Les semelles amortissantes commerciales : une fausse solution
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Institut de pédicure-podologie de Rennes 12 rue Jean-Louis Bertrand, 35000 Rennes Les semelles amortissantes commerciales : une fausse solution Thibaud BLANC Mémoire d’Initiation à la démarche de recherche Diplôme d’Etat de pédicurie-podologie Formateur guidant : Carine MENOU Mai 2017
PRÉFET DE LA RÉGION BRETAGNE DIRECTION REGIONALE DE LA JEUNESSE, DES SPORTS ET DE LA COHÉSION SOCIALE Pôle formation-certification-métier Diplôme d’Etat de Pédicurie-Podologie Travaux de fin d’études : Mémoire d’initiation à la démarche de recherche Conformément à l’article L 122-4 du code de la propriété intellectuelle du 3 juillet 1992 : « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque ». J’atteste sur l’honneur que la rédaction des travaux de fin d’études, réalisée en vue de l’obtention du diplôme d’Etat de Pédicurie-Podologie est uniquement la transcription de mes réflexions et de mon travail personnel. Et, si pour mon argumentation, je copie, j’emprunte un extrait, une partie ou la totalité de pages d’un texte, je certifie avoir précisé les sources bibliographiques. Le…………….…………. Signature de l’étudiant : Fraudes aux examens : CODE PENAL, TITRE IV DES ATTEINTES A LA CONFIANCE PUBLIQUE CHAPITRE PREMIER : DES FAUX Art. 441-1 : Constitue un faux toute altération frauduleuse de la vérité, de nature à causer un préjudice et accomplie par quelque moyen que ce soit, dans un écrit ou tout autre support d’expression de la pensée qui a pour objet ou qui peut avoir pour effet d’établir la preuve d’un droit ou d’un fait ayant des conséquences juridiques. Le faux et l’usage de faux sont punis de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende. Loi du 23 décembre 1901, réprimant les fraudes dans les examens et concours publics. Art. 1er : Toute fraude commise dans les examens et les concours publics qui ont pour objet l’entrée dans une administration publique ou l’acquisition d’un diplôme délivré par l’Etat constitue un délit.
Sommaire Introduction :...................................................................................................................... 1 I. Le concept d’amortissement ........................................................................................ 3 1. Les origines du concept d’amortissement ........................................................................ 3 1.1. Sport et santé ........................................................................................................ 3 1.2. L’onde de choc ...................................................................................................... 4 1.2.1. Principe des actions réciproques & Principe fondamental de la dynamique 4 1.2.2. Les paramètres spatiaux-temporels .............................................................. 5 1.2.3. L’influence des plateformes de force............................................................. 6 1.2.4. L’influence de l’industrie et du marketing ..................................................... 7 2. L’évolution du concept d’amortissement : du maximalisme au minimalisme ................. 8 2.1. L’amorti, au cœur des considérations................................................................... 8 2.2. La tendance minimaliste ....................................................................................... 8 II. Présentation des semelles amortissantes commerciales : propriétés et différences ..... 10 1. Qu’est-ce qu’un dispositif amortisseur ? ........................................................................ 10 1.1. Distinction entre amortissement et absorption ................................................. 10 1.2. Amortisseurs naturels et synthétiques ............................................................... 10 2. Les semelles amortissantes commerciales ..................................................................... 12 2.1. Sorbothane® ........................................................................................................ 12 2.2. Sholl® ................................................................................................................... 13 2.3. Noene® ................................................................................................................ 14 III. Les paramètres intrinsèques et extrinsèques à considérer influençant l’amorti ........... 16 1. Un facteur intrinsèque : Le système d’amortissement du membre pelvien .................. 16 1.1. Le capiton plantaire............................................................................................. 16 1.2. Les cartilages articulaires .................................................................................... 16 1.3. L’architecture morphostatique du pied et du membre Inférieur ....................... 17 1.3.1. L’architecture morphostatique du pied ...................................................... 17 1.3.2. Muscles suspenseurs du pied...................................................................... 18 1.3.3. Les muscles extrinsèques et intrinsèques du pied ...................................... 18 1.3.4. Les articulations du pied ............................................................................. 19 1.3.5. Les articulations sus-jacentes...................................................................... 19 1.4. Les limites du corps humain et de son propre système d’amortissement ......... 19
2. Des facteurs extrinsèques : l’influence du sol, de la foulée, et du chaussant ................ 20 2.1. L’influence du sol ................................................................................................ 20 2.2. L’influence du type de foulée.............................................................................. 20 2.3. L’influence du chaussant ..................................................................................... 22 IV. Physiopathologie : Les effets biomécaniques et cliniques d’une semelle amortissante 23 1. Ralentissement de la pose du pied au sol ....................................................................... 23 2. Le retard de la flexion du genou ..................................................................................... 23 3. Augmentation de la force d’appui plantaire ................................................................... 23 4. Allongement du temps de contact pied/sol.................................................................... 24 5. Déperdition d’énergie à chaque pas ............................................................................... 24 6. Instabilité à la pose du pied au sol .................................................................................. 24 7. Augmentation du travail musculaire............................................................................... 25 8. Fragilisation osseuse par absorption de l’onde de choc ................................................. 25 9. Accoutumance et dépendance du capiton : une addiction podale ................................ 26 10. L’hyperpronation et ses conséquences ...................................................................... 27 11. L’inhibition des capteurs sensoriels du pied (une anesthésie plantaire) .................... 28 V. Les effets posturaux d’une semelle amortissante ....................................................... 29 1. Posturologie et posturopodie ......................................................................................... 29 2. Présentation du protocole et du matériel utilisé ............................................................ 29 2.1. La plateforme stabilométrique ........................................................................... 29 2.2. Description des sujets testés............................................................................... 30 2.3. Objectifs de l’étude ............................................................................................. 30 2.4. Description du protocole .................................................................................... 30 2.5. Résultats .............................................................................................................. 30 2.6. Analyses et Critiques ........................................................................................... 31 3. Conclusion ....................................................................................................................... 31 VI. Conclusions et Perspectives ....................................................................................... 32 VII. Bibliographie ............................................................................................................. 33 VIII. Annexes .................................................................................................................... 36
Introduction : D’après une évaluation de l’INSERM1, le taux des pratiques physiques et sportives des Français entre 1967 et 2003 a considérablement augmenté. Cependant, d’après les résultats de l’étude menée par l’association « Attitude prévention » parue en janvier 2017 dans le quotidien « Le Monde », les français ne font toujours pas assez de sport au regard des critères préconisés par l’OMS pour un maintien en bonne santé. Praticable en solitaire ou à plusieurs, accessible à tous, modulable en temps et en investissement, et ne nécessitant que très peu d’équipement, le « running » séduit de plus en plus. En plein essor, cette pratique libre de la course à pied prend progressivement le pas sur le « jogging » traditionnel. Incarnant des valeurs saines et un retour aux choses simple, cette nouvelle discipline sportive provoque un réel engouement, tant chez les coureurs professionnels que chez les amateurs. En alliant modernité et performance, le running est devenu un sport « tendance » qui se révèle fédérateur au point de devenir un véritable phénomène de société. Pour répondre à ce marché en plein expansion, les grandes marques de l’industrie sportive ont donc rivalisé d’ingéniosité en matière de technologie et d’arguments marketing pour proposer régulièrement des modèles de chaussures supposés toujours plus novateurs et performants. Le concept d’amortissement, fer de lance de la stratégie commerciale des grandes marques de chaussures de sport, a connu de nombreux rebondissements au fil du temps, passant d’un amorti à outrance à un amorti minimaliste initiée par la mode du barefoot, une pratique de plus en plus plébiscitée ces dernières années. En parallèle, on a également vu se développer le marché des semelles « amorti-choc », et plus particulièrement celles à base de gel siliconé. Ces semelles amortissantes prônent non seulement un confort à toute épreuve mais également une protection contre les blessures et les risques de troubles articulaires liés à la pratique sportive. Elles réduiraient, entre autres, l’onde de choc générée par les impacts répétés lors de la course à pied Or, les adeptes du running comptent de nombreux débutants soucieux de leur santé qui s’interrogent au vu des arguments commerciaux et les avis divergents de la littérature sur l’amorti. Ils sont, pour eux, autant d’incitations à investir à minima dans des semelles amortissantes, voire dans des paires de chaussures plus techniques et onéreuses. On remarque également que les semelles amortissantes ne s’adressent désormais plus uniquement aux sportifs désireux d’acquérir un amorti optimal, mais également aux personnes à la recherche d’un meilleur confort dans leur chaussant au quotidien. En tant que futur pédicure-podologue, appelé à prescrire et délivrer des orthèses plantaires sur mesure, ce sujet m’a interpellé. Quelle est la composition de ces semelles amortissantes à base de gel siliconé, vendues en libre-service dans les magasins de sport ou les pharmacies ? Quels sont leurs effets, leurs atouts, leurs inconvénients éventuels ? Il m’a semblé important de me renseigner afin de pouvoir informer et conseiller efficacement mes futurs patients. 1 Institut National de la Santé Et de la Recherche Médicale 1
Au cours de mes recherches, j’ai pu constater que si les marques vantaient les bienfaits des propriétés amortissantes de leurs semelles au travers de nombreux médias (télévisuels, sites internet, réseaux sociaux...), des professionnels de santé, par contre les décriaient bien souvent, les jugeant néfastes par principe. P. Villeneuve, podologue et posturologue reconnu a par exemple écrit à ce sujet : « L’utilisation de semelles molles crée non seulement un effet “anesthésiant”, augmente l’instabilité posturale, mais majore les troubles biomécaniques et les pathologies (notamment celle du genou chez le sportif) en minorant la réaction du sol ». DOSSIER : OEIL, PROPRIOCEPTION ET POSTURE - REALITES Ophtalmologiques Juin 2005 N° 122 p 9-16 Au cours de ma formation, j’ai appris que tout élément placé sous le pied, et ce, quelle que soit sa hauteur, avait une incidence et des répercussions sus-jacentes. Je me suis donc demandé quels pouvaient être les effets de ce type de semelles. De quoi sont-elles composées exactement ? Quelles sont les propriétés mécaniques du gel siliconé ? Les avantages présentés sont-ils réels ou ne résultent-ils que d’une campagne marketing nécessaire à la vente d’un produit ? Le corps humain ne peut-il, à lui seul amortir l’onde de choc ? Existe-il des risques consécutifs au port de ces semelles, et si oui, quels sont-ils ? Nonobstant l’incertitude qu’une semelle standardisée puisse répondre, efficacement ou non, à l’unicité de la physiopathologie d’un patient, c’est davantage sur les conséquences de l’excès d’amorti que j’ai choisi d’orienter mes recherches. D’où la question suivante, initiant ma problématique : Le port d’une semelle amortissante en gel de silicone a-t-il des effets ? Ma problématique porte donc sur l’influence des semelles amortissantes commerciales sur l’appareil locomoteur et sur le système postural d’équilibration. Après avoir retracé l’origine et l’évolution du concept d’amortissement, je présenterai, dans un premier temps, quelques modèles de semelles amortissantes actuellement commercialisés, en précisant leurs propriétés et leurs différences. Dans un second temps, je m’attacherai à décrire les structures du système d’amortissement naturel du corps humain, les influences que peuvent avoir les facteurs extérieurs sur ce système, ainsi que l’intérêt voire la nécessité d’un amorti spécifique. Ensuite, je m’intéresserai aux effets biomécaniques et cliniques que peut entraîner le port de ce type de semelles. Puis, l’incidence de ces effets sur la posture à l’aide d’un protocole clinique. Enfin, après une conclusion définissant les nécessités et les contreparties de l’amorti, je poserai la question du rôle, de la pertinence, et de la responsabilité du pédicure-podologue, en sa qualité de clinicien à juger des divers effets que ces dispositifs, disponibles en libre-service, peuvent avoir sur la santé des patients. 2
I. Le concept d’amortissement 1. Les origines du concept d’amortissement 1.1. Sport et santé Comme en témoigne la loi « sport sur ordonnance » du 26 janvier 2017, la pratique d’une activité physique et sportive régulière est désormais synonyme de santé. Le grand vainqueur de cette nouvelle tendance alliant sport et santé, c’est le Running2. Le running est une pratique libre de la course à pied et ne nécessite en matériel qu’une paire de chaussures de sport. Grâce au fait qu’il puisse être pratiqué n’importe où et n’importe quand, le running séduit de plus en plus. Selon le blog Fitmyrun, on aurait constaté chaque année entre 2010 et 2015 une augmentation de 29% du nombre de pratiquants pour un total de 16 millions de personnes en 2015 soit un Français sur quatre. « Depuis une dizaine d'années, c'est la seule pratique sportive qui progresse significativement. Car l'investissement psychologique, physique et financier lié à cette activité est faible », analyse Patrick Mignon, responsable à l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (INSEP). En 2015, 25% de la population sportive pratique le running au moins une fois par mois Le revers de la médaille, c’est l’augmentation massive d’accidents et de blessures liée à la pratique sportive, entraînant un coût économique important pour la sécurité sociale. L’entorse de la cheville (lésion ligamentaire traumatique) par exemple, représente à elle seule 15 à 20% des traumatismes sportifs, soit 1 cas / 10 000 habitants par jour. Pour l’état, le coût journalier de l’entorse de cheville serait estimé à environ 1,2 million d’euros3. Une seconde pathologie, 2 Anglicisme dévié du verbe « run » qui signifie « courir ». 3 Chiffres recueillis lors du cours du Dr Damaj sur l’entorse de cheville dispensé à l’IFPP de Rennes 3
l’arthrose4 primaire précoce touchant préférentiellement l’appareil locomoteur, serait également une autre conséquence néfaste d’une activité sportive à haute dose. Cette affection, fréquente chez les anciens sportifs, a été imputée à l’onde de choc, et est à l’origine des nombreux arguments de « protection articulaire » qui ont favorisé l’avènement du concept d’amortissement. Mais qu’est-ce que l’onde de choc exactement ? 1.2. L’onde de choc 1.2.1. Principe des actions réciproques & Principe fondamental de la dynamique D’après A. Goldcher & E. Nataf (2002), c’est au début des années 1980 que l’on s’est aperçu que courir sur des sols non naturels et durs tels que le bitume pouvait présenter des risques d’un point de vue ostéo-articulaire. En effet, le pied est soumis aux mêmes lois de la physique et aux mêmes contraintes mécaniques que tout objet sur Terre. Or, il est important de rappeler qu’à la différence de la marche, la course se définit par la succession d’une phase d’appui unipodale et d’une phase de suspension bipodale, phase pendant laquelle le coureur est en absence totale de contact avec le sol. En conséquence, à la course, le contact du talon au sol impose une décélération brutale qui génère un impact, communément appelé : « l’onde de choc ». Cette onde de choc est en fait la réaction opposée de la force exercée par le pied sur le sol. Car d’après le principe des actions réciproques, ou 3e loi de Newton : « L'action est toujours égale à la réaction ; c'est-à-dire que les actions de deux corps l'un sur l'autre sont toujours égales et de sens contraires » La réaction du sol peut être quantifiée grâce au principe fondamental de la dynamique, la 2e loi de Newton. La force de gravité ( ⃗ ) attire la masse corporelle (m) vers le centre de la Terre. Le vecteur ⃗ correspond à l’accélération de pesanteur qui dépend de la planète ( ⃗ = 9.81 sur Terre), elle est verticale du haut vers le bas et s’applique au centre de gravité (par simplification). 4 Affection chronique qui se caractérise par une usure anormale du cartilage, et de l'ensemble de l'articulation. 4
Les industriels, pour inquiéter les sportifs, n’hésitent pas à citer les chiffres qui montrent que cette force peut atteindre des valeurs correspondant à trois fois le poids du corps. Cependant, il est à noter que la masse apparente du corps (m) est rendue variable par le système d’amortissement du membre pelvien composé d’un système de ressort et de structures amortissantes naturelles que nous détaillerons par la suite. 1.2.2. Les paramètres spatiaux-temporels La modélisation de la ⃗ (Ground Reaction Force) sous forme d’une force unique est réductrice puisque elle est en fait constituée de 3 composantes correspondant respectivement aux 3 plans de l’espace : ⃗ , ⃗ et ⃗. Ces trois forces correspondent respectivement aux forces latérales (prono- supination), aux forces de glissement ou de freinage, et aux forces verticales (pressions plantaires). ⃗ étant la seule qui puisse être potentiellement pathogène. La ⃗ peut être mesurée grâce à un plateau de force et varie en fonction de la foulée, de la vitesse, du type de terrain et des chaussures utilisées. Aussi, le pied n’étant pas un point mais une surface, les forces doivent s’exprimer sous forme de moment5 ( ⃗) et la distance (d) entre son point d’application et son axe de mobilité anatomique correspondant, établit par la relation : ( ⃗) = ( ⃗ ) x (d) Enfin, le déroulement du pied est un processus dynamique qui s’effectue sur une durée de plusieurs centaines de millisecondes. Le facteur temporel (t) est donc essentiel dans l’estimation du travail6 des charges plantaires s’exerçant sur le pied. En effet, l’intensité de la force ⃗ appliquée dépend de la durée t pendant laquelle cette force est appliquée. La même quantité de mouvement peut être appliquée dans une durée plus longue via une force plus faible, 5 Le moment d’une force par rapport à un point donné est une grandeur physique vectorielle traduisant l’aptitude de cette force à faire tourner un système mécanique autour de ce point, souvent appelé pivot. Le moment d’un ensemble de forces, et notamment d’un couple est la somme des moments de ces forces. 6 Le travail d’une force est l’énergie fournée par cette force lorsque son point d’application se déplace (l’objet subissant la force se déplace ou se déforme). 5
ou, inversement, une force élevée sur une durée courte. La durée de l’impact influe donc directement le pic de l’onde de choc. C’est entre autres par ce procédé que les amortisseurs, en augmentant le temps de contact, se proposent de réduire le pic de l’onde de choc. 1.2.3. L’influence des plateformes de force C’est en 1977 que paraît la première étude de l’onde de choc transmise au squelette lors du contact entre le talon et le sol. Grâce à des accéléromètres miniaturisés, la vitesse de l’onde de choc a été mesurée à 120km/h dans le tibia, soit l’équivalent d’un tremblement de terre d’intensité 4 sur l’échelle de Richter. Les amortisseurs naturels du corps humain diminuent ensuite progressivement son intensité lors de son parcours le long du squelette. Pour une valeur d’origine de 5 ⃗7 dans le tibia, elle est réduite à une valeur de 0.5 ⃗ au niveau du crâne, notamment grâce aux disques intervertébraux. L’enregistrement de la force verticale au cours d’un pas donne une courbe caractéristique avec une double bosse (cf. annexe, figure n°9). La force enregistrée atteint des valeurs deux à trois fois supérieures à celle du poids du corps (environ 70 daN) en course et jusqu’à 8 fois en saut. L’impact du talon est nettement reconnaissable sur la courbe. C’est suite à l’analyse de ces courbes que naît le concept d’amortissement. A l’époque, il apparaît alors comment évident que cette Force ⃗ est significativement pathogène et est responsable des nombreuses pathologies survenant lors des pratiques sportives. Mais, d’une part, pour apprécier les effets d’une force plantaire, il faut prendre en compte deux facteurs essentiels : la surface d’application de cette force, et surtout la durée de son application sur chaque surface considérée. D’autre part, si l’on transforme cette courbe de force en courbe de pression, ce pic disparaît. L’idée d’amortir est donc basée sur une erreur d’interprétation de la courbe de forces, par simple confusion entre force et pression. 7 ⃗ correspond à l’accélération de pesanteur sur Terre (1 g = 9.81 m/s²). 6
De plus, selon Alain Goldcher, « la physique et toutes les études physiopathologiques montrent que ce n’est pas la force qui est délétère, mais la pression8 associée à la durée de la mise sous pression ». Un excès de pression intense mais bref est donc moins nocif qu’une pression relativement faible mais prolongée. 1.2.4. L’influence de l’industrie et du marketing Que ce soit à la marche ou à la course, les enregistrements de l’impact entre le talon et le sol montrent un pic de force d’intensité supérieure à 2 ou 3 fois le poids du corps. On dit alors qu’à chaque foulée, le pied du coureur réceptionne une charge correspondant à environ 5 fois le poids du corps lors d’un footing à 10 km/heure. Ces chiffres, sont souvent soulignés par les industriels pour alarmer le sportif, sans se demander si cette force subie par le pied est nécessairement nocive. Sans s’interroger non plus sur les éventuels seuils de nocivités, les industriels répondent par une fausse solution : l’amortissement, comme en témoigne une phrase d’un des articles princeps9: « Il semblerait logique que les charges d’impact répétées à la course se manifesteront par des effets biologiques négatifs s’ils ne sont pas atténués de quelques façon ». Malgré l’absence de preuves ou d’études venant corroborer cette impression, cette affirmation fait consensus. C’est donc l’industrie qui s’est intéressée au problème biomécanique et à la cinétique normale du pied pendant la course afin développer des modèles de chaussures idéales, apportant à la fois confort, stabilité et protection contre les blessures de surcharge et les traumatismes. Grâce à l’analyse des données collectées sur plateau de force, un coin viscoélastique a d’abord été inséré dans la semelle talonnière au niveau de la zone d’impact latérale. Jugé peu efficace, l’élément a été placé, par la suite, au centre du talon, en regard de la partie la plus plantaire du calcanéus, sans toutefois apporter plus de résultats. Actuellement, l’amortisseur se situe à un élément talonnier isolé, ou est couplé à un autre élément sous la première tête métatarsienne. Le but étant d’estimer le seuil acceptable de force d’impact qui peut s’appliquer sur le pied, tout en trouvant des matériaux suffisamment absorbants, légers et durables à incorporer dans les semelles pour atteindre le meilleur compromis entre confort et sécurité. Cependant, il apparaît toujours comme impératif que les chaussures doivent absorber les chocs pour réduire les risques de blessures. Et de ce fait toutes les nouvelles chaussures ont des propriétés phénoménales d’amortissement. Grâce au développement en parallèle de la pétrochimie et de ses dérivés, que je détaillerai dans une autre partie, de nouveaux matériaux viscoélastiques permettant d’absorber les chocs font leur apparition. La publicité des grandes marques de l’industrie assène alors au grand public leurs derniers concepts révolutionnaires de chaussures incorporant ces nouvelles technologies. Le concept d’amortissement devient alors un élément incontournable de l’équipement sportif. 8 ⃗ (Pression) = ⃗ (Force) / S (Surface) 9 Clarke et coll., 1983 7
2. L’évolution du concept d’amortissement : du maximalisme au minimalisme 2.1. L’amorti, au cœur des considérations Tout semblait se passer à merveille tant pour les sportifs que pour les industriels jusqu’à ce que des statistiques montrent une augmentation du nombre de blessures malgré l’incorporation des technologies amortissantes. Le nombre de blessures courantes telles que les fractures de fatigues, périostites tibiales et tendinites était resté stable, mais de nouvelles pathologies intéressant essentiellement la hanche et le genou avaient fait leur apparition. Malgré tout, le marché de l’amortissement continue de se développer, et dépasse largement les espérances financières des industriels grâce à un phénomène de mode qui s’instaure. Diverses variantes se succèdent alors : des chaussures avec un amorti de hauteur croissante, avec contrôle de l’excès de pronation, oversized10, axes courbes, et avec un design de plus en plus esthétique. Les grandes marques de l’industrie (Nike, Adidas, Mizuno, etc…) développent des technologies spécifiques (Air, Alvéolaires, Gel,…) mais toujours dans l’optique d’amortir. Et, même si dans de nombreuses activités physiques et sportives, le pied nu reste plus performant et plus stable que le pied chaussé, la mode de la chaussure « belle et confortable » persiste depuis plus d’une trentaine d’années. De nombreuses études tout de même conduites afin de mieux comprendre les raisons de ces blessures. D’après une étude, HAMILL, J., BATES , T.T. (1988)11, il existerait une relation inverse entre la fréquence des blessures et le coût des chaussures. Selon Bernard Marti12, les coureurs qui s’équipent des modèles les plus onéreux sont 23% plus sujets aux blessures que ceux s’équipant de modèles bon marché. Les sportifs les moins traumatisés étaient ceux qui portaient les chaussures les moins amortissantes et les plus usées ! 2.2. La tendance minimaliste Depuis quelques années, une nouvelle tendance à vue le jour : Le minimalisme, aussi appelé « course au naturel ». Ce terme englobe la course à pieds-nus (Barefoot) ainsi que la course à pied minimaliste, c’est-à-dire, des coureurs équipés de chaussures légères, très flexibles, avec très peu d’amorti, et censées reproduire les sensations du pied nu, comme une seconde peau. Une chaussure minimaliste, contrairement à une chaussure dite maximaliste (La chaussure Hoka par exemple) est légère (moyenne inférieure à 240g), avec un drop13 faible (inférieur à 5mm) et avec une semelle extrêmement fine afin qu’elle soit de faible hauteur. Ainsi le pied est le plus près possible du sol. La flexibilité de cette chaussure est maximale afin d’imposer au pied le minimum de contraintes et de restriction de mouvements possible. De cette façon, c’est la chaussure qui s’adapte au pied et non l’inverse. Par ailleurs, plus le pied est libre et plus on 10 De l’anglais : « surdimensionnées » 11 « A Kinematic Evaluation of the Effects of In Vivo Loading on Running Shoes ». Journal of Orthopaedic and Sports Physical Therapy, (1988) 12 Spécialiste de médecine préventive à l’université de Berne (Suisse) 13 Différence de hauteur entre le talon et les orteils 8
laisse le système musculaire d’équilibration et de stabilisation s’exprimer. Deux groupes de coureurs à pied ont été comparés dans un laboratoire, l’un courant avec des chaussures amortissantes classiques, et l’autre avec des chaussures minimalistes. Après 12 semaines d’entraînement, la musculature du triceps sural du groupe courant en chaussures minimalistes avait augmenté de près d’un tiers. Le but des chaussures minimalistes est de libérer le pied du matelas moelleux auquel il est habitué tout en le protégeant des agressions extérieures du sol (abrasions cutanées, coupures, brulures). Elles permettent de resensibiliser le pied en stimulant les mécanorécepteurs de la sole plantaire qui ont tendance à s’endormir en l’absence de choc due aux semelles amortissantes. En réduisant l’amorti, le pied devient donc plus libre, plus stable, plus musclé, et plus prompt à réagir aux variations de terrain grâce à une proprioception davantage stimulée. D’ailleurs, les danseurs et gymnastes, dont l’activité requiert un grand contrôle du pied, pratiquent pieds nus ou en simple chausson de danse. Malgré la tendance minimaliste des dernières années on observe encore plus récemment une apparition croissante des chaussures oversized telles que la chaussure Hoka chez les sportifs. Cela montre bien que le concept d’amortissement, malgré tous ses rebondissements, est un sujet qui fait aujourd’hui encore débat au sein de la communauté sportive. Une chaussure minimaliste (Vibram) Une chaussure maximaliste (Hoka) Différences entre une chaussure minimaliste et une semelle avec amorti. On note l’absence de semelle intermédiaire qui contient normalement les dispositifs amortissants, la différence d’épaisseur globale, ainsi que la différence de drop entre ces deux types de chaussures. 9
II. Présentation des semelles amortissantes commerciales : propriétés et différences 1. Qu’est-ce qu’un dispositif amortisseur ? 1.1. Distinction entre amortissement et absorption Au préalable, un peu de sémantique s’impose, car les discours marketing ont souvent tendance à amalgamer amortissement et absorption, lesquels peuvent pourtant entraîner des actions diamétralement opposées en fonction de leurs propriétés. En physique, l’amortissement est un phénomène ayant pour effet de réduire l’énergie cinétique d’un corps en mouvement. On dit alors d’un matériau qu’il est amortisseur s’il tend à réduire les oscillations engendrées lors d’un choc brutal. Les amortisseurs d’une voiture par exemple évitent les oscillations provoquées par les inégalités du revêtement de la route. Dans le cas des activités physiques et sportives, c’est la réception d’un saut, d’un pas de la marche ou de la course qui génère ce choc brutal entraînant la genèse d’une onde de choc se propageant au squelette, et qui, selon certains biomécaniciens, doit être amortie. Parmi ces matériaux amortisseurs, on en distingue deux types dont les effets varient selon leur complaisance14 et leur résilience15. D’une part l’amortisseurs élastique se déformant sous la pression mais conservant une énergie de tension, restituée plus ou moins rapidement selon la rémanence16 (Ce type d’amortisseur est également qualifié de matériau « propulseur ». D’autre part l’amortisseur proprement dit, également appelé matériau « absorbant », se déformant peu, dispersant l’onde latéralement, et transformant une partie de l’énergie cinétique sous forme de chaleur et de bruit. 1.2. Amortisseurs naturels et synthétiques Il existe des amortisseurs naturels, utilisés depuis l’antiquité, comme le cuir sur la poignée des épées, ou pour la roue des chariots. Le matériau de référence reste le caoutchouc naturel importé en Europe à partir des années 1936. La découverte de sa vulcanisation par Charles Goodyear en 1839 a permis de l’utiliser dans la confection des semelles. 14 La complaisance, en science des matériaux, est une grandeur qui caractérise le comportement élastique d’un matériau (exprimée en Pa-1) 15 La résilience est la capacité d'un matériau à absorber de l'énergie quand il se déforme sous l'effet d'un choc (déformation rapide) 16 Temps mis par un matériau pour retrouver sa forme initiale. Si la rémanence est élevée, le matériau est qualifié de dynamique. 10
Il existe aussi des amortisseurs synthétiques, dérivés de la pétrochimie, également utilisés par les pédicures-podologues lors de la confection de semelles orthopédiques. Ils peuvent être classés en sept groupes principaux : - Les élastomères de polyuréthane (ex : Sorbothane) - Les mousses de polyuréthane (ex : Poron) - Les mousses de caoutchouc synthétique (ex : Noene) - Les mousses de chlorure de polyvinyle (ex : Implus) - Les mousses de polyéthylène (ex : Plastazote) - Les Ethylène-acétate de vinyle (ex : EVA) - Le caoutchouc de silicone (ex : Gel) Les matériaux préconisés pour réduire les vibrations, les ondes de choc ou pout mémoriser temporairement une forme, sont les matériaux viscoélastiques. Ce matériau, comme son nom l’indique, est à la fois « visqueux » et « élastique ». Il possède la capacité, lorsqu’il est soumis à une contrainte, de se comporter comme un solide élastique et un fluide visqueux. La combinaison de ces deux propriétés lui permet de se déformer lentement lorsqu’il est soumis à des contraintes extérieures, puis de retrouver sa forme initiale. Des compagnies comme Sorbothane utilisent des exemples simples afin d’appréhender ce concept de liquide-solide. Leur site officiel explique par exemple que lorsqu’on jette une pierre dans une flaque d’eau, celle-ci se déforme en créant des vaguelettes pour disperser latéralement l’onde de choc avant de reprendre progressivement sa forme plane et lisse. Le Sorbothane agit de la même façon en dispersant latéralement l’onde de choc avant de prendre sa configuration initiale pour la foulée suivante. Autre exemple, lorsque deux voitures entrent en collision frontale, si celles-ci ont le temps de freiner avant l’impact, leur vitesse relative diminue et le choc est par conséquent moins violent. De la même manière, le Sorbothane se déforme sous la contrainte en opposant une résistance qui « freine » l’impact et limite donc la force de réaction potentiellement pathogène pour l’organisme. 11
2. Les semelles amortissantes commerciales Suite au développement de ces matériaux, à l’origine destinés à un public sportif, les inserts viscoélastiques se sont progressivement exportés hors des chaussures de sport. Les éléments viscoélastiques se transforment alors en semelles amovibles, intégrables à tout type de chaussant, afin de cibler des consommateurs à la recherche de confort dans leur chaussant au quotidien. On a vu précédemment que les adeptes du running étaient de plus en plus nombreux. Par conséquent, il existe parmi eux un nombre incroyablement élevé de débutants, malgré la diversité de pratiquants (âge et sexe) de cette discipline. En effet, parmi les 16 millions de pratiquants, 42% soit 6.7 millions de personnes, sont des novices. Ceux-ci, soucieux de leur santé et de leur bien-être, souhaitent s’équiper correctement. Les magasins de sport ont donc naturellement développé le côté « conseil » de leurs rayons sport afin de guider au mieux le consommateur vers une chaussure adaptée à sa pratique, sa foulée, et son budget. Mais, les semelles viscoélastiques, dites amortissantes attirent également de plus en plus ces nouveaux sportifs. Pratiques car passant d’un chaussant à l’autre, ces semelles sont présentées au consommateur comme ayant les même vertus que les chaussures amortissantes. Mais ces semelles n’ont pourtant pas les mêmes caractéristiques malgré la similarité des matériaux utilisés. Il serait donc souhaitable que le consommateur bénéficie de conseils fiables quant à leur utilisation, indications sur de possibles effets secondaires, etc. Malheureusement, ces produits sont disponibles en libre-service laissant le consommateur seul et perdu devant la grande diversité des marques et modèles proposés. Voici quelques modèles de semelles viscoélastiques présentes dans le commerce avec leurs spécificités et les qualités qu’elles s’attribuent : 2.1. Sorbothane® Le Sorbothane, sous forme de talonnettes ou de semelles entières, est très présent dans les magasins de sport. Sur le site officiel de Sorbothane, on peut lire que : «Le Sorbothane est un matériau unique qui imite parfaitement la chair et offre un excellent amorti. Les semelles et talonnettes Sorbothane® évitent les traumatismes liés aux impacts répétés, soulagent les douleurs musculaires et articulaires (maux de dos, de genoux, de pieds), limitent les blessures (fractures de fatigue, tendinites, périostites, cervicalgies) Le Sorbothane favorise la prévention des rechutes et apporte un confort inégalé. » 12
La compagnie commerciale vante donc, en plus du confort extrême procuré, des vertus prophylactiques sur les pathologies de surmenage présentes chez les sportifs. Pourtant, le sorbothane, en dispersant latéralement l’onde se classe dans la catégorie des matériaux « absorbants », comme l’illustre le schéma suivant : « Le Sorbothane® se déforme et disperse l’onde de choc latéralement, puis retrouve immédiatement sa forme initiale sans rebond pour être efficace à chaque foulée. » En termes d’efficacité, une étude (Noe17) in vitro sur 5 jambes récemment amputées a montré que le sorbothane pouvait absorber jusqu’à 98% de l’onde de choc, soit un gain relatif de 18%, puisqu’un capiton sain sous calcanéen en atténue lui-même 80%. Bien que son efficacité dépende de la compliance18 du système pied/amortisseur (c’est-à-dire que, plus on utilise une semelle amortissante performante, plus le gain par rapport au pied nu s’atténue) le sorbothane reste intéressant dans le cas d’un capiton pathologique. En effet, l’association d’un capiton déficient et de sorbothane permet d’absorber 83% de l’onde de choc, soit une valeur proche de la capacité d’absorption d’un capiton sain. 2.2. Sholl® Scholl est une marque très connue pour ses accessoires pédicuraux, ouverts au grand public. Elle se diversifie aujourd’hui en proposant également des semelles amortissantes. Elle utilise pour vendre ses produits de nombreux outils publicitaires, notamment la télévision. C’est leur publicité qui a en premier lieu suscité mon intérêt et amorcé mes interrogations pour ce travail de recherche. Scholl propose différents types de semelles amortissantes selon leur utilisation : quotidienne, professionnelle, ou sportive. Les modèles pour utilisation quotidienne et professionnelle se ressemblent, la semelle sportive intègre en revanche « une coque de support pour plus de stabilité et un maintien de la voûte plantaire » 17 Noe & Coll. Role of the calcaneal heel pad and polymeric shock absorbers in attenuation of the heel strike impact. J. Biomed. Eng. 1993 ; 15 :23-26 18 C’est la propriété d'un matériau de subir une déformation élastique lorsqu'il est soumis à une force appliquée. Elle est égale à l'inverse de la raideur 13
« La technologie Scholl ActivGel™ est constituée de deux types de gel qui absorbent les chocs même les plus petits et réduisent efficacement les impacts ressentis par l'utilisateur lorsqu'il marche ou lorsqu'il court. Le gel ferme soutient la voûte plantaire et le talon, et le gel souple assure un amorti du pied tout en absorbant les chocs. » En jouant sur la densité de deux gels différents, Scholl propose donc un amorti de haute performance, une absorption des chocs et une réduction des excès de pressions plantaires. Les Gels utilisés sont des polymères de la catégorie des élastomères thermoplastiques mais je n’ai pu obtenir d’informations plus précises quant à leur composition et leur dureté shore19. La spécificité de ces semelles réside dans le fait qu’elles sont vendues en pharmacies en plus des magasins de sport : cela leur confère une dimension médicale que ne possèdent pas ses concurrentes. Toutefois, il est bien précisé sur le site de la marque que les semelles Scholl ne sont pas des semelles orthopédiques et ne peuvent, par conséquent, pas se substituer à celles délivrées par le pédicure-podologue. Il est également intéressant de constater que Scholl prend la précaution de spécifier que ces semelles sont destinées à un pied dont la croissance ostéo- articulaire est terminée et ne conviennent donc pas aux enfants. Par contre, Scholl n’hésite pas à conseiller leur utilisation dans des chaussures de sport, bien que ces dernières disposent déjà d’un système d’amortissement et d’absorption des ondes de choc. 2.3. Noene® Vendues comme les autres en magasin de sport et sur internet, Noene propose des semelles techniques conçues avec un matériau viscoélastique capable d’absorber puis de dissiper les ondes de choc générées par l’impact du pied au sol. Elles peuvent être utilisées soit au quotidien, soit lors d’une activité sportive. 19 La dureté shore caractérise la dureté des élastomères, comprise entre 0 et 100. Un shore 0 correspond à la dureté de l’eau, et 100 correspond à la dureté de l’acier. La peau humaine est d’environ 10 shore. 14
Le NOENE ® est « un caoutchouc dont la viscoélasticité et la capacité d’amortissement permettent d’absorber puis de dissiper l’énergie et qui possède des caractéristiques particulières et très différentes des élastomères traditionnels, en raison de sa structure interne et de sa disposition spéciale. » Contrairement à ses concurrentes, la marque ne prône pas un confort particulier. Elle axe sa stratégie commerciale sur l’aspect anti-vibratoire de ses semelles dont l’action permettrait de protéger les articulations et d’éviter ainsi d’éventuelles lésions par microtraumatisme répété. Une des spécificités de ces semelles est que le matériau n’est pas un insert talonnier ou sous- métatarsien, mais compose l’ensemble de la semelle. C’est également un matériau distribué par des fournisseurs et utilisé par les pédicures-podologues dans les semelles orthopédiques. Autre point important, la semelle ne mesure que 2mm de hauteur et ne prend pas trop de place dans le chaussant. Cette faible hauteur n’altère en rien les performances absorbantes du Noene, comme le montre une vidéo publiée sur leur site officiel, où une bille de Noene est lâchée et se stabilise immédiatement au sol sans rebondir. Avec ces semelles, pas question de restituer de l’énergie, ce matériau est un pur absorbant. Enfin, les semelles Noene, comme les autres marques, conviennent aussi bien pour les activités sportives que quotidiennes. Par contre, Noene préconise également le même modèle pour les enfants et les seniors, sans distinction : « Pendant la croissance, étape au cours de laquelle on ressent quelques gênes articulaires, NOENE ® peut aider vos enfants en absorbant et en dissipant les vibrations générées au cours de leur intense activité quotidienne. » « Au fil des années, les articulations perdent de leur souplesse et deviennent plus sensibles aux impacts et aux vibrations, et davantage sujettes aux fractures de fatigue et aux lésions. Ceci étant, les seniors sont aujourd’hui de plus en plus actifs. Les semelles NOENE ® peuvent donc les aider à continuer de pratiquer leurs activités habituelles tout en les protégeant. » Avons-nous cependant tous besoin de la même quantité d’amorti ? 15
III. Les paramètres intrinsèques et extrinsèques à considérer influençant l’amorti Il semblerait que la force de réaction du sol pourrait être nocive de par les impacts répétés qui serraient des sources potentielles de blessures chez le sportif. Cependant, la tendance du minimalisme contredit cette théorie en affirmant que le corps humain dispose d’un système d’amortissement propre suffisant pour répondre aux forces de pressions plantaires. Quels sont alors les éléments anatomiques intervenant dans le système d’amortissement du membre pelvien et ses limites ? Quels sont les autres facteurs à prendre en compte pour évaluer la nécessité de l’amorti ? 1. Un facteur intrinsèque : Le système d’amortissement du membre pelvien 1.1. Le capiton plantaire Le capiton plantaire est un tissu graisseux situé dans la partie profonde de la peau sous la plante des pieds. Il est constitué d’adipocytes (cellules graisseuses), de fibres musculaires et d’un riche réseau veineux superficiel. Son épaisseur peut varier de 1 cm à l’avant pied jusqu’à 2cm sous le talon. C’est la couche de peau la plus épaisse du corps. Cette épaisseur est une nécessité, car le capiton plantaire protège la structure osseuse du pied (calcanéum au talon, et têtes métatarsiennes à l’avant-pied) qui est en contact avec le sol. Son rôle principal est d’absorber les chocs, notamment lors du contact initial du talon et lors de la phase de propulsion, où les pressions plantaires sont maximales. On peut dire que le capiton plantaire est au pied ce que le pneu est à la jante de la roue d’une voiture. Ce rembourrage nous permet de marcher relativement confortablement en s’interposant entre les os du pied et la surface du sol. En absorbant les chocs, le capiton plantaire constitue la première ligne de défense de l’organisme pour amortir les chocs et les vibrations des forces de réaction plantaires. Cependant, avec le temps, le capiton plantaire tend naturellement à s’atrophier, à l’origine de nombreuses métatarsalgies chez le sujet âgé. 1.2. Les cartilages articulaires Les cartilages hyalins des surfaces articulaires sont des tissus qui recouvrent certaines parties des os (les extrémités en général) afin de favoriser le glissement des pièces osseuses entre-elles. Cependant, leur rôle ne s’arrête pas à la limitation des frottements entre pièces osseuses, les cartilages jouant également un rôle dans la fonction d’amortissement des ondes vibratoires. Le cartilage du genou par exemple, pour lequel le rôle d’amortissent est central, est renforcé grâce à des structures telles que les ménisques. Chez la personne âgée, l’arthrose se caractérise par 16
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