POUR UNE FILIÈRE DES SERVICES À LA PERSONNE EN ENVIRONNEMENT NUMERIQUE - Olivier Peraldi Françoise Rouch - Fesp
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Services à la personne : 2020-2030, quel domicile connecté ? POUR UNE FILIÈRE DES SERVICES À LA PERSONNE EN ENVIRONNEMENT NUMERIQUE Olivier Peraldi Françoise Rouch Livre blanc du groupe de travail réuni et animé par la Fesp de novembre 2014 à juin 2015
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Services à la personne : 2020-2030, quel domicile connecté ? POUR UNE FILIÈRE DES SERVICES À LA PERSONNE EN ENVIRONNEMENT NUMERIQUE Olivier Peraldi Françoise Rouch Livre blanc du groupe de travail réuni et animé par la Fesp de novembre 2014 à juin 2015
SOMMAIRE Préambule 9 Lettre de cadrage 13 Introduction 19 Partie 1 : Services à la personne et environnement numérique : quelles interactions ? 23 Partie 2 : Services à la personne en environnement numérique, quelles évolutions ? 73 Partie 3 : Propositions 115 Notes 135 Membres du groupe de travail 145 Contributions des membres du groupe de travail 151
PRÉAMBULE Si les travaux concernant les services à domicile et leurs évolutions ne manquent pas, leur approche est trop souvent réduite à la prise en compte de catégories de publics très spécifiques (petite enfance, dépendance, accompagnement scolaire, entretien de la maison, etc.), segmentés en publics « fragiles » ou « non fragiles ». Cette segmentation en silos peut être utile pour réaliser les indispensables analyses sectorielles. Elle interdit en revanche une approche macro- économique basée sur les avancées technologiques génératrices d’emplois. C’est la raison qui a amené la Fédération du Service aux Particuliers (Fesp) à mettre en place un groupe de travail intitulé Services à la personne 2020-2030, quel domicile connecté ?, dont elle a assuré la coordination et l’animation tout au long des travaux qui ont duré près de huit mois en 2014 et 2015. La Fesp a souhaité rassembler autour d’un panel d’entreprises représentatives de l’ensemble des métiers des services à la personne (SAP)1, les acteurs majeurs concernés par le domicile tels que Axa Assistance, CNP Assurance, Cofély Inéo-GDF-Suez, Le Crédit Agricole, Europ Assistance, Generali, Le Groupe La Poste, Huawei, Leroy Merlin, Orange HealthCare et Orange Assistance, Pierreval Sodexo, ou encore des partenaires tels que l’Asipag et Handibat Développement. Le groupe a bénéficié de l’expertise d’économistes de Sciences Po Paris, du Comité Intelligence économique et stratégique des ingénieurs et scientifiques de France, et d’économètres de l’Essec, notamment titulaires de la chaire Accenture strategic business analytics. Particulièrement concerné par les évolutions des besoins, usages et potentiels liés aux services à domicile les partenaires de la Fesp tels la Caisse des dépôts, Klésia, l’Agence nationale d’amélioration de l’habitat (Anah), le Gérontopôle des Pays de la Loire, le Syndicat des résidences pour aînés (Snra) ou encore la CCI d’Alençon étaient également membres du groupe de travail. 8 9
Le groupe s’est donné pour objectifs de : Résultat du travail de concertation d’acteurs représentatifs de > dresser le constat de l’état des besoins et de l’offre technologique l’ensemble des métiers concernés par les services à domicile, ce livre et de service actuellement disponible sur le marché du domicile blanc entend être : connecté ; > un outil de connaissance partagée entre les différents acteurs ; > dégager de façon prospective les schémas organisationnels et > un outil d’aide à la décision des dirigeants d’entreprises concernés orientations propres à générer le développement de réponses adaptées par l’un des enjeux économiques et sociétaux les plus porteur d’activité aux besoins actuels et futurs des Français en matière de services et de croissance, dès à présent et pour les années à venir ; associés à leur personne et à leur domicile ; > une aide à la prise de conscience des enjeux du secteur par les > proposer des pistes concrètes, voire des préconisations, suscep- pouvoirs publics. tibles de favoriser des modèles économiques, technologiques et de services à la personne : respectueux des exigences qualitatives inhé- Aux termes de leurs réflexions, les membres du groupe s’accordent rentes au secteur et aux différents métiers concernés ; porteur d’une à penser que ce livre blanc constitue un point de départ appelant les dynamique d’innovations et de développement d’un écosystème uns et les autres à faire en sorte de contribuer à l’émergence d’une spécifique ; capable d’être reproduits, voire exportés. filière des services à la personne à domicile en environnement numérique. Il s’est réuni en plénière à sept reprises. Des réunions intermédiaires Qui seraient mieux placés à cet égard que les responsables des en- en comité restreint ont permis d’explorer certains thèmes plus techniques. treprises des secteurs concernés pour porter une démarche visant à Il a eu des échanges particulièrement riches, qui ont alimenté la la reconnaissance d’une filière des SAP, afin que ceux-ci constituent rédaction du présent livre blanc, objectif final des travaux. un secteur d’activité économique à part entière ? Dans ce cadre De nombreuses questions ont été soulevées à cette occasion : structuré, ils seront mieux à même de faire prévaloir leurs intérêts > les performances technologiques des objets connectés et, plus lar- – qui pourraient sinon parfois s’avérer contradictoires –, et consti- gement, du numérique suffisent-elles à répondre à l’attente qualita- tueraient des interlocuteurs susceptibles d’apporter aux pouvoirs tive des personnes dans la réalisation de services à leur domicile ? publics une réflexion et une capacité d’actions renforcées. > les technologies à distance et intervention physique au domicile La Fesp souhaite remercier les membres du groupe qui ont consacré sont-elles vouées à évoluer dans l’ignorance l’une de l’autre ou plutôt à temps et réflexion à un sujet particulièrement complexe par la s’articuler ? dimension de son champ d’étude, la diversité des acteurs, et sa > quelle performance leur rapprochement pourrait laisser espérer ? recherche de transversalité entre secteurs économiques et enjeux de > quel modèle économique découle de leur « éloignement » ou de développement. leur rapprochement ? > quelles sont les attentes des Français en matière de technologies Elle souhaite également remercier tout particulièrement le Medef, numériques à domicile ? son président Pierre Gattaz, et son directeur général, Michel Guil- > quelle articulation entre les besoins en services à la personne qui baud, pour l’accueil qui a été réservé à cette initiative, et la mise à semblent exponentiels, alors que dans le même temps s’exprime à disposition des moyens matériels qui a permis la réalisation de ce longueur de sondage la crainte d’intrusion dans la vie privée liée de travail dans les meilleures conditions. par la collecte de données personnelles ? 10 11
2020-2030, quel domicile connecté ? Lettre de cadrage du 21 novembre 2014 Qu’il soit qualifié d’Internet des objets, de smart home ou de maison intelligente, le domicile connecté constitue l’un des fondements de l’émergence du smart grid et de la smart city. Premier lieu de vie et de construction sociale des personnes, à la fois lieu de vie et, parfois, lieu de travail, le domicile est aujourd’hui l’un des terrains privilégiés d’observation et d’anticipation tant des besoins de la vie quotidienne des publics que des évolutions des métiers afférents. Le potentiel des technologies associées au domicile répond en partie aux besoins d’ores et déjà repérés de mieux être, d’accom- pagnement du résident au quotidien, voire de sécurisation de son environnement de vie. Ce potentiel suggère l’extraordinaire capacité à répondre aux besoins et usages qui seront ceux attendus par les Français, et même au-delà de la France, dès les toutes prochaines années. Près de huit Français sur dix se connectent à l’Internet à partir de leur domicile. Ce taux a augmenté de vingt points en cinq ans2. Plus d’un Français sur deux effectuent des démarches administratives sur l’Internet. 99 % des connexions sont désormais effectuées en haut débit. Pourtant, le marché du domicile connecté reste particu- lièrement fragmenté et peine à structurer un écosystème suffisam- ment robuste pour développer une offre cohérente à la hauteur des besoins. Plus de 4,5 millions de ménages français font appel chaque année aux services à la personne3. Ces services répondent à des préoc- cupations sociétales majeures dont l’égalité femme / homme face aux tâches ménagères, la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle, l’accompagnement et la réussite scolaire, l’aide aux personnes handicapées ou en situation de perte d’autonomie. Alors que la fracture numérique tend à se réduire, aussi bien entre les générations qu’entre les territoires métropolitains, les différents usages souffrent encore de niveaux de maturité économiques très divers. 12 13
Le développement des technologies interroge les besoins actuels Ce groupe se donne pour objectifs de : et futurs des Français à leur domicile tout autant que les habitudes > dresser le constat de l’état des besoins et de l’offre technologique professionnelles et la réalisation des métiers s’exerçant au sein de ce et de service actuellement disponible sur le marché du domicile lieu de vie. Les défis sont nombreux : évolution des outils – tech- connecté ; nologiques et de travail –, évolutions des attentes des publics, mais > dégager de façon prospective les schémas organisationnels et aussi des techniques professionnelles, des compétences à acquérir, orientations propres à générer le développement de réponses adaptées des contenus de formations continues, ou encore des cadres qua- aux besoins actuels et futurs des Français en matière de services litatifs et éthiques. Afin d’espérer relever ces défis, les solutions et associés à leur personne et à leur domicile ; process techniques et technologiques innovants doivent trouver la > proposer des pistes concrètes, voire des préconisations, suscep- meilleure cohérence avec les contraintes inhérentes à un lieu de vie tibles de favoriser des modèles économiques, technologiques et de à forte valeur subjective, voire émotionnelle. La connaissance des services à la personne : respectueux des exigences qualitatives inhé- réalités d’exécution professionnelles du service réalisé au domicile rentes au secteur et aux différents métiers concernés ; porteur d’une est également indispensable. dynamique d’innovations et de développement d’un écosystème spécifique ; capable d’être reproduits, voire exportés. Cette mutation en marche réinterroge les modèles économiques. Elle impose une approche décloisonnée entre les acteurs de la L’ensemble des travaux fera l’objet de la publication d’un livre blanc chaîne de valeur de l’intervention auprès de la personne et au sein reprenant les éléments actés par les membres du groupe de travail. du domicile, ainsi qu’une approche transversale entre les métiers Celui-ci se réunira dans les locaux du Medef, une fois par mois à pour dégager les socles communs permettant la création d’un dates fixes jusqu’en avril 2015, échéance des travaux. Il sera placé corpus technologiques et pratiques de base mutualisé. Ingénieurs, sous la présidence de la Fesp, son rapporteur sera Olivier PERALDI, informaticiens, techniciens, intervenants à domicile doivent bâtir directeur général de la Fesp, assisté de Françoise ROUCH, chargée une connaissance partagée du domicile connecté. de mission à la Fesp. Entreprises industrielles, entreprises de services, opérateurs de Les membres du groupe pourront, autant qu’ils en éprouveront réseaux, artisans et acteurs de l’immobilier, start-up, plateformes de le besoin, se saisir de ces travaux pour porter les conclusions du mise en relation, en liaison avec leurs partenaires naturels, agences groupes de travail et participer à la réalisation, en liaison avec les nationales, groupes d’assistance ou de prévoyance, ou encore pouvoirs publics, d’une offre du domicile connecté, technologique émetteurs de CESU, parviendront à projeter les éléments propres et de services à la personne, à la hauteur des besoins des Français, à relever le défi du domicile connecté et des services à la personne adaptée aux évolutions de leurs attentes quantitatives et qualitatives, en rendant collectivement robuste et efficiente l’offre de services et porteuse de modèles économiques et organisationnels dynamique proposées aux Français. et conquérants. Ce sont toutes ces raisons qui ont amené à la mise en place d’un Je vous remercie. groupe de travail intitulé Services à la personne : 2020-2030, quel domicile connecté ?, placé sous l’égide de la Fédération du service Maxime AIACH aux particuliers (Fesp) qui en assure la coordination et l’animation. Président 14 15
INTRODUCTION Reconnu par les pouvoirs publics organisme professionnel représentatif des entreprises de services à la personne sur l’ensemble des vingt-et-uns métiers du secteur, la Fédération du service aux particuliers (Fesp) développe une réflexion, avec les entreprises membres de ses syndicats adhérents4, ainsi qu’avec ses partenaires publics et privés5, sur les enjeux et les évolutions des métiers du service au domicile, plus particulièrement développés par les acteurs entrepreneuriaux. En savoir plus : www.fesp.fr 16 17
Services à la personne et technologie : en transformant les usages des résidents, le numérique associé à du domicile connecté à l’environnement numérique l’habitat modifie les habitudes de vie et influence jusqu’à la conception des infrastructures des bâtiments. En 2015, le Consumer Electronic Show (CES) de Las Vegas consa- La chaîne de la connectique atteint déjà aujourd’hui le domicile crait les objets connectés associés à la « vie de tous les jours » par la capacité d’intervenir à distance sur des matériels récepteurs comme le premier marché de l’innovation au monde. Tradition- d’ordres pour des actes simples relevant du dialogue entre machines nellement, par et pour l’industrie, l’innovation achève ainsi sa mue (M2M)10. La chaîne évolue désormais en intégrant de plus en plus qui a vu le particulier prendre le pas sur le collectif et le domicile des fonctionnalités interrogeant la « dimension humaine » de l’acte s’affirmer comme un Eldorado du service. réalisé : pertinence et limites du service réalisé à distance, adhésion, Premier lieu de vie au quotidien des familles, le champ à investir compréhension, voire appropriation du dispositif par la personne est immense. Le périmètre de l’objet connecté, mais aussi de la 5G, appelée à en bénéficier, mais aussi qualité de l’implémentation dans voire de la réalité augmentée, inclut celui du domicile en environ- l’environnement spécifique du domicile et de l’adéquation avec les nement numérique. Un marché où le seul segment de la domotique autres acteurs y intervenant. est estimé en France à plus de 150 millions d’euros6. De marché de De par leurs missions, les services à la personne (SAP) sont tout niche, l’ensemble du secteur évolue vers une activité économique de particulièrement concernés par ces évolutions technologiques et masse. Le catalogue de produits ne cesse de s’étoffer : matériels de environnementales. Ils constituent par ailleurs l’un des tous premiers sécurité (alarmes, avertisseurs, détecteurs, etc.) et de motorisation/ terrains de croissance en termes d’activités économiques et de automatisation (portails, volets, stores, etc.) occupent le haut de la création d’emplois. Les SAP représentent en France, en 2015, près liste avec 57 % de part de marché en 2015. Ces produits sont suivis de 20 milliards d’euros de chiffre d’affaires (1,1 % du PIB) et plus de des solutions de télésurveillance (interphones, visiophones, etc.) et 1,9 millions de salariés. Les professionnels du secteur interviennent de maîtrise de l’énergie (thermostats connectés, pilotages à distance auprès de 4,5 millions de ménages et le secteur créé plus de 100 000 d’éclairage et de chauffage, etc.), et les outils de programmation de emplois chaque année. type box, couvrant 43 % du marché. Les perspectives de besoin en emplois nouveaux parlent d’elles- 28 milliards selon Goldman Sachs ou 80 milliards d’objets connec- mêmes. En France, plus de 1,2 million de postes sont à pourvoir tés d’ici 2020 selon Idate7, mais aussi un marché de 14 400 milliards d’ici 202211. Allongement de la vie et vieillissement de la popula- de dollars pour Cisco8… la dynamique des objets connectés pour- tion, taux de natalité soutenu, forte proportion de travail féminin, rait être un prochain Eldorado économique. Depuis le lancement attentes en accompagnement à la réussite scolaire, évolution des mondial de l’iPhone en 2008 ce marché aura vu la mise en place besoins des ménages en soutien aux tâches de la vie quotidienne, en moins de dix ans, de plus de 1,3 milliard de smartphones dans mais aussi fort contingents de départ à la retraite dans les métiers l’environnement quotidien de la population mondiale9. En 2015, 25 des services à la personne12 sont autant d’éléments de croissance millions de Français en possèdent un ou plusieurs. Premier maillon pour l’activité des SAP. de la connectique, individuelle et nomade, le succès du smartphone Pour autant, ce potentiel d’emplois a pour caractéristique d’être n’est que l’avant-garde de la « révolution du numérique » qui mobi- très sensible à l’environnement fiscal et réglementaire. Les SAP lise aujourd’hui une chaîne d’outils, de fonctionnalités et d’acteurs souffrent, depuis 2010, d’une grande instabilité fiscale et juridique. qui ne cesse de grandir. Au-delà des performances technologiques, Ainsi, si la destruction d’emplois dans les SAP peut être rapide 18 19
et massive en cas d’altération du cadre fiscal comme ce fut le cas milliards d’euros16, alors que les revenus disponibles des plus de 60 en 2013 du fait de la suppression du calcul forfaitaire des charges ans représentaient en 2010 environ 424 milliards d’euros et que d’ici sociales sur la base du smic et de l’augmentation de la TVA pour 2050 l’augmentation du nombre de séniors aura fait progresser le certains de ses métiers13, à l’inverse, la réalisation du potentiel d’em- marché de 150 %17. plois pourrait devenir réalité à court terme dès lors que les pouvoirs Jusqu’à présent, peu de recherches ont fait du domicile le point publics s’engageraient à en stabiliser le cadre juridique et fiscal et à d’entrée de la problématique de l’amélioration de la vie quotidienne maintenir ainsi le coût du service déclaré compétitif par rapport au des Français, malgré l’apport indéniable des SAP par la simplifi- service non déclaré. Une telle stabilisation permettrait de réaliser en cation d’un certain nombre de taches chronophages (assistance à peine trois ans plus de 147 000 emplois nouveaux14. administrative, entretien de la maison, etc.), par l’assistance dans les Le rapprochement de la dynamique du numérique et de celle des obligations parentales (garde des jeunes enfants, aide aux devoirs services à la personne peut être regardé comme une chance inédite scolaires, etc.), par l’aide apportée face aux impondérables technolo- de développement de l’activité des deux secteurs. Développement giques (assistance informatique, etc.)… quantitatif et qualitatif. Tout en soulignant l’intérêt des travaux de la mission d’évaluation en matière de prise en compte de la transformation numérique lancée par le Gouvernement en 2014, ceux-ci ont omis d’aborder la question sous l’angle du domicile, se limitant à traiter des services de proximité sous celui des services publics. Sont ainsi cités comme services de proximité susceptibles de bénéficier du numérique : l’éclairage des rues, la distribution d’eau, le ramassage des déchets, la gestion du trafic, la sécurité sur la voie publique, ou encore les formalités administratives à distance. Seul le Groupe La Poste est évoqué en quelques lignes, par une référence au projet Cohesio consistant à « rendre régulièrement visite aux personnes isolées, fragilisées et à mobilité réduite, et, Facteo dont l’objectif est d’équiper tous les facteurs d’un terminal de type smartphone d’ici 2015 pour faciliter les opérations courantes et proposer de nouvelles offres au service de la proximité »18. S’il est fait mention de l’évolution des services que peuvent offrir Sources : Cisco, 2014. le groupe et ses agents les postiers, rien n’est indiqué sur les amé- nagements nécessaires en matière de connexion du domicile de la La création par les pouvoirs publics et les acteurs entrepreneuriaux personne fragilisée. – industriels, producteurs de technologies, producteurs de ser- Le rapport de fin de mission ne pose à aucun moment la question vices – de la filière silver économie, officialisée par la signature du de l’apport économique d’une prise en compte de la population « contrat de filière » en décembre 201315, a été une première étape française, dans son ensemble, via le potentiel numérique que repré- indispensable pour mobiliser les énergies en vue de la réalisation sente le domicile. Une approche dynamique des SAP en environne- d’un marché dont le poids, pour la France, était alors évalué à 92 20 21
ment numérique aurait pourtant eu toute sa place lors des travaux, par ailleurs fort pertinents, qui aurait permis ainsi une meilleure appréhension par les pouvoirs publics du potentiel d’activités et d’emplois que représente le rapprochement des deux mondes : numérique et SAP. Ces dernières années, de nombreuses études réalisées à l’initiative des pouvoirs publics, d’entreprises ou d’universités, ont décrit plu- sieurs segments des besoins des ménages en services à leur domi- cile. Deux approches, toutes deux appuyées sur une segmentation des publics, se sont partagées l’essentiel des travaux de recherche et d’analyse menés jusqu’alors. Une première approche sociale, trouvant le plus d’acceptation au- PARTIE 1 près des pouvoirs publics, a été celle s’interrogeant sur les réponses technologiques à apporter au quotidien des personnes en situation Services à la personne eT de perte d’autonomie, handicapées ou âgées. La Caisse nationale environnement numérique : solidarité autonomie (Cnsa) compte parmi les acteurs publics finan- quelleS INTERACTIONS ? çant de telles initiatives dans le cadre de l’innovation en gérontech- nologies19. La domotique est la réponse la plus communément citée dans les travaux portant sur l’apport technologique susceptible de faciliter la vie quotidienne des personnes en situation de dépen- dance. Ainsi longtemps, la présence de domotique a un domicile suffisait à qualifier celui-ci de « connecté ». D’inspiration plus consumériste, la seconde approche portait sur les outils technologiques à distance s’adressant aux catégories de personnes, actives et solvables, désireuses de renforcer le confort de leur mode de vie : sécurisation du domicile, connectique à distance, maîtrise et économie d’énergie, etc. Il convient désormais de passer le cap de l’approche par segments pour s’engager résolument dans une approche transverse appuyée sur le volume des publics. 22 23
Rapprocher dans une même réflexion l’évolution des métiers des > l’utilisation des outils de production, de transmission, de gestion services à la personne (SAP) et celle des technologies du domicile et de partage d’informations numérisées au bénéfice des pratiques en environnement numérique suppose la réunion d’un ensemble tant médicales que médico-sociales, qui ont fait l’objet dès 2009 de connaissances et techniques spécifiques aux domaines du savoir- de travaux parlementaires conséquents20. Elle ne se résume pas à être et des qualités nécessaires aux relations interpersonnelles, la télémédecine et ne doit pas être assimilée au vaste ensemble des ainsi que de l’informatique, de l’audiovisuel, des multimédias, de « TIC santé ». La plupart des systèmes de santé des pays industria- l’Internet et des télécommunications qui permettent aux utilisateurs lisés entrent progressivement dans l’ère numérique. Une démarche de communiquer, d’accéder aux sources d’information, de stocker, particulièrement encouragée par l’Union européenne ; de manipuler, de produire et de transmettre des information sous > l’e-learning, défini par la Commission européenne comme « l’uti- toutes les formes auprès d’une grande diversité de publics. En tout lisation des nouvelles technologies multimédias et de l’Internet état de cause, la qualité du traitement de l’information et de la com- pour améliorer la qualité de l’apprentissage en facilitant l’accès à des munication de celle-ci reste l’objectif, et la technologie, le moyen. ressources et des services, ainsi que les échanges et la collaboration Le rapprochement des compétences humaines des métiers du à distance. ». Ce mode d’apprentissage recouvre les méthodes de domicile avec les capacités d’exécution ouvertes par les technologies formation s’appuyant sur l’outil informatique. Certaines sont cen- permet de dépasser l’apport spécifique aux technologies de l’infor- trées sur le support technologique, d’autres sur la distance. Cer- mation et de la communication : rapidité, fluidité, quantité et qua- taines insistent sur les aspects pédagogiques, le type d’interaction lité propres aux moyens techniques mis en œuvre. La qualification ou le mode de tutorat, tandis que d’autres proposent une synthèse. des problématiques résultant de l’intégration de ces technologies au Ce qui prime, au travers de ce terme, ce sont les interactions ren- sein des systèmes institutionnels (environnement social et familial, dues possibles par l’utilisation d’un réseau informatique, qu’il soit relation sphère privée / sphère publique, etc.), nécessite aujourd’hui localement (au sein d’une entreprise ou d’une école) ou mondia- un effort de conceptualisation et de formulation, notamment au lement situé (via l’Internet) et l’acquisition de savoir, de compé- regard des besoins existants et insuffisamment couverts par l’offre tence, etc. de services humains et technologiques, mais aussi des besoins non encore repérés ou à venir. Ces technologies peuvent aussi s’adresser à des publics particuliers, telle la silver économie s’adressant aux personnes âgées21, elles- L’intégration des technologies au sein du domicile et le rappro- mêmes sous-segmentées en trois catégories : chement avec le champ des services à la personne interrogent le > les âgés « actifs ». Ces personnes, généralement retraités, auto- devenir tant des produits que des usages et pratiques des différents nomes et indépendantes connaissent un vieillissement habituel ou publics concernés (bénéficiaires des services, salariés intervenant à usuel avec le cas échéant des atteintes de certaines fonctions, liées à domicile, partenaires). Les technologies concernées sont divisées en l’âge, considérées comme physiologiques ; quatre catégories : > les âgés « fragiles ». Ces personnes présentent des limitations > l’e-santé, qui peut être définie comme : « l’application des tech- fonctionnelles et une baisse des capacités d’adaptation ou d’anti- nologies de l’information et de la communication à l’ensemble des cipation, sous l’action conjuguée du vieillissement physiologique, activités en rapport avec la santé » (Commission européenne) ; de maladies chroniques et du contexte de vie. La fragilité doit être > les services du numérique au service du bien-être de la personne (OMS) ; comprise comme une situation dynamique ou même un état ins- 24 25
table, qui peut évoluer vers une rupture d’équilibre, des complica- à un lecteur mobile, l’accès à des informations relatives sur une tions et une perte d’autonomie, mais peut aussi être stabilisée par application informatique ; des interventions appropriées ; > les objets dits « actifs » embarquant des technologies les raccor- > les âgés « dépendants ou en situation de perte d’autonomie ». Ces dant à l’Internet (un module GSM pour le réseau mobile, Wi-Fi, âgés ont besoin d’être aidés pour l’accomplissement des actes essen- Ethernet, Bluetooth, ou des technologies dites low-energy). tiels de la vie ou requièrent une surveillance régulière. Ils peuvent vivre à domicile ou en Ehpad. Ils représententent 8 % du nombre Tout type d’objet peut être connecté pour autant qu’il soit équipé d’âgés en France. électroniquement et qu’il soit muni d’un module de communication le raccordant à l’Internet. Les applications sont infinies et la mise sur le marché d’objets communicants est désormais continue. Dans 1. Le domicile : un territoire économique en devenir les produits à destination des consommateurs, il existe un système 1.1. L’Internet des objets : une progression inédite dans permettant de contrôler les lampes de sa maison (intensité, couleur) la vie quotidienne depuis son téléphone mobile, un système à placer dans ses plantes avertissant quand il convient de les arroser ou encore un système En vingt ans, l’informatique a révolutionné l’appréhension du adapté aux véhicules, lesquels peuvent être contrôlés à l’aide d’une monde. Après les ordinateurs personnels, l’irruption des supports application mobile (ouverture/fermeture des portes ou du toit entre mobiles a été une source de profonde innovation transformant le autres) pouvant en outre être géo-localisée. marché des services, d’abord ceux réalisés à distance et, bientôt, Du côté de l’industrie le potentiel de développement est également également sur ceux réalisés au plus près des personnes, à leur important. Dès l’origine, l’informatique a permis d’optimiser les domicile. processus d’entreprises grâce au partage et au traitement de l’infor- Au début de l’Internet, des moyens importants et coûteux mation et à l’automatisation de nombreuses tâches. L’Internet des étaient nécessaires pour pouvoir communiquer au travers du objets, va encore plus loin en associant des technologies de l’infor- réseau (mémoires, processeur, bande passante). Une innova- mation et de la communication avec des objets « intelligents » et tion technologique soutenue a permis de réduire les ressources communicants dans le but de fournir à ces derniers les moyens consommées et de miniaturiser les appareils communiquant d’interagir sans intervention humaine avec le système d’informa- sur le réseau. Si, jusqu’alors, l’Internet était réservé à l’intercon- tion. Répondant à l’expression « machine to machine » (M2M) peut nexion de terminaux (PC, téléphones, tablettes, etc.), l’abais- appartenir indifféremment à une organisation ou à une entreprise. sement du coût moyen de production des capteurs tombés de Il est alors possible d’imaginer des interconnexions (entreprise, 1,30 dollars à 60 cts, ainsi que l’augmentation de la capacité de bâtiment, ville, etc.) beaucoup plus « intelligentes » où l’ensemble traitement logicielle permettent la connexion de toutes sortes des ressources s’accorderait pour offrir un environnement cohérent d’objets au réseau. et performant. D’après une étude menée par BNP Paribas22, cinq millions de per- Deux types d’objets connectés sont généralement distingués : sonnes, soit 11 % de la population française âgée de plus de 18 ans, > les objets dits « passifs » utilisant généralement un tag (puce RFID sont actuellement équipées d’au moins un objet connecté. Dans la ou code barre) permettant leur indentification et permettant, grâce catégorie de population des 18-24 ans, ils sont 14 %. Selon Xerfi23, le 26 27
marché des objets connectés devrait représenter 3 % des dépenses tionnant la réalisation à un certain nombre d’éléments : mise en high-tech des Français d’ici 2016 et croître de 50 % chaque œuvre d’une stabilité pluriannuelle du cadre fiscal et réglemen- année. Sur les 92 millions de produits high-tech vendus en taire, sécurisation d’une certaine flexibilité du droit du travail, etc. 2013, 48 % sont connectés. Ce taux a grimpé à 57 % en 2014 et 59 000 créations nettes d’emplois sont ainsi en jeu, puisqu’en l’ab- devrait dépasser les 85 % à l’horizon 2020. Mais connectivité ne sence de telles évolutions du marché du travail, les services à la per- rimerait pas nécessairement avec « intelligence ». Les produits sonne ne créeraient que 88 000 emplois (mais resterait néanmoins « intelligents » (smart), capables d’analyser l’information qu’ils le troisième contributeur à l’emploi en France). collectent, restent rares : 0,3 % en 2013, même s’ils devraient générer un chiffre d’affaires qui devrait franchir les 60 % de L’émergence d’une filière du service à la personne en environnement l’ensemble du marché d’ici 202024. numérique pourrait être l’un des leviers de réalisation de l’un des plus importants potentiels d’emplois en France. 1.2 Les SAP : un gisement d’emplois inexploité Le secteur des services à la personne doit son dynamisme à une grande diversité d’acteurs : particuliers employeurs et orga- nismes de services à la personne. Sur les 33 100 organismes de services à la personne recensés au 1er janvier 2015, 40 % étaient des entreprises, 19 % des associations, 37 % des auto-entrepre- neurs et 4 % des établissements publics25. L’ensemble des métiers des SAP emploie 1,35 million de per- sonnes26 et constituerait l’un des domaines d’activités qui contri- bueraient le plus à la création d’emplois dans le scénario de dynamisation volontariste du marché du travail envisagé par McKinsey. Avec un potentiel de 147 000 emplois postes nets créés à l’horizon 2018, il se situe en cinquième position parmi les secteurs pourvoyeurs d’emplois en France. Ces données ont été récemment consolidées par les récents rapports de France Stratégie27 et du Crédoc28, ainsi que les services du Ministère de l’Économie et des Finances, estimant que la Silver économie pourrait entraîner 300 000 créations d’emplois nettes, d’ici à 202029. Dans le cadre du scénario de réforme du marché du travail élaboré en 2014 par McKinsey, le cabinet d’études nuance pour- tant l’enthousiasme que peut suggérer ce potentiel en en condi- 28 29
Les différentes formes de services à la personne 2 Architecture et protocoles de réseau : l’absence de standard L’article L. 7231-1 du code du travail définit les services à la per- sonne en trois grandes catégories de métiers : 2.1 Rendre compatibles les solutions servicielles 1° La garde d’enfants ; La plupart des applications a fait l’objet de développements proprié- 2° L’assistance aux personnes âgées, aux personnes handicapées taires comme c’est le cas dans l’industrie, la domotique ou encore ou aux autres personnes qui ont besoin d’une aide personnelle à l’équipement des véhicules. La raison invoquée est la spécificité des leur domicile ou d’une aide à la mobilité dans l’environnement de proximité favorisant leur maintien à domicile ; besoins. Il en est résulté une incompatibilité des différentes solu- 3° Les services aux personnes à leur domicile relatifs aux tâches tions et l’absence de standard. Cette absence de standardisation a ménagères ou familiales. sans nul doute été l’une des principales raisons qui expliquent pour- quoi ces réseaux d’objets « intelligents » ne sont que peu déployés Ils prennent ainsi diverses formes : aujourd’hui, en comparaison des nombreuses applications qu’ils > services de proximité, offerts dans des lieux dédiés : écoles, hôpitaux, garages, salons de coiffure, etc. Avec la contrainte que le peuvent supporter. consommateur n’a pas le choix du lieu, ni même le choix du temps Si les acteurs ont, dès l’origine, développé des technologies proprié- où le service sera rendu : il lui faut prendre rendez-vous ; taires, ils l’ont fait au détriment de l’interopérabilité. La fragmenta- > services à domicile, avec la fourniture de « petits » services (de tion des systèmes a freiné le développement des communications la réparation d’un bouton au remplissage de la déclaration d’impôt entre objets de marques différentes. Si bon nombre de sociétés ou- ou au nettoyage des vitres). Avec la contrainte que les tarifs deman- dés ne sont pas forcément accessibles à tous. (il n’est pas rare vrent, depuis, leurs APIs afin d’augmenter cette interopérabilité qui qu’un déplacement et une heure de travail soient facturés pour un est l’un des fondamentaux de l’IdO, beaucoup d’autres choisissent service qui n’aura pris que quelques minutes ou même quelques de renforcer leur écosystème propriétaire, maintenant de fait leurs secondes) ; clients dans un univers fermé. Pourtant, une structure logicielle > aides à la personne, orientés vers la fourniture d’un service spéci- commune30 et des réseaux compatibles, voire unifiés, sont autant de fique et, le plus souvent, d’une gamme de services, adaptés à l’état ou à la situation d’une personne. clés pour l’avènement des objets connectés. L’IdO cherche encore un modèle susceptible d’assurer le dévelop- Par ailleurs, le développement des Technologies de l’information et pement harmonieux des technologies avec les besoins. Ainsi, il de la communication (TIC) provoque l’irruption de nouvelles « ma- est essentiel d’interconnecter les « réseaux objets » et le « réseau nières de faire » qui amplifient, modifient la gamme des prestations de l’internet global », donnant naissance ainsi à l’Internet of Eve- offertes et accroissent les possibilités de : rything, porté par de nouvelles technologies comme l’« intelli- > mettre à la disposition du consommateur, là où il le souhaite, gence » ubiquitaire. quand il le souhaite et pour une durée éventuellement courte, un L’IdO concernera toute la chaine de valeur des SAP à commencer prestataire capable d’apporter le savoir ou le savoir-faire demandé ; par les : > déplacer le lieu de fourniture des services des lieux dédiés au lieu > utilisateurs du quotidien : particuliers et salariés intervenant au souhaité par le consommateur. Par exemple en substituant les soins à domicile aux soins hospitaliers ; domicile ; > d’assurer dans les cas nécessaires, la fourniture de prestations > acteurs de l’industrie numérique : opérateurs télécom, éditeurs de « à distance ». logiciels, société de services ; 30 31
> entrepreneurs, porteurs de nouveaux concepts et d’innovation ; ou être dotés d’une certaine autonomie de comportement. Une telle > concepteurs et producteurs d’objets connectés, réputés de plus en approche permet de développer de nouveaux modèles économiques plus « intelligents » et communicants ; plus orientés sur la valorisation des services rendus. > acteurs des industries traditionnelles qui les mettent en œuvre ; Cette approche globale doit être prise en compte dans la conception > acteurs des pouvoirs publics concernés par les politiques des ser- même des produits, car il faut concevoir de front non seulement vices à la personne et du numérique. tous les éléments de la partie « physique » du produit, mais aussi toutes les applications auxquelles il sera connecté, ainsi que l’archi- tecture du système dans lequel il devra s’intégrer. 2.2 Lier un objet ou un lieu à l’Internet Ainsi, l’IdO désigne les diverses solutions techniques qui per- mettent d’identifier des objets, de capter, stocker, traiter, et transfé- L’Internet des objets est un néologisme qui se rapporte à l’extension rer des données dans les environnements physiques mais aussi entre de l’Internet à des objets et à des lieux dans le monde réel. Il repose des contextes physiques et des univers virtuels. L’enjeu majeur n’est sur la communication des objets, quelle que soit la manière de les pas tant d’inventer de nouvelles technologies que de perfectionner connecter : xG, NFC, puce RFID, capteur, bluetooth, wifi… L’Inter- celles qui existent déjà, de les connecter, et de les intégrer. net des objets n’est donc pas une technologie en soi mais un système L’informatique « sort » alors de l’ordinateur pour s’intégrer directe- complexe qui repose sur l’interopérabilité entre le stockage et le ment dans l’environnement, qui devient donc ubiquitaire. Le but de traitement des données selon différents procédés. cette idée est d’élargir les possibilités de l’informatique, de faire en sorte que l’ordinateur profite à l’utilisateur à tout moment lorsqu’il Il regroupe trois types d’appareils : se trouve dans cet environnement. Pour aller plus loin, cet ordina- > les objets connectés directement à Internet et qui stockent leur teur ambiant offre des capacités d’interaction plus naturelles, ce qui donnée dans le cloud : le rend transparent et utilisable sans effort pour les personnes. > le M2M via une technique bluetooth, RFID, NFCn wifi ou 3/4G ; Par sa capacité à élargir progressivement la notion de réseau de > les terminaux communicants : tablettes, smartphones, ordinateurs réseaux en construisant un réseau de capteurs pour des objets, portables, etc. l’IdO contribue également à structurer des types de réseaux iné- dits en tissant entre objets et individus des formes de structuration Un objet connecté comporte une partie physique « tradition- aussi nouvelles que celles qu’ont constitué les communautés dans nelle » composée de mécanique et d’électronique, complétée par l’internet. Pour comprendre ces évolutions, il est essentiel de ne pas un ensemble de capteurs reliés à une électronique de surveillance limiter l’analyse à la dimension technique du phénomène mais de et de contrôle pilotée par des logiciels de commande, ainsi qu’une considérer ses composantes sociales ainsi que les possibles interac- interface utilisateur pour l’interaction avec les opérateurs. Cet objet tions entre ses utilisateurs. connecté31 est chapeauté par des capacités de connexion et de com- Les processus d’appropriation en local seront déterminants quant munication32, ainsi que de liaison avec le Cloud Computing. à la forme et aux modalités que prendront les usages de l’IdO. Ils De simples objets sous contrôle sont qualifiés d’« intelligents » pou- emprunteront certainement d’autres formes que celles qui sont vant voir leur fonctionnement optimisé en permanence pour amé- aujourd’hui imaginées par les chercheurs et les entreprises. liorer la performance globale du système auxquels ils appartiennent L’Internet des objets porte des enjeux économiques et sociétaux 32 33
majeurs. Parmi ces challenges, la sécurité concerne l’ensemble des mations peut s’opérer selon trois types de connexions : entre acteurs. Si l’utilisation de technologies ouvertes permet l’intero- machines (M2M), entre personnes et machines (P2M ou M2P), pérabilité, elle expose les objets – et donc leurs utilisateurs – aux entre personnes (P2P). Les enjeux économiques de chacune de attaques. Aussi la sécurité doit-elle faire partie intégrante de la ces formes de connexion sont respectivement évalués à hauteur de conception des systèmes. Le groupe de travail s’est accordé pour 6,4, 3,5 et 4,5 milliards de dollars34. considérer que, comme toute nouvelle technologie, l’Internet des Pour Cisco, l’IoE représente avant tout un formidable levier de objets peut faire peur mais les apports potentiels pour la société ne performance, notamment pour les villes – qui deviendraient alors doivent pas être sous-estimés. des « smart cities » – et plus généralement pour les administra- L’IdO promet de révolutionner la société à l’image de ce que l’infor- tions publiques. L’IoE pourrait soutenir de nombreux développe- matique a fait ces vingt dernières années. Les technologies, de plus ments et améliorations comme par exemple l’habitat ou le station- en plus matures, impactent la réalité par notamment, le dévelop- nement « intelligents », le contrôle optimisé des consommations pement de l’offre. Elles vont permettre aux agglomérations d’opti- énergétiques et naturelles, une tarification routière plus adaptée, miser leurs infrastructures, aux entreprises leurs processus et de se etc. Il permettrait aussi d’accroître les performances administra- démarquer en proposant des produits innovants, aux particuliers tives, en améliorant la productivité des agents et en réduisant les de disposer de services novateurs au sein de leur domicile. C’est une coûts d’exploitation. source d’inspiration et d’innovation sans limite pour les entreprises De manière encore plus prégnante qu’avec l’Internet des objets, et pour la société en général. l’IoE repose sur la collecte des informations qui seront partagées Les SAP vont s’adapter au fur et à mesure de la montée en puissance individuellement et collectivement. Cette collecte sera organisée de l’IdO au domicile des particuliers à cette nouvelle donne, qu’il par des sociétés privées capables de traiter des big datas, et char- s’agisse de leur organisation, de leur offre et de la formation de leurs gées d’en retirer des bénéfices, en les revendant soit à des agences personnels. publicitaires ou marketing, soit aux organismes publics soucieux d’optimiser leurs services et territoires, soit aux sociétés privées d’intérêt public (transports, énergie, travaux, gestion des déchets, 3 Un concept large : l’Internet of Everything etc.). La matière première de cette nouvelle industrie sera compo- 3.1 La mise en relation des producteurs d’information sée d’informations personnelles, fournies gratuitement, et dont le producteur ne maîtrisera pas l’utilisation ; sans parler des risques Au-delà de l’Internet des objets, s’annonce le concept de l’Inter- de piratage des serveurs qui hébergent toutes ces données. net of Everything (IoE)33. Ce concept, difficilement traduisible en français (« L’internet de Tout »), signifie qu’il va bien au-delà des « Things » (objets connectés). Il s’agit en fait d’une expression 3.2 L’impact du développement de l’Internet of Eve- inventée et promue à partir de 2013 dans un rapport de Cisco, rything l’un des leaders mondiaux en infrastructure réseau. Au-delà de la connexion des objets, l’IoE intègre également les données, les pro- De très nombreux secteurs d’activité économique et de la vie quo- cessus et… les particuliers (via leurs smartphones et leurs réseaux tidienne sont d’ores et déjà impactés par les évolutions des objets sociaux). La mise en relation de tous ces producteurs d’infor- connectés et l’IoE et le seront plus encore dans les années à venir. 34 35
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