Recommandations pour la vaccination contre la grippe

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Directives et recommandations

Recommandations pour la vaccination contre la grippe
Etat: septembre 2011
Office fédéral de la santé publique (OFSP) en collaboration avec le Groupe de travail Influenza (GTI) et la Commission fé-
dérale pour les vaccinations (CFV)

   L’essentiel en bref
   La grippe (influenza) est une mala-    de 40 à 70%. La vaccination anti-        L’assurance obligatoire des soins
   die infectieuse aiguë due aux virus    grippale est très sûre. Ses effets       prend en charge – sous réserve du
   influenza, dont les conséquences       sont connus et, depuis 1945, plu-        montant de la franchise – les frais
   et les complications sont souvent      sieurs milliards de doses ont été ad-    de vaccination pour les personnes
   sous-estimées. Elle présente les       ministrées dans le monde entier.         avec un risque accru de complica-
   symptômes les plus divers, qui         Tous les vaccins antigrippaux triva-     tions graves en cas de grippe.
   peuvent aller d’une légère infection   lents utilisés en Suisse à l’heure ac-
   respiratoire jusqu’au décès. Chaque    tuelle sont inactivés, ils ne contien-   La vaccination contre la grippe est
   hiver, en moyenne, 5 à 10% des         nent donc pas de virus infectieux de     recommandée aux:
   adultes et 20 à 30% des enfants        nature à provoquer une grippe, mais
   contractent la grippe en Suisse.       uniquement les antigènes de trois        A) personnes avec un risque accru
   Dans certains groupes à risque et,     souches de virus de la grippe mo-        de complications graves en cas de
   plus généralement, chez les per-       mentanément en circulation (une          grippe (pour ces personnes, la vac-
   sonnes de plus de 65 ans, la grippe    souche de chacun des virus A/H1N1,       cination est prise en charge par l'as-

                                                                                                                             Septembre 2011
   entraîne souvent des complications     A/H3N2 et Influenza B).                  surance obligatoire des soins sous
   qui en font un important facteur de                                             réserve du montant de la franchise).
   morbidité et de mortalité. 100 000     Effets indésirables des vaccina-
   à 250 000 affections grippales né-     tions (EIV): L’EIV le plus fréquent      Ce sont:
   cessitent des consultations médi-      est, chez 10 à 40% des personnes         – les personnes de 65 ans et plus;
   cales, les complications graves re-    vaccinées, une légère réaction lo-       – les personnes (dès l'âge de
   quièrent quelques centaines à 5000     cale au point d’injection, qui s’es-       6 mois) avec l'une des maladies
   hospitalisations et provoquent jus-    tompe au bout de quelques heures           chroniques suivantes: maladies
   qu’à 1500 décès durant une vague       à deux jours, sans thérapie. On ob-        cardiaques; maladies pulmonaires
   de grippe. Les virus influenza, en     serve des symptômes généraux               (p. ex., asthme); troubles méta-
   particulier le virus de type A, se     sans gravité tels que fièvre, nau-         boliques affectant les fonctions
   caractérisent par un changement        sées, douleurs musculaires, arti-          cardiaque, pulmonaire ou rénale
   fréquent de leurs antigènes de sur-    culaires et céphalées, ainsi que           (p. ex., diabète ou obésité mor-
                                                                                     bide, IMC ≥ 40); troubles neurolo-

                                                                                                                             recommandations
   face, de sorte que de nouvelles va-    d’autres symptômes grippaux chez
   riantes virales apparaissent conti-    5 à 10% des personnes vaccinées.           giques (p. ex., maladie de Parkin-
   nuellement et sont à l’origine des     Les réactions graves de type aller-        son, troubles cérébrovasculaires)       Directives et
   épidémies récurrentes pendant les      gique – angio-œdème, asthme, ana-          ou de l'appareil locomoteur affec-
   mois d’hiver.                          phylaxie – sont très rares (moins de       tant les fonctions cardiaque, pul-
   Le moyen le plus efficace de se pré-   1 pour 10 000) et s’expliquent en          monaire ou rénale, hépatopathies,
   munir contre la maladie et notam-      général par une hypersensibilité aux       insuffisance rénale, asplénie ou
   ment ses complications est la vac-     protéines de l’œuf de poule. Des           trouble fonctionnel de la rate (y
   cination antigrippale. Si les anti-    phénomènes indésirables neuro-             compris hémoglobinopathie), im-
   gènes contenus dans le vaccin cor-     logiques, p.ex. un syndrome de             munodéficience (p. ex., infection
   respondent aux virus en circulation,   Guillain-Barré (SGB), sont également       VIH, cancer, thérapie immunosup-
   elle offre pour les enfants et les     très rares.                                pressive);
   adultes en bonne santé une protec-                                              – les femmes enceintes dès le
   tion efficace contre la maladie dans   Recommandations de vaccination:            2e trimestre de grossesse ou
   70 à 90% des cas. Pour un certain      Etant donné que les virus en circula-      ayant accouché au cours des
   nombre de personnes faisant partie     tion changent d’une année à l’autre,       4 semaines précédentes;
   d’un groupe à risque, et notamment     il est nécessaire de renouveler la       – les enfants nés prématurément
   chez les personnes âgées, la vacci-    vaccination antigrippale tous les ans.     (nés avant la 33e semaine ou bien
   nation contre la grippe est moins      La période la plus propice se situe        d'un poids inférieur à 1500 g à la
   efficace mais permet toutefois de      entre la mi-octobre et la mi-no-           naissance) dès l'âge de 6 mois
   réduire la morbidité et la mortalité   vembre, la vaccination étant alors         pendant les deux premiers hivers
   grippale dans des proportions allant   efficace pendant six mois environ.         suivant la naissance;
                                                                                                                             1
Office fédéral de la santé publique
                         Recommandations pour la vaccination contre la grippe

                         Editeur
                         © Office fédéral de la santé publique (OFSP)
        Septembre 2011

                         Version actuelle disponible sur Internet
                         www.bag.admin.ch/infinfo

                         Pour de plus amples informations
                         Office fédéral de la santé publique
                         Unité de direction Santé publique
                         Division Maladies transmissibles
                         3003 Berne
                         Téléphone 031 323 87 06
                         epi@bag.admin.ch

                         Auteurs
                         Office fédéral de la santé publique (OFSP)
                         Division Maladies transmissibles (MT)
recommandations

                         Commission fédérale pour les vaccinations (CFV)
                         Membres: C. Aebi, Berne; R. Anderau, Neuchâtel; G. Bachmann, St-Gall; H. Binz, Soleure; P. Diebold, Monthey; M. Gallacchi, Melide;
                         U. Heininger, Bâle; P. Landry, Neuchâtel; A. Marty-Nussbaumer, Lucerne; L. Matter, Bâle; K. Mühlemann, Berne; J. Roffler, Genève;
Directives et

                         C.-A. Siegrist, Genève (présidente); S. Stronski Huwiler, Zurich; P. Trefny, Lucerne; B. Vaudaux, Lausanne. Secrétariat de la CFV assuré
                         par l’OFSP, Section programmes de vaccination et mesures de contrôle.

                         Groupe de travail Influenza (GTI)
                         Membres: E. Jandrasits, Zurich; L. Kaiser, Genève; A. Kauffmann, Genève; R. Koch, Berne; J. Kyek, Zoug; E. Masserey, Lausanne;
                         T. S. Meister, Ittigen; K. Mühlemann, Berne; J.-C. Piffaretti, Massagno (président); J. Roffler, Genève; C.A. Siegrist, Genève; U. Thurnherr,
                         Karlsruhe; A. Witschi, Bâle. Secrétariat du GTI assuré par l’OFSP, Division Maladies transmissibles.

                         Mots-clés:
                         Grippe, influenza, Influenza-like-illness, virus influenza, vague de grippe, pneumonie, risque de complications, groupes à risque, gros-
                         sesse, vaccination, efficacité, recommandations de vaccination, professionnels de la santé

                         Suggestion de citation:
                         Office fédéral de la santé publique, Commission fédérale pour les vaccinations (CFV), Groupe de travail Influenza (GTI). Directives et re-
                         commandations. Recommandations pour la vaccination contre la grippe. Berne: Office fédéral de la santé publique, 2011.

                         Cette publication paraît aussi en allemand.

                         Numéro de publication:
                         BAG OeG 11.06 1500 d 1000 f 20EXT0609/20EXT06010
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                         Imprimé sur du papier blanchi sans chlore
Office fédéral de la santé publique
Recommandations pour la vaccination contre la grippe

   – les résidents des maisons de          C) personnes en contact profession-     tous les ans, de préférence entre
     soins et des établissements pour      nel avec de la volaille, des oiseaux    mi-octobre et mi-novembre. L’admi-
     patients atteints de maladies chro-   sauvages ou de cochons (pour ré-        nistration consiste en une injection
     niques.                               duire le risque de développement        intramusculaire dans la partie supé-
                                           d'un nouveau virus par réassorti-       rieure du bras (muscle deltoïde) ou
   B) personnes qui, au sein de leur fa-   ment).                                  dans la région antéro-latérale de la
   mille ou dans le cadre de leurs acti-                                           cuisse chez les petits enfants.
   vités privées ou professionnelles,      Contre-indications et mesures de
   sont en contact régulier avec:          précaution: La vaccination antigrip-    La dose d’antigènes pour les sujets
   – des personnes de la catégorie A       pale est contre-indiquée en pré-        à partir de 3 ans est de 15 µg pour
      (voir ci-dessus);                    sence d’une forme sévère d’allergie     chacun des trois composants anti-
   – des nourrissons de moins de           à l’œuf de poule ou d’une hypersen-     géniques HA. Les enfants de moins
      6 mois (ceux-ci présentent des       sibilité grave à l’un des composants    de trois ans reçoivent une demi-
      risques accrus de complications      du vaccin (lécithine, formaldéhyde,     dose, ce qui correspond à 7,5 µg
      et ne peuvent être vaccinés en       Triton-X, aminoglycosides). La vacci-   pour chacun des trois composants
      raison de leur très jeune âge).      nation antigrippale n’est pas recom-    HA. Si la vaccination est pratiquée
                                           mandée pour les nourrissons de          pour la première fois chez des en-
   La vaccination contre la grippe est     moins de 6 mois. Les personnes qui      fants de 6 mois à 8 ans (jusqu’à leur
   recommandée en particulier à tout       présentent une forte fièvre ne de-      9e anniversaire), il est recommandé
   personnel soignant, médical ou pa-      vraient être vaccinées qu’après dis-    d’administrer deux doses (ou deux
   ramédical, personnel des crèches,       parition des symptômes.                 demi-doses, suivant l’âge) à un in-
   des garderies, des établissements                                               tervalle de quatre semaines (on
   de soins, de retraite ou pour per-      Schéma de vaccination, adminis-         parle en l’espèce de priming).
   sonnes âgées, y compris les étu-        tration et dosage: La vaccination
   diants et les stagiaires.               contre la grippe doit être renouvelée

                                                                                                                           Septembre 2011
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                                                                                                                           Directives et

                                                                                                                           3
Office fédéral de la santé publique
                         Recommandations pour la vaccination contre la grippe

                         Sommaire
                         L’essentiel en bref                                                                                    1
                         Impressum                                                                                              2
                         1. Introduction                                                                                        5
                         2. Les virus influenza et leur transmission                                                            5
                              2.1. Description de l‘agent pathogène                                                             5
                                   Figure 1. Schéma de désignation des virus influenza de type A                                5
                              2.2. Transmission, multiplication du virus et contagiosité                                        6
                         3. Clinique                                                                                            6
                              3.1. Symptômes, pathophysiologie et évolution clinique                                            6
                              3.2. Groupes exposés à un risque accru de complications                                           7
                              3.3. Diagnostic                                                                                   8
                         4. Epidémiologie                                                                                       8
                              4.1. Propagation des virus influenza dans le monde                                                8
                              4.2. Surveillance de l’influenza                                                                 10
                                   Figure 2. Vue synoptique des saisons d’influenza recensées dans le système de déclaration
                                   suisse Sentinella pour la période 1995/1996 à 2010/2011                                     10
                              4.3. Fardeau de la grippe saisonnière en Suisse                                                  11
                                   Tableau 1. Chiffres-clés des saisons grippales entre 1995/1696 et 2010/2011 en Suisse       11
                         5. Vaccination contre la grippe                                                                       12
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                              5.1. Vaccins et produits autorisés en Suisse                                                     12
                              5.2. Immunogénicité et efficacité                                                                13
                              5.3. Effets indésirables des vaccinations (EIV)                                                  14
                              5.4. Interactions et précautions                                                                 15
                              5.5. Contre-indications                                                                          15
                              5.6. Aspects économiques                                                                         15
                         6. Recommandations                                                                                    16
                              6.1. Objectifs de la vaccination et couverture vaccinale en Suisse                               16
                              6.2. Recommandations pour la vaccination contre la grippe                                        16
                              6.3. Groupes particuliers                                                                        17
recommandations

                                   6.3.1. Enfants                                                                              17
                                   6.3.2. Personnes âgées                                                                      17
Directives et

                                   6.3.3. Femmes enceintes                                                                     18
                                   6.3.4. Personnes immunodéficientes                                                          18
                                   6.3.5. Professionnels de la santé (HCW)                                                     18
                                   6.3.6. Voyageurs                                                                            19
                              6.4. Autres mesures de prévention et thérapie                                                    19
                         Bibliographie                                                                                         20

       4
Office fédéral de la santé publique
Recommandations pour la vaccination contre la grippe

1. Introduction                               Les virus influenza sont des virus            rement) H1N2. On a vu circuler aussi,
                                              sphériques ou pléomorphes d’environ           entre 1957 et 1968, le sous-type
Les virus grippaux des types A, B et C        100 nm de diamètre. Ils possèdent un          H2N2. D’autres virus influenza A peu-
provoquent une maladie communé-               génome d’ARN monocaténaire néga-              vent se transmettre de façon spora-
ment appelée grippe, ou influenza.            tif, segmenté en huit (influenza type A       dique de l’animal à l’homme et, par-
Cette dernière peut causer des com-           et B) ou sept fragments (influenza            fois, provoquer des affections sévères
plications parfois graves, en particulier     type C). Chaque segment est com-              à l’instar, entre autres, des sous-types
chez les personnes âgées ou fragili-          posé d’une séquence des bases qui             H5N1, H7N2, H7N3, H7N7, H9N2 et
sées par des affections chroniques.           code pour des protéines et est asso-          H10N7 [10,11]. Parmi les sous-types
Cette affection, dont les complications       ciée à une ARN-polymérase, cette sé-          de type A apparaissent constamment
entraînent des consultations médi-            quence étant protégée d’une dégrada-          de nouvelles variantes du virus, dites
cales, des hospitalisations et de l’ab-       tion précoce par des nucléoprotéines.         «souches», dont la dénomination est
sentéisme, engendre chaque hiver              Le matériel génomique est entouré             indiquée à la figure 1.
des coûts considérables à la charge du        par une membrane protéique consti-            Les virus influenza de type B sont ré-
système de santé publique et la com-          tuée de protéine de matrice M1 et par         pandus chez l’être humain, certains
munauté toute entière. Une vaccination        une deuxième membrane, lipidique              rongeurs et mammifères marins. Ils
en temps opportun, durant l’automne,          celle-là. Cette enveloppe externe             se répartissent entre les deux lignées
est le moyen le plus efficace de préve-       contient les deux glycoprotéines ma-          de souches Victoria et Yamagata. Les
nir la grippe saisonnière en hiver. La vac-   jeures, à savoir l’hémagglutinine (H)         virus influenza de type C infectent
cination antigrippale est recommandée         et la neuraminidase (N), avec en plus         l’être humain, le porc et le chien [9, 12,
à toutes les personnes à risque accru         pour le type A un canal ionique (pro-         13].
de complications ainsi qu’aux per-            téine M2) [3, 4]. Pour le virus influenza     Le génome des virus influenza pré-
sonnes en contact fréquent avec des           de type A, on connaît au total 16 sous-       sente un taux de mutation élevé.
personnes à risque, notamment tous            types différents d’hémagglutinine et          Cette variabilité génétique modifie
les professionnels de la santé.               9 de neuraminidase, contre un seul            constamment la structure de leurs gly-
Ce document livre des connaissances           sous-type H ou N pour l’influenza de          coprotéines de surface, ce qui permet
de base sur les virus influenza, la           type B; quant au virus influenza de           aux virus d’échapper à la réponse im-
grippe en tant que maladie, l’épidé-          type C, il ne porte qu’une seule glyco-       munitaire de l’hôte infecté (l’être hu-

                                                                                                                                         Septembre 2011
miologie, la vaccination, ainsi que sur       protéine de surface. Pour l’influenza         main, p. ex.), car ces glycoprotéines
les vaccins disponibles en Suisse et          de type A, l’assemblage des sous-             de surface variables sont précisément
présente les recommandations de vac-          types H et N détermine le sous-type           la cible du système immunitaire, et no-
cination antigrippale. L’ancienne bro-        de virus (p. ex. A/H3N2), dont dépend         tamment des anticorps neutralisants
chure intitulée «Directives et recom-         aussi le spectre d’hôtes [5].                 [14-16].
mandations pour la vaccination contre         Les virus influenza de type A coloni-         Les diverses souches d’influenza nais-
la grippe» de septembre 2007 a été re-        sent fréquemment des mammifères               sent de l’action de deux mécanismes
vue et complétée après la pandémie            tels que le porc, le cheval, le chat, le      différents: la dérive antigénique («anti-
de 2009, à la lumière de nouvelles ob-        chien, certaines espèces de rongeurs          genic drift») et la variation antigénique
servations scientifiques, de la disponi-      et de mammifères marins. Cela dit, le         («antigenic shift»).
bilité de nouveaux vaccins et d’une           réservoir le plus important est consti-       Le terme de dérive antigénique dé-
mise à jour des recommandations de            tué par les oiseaux, en particulier les       signe les mutations ponctuelles fré-
vaccination.                                  oiseaux aquatiques, qui sont souvent          quentes qui surviennent dans le gé-

                                                                                                                                         recommandations
                                              des porteurs asymptomatiques [6-9].           nome des virus lors de la réplication
                                              Chez l’être humain, les épidémies de          virale. Elles entraînent de légères mo-
                                              grippe influenza de type A sont cau-          difications des glycoprotéines de sur-
                                                                                                                                         Directives et
2. Les virus de l’influenza                   sées par des virus à hémagglutinine           face (hémagglutinine, neuraminidase)
   et leur transmission                       H1, H2 et H3, ainsi qu’à neuramini-           et ainsi des propriétés antigéniques
                                              dase N1 et N2 [1]. Depuis 1918, les vi-       des virus. La pression sélective
2.1. Description de l’agent                   rus influenza A en circulation sont les       qu’exerce le système immunitaire de
     pathogène                                sous-types H1N1, H2N2, H3N2, et (ra-          l’hôte sur les virus favorise ces muta-
Les virus influenza, qui appartiennent
à la famille des Orthomyxoviridae, se
                                              Figure 1
répartissent en trois types: influenza        Les souches de virus influenza de type A sont désignées selon le schéma suivant
A, influenza B et influenza C, qui se
distinguent par leur nucléoprotéines et                                 Numéro de
leur génome [1, 2]. Les épidémies an-                                    souche           Sous-type d‘hémagglutinine
                                                             Type
nuelles de grippe saisonnière sont
                                                                                                             Sous-type de
causées par les virus influenza des                                                                          neuraminidase
type A et B, alors que de nouveaux vi-
rus de type A peuvent être à l’origine                            A/Perth/16/2009(H3N2)
de pandémies, c’est-à-dire des épidé-
mies à l’échelle mondiale. Le virus in-
fluenza de type C apparaît de façon
                                               Lieu de découverte de la souche          Année
sporadique, surtout chez les adoles-                                                d’isolement                                          5
cents et cause une affection légère.
Office fédéral de la santé publique
                         Recommandations pour la vaccination contre la grippe

                         tions ponctuelles. Ceci explique que la     ment que les virus de type A. La fré-        hèrent aux récepteurs acide N-acétyl-
                         population soit de moins en moins im-       quence des mutations des virus in-           neuraminique de la cellule hôte et in-
                         mune contre ces virus constamment           fluenza de type C est encore plus            fectent la cellule par endocytose. Un
                         modifiés («dérivés») et que, en conju-      lente.                                       abaissement du pH à l’intérieur de la
                         gaison avec d’autres facteurs, elle soit                                                 cellule amène la membrane virale à fu-
                         touchée quasiment chaque hiver par          2.2. Transmission, multiplication            sionner avec l’endosome, et les com-
                         une épidémie de grippe saisonnière.              du virus et contagiosité                plexes ARN-nucléoprotéines ainsi libé-
                         La dérive antigénique implique donc         La grippe se transmet de personne            rés sont transportés vers le noyau cel-
                         que les vaccins antigrippaux soient         à personne, essentiellement par voie         lulaire, lieu de la transcription de tous
                         adaptés tous les ans aux propriétés         aérienne (aérogène), et plus précisé-        les segments du génome. L’assem-
                         des virus en circulation. La dérive s’ob-   ment par des gouttelettes sécrétées          blage des particules virales nouvelle-
                         serve chez tous les types (A, B et C)       par les voies respiratoires de per-          ment synthétisées se produit dans la
                         des virus influenza [14-18].                sonnes infectées, qui parviennent            membrane cellulaire, et leur libération
                         Quant au phénomène de la variation          par la toux, les éternuements ou la          de la cellule hôte est commandée par
                         antigénique, il n’est connu à ce jour       parole dans les muqueuses buccales,          la neuraminidase [2].
                         que chez les virus influenza de type A.     nasales ou oculaires de personnes            Contagiosité: En général, un adulte
                         S’il est beaucoup plus rare que celui       non infectées. Il s’agit de gouttelettes     infecté excrète le virus dès le jour
                         de la dérive antigénique, l’ampleur des     macroscopiques d’un diamètre supé-           précédant l’apparition des premiers
                         modifications dans le génome est net-       rieur à 5 µm, ce qui suppose une dis-        symptômes et reste contagieux jus-
                         tement plus importante. En général, la      tance d’un mètre au maximum entre            qu’au troisième ou cinquième jour
                         population ne présente aucune immu-         deux personnes. Une transmission par         (maximum septième) suivant cette ap-
                         nité, ou une immunité très réduite,         aérosols (particules infectieuses en         parition. Chez l’enfant, la phase infec-
                         face à ces nouveaux virus influenza de      suspension dans l’air ambiant d’un dia-      tieuse débute probablement plus tôt
                         type A, ce qui peut conduire à une épi-     mètre inférieur à 5 µm) est également        et peut durer jusqu’à 10 jours après
                         démie à l’échelle mondiale, c’est-à-dire    possible, notamment en présence              l’apparition des symptômes [33]. Les
                         une pandémie [8, 19, 20]. Une modi-         d’une hygrométrie assez basse, mais          personnes immunodéprimées peu-
                         fication fondamentale de l’une des          elle paraît globalement jouer un rôle        vent être contagieuses jusqu’à 21
                         deux glycoprotéines de surface donne        secondaire [25-29]. Selon des études,        jours après le début de la maladie [8].
        Septembre 2011

                         la plupart du temps naissance à un          le virus influenza semble ne pas être        Même des personnes infectées ne
                         nouveau sous-type, et ce, en principe,      transmis de la mère à l’enfant pendant       présentant pas ou peu de symptômes
                         sous l’action de deux mécanismes: 1)        la grossesse [30, 31].                       peuvent être contagieuses et trans-
                         par une mutation ponctuelle permet-         En outre, des personnes peuvent s’in-        mettre la maladie par simple éternue-
                         tant une adaptation à une espèce nou-       fecter avec les virus influenza par          ment. Chez les malades, c’est au dé-
                         velle. On parle alors de franchisse-        contact avec des gouttelettes de             but de l’affection que le risque de
                         ment de la barrière des espèces, à          sécrétion présentes sur une surface          contagion (contagiosité) est le plus im-
                         l’exemple de la transmission de l’ani-      contaminée. La transmission par              portant, particulièrement en présence
                         mal à l’homme, comme ce fut le cas          contact direct se fait par les mains,        de toux, car la charge virale («viral
                         lors de la pandémie A/H1N1 de 1918;         quand deux personnes se serrent la           load») dans les voies respiratoires est
                         2) par réassortiment (échange) de seg-      main, p. ex. Il y a transmission indi-       très élevée à ce moment-là [34]. Le
                         ments géniques entiers de deux ou           recte au contact d’objets tels que poi-      potentiel de contagion dépend de la
                         plusieurs souches virales, lors de l’in-    gnées de porte, couverts, jouets ou ar-      virulence de la souche virale en circu-
recommandations

                         fection d’une cellule hôte par diffé-       gent liquide (billets, pièces) contami-      lation, autrement dit de sa capacité
                         rents virus: la pandémie A/H2N2 de          nés par les sécrétions respiratoires         à déclencher des symptômes impor-
                         1957 était imputable à un tel réassorti-    d’une personne infectée, suivi d’un          tants, telles la toux, chez la personne
Directives et

                         ment, et de même en 1968 est apparu         contact avec les propres muqueuses           infectée [35], ainsi que de l’immunité
                         un nouveau sous-type d’influenza com-       buccales, nasales ou oculaires de            (acquise par maladie ou vaccination
                         posé du virus A/H2N2 provenant de           l’hôte [32, 33]. Les virus influenza         antérieure) de la population. Plus le vi-
                         l’homme et d’un sous-type (aviaire), le     peuvent rester infectieux plusieurs          rus a changé par mutation depuis l’an-
                         virus A/H3, associé à un sous-type N        heures sur une surface contaminée,           née précédente, moins l’immunité ac-
                         inconnu. Le virus A/H3N2 qui en est         surtout lorsque température et hygro-        quise par la vaccination ou une mala-
                         résulté fut à l’origine de la «grippe de    métrie sont basses [26]: jusqu’à             die antérieure est protectrice.
                         Hong Kong». Enfin, le virus de la grippe    48 heures sur une surface dure et
                         pandémique A/H1N1 de 2009 est né            lisse, 12 heures sur des textiles et du
                         de la recombinaison de deux souches         papier, et environ 5 minutes sur la
                         porcines, d’une souche aviaire et           main. Ils sont inactivés par les désin-
                                                                                                                  3. Clinique
                         d’une souche humaine. Il semble éga-        fectants usuels pour les mains; un la-
                         lement possible que des mutations           vage minutieux à l’eau et au savon           3.1. Symptômes, pathophysio-
                         ponctuelles dans le gène de l’hémag-        peut les éliminer en grande partie de la          logie et évolution clinique
                         glutinine ou des réassortiments aient       peau.                                        Une grippe évolue toujours de façon
                         lieu directement chez l’être humain et      Multiplication du virus: Les virus de        aiguë, avec des symptômes qui per-
                         conduisent à une pandémie [21-24].          la grippe pénètrent par inhalation dans      sistent de quelques jours à plusieurs
                         Les virus influenza de type B présen-       l’arbre respiratoire supérieur, où ils in-   semaines. Le temps d’incubation,
       6                 tent une variété génétique moindre et       fectent les cellules ciliées de l’épithé-    c’est-à-dire la période qui s’écoule
                         mutent deux ou trois fois plus rare-        lium. Grâce à l’hémagglutinine, ils ad-      entre l’infection et l’apparition des
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Recommandations pour la vaccination contre la grippe

premiers symptômes, varie de un à           conjonctivite et à un gonflement péri-      ranasales (sinusite), de la trachée (tra-
quatre jours (deux jours en moyenne).       orbital.                                    chéite, faux croup) et des bronches
L’éventail des manifestations pos-          Au bout de quelques heures s’ajou-          (bronchite). La maladie évolue parfois
sibles d’une infection par le virus de la   tent des symptômes respiratoires:           après quelques jours vers une inflam-
grippe est très large. L’infection peut     maux de gorge, enrouement, parfois          mation du tissu pulmonaire (pneumo-
suivre un cours parfaitement asympto-       un rhume, et typiquement une toux           nie). Ces complications au niveau
matique, dont la personne concernée         sèche. Les virus influenza infectent        des voies respiratoires peuvent être
ne s’apercevra pas. Des études séro-        tout d’abord les voies respiratoires su-    d’origine virale primaire (causées par
épidémiologiques ont montré que les         périeures (pharynx et nasopharynx),         les virus grippaux eux-mêmes) ou bac-
infections asymptomatiques sont fré-        où ils provoquent une réaction inflam-      térienne secondaire (dues à des bacté-
quentes pour tous les sous-types            matoire des cellules épithéliales respi-    ries proliférant dans le tissu lésé
d’influenza [34, 36, 37]. L’apparition de   ratoires, avec œdème de la muqueuse.        [surinfection]). Les pathogènes respon-
symptômes, respectivement leur in-          Contrairement aux infections par des        sables de ces pneumonies bacté-
tensité, dépend des propriétés intrin-      «virus de refroidissement» habituels,       riennes secondaires sont fréquem-
sèques du virus ainsi que de l’âge, de      les cellules épithéliales respiratoires     ment des staphylocoques, Strepto-
l’état de santé et du statut immuni-        sont détruites en cas d’infection par       coccus pneumoniae (pneumocoques)
taire de la personne infectée. Une évo-     des virus grippaux [39]. Une irritation     et Haemophilus influenzae. Au début
lution grave de la grippe doublée de        du larynx provoque parfois une toux         du XXe siècle, on a à tort imputé à ces
complications peut conduire à la mort       sèche persistante, non productive.          derniers, la grippe (virale). Les pneu-
et, en particulier chez les personnes       Souvent, les voies respiratoires infé-      monies virales primaires sont rares
âgées, des complications ou l’exacer-       rieures (entre larynx et bronches) sont     mais, non soignées, elles sont sou-
bation d’une pathologie latente peu-        atteintes après quelques jours, cau-        vent létales [48, 49].
vent se traduire par la perte de leur au-   sant une toux productive avec expec-        Dans de rares cas, les complications
tonomie habituelle. En général, il s’agit   torations. Une tachypnée peut appa-         de la grippe touchent également
toutefois d’une affection aiguë qui se      raître à cause de la fièvre et/ou avec      d’autres organes. Les atteintes inflam-
guérit spontanément.                        de la dyspnée et des douleurs thora-        matoires des muscles (myosite), du
S’agissant d’une évolution «clas-           ciques lors d’une infection des voies       cœur (myocardite ou péricardite) sui-
sique» de la grippe, les symptômes          respiratoires inférieures [12, 40-44].      vies d’une cardiomyopathie dilatative,

                                                                                                                                    Septembre 2011
généralisés peuvent apparaître de           Un gonflement des ganglions lympha-         d’un infarctus du myocarde ou d’un
manière si soudaine que de nom-             tiques cervicaux avant tout chez les        choc toxique peuvent survenir et se
breuses personnes touchées se sou-          enfants. Chez les jeunes enfants, des       révéler fatales [50, 51]. Parmi les com-
viennent du moment précis auquel la         symptômes gastro-intestinaux tels           plications neurologiques rares mais
maladie a débuté. Typiquement, l’in-        que douleurs abdominales, nausées,          sévères figurent en outre la ménin-
fection commence par un accès de            vomissements et diarrhées sont par-         gite, l’encéphalite, la myélite ainsi que
fièvre et des frissons, accompagnés         fois au premier plan [45-46].               la polyradiculonévrite de type syn-
d’un sentiment de malaise, d’asthé-         Le taux de multiplication des virus         drome de Guillain-Barré (SGB). Le
nie, de céphalées, de douleurs muscu-       dans l’organisme atteint son pa-            risque relatif de contracter un SGB est
laires et articulaires, de vertiges et de   roxysme au bout d’environ 48 heures         multiplié après une infection grippale,
perte d’appétit. Durant les premières       et peut persister jusqu’à une semaine.      toutefois il est rare et peut avoir pour
heures, la fièvre peut rapidement at-       Lorsque la grippe évolue sans compli-       origine d’autres agents infectieux [52-
teindre une température de 38 à 41 °C.      cations, les symptômes disparaissent        54]. Les enfants peuvent présenter

                                                                                                                                    recommandations
[8, 38]. Cette forte fièvre est surtout     le plus souvent après 3 à 7 jours, sa-      des convulsions fébriles; chez les per-
fréquente chez les personnes dont le        chant que la phase de convalescence,        sonnes âgées, la confusion mentale
système immunitaire est exposé à            accompagnée de toux et d’un état de         n’est pas rare. On compte au nombre
                                                                                                                                    Directives et

une souche grippale virulente et nou-       faiblesse générale, peut durer deux         des complications gastro-intestinales
velle pour lui, ce qui est souvent le cas   semaines ou davantage. La régénéra-         relativement rares l’appendicite ou la
chez les enfants. Bien que la fièvre ap-    tion des cellules épithéliales détruites    cholécystite, notamment chez les en-
paraisse plus rarement et soit plus         commence vers le cinquième jour et          fants. Ces complications surviennent
basse chez les personnes âgées, les         s’achève au bout de trois à quatre se-      avec un certain retard et sont proba-
prématurés et les personnes immuno-         maines [40].                                blement imputables à un gonflement
déficientes, la température corporelle      Si des complications sont en principe       des ganglions lymphatiques dans le
peut se maintenir à un niveau plus          possibles chez tout individu lors d’une     système lymphatique mésentérique.
élevé que la normale pendant plu-           affection grippale, leur probabilité aug-   L’administration d’acide acétylsalicy-
sieurs jours chez ces personnes. La         mente toutefois nettement chez les          lique en cas d’infection par le virus in-
fièvre dure en général trois jours, plus    personnes âgées, les nourrissons, les       fluenza peut provoquer chez l’enfant
rarement jusqu’à huit jours. Une bra-       femmes enceintes et les personnes           le rare syndrome de Reye [8, 12, 13,
dycardie relative, signe d’hypotension,     souffrant de maladies chroniques. Le        44, 45, 55, 56].
est une manifestation typique. Cer-         taux d’hospitalisation pour ces per-
tains patients font état aussi d’une        sonnes est de deux à cinq fois plus         3.2. Groupes exposés à un risque
gêne oculaire en vision latérale,           élevé que pour les jeunes adultes en             accru de complications
d’éblouissements, de photophobie, de        bonne santé [47]. Parmi les complica-       Parmi les groupes d’âge avec un risque
larmoiements et de sensations de brû-       tions les plus fréquentes figurent les      accru de complications en cas de
lure des yeux. L’examen révèle des          inflammations de l’oreille moyenne          grippe figurent les nourrissons (sur-       7
yeux brillants, associés parfois à une      (otite moyenne aiguë), des cavités pa-      tout durant les six premiers mois) et
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                         les personnes âgées (avant même             Une obésité morbide (IMC ≥ 40) a été         réaction en chaîne par polymérase en
                         leur 65e anniversaire). Chez les adultes    identifiée dans différentes études, du-      temps réel (de l’anglais Real-Time Po-
                         et les enfants atteints d’affections        rant la pandémie de 2009, comme              lymerase Chain Reaction, RT-PCR), im-
                         chroniques du cœur, des voies respi-        étant un facteur de risque de com-           munotests directs et indirects (p. ex.
                         ratoires, du métabolisme et du foie, de     plications. A cet égard toutefois, la        immunofluorescence). Ces méthodes
                         maladies neurologiques et musculo-          contribution d’autres facteurs alliés à      permettent une sous-typisation du vi-
                         squelettiques, d’insuffisance rénale,       un surpoids (maladies cardio-vascu-          rus. En outre, toute une série de tests
                         d’hémoglobinopathies, d’asplénie ou         laires, diabète et restriction de la fonc-   de détection rapide du virus de la
                         de troubles fonctionnels de la rate, la     tion pulmonaire) demeure en partie           grippe, disponibles dans le commerce
                         grippe est associée à une fréquence         floue [75, 76]. Le tabagisme est, en         ont été mis au point ces dernières an-
                         accrue de complications. De plus, une       raison de l’atteinte chronique de l’épi-     nées (résultats en moins de 30 min.).
                         infection par le virus influenza peut       thélium respiratoire, un facteur de          Leur sensibilité et leur spécificité sont
                         exacerber des problèmes de santé            risque indépendant d’évolutions sé-          cependant nettement moindres [81].
                         sous-jacents, en particulier un asthme      vères et de mortalité de la grippe [77].     Les tests sérologiques (détermination
                         bronchique, une broncho-pneumopa-                                                        du titre des anticorps) ne jouent un
                         thie chronique obstructive (BPCO), un       3.3. Diagnostic                              rôle que dans le cadre de recherches
                         emphysème pulmonaire, une insuffi-          Les symptômes d’une grippe, surtout          en vaccination et d’enquêtes épidé-
                         sance cardiaque, une maladie corona-        lorsque celle-ci évolue de manière peu       miologiques.
                         rienne ou un diabète. En outre, cer-        sévère et sans complications, ressem-
                         taines de ces affections chroniques         blent souvent aux symptômes déclen-
                         vont de pair avec une diminution – à        chés par des virus dits «de refroidis-
                         tout le moins partielle – des défenses      sement». C’est ce qui explique que
                                                                                                                  4. Epidémiologie
                         immunitaires [57, 58]. La fonction du       beaucoup de gens confondent les
                         système immunitaire diminue égale-          termes de grippe (= influenza) et de         4.1. Propagation des virus
                         ment avec l’âge [59]. Les patients          refroidissement, ce dernier pouvant               influenza dans le monde
                         souffrant d’une immunodéficience            être provoqué par une multitude de           L’influenza est largement répandue
                         congénitale ou acquise telle qu’une in-     virus. On en dénombre plus de 200            chez de nombreux mammifères et
                         fection au VIH, de maladies malignes        types, dont les adénovirus, les corona-      chez une grande partie des oiseaux.
        Septembre 2011

                         ou soumis à une thérapie immunosup-         virus, les virus coxsackie, les échovi-      La transmission, de même que des
                         pressive présentent un risque de com-       rus, les entérovirus, les métapneumo-        infections chroniques concernent de
                         plications sensiblement accru, et les       virus, les virus parainfluenza, les rhino-   nombreuses espèces aviaires toute
                         symptômes grippaux peuvent persis-          virus et les VRS (virus respiratoire         l’année. Certains virus franchissent les
                         ter longtemps [60-62]. Cela vaut aussi      syncytial). Les VRS apparaissent eux         barrières d’espèce de façon spora-
                         pour les prématurés durant leurs            aussi sous forme épidémique, surtout         dique, constituant ainsi un réservoir
                         deux premières années de vie.               à l’automne et au début de l’hiver, et       génétique inépuisable, ce qui – conju-
                         Les femmes subissent des transfor-          peuvent provoquer chez les nourris-          gué à la variabilité génétique – rend
                         mations importantes au niveau hormo-        sons des pneumonies parfois sévères.         impossible toute élimination ou éradi-
                         nal, physique et immunologique du-          Des bactéries telles que Mycoplasma          cation.
                         rant la grossesse et les premières se-      pneumoniae, les chlamydiae et Legio-         Chaque année, de 5 à 20% de la popu-
                         maines qui suivent l’accouchement.          nella pneumophila peuvent être à l’ori-      lation contracte la grippe. Selon l’Orga-
                         Leurs défenses immunitaires sont lé-        gine de syndromes de type grippaux.          nisation mondiale de la santé (OMS),
recommandations

                         gèrement diminuées, ce qui explique         Sans autre indication, le diagnostic         250 000 à 500 000 personnes meu-
                         que la grippe puisse prendre un carac-      clinique est en général difficile à po-      rent chaque année des suites de la
                         tère plus sévère, notamment durant          ser. La meilleure valeur prédictive po-      maladie [82].
Directives et

                         les deuxième et troisième trimestres.       sitive (probabilité) d’une affection grip-   Sous les tropiques, les virus influenza
                         Les femmes enceintes souffrant d’une        pale consiste en une combinaison des         circulent toute l’année de manière
                         maladie chronique sous-jacente (dia-        symptômes suivants: apparition sou-          sporadique ou sous forme de petites
                         bète, insuffisance cardiaque, maladie       daine, fièvre de plus de 38 °C et toux,      flambées, avec une tendance à la
                         rénale ou pulmonaire, immunosup-            en particulier durant une vague de           concentration des cas sur la saison la
                         pression, etc.) risquent de voir celle-ci   grippe [78-80].                              plus fraîche et/ou la période des pluies
                         s’exacerber [30, 63-65]. Au cours des       Diagnostic en laboratoire: Seuls des         [83]. Dans les régions au climat frais
                         pandémies de grippe de 1918, 1957 et        tests en laboratoire permettent de po-       ou tempéré, la grippe prend par contre
                         1968, on a observé une surmortalité         ser avec certitude le diagnostic d’in-       la forme d’épidémies saisonnières
                         chez les femmes enceintes [66, 67], et      fluenza. Toutefois, ils ne se révèlent       annuelles pendant les mois d’hiver.
                         les données suggérant qu’elles sont         nécessaires que si les patients sont         C’est habituellement la règle de dé-
                         nettement plus souvent sujettes à des       gravement malades en dehors d’une            cembre à mars dans l’hémisphère nord
                         complications quand elles contractent       épidémie ou s’ils sont à risque accru        et de juin à septembre dans l’hémi-
                         une grippe saisonnière se multiplient       de complications. Le prélèvement doit        sphère sud [29, 84, 85]. Cela tient à la
                         [68-70]. Même la pandémie de A/H1N1         se faire si possible dans les 48 heures      promiscuité, favorisée par la vie en
                         de 2009, pourtant relativement modé-        qui suivent l’apparition des symp-           commun dans des espaces clos du-
                         rée, a révélé un risque clairement ac-      tômes, au moyen d’un frottis nasal ou        rant la saison froide, ainsi qu’à la basse
                         cru chez des femmes enceintes en            pharyngé. Diverses méthodes sont             humidité de l’air qui y prédomine
       8                 bonne santé [71-75].                        utilisées en laboratoire spécialisé: iso-    et non seulement assèche les mu-
                                                                     lement du virus par culture cellulaire,      queuses buccales et nasales, mais en-
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Recommandations pour la vaccination contre la grippe

core stimule la capacité de survie et la     prépondérant dans la propagation de         Durant cette pandémie, les taux
transmission des virus [25, 29]. Du          la maladie. De par leurs contacts           d’hospitalisation et de létalité ont at-
printemps à l’automne, les affections        étroits avec d’autres personnes et leur     teint des valeurs un peu inférieures
grippales ne surviennent qu’à titre          conscience hygiénique encore insuffi-       à celles de 1958. En 1977, un virus
sporadique [10, 24-26, 86, 87]. En Eu-       samment aiguisée, ils connaissent l’in-     influenza du sous-type A/H1N1 qui
rope, la vague de grippe se propage          cidence de la grippe la plus élevée. Et     n’était plus en circulation depuis 1957
souvent d’ouest en est, à partir des         cela d’autant plus que les enfants,         s’est échappé selon toute probabilité
métropoles internationales qui sont          d’une façon générale, ont eu moins          d’un laboratoire chinois pour s’étendre
étroitement liés aux pays méridio-           souvent l’occasion d’être confrontés        rapidement à la planète via la Sibérie.
naux, vers les pays de l’Est [88]. La        aux virus influenza, d’où une moindre       Cette pandémie toucha surtout les
mobilité de la population et les moyens      possibilité de développer une immu-         moins de 20 ans, qui n’étaient pas im-
de transport jouent un rôle certain          nité partielle. Dans certaines institu-     munisés contre ce sous-type, sans
dans cette propagation [89]. Le pic de       tions collectives, telles que les jardins   toutefois causer une surmortalité no-
la vague de grippe est franchi la plu-       d’enfants, les écoles, les casernes,        table [23, 103-106]. Ce virus A/H1N1
part du temps en janvier ou février. Lo-     mais aussi les maisons de retraite et       de 1977 n’a pas pu non plus supplan-
calement, une épidémie dure de 6 à           les homes médicalisés, le taux de mor-      ter le virus saisonnier A/H3N2, et c’est
12 semaines.                                 bidité peut dépasser 50% [29, 93-95].       ainsi que les deux sous-types ont cir-
Elle peut être causée par un (sous-)         On parle de pandémie de grippe en           culé conjointement pendant 32 ans
type unique d’influenza A ou B, ou par       cas de transmission d’homme à               [23]. Un nouveau virus A/H1N1 parti
divers virus grippaux A et B en circula-     homme d’un virus influenza nouveau,         du Mexique a, lors de la pandémie de
tion concomitante [45,90,91]. Durant         contre lequel une grande partie de la       2009, évincé et remplacé les anciens
certaines saisons, l’épidémie est pro-       population n’est pas immunisée et           virus de la grippe saisonnière A/H1N1,
voquée en Europe par des types ou            lorsque ce virus se propage rapide-         mais le sous-type A/H3N2 reste en-
sous-types et souches différents de          ment dans le monde entier, même             core en circulation. Une fois de plus, la
ceux qui prévalent aux Etats-Unis ou         hors de la saison grippale normale.         pandémie de 2009 a surtout touché
dans l’Est asiatique. Parfois, deux          Souvent, mais pas toujours, les an-         des personnes jeunes, de moins de
vagues se suivent: la première est           ciennes souches virales saisonnières        52 ans, et la mortalité globale au sein
souvent imputable à un virus influenza       sont évincées par le virus pandémique,      de la population est restée très basse

                                                                                                                                      Septembre 2011
de type A, la seconde à un virus B [90].     qui prend leur place comme nouveau          dans la plupart des pays [74].
La question de savoir quel (sous-)type       virus saisonnier à la faveur d’une ou de    Grippe aviaire chez l’homme: Les
ou quelle souche circulera de façon          plusieurs vagues [24, 96]. Il y a déjà      sous-types H5, H7 et H9 des virus in-
épidémique durant le prochain hiver          eu, à intervalles irréguliers, des pandé-   fluenza A aviaires se sont transmis
dépend entre autres des modifications        mies dans les siècles passés. La pre-       dans certains cas des oiseaux aux
génétiques (par dérive antigénique)          mière à avoir été bien documentée           êtres humains, provoquant des mala-
survenues par rapport à l’année précé-       (sans doute du sous-type A/H3) s’est        dies de degrés de gravité divers. Ces
dente, de la contagiosité et de la viru-     propagée en 1889 de l’Asie au monde         virus pourraient être eux aussi à l’ori-
lence d’une souche influenza, ainsi          entier et a atteint l’Europe via la Rus-    gine d’une pandémie si, par une modi-
que de l’immunité spécifique à la            sie [22]. Au cours du XXe siècle, quatre    fication de leur génome, ils étaient ef-
souche virale au sein de la population.      pandémies de grippe sont apparues: la       ficacement transmissibles de l’homme
Par ailleurs, il semble que la réponse       plus sévère fut, en 1918 et 1919, la        à l’homme. A Hong Kong, plusieurs
précoce non spécifique du système            fameuse grippe espagnole, causée            cas de décès humains se sont pro-

                                                                                                                                      recommandations
immunitaire induise, par réactivité croi-    par un virus particulièrement virulent      duits en 1997, dont l’origine était un vi-
sée, une protection contre une infec-        du sous-type A/H1N1 et qui, en trois        rus grippal ne touchant jusque-là que
tion par d’autres souches grippales.         vagues d’envergure mondiale, provo-         les oiseaux, à savoir le sous-type
                                                                                                                                      Directives et

C’est pourquoi, à la fin de l’automne, il    qua la mort de 50 à 100 millions de         A/H5N1 [107-109]. Depuis, plusieurs
existe une espèce de «concurrence»           personnes, dont un grand nombre de          centaines de personnes sont décé-
entre les différentes souches virales,       jeunes adultes [24, 97-99]. En Suisse,      dées de telles infections, notamment
la propagation de l’une pouvant entra-       on estime que sur la population totale      en Chine, au Vietnam, en Indonésie
ver la circulation d’une autre [92].         de l’époque, soit 3,9 millions, 600 000     et en Egypte. Pour l’instant, on n’a
L’évolution d’une vague de grippe,           à un million de personnes ont               observé que quelques cas isolés
la proportion des personnes infectées,       contracté la maladie et que 20 000 à        de transmission directe d’homme à
le degré de gravité des symptômes            25 000 en sont mortes [100-102],            homme [37]. Le site internet de l’OMS
dans les différents groupes d’âge et         ce qui correspond à un taux de létalité     http://www.who.int/csr/disease/avian
le nombre des décès peuvent varier           de 2 à 4%. La pandémie A/H2N2 de            _influenza/en/ livre des informations
considérablement d’une année à               1957/1958 (dite grippe asiatique) a         sur les cas de maladie et de décès
l’autre, suivant la contagiosité et la vi-   touché plus de 20% de la population         confirmés par laboratoire. En 2003,
rulence des souches influenza en cir-        mondiale, 0,9 à 1% des malades ont          lors d’une flambée du virus influenza
culation, ainsi que l’immunité prédo-        dû être hospitalisés, et on estime que      A/H7N7 parmi des volailles aux Pays-
minant au sein de la population. Du-         le taux de létalité a atteint 0,4%. Ce      Bas, des dizaines de personnes sont
rant une saison grippale, la proportion      virus A/H2N2 a été évincé à peine           tombées malades, et un vétérinaire
des personnes touchées se situe              onze ans plus tard, lors de la pandémie     impliqué est décédé [110]. En 1999,
entre 5 et 10% pour les adultes et           de 1968/1969, par un virus A/H3N2           2003 et 2007, un virus H9N2 a causé à
entre 20 et 30% pour les enfants. Les        (grippe de Hong Kong), sous-type qui        Hong Kong des affections grippales           9
enfants d’âge scolaire jouent un rôle        circule depuis dans le monde entier.        chez des enfants [111, 112].
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                         Recommandations pour la vaccination contre la grippe

                         4.2. Surveillance de l’influenza              tions (SARI) dues à la grippe. Dans la     tion de la suspicion d’influenza (en an-
                         L’activité grippale dans le monde est         région Europe de l’OMS, pendant la         glais influenza-like illness, ILI): une
                         surveillée par l’OMS depuis 1948. Ses         saison de la grippe, les Etats membres     forte fièvre d’apparition généralement
                         quatre centres de référence de                (53, dont la Suisse) annoncent leurs       soudaine (>38 °C) accompagnée de
                         l’Influenza d’Atlanta, Londres, Mel-          données épidémiologiques et virolo-        toux ou de maux de gorge. L’OFSP re-
                         bourne et Tokyo identifient de nou-           giques chaque semaine au système           çoit ainsi, chaque saison grippale, de
                         velles souches virales et fournissent         Europe Influenza Surveillance Euro-        3000 à 10 000 déclarations d’ILI, extra-
                         les virus de référence en vue de la vac-      Flu de l’OMS. On peut suivre l’évolu-      pole ce chiffre à la population suisse
                         cination contre la grippe. Il existe des      tion de la situation grippale en Europe    totale et publie les courbes d’influenza
                         Centres Nationaux de Référence de             sur le site internet http://www.euro-      à un rythme hebdomadaire (cf. figure
                         l’Influenza agréés par l’OMS dans             flu.org/.                                  2). Le début et la fin d’une vague de
                         83 pays, dont la Suisse, qui, au sein du      En Suisse, de 100 à 200 cabinets mé-       grippe en Suisse sont définis par le
                         réseau mondial de surveillance virolo-        dicaux de premier recours répartis         seuil épidémique national, calculé tous
                         gique, échangent leurs connaissances          dans tout le pays participent volontai-    les ans à partir des données épidémio-
                         et les échantillons viraux qu’ils ont iso-    rement au système de déclaration           logiques des neuf dernières saisons.
                         lés. Dans de nombreux pays situés             Sentinella créé en 1986, qui enre-         Les médecins du système Sentinella
                         sous des latitudes fraîches et tempé-         gistre le nombre de cas hebdoma-           envoient par ailleurs selon un plan
                         rées, on recense avec des systèmes            daires de suspicion de grippe et le        d’échantillonnage des frottis nasopha-
                         de déclaration sentinelles le nombre          nombre total des consultations. Les        ryngés prélevés chez des patients
                         extrapolé des consultations médicales         médecins qui y sont associés décla-        avec suspicion de grippe au Centre
                         (ILI) et, en partie, celui des hospitalisa-   rent les patients répondant à la défini-   National de Référence de l’Influenza

                         Figure 2
                         Vue synoptique des saisons d’influenza recensées dans le système de déclaration suisse Sentinella pour la période
                         1995/1996 à 2010/2011
        Septembre 2011
recommandations
Directives et

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