelle d’un praticien, pouvant situations d’urgence : aboutir à une suspension totale ou 1 tout recours lié à une inscription (ou partielle d’exercer. un refus d’inscription) au tableau de Pour d’évidentes raisons notamment de l’Ordre, quel qu’en soit le motif (par sécurité des soins et de protection de la exemple, la conformité des diplômes santé publique, l’Ordre a le devoir d’agir nécessaires à l’inscription, la maîtrise de vite. Le législateur a donc mis en place ces la langue, les conditions d’honneur et de procédures, avec des délais contraints, moralité, l’état pathologique ou afin que les décisions rendues nécessaires l’insuffisance professionnelle, etc.) ; par la situation exposée soient prises J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE 19
PRATIQUE rapidement, mais de façon sécurisée. Sise en individuelle. Ajoutons d’ailleurs à cela que le première instance au sein de chaque conseil praticien peut saisir le Conseil d’État pour régional de l’Ordre, la formation contester les décisions prises par le Conseil restreinte est composée, selon la taille du national sur appel des décisions prises par le conseil régional, de neuf ou huit membres conseil régional de l’ordre. élus en son sein. Elle siège en formation de En matière d’inscription au tableau, que ce cinq à trois membres. En appel, la formation soit après recours d’un praticien qui conteste restreinte du Conseil national, composée de un refus d’inscription, ou requête du Conseil neuf membres élus auxquels il faut ajouter le national qui conteste une décision conseiller d’État qui assiste le Conseil d’inscription qu’il estime non fondée, national, siège en formation de cinq l’examen des documents fournis par les membres. parties, et notamment le candidat à C’est le pouvoir administratif de l’Ordre qui l’inscription, peut se transformer en véritable est ici mobilisé : il ne s’agit donc pas d’une travail d’enquête et de recoupement, juridiction. Ainsi, la décision éventuelle notamment s’agissant de la vérification des d’une suspension d’exercice qui sera diplômes délivrés hors de France. Les prise n’est pas une sanction cas de production par le « praticien » disciplinaire mais une mesure La décision d’une d’un faux diplôme existent. Enfin, les administrative de gestion du suspension affaires peuvent porter sur tableau. l’inscription au tableau de sociétés En pratique et en temps « normal », d’exercice est d’exercice, par exemple en cas de non- les décisions administratives sont conformité des statuts d’une société. prises par les conseils régionaux ou une mesure En ce qui concerne les demandes de le Conseil national lorsqu’ils siègent administrative, suspension d’exercice, la question de en formation plénière (lors des ses- l’expertise est centrale car elle est sions trimestrielles du Conseil elle n’est pas d’une grande aide à la décision de la national, par exemple). La forma- formation restreinte. Du reste, les tion restreinte peut, elle, être une sanction textes prévoient la possibilité d’une mobilisée à tout moment, dans le disciplinaire. expertise complémentaire, voire d’une respect des délais de convocation nouvelle expertise. Cela étant, il peut prévus par les textes. La formation res- arriver à une formation restreinte de ne pas treinte agit donc entre deux plénières du suivre l’avis de l’expertise. Citons un cas. Un Conseil, et par délégation du conseil régional conseil départemental saisit la formation ou du Conseil national. restreinte du conseil régional sur un cas de Bien sûr, les procédures sont extrêmement suspicion d’état pathologique. La formation encadrées et formalisées, qu’il s’agisse du res- restreinte du conseil régional suit l’expertise pect de délais très stricts, du rôle des rappor- du collège d’experts qui ne conclut pas à l’état teurs ou encore de la désignation du collège pathologique. Le conseil départemental fait de trois experts (un expert désigné par le pra- appel de cette décision devant la formation ticien, un par l’Ordre, le troisième étant dési- restreinte du Conseil national. Cette dernière gné par les deux premiers experts) chargés ne suit pas l’avis des experts. Elle a en effet à d’étudier les affaires relevant des cas numé- juger non pas de l’aptitude du praticien à ros 2 et 3 exposés ci-dessus (état pathologique évoluer « normalement » dans sa vie de tous ou infirmité, insuffisance professionnelle du les jours, mais de son aptitude à exercer notre praticien). profession sans mise en danger des patients. Nous n’entrerons pas ici dans le détail du La formation restreinte casse la décision. Elle mécanisme de ces procédures, dont l’un des suspend l’exercice du praticien pour six mois, principes est évidemment le respect rigoureux subordonnant sa reprise d’activité à une du contradictoire, comme pour toute décision nouvelle expertise... 20 J A N V I E R - F É V R I E R 2 0 2 3 # ONCD LA LETTRE
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