Le système bancaire italien : territoires, métiers et défis - HORIZONS BANCAIRES
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HORIZONS BANCAIRES NUMÉRO 340 - NOVEMBRE 2010 Le système bancaire italien : territoires, métiers et défis http://etudes-economiques.credit-agricole.com
HORIZONS BANCAIRES N U M É R O 3 4 0 – N O V E M B R E 2 0 1 0 Le système bancaire italien : territoires, métiers et défis ÉDITO ...................................................................................................................................................................................................................... 3 JEAN-PAUL CHIFFLET, directeur général, Crédit Agricole S.A. Les grandes tendances Les caractéristiques du système bancaire italien : évolution de l’activité et des performances ............................................................................................................................. 5 MARCELLO MESSORI, professeur, Université de Rome « Tor Vergata » La concentration du marché bancaire italien : évolutions et perspectives ................................ 11 ILARIA ROMAGNOLI, managing director, Head of FIG Italy, Rothschild Banques et antitrust : les spécificités italiennes ............................................................................................................. 20 SERGIO EREDE, associé fondateur, Bonelli Erede Pappalardo ET MASSIMO MEROLA, responsable du bureau de Bruxelles, Bonelli Erede Pappalardo ; professeur, Collège d’Europe Le marché bancaire italien et l’évolution réglementaire de Bâle 3 ......................................................... 26 ANDREA FERRETTI, executive director, Ernst & Young ET GIUSEPPE QUAGLIA, partner, Ernst & Young Banques et territoires Les relations entre banques et territoires après la Grande Crise de 2007-2009 ................ 38 GIOVANNI FERRI, professeur, Université de Bari Le rôle des Banques de Territoire dans le système bancaire italien .................................................... 46 GIAMPIERO MAIOLI, administrateur délégué et directeur général du Groupe Cariparma Friuladria Le rôle des fondations en tant qu’investisseurs institutionnels des banques ........................ 51 CARLO GABBI, président de la Fondation Cariparma Les problèmes de financement des PME et leur accès aux marchés étrangers ............... 55 GIAMMARCO BOCCIA, responsable corporate, Division nouveaux marchés, SACE Les métiers de la banque Le marché immobilier italien ....................................................................................................................................................................... 58 DANIELA PERCOCO, responsable du département immobilier, Nomisma ET LUCA DONDI, économiste, Nomisma ET GUALTIERO TAMBURINI, président, Assoimmobiliare La distribution bancaire en Italie : tendances actuelles, scénarios d’évolution et stratégies concurrentielles ................................................................................................. 65 VITTORIO RATTO, partner, Bain & Company, Milan ET ALESSANDRO GERALDI, manager, Bain & Company, Milan Le crédit à la consommation en Italie ............................................................................................................................................ 71 Trois questions à UMBERTO FILOTTO, secrétaire général, Assofin ; professeur, Université de Rome « Tor Vergata » La gestion d’actifs en Italie ........................................................................................................................................................................... 73 GINO GANDOLFI, professeur, Université de Parme ET GIACOMO NERI, partner, PricewaterhouseCoopers Le groupe Crédit Agricole en Italie ..................................................................................................................................................... 84 ARIBERTO FASSATI, directeur et membre du Comité exécutif du groupe Crédit Agricole S.A., président de Cariparma Service aux lecteurs ............................................................................................................................................................................................... 87
HORIZONS BANCAIRES N U M É R O 3 4 0 – N O V E M B R E 2 0 1 0 É D I T O R I A L JEAN-PAUL CHIFFLET D IRECTEUR G ÉNÉRAL , C RÉDIT A GRICOLE S.A. Le Crédit Agricole a fait, depuis longtemps, le choix de l’Italie comme son second marché domestique. Cette évolution a été consolidée depuis 2007 par l’acquisition de Cariparma et de Friuladria, par la création de partenariats puissants en crédit à la consommation avec des acteurs majeurs du monde économique italien, puis par l’intégration croissante du dispositif comprenant les métiers spécialisés du groupe déjà présents sur place. Plusieurs raisons expliquent ce choix stratégique. La proximité géographique, mais aussi culturelle et commerciale avec la France, est évidemment une condition première de réussite. L’Italie présente aussi une configuration unique, en zone Euro, de marché mature à fort potentiel bancaire, que ce soit en termes de déve- loppement et de sophistication des produits bancaires et d’assurance, ou de consolidation à venir. Un ancrage régional marqué, la proximité des banques avec leurs clientèles et le développement de relations durables, ainsi que le rôle spéci- fique des fondations rappellent enfin les valeurs mutualistes du Crédit Agricole. Aujourd’hui, le Crédit Agricole est le septième groupe bancaire italien et le premier groupe financier étranger dans la Péninsule. Des positions de leader ont été acquises dans des régions ciblées et dans les métiers de la banque de détail, des services financiers spécialisés, de la gestion d’actifs et des assurances, et de la ban- que de financement et d’investissement. Notre volonté est de continuer à nous développer au service de l’ensemble de nos clients. Nous voulons leur apporter, grâce à notre souci permanent de proximité et grâce aussi aux avantages d’un groupe de dimension mondiale, une qualité de service exemplaire et des solutions innovantes et adaptées à leurs besoins. L’extension de notre dispositif de banque de détail avec l’acquisition de Cassa di Risparmio della Spezia et de quatre-vingt-seize nouvelles agences va dans ce sens. Les hommes et les femmes du Crédit Agricole en Italie peuvent donc être fiers du développement et des résultats de leur Groupe dans le pays et revendiquer les enga- gements et les valeurs du Crédit Agricole. ◗ Ce numéro d’Horizons Bancaires est consacré à l’Italie. Une première partie rappelle les principales tendances du système bancaire de la péninsule. Les évolutions liées à la crise sont mises en évidence et une large place est attribuée à la prospective. La seconde partie aborde la thématique de l’ancrage territorial en identifiant ses fondements et en illustrant ses pratiques. Une troisième et dernière partie développe l’analyse de quelques questions d’actualité : solidité de l’immobilier résidentiel, spécificités de la distribution, de la gestion de l’épargne et du crédit à la consommation. 3
HORIZONS BANCAIRES N U M É R O 3 4 0 – N O V E M B R E 2 0 1 0 Les grandes tendances 4
HORIZONS BANCAIRES N U M É R O 3 4 0 – N O V E M B R E 2 0 1 0 Les caractéristiques du système bancaire italien : évolution de l’activité et des performances Même s’il a été relativement peu touché par la crise financière de 2007-2009, le système bancaire italien reste soumis à une forte pression en termes de rentabilité. Cet article en analyse les causes et propose des solutions structurelles pour y remédier. MARCELLO MESSORI Professeur, Université de Rome « Tor Vergata » Préambule ter de manière significative. Qui plus est, les prévi- Le secteur bancaire italien est, avec celui du Canada, sions les plus optimistes soulignent qu’au cours des celui qui a été le moins touché par la crise financière de prochaines années, l’amélioration de la rentabilité ban- 2007-2009 par comparaison avec les autres pays caire (appréciée par le ROE) sera graduelle en Italie et économiquement avancés. En Italie, aucun intermé- inférieure à celle des secteurs bancaires plus touchés diaire financier n’a dû recourir à des aides publiques par la crise. pour assurer son sauvetage, et seuls quatre groupes Apparemment contradictoires, ces faits trouvent une bancaires ont jugé opportun de renforcer leur propre interprétation cohérente à la lumière des nombreuses capitalisation au moyen d’émissions limitées d’instru- particularités qui continuent de caractériser le secteur ments hybrides souscrits par le ministère de l’Écono- bancaire italien, et qui sont l’un des legs des proces- mie (les « Tremonti bonds »). Enfin, un seul parmi les sus, par ailleurs positifs, de concentration et de réal- plus grands groupes bancaires a procédé à une reca- location des droits de propriété qui se sont déroulés pitalisation sur le marché. Et pourtant, au cours des entre le début des années 1990 et 2007. deux dernières années, le secteur bancaire italien a Nous rappellerons ci-après certaines de ces particu- enregistré une réduction drastique de sa rentabilité et larités : (i) la plus grande solidité manifestée face à la les groupes cotés ont vu les cours de leurs actions chu- crise financière s’explique par divers facteurs (par 왘 5
HORIZONS BANCAIRES N U M É R O 3 4 0 – N O V E M B R E 2 0 1 0 왘 exemple, une plus grande vigilance), mais surtout par mis de construire des rapports de longue durée la spécialisation des groupes bancaires italiens et des (accompagnés toutefois par des pratiques répandues banques italiennes dans l’activité retail et corporate tra- de multibancarité) avec les petites et moyennes entre- ditionnelle, ainsi que dans l’activité de corporate and prises, et de privilégier les produits administrés dans investment banking ; (ii) cette spécialisation implique que la gestion du patrimoine financier des ménages. Trois ces groupes et ces banques tirent une partie signifi- indicateurs le révèlent clairement : l’Italie est l’un des cative de leurs profits des financements aux entrepri- rares pays européens à avoir augmenté le nombre des ses, et surtout de la gestion du patrimoine financier des agences bancaires jusqu’à ces dernières années ménages, qui sont particulièrement vulnérables aux cri- (cf. Affinito et al. 2006) ; le poids de l’épargne admi- ses de l’économie réelle ; (iii) la crise récente a été si pro- nistrée par rapport à l’épargne gérée est très impor- fonde qu’elle a entraîné de fortes augmentations de l’a- tant en Italie (cf. Lusignani 2010) ; enfin, au seuil de la version au risque de la part des détenteurs de richesse. crise financière, tandis que les actifs du bilan des aut- Ce dernier point a imposé, par voie de conséquence, res grandes banques européennes et de diverses une révision des mécanismes d’allocation des patri- banques régionales non italiennes étaient dominés moines financiers des ménages. par des services financiers souvent exposés à un ris- que très élevé, les actifs des grands groupes bancai- Quelques particularités res italiens (y compris ceux d’envergure européenne) des banques italiennes se composaient pour une part prépondérante de ser- Le processus de concentration et de réallocation des vices traditionnels (cf. Pierobon 2009). droits de propriété qui a caractérisé le secteur bancaire En raison de cette spécialisation, le secteur bancaire ita- italien entre les années 1990 et 2007, a été le plus rapi- lien satisfaisait en 2007 aux exigences de fonds pro- de et le plus étendu de ceux qui ont été mis en œuvre pres réglementaires, mais présentait un coefficient de dans les grands pays européens pendant la même capitalisation inférieur à la moyenne européenne. Ici période. Il suffit, à ce propos, de considérer deux encore, cette situation est la résultante – au moins en indicateurs : partie – du processus de concentration : en effet, spé- • alors qu’au début des années 1990, le poids de la cialement entre le second semestre 1997 et l’année propriété publique dans le secteur bancaire frôlait les 2007, les concentrations se sont largement fondées sur 75 % en Italie, et dépassait donc de plus de 20 % celui des échanges d’actions qui n’ont pas renforcé les observé en Allemagne et de près de 40 % celui enre- fonds propres des nouveaux groupes. En outre, une gistré en France, la présence de l’État dans les banques partie significative des ressources supplémentaires, italiennes s’est trouvée pratiquement réduite à zéro au pourtant relativement limitées, qui ont été injectées début des années 2000 ; dans le secteur au cours des années 90 a servi à • alors qu’en 1990, le degré de concentration du financer des mesures de sauvetage. De fait, déjà pen- marché bancaire italien atteignait tout juste la moitié de dant la première phase de la crise financière (début celui de l’Union européenne, cet écart a été comblé à 2008), l’ensemble du secteur bancaire italien enregis- partir de 2005 (cf. par exemple : Messori 2002 et trait un ratio Tier 1 inférieur d’environ un demi pour cent 2007). De surcroît, ce processus de regroupement a à la valeur moyenne européenne. Cet écart s’est ensui- abouti à la construction de deux des plus grands te accentué, jusqu’à atteindre deux pour cent entre l’au- groupes bancaires européens (Unicredit et Intesa- tomne 2008 et le printemps 2009, au moment où les San Paolo), et d’un sous-ensemble de groupes de autres grands pays de l’Union européenne lançaient dimension nationale implantés dans les régions les plus des plans de recapitalisation publique en faveur de leurs « fortes » du pays. Ces transformations profondes intermédiaires financiers, y compris ceux qui étaient sol- n’ont cependant pas modifié l’atout majeur qui carac- vables (cf. Banque d’Italie 2009 et 2010). Ce n’est térise l’activité bancaire en Italie par comparaison qu’au cours des derniers trimestres que les banques avec d’autres pays : l’enracinement territorial qui a per- et groupes bancaires italiens ont augmenté leurs coef- 6
Les caractéristiques du système bancaire italien : évolution de l’activité et des performances M A R C E L L O M E S S O R I ficients de fonds propres pour les rapprocher de outre, il faut rappeler que, pendant la seconde moitié la moyenne européenne. Néanmoins, en termes de des années 1990, le ratio prêts/dépôts bancaires est levier financier, la vocation traditionnelle du secteur resté largement supérieur à 1 en Italie, et plus élevé que bancaire italien a plus que compensé sa moindre capi- le ratio moyen observé dans la zone euro et – à plus talisation : jusqu’en 2008, le taux moyen de leverage forte raison – aux États-Unis (cf. Messori 2009, pp. 81- du secteur bancaire italien a été inférieur à celui qui 82). À partir du début des années 2000, l’évolution de caractérisait les autres principaux pays de l’Union ce ratio en Italie a eu pour conséquence que les fonds européenne (cf. Draghi 2010 ; Sironi 2010). propres n’étaient plus suffisants pour compenser les écarts entre les postes traditionnels de l’actif et du pas- La rentabilité des banques italiennes sif des bilans bancaires. Par conséquent, toutes les Les considérations qui précèdent expliquent peut-être banques italiennes sont devenues débitrices nettes la solidité relative du secteur bancaire italien face à l’im- des marchés interbancaires internationaux. Enfin, l’on pact de la crise financière de 2007-2009. Cependant, doit rappeler que, renforçant leur précédente fonction elles ne suffisent pas à alimenter la réflexion sur l’évo- de réallocation de la richesse financière des ménages lution possible de ce secteur dans l’après-crise. À cet pour passer des titres de dette publique à des porte- effet, il est nécessaire de rappeler deux autres parti- feuilles plus diversifiés, les banques italiennes ont placé cularités : d’une part, la dynamique de la rentabilité du un volume massif d’obligations (plain vanilla et struc- secteur entre la fin des années 1990 et le début des turées) sur les marchés financiers nationaux. De plus, années 2000 ; d’autre part, le rôle connexe joué par l’in- en raison du faible poids des investisseurs institution- termédiation bancaire pour l’allocation de la richesse nels italiens (fonds de pension et produits d’assuran- financière des ménages italiens. ce de la « branche vie »), à la différence d’autres pays Après avoir surmonté la longue crise du milieu des européens, ces obligations ont été largement ven- années 1990, le secteur bancaire italien a enregistré dues sur le marché retail, c’est-à-dire intégrées dans entre 1998 et 2000 une forte croissance du ROE net les portefeuilles des ménages (cf. Banque d’Italie, pour (de 7,4 % à 11,6 %) et s’est donc rapproché de la pro- ces différentes années). fitabilité moyenne européenne. En dépit d’un contex- Si l’on ajoute que l’Italie affiche le ratio le plus élevé de te macroéconomique moins favorable, il a maintenu tous les plus grands pays d’Europe continentale entre entre 2001 et 2003 des valeurs de ROE comprises la richesse financière nette des ménages et le PIB (cf. entre 6,2 % et 8,8 %, et il a réalisé, entre 2004 et Banque d’Italie 2010, p. 167), les observations qui 2007, des ROE oscillant autour de 10 %, pour en arri- précèdent indiquent que la rentabilité du secteur ban- ver au seuil de 11,8 % en 2006 (cf. Banque d’Italie, pour caire italien s’est surtout maintenue par rapport à la ces différentes années). Ces données indiquent que, moyenne européenne grâce à la gestion et à l’admi- bien qu’il n’ait jamais atteint les niveaux maxima de la nistration de la richesse financière des ménages. C’est- rentabilité bancaire internationale, le secteur bancaire à-dire d’abord grâce à l’« épargne gérée », puis à italien s’est tout d’abord approché de la rentabilité l’« épargne administrée ». Tandis que les grands grou- moyenne des banques européennes, puis il s’est ali- pes européens et certaines banques régionales, spé- gné sur celle-ci. Dès lors se pose la question suivan- cialement allemandes, ont réagi à la baisse du rende- te : comment les banques italiennes ont-elles été en ment de leurs activités traditionnelles et ont ainsi état de combler cet écart de rentabilité tout en main- augmenté leur ROE grâce à l’expansion d’activités de tenant une spécialisation traditionnelle ? banque d’investissement lucratives mais risquées, le Pour répondre à cette question, il est nécessaire de rap- secteur bancaire italien a profité de son propre enra- peler que le processus de concentration qui s’est cinement territorial et de la faiblesse des investisseurs déroulé entre 1990 et 2007 a intensifié la concurren- institutionnels pour s’assurer le quasi-monopole de la ce bancaire dans le secteur des services aux entre- gestion et de l’administration de la richesse financière prises et a donc comprimé les marges d’intérêt. En des ménages, pour en tirer les revenus correspondants. 왘 7
HORIZONS BANCAIRES N U M É R O 3 4 0 – N O V E M B R E 2 0 1 0 왘 Cette situation a cependant entraîné une allocation condamneront à une phase de stagnation. Une situa- inefficiente de cette richesse. En voici la preuve : dans tion de ce type prolongerait la politique de taux d’in- les années 2000, avant l’éclatement de la crise finan- térêt bas, mais menacerait également la solvabilité cière en mai 2007, le rendement moyen d’un vaste des petites et moyennes entreprises et aggraverait le éventail d’obligations bancaires structurées ne dépas- chômage. Dans un tel contexte, les détenteurs de sait pas celui des titres de la dette publique italienne richesse trouveraient d’excellentes raisons de renfor- assortis d’une échéance analogue. Ceci signifie que ces cer leur aversion au risque, qui s’est déjà accrue pen- obligations ne généraient aucune prime au titre de dant la crise financière, et d’interrompre ainsi les pro- leur caractère plus risqué et de leur faible liquidité. cessus modérés de réallocation de leurs portefeuilles Pendant cette même période, le taux de croissance de vers des échéances plus longues. la richesse financière des ménages italiens a été infé- En ce qui concerne le secteur bancaire européen, rieur à celui de pays ayant une propension plus faible cette situation impliquerait une réduction des revenus à l’épargne. déjà peu élevés générés par les services traditionnels offerts aux entreprises, une multiplication des créances Les perspectives en retard ou en défaut de paiement, et une chute des des banques italiennes produits générés par la gestion du patrimoine financier Examinées ci-dessus, les particularités des des ménages, en raison de leur fuite vers la liquidité ou intermédiaires financiers italiens sauront-elles offrir, vers des investissements à court terme. De surcroît, les dans un avenir proche, des niveaux de performance banques européennes ayant moins de difficultés à satisfaisants, même s’ils demeurent inférieurs à ceux trouver de la liquidité privée, la BCE pourrait décider de d’avant crise ? Les données et les prévisions indi- poursuivre le processus graduel de stérilisation des quent que le secteur bancaire italien a subi avec retard politiques généreuses de « guichet ouvert » lancées l’impact de la crise, par rapport à d’autres systèmes pendant la crise financière, afin de se concentrer sur le bancaires, mais qu’il risque de retrouver des niveaux soutien à la demande de titres de dette souveraine. Cela satisfaisants de rentabilité avec un délai plus important. assécherait une source de gains faciles pour le secteur En effet, en dépit d’une chute significative, le ROE bancaire européen. Ce dernier aurait ainsi une incitation, moyen des banques italiennes s’est maintenu à une renforcée par le manque de réformes des règles et de valeur de 4,5% en 2008 avant de baisser à 3,6 % en la supervision européennes des marchés financiers, à 2009. Et on s’attend à ce que la rentabilité ne retrou- se concentrer de nouveau sur l’expansion des activités ve des valeurs proches de 5 % qu’en 2012 (cf. AFO d’investissement risquées qui ont soutenu la rentabilité 2010). jusqu’au milieu de l’année 2007, mais qui ont Ces prévisions ne sont guère surprenantes et semblent également été un facteur déterminant de la crise de même trop optimistes. Spécialement en Europe, le 2007-2009. contexte macroéconomique pour les prochaines En raison de sa spécialisation traditionnelle, le secteur années n’est pas encourageant. Il est plus que pro- bancaire italien serait particulièrement touché par une bable qu’en raison des freins à la croissance créés par évolution aussi négative du contexte macroécono- l’augmentation des dettes souveraines et du man- mique et de l’activité bancaire européenne. Qui plus que de relance de la consommation intérieure, les est, par rapport à la période antérieure à la crise, il pays de la zone euro comptent sur une croissance tirée pourrait rencontrer des difficultés accrues pour sau- par les exportations. Si la même stratégie est égale- vegarder des niveaux satisfaisants de performance à ment suivie par les États-Unis et par les pays émer- l’aide des revenus provenant de la gestion du patri- gents, la somme des parties ne pourra pas cor- moine financier des ménages. Depuis quelque temps, respondre au tout. Et les régions soumises à des la forte aversion au risque, qui a caractérisé les choix freins plus importants, comme la zone euro, ne pour- financiers des ménages italiens, a probablement faci- ront pas réaliser leurs objectifs de croissance et se lité le placement d’obligations bancaires (y compris 8
Les caractéristiques du système bancaire italien : évolution de l’activité et des performances M A R C E L L O M E S S O R I structurées) qui offrent des rendements minimum entreprises nationales (cf. Panetta 2004). Aujourd’hui, garantis à l’échéance. Pour preuve, et comme nous l’a- il paraît nécessaire de poursuivre les processus de vons déjà indiqué, les banques italiennes n’ont pas ren- réorganisation et d’amélioration des services retail contré de difficultés à placer ces produits à des condi- offerts aux ménages, sans reculer par rapport aux tions alignées sur celles des titres de dette publique progrès accomplis dans les services offerts aux entre- moins risqués. Combiné aux enseignements les plus prises. Le problème est qu’à la différence des années évidents de la crise financière, un renforcement 1990, le secteur bancaire italien ne peut plus compter supplémentaire de l’aversion au risque pourrait donc au début de la deuxième décennie des années 2000 pousser les ménages italiens à mieux apprécier les ris- sur un puissant moteur de transformation. Il existe ques de liquidité et de contrepartie des obligations ban- peut-être encore un espace limité pour des regroupe- caires qui, dans de nombreux cas, sont des actifs ments et réallocations des droits de propriété au sein financiers complexes et non négociables sur des mar- des principaux groupes de banques populaires qui, bien chés « de masse ». À ce propos, il est intéressant de qu’ils conservent la forme coopérative, sont cotés sur noter qu’après la crise, le placement des obligations des marchés réglementés. Toutefois, la spécialisation bancaires italiennes a eu lieu à des conditions relati- poussée du secteur bancaire italien impose qu’à côté vement plus favorables pour les souscripteurs. du petit nombre de grands groupes de dimension européenne ou nationale, un ensemble de banques Quelques conclusions locales puissent trouver leur place, en raison des liens Au cours des prochaines années, le secteur bancaire de long terme entretenus avec les petites entreprises italien devra donc affronter un nouveau et délicat défi. de la région. En outre, au moins à court terme, En raison du durcissement des réglementations inter- l’amélioration des services retail offerts aux ménages nationales, il se verra contraint de poursuivre le ren- réduira vraisemblablement les marges bancaires. Et la forcement de ses fonds propres. Il lui faudra donc continuité des services offerts aux entreprises, qui a réaliser un rendement approprié pour accroître ses évité la propagation du credit crunch en Italie y com- ressources internes et pour assurer une rémunération pris pendant les phases les plus aiguës de la crise, a attrayante aux investisseurs. Par ailleurs, dans l’après- augmenté le volume des prêts douteux et a poussé en crise, les grands groupes bancaires et les autres ban- conséquence les banques à augmenter le volume de ques italiennes devront à la fois financer des emprun- provisions, ce qui a eu des effets négatifs sur leurs teurs plus risqués et placer leurs propres titres de bilans. dette auprès de détenteurs de richesse plus prudents et éprouvant une plus grande aversion au risque. Cette En principe, deux solutions structurelles pourraient situation réduira une source de revenus faciles tirés de remédier à cette pression sur la rentabilité du secteur l’administration de la richesse financière des ménages, bancaire italien, que la crise financière de 2007-2009 qui ont contribué aux bonnes performances bancaires a aggravé mais n’a pas causé. La première repose sur entre 1998 et 2007. un redimensionnement de l’activité bancaire sur le La solution, préconisée à diverses occasions par le gou- marché financier italien. Plutôt que de continuer à verneur de la Banque d’Italie (cf. par exemple : Draghi détenir le quasi-monopole de l’offre de services aux 2009), se fonde sur une amélioration de la qualité des entreprises et aux ménages, les banques italiennes services offerts et sur une augmentation de la pro- pourraient laisser de la place à des acteurs indépen- ductivité. Apparemment, il s’agit d’un parcours similaire dants spécialisés dans la gestion de l’épargne et dans à celui accompli avec succès pendant les années 90. les services financiers sophistiqués. La faiblesse des En effet, plusieurs indicateurs montrent que les concen- investisseurs institutionnels italiens et leur inertie rendent trations et la réallocation des droits de propriété de cette cependant la réalisation de cette première solution période ont renforcé le degré d’efficience et amélioré hérissée d’obstacles. La seconde solution repose en les services retail et corporate traditionnels offerts aux revanche sur la réduction des déséquilibres précités 왘 9
HORIZONS BANCAIRES N U M É R O 3 4 0 – N O V E M B R E 2 0 1 0 왘 entre les prêts et les dépôts bancaires, de manière à des prêts consentis, ce qui est possible au moyen de assouplir la nécessité pour les banques italiennes de la titrisation. Un aspect important de l’évolution du placer un montant élevé de leurs propres dettes sur le secteur bancaire italien dépend donc de la réponse à marché retail. Cependant, cette alternative risque de la question suivante : est-il possible de réaliser des opé- pénaliser, par des conditions trop rigoureuses, l’offre de rations de titrisation qui n’aboutissent pas à la pyramide prêts bancaires aux entreprises. Pour éviter de tomber de produits structurés, à l’opacité et à l’instabilité pro- de Charybde en Scylla, il serait donc nécessaire d’al- pres au modèle « originate to distribute » qui a été à la léger l’actif du bilan bancaire sans réduire le montant base de la crise financière récente ? ◗ BIBLIOGRAPHIE Affinito, M., De Bonis, R., Farabullini, F. (2006), “Strutture finanziarie e sistemi bancari: differenze e analogie fra i paesi europei”, in Banche e finanza nel futuro: Europa, Stati Uniti, Asia, a cura di M. De Cecco e G. Nardozzi, Bancaria Editrice, Roma. pp. 179-218. AFO – ABI Financial Outlook (2010), Rapporto di previsione 2010-2012, Roma. Banca d’Italia (vari anni), Relazione annuale, Roma. Draghi, M. (2009), “Intervento del Governatore della Banca d’Italia”, Giornata mondiale del risparmio del 2009, Roma, ottobre. Draghi, M. (2010), “Intervento del Governatore della Banca d’Italia”, AIAF – ASSIOM – ATIC FOREX, Napoli febbraio. Lusignani, G. (2010), “Il posizionamento strategico dell’industria finanziaria italiana”, in L’industria del risparmio in Italia dopo la crisi, a cura di P. Garonna e G. Sabatini, Bancaria Editrice, Roma, pp. 43-65. Messori, M. (2002), “Consolidation, ownership structure and efficiency in the Italian banking system”, BNL Quarterly Review, vol. LV, pp. 177-217. Messori, M. (2007), Il potere delle banche, Università Bocconi Editore, Milano. Messori, M. (2009), The financial crisis: understanding it to overcome it, Assogestioni, Roma. Panetta, F. (a cura di) (2004), Il sistema bancario italiano negli anni novanta. Gli effetti di una trasformazione, il Mulino, Bologna. Pierobon, F. (2009), “Evoluzione dell’attività bancaria e crisi finanziaria”, in Oltre lo shock. Quale stabilità per i mercati finanziari, a cura di E. Barucci e M. Messori, Egea, Milano, pp. 77-97. Sironi, A. (2010), “Il rafforzamento patrimoniale delle banche: prime indicazioni sull’impatto delle nuove proposte di Basilea”, Banca Impresa Società, vol. XXIX, pp.211-35. 10
HORIZONS BANCAIRES N U M É R O 3 4 0 – O C T O B R E 2 0 1 0 La concentration du marché bancaire italien : évolutions et perspectives Le système bancaire italien a connu plusieurs phases de privatisation et de concentration qui l’ont profondément et rapidement transformé au cours des vingt dernières années. Une nouvelle phase de concentration pourrait se produire, mais à des rythmes plus lents et dans des proportions plus limitées que cela n’a été le cas dans un passé récent. ILARIA ROMAGNOLI Managing Director, Head of FIG Italy, Rothschild La concentration du marché bancaire Évolution de la réglementation italien au cours des dernières années La loi bancaire de 1936 représente la première réfor- La physionomie actuelle du système bancaire italien est me organique de l’activité de crédit en Italie, en répon- le résultat d’un long processus de modernisation qui l’a se aux crises qui avaient miné l’activité des banques conduit à s’intégrer pleinement dans le marché européen depuis la fin du XIXe siècle. Cette réforme prévoyait et mondial. Les principes cardinaux de ce parcours, ini- une spécialisation temporelle du crédit1 et une spé- tié dans les années 1990, ont été respectivement : cialisation territoriale ou sectorielle. Jusqu’au début • la réforme de la réglementation du secteur et les pri- des années 1990, les établissements de crédit ita- vatisations qui l’ont suivie ; liens se divisaient en : • une phase intense de concentration entre 1993 et • Établissements de crédit de droit public (Banco di 2002 ; Napoli, Banca Nazionale del Lavoro, Istituto Bancario • l’ouverture progressive du système aux investisseurs San Paolo di Torino, Banco di Sicilia, Monte dei Paschi étrangers et une nouvelle phase de concentration di Siena et Banco di Sardegna) ; entre 2005 et 2007. • Banques d’intérêt national (Banca Commerciale 왘 1. Les établissements se subdivisent entre ceux qui géraient le crédit à court terme (moins de 18 mois) et ceux qui étaient focalisés sur le moyen et long terme. 11
HORIZONS BANCAIRES N U M É R O 3 4 0 – N O V E M B R E 2 0 1 0 왘 italiana, Credito Italiano, Banco di Roma) détenues Privatisations et première phase par l’IRI (Institut de Reconstruction Industrielle) ; de concentration (1993 – 2002) • Caisses d’épargne. Outre les modifications réglementaires intervenues • Établissements de prêt sur gage. pendant les années 1990, un autre facteur a joué un • Banques populaires. rôle fondamental dans l’évolution du système bancai- • Caisses agricoles et artisanales. re italien, à savoir le processus de privatisation des • Banques privées, les seules qui ne soient pas, de fait, « banques d’intérêt national » détenues par l’IRI. d’origine publique. En 1993, l’IRI a mis en vente 67 % du capital du Credito Italiano, 40 % au moyen d’une offre publique Environ 80 % des fonds canalisés par le système ban- de vente (« OPV », c’est-à-dire une vente de titres au caire étaient concentrés entre les mains des banques public), et le solde au moyen d’un placement privé. Les sous contrôle public, comme l’illustre le tableau 1. grands actionnaires du Credito Italiano issus de la pri- TABLEAU 1. Données sur le système bancaire italien - 1990 Catégories de banques Nombre de banques Nombre d’agences % de l’actif total Établissements de crédit de droit public 6 2 449 20,1 Banques d’intérêt national 3 1 459 12,9 Caisses d’épargne et établissements de prêt sur gage 84 4 695 24,2 Banques « publiques » 93 8 603 57,2 Banques de crédit ordinaire 106 3 981 20,5 Établissements centraux catégoriels 5 5 2,4 Banques populaires 108 3 290 14,2 Caisses agricoles et artisanales 715 1 792 4,3 Succursales de banques étrangères 37 50 1,6 Total 1 064 17 721 100 La loi nº 218 du 30 juillet 1990, également dite « loi vatisation ont été respectivement la Famille Pesenti, Amato », a représenté une étape fondamentale du Allianz – Ras, Commercial Union, Société Générale, processus de restructuration du système bancaire Natwest, le groupe Caltagirone, les Benetton, les fonds italien. La « loi Amato » a permis la transformation des Fininvest, Toro Assicurazioni et SAI. établissements de crédit de droit public en sociétés par En 1994, ce fut au tour de la Banca Commerciale actions et la naissance de fondations bancaires, Italiana (« Comit ») d’être privatisée au moyen d’une actionnaires des banques, auxquelles ont été trans- OPV. Les actionnaires de contrôle de la banque post férées toutes les activités sortant des activités ban- privatisation étaient notamment Assicurazioni Generali, caires traditionnelles. Commerzbank, Paribas et, pour de moindres parts, L’évolution de la réglementation du système bancaire Lucchini, Pirelli, Della Valle et Stefanel. a ensuite été complétée par l’adoption du « Testo En revanche, la privatisation de la Banco di Roma a Unico delle leggi in materia bancaria e creditizia (TUB) » suivi un parcours différent : en 1992, l’IRI et l’Ente (code des lois en matière de banque et de crédit) de Cassa di Risparmio di Roma ont apporté leurs par- 1993 et du « Testo Unico della Finanza (TUF) » (code ticipations de contrôle respectivement détenues de la finance) de 1998. Les segmentations de l’activi- dans Banco di Roma et Banca di Santo Spirito (qui té des intermédiaires ont été remaniées et les banques avait reçu en apport, quelques années auparavant, ont pu adopter les formes juridiques de sociétés par l’activité bancaire de Cassa di Risparmio di Roma) à actions et de sociétés coopératives (banques populaires une holding dénommée Società Italiana di et banques de crédit coopératif). Partecipazioni Bancarie (« SIPBA »), qui s’est trouvée 12
La concentration du marché bancaire italien : évolutions et perspectives I L A R I A R O M A G N O L I de ce fait détenue à 65 % par l’Ente Cassa di crédit spécialisés et les caisses d’épargne. Les ban- Risparmio di Roma et à 35 % par l’IRI. ques populaires ont été moins touchées par ce pro- Postérieurement à la fusion entre Banco di Roma et cessus, fondamentalement en raison de leur forme Banca di Santo Spirito (la nouvelle entité issue de la juridique de « coopérative ». Seules ont fait exception fusion a été dénommée Banca di Roma S.p.A.), la pri- la Banca Antonveneta et la Banca Popolare di Brescia vatisation effective a eu lieu en 1997 au moyen (i) de qui se sont transformées en sociétés par actions, la dissolution de SIPBA et du transfert des actions de ainsi que la Banca Agricola Mantovana qui a été Banca di Roma directement aux actionnaires et acquise par Monte dei Paschi di Siena après l’abo- (ii) d’une opération de placement d’actions et lition du vote par tête. d’obligations qui a réduit la participation détenue Quoique moins intense, le processus de consolidation par l’Ente Cassa di Risparmio di Roma à moins de des banques populaires a conduit notamment aux 30 % du capital de Banca di Roma et a fait sortir l’IRI regroupements entre Banca Popolare di Verona et de l’actionnariat de la banque. Banca Popolare di Novara (dont est issue Banca Le processus de désengagement de l’État s’est achevé Popolare di Verona e Novara – BPVN), et entre Banca entre 1997 et 2001, par la cession des parts détenues Popolare Commercio e Industria et Banca Popolare di par le ministère du Trésor dans la Banco di Napoli et la Bergamo – Credito Varesino qui a donné naissance au Banca Nazionale del Lavoro (« BNL »). Gruppo Banche Popolari Unite (« BPU »). Simultanément aux privatisations, un processus intense Entre 1990 et octobre 2002, cinq cent soixante-six de concentration des banques s’est déroulé entre opérations de regroupement ont été enregistrées au 1993 et 2002, visant à créer des groupes bancaires total, avec un pic en 2002, année pendant laquelle ont plus compétitifs, ce qui a entraîné la naissance, entre eu lieu soixante-dix-sept opérations de M&A. En autres, de : revanche, la période 2003-2004 a enregistré un ralen- • Unicredito : né du regroupement progressif entre tissement du processus de concentration, principale- Credito Italiano, Cassa di Risparmio di Torino, Cassa di ment dû à l’attitude de la Banque d’Italie qui a jugé Risparmio di Verona, Cassa Marca Trevigina, Credito nécessaire d’observer une phase d’accalmie après Romagnolo, Cassa di Risparmio di Trieste, Carimonte cette période d’intense consolidation. et Cassa di Risparmio di Trento e Rovereto. • Banca Intesa : née du regroupement progressif La seconde phase de concentration du entre Cassa di Risparmio delle Province Lombarde système bancaire : de 2005 à nos jours (« Cariplo »), Banco Ambrosiano Veneto et Comit. À la suite de ce processus de privatisation et d’ou- • Sanpaolo IMI : né de la fusion entre l’Istituto Bancario verture croissante du capital des banques au mar- Sanpaolo di Torino et l’IMI (première banque d’affaires ché, la plupart des grandes banques italiennes ont et d’investissement), entité de droit public fondée en accueilli des banques étrangères parmi leurs action- 1931 pour soutenir la reconstruction du système indus- naires de référence à partir de début 2005. Mais triel national. dans un premier temps, les banques étrangères • Capitalia : née du regroupement entre (i) la Banca di n’ont pas pris le contrôle des principaux établisse- Roma post privatisation et acquisition de Banco di ments de crédit italiens. Les participations des ban- Sicilia et Mediocredito Centrale et (ii) la Bipop – Carire, ques étrangères se sont généralement fédérées entité issue de la fusion antérieure entre Bipop – Banca sous la forme de pactes d’actionnaires regroupant Popolare di Brescia (société par actions) et la Cassa di des fondations bancaires ou des actionnaires autres Risparmio di Reggio Emilia. que d’origine italienne. Les opérations de regroupement précitées ont concerné pour la plupart les anciennes banques Le tableau 2 présente l’actionnariat des dix premières nationales de droit public, les établissements de banques italiennes à la fin de l’année 2004. 왘 13
HORIZONS BANCAIRES N U M É R O 3 4 0 – N O V E M B R E 2 0 1 0 TABLEAU 2. Données sur le système bancaire italien - 2004 Banques Nombre d’agences Principaux actionnaires SanPaolo IMI 3 205 Compagnia San Paolo (14,27 %) ; Fondazione CR di Padova e Rovigo (10,65 %) ; Banco Santander Central Hispano (8,49 %) ; Fondazione CR di Bologna (7,58 %). Unicredito 3 137 Fondazione CR di Torino (8,74 %) ; Fondazione CR di Verona, Vicenza, Belluno e Ancona (7,59%) ; Carimonte Holding (7,14 %) ; Allianz (4,94 %). Banca Intesa 3 080 Crédit Agricole SA (15,00 %) ; Fondazione Cariplo (9,92 %) ; Assicurazioni Generali (6,35 %) ; Commerzbank (4,29 %). Capitalia 1 950 ABN Amro (7,91 %) ; Fondazione CR di Roma (5,19 %) ; Fondazione Manodori (4,00 %) ; Lehman Brothers International Europe (3,66 %). MPS 1 824 Fondazione Monte dei Paschi di Siena (58,58%); Caltagirone Francesco Gaetano (3,81 %) ; Hopa Spa (2,44 %) ; Premafin Finanziaria (2,10 %). BP U 1 204 Banca popolare : actionnariat diffus. BP VN 1 172 Banca popolare : actionnariat diffus. BP ER 1 105 Banca popolare : actionnariat diffus. Antonveneta 1 000 BPI (29,5 %) ; ABN Amro (18,12 %) ; Magiste International (4,99 %) ; Fingruppo Holding (4,92 %). BPI 970 Banca popolare : actionnariat diffus. 왘 L’intérêt des banques étrangères pour les établisse- banque hollandaise en est ainsi venue à détenir 55,8 % ments italiens a augmenté pendant l’année 2005. Une de Banca Antonveneta et a ensuite lancé l’OPA bonne partie des actionnaires étrangers des banques obligatoire. italiennes ont manifesté de manière plus ou moins Les dirigeants d’Unipol ont à leur tour été impliqués voilée leur intention d’accroître leur propre influence, dans l’enquête sur BPI et le 10 janvier 2006, la Banque sinon de prendre purement et simplement le contrôle d’Italie a bloqué l’offre d’Unipol sur BNL. En février des banques dans lesquelles ils détenaient des parti- 2006, BNP Paribas a acquis 48 % de BNL auprès cipations importantes. d’Unipol et de ses alliés et a ensuite lancé l’OPA obli- C’est ainsi que, fin mars 2005, ABN Amro et BBVA ont gatoire sur l’intégralité du capital de BNL, à laquelle a lancé une offre publique d’achat respectivement sur également adhéré BBVA. Banca Antonveneta et BNL. Les deux offres ont Toujours en 2005, parallèlement aux efforts déployés échoué, y compris en raison de la constitution de par des banques étrangères pour se développer en deux contre-offensives italiennes dirigées par Banca Italie, certaines banques italiennes ont engagé un pro- Popolare Italiana (« BPI ») (alors dénommée Banca cessus de développement international. Tel est le cas Popolare di Lodi) dans le cas de Banca Antonveneta d’Unicredito, qui a annoncé en juin 2005 sa fusion et Unipol dans le cas de BNL, qui ont acheté des avec la banque allemande HypoVereinsbank. actions sur le marché et ont lancé à leur tour des off- Les événements de l’été 2005 ont poussé de nom- res publiques d’achat sur les deux banques. breuses banques italiennes à s’interroger sur l’oppor- En mai 2005, toutefois, le parquet de Milan a ouvert une tunité de se lancer à leur tour dans des opérations de enquête contre X, du fait de la contre-offensive lancée M&A à la lumière de (i) l’intérêt croissant des banques sur Banca Antonveneta, pour délit présumé d’agiotage étrangères pour le marché italien, (ii) la nécessité d’a- visant à faire échouer l’offre d’ABN Amro. voir une masse critique suffisante pour être compéti- Le 25 juillet 2005, le parquet de Milan a ordonné la sai- tives sur le marché national, compte tenu des mutations sie des actions que BPI et ses alliés détenaient dans en cours, et (iii) la volonté des principales banques Banca Antonveneta : cette mesure a marqué le point italiennes de jouer un rôle important, y compris sur le de départ d’une série d’enquêtes concernant les diri- plan européen. geants de BPI et qui ont conduit à la cession par BPI C’est dans ce contexte qu’a été annoncée, à l’été à ABN Amro de 25,9 % de Banca Antonveneta. La 2006, la fusion entre Banca Intesa et Sanpaolo IMI, qui 14
La concentration du marché bancaire italien : évolutions et perspectives I L A R I A R O M A G N O L I TABLEAU 3. Italie : principales fusions en 2006-2007 Synergies Gouvernance Fusion Projet industriel annoncées Banca Intesa-Sanpaolo Création d’un groupe bancaire leader €1,3 mld de Introduction du modèle dualiste (directoire IMI (2006) en Italie avec le réseau de distribution synergies brutes et conseil de surveillance). le plus dense (part de marché d’ici 2009. d’environ 20 %). – dont synergies Nomination du président du Conseil de coûts : €1,0mld ; de surveillance par Banca Intesa et du Renforcement de la position président du directoire par Sanpaolo IMI. internationale avec une focalisation – dont synergies sur la CEE de revenus : Conseil de surveillance composé de €0,3mld. 19 membres. Banche Popolari Unite - Création d’un top player au niveau €365mln de Introduction du modèle dualiste. Banca Lombarda (2007) national, avec une forte synergies brutes Nomination du conseil de surveillance : complémentarité territoriale. d’ici 2010. 23 membres dont 11 représentants BPU, Leadership élevé dans le nord de – dont synergies de 11 représentants Banca Lombarda et l’Italie, avec une part de marché coûts : €225mln ; 1 représentant des actionnaires supérieure à 15 % en Lombardie. minoritaires. – dont synergies Fusion entre la banque populaire et de revenus : Le premier président du conseil de la société anonyme (SpA) avec €140mln. surveillance représentera Banca maintien du statut juridique de Lombarda tandis que le vice-président banque populaire. représentera BPU. Nomination du directoire : pour les 3 premières années, 10 membres dont 5 nommés par BPU et 5 par Banca Lombarda. Le président du directoire est nommé par BPU. Banca Popolare di Création du troisième groupe €0,5mld de Introduction du modèle dualiste Verona e Novara - bancaire en Italie en termes de synergies brutes Nomination du conseil de surveillance Banca Popolare Italiana nombre d’agences et d’ici 2010. (2007) de capitalisation de marché. – dont synergies – Année 1 : 10 membres dont de coûts : €0,2mld. 4 représentants BPI et 6 représentants Première banque populaire du pays BPVN. – dont synergies – Année 2 : 15 membres dont de revenus : 6 représentants BPI et 9 représentants €0,3mld. BPVN. – Année 3 : 20 membres dont 8 représentants BPI et 12 représentants BPVN. Le président du Conseil de surveillance est nommé par BPVN et le président du Directoire est nommé par BPI. Unicredit-Capitalia Création d’un groupe de dimension €1,2mld de 4 représentants de Capitalia cooptés par (2007) européenne. synergies brutes le conseil d’administration de Unicredit, d’ici 2010. sur un total de 23 membres. Leader sur 4 marchés nationaux – dont synergies de Le président de Capitalia sera (Italie, Allemagne, Autriche, Europe coûts : €0,8mld. vice-président suppléant de Unicredit et centrale et orientale). responsable de la gestion des #1 Zone euro, #3 en Europe, – dont synergies participations détenues dans #7 mondial par la capitalisation de revenus : Mediobanca, Generali, RCS et Pirelli, €0,4 mld. ainsi que président du comité exécutif de Unicredit. 왘 15
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