Message relatif à l'initiative populaire "Remplacer la taxe sur la valeur ajoutée par une taxe sur l'énergie"
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13.095 Message relatif à l’initiative populaire «Remplacer la taxe sur la valeur ajoutée par une taxe sur l’énergie» du 20 novembre 2013 Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous proposons de soumettre l’initiative populaire «Remplacer la taxe sur la valeur ajoutée par une taxe sur l’énergie» au vote du peuple et des cantons, en leur recommandant de la rejeter. Nous vous prions d’agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mes- dames, Messieurs, l’assurance de notre haute considération. 20 novembre 2013 Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Ueli Maurer La chancelière de la Confédération, Corina Casanova 2013-1154 8089
Condensé Le Conseil fédéral propose au Parlement de recommander au peuple et aux can- tons de rejeter l’initiative populaire «Remplacer la taxe sur la valeur ajoutée par une taxe sur l’énergie». Il approuve la ligne de l’initiative d’utiliser des taxes sur l’énergie pour atteindre les buts de sa politique climatique et énergétique, mais il rejette la suppression de la taxe sur la valeur ajoutée et considère qu’il n’est pas indiqué que le montant de la taxe sur l’énergie proposée dépende des recettes de TVA ou des besoins de financement de l’Etat. Teneur de l’initiative L’initiative populaire «Remplacer la taxe sur la valeur ajoutée par une taxe sur l’énergie» a été déposée le 17 décembre 2012 par le Parti vert’libéral munie de 108 018 signatures valables. Elle demande l’introduction d’une taxe sur les énergies non renouvelables (comme le pétrole, le gaz naturel, le charbon et l’uranium) et préconise de compenser la charge fiscale supplémentaire grevant la consommation d’énergie par la suppression de la taxe sur la valeur ajoutée. Les auteurs de l’initiative veulent élever l’efficience énergétique, promouvoir les énergies renouvelables et réduire les émissions de CO2. L’initiative doit contribuer à la sortie du nucléaire tout en ménageant le climat et l’économie. Avantages et lacunes de l’initiative Le Conseil fédéral approuve la ligne directrice de l’initiative, fondée sur la politique en matière énergétique et climatique: en mai 2011, il a décidé de sortir progressi- vement du nucléaire, de continuer à poursuivre ses objectifs climatiques actuels et de maintenir une grande sécurité de l’approvisionnement en électricité. Il partage également l’avis des auteurs de l’initiative d’après lequel la réduction visée des émissions de CO2 et des gaz à effet de serre ainsi que de la consommation de l’énergie à plus long terme doit être atteinte principalement en agissant sur les prix. C’est pourquoi l’administration examine actuellement, dans le cadre des travaux relatifs à la deuxième étape de la Stratégie énergétique 2050, les moyens de rempla- cer progressivement les systèmes d’encouragement des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique – notamment le programme Bâtiments – après 2021 en introduisant des taxes sur l’énergie. Toutefois, en proposant la suppression de la taxe sur la valeur ajoutée, l’initiative populaire propose une voie indésirable économiquement et financièrement. Pour garantir les finances publiques, les taux de la taxe sur l’énergie devraient être très élevés, dans une mesure qui dépasse de beaucoup le niveau justifiable en matière de politique énergétique et climatique. Afin que les recettes fiscales de la Confédéra- tion soient suffisantes, ces taux devraient d’ailleurs être augmentés au fur et à mesure que l’effet incitatif déploierait ses effets et que les ménages et les entreprises consommeraient moins d’énergies non renouvelables. La taxe sur la valeur ajoutée constitue la principale source de recettes de la Confédération et elle gagne de plus en plus en importance pour le financement des assurances sociales. De plus, en 8090
complément à l’impôt sur le revenu, elle répond de manière avantageuse à des impératifs comme la clarté et l’efficacité économique. En cas de remplacement de la taxe sur la valeur ajoutée par une taxe sur l’énergie, les entreprises seraient plus lourdement grevées qu’aujourd’hui. Contrairement à la taxe sur la valeur ajoutée, qui est largement neutre pour le commerce extérieur, une taxe sur l’énergie désa- vantagerait les entreprises nationales par rapport à leurs concurrentes étrangères. De plus, l’initiative aurait des effets négatifs sur la répartition puisqu’elle alourdi- rait plus que proportionnellement la charge des ménages à faible revenu. C’est pourquoi un remplacement de la taxe sur la valeur ajoutée par une taxe sur l’énergie n’est pas recommandable. Proposition du Conseil fédéral Pour ces raisons, le Conseil fédéral propose aux Chambres fédérales de recomman- der au peuple et aux cantons de rejeter l’initiative populaire «Remplacer la taxe sur la valeur ajoutée par une taxe sur l’énergie». 8091
Table des matières Condensé 8090 1 Aspects formels et validité de l’initiative 8094 1.1 Texte de l’initiative 8094 1.2 Aboutissement et délais de traitement 8095 1.3 Validité 8096 2 Genèse de l’initiative 8096 2.1 Environnement politique 8096 2.2 Droit en vigueur 8097 2.3 Politique énergétique de la Confédération 8099 2.3.1 Stratégie énergétique 2007 8099 2.3.2 Stratégie énergétique 2050 8099 2.3.3 Plans du Conseil fédéral: passage d’un système d’encouragement à un système d’incitation 8101 2.4 Principes fiscaux de la Confédération 8102 2.5 Importance de la TVA 8103 2.5.1 Evolution des recettes et des recettes affectées de la TVA 8104 2.5.2 Charge de la TVA sur les entreprises 8105 2.5.3 Charge de la TVA sur les ménages 8106 2.5.4 Neutralité de la TVA pour le commerce extérieur 8107 3 Buts et contenu de l’initiative 8108 3.1 Buts de l’initiative 8108 3.2 Dispositif proposé 8108 3.3 Commentaire et interprétation du texte de l’initiative 8109 3.3.1 Perception d’une taxe sur l’énergie 8109 3.3.2 Mesures d’allégement 8110 3.3.3 Suppression de la TVA 8110 4 Appréciation de l’initiative 8111 4.1 Conformité aux principes et valeurs de la Suisse 8111 4.2 Conséquences en cas d’acceptation 8112 4.2.1 Fixation du taux de la taxe et conséquences énergétiques 8112 4.2.2 Conséquences pour l’économie dans son ensemble 8113 4.2.3 Conséquences pour la Confédération 8118 4.2.4 Conséquences pour les assurances sociales 8119 4.2.5 Conséquences pour les cantons et les communes 8120 4.2.6 Mise en œuvre de l’initiative 8121 4.3 Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse 8123 4.3.1 Compatibilité avec les obligations à l’égard de l’UE 8123 4.3.2 Accords avec la Principauté de Liechtenstein et avec l’Allemagne 8123 4.3.3 Compatibilité avec le droit commercial international (OMC) 8124 4.4 Examen d’un contre-projet direct 8125 8092
5 Conclusions 8126 Liste des abréviations 8127 Bibliographie 8128 Arrêté fédéral relatif à l’initiative populaire «Remplacer la taxe sur la valeur ajoutée par une taxe sur l’énergie» (Projet) 8131 8093
Message 1 Aspects formels et validité de l’initiative 1.1 Texte de l’initiative L’initiative populaire «Remplacer la taxe sur la valeur ajoutée par une taxe sur l’énergie» a la teneur suivante: I La Constitution1 est modifiée comme suit: Art. 130a (nouveau) Taxe sur l’énergie 1 La Confédération peut prélever une taxe sur les énergies non renouvelables impor- tées et les énergies non renouvelables produites en Suisse. Si l’énergie est exportée, la taxe est remboursée. La taxe est calculée par kilowattheure (kWh) d’énergie primaire. 2 Aux fins de prévenir de graves distorsions de concurrence, la loi peut prévoir une taxe sur l’énergie grise. 3 Le taux de la taxe est fixé de sorte que son produit corresponde à un pourcentage déterminé du produit intérieur brut. 4Chaque agent énergétique peut être assujetti à un taux différent en fonction de son bilan écologique global. 5Aux fins de prévenir des distorsions de concurrence graves et de simplifier la perception de la taxe, la loi peut prévoir des exceptions au prélèvement de la totalité de la taxe. 6 Si, par suite de l’évolution de la pyramide des âges, le financement de l’assurance- vieillesse, survivants et invalidité n’est plus assuré, 13,1 % au plus du produit de la taxe sur l’énergie peuvent y être affectés. 7 5 % du produit non affecté de la taxe sont employés à la réduction des primes de l’assurance-maladie en faveur des classes de revenus inférieurs, à moins que la loi n’attribue ce montant à une autre utilisation en faveur de ces classes. II Les dispositions transitoires de la Constitution sont modifiées comme suit: Art. 196, ch. 3, al. 2, let. ebis (nouvelle) 3. Disposition transitoire ad art. 87 (transports) 2 Pour financer les grands projets ferroviaires, le Conseil fédéral peut: ebis. utiliser 1,5 % du produit de la taxe sur l’énergie visée à l’art. 130a; 1 RS 101 8094
Art. 197, ch. 92 (nouveau) 9. Disposition transitoire ad art. 130a (taxe sur l’énergie) 1Dès l’entrée en vigueur de la législation relative à l’art. 130a, mais au plus tard le 31 décembre de la cinquième année qui suit l’acceptation de celui-ci: a. les art. 130, 196, ch. 3, al. 2, let. e et 196, ch. 14 sont abrogés; b. l’art. 134 est modifié comme suit: Art. 134 Exclusion d’impôts cantonaux et communaux 1Les objets que la législation fédérale soumet à des impôts à la consommation spéciaux, au droit de timbre ou à l’impôt anticipé ou qu’elle déclare exonérés ne peuvent être soumis par les cantons et les communes à un impôt du même genre. 2 Le pourcentage déterminé du produit intérieur brut selon l’art. 130a, al. 3 est fixé de sorte que le produit de la taxe sur l’énergie corresponde au produit moyen de la taxe sur la valeur ajoutée des cinq années qui ont immédiatement précédé sa sup- pression. 3 Si la législation relative à l’art. 130a n’entre pas en vigueur au plus tard le 1er janvier de la sixième année qui suit l’acceptation de celui-ci, le Conseil fédéral règle les modalités. 1.2 Aboutissement et délais de traitement L’initiative populaire «Remplacer la taxe sur la valeur ajoutée par une taxe sur l’énergie» a fait l’objet d’un examen préliminaire de la Chancellerie fédérale le 1er juin 20113 et a été déposée le 17 décembre 2012 avec le nombre de signatures requises. Par décision du 16 janvier 20134, la Chancellerie fédérale a constaté que l’initiative a abouti avec 108 018 signatures valables. Elle revêt la forme d’un projet rédigé. Le Conseil fédéral ne lui oppose aucun contre-projet, ni direct ni indirect. Conformément à l’art. 97, al. 1, let. a, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement (LParl)5, le Conseil fédéral dispose d’un an depuis le dépôt de l’initiative, c’est-à-dire jusqu’au 17 décembre 2013, pour sou- mettre à l’Assemblée fédérale un projet d’arrêté fédéral accompagné d’un message. Pour sa part, l’Assemblée fédérale dispose de 30 mois à partir du dépôt de l’ini- tiative, c’est-à-dire jusqu’au 17 juin 2015, pour décider de la recommandation de vote qu’elle proposera au peuple et aux cantons (art. 100 LParl). 2 La numérotation définitive de la présente disposition transitoire sera fixée par la Chancel- lerie fédérale après le scrutin. 3 FF 2011 4303 4 FF 2013 571 5 RS 171.10 8095
1.3 Validité L’initiative respecte les exigences de validité prévues à l’art. 139, al. 3, Cst.: a. elle respecte le principe de l’unité de la forme puisqu’elle revêt la forme d’un projet rédigé; b. elle respecte le principe de l’unité de la matière, puisqu’il existe un rapport intrinsèque entre ses différentes parties; c. elle respecte le principe de la conformité aux règles impératives du droit international, puisqu’elle ne contrevient à aucune d’elles. 2 Genèse de l’initiative 2.1 Environnement politique L’initiative a été déposée en décembre 2012 par le Parti vert’libéral (PVL). Elle préconise quant au fond de renchérir la consommation d’énergies non renouvelables en instituant une taxe sur l’énergie. L’augmentation du prix de l’énergie doit inciter à améliorer l’efficacité énergétique et à réduire la consommation d’énergie. Le coût des activités polluantes est ainsi plus fortement mis à la charge de leurs responsa- bles. La suppression de la TVA doit permettre la mise en œuvre de la réforme fiscale proposée sans modifier la quote-part fiscale. Le débat relatif à une réforme fiscale écologique n’est pas nouveau. Deux initiatives populaires déposées au cours des années 90 («Initiative énergie et environnement» et «pour garantir l’AVS – taxer l’énergie et non le travail») préconisaient l’introduction de taxes d’incitation sur la consommation d’énergie dont le produit devait servir à abaisser d’autres taxes pour ne pas augmenter la quote-part fiscale. Le Conseil fédéral et le Parlement ont opposé un contre-projet à l’«initiative énergie et environ- nement», qui aurait jeté les bases de l’introduction d’une taxe incitative sur l’énergie. Son produit aurait été utilisé pour réduire les charges salariales annexes obligatoires. Le 24 septembre 2000, le peuple et les cantons ont rejeté ce contre- projet par 55 % des voix contre 45 %. Quant à l’initiative populaire «pour garantir l’AVS – taxer l’énergie et non le travail», qui allait dans le même sens, elle a été rejetée le 2 décembre 2001 par 77 % des voix. En 2006, cette affaire a été portée devant le Parlement par la motion Studer Heiner (06.3190), «Réforme fiscale écologique». À l’origine, cette motion demandait un projet de réforme écologique. Le Parlement l’a transformée ensuite en un mandat d’examen en vue de déterminer les incitations écologiques inopportunes dans les systèmes des impôts et des subventions. Présenté par le Conseil fédéral en juin 2013, le rapport répondant à cette motion identifie les incitations écologiques inopportunes dans les domaines du trafic, de la consommation d’énergie et de matériaux ainsi que de l’utilisation et de la dégradation du sol. Il parvient toutefois à la conclusion que des mesures correctrices ont déjà été prises dans le cadre d’autres projets ou qu’elles pourraient être mieux ciblées dans des projets séparés que dans un projet unique. Etroitement liés aux préoccupations écologiques, les thèmes de l’«augmentation de l’efficacité énergétique» et de la «promotion des énergies renouvelables» sont des éléments centraux du débat politique de ces dernières années relatif à l’énergie. En l’occurrence, il faut citer en particulier l’initiative populaire «De nouveaux emplois 8096
grâce aux énergies renouvelables (initiative cleantech)» du parti socialiste. Le Con- seil fédéral poursuit les mêmes objectifs que cette initiative: développer rapidement les énergies renouvelables et réduire l’«empreinte écologique» de la Suisse. Toute- fois, il la rejette car il veut atteindre ces objectifs dans le cadre de la Stratégie éner- gétique 2050 cf. ch. 2.3.2). L’initiative cleantech a été retirée conditionnellement lorsque le Parlement a adopté l’initiative parlementaire 12.400 «Libérer les investis- sements dans le renouvelable sans pénaliser les gros consommateurs»6. En Suisse, des taxes sont déjà perçues en vue d’atteindre des objectifs de politique climatique et énergétique, par exemple le supplément actuel sur les coûts de trans- port des réseaux à haute tension d’un montant de 0,45 centime par kilowattheure de courant et la taxe sur le CO2 d’un montant de 36 francs (60 francs à partir du 1er janvier 2014) par tonne de CO2 (cf. ch. 2.2 et 2.3.2). Comme le prévoit la Stra- tégie énergétique 2050, le Conseil fédéral a commandé des travaux concernant le passage d’un système d’encouragement (fondé notamment sur des subventions) à un système d’incitation comportant des taxes sur l’énergie (cf. ch. 2.3.3). Les taxes sur l’énergie dont certaines comportent des éléments d’une réforme fiscale écologique font également partie d’une conception largement testée au niveau inter- national. Des systèmes d’incitation comprenant des taxes sur le CO2 et sur l’énergie existent déjà dans quelques pays [p. ex. Allemagne, Australie, Canada (Colombie britannique), Danemark, Finlande, Grande-Bretagne, Irlande, Norvège, Pays-Bas et Suède]. Le produit de ces taxes est la plupart du temps utilisé pour diminuer les coûts salariaux accessoires et les impôts sur le revenu. Face aux réglementations exceptionnelles qui existent, les expériences faites au niveau international ne montrent globalement pas de conséquences négatives sur l’emploi ni sur la capacité concurrentielle et une partie d’entre elles font état d’effets positifs sur l’innovation7. Il faut relever cependant que le montant des taxes sur l’énergie appliquées actuelle- ment au niveau international est sans commune mesure avec celui de la taxe sur l’énergie qui s’appliquerait en cas d’acceptation de l’initiative et ce, en raison des conceptions différentes de ces taxes. La taxe sur l’énergie proposée par les auteurs de l’initiative se base sur les recettes de la TVA. Sa hauteur devrait être fixée en conséquence (voir ch. 3.3). 2.2 Droit en vigueur Le droit en vigueur serait concerné par l’initiative tant au niveau de la perception de l’impôt qu’au niveau de son utilisation. Dans le domaine des énergies non renouve- lables, la Confédération prélève, en vertu de l’art. 1 de la loi du 21 juin 1996 sur l’imposition des huiles minérales8, deux impôts de consommation spéciaux: d’une part, l’impôt sur les huiles minérales, qui grève l’huile de pétrole, les autres huiles minérales, le gaz de pétrole et les produits résultant de leur transformation, ainsi que les carburants et, d’autre part, la surtaxe sur les carburants. La moitié du produit net de l’impôt sur les huiles minérales et la totalité de la surtaxe sur les carburants (qui correspond environ à 70 % des recettes totales de cet impôt et de cette surtaxe) sont affectées à des tâches liées à la circulation routière et au trafic aérien. Le reste des 6 FF 2013 4901 7 Cf. INFRAS 2007, IEEP 2013a, p. 38 ss., IEEP 2013b, p. 19s., 44 s., 76s.et 85s., Patuelli et. al. 2005. 8 RS 641.61 8097
recettes totales sert à couvrir les dépenses générales de la Confédération. Etant donné que l’initiative ne prévoit pas l’abrogation des bases constitutionnelles de ces deux impôts (art. 86 et 131, al. 1, let. e, et 2, Cst.), ils pourraient être prélevés en plus de la taxe sur l’énergie prévue par l’initiative. En plus de ces deux impôts à la consommation, le droit fédéral prévoit d’autres taxes sur les énergies non renouvela- bles. Il s’agit notamment de la taxe sur le CO2, que la Confédération prélève sur la production, l’extraction et l’importation des combustibles9. La taxe sur le CO2 est une taxe d’incitation qui s’appuie sur la compétence de la Confédération en matière de protection de l’environnement (art. 74 Cst.). Un tiers du produit net de cette taxe sert à financer le programme Bâtiments (assainissements énergétiques) et les deux tiers restants sont redistribués à la population via les primes de l’assurance obliga- toire des soins et aux entreprises via les caisses de compensation. La taxe sur le CO2 vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre, notamment les émissions de CO2, qui proviennent de l’utilisation des énergies fossiles. Au surplus, la société nationale du réseau de transport prélève un supplément sur les coûts de transport des réseaux à haute tension (supplément perçu sur le réseau), qui finance notamment la rétribution à prix coûtant du courant injecté (RPC). Ce supplément sert à indemniser les charges spéciales des gestionnaires de réseaux dues à leur obligation d’acquérir l’électricité provenant d’énergies renouvelables. Ce supplément s’appuie en particulier sur la compétence de la Confédération en matière d’énergie (art. 89 Cst.). Ces deux taxes pourraient également être prélevées en plus de la taxe sur l’énergie prévue par l’initiative. En plus de ces taxes sur les sources d’énergie non renouvelables, la Confédération prélève une redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations (RPLP). La RPLP n’est pas un impôt à la consommation. En vertu de l’art. 1 de la loi du 19 décembre 1997 relative à une redevance sur le trafic des poids lourd10, elle sert à couvrir à long terme des coûts d’infrastructure et des coûts occasionnés à la collec- tivité par ce trafic, dans la mesure où celui-ci ne compense pas ces coûts par d’autres prestations ou redevances. En plus des taxes précitées, la Confédération prélève des impôts spéciaux sur la consommation (p. ex. les impôts sur l’alcool et sur le tabac) et un impôt général sur la consommation, la TVA. En vertu de l’art. 1, al. 2, LTVA, la TVA est perçue sur les prestations que les assujettis fournissent à titre onéreux sur le territoire suisse, sur l’acquisition par un destinataire se trouvant sur le territoire suisse de prestations fournies par une entreprise ayant son siège à l’étranger et sur l’importation de biens. Contrairement aux impôts de consommation spéciaux, aux taxes sur l’énergie ou aux droits de douane, la TVA devrait obligatoirement être abrogée si l’initiative était acceptée (art. 197, ch. 9, al. 1, let. a, Cst). 9 Art. 29, al. 1, de la loi du 23 décembre 2011 sur le CO2, RS 641.71. 10 RS 641.81 8098
2.3 Politique énergétique de la Confédération 2.3.1 Stratégie énergétique 2007 En 2007, le Conseil fédéral a décidé d’asseoir sa stratégie énergétique sur quatre piliers: l’efficacité énergétique, les énergies renouvelables, le remplacement et la construction de grandes centrales électriques (nouvelles centrales nucléaires inclu- ses) et la politique énergétique extérieure. En 2008, le Conseil fédéral a adopté deux plans d’action11 pour concrétiser cette stratégie. Les mesures qu’ils contiennent ont pour ambition, au cours de la période 2010 à 2020, de réduire la consommation d’énergie fossile de 20 %, d’élever la part des énergies renouvelables à 24 % de la consommation totale d’énergie et de limiter la hausse de la consommation d’élec- tricité à 5 % au plus. La politique énergétique nationale fondée sur la stratégie énergétique 2007 se com- pose d’un assortiment d’instruments d’incitation, de mesures d’encouragement, de prescriptions relatives à la consommation, de normes minimales et de mesures concernant la recherche et la formation. La RPC constitue le principal pilier de la promotion de la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables. Le supplément sur le réseau finance les coûts non couverts par les prix du marché pour la prise en charge par les gestionnaires de réseaux de l’électricité produite par des technologies donnant droit à la rétribution (p. ex. énergie éolienne, énergie solaire, biomasse)12. Un supplément de 0,45 centime en tout par kilowattheure d’électricité est prélevé en 201313. Dans le cadre des délibérations concernant l’initiative parle- mentaire 12.400 «Libérer les investissements dans le renouvelable sans pénaliser les gros consommateurs» (21 février 2012), le Parlement a décidé, au cours de la sessi- on d’été 2013, de renforcer la promotion de la production d’électricité provenant d’énergies renouvelables au moyen de la RPC, en autorisant la hausse du supplément jusqu’à 1,5 centime par kilowattheure d’électricité. 2.3.2 Stratégie énergétique 2050 À la suite, principalement, de la catastrophe nucléaire de Fukushima, le Conseil fédéral et le Parlement ont pris, en 2011, la décision de principe d’abandonner progressivement l’énergie nucléaire. C’est pourquoi le Conseil fédéral a élaboré la Stratégie énergétique 2050 sur la base de perspectives énergétiques révisées. Avec le message du 4 septembre 2013 relatif au premier paquet de mesures de la Stratégie énergétique 2050 (Révision du droit de l’énergie) et à l’initiative populaire fédérale «Pour la sortie programmée de l’énergie nucléaire (Initiative ‹Sortir du nucléai- re›)»14, il a présenté un premier plan de mesures visant à garantir l’approvision- nement énergétique à long terme, plan qui doit être opposé, en tant que contre-projet indirect, à l’initiative populaire «Pour la sortie programmée de l’énergie nucléaire (initiative ‹Sortir du nucléaire›)». 11 Plans d’action «Efficacité énergétique» et «Energies renouvelables», OFEN, 2008 (www.bfe.admin.ch > Thèmes > Politique énergétique > Plans d’action 2008) 12 Art. 15b, al. 1, let. a, LEne 13 Art. 3j, al. 1, de l’ordonnance du 7 décembre 1998 sur l’énergie, RS 730.01 et art. 15b LEne 14 FF 2013 6771 8099
Dans la Stratégie énergétique 2050, le Conseil fédéral a fixé les priorités suivantes: – Réduire la consommation d’énergie et d’électricité par personne en renfor- çant les mesures d’efficacité. – Développer l’offre d’électricité, en particulier dans le domaine de la force hydraulique et des énergies renouvelables. La couverture de la demande requiert probablement aussi le développement de la production électrique fossile au moyen du couplage chaleur-force et, le cas échéant, au moyen de centrales à gaz ou d’une augmentation des importations d’électricité. – Garantir l’approvisionnement en énergie en maintenant l’importation d’électricité pour garantir la sécurité de l’approvisionnement, en développant les réseaux de transport d’électricité et en transformant les réseaux de distri- bution en réseaux intelligents («smart grids»). – Transformer et développer les réseaux électriques et le stockage d’énergie car le développement des nouvelles énergies renouvelables et l’injection fluctuante de courant nécessitent une transformation des réseaux électriques et une augmentation des capacités de stockage d’énergie. – Renforcer la recherche énergétique: en mars 2013, le Parlement a déjà adopté le plan d’action Recherche énergétique suisse coordonnée. – Charger la Confédération, les cantons, les villes et les communes de montrer l’exemple en couvrant largement leurs propres besoins en chaleur et en élec- tricité au moyen d’agents énergétiques renouvelables et en appliquant le principe de «meilleure pratique» dans tous les domaines. – Renforcer la coopération internationale: l’intensification de cette coopéra- tion dans le domaine de l’énergie doit se poursuivre. Le premier plan de mesures vise à atteindre les objectifs suivants: – La consommation moyenne finale d’énergie par personne et année doit diminuer de 16 % d’ici 2020 par rapport à 2000 (année de référence) et de 43 % d’ici 2035. La consommation finale d’énergie visée en 2035 avoisine 152 TWh (549 PJ). – La consommation d’électricité moyenne par personne et par an doit dimi- nuer de 3 % d’ici 2020 par rapport à 2000 (année de référence) et de 13 % d’ici 2035. Cela correspond à une consommation d’électricité estimée à 55 TWh (198 PJ) en 2035. – En 2020, la production annuelle moyenne d’électricité issue des nouvelles énergies renouvelables (sans la force hydraulique) devra atteindre au moins 4,4 TWh en 2020 et si possible au moins 14,5 TWh en 2035, ce qui corres- pond à 26 % de la consommation d’électricité estimée en 2035. – En 2035, la production annuelle moyenne d’électricité issue de la force hydraulique devra atteindre au moins 37,4 TWh, ce qui correspond à 65 % de la consommation d’électricité estimée en 2035. 8100
Les objectifs concernant la consommation d’énergie et le développement de l’électricité produite par des énergies renouvelables doivent être inscrits dans la loi sur l’énergie. En outre, il faut prévoir des mesures légales dans les domaines suivants: – Efficacité énergétique: relever la taxe sur le CO2 à 84 francs par tonne de CO2 pour augmenter l’efficacité énergétique dans le domaine des bâtiments et renforcer le programme Bâtiments. Améliorer l’efficacité énergétique dans l’industrie et les services et dans la mobilité, étendre les prescriptions d’efficacité à d’autres catégories d’appareils électriques et édicter des pres- criptions claires pour les fournisseurs d’électricité. – Energies renouvelables: p. ex. relever le supplément perçu sur le réseau jus- qu’à 2,3 centimes au plus par kilowattheure d’électricité, optimiser les taux de rémunération, accélérer les procédures d’autorisation. – Centrales à combustibles fossiles: p. ex. exempter partiellement, à certaines conditions, les installations de couplage chaleur-force de la taxe sur le CO2 grevant les combustibles. – Réseaux électriques: accélérer les procédures et introduire les compteurs intelligents («smart meters»). Ce plan de mesures épuise la totalité des potentiels que la Suisse est en mesure d’exploiter aujourd’hui avec les technologies disponibles ou prévisibles et qui ne nécessitent pas de politique et de coopération internationales coordonnées sup- plémentaires. 2.3.3 Plans du Conseil fédéral: passage d’un système d’encouragement à un système d’incitation La Stratégie énergétique 2050 prévoit que la politique énergétique sera réorientée stratégiquement pour la période postérieure à 2020, conjointement au développe- ment de la politique climatique. Le Conseil fédéral fixera suffisamment tôt des objectifs cohérents en matière de politique climatique et énergétique en tenant comp- te de l’évolution internationale et des dernières connaissances scientifiques. Il défend l’idée que les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de la consommation d’énergie doivent être poursuivis à long terme en agissant sur les prix. C’est pourquoi les systèmes d’encouragement actuels des énergies renouve- lables (RPC) et de l’efficacité énergétique (programme Bâtiments, appels d’offres concurrentiels, objectifs d’économies pour les entreprises électriques) seront rem- placés progressivement par un système d’incitation après 2021. Un système d’incitation comprenant une taxe sur l’énergie présente des avantages par rapport à un système d’encouragement qui se dégagent principalement à moyen et à long terme. Premièrement, le changement des prix relatifs laisse la liberté aux ménages et aux entreprises d’adapter leur comportement là où c’est possible au moindre coût. Deuxièmement, les incitations par les prix stimulent la recherche constante de meilleurs moyens de réduire les émissions et la consommation d’énergie. Ces incitations engendrent des effets dynamiques sur l’activité écono- mique. La charge fiscale supplémentaire liée à une taxe énergétique qui pèse sur la population devrait être compensée par le fait que le produit de la taxe sur l’énergie est redistribué dans la même mesure. Une autre utilisation possible consiste à abais- 8101
ser les impôts et taxes existants. Des gains d’efficience peuvent être obtenus suivant le mode de redistribution du produit de la taxe sur l’énergie ou du choix des impôts et taxes réduits en contrepartie. Ces gains réduisent le coût économique de la pour- suite des objectifs énergétiques et climatiques (cf. ch. 4.2.2). Le système d’incitation visé par le Conseil fédéral à long terme comporte deux volets: le prélèvement d’une taxe sur l’énergie et l’utilisation du produit de cette taxe. Des éclaircissements sont en cours pour déterminer concrètement les agents énergétiques (combustibles, carburants, électricité) qui doivent être soumis à la taxe sur l’énergie. Par une utilisation adéquate de son produit, cette taxe doit rester neutre pour les finances fédérales, c’est-à-dire que les pouvoirs publics ne doivent pas disposer de plus de fonds qu’ils n’en disposeraient sans la taxe sur l’énergie. Globa- lement, la charge des ménages et des entreprises ne devrait donc pas augmenter. Dans ce but, le produit de la taxe sur l’énergie pourrait être redistribué aux ménages et aux entreprises et compensé en outre par une réduction des impôts et des taxes actuels. Le produit de la taxe devrait être utilisé de sorte que les ménages à faible revenu ne soient pas plus lourdement grevés par la taxe sur l’énergie que les ména- ges à haut revenu. Pendant la phase transitoire à partir de 2021, les encouragements du premier plan de mesures de la Stratégie énergétique 2050 seront réduits à un minimum. Pendant cette période, une partie du produit de la taxe sur l’énergie pourra encore servir à financer des mesures d’encouragement. La transition doit s’effectuer d’une manière fluide et dans un délai raisonnable. En l’occurrence, il faut accorder une importance particulière à la sûreté de la planification des ménages et des entreprises et à la sauvegarde à long terme des recettes fiscales. Le Conseil fédéral examine la création d’une base constitutionnelle explicite pour un tel système d’incitations avec une taxe globale sur l’énergie. Le DFF a examiné diverses questions et variantes liées à l’introduction du système d’incitation envisagé en étroite collaboration avec le DFAE, le DFI, le DFJP, le DETEC, le DEFR et des représentations cantonales (cf. ch. 4.4)15. Une première consultation sur ce rapport prendra fin le 15 décembre 2013. 2.4 Principes fiscaux de la Confédération La politique fiscale de la Confédération est fondée sur les principes suivants: pre- mièrement, l’équilibre des finances fédérales doit être assuré constamment. Par conséquent, toute réforme fiscale doit être financièrement supportable. Deuxième- ment, les impôts doivent être équitables, c’est-à-dire qu’ils doivent être modérés et respecter le principe de la capacité économique. Troisièmement, le système fiscal doit être aussi efficient que possible et influencer le moins possible les décisions individuelles et entrepreneuriales. Quatrièmement, il doit être simple. Cinquième- ment, il doit être attrayant et tenir compte de l’attrait de la place suisse. Pour ce qui est de la présente initiative, la question de l’adéquation de l’objet fiscal est capitale pour la politique fiscale. Au niveau de la Confédération, le revenu (impôt fédéral direct) et la consommation (TVA) servent en premier lieu d’objets 15 Cf. Rapport du DFF du 2 septembre 2013 «Passage d’un système d’encouragement à un système d’incitation / Variantes d’un système d’incitation dans la politique énergétique», téléchargeable sous www.efd.admin.ch > Thèmes > Impôts > Système d’incitation en matière énergétique. 8102
fiscaux à large base de calcul pour garantir une production durable de recettes. L’étendue de la base de calcul permet en effet d’appliquer des taux modérés et diminue les possibilités d’éluder l’impôt. Des biens dont la consommation engendre des effets externes négatifs, c’est-à-dire dont le coût ne peut pas être mis entièrement à la charge de leurs responsables, servent d’objets fiscaux supplémentaires. Les impôts spéciaux sur la consommation d’énergie non renouvelable, de tabac et d’alcool en sont des exemples. Toutefois, les impôts à caractère incitatif ne jouent qu’un rôle complémentaire pour la production de recettes, car leur rendement est réduit en raison de l’étroitesse de leur base de calcul et diminue en vertu de l’effet incitatif. 2.5 Importance de la TVA La TVA joue un rôle très important dans la politique fiscale de la Confédération. Elle n’est pas seulement la principale source de recettes de la Confédération: elle devient aussi de plus en plus importante pour financer les assurances sociales. Sa part aux recettes fiscales de la Confédération est généralement de plus de 35 % (cf. tableau 1). Dans les pays membres de l’OCDE aussi, les impôts à la consommation généraux ou spéciaux (qui font partie des impôts indirects) constituent une impor- tante source de recettes puisqu’ils produisent 30 % de l’ensemble des recettes en moyenne pour l’OCDE16. En matière d’imposition de la consommation, la TVA est l’impôt le plus important. Tableau 1 Evolution des recettes de la TVA et des recettes fiscales17 de la Confédération Année Recettes de la TVA Taux de croissance Recettes fiscales de Part de la TVA aux en millions de francs par rapport à l’année la Confédération recettes fiscales de précédente en % en millions de francs la Confédération en % 2007 19 684 3,5 53 336 36,9 2008 20 512 4,2 58 752 34,9 2009 19 830 3,3 55 890 35,5 2010 20 672 4,2 58 157 35,5 2011 21 642 4,7 58 996 36,7 2012 22 050 1,9 58 788 37,5 La TVA a pour but d’imposer la consommation finale non entrepreneuriale sur le territoire suisse. Toutefois, ce ne sont pas les consommateurs qui sont assujettis mais les entreprises. On part du principe, en l’occurrence, que les entreprises repor- tent la TVA sur leur clientèle et n’ont, par conséquent, pas à supporter la charge de la TVA. 16 Cf. OCDE 2012. 17 Créances brutes, c’est-à-dire recettes avant déduction des pertes sur débiteurs selon le compte d’Etat. Une augmentation du taux de la taxe de 0,4 point de pourcentage est survenue le 1er janvier 2011 (financement additionnel de l’AI). 8103
La livraison de biens et la fourniture de services par les entreprises sont imposables. Le taux normal de 8 %, le taux réduit de 2,5 % ou le taux spécial de 3,8 % s’applique suivant la nature de la prestation fournie. L’application du taux réduit de 2,5 % aux biens de consommation journalière est due à des raisons de politique sociale. Le taux réduit s’applique notamment à la livraison de denrées alimentaires, de médicaments, de livres, de journaux, de revues et de divers produits pour l’agriculture (art. 25, al. 2, LTVA). Le taux spécial de 3,8 % pour les prestations d’hébergement a été introduit pour cinq ans au milieu des années 90 afin de venir en aide à l’hôtellerie qui traversait une passe difficile. Depuis lors, ce taux spécial a été prorogé cinq fois, la dernière fois le 21 juin 2013, jusqu’à fin 2017. Pour éviter un cumul de l’impôt, le contribuable a le droit de déduire à titre d’impôt préalable la TVA que son fournisseur lui a facturée. Une partie des prestations économiques est exclue du champ de la TVA. Il s’agit principalement de prestations relevant de la santé, de la formation, de la culture, du sport, des services financiers et des assurances ainsi que de la vente et de la location d’immeubles d’habitation et de logements (art. 21 LTVA). Une entreprise qui four- nit des prestations exclues du champ de l’impôt ne doit pas payer la TVA sur son chiffre d’affaires, mais ne peut pas non plus déduire à titre d’impôt préalable la TVA que ses fournisseurs lui ont facturée. 2.5.1 Evolution des recettes et des recettes affectées de la TVA L’évolution des recettes de la TVA est presque parallèle, à moyen terme, à celle de l’économie générale, car la part du revenu affectée à la consommation varie peu avec le temps (cf. tableau 2). C’est pourquoi le taux d’augmentation du PIB nominal pronostiqué est un bon indicateur pour estimer les recettes de la TVA. Cette conti- nuité, c’est-à-dire cette évolution relativement bien prévisible des recettes constitue une autre raison de l’importance de la TVA en tant que source de recettes de la Confédération. Tableau 2 Evolution du PIB et des recettes de la TVA18 Année Taux d’augmentation Taux d’augmentation en % Recettes de la TVA en % du PIB nominal des recettes de la TVA par en % du PIB par rapport à l’année rapport à l’année précédente précédente 2007 6,4 1,8 3,57 2008 5,0 3,0 3,50 2009 –2,4 –1,0 3,55 2010 3,63 5,4 3,62 2011 2,2 1,1 3,58 18 Contrairement au tableau 1, le tableau 2 montre des créances brutes corrigées de tout changement structurel (modifications des taux et de l’assiette). De plus, les recettes de la TVA sont présentées par période et non pas selon réception par l’AFC. 8104
En 2012, 23 % des recettes de la TVA étaient affectées. Le tableau 3 donne un aperçu de l’importance et de l’évolution de ces recettes affectées. Un point de pourcentage des recettes de la TVA est destiné à l’AVS. De 1999 à la fin 2012, 33,7 milliards de francs ont été affectés à l’AVS. Ces recettes ont couvert en moyenne 7,4 % des dépenses annuelles de l’AVS. Depuis 2001, 0,1 point de pourcentage des recettes de la TVA est affecté au finan- cement des projets d’infrastructure des transports publics (FTP) (art. 196, ch. 3, al. 2, let. e, Cst.). Jusqu’à fin 2012, des recettes de la TVA d’un montant de 3,5 milliards de francs en tout ont été consacrées aux transports publics. De plus, 5 % du produit non affecté de la TVA servent à financer la réduction des primes de l’assurances-maladie. Enfin, les taux de la TVA ont été relevés de 0,4 point de pourcentage le 1er janvier 2011 pour garantir le financement de l’AI jusqu’au 31 décembre 2017. Tableau 3 Evolution des recettes affectées de la TVA19 (en millions de francs) Année Point de pourcen- Point de pourcen- Pour mille de 0,4 point de Réduction Recettes tage de la TVA tage de la TVA la TVA pour les pourcentage pour des primes de générales de pour l’AVS 17 % à la Confé- grands projets le financement l’assurance- la Confédé- 83 % au fonds dération ferroviaires21 supplémentaire maladie23 ration de l’AVS20 de l’AI22 2007 2 144 439 302 0 840 15 959 2008 2 235 458 315 0 875 16 629 2009 2 167 444 305 0 849 16 065 2010 2 257 462 318 0 884 16 751 2011 2 269 465 320 863 889 16 836 2012 2 288 469 309 1 103 896 16 985 2.5.2 Charge de la TVA sur les entreprises La TVA a pour but d’imposer la consommation finale non entrepreneuriale sur le territoire suisse. L’entreprise assujettie la reporte donc en principe sur sa clientèle. Il peut arriver cependant que la TVA grève l’activité entrepreneuriale. C’est le cas lorsque la charge fiscale mène à un recul de la demande et que seule une partie de la TVA peut être reportée sur les consommateurs. De plus, suivant le montant du taux, la TVA tempère, comme tout impôt, la propension à consommer dans le pays et peut entraîner la revendication de hausses des salaires. 19 Cf. note 18. 20 Art. 130, al. 3, Cst. en relation avec l’art. 1 de l’arrêté fédéral du 20 mars 1998 sur le relèvement des taux de la taxe sur la valeur ajoutée en faveur de l’AVS/AI, RS 641.203. 21 Art. 196, ch. 3, al. 2, let. e, Cst. en relation avec le ch. I de l’ordonnance du 23 décembre 1999 sur le relèvement des taux de la taxe sur la valeur ajoutée en faveur du financement des grands projets ferroviaires, RO 2000 1134. 22 Art. 196, ch. 14, al. 2, Cst. 23 Art. 130, al. 4, Cst. 8105
Les entreprises sont grevées d’une taxe occulte sur une partie de leurs investisse- ments et des prestations qu’elles acquièrent. Cette taxe occulte se forme principale- ment lorsque des prestations sont exclues du champ de la TVA. Etant donné que l’impôt préalable grevant ces prestations ne peut pas être déduit, une taxe occulte grève la fourniture de telles prestations. Une taxe occulte se forme également lors- que des prestations imposables en soi sont cofinancées par des subventions; dans ce cas en effet, le bénéficiaire des subventions doit réduire la déduction de l’impôt préalable. D’après une étude pour la Suisse datant de 2007, le coût administratif du système actuel de la TVA se monte à 480 millions de francs par an24. Ce coût comprend les frais relatifs aux obligations de renseigner, comme l’établissement et la remise des décomptes de la TVA, la remise de renseignements à l’AFC, la facturation conforme aux exigences de la TVA, la demande de remboursement de l’impôt anticipé et du dégrèvement ultérieur de l’impôt ainsi que la remise de renseignements dans le cadre des contrôles de l’AFC. Ce coût tient également compte des frais de stockage, de formation, de consultation de conseillers fiscaux et des processus de décision. 2.5.3 Charge de la TVA sur les ménages En principe, la TVA grève les ménages dans la mesure dans laquelle ils affectent leur revenu à des dépenses de consommation. En l’occurrence, on admet que seuls les consommateurs (et non pas les entreprises) supportent la charge de la TVA. Les résultats d’études empiriques étayent ces hypothèses dans l’ensemble25. Des études sur les effets de répartition de la TVA en Suisse montrent que la TVA est régressive en fonction du montant du revenu des ménages, mais que cette régressi- vité est relativement faible26. En se fondant sur une compilation des relevés de l’OFS concernant le budget des ménages de 2006 à 2009, l’AFC a calculé la charge de la TVA sur les ménages suisses. Le tableau 4 indique la charge de la TVA sur les ménages, en pourcentage, pour diverses classes de revenu. Les ménages à très haut revenu ne sont pas pris en considération. Il apparaît en effet que la charge diminue proportionnellement lorsque le revenu augmente. La TVA suisse a donc des effets légèrement régressifs sur le revenu des ménages. 24 Rambøll Management GmbH, p. 6 et ch. 3.1.2. 25 Cf. à ce sujet la bibliographie dans Morger, 2011. 26 Mottu 1997. 8106
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