Mesures techniques et évaluation des risques environnementaux pour la conservation des éponges d'eaux profondes

 
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Mesures techniques et évaluation des risques environnementaux pour la conservation des éponges d'eaux profondes
Mesures techniques et évaluation
 des risques environnementaux
pour la conservation des éponges
         d’eaux profondes
Mesures techniques et évaluation des risques environnementaux pour la conservation des éponges d'eaux profondes
Mesures techniques et évaluation des risques environnementaux pour la conservation des éponges d'eaux profondes
Mesures techniques et évaluation
 des risques environnementaux
pour la conservation des éponges
         d’eaux profondes
                                      de

                              Tony Thompson
                                Consultant
                Département des pêches et de l’aquaculture
      Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture
                                    Rome

                                      et
                             Susanna D. Fuller
                           Oceans North, Canada

    Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture
                                 Rome, 2021
Mesures techniques et évaluation des risques environnementaux pour la conservation des éponges d'eaux profondes
Citer comme suit:
Thompson, T. et Fuller, S.D. 2021. Mesures techniques et évaluation des risques environnementaux pour la conservation des éponges d’eaux
profondes. FAO, Rome.

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Photo de couverture:
©FAO/Fisheries and Oceans Canada
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Table des matières
Remerciements. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . iv
Abréviations et acronymes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . v
Résumé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . vii
1. INTRODUCTION. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
2. ÉCOSYSTÈMES MARINS VULNÉRABLES. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
3. FONCTIONS ÉCOSYSTÉMIQUES DES ÉPONGES D’EAUX PROFONDES. . . . 2
      3.1. Le rôle écosystémique des éponges. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
4. MESURES RÉGIONALES DE PROTECTION DES ÉPONGES. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
      4.1 Inclusion des éponges comme espèce indicatrice d’EMV par les ORGP. . . . . . . . 5
      4.2 Application de seuils de rencontre pour l’établissement d’EMV . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
               4.2.1 Rencontres avec des éponges dépassant la valeur-seuil. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
               4.2.2 Rencontres avec des éponges ne dépassant pas la valeur-seuil. . . . . . . . . . . . 9
               4.2.3 Prélèvements d’éponges par la pêche profonde. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
      4.3 Zones actuellement fermées en vue de protéger les EMV abritant
      des éponges . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
      4.4 Définition des zones de pêche de fond existantes et de protocoles
       de pêche exploratoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
 5. DISPOSITIONS PRISES DANS LES ORGP POUR ATTÉNUER LES
    RISQUES POUR LES ÉPONGES.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
      5.1 Réduction des zones de chevauchement. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
      5.2 Définition améliorée de l’empreinte de pêche. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
      5.3 Informations sur les engins, modifications et restrictions. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
6. ÉVALUATION DES RISQUES DANS LE CONTEXTE DE L’APPROCHE
   ÉCOSYSTÉMIQUE DES PÊCHES. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
7. CADRE D’ÉVALUATION DES RISQUES ÉCOLOGIQUES, ET
   INDICATEURS FONDÉS SUR LES RISQUES. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
      7.1 Identification des éléments d’un CERE. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
      7.2 Application du CERE et des indicateurs fondés sur le risque aux habitats
      d’éponges de l’Atlantique Nord . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
8. CHANGEMENTS DES FONCTIONS ÉCOSYSTÉMIQUES DES
   ÉPONGES CAUSÉS PAR LA PÊCHE.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
9. STRATÉGIE POUR INCORPORER LES FONCTIONS DES CHAMPS
   D’ÉPONGE AUX CADRES DE GESTION. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
10. BIBLIOGRAPHIE. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
Mesures techniques et évaluation des risques environnementaux pour la conservation des éponges d'eaux profondes
iv

     Remerciements
     Le présent rapport a été relu par Merete Tandstad (FAO, Département des pêches et de l’aquaculture
     – NFIF), Edoardo Mostarda (FAO, NFIF), Blaise Kuemlangan (FAO, Service droit et développement -
     LEGN), Ellen Kenchington (Pêches et Océans Canada), et Odd Aksel Bergstad (Institut de Recherche
     Marine, Norvège).
Mesures techniques et évaluation des risques environnementaux pour la conservation des éponges d'eaux profondes
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Abréviations et acronymes
AEP                        approche écosystémique des pêches
APSOI                      Accord relatif aux pêches dans le sud de l’Océan Indien
ASFIS                      Aquatic Sciences and Fisheries Information System
CCAMLR                     Commission pour la conservation de la faune et la flore marines de
                           l’Antarctique
CPPN                       Commission des pêches du Pacifique Nord
CCPR                       Code de conduite pour une pêche responsable
CDB                        Convention sur la diversité biologique
CERE                       cadre d’évaluation des risques écologiques
CGPM                       Commission générale des pêches pour la Méditerranée
CIEM                       Conseil international pour l’exploration de la mer
CNUDM                      Convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982
CNUED                      Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement
CPANE                      Commission des pêches de l’Atlantique Nord-Est
Directives DSF de la FAO   Directives internationales sur la gestion de la pêche profonde en haute mer
                           de la FAO (adoptées en 2008)
DSF                        pêches en eaux profondes
ÉÉI                        éléments écologiques importants
EMV                        écosystème marin vulnérable
ENN                        effets néfastes notables
ESA                        évaluation scientifique des écosystèmes
FAO                        Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture
MCE                        mesures de conservation et d’exécution
ODD                        Objectifs de Développement Durable
OPANO                      Organisation des peches de l’Atlantique du Nord-Ouest
OPASE                      Organisation des pêches de l’Atlantique du Sud-Est
ORGP                       organisations régionales de gestion des pêches
ORGPPS                     Organisation régionale de gestion des pêches du Pacifique Sud
ORP                        organe régional des pêches
SICA                       analyse qualitative des risques
SponGES                    Projet SponGES, écosystèmes de champs d’éponges d’eaux profondes de
                           l’Atlantique Nord, approche intégrée de préservation et d’exploitation
                           viable
TAC                        total admissible des captures
UNFSA                      Accord des Nations Unies sur les stocks de poissons
VMS                        système de surveillance des navires par satellite
WG                         groupe de travail
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vii

Résumé
Réduire les impacts de la pêche hauturière profonde sur les espèces non ciblées, associées et dépendantes,
y compris sur les écosystèmes marins vulnérables (EMV) est un élément important de toute approche
écosystémique de la gestion des pêches. L’approche écosystémique est une forme évoluée de la gestion
des pêches, incorporant la protection de la biodiversité, et reposant sur des instruments juridiques,
dont la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (CNUDM), l’Accord des Nations Unies sur
les stocks de poissons (UNFSA)1, l’Accord d’application2, et la Convention sur la diversité biologique
(CDB). Des instruments juridiques non contraignants, notamment le Code de conduite pour une pêche
responsable (CCPR), les résolutions de l’Assemblée générale des Nations Unies relatives à la viabilité des
pêches, et les Directives internationales sur la gestion de la pêche profonde en haute mer (Directives DSF
de la FAO ; FAO, 2009) indiquent d’autres pistes vers la réduction des impacts des activités de pêche.
Tout récemment, les Objectifs d’Aichi pour la biodiversité découlant de la Convention sur la diversité
biologique (CDB), et le cadre défini par les Objectifs de développement durable (ODD), en particulier
l’Objectif 14, sont venus renforcer les structures permettant aux États de prendre des dispositions pour
diminuer les pertes de biodiversité dans les écosystèmes marins. Les éponges d’eaux profondes sont des
éléments importants de certains EMV, et peuvent être elles-mêmes considérées comme des EMV pour
certaines espèces données, soit qu’elles forment sur les fonds marins des agrégats denses, monoespèces
ou multi-espèces, soit qu’elles entrent dans des communautés diverses de coraux et d’éponges des grands
fonds. Les éponges d’eaux profondes sont souvent longévives et de croissance lente. Elles assument des
fonctions écosystémiques très diverses, notamment en offrant un habitat à des espèces associées sur des
substrats rocheux ou meubles, en participant au couplage benthique-pélagique, à l’absorption et aux
cycles du carbone, de l’azote et de la silice, à la décomposition des particules, au filtrage de l’eau et à
l’élimination des bactéries, ainsi qu’à la déflexion des courants et à l’altération du microenvironnement
qui les entoure. Relativement moins bien étudiées que les espèces des eaux peu profondes et des récifs
coralliens, les éponges d’eaux profondes jouent pourtant un rôle analogue dans l’écosystème. Mais on
connaît beaucoup moins bien leur rythme de croissance, leur mode de reproduction et de rétablissement
que ceux des systèmes d’eaux peu profondes.
Réagissant aux engagements, pris par les États, de donner suite aux demandes figurant dans les
résolutions de l’Assemblée générale des Nations Unies relatives à la viabilité des pêches, et de se
conformer aux principes des Directives DSF de la FAO, les organisations régionales de gestion des
pêches (OGRP) ont mis en place diverses dispositions visant à éviter et atténuer les impacts de la pêche
profonde sur les éponges, notamment en identifiant ces dernières comme indicateur possible d’EMV,
en mettant au point pour les éponges des seuils de rencontre qui déclenchent l’application de règles
d’éloignement pour les navires de pêche, en incluant les éponges dans les évaluations des effets néfastes
notables (ENN) de la pêche sur les écosystèmes des fonds marins, en fermant des zones et en mettant au
point des protocoles de pêche exploratoire. On a pu dans certains cas prédire à partir d’une modélisation
écologique la localisation de fortes concentrations d’éponges d’eaux profondes, mais la majeure partie des
informations sur la localisation des éponges provient de l’évaluation des prises accessoires des activités
de pêche et des identifications issues des recherches par chalutage, certaines informations étant déduites
d’échantillonnages in situ (images fixes et vidéos). Les mesures de gestion sont plus ou moins complètes
selon l’ORGP, et les conseils concernant les éponges d’eaux profondes peuvent être différents, en fonction
du type d’écosystème, du type de pêche et des engins de pêche utilisés, du niveau des connaissances
scientifiques et des compétences taxonomiques, ainsi que des modes de pêche pratiqués.

1
  Dont le nom officiel est « Accord aux fins de l'application des dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10
décembre 1982 relatives à la conservation et à la gestion des stocks de poissons dont les déplacements s'effectuent tant à l'intérieur qu'au-delà
de zones économiques exclusives (stocks chevauchants) et des stocks de poissons grands migrateurs » 34 ILM 1542 (1995) (ONU, 2020)
2
  Dont le nom officiel est « Accord visant à favoriser le respect par les navires de pêche en haute mer des mesures internationales de
conservation et de gestion » (FAO, 1995).
Mesures techniques et évaluation des risques environnementaux pour la conservation des éponges d'eaux profondes
viii

       Certains États et ORGP ont fixé des méthodes d’évaluation des risques écologiques, et les Directives DSF
       de la FAO présentent des éléments spécifiques à prendre en considération pour l’évaluation des ENN
       sur les EMV. Pour ce qui est des pêches, le cadre d’approche écosystémique des pêches (AEP), dont la
       FAO fait la promotion, comporte aussi une procédure d’évaluation des risques, qui est une des étapes
       essentielles de la planification de la gestion des pêches (FAO 2003, 2005, 2012). Il y a en outre bon nombre
       de cadres d’évaluation des risques qui peuvent servir à atténuer et éviter les impacts de la pêche profonde
       sur les écosystèmes d’éponges.
       Les informations spécifiques qui ont servi à définir ces modes d’évaluation des risques proviennent du
       projet SponGES, financé par l’Initiative en faveur de la croissance bleue (programme-cadre Horizon 2020
       de l’Union européenne) entre 2015 et 2019. Le projet SponGES a stimulé des recherches sans précédent
       sur les éponges d’eaux profondes de l’Atlantique Nord, avec ce résultat que l’on connaît et comprend
       mieux désormais la distribution des éponges, leurs fonctions écologiques, les impacts des activités
       humaines et du changement climatique, leur rôle dans l’écosystème des eaux marines profondes et les
       contributions qu’elles sont susceptibles d’apporter grâce à leurs composantes biotechnologiques. Les
       informations scientifiques ainsi obtenues peuvent être intégrées aux cadres politiques et directifs visant
       les écosystèmes des eaux profondes.
1

1. Introduction
L’importance qu’il y a à protéger l’environnement de la haute mer des impacts des activités de pêche
est mentionnée expressément à l’article 119 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer
(CNUDM, 1982), s’agissant aussi bien des espèces exploitées (par. 1 a) que des espèces qui leur sont
associées ou en dépendent (par. 1b). La mise en œuvre de cette disposition a été soulignée lors du
Sommet planète Terre de 1992 (CNUED), en particulier au chapitre 15 d’Action 21, «Préservation de
la diversité biologique», qui a abouti à la Convention sur la diversité biologique (CDB) de 1992. La
protection de l’environnement marin est également au nombre des objectifs d’Aichi pour la biodiversité
(CDB, 2020) convenus en 2010, et des Objectifs de développement durable (ODD, 2020) auxquels ont
abouti les débats de la conférence Rio + 20 de 2012.
Le souci d’une utilisation viable des ressources biologiques de la mer et la nécessité d’améliorer la
conservation et la gestion des stocks de poissons grands migrateurs et des stocks chevauchants,
souligné lors de la CNUED de 1992, a suscité des négociations, puis l’adoption de l’Accord des Nations
Unies sur les stocks de poissons (UNFSA), qui donnait toute son importance au rôle qu’assument les
organes régionaux des pêches (ORP), et plus particulièrement les organisations régionales de gestion
des pêches (ORGP). Depuis 2006, stimulées par l’Assemblée générale des Nations Unies (Résolution
61/105 de l’Assemblée générale), les ORGP ont inclus les effets néfastes possibles des engins de pêche
profonde sur les habitats des eaux profondes en haute mer dans les dispositions qu’elles ont adoptées
pour protéger les écosystèmes marins vulnérables (EMV). Ces organisations, qui sont compétentes
pour gérer les pêches profondes en haute mer, ont en particulier adopté une série de mesures (Base de
données de la FAO sur les EMV [FAO, 2020]) en vue de prévenir les pratiques de pêche destructrices et
de concourir à la protection de la biodiversité dans les fonds marins. Ces mesures peuvent se répartir
dans les grandes catégories ci-après:

     1. Définition des zones de pêche profonde existantes («empreinte») où la pêche profonde est
        autorisée sous réserve de diverses mesures de contrôle visant à protéger les espèces ciblées
        et accessoires;
     2. Adoption de protocoles d’éloignement à respecter lorsque sont dépassés les seuils de
        prises dans un EMV;
     3. Définition des aires extérieures à l’empreinte où la pêche profonde est fermée mais où
        de nouvelles pêcheries profondes seront autorisées sous réserve de protocoles de pêche
        exploratoire;
     4. Définition des aires, situées à l’intérieur ou à l’extérieur de l’empreinte, qui sont fermées à
        la pêche profonde en vue de protéger des EMV d’ENN.
Les ORGP conviennent de ce type de dispositions spatiales et les adoptent en les ajustant au contexte
régional, leurs membres étant légalement tenus de les respecter. De plus, dans les régions où il n’y a pas
d’ORGP, ce sont les États signataires de la CNUDM ayant des navires de pêche («États du pavillon») qui
sont responsables de la conservation en haute mer.

2. Écosystèmes marins vulnérables
Les EMV comportent des espèces, des communautés ou des habitats qui sont vulnérables aux impacts
des activités de pêche. La vulnérabilité d’un écosystème est fonction de celle des populations, des
communautés ou des habitats qui le constituent.
Au début et au milieu des années 2000, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté une série de
résolutions [résolutions 58/14 (2004), 59/25 (2005) et 61/105 (2006) de l’Assemblée générale] appelant à
élaborer des mesures de gestion protégeant les EMV contre les ENN des activités de pêche, à la suite
2

    de quoi a été entreprise la mise au point de directives internationales applicables à la pêche profonde.
    Puis ont été adoptées en 2008 les Directives internationales sur la gestion de la pêche profonde en haute
    mer (Directives DSF de la FAO: FAO, 2009), élaborées pour les pêches dont les prises comprennent des
    espèces dont la viabilité n’est possible qu’avec de faibles taux d’exploitation, et dont les engins risquent
    de toucher les fonds marins. Ces directives précisent les critères à appliquer notamment pour définir
    les EMV, pour établir ce qui peut constituer un EMV et pour évaluer les impacts des activités de pêche.
    Il est indiqué dans les Directives DSF de la FAO que les EMV comportent des populations, des
    communautés et des habitats où des perturbations de courte durée ou chroniques peuvent causer des
    altérations importantes et qui peuvent prendre de cinq à 20 ans pour se rétablir d’impacts liés à la pêche
    (par. 14 à 20). Les caractéristiques à retenir comme critères pour identifier les EMV sont recensées dans la
    liste ci-après: caractère unique ou rareté, importance fonctionnelle de l’habitat, fragilité, caractéristiques
    du cycle biologique des espèces le composant qui rendent leur rétablissement difficile, et complexité
    structurelle (par. 42). Les Directives donnent des exemples de groupes d’espèces, de communautés,
    d’habitats et de caractéristiques souvent susceptibles de correspondre à un EMV. Il s’agit notamment
    des coraux d’eau froide et des hydraires, de certains types de communautés où les éponges dominent,
    de faunes denses émergentes et de communautés vivant dans les zones d’infiltration et de cheminées
    hydrothermales, généralement associés à des structures sous-marines spécifiques, telles que talus,
    monts sous-marins, canyons, fosses, zones d’infiltration et cheminées hydrothermales. En général, les
    ORGP considèrent les EMV comme écosystèmes benthiques fonctionnels qui subissent ou peuvent
    subir des altérations importantes à cause des ENN de la pêche profonde. Les résolutions de l’Assemblée
    générale des Nations Unies et les Directives DSF de la FAO sont des instruments juridiques adoptés,
    mais sans force contraignante, comme aide et guide pour les ORGP. Les règles visant les EMV sont
    formulées par la Commission (organisme de prise de décision et de gestion d’une ORGP) avec l’accord
    des membres, conformément au mandat établi dans les conventions qui les régissent, sur la base d’avis
    scientifiques (d’un organe scientifique consultatif intérieur ou extérieur à l’ORGP). L’organe scientifique,
    généralement à la suite d’une demande de la Commission, examine les éléments permettant de décider
    s’il y a un EMV dans une zone précise, ou s’il risque d’y en avoir un, et donne les avis correspondants.
    La Commission examine les avis scientifiques et selon le cas, adopte une disposition protégeant l’EMV
    ainsi qu’une limite de gestion. Ces dispositions deviennent alors contraignantes pour les membres
    contractants et les membres non contractants coopérants relevant de la structure de gestion des pêches
    (par ex. les mesures de conservation et d’exécution – MCE – de l’Organisation des pêches de l’Atlantique
    Nord-Ouest, OPANO). Les EMV, de même que les stocks de poissons, présentent des caractéristiques
    particulières selon les environnements locaux et régionaux, et les critères retenus sont à ajuster en
    conséquence (Directives DSF de la FAO, par. 43), comme le démontrent les différentes dispositions
    prises par les ORGP (Base de données de la FAO sur les EMV).

    3. Fonctions écosystémiques des éponges d’eaux
    profondes
    Les éponges marines n’ont pas été incluses dans les quelques exemples d’organismes susceptibles de
    constituer des EMV donnés dans la résolution 61/105 de l’Assemblée générale des Nations Unies (par.
    80 et 83c) et d’autres qui ont suivi, de ce fait elles n’ont été ajoutées que lentement dans les dispositions
    de gestion des pêches dans les EMV adoptées par les ORGP. Elles ont toutefois été incluses dans les
    Directives DSF de la FAO (FAO, 2009), et les politiques ainsi mises en place ont stimulé la collecte et
    la compilation de données sur les éponges d’eaux profondes, l’élaboration de mesures de protection
    entrant dans les obligations prévues par les ORGP pour protéger des EMV risquant de subir l’impact
    d’activités de pêche. Les Directives ont également stimulé l’appui au développement des recherches sur
    l’écologie et les fonctions écosystémiques des éponges d’eaux profondes, qui n’avaient porté jusqu’à
    récemment que sur les écosystèmes des eaux peu profondes, dans les récifs coralliens tropicaux pour la
    plupart d’entre elles.
3

Les explorations des systèmes d’eaux plus profondes, portant entre autres (1992-1995) sur les invertébrés
benthiques des eaux islandaises (Benthic Invertebrates of Iceland waters, ou BIOICE), ont visé surtout
les «ostur» (Geodia), identifiées d’abord par des pêcheurs au large des îles Féroé et de l’Islande (Bruntse et
Tendal, 2001). D’autres explorations portant sur les champs de Pheronema carpenteri (Hexactinellidae) de
l’Atlantique Nord-Est (Rice, Thurston et New, 1990) et sur les Geodiidae de l’Atlantique Nord (Klitgaard
et Tendal, 2004: Murillo et al., 2012: Beazley et al., 2013) ont permis de déterminer que les grands agrégats
d’éponges d’eaux profondes fournissent à d’autres espèces marines un habitat sur lequel elles exercent
une influence. Ces champs étaient composés pour l’essentiel des espèces Astrophorina (Demospongiae)
et Hexactinellidae. Les champs d’Astrophorina sont souvent multi-espèces (Klitgaard et Tendal, 2004:
Beazley et al., 2015), tandis que ceux d’Hexactinellidae présentent plutôt des agrégats monoespèces,
composées de Pheronema carpenteri (Rice et al., 1990) et de Vazella pourtalesi (Beazley et al., 2018). En
2016 a été lancé le projet de recherche et d’innovation SponGES, financé grâce à l’Initiative en faveur
de la croissance bleue (programme-cadre Horizon 2020), l’objectif étant d’améliorer la conservation
et l’exploitation viable des écosystèmes d’éponges d’eaux profondes de l’Atlantique Nord. En quatre
années de recherches et d’échanges avec les parties prenantes, SponGES a pu a) étudier la distribution, la
diversité, la biogéographie, les fonctions et la dynamique de ces écosystèmes, b) améliorer l’innovation
et les applications industrielles en révélant leur potentiel biotechnologique, c) développer les capacités
pour la modélisation, la compréhension et la prédiction des menaces, des impacts, et des changements
que connaîtront ces champs du fait du climat ou de l’action de l’homme, et d) faire monter l’interaction
entre science et politiques du niveau régional au niveau international, d’un bout à l’autre de l’Atlantique
Nord, en vue d’une meilleure gestion des ressources et d’une bonne gouvernance de ces écosystèmes.
Les éponges d’eaux profondes, écosystèmes qui étaient pratiquement inconnus il a quelques décennies
à peine, sont maintenant considérées comme structures biologiques fondatrices dans l’environnement
benthique.

3.1 Le rôle écosystémique des éponges
Des études de recherche ont montré que les espèces qui forment des structures en eaux profondes
assument des fonctions écosystémiques très diverses, distribuées selon la profondeur, le flux des
courants et le type de substrat (Buhl-Mortensen et al., 2010). Les études consacrées aux écosystèmes
benthiques confirment les différents rôles que jouent les éponges pour le fonctionnement des écosystèmes
(Maldonaldo et al., 2016). Les effets sont notamment un accroissement de l’abondance et de la diversité
des espèces associées, de la production, du traitement du carbone organique, du couplage benthique-
pélagique, de la biofiltration, de la complexité structurelle et biologique, de la bioprospection et de
l’atténuation du changement climatique (Tableau 1).

Table 1. Fonctions écosystémiques des éponges d’eaux profondes.

 Fonction écosystémique                                          Source

                                                                 Witte et al., 1997; Klitgaard, 1995; Beazley et al., 2015;
 Bio-ingénierie de l’habitat, modification des courants locaux
                                                                 Murillo et al., 2012; Kutti et al., 2014;
 du fond
                                                                 Maldonaldo et al., 2016 et les références qui y sont citées

                                                                 Witte et Graf, 1996; Kutti, Bannister et Fosså, 2013; Cathalot
 Piégeage du carbone, cycle de l’azote et de la silice           et al., 2015; Maldonaldo et al., 2016 et les références qui y
                                                                 sont citées; Hendry et al., 2019; Pham et al., 2019

                                                                 Witte et al., 1997; Kahn et al., 2015; Maldonaldo et al., 2016
 Déposition de particules
                                                                 et les références qui y sont citées

 Filtrage et élimination de l’abondance bactérienne              Kahn et al., 2015
4

    L’importance relative de ces fonctions dépend du type de sédiment, de la taille et de la densité des
    champs d’éponges, de la longévité des espèces, de la morphologie et de la structure des éponges, de la
    situation sur le gradient de profondeur et de la biomasse totale (Groupe de travail ESA de l’OPANO,
    2018) (Tableau 2).

    Tableau 2. Compilation préliminaire des analyses de traits biologiques des EMV, y compris les modalités, les
    fonctions et les vulnérabilités possibles des coraux et des éponges face à la pêche (source: groupe de travail ESA
    de l’OPANO, 2018)

                                                                                  Hypothèses sur l’impact
         Trait                Modalités               Liens fonctionnels                                             Références
                                                                                       de la pêche

                                                            Productivité,
                        Très petite < 100 mm                                       On s’attend à ce que les
          Taille                                         contribution à la                                            Sainsbury,
                         Petite 100-300 mm                                       grandes éponges soient plus
      maximale de                                     biodiversité, capacité                                         Campbell et
                       Moyenne 301 à 500 mm                                       vulnérables aux engins de
        l’adulte                                     de filtrage, piégeage du                                       Whitelaw, 1992
                          Grande > 500 mm                                         pêche qui touchent le fond
                                                              carbone

                                                                                    On s’attend à ce que la
                         Massive - globuleuse
                                                                                 morphologie et la taille soient
                         Massive - irrégulière
                                                                                 des facteurs de capturabilité.
                      Tubulaire/Vase/Cylindrique            Productivité,
                                                                                  Par ex., 100% des éponges
                             Flabelliforme               contribution à la
                                                                                  ramifiées de taille inférieure   Wassenberg et al.,
      Morphologie       Arborescente/Ramifiée         biodiversité, capacité
                                                                                    à 300 mm, et 80% des                2002
                          En coussin/Papillée        de filtrage, piégeage du
                                                                                 éponges ramifiées de hauteur
                             Feuille mince                    carbone
                                                                                         comprise entre
                      En tige Filiforme (en fouet)
                                                                                 301 et 500 mm sont passées
                                                                                           sous le filet
                                                         Contribution à la         On s’attend à ce que les
                                                         biodiversité, bio-          éponges formant des
                         Hautement agrégées
                                                      ingénierie de l’habitat        agrégats soient plus
         Degré           (formant un habitat)
                                                         (stabilisation des         vulnérables à la pêche          Non disponible
      d’agrégation          Petits agrégats
                                                       sédiments, par ex.),       que les espèces solitaires,
                               Solitaires
                                                         modification des        compte tenu de la probabilité
                                                     courants locaux du fond            de rencontres
                                                                                    On s’attend à ce que les
                                                                                   éponges filtreuses soient
                               Filtreur
          Mode                                         Transfert d’énergie        plus sensibles aux impacts
                              Carnivore                                                                             Non disponible
     d’alimentation                                    (niveau trophique)         de la sédimentation due à
                             Suspensivore
                                                                                   la pêche que les éponges
                                                                                           carnivores

                                                                                    On s’attend à ce que les
                              Rocheux                    Bio-ingénierie de           éponges vivant sur un
        Substrat          Gravier/cailloutis          l’habitat (stabilisation   sédiment meuble soient plus
      préféré pour       Meuble (boue/sable)            des sédiments, par         sensibles aux impacts de         Non disponible
        l’habitat       Habitat épizoïque (sur        ex.), modification des       la sédimentation due à la
                         d’autres animaux)           courants locaux du fond      pêche que celles qui vivent
                                                                                      sur un fond rocheux

                                                      Assure une structure            Les éponges rigides
                               Rigides                stable et un substrat         sont plus sensibles aux
        Rigidité                                                                                                    Non disponible
                               Souples                où peuvent s’attacher         perturbations dues à la
                                                       d’autres organismes          pêche touchant le fond
                                                                                  Les éponges sessiles sont
      Mobilité de              Sessile                                            plus sensibles aux pertur-
                                                           Bioturbation                                             Non disponible
       l’adulte               Sédentaire                                           bations dues à la pêche
                                                                                       touchant le fond

    Les recherches sur les éponges d’eaux profondes se sont certes développées depuis une vingtaine d’années,
    mais il subsiste des lacunes dans les connaissances touchant les modes et la périodicité de la reproduction,
    les rythmes de croissance et les rythmes de rétablissement. Les impacts du changement climatique sur les
    éponges sont inconnus, bien que la recherche expérimentale se développe, notamment les tests de rythme
    de respiration des éponges face à l’élévation de la température. Tant que demeurent des incertitudes sur
    certains aspects des fonctions écosystémiques des éponges, l’évaluation des risques écologiques devra être
    basée sur le principe de précaution.
5

4. Mesures régionales de protection des éponges
4.1 Inclusion des éponges comme espèce indicatrice d’EMV
par les ORGP
Les ORGP ont désigné des espèces indicatrices d’EMV comme moyen d’identifier des EMV, la plupart du
temps lorsque ces espèces ont été rencontrées (pêchées) par des navires de pêche commerciaux. Au moyen
d’études scientifiques, elles ont entamé l’identification d’éléments et d’espèces spécifiques des écosystèmes
répondant aux critères de définition des EMV, lesquels coïncident dans leur grande majorité avec ceux
des Directives DSF de la FAO (par. 42). Dans l’Atlantique Nord-Ouest, des recherches précises sur le sujet
(programme de l’OPANO sur les écosystèmes marins potentiellement vulnérables et les incidences de
la pêche en eaux profondes, programme NEREIDA), ainsi que des études canadiennes, ont permis de
définir certaines espèces d’éponges comme indicatrices d’EMV dans la zone de l’OPANO (tableau 3). La
Commission des pêches de l’Atlantique Nord-Est (CPANE) a défini différents agrégats d’éponges d’eaux
profondes comme indicatrices d’EMV, tandis que d’autres ORGP incluent plus généralement les éponges
comme indicateurs d’EMV.
En majorité, les espèces indicatrices d’EMV sont particulièrement difficiles à définir, spécialement
les éponges, mais on peut s’aider des guides d’identification établis par les ORGP pour la plupart des
régions, par exemple l’Atlantique Nord-Ouest (Kenchington et al., 2015), l’Atlantique Sud-Est (Ramos
et al., 2009), la Méditerranée (FAO, 2017a, b) et l’océan Indien (FAO, 2016). Ces difficultés font que les
espèces indicatrices d’EMV peuvent être définies à l’échelon taxonomique supérieur, tel que le phylum
Porifera dans l’Atlantique Sud-Est (Organisation des pêches de l’Atlantique Sud-Est – OPASE), et les
classes Hexactinellidae et Demospongiae dans l’océan Austral et le Pacifique Sud (Convention sur la
conservation de la faune et la flore marines de l’Antarctique, et Organisation régionale de gestion des
pêches du Pacifique Sud - ORGPPS), ou au contraire par espèces représentatives dans l’Atlantique Nord-
Ouest et Nord-Est (OPANO et CPANE). Les éponges figurent dans les règles des parties contractantes
applicables à leurs navires pêchant en haute mer dans l’océan Indien, les détails sont consultables sur le
site Web de l’Accord relatif aux pêches dans le sud de l’océan Indien (APSOI). Elles ne figurent pas dans
les espèces indicatrices d’EMV du Pacifique Nord (Commission des pêches du Pacifique Nord – CPPN),
et pour la Méditerranée, les espèces indicatrices restent à définir (Commission générale des pêches pour la
Méditerranée – CGPM) (Tableau 3).

Tableau 3. Éponges indicatrices d’EMV adoptées par les ORGP (les autres taxons indicateurs ne sont pas inclus
dans le tableau).

                                                                  Protocole de                            Réaction
                   Indicateurs d’EMV (phylum Porifera)                                    Seuil
   Source                                                         collecte des                           en cas de
                  (famille d’espèces)(Code ASFIS de la FAO)                            (pour 2019)
                                                                    données                              rencontre

    NAFO       Asconema foliatum, Rossellidae (ZBA)            L’observateur         300 kg d’éponges   Signaler la
  (OPANO)      Aphrocallistes beatrix, Aphrocallistidae        doit identifier les                      rencontre,
  CEM 2019                                                     espèces au niveau                        s’éloigner
  Annex I.E    Asbestopluma (Asbestopluma) ruetzleri,          taxonomique le plus                      de 2 milles
               Cladorhizidae                                   bas possible: le                         marins.
               Axinella sp. Axinellidae                        capitaine du navire                      Fermeture
               Chondrocladia grandis, Cladorhizidae (ZHD)      doit signaler au                         temporaire à
                                                               Secrétariat toute                        l’extérieur de
               Cladorhiza abyssicola, Cladorhizidae (ZCH)      rencontre dépassant                      l’empreinte.
               Cladorhiza kenchingtonae, Cladorhizidae (ZCH)   le seuil                                 Examen par
               Craniella sp.,Tetillidae (ZCS)                                                           le Conseil
                                                                                                        scientifique
               Dictyaulus romani, Euplectellidae (ZDY)
               Esperiopsis villosa, Esperiopsidae( ZEW)
               Forcepia spp., Coelosphaeridae (ZFR)
               Geodia barretti, Geodiidae
               Geodia macandrewii, Geodiidae
               Geodia parva, Geodiidae
               Geodia phlegraei, Geodiidae
6

    Tableau 3. Continué
                                                                          Protocole de                                  Réaction
                       Indicateurs d’EMV (phylum Porifera)                                          Seuil
       Source                                                             collecte des                                 en cas de
                      (famille d’espèces)(Code ASFIS de la FAO)                                  (pour 2019)
                                                                            données                                    rencontre

        NAFO       Haliclona sp., Chalinidae (ZHL)                     L’observateur           300 kg d’éponges       Signaler la
      (OPANO)      Iophon piceum, Acarinidae (WJP)                     doit identifier les                            rencontre,
      CEM 2019                                                         espèces au niveau                              s’éloigner
      Annex I.E    Isodictya palmata, Isodictyidae                     taxonomique le plus                            de 2 milles
                   Lissodendoryx (Lissodendoryx) complicata,           bas possible: le                               marins.
                   Coelosphaeridae (ZDD)                               capitaine du navire                            Fermeture
                   Mycale (Mycale) lingua, Mycalidae                   doit signaler au                               temporaire à
                                                                       Secrétariat toute                              l’extérieur de
                   Mycale (Mycale) loveni, Mycalidae                   rencontre dépassant                            l’empreinte.
                   Phakellia sp., Axinellidae                          le seuil                                       Examen par
                   Polymastia spp., Polymiastiidae (ZPY)                                                              le Conseil
                                                                                                                      scientifique
                   Stelletta normani, Ancorinidae (WSX) (Stelletta)
                   Stelletta tuberosa, Ancorinidae (WSX) (Stelletta)
                   Stryphnus fortis, Ancorinidae (WPH)
                   Thenea muricata, Pachastrellidae (ZTH)
                   (Thenea)
                   Weberella bursa, Polymastiidae
        NEAFC      3. Agrégats d’éponges d’eaux profondes              Signaler simplement     Chalut et pêche        Signaler la
       (CPANE)     a. Autres agrégats d’éponges: Geodiidae,            la rencontre, de        autre qu’à la          rencontre,
       19/2014     Ancorinidae, Pachastrellidae                        préférence avec         palangre: 400 kg       s’éloigner
       (modifié)                                                       cartographie du fond    d’éponges              de 2 milles
                   b. Jardins d’éponges sur fond rocheux:              marin (par sondeurs     Pêche à la             marins.
                   Axinellidae, Mycalidae, Polymastiidae, Tetillidae   acoustiques)            palangre: 10           Fermeture
                   c. Communautés d’éponges de verre Rossellidae                               indicateurs d’EMV      temporaire.
                   Pheronematidae                                                              par milliers de        Examen de
                                                                                               hameçons (ligne        la fermeture
                                                                                               de 1 200 m)            temporaire

       SEAFO       “… et les éponges comprenant les taxons             Les observateurs        Chalut                 S’éloigner de
      (OPASE)      figurant sur la liste des indicateurs d’EMV du      doivent enregistrer     600 kg d’éponges       1 ou 2 milles
      CM 30/15     Conseil scientifique de l’OPASE” (Annexe 6,         les espèces au          vivantes (zone de      marins.
                   par. 1) PFR Éponges Porifera (Phylum) (SEAFO,       niveau taxonomique      pêche existante),      Signaler au
                   2016, p.36: SEAFO, 2017, p. 16)                     le plus bas possible    400 kg d’éponges       Secrétariat
                                                                       et collecter des        vivantes (zone de      et au Conseil
                                                                       échantillons            pêche nouvelle)        scientifique.
                                                                                               Palangre et casiers    Fermeture
                                                                                               >=10 unités (kg or     temporaire à
                                                                                               litres) pour 1 200 m   l’extérieur de
                                                                                               (1 000 hameçons)       l’empreinte.
                                                                                               de ligne pour toutes   Évaluation
                                                                                               les aires              de l’aire par
                                                                                                                      le Conseil
                                                                                                                      scientifique

       SPRFMO      Éponges (Porifera: Demospongiae et                  Signaler la rencontre   Annexe 6A              S’éloigner de
      (ORGPPS)     Hexactinellidae) Annexe 5                                                   Un trait, pour un      1 mille marin
     CMM 3-2019                                                                                seul taxon éponges     Fermeture
                                                                                               indicateur d’EMV,      temporaire.
                                                                                               50kg                   Examen par
                                                                                               Annexe 6B              le Conseil
                                                                                               Un trait pour trois    scientifique
                                                                                               taxons indicateurs     (par. 26 à
                                                                                               différents ou plus,    33)
                                                                                               Éponges, 5 kg
                                                                                               plus deux autres
                                                                                               groupes, 1 à 5 kg

        SIOFA      Annexe 1: Porifera (PFR), pouvant être si           Les observateurs        Palangre               Pour les
       (APSOI)     possible réparties dans le rapport entre:           doivent collecter des   Capture ou             lignes
     CMM 2019-01   Hexactinellidae (HXY)(Classe), et Demospongiae      données sur les EMV     récupération           longues, 1
                   (DMO)(Classe)                                       Les Parties             d’au moins 10          mille marin
                                                                       contractantes           unités d’espèces       du point
                   Habitat benthique établi faisant l’objet de         devront signaler        indicatrices d’EMV     médian de
                   mesures de protection provisoires                   toute rencontre de ce   Chalut                 la trace pour
                                                                       type dans le rapport    300 kg d’éponges       les chaluts
                                                                       national au Comité      en un trait quel       2 milles
                                                                       scientifique            qu’il soit             marins de
                                                                                                                      chaque côté
                                                                                                                      de la trace
                                                                                                                      de chalutage
                                                                                                                      quelle qu’elle
                                                                                                                      soit
7

Tableau 3. Continué
                                                                      Protocole de                               Réaction
                    Indicateurs d’EMV (phylum Porifera)                                      Seuil
   Source                                                             collecte des                              en cas de
                   (famille d’espèces)(Code ASFIS de la FAO)                              (pour 2019)
                                                                        données                                 rencontre

  Mesures de    Guide de classification des taxons des EMV         Donner des détails   >=10 unités or         >=10
 conservation   Porifera: Hexactinellidae (éponges de verre),      sur les taxons de    >=5 unités             unités –
 de la CCAMLR   Demospongiae (éponges siliceuses)                  l’EMV                ‘Segment de ligne’     Signalement
 22-07(2013)                                                                            signifie une section   et
                                                                                        de ligne à 1 000       éloignement
                                                                                        hameçons ou une        Fermeture
                                                                                        ligne de 1 200         temporaire
                                                                                        mètres, selon la       dans un
                                                                                        longueur la plus       rayon d’un
                                                                                        courte des deux, et    mille marin
                                                                                        pour les lignes de      >=5 -
                                                                                        casiers une section    signalement
                                                                                        de 1 200 m
 NPFC (CPPN)    Les éponges ne sont pas spécifiquement
  CMM 2018-     incluses comme indicateurs d’EMV (les coraux le
    05/06       sont), ni incluses par le Conseil scientifique
    CGPM        La CGPM a fermé certaines zones d’EMV mais ne
                prévoit pas de dispositions pour les rencontres.
                Aucun indicateur n’a été choisi

Parmi les ORGP qui ont inscrit des éponges sur une liste d’indicateurs d’EMV, c’est l’OPANO qui en a
inscrit le plus, la liste compte 29 espèces d’éponges indicatrices. Lors de la réunion de 2019 du Conseil
scientifique de l’OPANO (NAFO, 2019), des codes ASFIS de la FAO ont été attribués à 18 espèces
d’éponges, afin de faciliter le signalement par les observateurs au cours d’activités de pêche.

4.2 Application de seuils de rencontre pour l’établissement d’EMV
Afin de réduire le plus possible les impacts sur les EMV, les ORGP ont fixé des mesures spécifiques visant
à éviter les effets nocifs notables sur les zones comportant des concentrations importantes d’espèces
benthiques. Elles ont donc établi des valeurs-seuils précises de captures des espèces indicatrices d’EMV,
valeurs dont le dépassement entraîne l’obligation de prendre des dispositions spécifiques afin d’évaluer
la possibilité que le navire soit en train de pêcher dans un EMV. Pour les éponges, les seuils sont établis
au niveau du phylum, allant de 300 à 600 kg par chalutage, l’identification jusqu’au niveau de l’espèce
n’est donc pas exigée. Les seuils sont souvent plus bas pour les autres engins de pêche profonde, tels que
les palangres, qui ne retiennent que très peu d’éponges dans leurs prises (Tableau 3). Les prises dépassant
le seuil donnent lieu à des réactions de gestion différentes selon les règles des ORGP: signalement de la
rencontre, obligation de s’éloigner, et la possibilité de fermeture temporaire.
Le choix des valeurs-seuils pour les navires de pêche profonde s’est fondé sur «l’expérience» ou «les avis
d’experts» plutôt que sur des analyses scientifiques solides, et la tendance a souvent été de diminuer ces
seuils. Le seuil pour les éponges à l’OPANO, par exemple, qui avait été de 1 000 kg (2009), est passé à
800 kg (2010-2011), puis à 600 kg et 400 kg (à l’intérieur et à l’extérieur de la zone de pêche, 2012) et à 300
kg (2013-2018) (NAFO CMM, 2009-2019). Des travaux scientifiques ont été entrepris dans l’Atlantique
Nord-Ouest pour tenter de déterminer un moyen objectif de fixer les valeurs-seuils (Kenchington et al.,
2009, 2011: Cogswell et al., 2010). Les résultats, qui ont livré des valeurs-seuils plus faibles, avec une
distinction entre les concentrations importantes d’éponges agrégées et les populations éparses d’éponges
plus dispersées, peuvent être utiles pour délimiter les zones d’EMV. Un seuil est certes nécessaire pour
déclencher une réaction de gestion, mais s’il sert de base pour obliger à signaler les rencontres avec
des espèces indicatrices d’EMV, y compris des éponges, cela limite les informations collectées, car la
présence d’éponges au-dessous du seuil n’est pas signalée.
L’OPANO (NAFO, 2009b, p. 33) a analysé les captures d’éponges par des navires de recherche qui ont
déployé des chaluts de fond en haute mer dans l’Atlantique Nord-Ouest entre 1995 et 2008, et dressé
le tracé des points où des éponges étaient présentes, de ceux où elles étaient absentes, et des points où
8

    les captures avaient été supérieures
    à 75 kg (Figure 1). L’interprétation
    des captures nulles (des points
    où il n’avait pas été constaté de
    captures) pose problème, mais le
    tracé donne une indication claire
    des endroits d’où les éponges
    sont absentes, de ceux où elles
    sont présentes avec des densités
    plutôt faibles, et présentes avec de
    fortes densités. Les aires de forte
    densité ont été interprétées comme
    comportant des concentrations
    importantes d’éponges, et devant
    être considérées comme contenant
    des EMV (OPANO, 2006).
    Plus récemment a été débattue
    la question de l’applicabilité de
    valeurs-seuils pour toutes les
    espèces d’un taxon. Le seuil de
    l’OPANO pour les éponges est le
    plus pertinent pour les éponges             Figure 1. Capture d’éponges lors des campagnes de recherche dans
    Geodia, en forme de boule massive,          l’Atlantique Nord-Ouest, 1995-2008 (source: NAFO, 2009b, p. 33).
    mais il est jugé trop élevé pour
    certaines des éponges plus légères, par exemple les éponges de verre. Des études en cours portent sur
    les fonctions écosystémiques des éponges de verre du Bonnet flamand (Murillo et al., 2020).
    Les rencontres avec des éponges dépassant la valeur-seuil peuvent aussi faire jouer non seulement
    l’obligation de signalement mais aussi une règle d’éloignement et une fermeture temporaire, encore que
    les détails varient en fonction de la région (voir plus haut tableau 3). L’utilité de la règle d’éloignement
    pour la protection des espèces sédentaires longévives d’éponges (et de coraux) a été longuement
    débattue. La mise en place d’une fermeture temporaire à la suite de rencontres dépassant la valeur-seuil
    sert à protéger l’aire entourant l’aire de rencontre jusqu’à ce que d’autres investigations aient confirmé
    ou infirmé la présence d’un EMV. À l’heure actuelle, la fermeture temporaire à la suite d’une rencontre
    est appliquée dans l’Atlantique Nord-Ouest à l’extérieur de l’empreinte (OPANO), dans l’Atlantique
    Nord-Est (CPANE), dans l’Atlantique Sud-Est (OPASE), dans l’océan Antarctique (CCAMLR) et pour
    certaines parties contractantes dans le sud de l’océan Indien (APSOI), la zone étant généralement fermée
    dans un rayon de 1 à 2 milles marins.

    4.2.1 Rencontres avec des éponges dépassant la valeur-seuil

    La CCAMLR, qui gère les pêches dans l’Antarctique, est le seul organe régional qui ait fait état de rencontres
    avec des indicateurs d’EMV dépassant la valeur-seuil. Il s’agissait de captures dans les pêches à la palangre
    de légine australe, qui ont eu pour résultat le signalement de 77 aires à risque d’EMV (CCAMLR, 2018).
    Pour ce qui est des nombres et du poids des spécimens indicateurs d’EMV, les prises sont enregistrées au-
    dessus du seuil de 10 unités indicatrices d’EMV par section de ligne (autrement dit, par section de ligne
    à 1 000 hameçons, ou par section de 1 200 m, selon ce qui est le plus court, et par section de 1 200 m pour
    les lignes à casiers) (Tableau 4). Les prises dépassant le seuil étaient en moyenne de 12,2 kg d’éponges et
    de 4,8 kg d’autres espèces indicatrices d’EMV, des gorgones pour l’essentiel. La prise d’éponges la plus
    importante qui ait été enregistrée était de 68 kg sur une seule section de ligne. Les prises inférieures au
    seuil n’ont pas été inscrites au registre des EMV (CCAMLR, 2018), mais ont pu être communiquées à la
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