QUICHANTE LÀ-BAS? - Cinéma Utopia

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QUICHANTE LÀ-BAS? - Cinéma Utopia
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5 AVENUE DU DOCTEUR PEZET 34090 MONTPELLIER (TRAM 1 ARRÊT ST ELOI) / TÉLÉPHONE : 04 67 52 32 00 / WWW.CINEMAS-UTOPIA.ORG

  QUICHANTE                                                                                  LÀ-BAS ?

  (KO TO TAMO PEVA)                           de la terre, les habitants des Balkans         invasions, des annexions, des alliances,
                                              ont depuis des lustres acquis en matière       bref : la figuration scolaire et graphique
  Slobodan ŠIJAN                              d’humour et de désespoir un savoir-faire       d’un foutu bazar balkanique, fruit d’un
  Yougoslavie 1980 1h25 VOSTF                 qui confine au professionnalisme. Les          gloubi-boulga géopolitique pas piqué
  avec Pavle Vuisić, Dragan Nikolić,          moins jeunes d’entre nous se rappellent        des vers. Construit en 1918 sur les
  Danilo Stojković, Aleksandar Berček…        sans doute qu’il a fugacement exis-            ruines fumantes de la Grande guerre,
  Scénario de Dušan Kovačević                 té au xxe siècle, pas bien loin de chez        définitivement démantibulé en 2003, ce
                                              nous, un pays appelé la Yougoslavie.           patchwork de populations slaves dispa-
  VERSION RESTAURÉE                           Les plus attentifs en cours d’histoire-        rates aura duré en tout et pour tout 85
                                              géo se souviennent sans doute de ces           ans et connu successivement un régime
  Pour paraphraser Musset, les plus dé-       cartes de l’Europe hardiment bariolées,        monarchique, l’occupation allemande,
  sespérées sont les comédies les plus        avec des hachures dans un sens, dans           une république socialiste emmenée par
  belles.                                     l’autre, des lignes pointillées frontalières   Tito, avant que les tensions nationalistes
  De par leur histoire tumultueuse, fou-      plutôt mouvantes, des flèches pointant         ne fassent tout voler en éclats – la guerre
  traque, sanglante, à l’instar des peuples   dans toutes les directions, racontant          du Kosovo marquant l’ultime et macabre
  juif, palestinien, kurde et autres damnés   des mouvements de populations, des             épisode de cette courte histoire.

N°130 du 26 mai au 29 juin 2021, Entrée : 6,50€ / le midi : 4€ / Abonnement : 47€ les dix places
QUICHANTE LÀ-BAS? - Cinéma Utopia
DEUX
                                                                      Filippo MENEGHETTI France 2019 1h38
                                                                      avec Barbara Sukowa, Martine Chevallier, Léa Drucker,
                                                                      Jérôme Varanfrain… Scénario de Malysone Bovorasmy,
                                                                      Filippo Meneghetti et Florence Vignon
                                                                      César 2021 du meilleur premier film.

                                                                      Ce sont des rêves d’Italie qui bercent les réveils de Madeleine,
                                                                      en même temps que les doux baisers de sa compagne ca-

QUI CHANTE LÀ-BAS ?
                                                                      chée, Nina. Aux yeux de tous, cette dernière n’est qu’une voi-
                                                                      sine qui vit sur le même palier. Toujours fourrées l’une chez
                                                                      l’autre, elles se nourrissent d’un amour lumineux qui ne de-
                                                                      mande qu’à s’affirmer au grand jour. Alors, elles manigancent,
                                                                      planifient comment vendre leurs appartements respectifs
Si je vous raconte tout ça, c’est que les flèches sur les cartes,     pour partir s’installer ensemble dans un quartier de Rome,
les tâches de couleurs et les pointillés, ça a des répercus-          s’offrir la liberté à laquelle elles ont de tout temps aspiré, loin
sions très concrètes sur les individus qui s’efforcent de vivre,      des contraintes sociales, du regard des autres. À 70 ans, tous
parfois de survivre, aussi simplement et paisiblement que             les coups sont permis pour jouir pleinement de la vie ! Il faut
possible, et qui se retrouvent plus souvent qu’à leur tour            les voir s’enlacer avec une tendresse fougueuse, pleines de
charriés comme des galets dans le torrent de l’Histoire. Ça           désir, faisant fi des rides, assumant leurs peaux qui ont bien
forge le caractère, une philosophie de l’existence, et donc un        vécu. Puis virevolter, joyeuses, au gré de leurs chansons pré-
humour mâtiné d’un sens du dérisoire peu commun.                      férées, prêtes à s’échapper hors du cadre, à tout jamais com-
                                                                      plices et complémentaires. Leur passion ne fait pas son âge,
Comédie yougoslave aussi drôle et inventive que minima-               vivace comme au premier jour. Une connivence qui n’est cer-
liste et mélancolique, Qui chante là-bas ? métaphorise le             tainement pas née de la dernière pluie.
convoyage de populations bigarrées, roulant dans un au-
tobus brinquebalant à travers le siècle sur des chemins à
peine tracés, vers une destination improbable. À son bord, la
liste des passagers tient de l’inventaire à la Prévert : un jeune
couple fraîchement et vraisemblablement trop vite marié, un
chanteur de charme gominé, un bourgeois réactionnaire mal
embouché, un phtisique à l’agonie, un chasseur malchan-
ceux, un vétéran décati et décoré (mais, grands dieux, de
quelle guerre ?), et deux tziganes musiciens – qui ponctuent
le récit au chant, à l’accordéon et à la guimbarde comme le
chœur antique de la farce tragique qu’ils accompagnent. La
petite troupe hétéroclite est emmenée par un contrôleur ma-
tois et âpre au gain, et son fils un peu simplet (mais capable
de conduire les yeux bandés !). L’action se passe en 1941,
l’invasion allemande en cours est invisible, la Yougoslavie –
les voyageurs ne le savent évidemment pas – ne sera bien-
tôt plus une monarchie. Ce qui les unit, c’est Belgrade, qu’ils
veulent tous pour diverses raisons rejoindre. Le véhicule,
qu’on devine d’un rouge éclatant sous son épaisse carapace
de poussière, cahote lentement mais sûrement vers son des-
tin, promenant au long d’une campagne aride l’imposant pa-
nache de fumée noire que dégage la cheminée de son gazo-
gène. Son odyssée incertaine lui fera emprunter des chemins
de traverse et marquer des arrêts intempestifs qui seront au-
tant d’occasions pour ses passagers de révéler leur vrai vi-
sage, en définitive rarement aimable – et d’assembler pièce           Si l’univers de Nina est spartiate, celui de Madeleine est foi-
à pièce le puzzle d’une société déboussolée.                          sonnant, chargé de souvenirs et de bibelots en tous genres
                                                                      qui témoignent d’une existence classique et bien remplie : il
Qui chante là-bas ? est réalisé en 1980, alors que le régime          y eut jadis un mari, une vie de famille… Comment dire à ses
communiste est à un tournant. Tito vient de disparaître et les        propres enfants, élevés dans un milieu si normatif, que tout
nationalismes reprennent du poil de la bête. Quarante ans             cela n’était qu’un leurre, qu’on est pas celle qu’ils ont cru ?
plus tard, le film n’a rien perdu de son charme, ni la fable de       Comment leur dire qu’on s’apprête à remiser au placard la
son éclat. Au contraire, on découvre avec le recul avec quelle        panoplie de la mamie rangée qu’ils pensaient connaître par
acuité il préfigure la faillite communiste et l’éclatement iné-       cœur ? Le bon sens voudrait que ce soit dit simplement à
luctable d’une Yougoslavie fabriquée à la diable au tournant          ceux qui, désormais adultes, n’ont manqué de rien, sur-
du siècle pour servir les intérêts de ses voisins.                    tout pas d’affection. Alors pour son anniversaire, Madeleine,
Pour la petite histoire, sélectionnée à Cannes dans une sec-          bien préparée, coachée par Nina, prend son courage à bras
tion parallèle en 1980, cette petite merveille balkanique, aus-       le corps, et entame la phrase fatidique : « Je voulais vous
si grinçante que les essieux de l’autocar, faillit bien ne jamais     dire une chose importante pour moi… », qu’elle ne finira pas
sortir sur les écrans français. Il fallut alors tout l’enthousiasme   comme prévu…
et toute la ténacité de nos camarades du cinéma nîmois Le
Sémaphore pour le faire connaître, avec succès : il fut mon-          Filippo Meneghetti qualifie son premier long métrage de mé-
tré en exclusivité, excusez du peu, à Nîmes, à Avignon (chez          lodrame mis en scène comme un thriller de mœurs. Il y a ef-
Utopia bien sûr) et dans une unique salle parisienne, le Saint        fectivement un peu de tout cela dans Deux et bien plus en-
André des Arts. Ce qui ajoute encore au plaisir de vous le            core. C’est surtout un magnifique questionnement, tout en
faire redécouvrir aujourd’hui.                                        retenue, sur le poids du regard, le nôtre, celui des autres.
SLALOM
Charlène FAVIER                               place ? Ou pour d’autres raisons plus          contre toute attente, Lyz va s’accro-
France 2020 1h32                              personnelles, difficiles à confesser ? Il      cher. Décrocher une première victoire.
avec Noée Abita, Jérémie Renier,              ne fait de cadeau à personne et surtout        Ses camarades ne deviendront pas
Marie Denarnaud, Catherine                    pas à Lyz. Lopez par-ci, Lopez par-là, il      plus tendres pour autant. Elle passe-
Marchal, Muriel Combeau…                      se garde de l’appeler par son prénom,          ra des moqueries à la jalousie, du sta-
Scénario de Charlène Favier                   comme pour marquer la distance, l’exis-        tut de nulle à celui de chouchoute de
et Marie Talon                                tence d’un plafond de glace. Il n’hésite       l’entraîneur. Même Justine, sa meilleure
                                              pas à tenir haut et fort des propos humi-      copine, déraillera un peu. Description
Elles sont de tous les plans : la pou-        liants sur cette nouvelle arrivée si réser-    lucide et sans concession de l’ado-
dreuse, les montagnes majestueuses et         vée, lui attirant quelques railleries bien     lescence, prise en tenaille entre le dé-
puis Lyz (Noée Abita, formidable, renver-     senties de la part de ses camarades.           sir de conformisme intégrateur et une
sante), avec ses grands yeux candides         Ici se joue une lutte perdue d’avance          soif inextinguible de rébellion. Le prix
qui feraient chavirer toutes les certi-       entre classes sociales. Ces ados de 15         à payer pour monter sur le podium se-
tudes. Elle est à la croisée des chemins,     ans ne partent pas sur un pied d’égali-        ra de s’oublier, d’oublier le regard des
à cet âge où tout peut basculer, où l’on      té, n’abordent pas la vie avec les mêmes       autres. N’être plus que muscles ban-
slalome à vue, tiraillée entre les conseils   armes, les mêmes skis, sans que ce soit        dés, se limiter à la recherche d’une pos-
raisonnables des adultes et l’envie de        surligné. Rien n’est appuyé dans ce            ture parfaite. Plus rien ne semblera pou-
suivre ses rêves sans plus rien écouter.      film subtil qui laisse la part belle à l’in-   voir atteindre notre jeune héroïne, prête
S’il y a une chose dont Lyz ne doute pas,     telligence, à la complexité des person-        à défier les lois de la gravité, et celles de
c’est son envie de skier, de devenir une      nages. Nul n’est blanc comme neige,            la prédestination, tendue vers son but
championne. Toutefois on ne donne pas         nulle âme n’est complètement noire.            ultime, proche de se briser. Tout semble
cher de sa réussite quand on la voit dé-      Sans complaisance, jusqu’au bout, la           glisser sur Lyz devenue indifférente aux
bouler dans cette prestigieuse section        réalisatrice se gardera d’asséner sa véri-     mots gratuits, aux maux qui traversent
sport-étude de Bourg-Saint-Maurice,           té au spectateur, laissant chacun face à       ses chairs, prête à tout endurer, jusqu’au
plus vulnérable, moins aguerrie que ses       la sienne propre, tout comme l’est Lyz à       geste fatidique qui la fera basculer dans
congénères. À quinze ans, il est temps        cet instant précis.                            une autre réalité…
de comprendre que le partage des
chances n’est pas équitable. Leur pro-        On va suivre l’adolescente à la trace,         Les prises de vue filent le tournis tant
fesseur et entraîneur ne manque pas de        jusqu’à percevoir la plus intime de ses        elles sont belles. Sur nos tempes ré-
le souligner, sans ménagement. Fred           sensations. Elle aurait bien des raisons       sonne le tambour d’un cœur, le baiser
(Jérémie Renier profond, complexe)            de baisser les bras, à force d’entendre        glaçant du vent qui s’emballe ou ce-
n’est pas du style à mâcher ses mots.         qu’elle n’est pas à sa place, qu’elle ne       lui trop brûlant d’une promiscuité ma-
Pour le bien des jeunes qu’il entraîne ?      le sera jamais. À force de sentir qu’elle      laisante. Des sensations intenses pour
Parce qu’il sait que l’univers sportif qui    est pour sa mère la dernière roue du           donner à ressentir, nous entraîner loin de
les attend ne sera jamais tendre et qu’il     carrosse, celle qui empêche d’aimer en         nos zones de confort, pour mieux nous
leur faut s’endurcir pour s’y faire une       rond, qui coûte en sacrifices. Pourtant,       amener à réfléchir…
MÈRE ET FILLE
(MATER)                                       déjà pas su guérir son regretté ma-
                                              ri. Anka n’y va pas par quatre chemins
                                                                                             croise des amis d’enfance, et finale-
                                                                                             ment prend conscience que pour appor-
Écrit et réalisé par Jure PAVLOVIC            lorsqu’elle a quelque chose à dire. Pour       ter son aide, elle doit laisser le rapport à
Croatie 2019 1h37 VOSTF                       l’instant, elle vit encore chez elle grâce     son passé et à cette mère invivable re-
avec Daria Lorenci-Flatz, Neva Rošić,         au passage d’une aide à domicile dé-           prendre une place dans son existence.
Vera Zima, Anka Vučković…                     vouée – à qui elle mène pourtant la vie
                                              dure – et la visite de quelques amis. Mais     L’excellente idée de mise en scène du
Comme toutes celles et ceux partis loin       la charge va s’alourdir, il faut trouver des   film est de tout nous donner à voir sur
faire leurs vies, c’est avec un étrange       solutions. Or, comme Jasna l’avait an-         le visage de Jasna. Du début à la fin, la
sentiment que Jasna a laissé son mari         noncé à son mari et ses enfants, le mi-        caméra ne la quitte pas, nous laissant
et ses deux enfants en Allemagne pour         rage de le faire en une semaine s’éloigne      suffisamment à voir des scènes ou des
rendre visite à sa mère dans son pays         rapidement : sa mère refuse à peu près         actions en arrière-plan, tout en se foca-
d’origine, la Croatie. A l’arrivée, un mé-    n’importe quelle forme d’aide et envoie        lisant sur l’intériorité du personnage. Et
lange d’appréhension et de mélancolie :       bouler toute proposition quant à son           pour cause : c’est le rapport de Jasna
les souvenirs qui remontent et le doute       avenir. Mais surtout, ce que Jasna ne
d’avoir laissé là quelques itinéraires ina-   pensait pas voir surgir, c’est l’implica-      au monde qui est déterminant. Sa mère
chevés. Bien sûr, il y a d’abord le bon-      tion affective qui la concerne. Elle qui est   ne changera pas, seule la perception
heur de revoir ceux qu’on aime et puis,       partie mener une vie prospère à l’étran-       qu’en a Jasna pourra modifier leurs rap-
très vite, la peur de ne plus savoir com-     ger : comment venir aujourd’hui imposer        ports. Il faut souligner ici l’exceptionnelle
ment partager leurs vies, de s’être irré-     son aide alors qu’elle s’est éloignée de       performance de l’actrice Daria Lorenci-
médiablement éloigné de leur quotidien.       la vie de sa mère ? Sait-elle seulement        Flatz, dont les moindres expressions
                                              ce qui pourrait apaiser les vieux jours        nous donnent à ressentir les difficultés
Pour Jasna, la situation est particulière-    de cette matriarche acariâtre ? Jasna          à concilier compassion et colère envers
ment plus délicate : sa mère, Anka, est       se trouve vite contrainte de passer sur        cette vieille dame enfermée dans sa ri-
malade et n’a pas le caractère à rendre       place un peu plus de temps que prévu,          gidité affective. Sans apitoiement ni pa-
les choses faciles. Elle est plutôt du        juste assez pour faire voler en éclat la       thos, Mère et fille saisit avec finesse les
genre à refuser de changer ses habi-          distance affective qu’elle tentait jusqu’ici   chemins qui mènent une femme à faire
tudes pour prendre un peu soin d’elle et      de maintenir. Elle prend alors en charge       la paix avec la mère qu’elle est train de
à pester sur les docteurs qui n’avaient       les affaires courantes, reçoit la famille,     perdre.
UN PRINTEMPS À HONG KONG

Écrit et réalisé par Ray YEUNG                ment trentaine, un mariage qui fait jaser             ré d’un livre de témoignages de gays se-
Hong Kong 2020 1h32 VOSTF                     au vu du jeune âge du prétendant. Hoi                 niors, observe avec une infinie tendresse
avec Tai Bo, Ben Yuen,                        lui est divorcé et vit – comme c’est sou-             et délicatesse les paradoxes de ces deux
Patra Au Ga Man, Lo Chun Yip…                 vent le cas en Chine où les générations               personnages, qui doivent conjuguer
                                              coexistent sous le même toit – avec son               leurs désirs, leurs nouveaux émois avec
« La vieillesse, c’est le temps de l’hiver    fils, sa belle fille et sa petite fille, et il doit   l’attachement réel pour leur famille à qui
pour les ignorants, et le temps des mois-     subir la bigoterie excessive de son fils              il leur semble évidemment impossible
sons pour les sages. » (proverbe yiddish      qui lui reproche son manque d’entrain                 d’avouer quoi que soit et qu’ils ne vou-
et universel)                                 dans la pratique religieuse.                          draient pour rien au monde blesser. La
                                                                                                    construction de la relation entre les deux
L’an dernier, on découvrait avec bonheur      Il se trouve que Pak et Hoi ont un secret :           hommes, au fil de scènes très simples
Deux de Felipe Menighetti, un film sub-       régulièrement ils fréquentent un jardin               comme un repas préparé ensemble (la
til qui évoque l’histoire très touchante de   public et des toilettes bien particulières,           cuisine est en Chine le vecteur de lien
la relation interdite entre deux voisines     qui sont des lieux de drague bien connus              social par excellence), est analysée en
septuagénaires, incarnées magnifique-         de la communauté gay. Comme beau-                     toute intelligence. Parallèlement, dans
ment par Barbara Sukowa et Martine            coup d’homosexuels du « placard », ils                une culture où la solidarité avec les aînés
Chevallier, une histoire d’amour tenue        ont probablement des décennies durant                 et leur accompagnement est une valeur
secrète jusqu’à ce qu’un drame ne la          mené une double vie dans un pays où                   sacrée, on observe le projet mené avec
dévoile.                                      l’homosexualité est tolérée mais n’en est             courage et détermination par les compa-
Un printemps à Hong Kong pourrait             pas moins largement l’objet d’opprobre                gnons de sauna de Pak et Hoi, qui envi-
être son pendant masculin et chinois.         de la population. Et ne parlons évidem-               sagent de monter une maison de retraite
L’histoire de deux hommes de l’ancien         ment pas d’un quelconque droit au ma-                 pour les gays dépendants, un projet qui
protectorat britannique au crépuscule         riage !                                               a du mal à trouver un porte-parole, tout
de leur vie, une vie qui semble rangée et     Au-delà des relations fugaces au cœur                 le monde redoutant le qu’en dira-t-on.
réglée comme du papier à musique. Pak         de l’anonymat un peu glauque d’un sau-                L’histoire de cette relation intime devient
a mené une longue carrière de chauf-          na, la relation entre Hoi et Pak va deve-             ainsi peu à peu celle d’un combat pour
feur de taxi, sillonnant les rues de la mé-   nir de plus en plus intime et amoureuse,              les droits LGBT, dans un pays-continent
tropole 10 heures par jour. Il est père       chacun trouvant dans l’autre l’âme sœur               où le chemin vers l’acceptation et l’égali-
de famille et se débat avec la prépara-       qu’ils n’ont pas eue ou qu’ils ont perdue.            té est encore bien long pour cette mino-
tion du mariage de sa fille déjà large-       Le réalisateur Kay Yeung, qui s’est inspi-            rité comme pour bien d’autres.
FESTIVALS JAZZ DE L’ETE
                                                                     en partenariat avec l’école du JAM
                                                                     JEUDI 10 JUIN DES 19h
                                                                     19h : Concert des Hot Jam Stompers
                                                                     (New Orleans) + Présentation des festivals
                                                                     d’été Jazz en Pic St Loup, Jazz à Vauvert
                                                                     et Jazz à Junas.
                                                                     20h : Projection de Mes Films
                                                                     de voyages de Michel Marre
                                                                     Une proposition de Michel MARRE.
                                                                     9 séquences de voyages en Afrique, Cuba,
                                                                     Roumanie, Asie, Maghreb, Proche Orient,
                                                                     Sibérie, New York, Inde.
                                                                     « Tantôt ethnomusicologiques, tantôt récits de mes créations,

BILLIE
                                                                     ce sont toutes ces rencontres musicales que j’ai eu la chance
                                                                     de vivre tout au long de ma carrière et que je présente à tra-
                                                                     vers les films réunis en un « carnet de notes » dans le cadre
                                                                     de cette projection. » Michel Marre
                                                                     Trompettiste et bugliste, Michel Marre est une figure cen-
                                                                     trale de la scène de jazz à Montpellier et dans le sud de
Film documentaire de James ERSKINE
GB 2020 1h38 VOSTF                                                   la France. S’il est ancré dans cet espace, il a joué avec de
avec Billie Holiday, Linda Lipnack Kuehl, Count Basie,               nombreux partenaires (Don Cherry, Denis Fournier, Daniel
Sarah Vaughan, Charles Mingus, Tony Bennett,                         Humair, Doudou Gouirand, Gérard Pansanel Archie Shepp,
Jimmy Fletcher, Bobby Tucker, Jimmy Rowles, Sylvia
Syms… D’après les documents et l’ébauche                             Louis Sclavis…) tout en multipliant les voyages dans diffé-
de biographie de Linda Lipnack Kuehl                                 rents pays armé d’une caméra.
Ce beau film évoque la vie de la plus grande voix que le jazz
ait jamais connue. « La vie » ? « Les vies » serait plus juste car
Billie Holiday fut une femme au destin chaotique, embrassant
mille parcours artistiques et amoureux.
Dans l’Amérique ségrégationniste, il fallait pour les Noirs ten-
ter de survivre avec peu, soit dans les grandes exploitations
de coton du Sud, soit dans des quartiers insalubres à la péri-
phérie des grandes villes du Nord, avec leur lot de prostitu-
tion, de délinquance, de drogues, de violences raciales…
Billie, née à Philadelphie en 1915, a connu tout ça à la fois,
alors qu’elle n’était qu’une enfant. Tout au long d’une vie dé-
chirée et nourrie de drames personnels, elle portera en elle
les stigmates, la mémoire et les souffrances de son peuple,
qu’elle transformera en un chant bouleversant tout droit sorti
de ses entrailles. Un blues envoûtant et majestueux, sculp-
té dans les ténèbres, à l’image de son titre le plus connu :
Strange fruit, évoquant le corps lynché d’un Noir pendu à un
arbre.                                                               En clin d’œil à l’histoire du Festival Jazz en Pic St Loup et
                                                                     pour célébrer ses 20 ans, nous tenions à inviter Michel Marre,
À la fin des années 1960, 10 ans après la mort de Billie Holiday,    musicien incontournable qui a participé à son évolution aux
la journaliste new-yorkaise Linda Lipnack Kuehl commence
une biographie officielle de l’artiste. Elle recueille 200 heures    côtés de son créateur Jacky Azéma. Trompettiste, bugliste,
de témoignages incroyables… elle n’achèvera jamais son               tubiste, compositeur et grand voyageur, Michel Marre n’en
livre (vous découvrirez pourquoi dans le film).                      reste pas là et nous montre ses talents de réalisateur à tra-
Après la disparition tragique de Linda, on perd la trace du
manuscrit et des enregistrements… jusqu’à ce que James               vers des films réalisés tout au long de sa carrière ; il y est
Erskine, poussé par son producteur, les déniche, pieusement          question de rencontres musicales bien évidemment.
conservés chez un collectionneur du New Jersey.                      Jazz en Pic St Loup du 9 au 12 juin
Le film qu’il tire de ce matériau unique l’est tout autant.          Jazz à Vauvert du 2 au 4 juillet
S’émancipant de la stricte chronologie des événements, il dé-        Jazz à Junas du 20 au 24 juillet
roule le fil des chansons – plus ou moins connues, certaines
écrites par Billie, d’autres qu’elle a inspirées ou simplement
interprétées – et éclaire en croisant les témoignages la per-        Plus d’informations et réservation
sonnalité complexe de l’artiste.                                     www.jazzajunas.fr ou au 04 66 80 30 27
L L
                                                                                             LA PAIX EST LA CHOSE LA PLUS

                                              H A
                                                                                             DIFFICILE À FABRIQUER

                                        CIT Y
                                                                                             Au xxie siècle, soutenir un régime
                                                                                             nationaliste qui pratique l’apartheid, la
                                                                                             colonisation, l’utilisation disproportionnée
                                                                                             et systématique de la force et de la
                                                                                             violence, pratiquant une politique
                                                                                             d’expulsion, de dépossession sans
                                                                                             fondement légal et mettant en place
                                                                                             une stratégie d’épuration territoriale en
                                                                                             coalition avec des partis d’extrême-droite,
                                                                                             relève d’un dogmatisme qui ne peut
                                                                                             trouver son ancrage que dans la certitude
                                                                                             qu’une population, une ethnie, une
                                                                                             culture, une société, une confession, est
                                                                                             plus essentiel et donc supérieure à une
                                                                                             autre… je ne peux personnellement m’y
                                                                                             résoudre et je veux dénoncer avec force
                                                                                             les tirs visant les civil.e.s, toutes et tous !
                                                                                             Je ne m’exprime pas habituellement sur
                                                                                             un conflit qui se déroule à l’étranger,
                                                                                             mais puisque les prises de parole des
Film documentaire                              Il n’est bien sûr nul besoin de connaître     représentants de la droite et de l’extrême
de Frederick WISEMAN                           par cœur la filmographie de Wiseman           droite en France comme en Belgique
USA 2020 4h32 (2h05 + 2h27) VOSTF              pour s’immerger dans City hall, mais ce       convergent vers un soutien aveugle
                                               rappel des œuvres passées est là pour         à la violence extrême de Tsahal, je
Après At Berkeley, après National Gallery,     dire à quel point le regard de Wiseman
après Ex libris…, Frederick Wiseman            s’intéresse à tous les aspects de la vie      ne peux rester silencieux et observer
nous offre, du haut de ses quatre-vingt-       des habitants de la ville, et pour souli-     sans réaction des assassinats de
dix ans, un nouveau film monumental et         gner que chez lui, l’institution est moins    civil.e.s (toutes et tous) qui sont le fruit
passionnant, en investissant cette fois la     un sujet qu’un cadre, un point de vue à       d’une politique militarisée qui à force
mairie de Boston, capitale et métropole        partir duquel se déploie la vaste comé-       d’agressions chroniques révèle et réveille
la plus peuplée du Massachusetts, diri-        die humaine beckettienne qu’est son
gée par le Maire démocrate Martin Walsh        œuvre. En témoigne, une fois encore, la       les pires haines.
qui essaie de mener, dans un esprit par-       galerie de portraits, parfois fugaces, qui    Je regrette que la propagande de la peur,
ticipatif et collaboratif avec les citoyens,   ponctue le film et qui donne à voir l’Amé-    la bêtise populiste et identitaire aient
une politique socialement et écologi-          rique d’aujourd’hui, dans toute sa diver-     envahi à ce point nos gouvernements
quement ambitieuse. Wiseman réalise            sité. Ponctué par les grandes fêtes état-
ainsi son film le plus explicitement poli-     suniennes, (Thanksgiving, Veteran’s Day,      pour que tous soutiennent sans faille un
tique, une véritable profession de foi en      Halloween…), City hall est de fait traver-    régime surarmé et suranné qui s’empare
l’Amérique et sa démocratie telle que la       sé sans cesse par les grands sujets po-       avec une brutalité barbare des territoires
définissait Abraham Lincoln dans son           litiques qui travaillent la société améri-    voisins et convoités.
discours de Gettysburg : « le gouverne-        caine contemporaine. Dans le désordre :
ment du peuple, par le peuple et pour          mariage homosexuel, légalisation du           Si j’ai hésité avant de poster ce texte,
le peuple », un contrepoint au cauche-         cannabis, coût de la santé, tueries de        c’est que je ne suis pas dupe des
mar qu’est l’entreprise de démolition de       masse, tensions dans les rapports entre       propagandes qui rendront ma prise de
l’administration Trump, et une proposi-        la police et population, discriminations      position clivante et donc blessante pour
tion, en filmant ce qu’est concrètement        des minorités, quelles qu’elles soient,       certain.e.s.
une politique vertueuse de service pu-         présentes comme passées…
blic et d’inclusion, d’un contre-modèle :      Mais loin d’être circonstanciel, le film      Je ne suis pas pour un camp.
« Je sais que Boston ne résoudra pas           montre avant tout comment une pen-            Je suis pour le progrès, seul gage de
les problèmes des États-Unis », nuance         sée politique se réalise dans ce qu’il y      paix. Le progrès des esprits partageurs
le maire au milieu du film, « mais il suffit   a de plus concret, de plus prosaïque et       et des actes partagés. La paix est la
d’une ville… »                                 donc de plus noble : la gestion au jour le
City hall appartient à la veine des films      jour de la vie quotidienne de tout un cha-    chose la plus difficile à fabriquer parce
territoriaux de Wiseman, qui résument et       cun et l’ambition de rendre sa ville meil-    qu’elle demande de faire taire la peur et
rassemblent presque tous les éléments          leure (« Construire un meilleur Boston »,     de participer volontairement à perdre un
de la vie institutionnelle que le cinéaste     est-il clairement affiché sur les chantiers   peu au profit de tous. Cette générosité ne
a explorés et approfondis depuis plus de       de la cité). Soit la démocratie en action,    peut s’acquérir qu’en acceptant la défaite
50 ans. On s’y préoccupe donc, comme           c’est-à-dire avant tout du travail collec-
dans Public housing, de loger les plus         tif, du débat et du compromis, de l’enga-     de la force et en abandonnant l’idée
précaires ; on y briefe les policiers dans     gement citoyen dans la conduite des af-       d’une supériorité quelconque sur quoi
un commissariat à la Law and order ; les       faires de la part de femmes et d’hommes       que ce soit et donc des supposés droits
infirmières qui manifestent pour de meil-      de bonne volonté, prompts à interpeller       supérieurs sur les êtres et les terres. Dans
leures conditions de soins sortent tout        l’exécutif quand il le faut…
droit de Hospital ; on négocie en conseil      En 4h30 magnifiques, on voit Frederick        l’histoire humaine, les colonisations sous
des écoles l’augmentation du nombre            Wiseman défendre et illustrer une cer-        toutes les formes et à chaque époque,
d’élèves que peut accueillir un lycée du       taine idée de l’Amérique. Ce qu’on ap-        ont été, toujours et sans exception, un
type de celui de High school II ; le sort      pellera, pour reprendre l’expression uti-     crime, une sauvagerie politique imposée
des sans-abris renvoie à Welfare ; ce-         lisée dans une des réunions montrées          par un peuple à un autre peuple, un crime
lui des femmes battues à Domestic vio-         dans le film : un art civique.
lence…                                         (Antoine Guillot, France Culture)             source d’innombrables tragédies.
                                                                                             Alain Cofino Gomez
CINÉ CAMPUS saison 2020-2021 - Séances proposées et animées par les étudiants de l'Université Paul
Valery Montpellier 3, en partenariat avec le Centre Culturel Universitaire et la Bibliothèque Universitaire.
                                                                     Séance unique et rencontre le lundi 7 juin à 18h

                                                                     LES FLEURS
Séance unique et rencontre le jeudi 27 mai à 18h
                                                                     DU BITUME
                                                                     Film documentaire écrit et réalisé
                                                                     par Karine MORALES et Caroline PERICARD

LA PASSION
                                                                     France/Tunisie 2017 52min VOSTF

                                                                     Pour leur premier documentaire, Karine Morales et Caroline
                                                                     Péricard nous embarquent en Tunisie à la rencontre de trois
                                                                     jeunes artistes militantes. Les Fleurs du bitume nous donne à
                                                                     voir l’éclosion de ces trois Tunisiennes, Chamia la danseuse,

VAN GOGH
                                                                     Ouména la graffeuse et Shams la slameuse, au sein d’un lieu
                                                                     dont elles sont traditionnellement exclues : la rue.
                                                                     Elles se cherchent, s’épanouissent et revendiquent leur légiti-
                                                                     mité en exerçant leur art publiquement ; la place publique, voi-
                                                                     là l’endroit de leur lutte, de leur passion et de leur émancipa-
                                                                     tion. Quelle est donc leur place à elles, la place de toutes ces
                                                                     femmes dans cette société tunisienne post Ben Ali ?
Écrit et réalisé par Dorota KOBIELA et Hugh WELCHMAN                 Un triple portrait nous est offert de cette nouvelle généra-
GB/Pologne 2016 1h34                                                 tion, consciente et féministe, qui ne demande qu’à s’exprimer.
avec les voix de Pierre Niney,                                       S’exprimer par leur voix, leur corps mais surtout par leur Art ;
Chloé Berthier, Xavier Fagnon, Danièle Douet…                        un art politique qui témoigne d’un besoin de liberté.
                                                                     Bien qu’au premier abord leur avenir leur paraisse sans is-
PRIX DU PUBLIC, FESTIVAL DU                                          sue, il n’en est rien. Tout réside dans cette citation reprise
FILM D’ANIMATION D’ANNECY 2017                                       par Shams : « Ceci ne peut pas être la fin du monde, nous
                                                                     sommes condamnés à l’espoir ». Il s’agit surtout de courage,
« Je voudrais montrer par mon travail ce qu’il y a dans le cœur      celui de faire changer les choses, celui de semer des graines
d’un tel original » : c’est en ces mots que Vincent Van Gogh         pour faire éclore les fleurs de demain.
se décrivait juste avant sa mort. La Passion Van Gogh est un
film d’animation qui porte sur le célèbre artiste et plus pré-
cisément sur sa fin. Dessinée comme l’une des œuvres du
peintre, cette fiction mélange l’art de la peinture et les procé-
dés du numérique. Le film a d’abord été tourné avec de vrais
acteurs, et ces images en prise de vue réelle ont été peintes
« à la manière de Van Gogh » par 125 animateurs recrutés
dans toute l’Europe.
Pour chaque plan, les peintres utilisaient le même tableau
qu’ils modifiaient imperceptiblement entre chaque prise.
Puis l’ensemble était retravaillé sur ordinateur pour assouplir
les transitions. Un travail titanesque pour fournir les 64 000
images, certains plans de 3 secondes ayant demandé jusqu’à
un mois de travail !
Le résultat est spectaculaire, le spectateur ayant véritable-
ment l’impression de voir la peinture prendre vie comme par
magie. C’est à une véritable synthèse artistique que nous as-
sistons qui magnifie la couleur.
Après avoir longtemps tâtonné, le couple de scénaristes s’est
concentré sur les dix dernières semaines de la vie de Van
Gogh (1853-1890). Une période prolifique durant laquelle, ins-
tallé à Auvers-sur-Oise, il peint 70 toiles, avant de mettre fin à
ses jours. L’histoire se concentre sur le personnage d’Armand
Rolin, chargé par son père (celui qui fut le facteur de Van Gogh)
de remettre la dernière lettre du peintre à son frère Théo. De là
Armand commencera à enquêter sur le décès mystérieux de
Vincent et remettra en question les circonstances de sa mort.
Loin d’un travail de copie pure et simple, le film propose une
nouvelle interprétation visuelle de ses peintures, au service
d’une histoire souvent occultée. Le récit n’est pas celui d’un
quelconque biopic : c’est à travers sa détresse et sa dispari-
tion que Van Gogh devient vraiment le centre de son monde.
Son art est ici dévoilé d’une manière unique.
SÉANCE UNIQUE le jeudi 17 juin à 19h30 en
                                                                     présence de la réalisatrice Maria Ramos
                                                                     Soirée organisée par La Cinémathèque du do-
                                                                     cumentaire en partenariat avec DOC-Cévennes,
                                                                     Cinelatino, Itinérances, Institut Jean Vigo,
                                                                     Cinémathèque de Toulouse et Quai des Docs.

                                                                     O PROCESSO
                                                                     Documentaire écrit et réalisé par Maria Augusta RAMOS
                                                                     Brésil / Allemagne / Pays-Bas 2018 2h19 VOSTF
                                                                     Meilleur long métrage Compétition internationale
                                                                     Visions du réel 2018

Mercredi 23 juin à 20h                                               De mars à mai 2016, la cinéaste a filmé les débats du Congrès
                                                                     qui ont mené à la destitution de Dilma Rousseff, présidente
En partenariat avec Le collectif Alternatiba-ANV                     du Brésil. Déjà primée à Nyon pour le premier volet de sa tri-
Cop21 Montpellier. Rencontre après le film.                          logie sur la justice brésilienne, Maria Augusta Ramos propose
                                                                     ici un thriller politique.

DÉSOBÉISSANT.E.S !
                                                                     Emportés dans un long travelling, on survole la foule de « sup-
                                                                     porters » portant les couleurs des partis qui s’affrontent dans
                                                                     l’imposant palais du Congrès national de Brasília. Le 17 avril
                                                                     2016, les députés votent la destitution de Dilma Rousseff, ré-
                                                                     élue 2 ans auparavant. Dilma Rousseff, première femme à
Écrit et réalisé par Alizée CHIAPPINI et Adèle FLAUX                 être élue présidente du Brésil, emprisonnée et torturée sous
France 2019 1h25                                                     la dictature militaire entre 1970 et 1972, doit alors affronter ce
                                                                     qu’elle dénonce comme un coup d’État. L’ancien allié de la
Ils ont moins de 35 ans, sont activistes chez Alternatiba,           présidente, Eduardo Cunha, accusé de fraude dans l’affaire
ANV-COP21 et Les Amis de La Terre, ils et elles consacrent           de la société pétrolière Petrobras, est l’initiateur du proces-
beaucoup de temps à leur engagement et ont un objectif :             sus de destitution.
construire une société soutenable. Elodie, Pauline, Sandy,
Gabriel et Elliot ont partagé leur voyage initiatique dans l’en-
gagement. Un an et demi d’actions et de rencontres.
Au-delà de ces histoires personnelles, c’est le travail de cen-
taines de militants qui est mis en lumière. De l’essor des
marches pour le climat, au blocage de la République des
Pollueurs, en passant par les actions de décrochage de por-
traits d’Emmanuel Macron, c’est l’histoire d’un nouvel enga-
gement citoyen dépassant les frontières. Le film retrace des
liens qui se créent entre luttes et mouvements, par des ac-
tions communes avec les Gilets Jaunes en France, Extinction
Rébellion en Angleterre, ou dans le désert des mines de char-
bon en Allemagne avec Ende Gelände.
« On a essayé de comprendre leur engagement pas seule-
ment sous l’angle de leur méthodologie d’action, mais aussi
des choix de vie qui vont avec cet engagement. Leur enga-
gement est un engagement total. Il y a une grande intensité
émotionnelle dans ces mouvements, ils partagent beaucoup,
ils investissent tous les espaces, ils vont jusqu’à s’exposer à      O Processo nous projette dans les coulisses de ce moment
la répression. Mon engagement, c’est de raconter leur his-           historique. La réalisatrice capte ces événements de manière
toire. » explique Adèle Flaux, une des réalisatrices.                brute sans les altérer, sans aucune intervention visible. Elle
                                                                     parvient à nous emmener au cœur des réunions stratégiques
Été 2018, 3 ans après les accords de Paris, les échéances dé-        entre avocats et dirigeants politiques qui organisent la dé-
crites par le GIEC sont impitoyables : à la fin 2020, si les États   fense de Dilma Rousseff. Le film mêle des moments révéla-
n’ont pas inversé le cours des choses alors le point de non-         teurs provenant aussi bien de la sphère publique, dont cer-
retour climatique sera atteint. Une course contre la montre          tains sont extraits directement de chaînes télévisées, comme
commence. Face à l’urgence et l’ampleur de la tâche, cer-            de la sphère privée.
tains, comme Élodie et Pauline, ont démissionné d’un poste           Maria Ramos remettait déjà en question dans ses précé-
confortable pour se consacrer à un combat qu’ils jugent cru-         dents films le système judiciaire brésilien. Elle apporte ici une
cial. Un QG, La Base, est loué au cœur de Paris pour organi-         compréhension de l’affaire différente de celle proposée par
ser la lutte.                                                        certains médias, et son film nous éclaire sur l’état du Brésil
Durant 1 an et demi, caméra sur l’épaule, les réalisatrices vont     aujourd’hui, l’arrivée au pouvoir de Jair Bolsonaro, que l’on
suivre une poignée de jeunes gens, l’émergence d’une nou-            voit se prononcer favorablement à la destitution de Dilma
velle génération de militants qui, à leur façon pragmatique,         Rousseff, et plus largement sur la montée d’une forme de
ouverte et combattive, imaginent un nouvel engagement ci-            politique conservatrice et populiste dans le monde entier. O
toyen. Entre utopie folle et engagement concret, c’est un            Processo permet de prendre conscience des conséquences
mouvement de masse qui s’organise et donne naissance à               de la destitution de Dilma Rousseff sur le plan politique, social
une nouvelle forme de contestation. Une contestation radi-           et économique, mais aussi de ce que cela peut représenter
cale et non-violente pour pousser les États à respecter les          symboliquement : l’effondrement de la démocratie et de ses
engagements de la COP21.                                             institutions. (Margaux Bigotte, Doc Cévennes)
AVANT-PREMIÈRE le mercredi 9 juin à 19h30,
rencontre avec le réalisateur et des invités.

DOUCE FRANCE
                                                                                            tés à du droit médiéval, et Europa City
                                                                                            leur paraît une aubaine autant qu'en tant
                                                                                            que futurs consommateurs et visiteurs
                                                                                            que comme potentiels employés dans
                                                                                            une département qui accumule les mau-
                                                                                            vais chiffres du chômage. On suivra par-
                                                                                            ticulièrement Amina, Sami et Jennyfer
Geoffrey COUANON                               comme l'une des plus fertiles de l'hexa-     trois jeunes de 17 ans aux rêves plein
Documentaire France 2019 1h37                  gone.                                        la tête, parfois différents, dont on va
Avec Amina, Jennyfer, Sami...                  On connait l'épilogue provisoire de l'af-    suivre progressivement l'évolution au
                                               faire puisque dans la foulée de l'aban-      fur et à mesure qu'ils vont comprendre
Des documentaires sur des luttes éco-          don si attendu du projet d'aéroport de       les problèmes que posent le projet. Et
logiques et paysannes on en a montrés,         Notre Dame des Landes, Emmanuel              c'est en cela que le film est passionnant
des débats on en a organisés dans les          Macron sonna de manière inattendue           car il pose une question fondamentale
Utopia... De Tous Au Larzac de Christian       la fin de la récré en novembre dernier,      : comment transmet-on des préoccu-
Rouaud, à Demain de Cyril Dion en pas-         même si Auchan n'a pas dit son dernier       pations environnementales et un intérêt
sant par le Dernier Continent sur la ZAD       mot.                                         pour des questions touchant à l'agricul-
de Notre-Dame des Landes, et nous                                                           ture paysanne et à la souveraineté ali-
pourrions en citer des dizaines d'autres,      Douce France n'est pas à proprement          mentaire à des jeunes des quartiers po-
l'histoire de votre salle chérie s'est faite   parler un documentaire sur tout le com-      pulaires pour qui cela est naturellement
au gré des débats autour de l'environ-         bat mené par les écologistes et pay-         secondaire, eux qui ont vu leurs parents
nement et d'une agriculture socialement        sans franciliens depuis quelques an-         avant tout confrontés aux difficultés
et écologiquement responsable. De par          nées. Il prend un angle très différent et    économiques parfois insurmontables du
notre proximité géographique, il y a un        qui s'avère passionnant. Il suit un classe   quotidien. Et c'est tout ce cheminement
combat qui nous tenait depuis quelques         de lycée de Villepinte, une commune          qui est touchant et fascinant. Quand
années particulièrement à cœur, ce-            voisine du 93 qui va être emmenée par        Sami le jeune sportif , commence à se
lui que menaient certains de nos spec-         une de ses enseignantes à s'intéresser       passionner pour le métier des paysans
tateurs pour la défense du Triangle de         au sujet . Villepinte est symbolique de      bios de la plaine de France. Ou quand
Gonesse contre Europa City, projet déli-       ces villes de grands ensembles poussés       Jennyfer, pourtant au début du film to-
rant du groupe Auchan pour la construc-        comme des champignons à la fin des           talement séduite par le discours ultra-
tion d'un parc d'activités gigantesque         années 60 et qui ont forcément regroupé      libéral de la députée macroniste de sa
mêlant surfaces commerciales, zones            les classes les plus populaires d'Ile de     circonscription, finit par convaincre sa
de divertissement (avec même une piste         France. Et quand on découvre ces ado-        mère de se rendre à l'AMAP .
de ski indoor comme à Dubai). Un pro-          lescents nourris au culte de la réussite     Et bien au-delà de la question d'Europa
jet prévu sur le site de la grande plaine      économique, et de la consommation,           City, le film pose du coup des questions
de France non loin des pistes de Roissy,       pour eux , la présentation du projet d'en-   fondamentales à toutes celles et ceux,
l'une des dernières grandes terres             quête semble révéler en eux un intérêt       jeunes ou moins jeunes, qui veulent faire
d'agriculture proche de Paris, réputée         aussi grand que s'ils étaient confron-       avancer la cause écologiste.
IL MIO CORPO

Film documentaire                               té, Stanley est un jeune réfugié nigérien        raconter le destin de ceux qui mènent
de Michele PENNETTA                             qui a enfin obtenu son permis de travail.        une vie décidée par d’autres. Sous le so-
Italie 2020 1h20 VOSTF                          Stanley a traversé la mer pour échapper          leil de plomb sicilien, dans cette lumière
                                                à la violence dans son pays, il s’est déjà       qui rejaillit dans toutes les images, les
Une camionnette qui sillonne à travers          libéré de chaînes et collectionne main-          corps, les gros plans intenses, la photo-
les montagnes de Sicile, stoppe sur             tenant les petits boulots pour gagner sa
un pont en surplomb d’une décharge :            pitance et essayer de vivre dans cette île       graphie réussit à rendre à ces deux êtres
l’image insiste sur la trajectoire. On suit     que Michele Pennetta filme de manière            la force qu’il leur reste, malgré la brutali-
les lacets et la fatalité de cette route qui    si particulière, oscillant entre l’aridité des   té et le soleil qui les écrasent. Le réalisa-
mène au lieu de la survie économique :          paysages désertiques et la beauté des            teur parvient à saisir une beauté très par-
un terrain vague, pentu, écrasé de so-          images si lumineuses et ouvertes.                ticulière d’une réalité sicilienne cruelle et
leil. C’est ici, là-bas, dans les décharges     En apparence, rien de commun entre               décadente. Le cinéaste assume sa sub-
sauvages, les anciennes mines, qu’Os-           ces deux êtres, ces deux univers. Rien,          jectivité, fait un pas de côté en déportant
car y cherche ce qui fera vivre sa fa-          sinon cette impression que les deux ont          son documentaire à la limite de la fiction.
mille : de la ferraille en tout genre. La lu-   été jetés là comme de véritables rebuts          Brisant cette frontière, il nous livre un es-
mière est partout. L’image, fixe, imprime       humains lâchés dans cette décharge à             sai d’une grande puissance poétique et
le labeur, la solitude et la fatigue. Elle      ciel ouvert qu’est le monde, dans lequel
s’accroche aux gestes de l’enfant, à sa         Stanley, tout comme Oscar, travaille dur,        d’une magnifique intensité, métabolisant
tristesse et sa beauté.                         pour presque rien.                               les émotions de ces deux êtres que rien
Oscar rêve. Il rêve d’échapper à l’au-                                                           ne relie sauf ce qu’ils racontent de notre
torité de son père, de s’échapper de            Le cinéaste a choisi le centre de la Sicile      société. Celle d’une Europe qui installe
sa rude condition de vie. Juste à cô-           comme un miroir de l’Europe, pour nous           ses réfugiés là où il ne reste plus rien.
MANDIBULES

                                                                                         té du Buffet froid de Bertrand Blier, pour
                                                                                         s’aventurer sur un terrain plus joyeux,
                                                                                         plus léger, voire presque premier de-
                                                                                         gré : la « Buddy-comedie ». Et pour peu
                                                                                         qu’on soit d’humeur à suspendre tem-
                                                                                         porairement la part la plus sévère de
                                                                                         son esprit critique, impossible de res-
                                                                                         ter de marbre devant les mésaventures
                                                                                         de ces deux trentenaires qui raisonnent
                                                                                         comme des ados de treize ans, voire
                                                                                         parfois comme des gosses, sans que
                                                                                         ça provoque jamais le moindre malaise.
                                                                                         Dupieux réveille simplement l’enfant qui
                                                                                         sommeille en nous, qui s’émerveille de
                                                                                         tout et ne s’étonne de rien, puisque tout
                                                                                         est possible tant qu’on tient à l’écart le
                                                                                         principe de réalité.
Écrit & réalisé par Quentin DUPIEUX          miques pour enfants de 5 ans, des road-     Et ça, Dupieux sait faire, et applique
France 2020 1h17                             movies sans queue ni tête et des twists     cette règle comme personne tant à ses
avec Grégoire Ludig, David Marsais,          qui se terminent en queue de pois-          personnages qu’à son récit. Pourquoi
Adèle Exarchopoulos, India Hair,             son, bienvenus dans la nouvelle galé-       une mouche géante ? Pourquoi vou-
Roméo Elvis, Bruno Lochet…                   jade filmique de Quentin Dupieux ! Nous     loir la dresser ? Parce que, c’est tout !
                                             l’avions laissé l’année dernière dans les   Personne n’ose aujourd’hui faire des
« Un film qui fait mouche ! »                brumes crépusculaires des alpages où        films aussi libres, aussi ouvertement dé-
(L’Almanach Vermot).                         sévissait un serial-killer affublé d’une    pourvus de tout psychologisme, aussi
                                             peau de bête, on le retrouve cette année    ouvertement absurdes, et aussi souvent
Voleur de voiture, c’est un métier qui de-   sur la Côte d’Azur dans un film solaire     drôles. Alors laissez la logique au pla-
mande du doigté, de la jugeote, et sur-      à suivre les enfantillages de deux post-    card, oubliez votre âge et laissez-vous
tout du flair pour repérer la bonne cible.   ados montés en graine. Jamais là où on      embarquer dans cette histoire rocambo-
Or s’il y a bien des qualités qui font dé-   l’attend donc, Dupieux tourne le dos à      lesque, qui vous fera dire en sortant de
faut à ce grand dadais de Manu, c’est        l’humour noir caractérisant Au poste et     la salle : « Taureau-triomphe » ! (Faut voir
bien ces trois-là. Chargé par un type        Le Daim, qui lorgnaient pas mal du cô-      le film pour comprendre…).
particulièrement louche de convoyer un
paquet en toute discrétion d’un point
A à un point B en prenant garde de ne
surtout pas l’ouvrir, il dérobe pour me-
ner à bien sa mission la première char-
rette venue sans prendre le temps de
l’inspecter, et comme c’est un cador, il
embarque aussitôt son alter-ego Jean-
Gab dans son plan foireux. Bien sûr ça
ne loupe pas, la voiture tombe rapide-
ment en panne d’essence, et c’est en
forçant le coffre arrière dans l’espoir
d’y trouver un jerrycan que nos deux
champions tombent nez à trompe avec
une mouche. Une grosse mouche. Une
TRÈS TRÈS grosse mouche.

Amis des brachycères dopés aux hor-
mones de croissance, des duos co-
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