PROGRAMME D'ÉTUDES DE CAS DE L'IAPC - WWW.IAPC.CA/ETUDESDECAS - PASSEPORT CANADA : UNE TRANSFORMATION ORGANISATIONNELLE EN
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Programme d’études de cas de l’IAPC www.iapc.ca/EtudesDeCas Passeport Canada : une transformation organisationnelle en réponse à un changement de cap des politiques et de la demande Andrew Graham
Collection d’études de cas de l’IAPC Rédacteur : Andrew Graham -‐ andrew.graham@queensu.ca Depuis plusieurs années, l'École de la fonction publique du Canada (EFPC), en partenariat avec l'Institut d'administration publique du Canada (IAPC), produit une série d'études de cas utilisées dans le cadre des activités d'apprentissage de l'école et aux fins d'usage général au sein des provinces, et ce, en vue de partager l'apprentissage organisationnel par l'entremise du programme d'études de cas de l'IAPC. Les cas, élaborés en concomitance avec des partenaires répartis sur plusieurs provinces, mettent résolument l'accent sur les activités du gouvernement fédéral. Nous remercions tous les services et ministères qui ont accepté de partager leurs idées et expériences et de les mettre au profit des autres. Chaque cas sera constitué du cas en lui-‐même ainsi que d'une petite note d'apprentissage présentant des suggestions d'usages et de thèmes. Les enseignements tirés, issus des observations des acteurs interrogés, ainsi qu'une documentation écrite et une analyse de la part de l'auteur et du rédacteur du cas seront également inclus. Pour de plus amples informations sur la série ou sur cette étude de cas en particulier, contactez Andrew Graham (Andrew.Graham@queensu.ca), rédacteur de la série des cas d'étude de l'IAPC. Tous les cas ont été élaborés par un chercheur/rédacteur puis montés. La recherche se base sur l'analyse de la documentation publiée et des entrevues réalisées avec les acteurs impliqués dans le cas. Les entrevues sont toutes traitées avec confidentialité et les citations qui en découlent ne sont pas attribuées à un individu identifiable. Site Web pour toutes les études de cas de l’IAPC : www.iapc.ca/EtudesDeCas et www.iapc.ca/Magasin . Passeport Canada : une transformation organisationnelle en réponse à un changement de cap des politiques et de la demande Auteur, Andrew Graham, School of Policy Studies, Université Queen’s, Kingston, Canada Nous remercions l’École de la fonction publique du Canada de l’appui financier qu’elle a fourni à la réalisation de cet ouvrage. Les opinions exprimées dans le présent rapport ne sont pas nécessairement celles de l’École de la fonction publique du Canada ou du gouvernement du Canada. Sommaire Lorsque les États-‐Unis ont décidé d’obliger les Canadiens arrivant par voie aérienne à détenir un passeport, une crise a éclaté à Passeport Canada. Cette situation a fait ressortir les faiblesses culturelles et administratives qui se développaient dans l’organisation depuis un certain temps. La réaction à la première vague et la préparation à la seconde vague de ce changement ont permis aux dirigeants de Passeport Canada de réagir dans l’immédiat par une série de mesures visant à corriger les lignes de faille culturelles et à « réussir à boucler la journée » en mode de gestion de crise. Le processus de réaction, toujours en cours plusieurs années après l’élément déclencheur, représente une transformation d’envergure pour l’organisation. Cette crise peut nous en apprendre long sur la relation entre la culture opérationnelle et les résultats, la nécessité d’établir une cohésion interne sur les valeurs fondamentales, le rôle des outils d’analyse (au-‐delà des données brutes) et la nécessité pour la haute direction de se concentrer sur les valeurs culturelles de base pour contrer une menace immédiate. Enfin, ce cas des plus intéressants décrit les leçons que l’organisation a tirées des défis qu’elle a dû relever, sa réaction initiale et les mesures correctives qu’elle a prises. La présente étude de cas comporte des Notes de l’instructeur Date de publication : 2011 Photo de couverture: Bernie Kasper, Madison Indiana Photography -‐ http://sindianavisions.wordpress.com/ Page 1
Passeport Canada : une transformation organisationnelle en réponse à un changement de cap des politiques et de la demande Préparée par Andrew Graham Le cas Un passeport, ça ne se magasine pas. Dans notre pays, Passeport Canada en est l’unique fournisseur. Quand un fournisseur exclusif, à cause de politiques qui échappent à son contrôle, est frappé par une augmentation subite de la demande ayant l’ampleur d’un tsunami, juste au moment où il devient si important d’avoir un passeport, que se passe-‐t-‐il? Voici le récit de l’augmentation subite de la demande que Passeport Canada a vécue et surmontée en 2006 et 2007, des mesures qu’il a prises et des leçons à en tirer. Contexte Passeport Canada a été créé à titre d’organisme de service spécial (OSS) du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, et son mandat est défini par le Décret sur les passeports canadiens. Il a la responsabilité de délivrer les passeports et de contrôler l’utilisation qu’en font les Canadiens. En tant qu’OSS, il mène ses activités avec une certaine indépendance, tout en demeurant assujetti aux orientations stratégiques du gouvernement. Passeport Canada fait partie de la structure ministérielle et doit se conformer aux règles du gouvernement en matière de ressources financières et humaines. Les personnes qui y travaillent sont des fonctionnaires. L’organisation finance entièrement ses activités grâce aux droits perçus pour la délivrance des passeports et autres documents de voyage. Cependant, comme il s’agit d’un OSS, le gouvernement peut lui accorder des crédits pour réaliser des projets spéciaux ou répondre à des besoins urgents. Normalement, Passeport Canada tire tous ses revenus d’exploitation et d’immobilisations de son propre fonds renouvelable. Passeport Canada a un mandat de service, mais il porte également une lourde charge sur le plan de la sécurité. Il doit veiller à ce que les passeports qu’il délivre soient fondés sur des faits, utilisés par les citoyens canadiens à des fins légitimes et respectés partout dans le monde comme documents de voyage permettant l’entrée dans un pays étranger. Par conséquent, bien que la rapidité du service soit un élément important, l’objectif véritable consiste en la prestation d’un service rapide qui donne une assurance au chapitre de la crédibilité et de la sécurité. La qualité du service doit toujours se mesurer dans cette optique. Passeport Canada compte quatre régions et un grand nombre de bureaux locaux d’un océan à l’autre. Il dispose également d’un vaste réseau d’agents réceptionnaires généralement affiliés à Postes Canada ou à Service Canada pour aider à assurer la prestation des services dans les secteurs urbains, ruraux et isolés du pays. L’organisation fournit également des services de passeport aux Canadiens à l’étranger, par l’entremise des services consulaires du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI). À l’aube de cette crise, Passeport Canada faisait face à plusieurs défis qui affaiblissaient sa capacité de réagir efficacement : • À l’interne, les unités ne travaillaient pas de façon concertée. Page 2
• L’information et les prévisions étaient douteuses, malgré une croissance soutenue. • L’organisation ne disposait pas de la capacité d’intervention en cas de crise nécessaire, malgré les nombreuses périodes d’intensification de la demande qu’elle avait connues par le passé. • Il s’agissait d’une organisation très opérationnelle qui se souciait peu des tendances et n’était guère portée à modifier ses processus. • Son modèle de financement limitait sa capacité d’innover ou d’éliminer les redondances. Comme l’a déclaré un des gestionnaires : « Nous avions et avons toujours d’excellentes compétences en résolution de problèmes situationnels et immédiats. Nous ne faisions pas beaucoup de réflexion sur notre expérience pour nous adapter en conséquence. » L’Initiative relative aux voyages dans l’hémisphère occidental (IVHO) En 2004, le Congrès des États-‐Unis a adopté l’Intelligence Rien qu’en janvier 2007, Reform and Terrorism Prevention Act, qui obligeait tous les Passeport Canada a reçu plus de voyageurs des pays de l’hémisphère occidental, y compris les 505 700 demandes (environ 23 000 citoyens canadiens et américains, à être munis d’un passeport par jour), soit 47 pour cent de plus valide ou d’un document de voyage approuvé pour entrer aux que le mois précédent. En mai 2007, États-‐Unis. En vertu de cette loi, le Congrès a annoncé en 2005 on dénombrait 199 000 demandes le lancement de l’Initiative relative aux voyages dans en attente. l’hémisphère occidental (IVHO), dans laquelle était proposée la mise en œuvre, en deux phases, d’une nouvelle réglementation relative aux passeports. Dans le cadre de la phase I de l’IVHO, les Canadiens arrivant aux États-‐Unis par voie aérienne devraient présenter un passeport valide ou un document de voyage approuvé à compter du 23 janvier 2007. La date butoir de la phase I a été officiellement confirmée le 24 novembre 2006, ce qui n’a laissé que 60 jours à Passeport Canada pour se préparer en vue de celle-‐ci. Dans le cadre de la phase II de l’IVHO, les voyageurs arrivant aux États-‐Unis par voie maritime ou terrestre devraient aussi présenter un passeport valide à compter du 1er juin 2009. Ce virage stratégique important pour les relations entre le Canada et les États-‐Unis découlant de l’IVHO échappait au contrôle de Passeport Canada et, on peut le croire, à celui du gouvernement du Canada. De novembre 2006 à février 2007, l’organisation a dû faire face à une hausse subite et sans précédent du nombre de demandes de passeport qui a entraîné d’importants retards dans le traitement des demandes et l’augmentation des délais d’attente aux bureaux de Passeport Canada et dans ses centres d’appel. Passeport Canada est alors passé en mode d’urgence, ce qui a éventuellement abouti à une série de transformations quant aux politiques, aux opérations, aux perspectives stratégiques et à la façon dont l’organisation traite ses intervenants. Comme toute autre augmentation subite de la demande ou tout autre changement imprévu, l’IVHO a posé des défis immédiats pour l’organisation, soit ceux de satisfaire à cette demande accrue et à intervenir auprès du public en cas d’échec. Les faiblesses dans ses systèmes et dans l’ensemble de sa structure ont été mis au jour. Inévitablement, cette situation a intensifié l’examen public de Passeport Canada de la part des médias, du Comité des comptes publics, du Bureau du vérificateur général du Canada et, surtout, des citoyens canadiens par l’intermédiaire de leurs législateurs. Page 3
Une augmentation subite, certes, mais dans le contexte d’une croissance soutenue Les Canadiens qui voyagent utilisent souvent leur passeport. Depuis nombre d’années avant cette augmentation subite, la demande de services de passeport connaissait une croissance soutenue. Secoué par la phase I, avisé pour la phase II La lutte désespérée pour absorber l’augmentation subite de la demande causée par l’obligation d’être muni d’un passeport pour entrer aux États-‐Unis par voie aérienne s’est soldée par de nombreuses heures supplémentaires, de longs délais d’attente et un stress considérable pour l’organisation. En fait, on a tenté de faire la même chose plus vite et plus intensément, avec des résultats peu prometteurs. La phase II, soit l’obligation d’être muni d’un passeport aux points d’entrée terrestres et maritimes, présentait alors un risque considérable pour Passeport Canada et le gouvernement. L’attention se portait de plus en plus de ce côté. Sous la gouverne de la Direction générale des opérations, qui a la responsabilité de déterminer l’admissibilité et de produire le livret de passeport, Passeport Canada a mis en œuvre une série d’innovations en prévision de la phase II de l’IVHO. Des employés de toutes les directions ont relevé le défi en faisant un nombre important d’heures supplémentaires dans le cadre d’« opérations éclairs », notamment les fins de semaine, ainsi qu’en relevant et en réglant les problèmes qui survenaient. Cette approche horizontale à l’égard d’un problème opérationnel représentait un important changement culturel pour l’organisation. Les gestionnaires des Opérations ont exercé le leadership nécessaire pour résoudre le problème tout en donnant au personnel de première ligne la possibilité de repenser et de mettre à jour un grand nombre de processus, d’améliorer leur efficience et d’absorber le volume des demandes. Le personnel des Opérations stratégiques a mis en œuvre un nouveau moyen d’observer la demande quotidienne dans tous les modes de service afin d’éviter les effets négatifs d’une seconde augmentation Page 4
subite, où que ce soit au Canada. Ces améliorations novatrices sont devenues les leçons retenues qui ont permis à Passeport Canada d’être prêt pour la phase II de l’IVHO. Obtenir de l’aide et renforcer les capacités Passeport Canada ne pouvait pas relever ce défi seul. Il était largement reconnu que le fonds renouvelable et le modèle d’autofinancement ne fourniraient pas les ressources nécessaires en temps voulu. En juin 2007, l’organisation a reçu un investissement ponctuel de 55 millions de dollars du gouvernement du Canada. Cet apport avait pour but de mettre au point la capacité opérationnelle nécessaire à Passeport Canada pour régler l’arriéré et faire face à l’augmentation prévue de la demande associée à la phase II. L’organisation s’est servie de ces fonds pour construire et équiper un nouveau centre de traitement des demandes par la poste et d’impression à Gatineau (Québec); ce centre a ouvert ses portes en janvier 2008. Elle a également remplacé de l’équipement désuet à ce bureau et à son centre d’impression de Mississauga (Ontario), de même que dans les bureaux régionaux. Le nouveau centre de production des demandes par la poste de Gatineau, un immeuble de production de haute technologie remis à neuf, est devenu opérationnel le 3 janvier 2008. Cette installation est à l’avant-‐garde de la production de documents sécurisés, tant par ses équipements que par les nouveaux flux de travail simplifiés que permet sa conception. Depuis son ouverture, il a suscité l’intérêt et la visite d’autres organismes de délivrance des passeports du monde entier. Un accès accru aux services Passeport Canada a également élargi son rayonnement dans les collectivités de petite taille en augmentant le nombre d’agents réceptionnaires de Postes Canada et de Service Canada. Les agents réceptionnaires reçoivent une formation sur la vérification de l’exactitude et de l’exhaustivité des demandes de passeport et sur la perception des droits. Les demandes vérifiées sont ensuite acheminées à Passeport Canada aux fins de l’examen et du traitement. Les décisions sans appel sur l’admissibilité sont toujours prises par Passeport Canada. L’amélioration du contrôle des processus La première augmentation subite de la demande a fait remarquer que la capacité de Passeport Canada à assurer un suivi efficace de son propre rendement était restreinte par des systèmes qui ne posaient pas les bonnes questions ou qui n’étaient pas assez rapides pour améliorer les processus en temps voulu. Des efforts considérables ont été engagés dans la construction de nouveaux systèmes électroniques de suivi et de rendement. Mettre la main à la pâte : les opérations éclair Une pratique qui a aujourd’hui sa place dans l’histoire de l’organisation a alors vu le jour. Elle avait tout d’une métaphore de l’approche que le PDG voulait voir appliquée à cette crise et, par le fait même, au virage organisationnel qu’il souhaitait. L’augmentation des heures de travail et les efforts mis en œuvre dans le traitement des demandes ne se sont pas limités au personnel opérationnel de première ligne. Tout le monde, à commencer par le PDG, a dû participer à ce qu’on appelait les opérations éclair. Les employés ont déposé leurs outils habituels, oublié tout des codes vestimentaires et mis la main à la pâte. Ils ont ouvert et estampillé des demandes, veillé à ce qu’elles soient consignées dans le système de suivi, procédé à la détection initiale d’erreurs et assuré un suivi de manière à laisser les agents des passeports libres de se Page 5
concentrer sur les approbations officielles. Cette initiative a eu un tel impact sur la philosophie de l’organisation que chaque fois que le chercheur auteur de la présente étude a discuté avec un employé de Passeport Canada, quel que soit son niveau d’emploi, c’est cette histoire qu’on lui a relatée en premier lieu. Il est difficile de savoir si cette stratégie a eu d’importantes répercussions sur le volume d’arriérés, mais c’est probablement le cas. Surtout, elle a montré clairement que Passeport Canada s’était approprié la crise à part entière. Elle a communiqué le niveau d’engagement de la haute direction et mis à l’œuvre le personnel des services fonctionnels dans le secteur d’activité principal qu’il soutenait. L’examen du processus d’approbation La conception d’un processus risque toujours de créer des entraves à un traitement efficace, et pas nécessairement pour des raisons juridiques ou de sécurité. Une révision des processus est souhaitable en période de crise. Le fait de mettre l’accent sur la productivité invite aussi le personnel à proposer des idées pour faire bouger les choses sans perdre la maîtrise du produit fini. En l’occurrence, le volume d’arriéré a amené Passeport Canada à se concentrer sur les résultats de la production sans perdre de vue son mandat de sécurité et de qualité. De nouveaux processus d’examen préalable et la subdivision de processus en étapes distinctes ont permis aux agents de traitement des cas de mieux segmenter leur temps et d’accélérer le traitement des demandes. Deux changements qui ont été apportés ont simplifié le processus de demande de passeport pour à peu près tout le monde. Le processus de demande de renouvellement simplifié (par lequel, dans la plupart des cas, un requérant déjà muni d’un passeport valide n’a pas à présenter de documents d’identité supplémentaires) et la nouvelle politique sur les répondants (qui fait de la plupart des titulaires d’un passeport canadien des répondants admissibles) ont été lancés en quelques mois seulement. Ensuite, la haute direction de Passeport Canada a demandé et reçu l’appui des plus hauts dirigeants de la fonction publique pour inclure aux priorités du gouvernement l’établissement d’un environnement optimal pour la production de documents de voyage sécurisés. Comme Passeport Canada s’autofinance grâce aux droits perçus, sans recevoir de crédits annuels du Parlement, cet appui avait une importance cruciale pour l’obtention du soutien financier nécessaire à la mise en œuvre d’améliorations à long terme de la production. Pour mieux servir les Canadiens, l’organisation a engagé un surcroît d’agents réceptionnaires de Postes Canada et de Service Canada. Les agents réceptionnaires reçoivent une formation sur la vérification de l’exactitude et de l’exhaustivité des demandes de passeport et sur la perception des droits. Les demandes vérifiées sont ensuite acheminées à Passeport Canada aux fins d’examen et de traitement. Les décisions sans appel sur l’admissibilité sont toujours prises par Passeport Canada. Ce faisant, Passeport Canada tirait parti d’autres programmes et services du gouvernement dans le cadre de sa stratégie globale. Cette initiative a également renforcé sa présence dans les collectivités les plus isolées. L’amélioration des outils d’analyse L’utilisation optimale de processus de production améliorés passe par de solides prévisions des volumes. Pour assurer une compréhension efficace des tendances des demandes de passeport, Passeport Canada a Page 6
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