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Projet Grands Lacs Fournir une réhabilitation holistique et à base communautaire aux victimes de torture au Burundi, en République Démocratique du Congo et au Rwanda Ce projet est financé par l’Union européenne
Avant-propos Pendant quatre ans, le Projet Grands Lacs de l’IRCT créées par les victimes, des groupes de counseling a soutenu une collaboration unique et enthousiaste social organisés uniquement sur l’initiative des entre six centres de réhabilitation au Burundi, en bénéficiaires du projet, des professionnels médicaux République Démocratique du Congo et au Rwanda, qui qui peuvent désormais fournir une documentation a directement bénéficié aux victimes de torture. médico-légale de qualité et des victimes assistées dans les procédures judiciaires et la lutte contre l’impunité. Dans une région marquée par les conflits, la violence et la cruauté, ces centres ont uni leurs efforts pour L’IRCT et ses partenaires espèrent que ce rapport permettre aux victimes de torture de devenir des fournira un aperçu du travail des centres et des acteurs proactifs, engagés et responsables dans le résultats accomplis par le Projet Grands Lacs, qui développement social, économique et politique de leurs constituent à nos yeux un précieux tremplin pour communautés. Le concept de ce travail repose sur la garantir que le plus grand nombre possible de victimes mission de l’IRCT, qui vise à promouvoir une mise en de torture bénéficient de services de réhabilitation œuvre effective du droit à la réhabilitation pour les holistiques et puissent jouer à nouveau un rôle actif victimes de torture, tel qu’il a été défini par le Comité dans leur communauté. des Nations Unies contre la torture dans l’Observation Générale 3 sur l’article 14 de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants. Les membres de l’IRCT estiment qu’une réhabilitation adéquate doit être holistique et décidée par les détenteurs des droits, afin de garantir aux victimes de torture une réelle 2015 © International Rehabilitation Council for possibilité de faire usage de ce droit1. Ce rapport met Torture Victims (IRCT, Conseil international de en lumière les histoires de victimes de torture qui réhabilitation pour les victimes de torture) reconstruisent courageusement leurs vies avec l’aide et les soins fournis par les centres à travers quatre Tous droits réservés approches principales : Imprimé en Uganda 1. un système d’orientation médicale ISBN (impression) : 978-87-93113-13-8 2. la restauration de la dignité par les moyens de subsistance ISBN (en ligne) : 978-87-93113-14-5 Le Conseil international de réhabilitation pour les 3. l’assistance aux victimes dans la lutte contre Victor Madrigal victimes de torture (IRCT) est une organisation l’impunité Secrétaire général de l’IRCT internationale indépendante de défense des 4. un changement de vie grâce au counseling social droits de l’homme axée sur la santé, qui promeut à base communautaire. et soutient le droit à la réhabilitation pour les victimes de torture. Il agit comme une plateforme L’un des principaux éléments du Projet Grands Lacs mondiale de connaissances sur la réhabilitation consistait à offrir des moyens aux victimes de torture, de l’état de santé et dirige le processus mondial mais aussi aux victimes secondaires, souvent oubliées, de consensus sur le droit à des normes de mais affectées par les expériences traumatisantes de réhabilitation. La vision de l’IRCT est celle d’un leurs proches. Le projet s’est en outre concentré sur monde sans torture. les zones rurales, allant à la rencontre des victimes dans le besoin qui n’auraient autrement jamais Vesterbrogade 149, building 4, 3rd floor, 1620 bénéficié de services de réhabilitation. Copenhagen V, Danemark Le projet a réuni des communautés, en soignant des Tél. : +45 44 40 18 30 blessures et en créant des plateformes de dialogue et de réconciliation dans des pays ayant connu des Fax : +45 44 40 18 54 guerres civiles, un génocide et des crises de réfugiés. E-mail : irct@irct.org Le travail entamé se poursuit à travers de nouveaux partenariats entre les prestataires de services, un Pour plus d’informations, voir www.irct.org accès facilité aux services, de nouvelles entreprises
Sommaire 3 Avant-propos 6 Introduction 13 Créer des pistes et des partenariats : le système d’orientation médicale 16 Restaurer la dignité par les moyens de subsistance 20 Guérir par la justice : aider les victimes à lutter contre l’impunité 24 Changer des vies grâce au counseling social à base communautaire 28 Les partenaires du projet 29 Notes et références
Introduction Un grand nombre d’hommes, de femmes et d’enfants biens et aux services de base, a un effet dévastateur vivant dans la région des Grands Lacs en Afrique sur la vie des populations. République centrale ont souffert de conflits. Ces dernières Démocratique décennies, le génocide au Rwanda, la guerre civile au Burundi et une série de guerres brutales et prolongées Fournir des services du Congo dans l’est de la République Démocratique du Congo de réhabilitation aux victimes AMIES DES (RDC) ont profondément marqué la région. de torture VICTIMES DES Entre 1993 et 2005, la guerre civile au Burundi, VIOLATIONS alimentée par des générations de tensions ethniques, aurait fait entre 250 000 et 300 000 victimes.2 Près de On ne connaît pas le nombre exact de personnes torturées dans la région des Grands Lacs. Cependant, DE DROITS ARAMA 700 000 personnes, soit 10 pour cent de la population, il est clair qu’au Rwanda, au Burundi et en RDC, HUMAINS (Kigali and ont été forcées de quitter leurs terres. de très nombreuses personnes ont subi diverses (Uvira) Ngoma) formes de torture et de mauvais traitements, comme FÉDÉRATION Au Rwanda, on estime qu’environ un million de personnes ont été tuées durant les 100 jours de des viols et des disparitions forcées. Beaucoup restent traumatisées depuis 20 ans, voire plus, et DES FEMMES génocide.3 Ce dernier a également entraîné l’une des n’ont jamais reçu de traitement. Les conséquences POUR LE UYISENGA plus importantes crises de réfugiés de ce monde, environ 1,2 million de personnes ayant fui vers les sont considérables, touchant les victimes elles- mêmes, leurs familles et leurs communautés. De DÉVELOPPEMENT NI IMANZI provinces de Kivu, en RDC.4 nombreuses victimes de torture souffrent de stress INTÉGRAL (Kigali et Rwamagana) L’ombre du génocide de 1994 plane encore post-traumatique (anxiété, flashbacks, insomnie, cauchemars et dépression, entre autres) et ressentent AU CONGO Rwanda aujourd’hui et a des effets sur les communautés à souvent de la honte (causée par l’humiliation endurée). (FEDICONGO) travers tout le pays. Lorsque la torture est utilisée de manière systématique (Uvira) et répandue, des sociétés entières peuvent être traumatisées. C’est sur fond de ce climat d’instabilité politique que SOLIDARITÉ le Projet Grands Lacs de l’IRCT a été lancé en avril 2011. Un projet unique dans sa conception, qui a mis en Burundi ET ACTIONS relation six centres de réhabilitation dans la région pour POUR LA PAIX / leur permettre de partager leurs expériences au-delà GRANDS LACS des frontières. REGROUPE- (SAP-GL) Le projet a aidé les six centres à fournir aux victimes MENT DES (Bujumbura) de torture et de violence sexuelle, de génocide et d’autres formes de violence politique des services MAMANS DE holistiques et à base communautaires dont elles KAMITUGA avaient grandement besoin. Son objectif était simple (Kamituga) : permettre aux victimes de torture et à leurs familles au Burundi, en RDC et au Rwanda de réclamer leurs droits et de devenir des citoyens proactifs participant au développement social, économique et politique de leurs communautés. En RDC, les crises de réfugiés de 1996 à 1997 et de De bons services de réhabilitation pour les victimes de torture incluent une sensibilisation des communautés, des services médicaux et psychologiques accessibles Centres de réhabilitation du Projet Grands Lacs 1998 à 2003 ont fait éclater une guerre qui, en 2008, et leur intégration dans des initiatives orientées sur avait fait 5,4 millions de morts, victimes principalement les communautés. Ces services sont une composante de maladies et de la famine. Cela en a fait le conflit le essentielle des efforts de développement socio- plus mortel au monde ces derniers temps.5 économique dans les pays sortant d’un conflit. À travers toute la région, les conflits intra- et inter- Les États qui ont connu un conflit manquent souvent étatiques sont étroitement liés. L’association d’une des fonds, de l’expertise ou de la volonté politique violence directe et d’une violence structurelle durable, nécessaires pour garantir des services de réhabilitation comme la pauvreté extrême et le manque d’accès aux accessibles, disponibles et appropriés. Les États 6 IRCT Projet Grands Lacs IRCT Projet Grands Lacs 7
reconnaissent également rarement la réhabilitation et le Burundi 184e sur 186 pays.11 Ce manque criant les phases du processus de réhabilitation et leur ont victimes de torture. Au total, plus de 750 personnes des victimes de torture comme une question de de ressources se traduit par des infrastructures de apporté un soutien moral. Dans le cadre d’affaires ont participé à ces événements, qui ont rassemblé priorité, de justice ou de développement. De plus, services de réhabilitation très limitées. Mais surtout, les juridiques, ceci peut prendre la forme d’une mise à des acteurs clés et leur ont offert le temps et l’espace les victimes préfèrent parfois se tourner vers des personnes vivant dans la pauvreté extrême ont du mal disposition de transports et d’hébergement pour les nécessaires pour créer des réseaux plus solides et services non étatiques, car elles ne font pas confiance à satisfaire leurs besoins de base comme l’alimentation, familles ou les membres de la communauté, afin de améliorer la coordination et la coopération. à l’État, qui est parfois à l’origine de leurs tortures. l’assainissement ou un logement adéquat et ne peuvent leur permettre d’assister à des audiences devant Par conséquent, ce sont souvent les établissements pas se permettre de demander des soins. Dans les les tribunaux. À travers des orientations médicales, De manière générale, le projet visait à améliorer et les centres de réhabilitation privés ou non trois pays, de nombreuses victimes de torture n’ont pas les centres ont fourni des informations et une aide la qualité et la quantité des services existants et gouvernementaux qui jouent un rôle clé dans l’aide d’assurance maladie et ne peuvent pas se permettre de psychologique aux familles et aux membres de la à renforcer les liens entre les services. Dans les apportée aux victimes de torture. payer le transport jusqu’aux prestataires de soins, les communauté lors des visites à l’hôpital. centres, trois services de réhabilitation principaux factures d’hôpitaux ni les médicaments prescrits. étaient généralement disponibles : conseils médicaux, En fournissant une aide psychosociale et une redres- Le projet a également pris en charge la coordination psychologiques et juridiques. Les soins médicaux sement aux victimes de torture et de traumatismes, La pauvreté a également un impact négatif sur le des activités de sensibilisation au niveau se limitaient le plus souvent aux premiers soins et les centres de réhabilitation peuvent les aider à se processus de réhabilitation. La torture entraîne un communautaire, notamment dans les zones rurales. à l’administration de médicaments de base. L’aide réintégrer, reconstruire des sociétés brisées et donner stress important, un manque de confiance en soi Ces événements ont rassemblé les victimes, la police psychologique comprenait différents types de des moyens aux communautés. Sans ce type d’assis- et une dévalorisation de soi-même. Ces sentiments locale, les autorités locales, l’armée et le personnel psychothérapie, comme l’ergothérapie, la thérapie par tance, les victimes de torture sont souvent incapables de vulnérabilité, d’échec et d’« incompétence » sont des centres aux côtés des membres de la communauté le mouvement, la thérapie par la danse, la thérapie de de participer aux processus décisionnels locaux qui exacerbés par la lutte quotidienne pour acheter des et ont offert aux victimes la possibilité de s’exprimer groupe et la thérapie relationnelle. forment le cœur du développement démocratique. biens de base et par le statut social inférieur associé à la et de réclamer les soins qu’elles requièrent et qu’elles pauvreté extrême. Pour que les services de réhabilitation méritent. Ces événements ont également permis aux L’aide juridique consistait généralement à fournir des Dans la région des Grands Lacs, la disponibilité des ser- soient vraiment efficaces, il faut lutter contre la pauvreté. centres d’expliquer ce que sont la torture et la informations et des conseils, à se mettre en relation vices est extrêmement limitée. Au Rwanda, par exemple, violence, et comment les empêcher, et de faire avec les instances judiciaires au nom de la victime et le ministère de la Santé a établi en 2010 que près de 30 Au-delà des victimes, les centres de réhabilitation jouent connaître leurs services et leurs activités auprès dans certains cas, à agir comme médiateur directement pour cent des Rwandais souffraient de traumatismes également un rôle important dans les soins offerts des membres de la communauté. entre deux clients. De nombreux centres ont également graves ; or, on estime que seulement deux pour cent ont aux victimes secondaires de torture et de violences des programmes sur le VIH-Sida, l’éducation, l’abri accès à des services de santé mentale.6 Le projet visait sexuelles, qui sont souvent oubliées par les prestataires et mènent des recherches sur les différents types à combler les lacunes de ce type. Pendant quatre ans, il de soins traditionnels. Grâce au développement de d’approches utilisées et sur leur efficacité. Le projet s’est attaché à faciliter l’accès à des services de réhabil- relations étroites avec les communautés, les centres de a aidé les centres de réhabilitation à renforcer et à itation plus efficaces pour les victimes et leurs familles réhabilitation peuvent constater eux-mêmes l’impact de développer ces services en leur permettant de les vivant dans les zones rurales du Burundi, de la RDC et du la violence sur les proches des victimes. Les enfants proposer directement aux victimes ou d’orienter ces Rwanda. Il s’est également concentré sur les zones rura- qui ont vu leur mère se faire violer, les femmes qui dernières vers d’autres prestataires de services dans les qui ont un accès limité aux services de réhabilitation. ont vu leur mari se faire battre, les pères dont les quatre domaines principaux : filles ont été torturées en prison ; tous ont enduré des Selon l’Atlas de la santé mentale 2011 de l’Organisation niveaux extrêmes de stress et de souffrance mentale, et • soins médicaux grâce à l’orientation vers des Mondiale de la Santé, le Rwanda ne compte qu’un nécessitent eux aussi des soins. établissements médicaux spécialisés psychiatre pour 2 000 000 habitants, soit six psychiatres pour l’ensemble du pays.7 Au Burundi, ces Le projet a tout particulièrement inclus les victimes • aide juridique en faisant appel à des cabinets chiffres sont encore plus faibles, avec seulement un secondaires dans le processus de réhabilitation et d’avocats pour saisir la justice psychiatre pour 10 000 000 habitants8. En RDC, on leur a fourni une aide psychologique, psychosociale et compte 6,6 psychiatres pour 10 000 000 habitants.9 parfois socio-économique. Les victimes secondaires • aide psychosociale à travers un counseling social à ont été impliquées dans tous les services de base communautaire Même lorsque les victimes ont accès aux services réhabilitation à base communautaires, comme les existants, celles qui nécessitent une réhabilitation ne • développement des moyens de subsistance et activités génératrices de revenus et le counseling sont parfois pas diagnostiquées correctement, car les activités génératrices de revenus social. Outre l’aide psychologique, juridique ou socio- personnes censées de fournir des services holistiques, économique, les centres de réhabilitation ont inclus Une approche holistique et à base communautaire a été comme les hôpitaux, la police, les avocats, les psycho- les membres des familles des victimes dans toutes mise en œuvre dans les trois pays. logues, les autorités locales, les travailleurs communau- taires et autres ne sont pas formés à ce genre de travail ou ne travaillent pas en collaboration. L’expertise requise Les survivants du génocide chantent à l’ouverture du nouveau pour diagnostiquer les maladies psychosomatiques, par exemple, est très rare. De plus, dans les centres de soin centre de réhabilitation dans le district de Ngoma, Rwanda, en Décembre 2014. L’importance de la réhabilitation holistique et 1. La réhabilitation holistique existants dans les zones rurales du Burundi, du Rwanda le rôle de la société civile a été discuté par des représentants et de la RDC, on trouve souvent des infirmières plutôt des communautés locales, des groupes de survivants, le maire Les victimes de torture réagissent différemment face que des docteurs ou des psychologues. de Ngoma, le chef de le Délégation de l’Union Européenne au à leurs expériences, de même que les conséquences Rwanda, l’IRCT et des représentants de la police. de la torture sont susceptibles d’être influencées La principale cause du manque de disponibilité et par de multiples facteurs internes et externes. Alors d’accès aux services est la pauvreté. L’Indice de que la torture est utilisée pour fragmenter, briser et développement humain 2014 des Nations Unies classe détruire les personnes, l’objectif de la réhabilitation le Rwanda à la 151e place, le Burundi à la 180e place Entre 2011 et 2015, 11 événements de sensibilisation est de les aider à recoller les morceaux. La torture et la RDC à la 186e place sur un total de 187 pays.10 En ont été organisés dans les trois pays pour souligner a un impact si dévastateur que les survivants ce qui concerne le Produit Intérieur Brut par habitant l’importance de la lutte contre l’impunité des auteurs peuvent avoir besoin d’aide à différents niveaux pour de 2011 à 2014, le Rwanda se classe 171e, la RDC 182e de tortures et le droit à la réhabilitation pour les reconstruire leur vie. 8 IRCT Projet Grands Lacs IRCT Projet Grands Lacs 9
Une réhabilitation holistique signifie que les centres adoptent une approche qui comprend des services 2. La réhabilitation à base communaux traditionnels ont été rompus pendant des décennies de violences intercommunales, une prend pas au sérieux le viol et les violences sexuelles créent une situation telle que de nombreuses femmes multidisciplinaires coordonnées et intégrés. Ces communautaire approche de réhabilitation à base communautaire avec sont trop effrayées pour oser dénoncer ces crimes. De services s’étendent au-delà du traitement médical une solide composante de « guérison collective » est nombreuses victimes de viol ne sollicitent pas réparation et psychologique et incluent une aide sociale, Le projet se fonde sur l’idée que les services ne essentielle pour garantir un sentiment d’acceptation et et elles ne sont pas soutenues par l’État ni par leur professionnelle et juridique, fournie aux victimes commencent et ne se finissent pas dans un centre d’appartenance à ses membres les plus vulnérables. communauté ou leur famille. Dans la plupart des cas, primaires et secondaires de torture, d’une manière de réhabilitation. L’espace physique du centre de Cela leur permet ensuite de reprendre suffisamment les femmes ne dénoncent pas le viol dont elles ont été répondant autant que possible à leurs besoins, à réhabilitation est important pour les traitements confiance pour pouvoir participer à la vie communale et victimes car elles craignent les représailles. Qui plus est, leurs attentes et à leurs aspirations. Les centres de médicaux, les conseils psychologiques et juridiques, devenir un membre estimé de leur société. au Burundi les femmes font l’objet de différentes formes réhabilitation devraient être informés sur les principes en tant qu’espace sûr et pour divers autres services de discrimination fondées sur le genre — notamment la de base des soins holistiques et formés aux méthodes proposés à titre individuel. Sur le plan pratique, une approche de réhabilitation réprobation sociale envers les victimes de viol. » 14 et techniques leur permettant d’adopter des attitudes et à base communautaire peut réduire le coût des des pratiques essentielles cette approche. Cependant, la communauté dans laquelle on vit est services, faciliter l’accès aux services pour les victimes En raison de cette stigmatisation, les femmes dans les un espace tout aussi important pour le processus vivant dans des communautés éloignées et peut être communautés et les familles qui ne bénéficient d’aucune L’IRCT et ses centres de réhabilitation partenaires de réhabilitation des victimes. Par exemple, les considérée comme un espace intime permettant aux aide ni d’aucune compréhension tentent de dissimuler reconnaissent la complexité et l’interconnectivité victimes vivant dans la pauvreté extrême ou exclues victimes de parler de leurs expériences. À travers le ce qui leur est arrivé. C’est pour cette raison que la des séquelles sociales, économiques, médicales et socialement au sein de la communauté sont parfois projet, les approches existantes d’intervention auprès réhabilitation doit être structurée, à travers des approches psychologiques de la torture, où un aspect peut avoir plus vulnérables, ce qui peut avoir un profond impact des communautés ont été renforcées et des structures individuelles, maritales ou de groupe, pour aider les un impact négatif ou positif sur l’autre. Sans une négatif sur le processus de réhabilitation. de réhabilitation à base communautaire ont été créées. victimes à raconter leur histoire, chose essentielle approche holistique, le processus de réhabilitation a Les victimes n’ont pas seulement eu accès à des soins pour pouvoir apporter des réponses appropriées. Pour peu de chances de réussir. L’approche de réhabilitation à base communautaire médicaux et psychologiques de qualité, elles ont aussi atteindre ces victimes, les prestataires de services doivent facilitée par le Projet Grands Lacs est venue compléter participé à des groupes de conseils communautaires et prendre en compte cet aspect spécifique. Les services de réhabilitation holistiques sont centrés les services de réhabilitation basés sur les centres ont entamé des activités génératrices de revenus. Il en sur les victimes. L’individualité de chaque victime est avec des services à base communautaires. Les a résulté un processus de réhabilitation qui a offert des prise comme point de départ du processus. En traitant services holistiques qui s’adaptent à ce contexte moyens d’agir non seulement aux victimes, mais aussi les effets physiques et psychologiques de la torture et et promeuvent une réintégration sociale jouent un à leurs familles et à leurs communautés. « De nombreuses femmes en offrant une aide sociale, économique et juridique, rôle essentiel dans la guérison des traumatismes. les centres ont donné aux victimes des moyens de Dans le Projet Grands Lacs, cette approche à base ont peur d’être stigmatisées réparation et leur ont permis de se réintégrer dans communautaire a été affirmée. si elles reçoivent des soins la société. Il était essentiel de fournir un traitement 3. Les réponses de spécialisés dispensés par professionnel et spécialisé aux victimes de torture réhabilitation sexospécifiques pour améliorer le système de santé publique et aider à des professionnels travaillant reconstruire les sociétés brisées de la région. « Je dois m’asseoir et réfléchir Environ 70 pour cent des bénéficiaires du Projet Grands dans le domaine de la Lacs étaient des femmes. C’est souvent le cas dans à ce que j’ai vécu pour les sociétés post-conflits, car beaucoup d’hommes ont violence sexuelle basée sur le préparer mon avenir. Notre été tués, laissant des femmes survivantes qui ont vécu genre. À Panzi, nous traitons des expériences extrêmement traumatisantes. Il est histoire a changé et nous également fréquent que les femmes victimes de torture différents types de patientes avons recommencé à vivre. Je soient doublement désavantagées. Elles subissent présentant différents de lourdes séquelles physiques et mentales, mais se suis solide, je dois travailler heurtent également à des stigmates supplémentaires et problèmes gynécologiques. pour atteindre mes objectifs et à la honte en raison des blessures subies, notamment en Nous ne nous contentons cas de torture sexuelle. avoir un bel avenir. » pas de traiter les victimes de Le viol est souvent utilisé comme une arme de guerre. violences sexuelles basées T. A., Rwanda Durant le génocide au Rwanda, environ 250 000 femmes ont été victimes de viol.12 En RDC, un rapport détaillé sur le genre, nous proposons sur les tortures sexuelles rédigé par l’organisation également des services Freedom from Torture en 2014 a indiqué que le viol et Pour les victimes de torture, cela signifie réaffirmer d’autres formes de violence sexuelle étaient courants gynécologiques généraux. leur identité en tant que membre d’une famille et d’une dans le pays. Le rapport a établi qu’« en plus des actes Ainsi, les femmes qui ont communauté. Cela signifie soigner et être soigné par commis par les soldats de l’armée congolaise et par les proches, participer à la vie sociale, aux événements les membres des groupes armés dans le contexte du peur de la stigmatisation culturels et aux réunions de la communauté. Cela signifie conflit, les viols commis par des civils sont devenus un peuvent venir pour un également avoir les outils et les compétences nécessaires problème à part entière, aggravé par l’impunité dont pour satisfaire à ses besoins et à ceux de sa famille. Pour jouissent généralement les auteurs de ces crimes. »13 Au traitement ‘ordinaire’ : il n’y a les victimes qui veulent retrouver leur identité, il est vital Burundi, de nombreux groupes de défense des droits de aucune honte à venir ici. » de regagner la capacité à faire les choses mêmes que les l’homme ont signalé des niveaux alarmants de violences auteurs des tortures ont essayé de leur enlever. sexuelles commises pendant et après la guerre civile. Dr. Denis MUKWEGE, directeur de Dans un rapport détaillé sur les viols au Burundi, Amnesty Groupes de counseling social facilitent la discussion des Dans une région où l’identité d’une personne est International a indiqué : « La pauvreté et la prédominance l’hôpital de Panzi, RDC questions anciennes et nouvelles dans la communauté étroitement liée au statut social, mais où les liens d’une société patriarcale ainsi que d’une culture qui ne 10 IRCT Projet Grands Lacs IRCT Projet Grands Lacs 11
L’une des nombreuses conséquences des guerres les autorités locales a permis aux associations de multiples dans la région a été la destruction partielle des systèmes de santé. Suite au génocide rwandais, par exemple, la plupart des femmes victimes de femmes survivantes de signaler plus facilement à la police les cas de violence sexuelle basée sur le genre. Dans les cas de violence sexuelle et basée Créer des pistes et des viol, estimées à 250 000, n’ont reçu que des soins d’urgence et ont eu un accès limité, voire inexistant, à des gynécologues ou à toute forme de soins sur le genre, la police locale demande souvent aux associations de survivantes d’aller à la rencontre des familles et de soutenir les victimes en les partenariats : le système psychologiques.15 incluant dans des groupes de counseling social à base communautaire. d’orientation médicale De plus, chaque formation organisée dans le cadre du Projet Grands Lacs avait un aspect sexospécifique. Par exemple, les formations sur les activités qualité de services requise. Même si des services de génératrices de revenus incluaient la gestion de « En raison de mon état de santé, « J’ai été contacté pour orienter plus grande qualité sont disponibles, les capacités sont microprojets et le leadership. En apprenant aux j’ai été informée par les autorités des cas compliqués de violence souvent insuffisantes pour faire face au grand nombre femmes à subvenir aux besoins de leur famille et locales que je pouvais participer à physique, dont certains cas de de victimes. à devenir indépendantes, ces formations ont offert un événement de sensibilisation sur violence sexuelle. En juillet des moyens aux femmes, qui ont découvert qu’elles Cela est notamment le cas pour les victimes souffrant la torture et la violence sexuelle 2013, nous avons signé un accord pouvaient avoir un impact et jouer un rôle de de traumatismes psychologiques ou de troubles basée sur le genre organisé par ARAMA de coopération. Jusqu’à présent, leadership au niveau de la communauté et au-delà. psychosomatiques. Un diagnostic médical basé dans ma communauté. Lorsque j’ai SAP-GL a orienté 45 cas, dont 32 cas de torture et 13 cas de sur les symptômes n’est pas toujours adapté à ces participé, j’ai réellement senti violence sexuelle. Tous les cas pathologies graves et complexes. De ce fait, les qu’il était temps de m’exprimer et ont nécessité une chirurgie victimes de torture peuvent passer entre les mailles de demander de l’aide. Le personnel d’ARAMA m’a écoutée et m’a aidée à « Suite à leur implication réparatrice. Notre coopération s’est du système médical. avérée très fructueuse. Grâce à ce comprendre ma situation, à rompre le dans le projet, de nombreuses Le Projet Grands Lacs a cherché à remédier à cette silence qui entourait mon désespoir projet, les patients ont bénéficié et à soulager ma douleur. C’est dans femmes ont été élues de soins holistiques. De plus, triste réalité en mettant en place un système efficace notre collaboration avec SAP-GL d’orientation médicale coordonné par les centres. le cadre de ce processus que j’ai été présidentes de groupes Grâce au système d’orientation, près de 3 000 invitée au centre d’ARAMA à Kibungo, nous a fait prendre conscience de j’ai été conseillée et orientée vers de counseling social et l’importance de l’aide psychologique victimes de torture ont reçu un traitement médical et psychosociale. Grâce à SAP- au Rwanda, au Burundi et en RDC. Le projet a ciblé l’hôpital référent du district de de groupes d’activités les communautés isolées et rurales en développant Kibungo pour y être soignée. C’est GL, deux employés de l’hôpital grâce à ARAMA que j’ai retrouvé goût génératrices de revenus, ont participé à une formation et en renforçant les relations avec les travailleurs sur le counseling social à base communautaires, les associations de victimes, les à la vie. » reconnus et enregistrés ONG locales et internationales, ainsi que les autorités communautaire et nous avons créé A. M., Rwanda auprès des autorités locales. une unité de suivi psychosocial à locales. Le système d’orientation a permis de détecter l’hôpital. » davantage de victimes ayant besoin de ces services. Certaines des bénéficiaires sont désormais membres Dr. Ernest KILUNGA, chirurgien en En développant des services à base communautaires chef et gynécologue, hôpital de et en garantissant des visites de suivi régulières des de comités de médiation Rushubi, Burundi victimes ayant préalablement bénéficié du système locaux, élus par tous les d’orientation médicale, les centres ont gagné en crédibilité. Cela a abouti à une plus grande coopération L’un des éléments clés du projet pour répondre à ce membres de la communauté, avec les communautés locales et à un meilleur accès problème a été de rompre le silence et d’expliquer et d’autres sont membres aux informations sur les nouveaux cas. aux femmes quels étaient leurs droits. À travers des activités de sensibilisation, les centres ont fourni du Conseil national des Le projet a également expliqué aux centres comment des informations indiquant vers qui se tourner pour femmes. Ces femmes, L’accès à des soins médicaux appropriés est un défi s’engager auprès des médias de masse. Ceci s’est recevoir de l’aide et réclamer ces droits. Au Burundi, permanent pour de nombreuses victimes de torture avéré très utile pour faciliter la sensibilisation des au Rwanda et en RDC, des informations sur les lois auparavant victimes, ont dans la région des Grands Lacs. Dans de nombreux communautés et, en fin de compte, améliorer l’accès nationales relatives à la violence sexuelle basée sur le désormais atteint un statut endroits de ces trois pays, et notamment dans les des victimes aux soins médicaux. À titre d’exemple, genre ont été mises à disposition et la liaison avec les régions rurales, les soins dont les victimes ont besoin le centre REMAK a lancé un spot radio en juin 2014 programmes existants a été facilitée. et une position qui leur ne sont tout simplement pas disponibles. à Mwenga, dans le Sud-Kivu (RDC), pour informer permettent de représenter la population sur les services fournis. Suite au spot Dans le district de Ngoma au Rwanda, par exemple, Comme mentionné précédemment, les victimes qui radio de REMAK, le nombre de victimes de torture une étroite coopération avec le One-Stop Centre les autres et de plaider en souhaitent accéder à des services de réhabilitation sexuelle venues des villages reculés pour demander pour la violence sexuelle basée sur le genre a permis leur nom. » se heurtent également à d’autres obstacles comme la des soins médicaux au centre a augmenté de manière la mise en place d’un numéro gratuit disponible 24 h pauvreté, un diagnostic incorrect et la réticence des exponentielle. Alors que REMAK n’avait reçu que sur 24 et 7 jours sur 7 afin que les victimes puissent victimes à demander des soins. moins de 10 cas issus de la zone reculée de Bisembe Jules GAHAMANYI, Directeur avoir un accès immédiat à des soins de santé - Mulombozi avant juin 2014, le centre a accueilli 74 mentale et physique et à une protection juridique. exécutif d’ARAMA, Rwanda De plus, les structures médicales existantes ne victimes de cette zone sur les deux seuls mois de juillet Au Burundi, une plus grande coopération avec fournissent pas toujours les services nécessaires ou la et août 2014. 12 IRCT Projet Grands Lacs IRCT Projet Grands Lacs 13
retournent dans leur communauté et garantissent Le fonctionnement du système TOTAL RWANDA un suivi au niveau de la communauté à travers des d’orientation 89 1,403 services de réhabilitation à base communautaires. Une fois qu’une victime a été détectée, ses besoins sont Outre la coordination et l’apport de services aux victimes évalués, en général par un médecin et un psychologue. primaires et secondaires, les centres de réhabilitation 520 Le projet a élaboré des formulaires standards utilisés offrent la protection et la confidentialité que les victimes par les centres pour procéder à cette évaluation, dans TOTAL DRC de torture recherchent et dont elles ont besoin, une chose que les infrastructures médicales contrôlées par un double objectif : évaluer la victime et renforcer la qualité des dossiers des clients dans les centres. Ce 1,044 l’État ne peuvent pas fournir. Par leur neutralité et leur formulaire simple a permis à l’ensemble des centres partenaires de recueillir des données comparables, qui ont pu être utilisées pour déterminer les tendances dans 539 794 indépendance vis-à-vis des établissements étatiques, les centres de réhabilitation peuvent gagner la confiance des victimes, de leur famille et des communautés. Un la région (les types d’auteurs de violences, les types de élément essentiel dans le processus de réhabilitation. 415 soins dispensés et leur efficacité). L’aide apportée par le Projet Grands Lacs a démontré En fonction de l’évaluation des besoins, le personnel 90 Une fois la victime arrivée au terme du processus d’orientation initial, débute alors l’étape post- qu’un système d’orientation médicale fonctionnel est du centre décidait si la victime avait besoin d’être fondamental pour permettre aux victimes de torture orientée. Le cas échéant, le personnel déterminait alors TOTAL orientation. Les victimes sont généralement renvoyées de retrouver la force physique et psychologique dont BURUNDI vers le centre de réhabilitation après avoir été 534 quel établissement était en mesure de lui fournir les elles ont besoin pour reconstruire leur vie et participer soins les plus appropriés. Cette approche a été garantie soignées. Elles reçoivent toute autre aide médicale activement à la société. à travers son intégration dans un réseau d’hôpitaux 141 dont elles ont besoin ainsi qu’un soutien juridique référents. Entre 2011 et 2015, les centres ont identifié et psychologique. Avant de retourner dans leur 18 hôpitaux référents, avec qui ils ont signé des accords de coopération prévoyant que les victimes 393 communauté, plusieurs visites de suivi sont planifiées. Bien souvent, les centres de réhabilitation continuent 0 d’assurer ce suivi sous forme de visites à domicile cide. soient traitées immédiatement et se voient proposer pendant des mois et parfois des années. Les victimes « J’avais huit ans lors du géno davantage d’options au niveau des services proposés. fami lle a été tuée, sont également encouragées à s’impliquer dans Lorsque toute ma occu pé de moi. J’ai été des groupes de counseling social et des activités un voisin s’est En permettant aux centres d’entrer en contact avec e et mes cica tric es génératrices de revenus dans la communauté. blessé à la jamb ma les hôpitaux, le projet a forgé de nouvelles relations n’ont pas guéri. Pendant toute entre des établissements qui travaillaient auparavant TOTAL HOMMES TOTAL FEMMES TOTAL ENFANTS e n’a cess é de se scolarité, la plai 769 1,328 884 chacun de leur côté. Les hôpitaux n’étaient souvent pas fect er. Je pouv ais rouvrir et de s’in conscients du rôle qu’ils pouvaient jouer dans les soins et bien que je suiv e à peine marcher holistiques apportés aux victimes de torture. « Uyisenga Ni Imanzi nous a niqu e auto mobi le, je des cours de méca trou ver de trav ail. n’arrivais pas à Les hôpitaux référents fournissent un large éventail de Victimes orientées vers des institutions sortis de l’ombre, mes frères Je n’arrivais pas à parler aux autres services de réhabilitation physique, incluant des examens et moi, et nous a redonné nger au sein de ma de santé spécialisées et j’étais un étra cliniques standard et des consultations, mais aussi des n’av ais pas d’am is et communauté. Je prescriptions de médicaments et autres traitements, espoir en l’avenir. Ils m’ont je me sentais très seul . J’ai comm encé de la chirurgie et des hospitalisations. À travers une de la communauté proches de la victime. Les victimes aidé à chasser ma tristesse à souffrir de dépr essi on. série de formations sur la documentation médico-légale de la torture (basée sur le Protocole d’Istanbul), une secondaires ont bénéficié d’une aide psychologique, et ma haine. Parfois, je n’ai Il y a quelques années, j’ai déco uvert psychosociale et parfois socio-économique. En 2014, par et documentation de grande qualité a été produite sur les plus de force et tout va mal. ARAMA, qui a décidé de m’aider cas de torture, aidant les centres dans leurs plaidoyers exemple, le centre Uyisenga Ni Imanzi au Rwanda a reçu à l’hô pita l mili tair e de m’a envoyé et leurs activités juridiques. Ces formations destinées un patient présentant un grave trouble psychiatrique. Il Mais Uyisenga est comme un Kanombe, où ma jamb e a été opér ée. Ils au personnel des hôpitaux et des centres ont permis s’agissait d’un orphelin qui était devenu chef de ménage parent pour moi et lorsque à mes côté s et m’on t donné sont restés après le génocide et qui s’occupait de ses deux jeunes es à chaque participant de développer ses capacités à des médicaments et des chaussur documenter la torture. Elles ont également amélioré sœurs. Pendant le génocide, il a été gravement blessé ces sentiments négatifs thérapeutiqu es. Je ne trou ve pas à la tête et sa santé s’est considérablement dégradée la coopération entre les centres et les établissements m’envahissent, ils sont toujours les mots pour décrire ce que j’ai plus de dix ans après, lorsqu’il a commencé à souffrir référents pour produire une documentation de qualité. ressenti en marchant sans douleur. de problèmes psychiatriques chroniques. Son état a eu là pour me redonner espoir. » Ils m’ont également apporté une aide Les centres détectent les victimes et les orientent un profond impact psychologique et économique sur ses e et psyc hoso cial e. psychologiqu vers des établissements médicaux de confiance pour sœurs, qui étaient toujours dépendantes de lui. Le centre E. R., Rwamagana, Rwanda qu’elles bénéficient de soins médicaux spécialisés l’a orienté vers un hôpital neuropsychiatrique, où il a été Avant de connaître ARAMA, je peur appropriés, mais assurent également des visites de soigné pendant une longue période. En parallèle, le centre n’arrivais pas à dormir. J’avais nt suivi dans les hôpitaux référents. Pendant ces visites, a pris en charge ses sœurs en les impliquant dans des des mauvais souvenirs qui revenaie eil. les victimes reçoivent une aide psychologique directe et activités génératrices de revenus et dans des groupes Cela signifie que le système d’orientation médicale me hanter la nuit pendant mon somm parfois même de la nourriture. de counseling social, en veillant à les tenir informées de est intégré dans une approche de réhabilitation plus Depuis la semaine dernière, j’ai plus l’état de santé de leur frère. Le centre leur a apporté un générale de nature holistique, où les centres jouent un retrouvé le sommeil et je ne fais je ne Le système d’orientation médicale s’est également soutien économique pour leur permettre d’effectuer le rôle essentiel dans la coordination, la mise en œuvre de cauchemars ! Grâce à ARAMA, cé concentré sur les victimes secondaires, comme les long voyage pour lui rendre visite, souvent accompagnées et le suivi des différents services de réhabilitation. Le me sens plus seul et j’ai recommen Je me enfants, les époux(ses), les parents et les membres par une infirmière ou un psychologue du centre. personnel des centres soutient les victimes lorsqu’elles à parler à d’autres personnes. » sens tellement mieux maintenant. 14 IRCT Great Lakes Project B.M., Rwanda
Restaurer la dignité par les car beaucoup vivent dans des zones rurales et voulaient améliorer leurs compétences. De plus, la majorité des victimes avaient perdu leurs biens et Les centres ont également aidé les groupes qui voulaient vendre leurs produits en leur permettant d’accéder aux marchés appropriés. Les centres les ont moyens de subsistance voulaient relancer leurs activités. Par exemple, dans le district de Ngoma, dans l’est du Rwanda, la plupart des victimes ont choisi les chèvres pour leurs activités, mis en contact avec des acheteurs dans les grandes villes, où ils pouvaient obtenir un meilleur prix pour leurs produits. car elles sont moins chères à élever et leurs agneaux peuvent être donnés à d’autres familles dans le besoin. La capacité à pourvoir aux besoins de ses enfants et à participer à la vie socio-économique de la communauté « Je travaillais dans les champs Pour déterminer le type d’activité génératrice de revenus adapté à chacun, un processus de sélection augmente considérablement les chances d’intégration lorsqu’ils m’ont violée. J’ai été sociale et de récupération de la confiance en soi. Par a été mis en place. Une analyse de la communauté a conséquent, la réhabilitation socio-économique des battue et laissée pour morte. également été effectuée pour déterminer s’il s’agissait victimes de torture est un élément essentiel dans la Il était trop difficile pour moi d’une communauté rurale ou urbaine et dans quelle réhabilitation holistique. Du fait de la pauvreté extrême province elle était située, car tous ces facteurs de retourner aux champs et je influencent les activités disponibles. qui prédomine dans ces trois pays, ce sont les groupes les plus vulnérables, comme les victimes de torture, ne pouvais plus assumer mes Une fois l’activité choisie, les personnes ont été qui ont le plus de risques de tomber dans un cycle responsabilités vis-à-vis de ma rassemblées en groupes et ont été formées à la gestion de pauvreté et d’exclusion sociale, qui viendra à son tour aggraver les traumatismes et mettre en péril le famille. Je n’étais plus personne d’un groupe. On leur a notamment expliqué comment élaborer un plan d’activités, comment élire un comité processus de réhabilitation individuel. aux yeux de la communauté, tout avec un président, un secrétaire et un trésorier et le monde disait du mal de moi, comment attribuer un rôle à chaque membre du me parlait méchamment et me groupe. Elles ont également bénéficié d’une formation sur la manière de gérer les procédures bancaires, car considérait responsable de ce qui beaucoup n’avaient jamais travaillé avec une institution Au Rwanda, la pastèque a la même valeur que 3 kg de maïs était arrivé. AVVDH s’est occupé financière. Le centre a ensuite effectué une analyse et est devenu une culture populaire pour les victimes de cultiver de base sur les revenus du groupe afin d’évaluer de moi et m’a amenée à l’hôpital à leurs progrès et un contrat a été rédigé pour décrire et de vendre. Uvira. Lorsque je suis retournée au le processus qui devait être suivi et ce que le groupe village, ils m’ont aidée à retravailler souhaitait atteindre. L’une des réussites du projet a été l’introduction de et à reprendre ma vie en main. Des critères permettant d’évaluer le groupe ont la culture de pastèque à Rwamagana, au Rwanda. La Les personnes qui me montraient également été définis. Ceux-ci incluaient le contrôle pastèque est une culture commerciale idéale à exporter, de la participation aux réunions et au processus car trois mois lui suffisent pour mûrir et une pastèque du doigt sont maintenant les décisionnel. Le processus décisionnel était important, vaut autant que trois kilos de maïs. Une victime en premières à venir me voir et à me car le groupe, par exemple en cas de bonne récolte, particulier qui a commencé à cultiver la pastèque en devait décider s’il devait partager la récolte ou la 2014 a récolté l’équivalent de deux millions de francs demander conseil. » vendre. Ils ont également parfois été amenés à décider rwandais au cours de sa deuxième saison. Cette s’ils devaient diversifier leur production, par exemple personne travaille désormais à plein temps, a acheté sa S. W., 70 ans, Sud- Kivu, RDC vendre leur maïs pour la consommation humaine ou propre moto et son activité continue de se développer. Restaurer le statut socio-économique d’une personne le transformer en fourrage, ce qui nécessite un plus peut permettre de briser le cycle de stigmatisation et grand effort mais génère des plus gros profits. Des démonstrations de jardins potagers impliquant d’exclusion dont les victimes sont captives. Cela lui d’autres membres de la communauté ont montré permet de retrouver un capital social en lui offrant la Des formations spécifiques à chaque activité ont qu’apprendre à cultiver des aliments peut redonner possibilité d’aider les autres, ce qui conduit à renforcer également été organisées. Ceux qui travaillent dans espoir, guérir les traumatismes à travers un travail NOMBRE DE GROUPES D’ACTIVITÉS ses liens avec la communauté. l’agriculture ont été formés par des agronomes productif et aider les victimes à se sentir soutenues et GÉNÉRATRICES DE REVENUS et ceux qui ont choisi l’élevage d’animaux ont encouragées par leurs communautés. Au Rwanda, un Après avoir reçu une aide médicale, psychologique et parfois juridique, les victimes bénéficient d’un counseling social à base communautaire associé à 95 appris à construire des écuries et à administrer les médicaments appropriés aux animaux. jardin de démonstration et un ranch ont été construits à Rwamagana, dans lesquels les victimes de torture ont pu suivre des formations sur les techniques et des activités génératrices de revenus. Le projet a Dans un premier temps, les centres ont soutenu la théorie de l’agriculture dispensées par le Conseil FEMMES HOMMES les groupes d’activités génératrices de revenus en organisé de nombreuses formations sur les activités rwandais de l’agriculture. génératrices de revenus et les approches de gestion de groupe pour permettre aux participants de 2,344 638 apportant 100 % des fonds ou du matériel nécessaires, par exemple des terres et des graines. Cette aide À Uvira, en RDC, le projet a soutenu la construction correctement sélectionner, gérer et maintenir leurs financière directe a été systématiquement réduite d’une usine qui produit du savon à partir d’ingrédients projets, et leur apprendre à travailler ensemble pour apprendre aux groupes à devenir autonomes. Le locaux. L’usine emploie 12 anciennes victimes, qui sont NOMBRE TOTAL sous forme de groupes formels reconnus par les processus pour chaque groupe peut prendre jusqu’à toutes membres d’un groupe de counseling social créé DE PARTICIPANTS autorités locales. deux ans. Au Rwanda, de nombreux groupes sont en 2013. Le projet a soutenu le groupe non seulement 2,982 devenus des coopératives reconnues par les autorités en organisant une formation sur la production de Les principaux domaines de travail choisis par les et se sont développés en accueillant d’autres membres savon artisanal, mais aussi en aidant les bénéficiaires à participants étaient l’agriculture et l’élevage d’animaux, de la communauté. vendre leurs produits auprès des acheteurs locaux. 16 IRCT Projet Grands Lacs IRCT Projet Grands Lacs 17
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