Réunification des familles : Présentation au Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration
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Conseil canadien pour les réfugiés Canadian Council for Refugees Réunification des familles : Présentation au Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration Introduction Le Conseil canadien pour les réfugiés (CCR) accueille favorablement l’étude du Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration sur les importants enjeux liés à la réunification des familles au Canada. Le CCR est un organisme pancanadien de regroupement sans but lucratif qui se voue à la défense des droits et à la protection des réfugiés et d’autres migrants vulnérables, au Canada et dans le monde, et à l’établissement des réfugiés et des immigrants au Canada. Le Conseil compte plus de 175 membres, soit des organismes impliqués dans l’établissement, le parrainage et la protection des réfugiés et des immigrants. Le Conseil est au service de ses membres pour leurs besoins en matière d’échange d’informations et d’expériences et de défense des droits. Depuis sa création, il y a près de 40 ans, le CCR se préoccupe des barrières imposées à la réunification des familles. Le CCR estime que la réunification des familles devrait être une priorité de notre politique d’immigration. La famille est l’élément naturel et fondamental de la société, et les gouvernements ont l’obligation de la protéger en vertu du droit international des droits de la personne. Nous sommes convaincus de l’absolue nécessité de respecter l’intégrité de l’unité familiale et de s’assurer que les familles ne sont pas séparées plus longtemps qu’il ne l’est absolument nécessaire. La notion de « famille » revêt un sens différent selon les différents contextes culturels : nous préconisons l’application de la définition la plus large et la plus inclusive possible du terme « famille ». Nous sommes particulièrement préoccupés par le sort des enfants séparés de leurs parents. La réunification rapide des familles devrait être la principale priorité de toute société qui se soucie de l’intérêt supérieur de l’enfant. Voici les principales préoccupations et observations du CCR au sujet des enjeux à l’étude. Nos commentaires portent sur trois volets principaux : 1. Principaux obstacles à la réunification des familles en ce qui concerne le programme de parrainage des membres de la famille immédiate dans la catégorie du regroupement familial a. Membres de la famille exclus b. Réunification des familles pour les enfants c. Enfant biologique et tests d’ADN d. Définition du terme famille 2. Obstacles à la réunification des familles en ce qui concerne les parrainages autres que ceux de la catégorie du regroupement familial a. Délais de traitement inacceptables pour la réunification des familles de réfugiés et d’aides familiaux résidants b. Manque de transparence relativement aux statistiques disponibles sur les délais de traitement c. Obstacles à la réunification des familles pour les demandes comportant des motifs d’ordre humanitaire présentées au Canada d. Séparation des familles imposée par le Programme des travailleurs étrangers temporaires et le Programme des travailleurs agricoles saisonniers 3. Faire en sorte que la réunification des familles soit accessible et équitable a. Niveaux d’immigration globaux b. Revenu minimal requis c. Parents et grands-parents
Réunification des familles : présentation, novembre 2016 Présentation 1. Principaux obstacles à la réunification des familles en ce qui concerne le programme de parrainage des membres de la famille immédiate dans la catégorie du regroupement familial a. Membres de la famille exclus L’alinéa 117(9)d) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés impose une interdiction de parrainage à vie pour les membres de la famille qui n’ont pas fait l’objet d’un contrôle au moment de l’immigration du répondant au Canada. Bien que l’alinéa 117(9)d) du Règlement touche toutes les catégories d’immigrants, il a une incidence négative disproportionnée sur les réfugiés et les migrants vulnérables qui omettent de déclarer un membre de leur famille. Cette omission peut être attribuable à la crainte de mettre en danger un membre de la famille, à l’oppression fondée sur le sexe, à un manque de renseignements ou à des événements imprévus de la vie. Le régime établi par l’alinéa 117(9)d) du Règlement est disproportionné, excessif et il cause un préjudice dévastateur aux personnes vulnérables, et en particulier aux enfants. Cette règle interagit avec d’autres dispositions de la loi pour également interdire l’accès à la Section d’appel de l’immigration qui pourrait (à défaut) prendre en considération des motifs d’ordre humanitaire. Pour les personnes qui avaient des motifs légitimes de ne pas déclarer un membre de la famille, le seul recours possible est une demande d’exemption de l’alinéa 117(9)d) du Règlement pour des motifs d’ordre humanitaire (article 25 de la LIPR). Toutefois, ce processus est coûteux, long et incohérent – ce qui le rend très souvent hors de la portée des victimes les plus vulnérables du Règlement. Cette règle avait pour but de détecter les cas de fraude en dissuadant les immigrants éventuels au Canada de cacher des membres de leur famille interdits de territoire. Des membres du CCR ont mené de vastes recherches sur cette disposition, arrivant à la conclusion qu’elle cause principalement la séparation de familles qui n’étaient pas visées par cette disposition. En réponse à une récente demande d’accès à l’information, le ministère a révélé que de 2010 à 2014 approximativement, 1 200 parrainages dans la catégorie du regroupement familial ont été refusés au motif de cet alinéa. Plus de 50 % de ces cas concernaient le parrainage d’enfants (cas « FC3 »), par opposition aux parrainages d’époux (« FC1 »). Des membres du CCR ont également procédé à un examen de décisions publiées par la Cour fédérale, lequel a permis de constater que dans approximativement 90 % des cas, il n’y avait ni intention frauduleuse ni geste frauduleux attribuable au fait que le membre de la famille non déclaré était interdit de territoire. Le CCR estime que l’alinéa 117(9)d) du Règlement viole l’engagement pris par le Canada en vertu du droit international des droits de la personne et recommande son élimination, ce qui constituerait une façon simple et efficace de corriger les problèmes qu’il a causés1. b. Réunification des familles pour les enfants En vertu du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, les enfants considérés comme des « personnes protégées » au Canada ne peuvent inclure leurs parents et leurs frères et sœurs, qu’ils se trouvent à l’étranger ou au Canada, dans leurs demandes de résidence permanente. Ils ne peuvent pas non plus les parrainer dans la catégorie du regroupement familial après leur arrivée. 1 Pour de plus amples renseignements, veuillez consulter les documents suivants : CCR, « Excluded Family Members: Brief on R. 117(9)(d) », mai 2016, ccrweb.ca/en/excluded-family-members-brief [EN ANGLAIS SEULEMENT], ou une infographie : ccrweb.ca/en/117-9-d-infographic [EN ANGLAIS SEULEMENT]. En 2008, le CCR a publié « Séparés à jamais : les membres de la famille exclus », un document d’information présentant une série de profils, http://ccrweb.ca/sites/ccrweb.ca/files/famexcluprofilsfr.pdf. 2
Réunification des familles : présentation, novembre 2016 Le CCR recommande que le Règlement soit modifié de sorte qu’un « membre de la famille » d’une personne protégée comprenne les parents et les frères et sœurs d’une personne protégée qui est mineure2. c. Enfant biologique et tests d’ADN La définition d’« enfant à charge » dans le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés limite la notion d’« enfant à charge » à celle d’enfant « biologique » ou d’enfant « adopté ». Cette définition peut entraîner un plus grand recours aux tests d’ADN, ce qui est importun et éventuellement nuisible à l’intérêt supérieur de l’enfant. Avec une telle pratique, des enfants non biologiques qui n’ont aucune autre famille peuvent être laissés pour compte. Le CCR a par conséquent appelé le gouvernement à élaborer des directives à l’intention des agents de l’immigration et des visas pour qu’ils acceptent les déclarations incontestées de parents et de tierces personnes qu’elles font sous serment comme preuves de la relation, dans le cas d’absence de certificat de naissance, avant de demander des tests d’ADN 3. d. Définition du terme famille Le CCR est satisfait que le gouvernement ait publié par anticipation son intention de réduire la limite d’âge de 22 à 19 ans, reconnaissant que les enfants plus âgés continuent de dépendre du soutien de leur famille4. Le CCR appelle le gouvernement à élargir la définition de « famille » afin de refléter les réalités des diverses communautés culturelles 5. 2. Obstacles à la réunification des familles pour les parrainages autres que ceux de la catégorie du regroupement familial Bien que le Comité axe son étude sur les parrainages de la catégorie du regroupement familial, le CCR lui demande instamment de prendre en considération les cas où la réunification des familles ne vise pas la catégorie du regroupement familial. Ces dossiers ne reçoivent pas l’attention qu’ils méritent, malgré le fait qu’ils supposent des délais de traitement plus longs que ceux de la catégorie du regroupement familial, et que dans de nombreux cas, des membres de la famille qui sont séparés se trouvent en situation de risque grave. a. Délais de traitement inacceptables pour la réunification familiale des réfugiés et d’aides familiaux résidants Le CCR salue l’engagement pris par le gouvernement à l’égard d’un traitement plus rapide des parrainages de la catégorie du regroupement familial (plus précisément celui des époux, des conjoints et des enfants), mais il est troublé que cet engagement ne vise pas : • La réunification des familles pour les réfugiés acceptés au Canada • La réunification des familles pour les aides familiaux résidants • La réunification des familles dans le cadre du délai prescrit d’un an pour les réfugiés réinstallés Dans chacun de ces cas, nous parlons aussi de la réunification avec les époux et les enfants, bien que ces volets de la réunification des familles ne visent pas les parrainages de la catégorie du regroupement familial. 2 CCR, Résolution 28, nov. 2003, Réunification familiale pour les enfants bénéficiant du statut de personne protégée. 3 Voir le rapport du CCR, Les tests d’ADN : une entrave à la réunification familiale rapide, http://ccrweb.ca/fr/tests-adn, et CCR, Résolution 26, nov. 2003, L’ADN et la preuve de la relation parent-enfant. 4 CCR, Résolution 2, juin 2013, Âge d’un enfant à charge. 5 CCR, Résolution 2, novembre 2011, Un engagement accru envers la réunification familiale. 3
Réunification des familles : présentation, novembre 2016 En ce qui concerne les réfugiés acceptés au Canada et les aides familiaux résidants, le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés prévoit un « traitement simultané » des demandes présentées pour leurs époux et enfants à l’étranger. Cela signifie que les réfugiés au Canada et les aides familiaux résidants peuvent inclure les demandes des membres de leurs familles qui se trouvent à l’étranger pour qu’elles soient traitées simultanément à leurs propres demandes de résidence permanente. Dans le cas des réfugiés réinstallés, les membres de la famille immédiate sont traités dans le cadre du « délai prescrit d’un an » si la demande est reçue au cours de l’année qui suit l’arrivée du réfugié au Canada6. Les réfugiés et les aides familiaux résidants qui visés par ces dispositions réglementaires n’ont pas à soumettre une demande de parrainage dans la catégorie du regroupement familial. Aucune exigence financière n’est établie relativement à l’admissibilité dans ces volets. Ces dispositions sont prévues en reconnaissance de leurs circonstances particulières, soit pour honorer les obligations du Canada en vertu du droit international des droits de la personne, soit pour reconnaître les précieuses contributions apportées aux familles et à l’économie du Canada. Toutefois, ces volets spéciaux et leurs objectifs d’amélioration sont entièrement minés par des délais de traitement inacceptables : il faut en moyenne 38 mois pour traiter les demandes des personnes à charge des réfugiés (« DR2 ») 7, et 51 mois pour traiter les demandes des personnes à charge des aides familiaux résidants (« LC2 ») 8. Dans le cas des demandes visées par le délai prescrit d’un an, le gouvernement est incapable de fournir les délais de traitement; des membres du CCR ont indiqué que les délais de traitement pour ces demandes sont souvent très longs. En ce qui concerne les réfugiés qui laissent leurs familles derrière eux dans des situations dangereuses ou précaires, ces délais exposent ces familles, y compris de nombreux enfants, à des dangers. En ce qui concerne les aides familiaux résidants, il est honteux que nous leur demandions de laisser leurs propres enfants derrière eux pendant qu’ils prennent soin des enfants canadiens. Ces délais nuisent à leur intégration et ont des incidences négatives à long terme sur les familles. Les niveaux d’immigration jouent un rôle en contribuant aux longs délais de traitement pour ces groupes. Lorsque les cibles ne correspondent pas au nombre de cas à traiter, l’arriéré augmente. Une fois que l’on atteint la cible annuelle pour une catégorie en particulier, les bureaux des visas cessent de traiter les autres demandes. Cas à traiter Catégorie d’immigration Cible 2016 Cible 2017 en juin 2016 Personnes protégées au Canada 14 148 Personnes à charge à l’étranger (DR2) 12 201 Total des personnes protégées au Canada et des personnes à charge à l’étranger 11 000 15 000 26 349 6 Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, art. 141 (Membre de la famille qui n’accompagne pas le demandeur). 7 Il s’agit du délai de traitement à la fin de 2015. Comme on l’explique plus bas, les renseignements plus récents ne sont pas disponibles. IRCC a cessé de publier les délais de traitement des bureaux des visas et, de façon générale, ne publie que les délais de traitement combinés pour les personnes protégées au Canada et les personnes à charge vivant à l’étranger. 8 Le délai de traitement de 51 mois est le délai affiché pour les aides familiaux résidants sur le site Web d’IRCC en date du 10 novembre 2016, http://www.cic.gc.ca/francais/information/delais/index.asp. Il s’agit du délai pour les aides familiaux résidants et leurs personnes à charge. 4
Réunification des familles : présentation, novembre 2016 Le tableau ci-dessus indique que les cibles d’immigration combinées pour 2016 et 2017 en ce qui concerne les réfugiés arrivés au Canada et leurs enfants à charge à l’étranger sont insuffisantes pour éliminer l’arriéré accumulé en date du mois de juin 2016. De plus, le nombre de demandes présentées en 2016 a augmenté par rapport à 2015. Cinq mille demandeurs ont été acceptés à titre de réfugiés entre les mois de janvier et de juin 2016 : leurs demandes de résidence permanente, et celles des membres de leurs familles seront ajoutées au nombre de cas à traiter. De façon similaire, l’arriéré de demandes d’aides familiaux résidants est réduit de façon graduelle seulement, puisque les cibles pour 2016 sont maintenant sur le point de correspondre au nombre de cas à traiter dans le système au milieu de 2016. Cas à traiter en Catégorie d’immigration Cible 2016 Cible 2017 juin 2016 Aides familiaux résidants 22 000 18 000 31 168 Le CCR demande instamment au gouvernement de s’engager à réunir les familles dans le cadre d’Entrée express, soit traiter les demandes d’immigration pour les membres de la famille immédiate – en particulier les enfants – dans une période de six mois, comme on l’avait promis pour les demandes d’immigration soi-disant « économiques » du programme Entrée express. La réunification des enfants avec leurs parents devrait à tout le moins être une priorité aussi importante que le traitement des immigrants économiques. b. Manque de transparence relativement aux statistiques disponibles sur les délais de traitement Le CCR se préoccupe particulièrement de l’élimination de l’information sur les délais de traitement des demandes DR2 (enfants à charge de réfugiés). Il y a plusieurs années, IRCC (alors CIC) a éliminé les renseignements concernant les délais de traitement des demandes DR2 de son site Web. Cela signifie que les personnes concernées qui consultent le site Web d’IRCC n’ont aucune indication quant au délai qui pourrait être requis pour traiter leur demande. Jusqu’à tout récemment, les données pouvaient à tout le moins être obtenues en consultant le site Web du gouvernement, le « Portail du gouvernement ouvert » 9. IRCC affichait des ensembles de données, qu’il était possible de décomposer par bureau des visas et par catégorie d’immigration, afin d’établir les délais de traitement par bureau des visas. Par le passé, on observait des variations régionales très importantes dans les délais de traitement des DR2, comme dans les autres catégories. Plus particulièrement, les délais de traitement en Afrique ont toujours été beaucoup plus longs que pour les autres régions. Il est par conséquent crucial que le public puisse analyser les délais par région. Toutefois, en 2016, IRCC a supprimé les données sur les écarts régionaux pour n’afficher que des aperçus globaux. L’explication fournie est qu’il s’agit d’une conséquence du déplacement des dossiers à l’échelle du réseau mondial d’IRCC. Cependant, IRCC continue d’afficher sur son site Web les délais de traitement en continu par pays de résidence et type de demande, ce qui signifie que ces renseignements sont disponibles. La décision de supprimer les données par région (bureau des visas ou pays d’origine) du site Web « Portail du gouvernement ouvert » fait en sorte qu’il est maintenant extrêmement difficile (dans le cas des catégories d’immigration pour lesquelles les délais de traitement sont affichés sur le site Web d’IRCC) ou impossible (dans le cas des DR2) de comparer les délais de traitement par région. 9 http://ouvert.canada.ca/data/fr/dataset?_organization_limit%253D0%2526organization%253Dcic%2526q. 5
Réunification des familles : présentation, novembre 2016 Pour ce qui est des personnes à charge des réfugiés, l’élimination de la ventilation des données par bureau des visas fait qu’il est impossible de connaître même les délais de traitement globaux. IRCC a combiné les délais de traitement concernant les réfugiés arrivés au Canada à ceux des membres de leurs familles (DR2). Le délai de traitement indiqué représente par conséquent une moyenne des deux catégories; il est donc inexact pour ce qui est des demandeurs au Canada et des personnes à charge à l’étranger. Le CCR demande instamment à IRCC de publier les données concernant les délais de traitement des DR2 ventilées par région. Pour ce qui est des demandes visées par le délai prescrit d’un an, les délais de traitement ne sont pas disponibles, ni publiquement ni sur demande. c. Obstacles à la réunification des familles pour les demandes comportant des motifs d’ordre humanitaire présentées au Canada Jusqu’en 2004, les demandes des membres des familles des personnes acceptées au Canada pour des motifs d’ordre humanitaire étaient traitées simultanément à celle du demandeur principal au Canada. Ainsi, une fois les examens médicaux, le contrôle judiciaire et le contrôle sécuritaire effectués, les membres de la famille à l’étranger pouvaient être admis immédiatement. Cela signifiait également que l’âge des enfants était « fixé » au moment de la soumission de la demande de résidence permanente par la personne se trouvant au Canada. En août 2004, la législation a été modifiée pour supprimer le traitement simultané des dossiers. Cette mesure a entraîné des retards importants dans la réunification familiale des personnes acceptées pour des motifs d’ordre humanitaire, et causé des problèmes pour les enfants qui « vieillissaient » durant le long processus de traitement. Cela constitue par ailleurs une pratique non efficiente, les membres de la famille à l’étranger devant souvent refaire les vérifications relatives à l’interdiction de territoire. Les personnes touchées se trouvent dans des situations où il peut y avoir des considérations d’ordre humanitaire impérieuses. Le CCR recommande un amendement au Règlement afin de rétablir la possibilité du traitement simultané des membres de la famille des personnes acceptées pour des motifs humanitaires 10. d. Séparation de la famille imposée par le Programme des travailleurs étrangers temporaires et le Programme des travailleurs agricoles saisonniers Le Canada exige que les travailleurs peu spécialisés/à faible revenu de ses programmes de migration de travailleurs temporaires (y compris les aides familiaux résidants) soient séparés de leurs familles pendant des périodes de temps prolongées. Bien que les travailleurs spécialisés/à revenu élevé soient autorisés à faire venir leurs familles, les travailleurs peu spécialisés/à faible revenu ne le sont pas. Cette mesure est discriminatoire et cause des problèmes importants de détresse et de santé mentale, y compris l’anxiété et la dépression. Le CCR croit que les travailleurs peu spécialisés devraient pouvoir immigrer de façon permanente au Canada par l’intermédiaire de la catégorie de l’immigration économique. Toutefois, tant que les programmes de migration de travailleurs temporaires seront en vigueur, tous les travailleurs devraient avoir le droit de faire venir leurs époux ou partenaires et enfants au Canada, et des permis de travail devraient leur être délivrés 11. 10 CCR, Résolution 12, mai 2009, Le traitement simultané de membres de la famille des personnes acceptées pour des motifs humanitaires. 11 CCR, Résolution 4, nov. 2011, Aides-familiaux, le statut de résidant et la réunification familiale, Résolution 4, mai 2008, Travailleurs temporaires, Résolution 4, nov. 2007, Droit à la résidence permanente pour les travailleurs migrants. 6
Réunification des familles : présentation, novembre 2016 3. Faire en sorte que la réunification des familles soit accessible et équitable Le CCR se préoccupe du fait que les niveaux d’immigration restreints, la définition étroite des personnes pouvant être parrainées et les exigences de revenu minimum rendent la réunification impossible pour de nombreuses familles. Cela est particulièrement vrai pour les personnes qui viennent au Canada à titre de réfugiés, et qui ne peuvent remplir les critères établis pour le parrainage d’un membre de la famille, mais qui sont tout de même profondément préoccupées par la situation d’un membre de leur famille, parce qu’il est déplacé ou exposé à un risque dans son pays d’origine. L’inaccessibilité du programme de la catégorie du regroupement familial a un impact considérable sur le Programme de parrainage privé des réfugiés, de nombreuses personnes se tournant vers des répondants du secteur privé comme solution de rechange pour faire venir des membres de leurs familles qui sont aussi des réfugiés. a. Niveaux d’immigration globaux Le CCR demande instamment au gouvernement canadien de rééquilibrer les niveaux d’immigration afin que les familles représentent au moins 40 % du total 12. Pourcentage de demandeurs de la catégorie du regroupement familial par rapport au total des demandes d'immigration : moyennes historiques 0% 20% 40% 60% 80% 100% 1991-1995 94,659 141,636 1996-2000 59,025 147,716 2001-2005 63,975 175,845 Family class 2006-2010 65,555 188,144 Other categories 2011-2015 67,094 192,475 2016 levels 80,000 220,000 2017 levels 84,000 216,000 Le tableau qui suit démontre que l’arriéré de cas dépasse les cibles d’immigration pour la catégorie du regroupement familial, ce qui signifie que les personnes doivent inévitablement attendre pendant des années pour que leur demande soit traitée. Catégorie d’immigration Cible 2016 Cible 2017 Cas à traiter en juin 2016 Famille Époux, conjoints et enfants 60 000 64 000 79 553 Parents et grands-parents 20 000 20 000 57 382 TOTAL 80 000 84 000 136 935 12 CCR, Résolution 2, novembre 2011, Un engagement accru envers la réunification familiale. 7
Réunification des familles : présentation, novembre 2016 b. Revenu minimal requis Le CCR demande depuis longtemps au gouvernement canadien de faire de la réunification des familles l’objectif premier de la reconnaissance du principe de l’unité familiale, et dans cet objectif, il demande instamment au gouvernement de supprimer l’exigence d’un revenu minimal pour toutes les catégories du regroupement familial13. c. Parents et grands-parents Les familles autres que les familles nucléaires, y compris les parents et les grands-parents, sont importantes pour le bien-être social et économique des familles, y compris celles des réfugiés et des immigrants. Le CCR s’oppose aux récentes modifications apportées au Règlement 14, qui rendent le parrainage des parents et grands-parents encore plus difficile 15. • Les exigences financières accrues font en sorte que seuls les plus riches peuvent parrainer leurs parents. La réunification des familles ne devrait pas être un privilège réservé aux mieux nantis. • Ces modifications touchent de façon disproportionnée les communautés racialisées et les femmes, qui sont désavantagées sur le plan économique au Canada, et moins susceptibles de respecter les seuils de revenu plus élevés. • L’accent mis sur les contributions économiques fait en sorte que l’on ignore les autres contributions faites par les nouveaux arrivants à nos sociétés. La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés reconnaît dans ses objectifs que les nouveaux arrivants peuvent contribuer de plusieurs façons. Le premier objectif, qui porte sur l’immigration est le suivant : « permettre au Canada de retirer de l’immigration le maximum d’avantages sociaux, culturels et économiques ». Le deuxième est « d’enrichir et de renforcer le tissu social du Canada dans le respect de son caractère fédéral, bilingue et multiculturel ». Maintenir les familles ensemble représente un avantage social important pour notre pays. • Les parents et les grands-parents soutiennent souvent les membres de la famille qui gagnent un salaire, par exemple en s’occupant des enfants. Pour les immigrants à faible revenu, la venue d’un parent signifie qu’il pourra travailler à temps plein parce que ce parent sera disponible pour prendre soin de ses jeunes enfants. • Les immigrants qui apportent leur contribution au Canada risquent de repartir s’ils ne peuvent faire venir leurs parents. • Les réfugiés qui arrivent au Canada à titre de mineurs non accompagnés n’ont pas droit à la réunification familiale avec leurs parents et leurs frères et sœurs. Les modifications retardent de façon importante les parrainages, et peuvent même empêcher les réfugiés de parrainer leurs parents et leurs frères et sœurs une fois qu’ils sont adultes. • Les parrainages sur une période de 20 ans augmentent le risque de difficultés pour les familles, en cas de maladie ou d’accident. Les immigrants paient les mêmes taxes que les Canadiens; il est injuste de les priver pendant des décennies des services payés par ces taxes. • Les parrainages sur une plus longue période augmentent le risque d’abus, parce que la relation de dépendance financière fait qu’il est plus difficile pour les parents et les grands-parents de quitter la maison si la relation devient violente. 13 CCR, Résolution 2, novembre 2013, Éliminer l’exigence des revenus pour la réunification familiale. 14 Règlement modifiant le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés DORS/2013-246, 13 décembre 2013. 15 CCR, Sponsorship of parents and grandparents: comments on proposed regulatory changes [EN ANGLAIS SEULEMENT], juin 2013. Conseil canadien pour les réfugiés ccrweb.ca Canadian Council for Refugees Novembre 2016
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