Rendre la police judiciaire à la justice - Communiqué de Droit et Démocratie
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Rendre la police judiciaire à la justice Communiqué de Droit et Démocratie La multiplication récente des affaires révélant de graves dysfonctionnements de certains services de police judiciaire (PJ) rend de plus en plus indispensable une réforme sur l’exercice effectif des pouvoirs de direction, de surveillance et de contrôle de la PJ, pourtant prévus par le code de procédure pénale. A ce constat inquiétant qui menace l’efficacité des enquêtes et compromet l’indépendance effective de l’institution judiciaire, Droit et Démocratie répond par trois propositions : 1) détacher les unités de police judiciaire auprès des magistrats chargés des enquêtes Nous suggérons de séparer les services de police judiciaire à compétence judiciaire exclusive des services à vocation de police administrative, en renforçant la réalité du contrôle de l’autorité judiciaire notamment par le détachement de ces unités. A cet effet, nous proposons une mise à disposition, au niveau des cours d’appel, d’officiers de police judiciaire spécialisés en PJ. Ceux-ci seraient placés sous le contrôle d’un avocat général désigné par le procureur général et d’un conseiller désigné par le président de la chambre de l’instruction. Ces magistrats auraient notamment un « droit de tirage » sur les effectifs ainsi affectés. 2) supprimer les services de direction de la police judiciaire des directions générales de la police nationale et de la gendarmerie nationale L’une des conséquences de la réforme envisagée, serait, par souci de cohérence, la suppression des services de directions de la police judiciaire de la police nationale et de la gendarmerie nationale, devenus obsolètes. 3) améliorer le contrôle et l’efficacité des actes de police judiciaire en renforçant le rôle des magistrats - Créer une commission mixte « Intérieur/Justice », présidée par un magistrat de la Cour de Cassation, qui déterminerait le nombre de policiers affectés à chaque ressort et veillerait à leur avancement et à leur droit à réintégrer leur corps d’origine. - Judiciariser les inspections : les IGPN et IGGN1 devraient, si un OPJ ou un APJ2 est mis en cause, comprendre une section dirigée par un magistrat ainsi que plusieurs magistrats détachés comme inspecteurs (élargissement de l’art. 15-2 du CPP, introduit par la loi du 15 juin 2000, mais appliqué seulement 3 fois en 10 ans !). Dans l’attente de cette réforme consistant à placer la Police Judiciaire sous l’autorité réelle de la Justice, il conviendrait de remettre en cause le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’Intérieur, qui accroit encore le poids spécifique de ce ministère et affaiblit corrélativement le ministère de la Justice ; De plus, il prive les magistrats du faible moyen dont ils disposaient de pouvoir choisir utilement entre la gendarmerie et la police le service le plus opérationnel, en fonction de la nature de l’affaire, voire de dessaisir l’une au profit de l’autre, en cas de besoin. Contact et coordonnées : président Ribs ? 1 Inspection générale de la police nationale / Inspection générale de la gendarmerie nationale 2 Officier de police judiciaire / Agent de police judiciaire
2 Annexe1 – les préconisations les plus récentes : a) François Hollande, lettre à l'USM du 14 avril 2012 "Les liens entre autorité judiciaire et police doivent être revus. Aujourd'hui les moyens, les possibilités d'enquête sont entre les mains du ministère de l'Intérieur qui a sous sa direction les services de police et de gendarmerie (...) Il faut préserver l'impartialité des enquêteurs de police judiciaire en les plaçant sous l'autorité fonctionnelle unique des procureurs et des juges d'instruction lorsqu'ils mènent des enquêtes judiciaires". b) P.S. Forum des idées. Justice.14 mars 2011 "Nous garantirons l'autorité des magistrats sur la police judiciaire. Les magistrats en charge des enquêtes doivent avoir les moyens d'exercer un réel pouvoir d'impulsion et de direction sur la police judiciaire. Pendant la durée de l'enquête, les services de police judiciaire doivent être placés sous l'autorité fonctionnelle exclusive du magistrat chargé de l'enquête ». c) Terra Nova, « La Justice, un pouvoir de la démocratie ». Instituer un Procureur général de la République, situé à l’interface entre le pouvoir politique et le pouvoir judiciaire qui « permettrait que l’effectivité de la direction, de la surveillance et du contrôle de la police judiciaire par le parquet, qui répond à des exigences constitutionnelles ne soit plus tributaire des rapports de force au sein du gouvernement, ni de l’arbitrage incertain du Président de la République » (p.46 -48). « Le Procureur Général de la République … veille à l’impartialité des enquêtes pénales et au respect des dispositions du code de procédure pénale relatives à la direction de la police judiciaire » (p.49) d) Club Droits, Justice et Sécurité – « Manifeste pour la Justice ». - « Sans remettre en cause le rattachement de la police au ministère de l’Intérieur, solution lourde et surtout sans perspective proche, il serait judicieux que le directeur de la police judiciaire soit un magistrat nommé par l’exécutif sur avis conforme du CSM », comme ce fut le cas pour la gendarmerie (p.42), avec une double évaluation correspondant à la dualité de ses fonctions administratives et d’auxiliaire de justice (p.43) ; - « Interdire la transmission de toute pièce de police judiciaire au Ministre de l’Intérieur dans une affaire en cours’ ». (p. 67 § 9°) ;
3 - « Préserver l’impartialité des enquêteurs de police judiciaire en les plaçant sous l’autorité fonctionnelle unique des procureurs ou des juges d’instruction lorsqu’ils mènent de enquêtes judiciaires ». (p.67 §10°) ; - « Imposer … le respect des règles déontologiques par les services de police et de gendarmerie et renforcer les pouvoirs », à cet égard, du défenseur des droits. (p.220) e) Syndicat de la Magistrature « Pour une révolution judiciaire » - Elections 2012 – Le projet du Syndicat de la Magistrature Une police vraiment judiciaire : Constituer des unités de police judiciaire rattachées à chaque juridiction et placées sous l’autorité fonctionnelle de l’autorité judiciaire. f) Union syndicale des magistrats. Congrès 19 octobre 2012 « De longue date, nous demandons un meilleur contrôle fonctionnel de l’autorité judiciaire sur la police judiciaire ».
4 Annexe 2 – les textes en vigueur : a) Le Code de Procédure Pénale art. 12 CPP : « La Police Judiciaire est exercée sous la direction du Procureur de la République ». art. 13 CPP : « Elle est placée sous la surveillance du Procureur Général et le contrôle de la Chambre de l’instruction dans chaque Cour d’appel ». art. 14 CPP : « … lorsqu’une information est ouverte, la Police Judiciaire exécute les délégations des juridictions d’instruction et défère à leur réquisition ». art.16 CPP : « Le Procureur Général habilite les Officiers de Police Judiciaire et peut leur retirer cette habilitation ». art. 224, 225, 229 CPP : « Modalités de contrôle par la Chambre de l’instruction ». b) D. 18 mars 1986 (Code de déontologie de la police nationale) art. 4 : « Sous réserve des règles posées par le code de procédure pénale en ce qui concerne les missions de police judiciaire, la police nationale est placée sous l’autorité du ministre de l’intérieur ». art. 19 : « Outre le contrôle de la chambre de l’instruction, qui s’impose à eux lorsqu’ils accomplissent des actes de police judiciaire, les personnels de la police nationale et les autorités administratives qui les commandent sont soumis au contrôle hiérarchique ». c) La Constitution : art. 64 – indépendance de l’autorité judiciaire (toujours garantie par le Président de la République)
5 Annexe 3 les prises de position sur la réalité de la police judiciaire: a) Les commentaires du « manifeste pour la justice » (Club Droits, Justice et Sécurités) Janvier 2012 « Les relations entre justice et police sont caractérisées par un caractère de dépendance quasi physique de la 1ère vis-à-vis de la seconde ... Les fonctionnaires de police sont rattachés au Ministre de l’intérieur qui est leur véritable organisme de commandement, et d’où dépend l’évolution de leur carrière ». (p. 42) « … on contraint les policiers à un exercice singulier de schizophrénie consistant à être soumis à un double pouvoir, celui de leur administration d’origine et celui des magistrats ». (eod.loc.) « L’indépendance des magistrats et notamment des juges d’instruction ne sert à rien si ceux-ci ne peuvent s’appuyer sur des enquêteurs eux-mêmes impartiaux » (p.62) b) Commentaires de « La justice, un pouvoir de la démocratie ». Terra Nova (Févr. 2011) « Dans la situation où l’autorité du Parquet sur la Police Judiciaire n’est pas concrètement, pas suffisamment assurée, toutes les dérives sont possibles … (le nombre de gardes à vue a pu exploser sans que le Parquet n’ait pu y faire quoique ce soit) » (p.44) c) Mme Mireille Delmas-Marty (commentaire sur l’arrêt Moulin c/France de la CEDH) « Les réformes successives ont entraîné un déplacement des pouvoirs vers la police et le parquet … Quand on met bout à bout ces petites réformes ponctuelles, le panorama est assez clair : renforcement systématique du pouvoir de la police, marginalisation des juges ». (cité par Terra Nova p. 45-46). d) Christophe Regnard, président de l'USM, 19 oct. 2012 "L'indépendance des juges, celle des procureurs dans la conduite de leurs enquêtes, que nous revendiquons, ne peut avoir de sens que si les services à qui ils confient les enquêtes sont eux- mêmes indépendants du pouvoir en place". e) S.M. (2ème congrès- novembre 1969) "L'indépendance de la justice et les libertés individuelles ne pourront être garanties sans une police judiciaire qui soit directement rattachée aux autorités judiciaires".
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