Retour à la vie d'avant? - ATE Association transports et ...
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Retour à
la vie d’avant?
Meilleure qualité de l’air, boom
du vélo, bureau sur le balcon:
la crise du coronavirus a aussi
eu ses bons côtés. Pour que
ces effets ne restent pas
temporaires, nous devons
maintenant prendre des déci-
sions judicieuses. Dans notre
dossier, nous abordons des
questions urgentes sur la
mobilité dans le contexte de
la crise et nous nous interro-
geons sur la meilleure manière
d’en tirer des enseignements.
© Fabian Lütolf/setrunners.ch
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ATE MAGAZINE 3/20 19
DOSSIER
COMMENTAIRE
À l’aube d’une transformation
E n quelques jours, la crise du coronavirus a et piétonnes au lieu d’élargir les autoroutes, valoriser les espaces
© ATE
bouleversé notre système social et changé de vie et de détente au lieu de créer des zones de stationnement
notre quotidien en profondeur. Dans un premier désertiques.
temps, la politique sanitaire était au cœur des D’autres mesures, telles que la réduction du trafic ou les zones
préoccupations, mais les questions d’économie de rencontre, contribuent à rendre les centres plus vivants et à
et de politique sociale ont désormais pris le soutenir les commerces locaux. En entreprise, les mesures de pro-
dessus. Pour limiter les pertes économiques, tection du climat doivent devenir la norme: temps et lieu de travail
les pouvoirs publics ont dû débourser beaucoup flexibles, obligation d’adapter la flotte pour ne plus émettre de CO2.
d’argent et ils devront en débourser encore pour
surmonter la crise climatique, qui ne peut pas Tirer les leçons de la crise
être différée: la production d’énergies renou- Au plus fort de la crise du coronavirus, la situation a été prise au
velables doit être massivement développée sérieux, et les mesures comme les interdictions ont été très bien
notamment pour que les voitures électriques acceptées. Or certaines mesures, appliquées entre autres à la
fonctionnent sans énergie fossile, et des infras- mobilité, ont prouvé qu’elles étaient réalisables et peuvent être
tructures ferroviaires sont nécessaires pour utilisées pour lutter contre la crise climatique.
Stéphanie Penher est respon- remplacer le trafic aérien – à l’origine d’un cin- Pour cette crise, le confinement n’est pas une solution. Il faut
sable de la politique des trans- quième des émissions de CO2 de la Suisse! – par une transformation.
ports et de la communication à
des lignes à grande vitesse. L’expérience des dernières semaines a montré que le travail à
l’ATE Suisse.
domicile permet de réduire le trafic pendulaire et le nombre des
Penser à long terme places de travail dans le centre des localités, la vidéoconférence
Après le premier allègement des mesures, les magasins de jar- évite des trajets inutiles, et les déplacements indispensables pour
dinage et de bricolage ont été pris d’assaut. Que se passera-t-il faire les courses peuvent être regroupés de manière à réduire le
dans les aéroports? Aujourd’hui, nous devons absolument prendre trafi .
les bonnes décisions pour éviter que les émissions de CO2 n’aug- Cette expérience a montré qu’il est agréable de faire du vélo ou
mentent après la crise, comme lors des précédentes crises écono- de se promener dans le quartier et que cet environnement – valori-
miques. Car il ne faut pas se faire d’illusions: la baisse des émis- sé par la réduction du trafic et la création d’espaces verts – offre de
sions due à la pandémie est passagère. Une seule chose est sûre: belles possibilités pour se détendre. En bref, il y a des domaines
nos investissements auront un effet longtemps après la crise. Nous dans lesquels il ne faut pas reprendre nos vieilles habitudes.
aligner aujourd’hui sur les objectifs de protection du climat nous
permettra demain de vaincre la crise climatique. C’est aussi vrai
pour les infrastructures de transports: développer le rail au lieu
de créer des pistes d’atterrissage, aménager des voies cyclables
Soutenez le changement
Nous préparons aujourd’hui les années et les siècles à venir. L’ATE lutte contre les obstacles
au processus de transformation qui nous permettra de surmonter la crise climatique. Luttez à
nos côtés en faisant un don! Un grand merci.
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Les milliards du Corona
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©Peter Herzig
DOSSIER
Un ciel sans traînées de condensation: la réduction drastique du trafic aérien de ces derniers
mois a des effets positifs sur l’être humain et l’environnement. Après la crise, des mesures
de protection du climat doivent impérativement être mises en œuvre.
Quand le ciel respire
Par Yves Chatton Les journées ensoleillées du printemps ont dévoilé un spectacle
inouï, méconnu des plus jeunes générations: un ciel bleu sans
trainées de condensation. Et après la crise? Si les autorités ne
veulent pas amorcer le changement, nous devons nous en charger.
C e 21 avril à 15 heures, moins de dix
avions survolent la Suisse. En Eu-
rope, on comptera quelque 4000 avions
climatique. Contrairement aux maladies,
aucun vaccin ou médicament ne permet
de lutter contre ses effets. Et l’impact sur
matique concrète. Le Parlement a encore
l’occasion de faire un premier pas dans la
bonne direction avec l’introduction d’une
dans le ciel ce jour-là, soit 87% de moins les générations futures sera irrémédiable. taxe incitative sur les billets d’avion, ac-
que l’année passée. Cette chute spectacu- tuellement débattue dans le cadre de la ré-
laire du trafic aérien en raison de la crise L’autre tempête vision de la loi sur le CO2. Bien qu’encou-
sanitaire s’accompagne de nombreux Malgré les évidences scientifiques, les au- rageante, cette mesure n’est pas suffisante.
changements bénéfiques pour l’être hu- torités continuent de prendre cette me-
main comme pour la nature. Et si nous nace à la légère. Début mai, le Parlement
saisissions cette opportunité pour re- a décidé de soutenir le secteur aérien avec
Les objectifs climatiques ne seront
mettre en question l’avenir de ce secteur? un crédit d’engagement de 1,875 mil- pas atteints sans une réduction
liard de francs, dont 1,275 milliard pour
Le chant des oiseaux garantir des prêts bancaires en faveur massive dans le secteur aérien.
Les riverains des aéroports suisses l’au- de compagnies aériennes suisses, sans
ront remarqué: le boucan du trafic aé- contrepartie écologique. L’ATE s’engagera ces prochaines semaines
rien – un avion toutes les trois minutes à L’ATE regrette fortement que l’enjeu pour corriger le tir sur le plan politique.
Genève – a laissé sa place à un répit bon climatique ait été balayé. Avec 45 autres Le remède passera aussi par une
pour la santé. C’est une amélioration in- organisations et partis politiques, elle modification des comportements indi-
contestable de la qualité de vie pour les avait demandé au Conseil fédéral, dans viduels en matière de mobilité. Les solu-
67 000 personnes qui sont touchées par une lettre ouverte, de conditionner tout tions existent et nous les connaissons.
les nuisances sonores des avions durant soutien public à des objectifs clairs en Que voulons-nous pour notre avenir;
la journée (et 100 000 durant la nuit!). matière de politique climatique, notam- retrouver et alimenter la croissance effré-
L’arrêt provisoire du trafic aérien est ment en favorisant une transition des née du trafic aérien ou nous orienter vers
aussi bénéfique pour le climat. En Suisse, passager·ères et des emplois liés vers des les alternatives respectueuses de l’envi-
l’aviation est à l’origine de plus de 20% de secteurs plus durables. ronnement? Nos choix contribueront à
l’impact climatique d’origine humaine éviter que le ciel bleu ne devienne gris.
(les explications d’Anja Kollmuss en pages Pas de retour à l’anormal
Yves Chatton est chargé de campagnes dans le
10 et 11). Sans une réduction massive dans Il est temps pour l’aviation de s’engager
domaine du transport aérien.
ce secteur, nous ne parviendrons pas à dans la transition que de nombreux autres
atteindre les objectifs climatiques. secteurs économiques ont amorcée de- Le site internet de l’ATE vient d’être complété avec
En parallèle à la crise actuelle, une puis longtemps. Jusqu’à présent, ce sec- les informations détaillées et les références
autre tempête fait rage: le changement teur n’a été soumis à aucune mesure cli- scientifiques: www.ate.ch/aviation
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DOSSIER
Concentration d’oxydes d’azote entre mars-avril 2019 et mars-avril 2020: le confinement
a montré qu’une diminution du trafic routier a un impact positif sur la qualité de l’air.
En Suisse, ce sont surtout les vieilles voitures diesel qui émettent trop de polluants.
Moins de trafic, moins de pollution
Par Martin Winder Dans le monde entier, l’activité industrielle et le trafic ont
nettement reculé en raison des mesures prises contre la
pandémie de coronavirus. Cela a également eu un effet
positif, hélas limité dans le temps, sur la pollution de l’air.
On le mesure en Suisse aussi.
D ébut avril, plusieurs médias ont rap-
porté que dans la ville de Jalandhar,
en Inde, l’air est à nouveau si clair que,
L’impact du diesel…
Les principales responsables sont les
nombreuses voitures diesel répondant
… et celui de la météo
Les statistiques de l’Office fédéral des
routes traduisent un net recul du trafic
pour la première fois depuis des décen- aux normes antipollution Euro 6b et an- sur les routes nationales après le confi-
nies, on aperçoit l’Himalaya à 200 ki- térieures. Si, après le scandale du die- nement. Sur l’autoroute du Gothard, cer-
lomètres de là. Les mesures pour en- sel de 2015, les tests antipollution sont tains jours d’avril, le trafic a reculé de
90% par rapport à avril 2019! Sur l’A1
aussi, à la hauteur de Würenlos, il a bais-
Pour que la qualité de l’air s’améliore durablement en sé de plus de 30% par rapport à l’an pré-
Suisse, il faudrait retirer de la circulation les véhicules cédent (voir le graphique en page 5).
Il n’est donc pas étonnant que les don-
émettant trop de polluants. nées de l’Office fédéral de l’environne-
ment refl tent elles aussi une pollution
de l’air bien moindre cette année. Mais
diguer la propagation du coronavirus devenus plus sévères pour les voitures cette baisse n’est pas due qu’au confine-
influencent la qualité de l’air: grâce à la neuves, les voitures déjà en circulation ment. Selon les spécialistes de la pollu-
réduction massive du trafic et à l’arrêt ont pu continuer de rouler en Suisse tion atmosphérique du Laboratoire fédé-
des usines, les émissions d’oxydes d’azote malgré leur excès d’émissions pol- ral d’essai des matériaux et de recherche
et de particules fines ont fortement recu- luantes. Il arrive aussi que les filtres à (Empa), les chiffres actuels sont égale-
lé. La qualité de l’air s’est nettement amé- particules diesel tombent en panne sans ment dus à la météo – aux températures
liorée surtout dans les régions très pol- qu’on ne le remarque ou qu’ils soient dé- douces du début d’année et au vent abon-
luées du monde. libérément retirés. Lors de ses contrôles, dant de la deuxième moitié de mars. Le
L’air étant généralement moins pol- la police décèle régulièrement des ma- temps qu’il fait influence beaucoup la
lué en Suisse qu’en Chine ou en Inde, nipulations du dispositif antipollution manière dont les polluants atmosphé-
on ne peut pas noter une amélioration sur des camions dont les propriétaires riques sont répartis, transformés chimi-
de même ampleur. Toutefois, même en ont voulu réduire leurs coûts d’exploi- quement ou lavés par la pluie.
Suisse, le niveau de pollution atmosphé- tation. Tout cela fait qu’il n’est pas rare
rique est régulièrement trop haut. Par les que la pollution de l’air, en Suisse aus- Sur les axes fréquentés
oxydes d’azote, les particules fines et, in- si, atteigne des niveaux nocifs pour la Pour détecter l’impact du confinement
directement, l’ozone, le trafic contribue santé près des lieux où la circulation est aussi rapidement que possible, l’Em-
largement à cette pollution. dense. pa utilise un modèle statistique décri-
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© ATE/Nelly Jaggi
DOSSIER
© European Space Agency, www.esa.int
Des vélos partout: la petite reine est le moyen de transport du moment. Une
étude montre qu’en Suisse, nous avons roulé près de trois fois plus à vélo en
avril qu’au cours des mois précédents. Une tendance qu’on aimerait voir durer!
vant l’influence de la météo sur l’expo-
sition aux polluants atmosphériques. Essor cycliste en Suisse
«Avec ce modèle, nous pouvons prédire
la concentration de polluants atmosphé- Moyen de déplacement pour le travail et les loisirs ou équipement
riques attendue dans telle ou telle situa-
sportif, le vélo a connu un grand essor pendant la crise du coronavirus.
tion météorologique dans des condi-
tions normales. Les écarts par rapport Une tendance que confirment des études ainsi que la forte demande en
à ces estimations modélisées nous per- pièces de rechange.
mettent de démontrer, par la baisse des
émissions de polluants atmosphériques,
les changements qui sont intervenus du-
rant le confinement», explique Christoph
Hüglin, de l’Empa.
U ne étude de l’EPFZ confirme une per-
ception subjective: en ce moment, le
vélo fait de plus en plus d’adeptes. Deux
Velosuisse, l’Association suisse des four-
nisseurs de deux-roues: «Plusieurs impor-
tateurs ont annoncé une augmentation
Grâce à ce modèle, il est apparu que raisons au moins l’expliquent. D’une notable de la vente de pièces de rechange.
les concentrations d’oxydes d’azote ont part, ce véhicule permet de garder facile- J’ai aussi été informé que, grâce aux répa-
fortement baissé près des lieux où le ment la distance physique recommandée rations, de nombreux magasins spéciali-
trafic est dense. «Des mesures réalisées entre deux personnes. D’autre part, le sés ont pu compenser les pertes subies par
aux stations de Berne-Bollwerk et de temps exceptionnellement sec et doux de la baisse de la quantité de vélos vendus.»
César-Roux à Lausanne ont montré que mars et avril invitait à se mettre en selle. Selon Martin Platter, la forte demande de
les concentrations d’oxydes d’azote ont Peu importe la météo, les chiffres pneus de 26 pouces – pratiquement tom-
reculé de près de 45% depuis le 16 mars», sont impressionnants: les Helvètes ont bés en désuétude aujourd’hui – révèle que
poursuit le chercheur. Dans les stations fait presque trois fois plus de vélo que les beaucoup de gens remettent des modèles
de mesures situées en campagne, en re- mois précédents, bien que les distances anciens en état de rouler.
vanche, on n’a noté aucun impact de la parcourues aient fortement diminué en Chez Velosuisse, la question de savoir
baisse du trafic sur ces concentrations. raison du semi-confinement. si cette tendance va perdurer divise, mais
Les chiffres reposent sur les don- Martin Platter se montre optimiste: «J’y
Et à long terme? nées de mouvement de plus de mille crois, déjà parce que le trafic automobile
Toutefois, il s’agit là d’un effet à court volontaires qui avaient déjà utilisé une est saturé dans les villes et les agglomé-
terme, limité à la durée du confinement. application pour enregistrer leurs tra- rations. Parmi les personnes qui se sont
Pour que la qualité de l’air s’améliore du- jets quotidiens entre septembre 2019 et mises au vélo par nécessité et en raison
rablement en Suisse, il faudrait retirer de janvier 2020, dans le cadre du projet de des règles sanitaires, beaucoup en garde-
la circulation les véhicules émettant trop recherche «Comportement en matière de ront l’habitude.»
de polluants. Une réduction durable du mobilité en Suisse» (Mobis). Pour visua- Les résultats d’une enquête menée
trafic routier motorisé et la généralisa- liser l’impact de la crise du coronavirus par l’association Transports et environ-
tion des véhicules électriques seraient sur la vie de tous les jours et sur la mobi- nement autrichienne sont également
particulièrement efficaces. D’une ma- lité en Suisse, l’EPFZ et l’Université de optimistes: un quart des 2 500 personnes
nière ou d’une autre, ces mesures sont Bâle ont demandé aux personnes ayant interrogées souhaite utiliser plus, voire
nécessaires pour ralentir le réchauffe- participé à l’étude Mobis de réactiver beaucoup plus souvent le vélo après la
ment climatique. Et contrairement au le traceur GPS après l’instauration du pandémie. Pour que cet essor se perpétue,
confinement, elles ont un impact positif confinement partiel. il est urgent d’investir davantage dans les
durable sur la qualité de l’air. infrastructures. Nous avons besoin de
Davantage de réparations pistes cyclables sûres et de qualité.
L’essor du vélo se voit également dans
Nelly Jaggi
Martin Winder est responsable de projets en l’envol des demandes de réparations,
politique des transports à l’ATE. ainsi que le confirme Martin Platter de
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© Katrina Sulkova/CTK Photo/Alarmy
DOSSIER
Des failles dans la loi de transition: l’objectif de 95 g de CO2/km
pour les voitures neuves ne s’appliquera qu’à partir de 2022 au
lieu de 2021. On risque ainsi de diluer la seule mesure visant à
réduire le CO2 dans le secteur des transports.
Voitures neuves: objectifs menacés
Par Luc Leumann Dans l’ordonnance sur le CO2 en consultation, le Conseil fédéral
veut édulcorer les objectifs climatiques applicables aux voitures
neuves. Les importateurs font valoir la crise du coronavirus –
un argument qui ne résiste pas à l’analyse.
E n mai, le Conseil fédéral a fait savoir
qu’il entendait assouplir les objec-
tifs CO2 applicables aux voitures neuves
sur ses promesses d’avant la votation sur
la stratégie énergétique 2050.
Les agents des mesures au rabais
Dans le quotidien «Blick» du 3 mai, au-
to-suisse menaçait d’utiliser davantage
par rapport à ceux de l’UE. Suite au re- Un pseudo-problème encore une autre faille législative au cas
tard de la nouvelle loi sur le CO2, il a mis
Bien que la décision du Conseil fédéral où le monde politique resterait sourd à
en consultation une révision de l’ordon-
porte sur les années 2021 et 2022, l’asso- ses appels à l’aide: «Il est possible qu’il ne
nance CO2. Le Conseil fédéral y contre-ciation des importateurs d’automobiles reste plus assez de voitures pour le mar-
dit ses objectifs climatiques à long terme,
auto-suisse a déclaré explicitement à la ché suisse et qu’elles soient importées
et ce, une fois de plus dans le domaineradio suisse alémanique SRF que cette six mois plus tard comme occasions bon
des transports. mesure était dictée par la crise du Co- marché.» En effet, à partir de six mois un
S’il en va de la volonté du Conseilvid-19. En outre, les problèmes de livrai- véhicule vaut comme occasion, même s’il
fédéral, le plafonnement des émissions son de la Chine demandent des excep- n’a presque pas été utilisé. Il n’entre plus,
de CO2 à 95 g/km devrait être applicable
tions pour cause de pandémie, écrivait dès lors, dans la «comptabilité CO2» des
à partir de 2022 seulement, au lieu de le «Tages-Anzeiger» le 18 avril. Mais qui voitures neuves. La Confédération serait
peut affirmer qu’en 2021, la situa- bien avisée de prolonger ce délai.
Pour les poids-lourds, des failles seraient tion exigera que le Conseil fédéral Pour les poids-lourds, les failles se-
assouplisse généreusement la loi? raient même admises par la loi. En effet,
même admises par la loi. Ces revendications sont en l’administration et la majorité de la Com-
contradiction avec la position de mission de l’environnement du Conseil
2021. Le Conseil fédéral «dilue fortement l’industrie automobile européenne – ré- national souhaitent que la Suisse n’adopte
les objectifs CO2» – comme il avait lui- putée hostile aux mesures pro-climat – pas les prescriptions de l’UE. Les camions
même qualifié cette faille législative de- qui, selon la presse allemande, déclare ne étrangers à fortes émissions de CO2 en
vant le Conseil des États en 2015. vouloir en aucun cas réduire ou ajourner profiteraient. Il appartient au Parlement
Une telle attitude est incompréhensible les objectifs CO2 applicables aux voitures de corriger cette faille de la loi sur le CO2.
quand on sait que le plafonnement des neuves. Le monde politique semble avoir oublié
émissions des voitures est, en matière de Les propres chiffres des importa- les catastrophes climatiques de 2019 –
transports, la seule mesure de politique teurs de voitures montrent qu’il s’agit une piqûre de rappel s’impose.
climatique de la Suisse et que, depuis d’un pseudo-problème: en mars 2020, ils
1990, elle ne parvient pas à réduire ses ont atteint l’objectif qu’ils s’étaient eux-
émissions de CO2. Qui plus est, le Conseil mêmes fixé, soit 10% de part de marché
fédéral fait fi de la position du Conseil des pour les voitures électriques et plug-in- Luc Leumann est coordinateur de la politique
États du 2 décembre 2019 et revient même hybrides, et ce, malgré le Covid-19. fédérale à l’ATE Suisse.
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DOSSIER
© tauav/Adobe Stock
© ATE/Nelly Jaggi
Éviter le rush: pour que davantage de pendulaires délaissent leur voiture au
profit des transports publics, il faut pouvoir voyager hors des heures de pointe.
Le télétravail et les horaires de travail flexibles font partie des solutions.
Un double transfert s’impose
Par Laura Schmid Les transports publics sont bondés durant les heures de pointe.
Comment y remédier? La révolution imposée dans nos habitudes
ces dernières semaines a démontré que des horaires de travail
flexibles, le télétravail et la vidéo-conférence réduisent l’encom-
brement des TP.
P réparer ses dossiers chez soi le matin
tôt et se rendre plus tard au bureau
ou tenir une réunion par vidéo-confé-
Le «work smart» fonctionne
La recette pour réduire les pointes d’oc-
cupation des TP compte trois ingré-
longtemps, la progression était lente et
bien des personnes restaient sceptiques
quant aux avantages du télétravail. La
rence avec ses collègues d’autres régions – dients: horaire de travail fl xible, télétra- situation d’exception de ces dernières
les expériences faites ces dernières se- vail et vidéo-conférence. Pendant la crise semaines a rendu le télétravail usuel et
maines ont démontré que nombre du coronavirus, la presque totalité du a forcé le monde professionnel à expéri-
d’entre nous peuvent parfaitement ef- personnel de bureau de Suisse a pu ex- menter de nouveaux modèles.
fectuer au moins une partie du travail périmenter le télétravail. Ce n’est certes
à domicile. pas du goût de tou∙tes, mais beaucoup Chasser les réticences
La Suisse doit d’urgence réduire ses d’entre nous ont pu constater que cela Nombre d’ex-pendulaires affirment être
émissions de gaz à effet de serre dues fonctionne très bien. plus détendu∙es et performant∙es en mode
aux transports individuels motorisés L’ATE s’investit depuis longtemps télétravail, simplement parce qu’on a da-
(TIM). Pour y parvenir, il faut qu’une pour l’indispensable transfert sur des vantage d’heures de sommeil du fait de
plus grande partie des déplacements s’ef- modes de transport écologiques. L’au- ne pas devoir voyager. D’autres estiment
fectue au moyen des transports publics tomne dernier, elle a signé la charte de que certaines réunions en vidéo-confé-
rence sont plus efficaces: on fait l’écono-
Il s’agit d’un transfert des transports individuels motorisés mie du déplacement, tout en faisant face
à chacun∙e grâce au fractionnement de
aux transports publics d’une part, et des heures de pointe l’écran.
Il faut espérer que ces expériences
vers le reste de la journée d’autre part. conduiront à faire disparaître les réti-
cences à l’égard des modèles de travail
(TP). Le problème: les TP sont saturés l’Initiative Work Smart, qui vise à en- fl xible. C’est un pas important vers la
aux heures de pointe. L’exercice s’avère courager les formes de travail fl xible diminution du trafic pendulaire. Ces
donc impossible. en Suisse – notamment la configuration pratiques réduisent l’encombrement des
Mais à y regarder de plus près, on de l’horaire de travail par l’employé∙e, TP et rendent ainsi possible l’abandon
constate que, sur la journée entière, le le télétravail, le travail dans les TP et en progressif de la voiture.
taux d’occupation des TP est d’à peine bureaux partagés délocalisés.
30%. Dès lors, un double transfert s’im- Depuis sept ans déjà, l’Initiative Work Laura Schmid, spécialiste des transports
pose: des TIM vers les TP et des heures Smart s’attache à promouvoir de tels mo- publics auprès de l’ATE, œuvrait pour des trans-
de pointe vers le reste de la journée. dèles dans le monde du travail. Pendant ports écologiques déjà bien avant la crise.
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© mad
©mad
DOSSIER
Ensemble, mais chacune chez soi. Les rédactrices de l’ATE ont testé
le télétravail sous toutes ses coutures ces dernières semaines.
Le monde entre nos quatre murs
Travailler à domicile ou ne pas travailler à domicile? Ce n’était pas une question de préférences
personnelles ces dernières semaines, mais simplement une nécessité. Expériences de deux personnes
qui s’assoient habituellement l’une en face de l’autre.
Oui, mais... «Non, vous ne me dérangez pas, je
suis sur le télésiège!» J’ai tellement Non, mais... Du lit à la cuisine et, café en main,
direction le salon: je n’ai pas l’im-
souvent entendu mon père répondre ainsi à un appel profession- pression de me rendre au bureau. Et une fenêtre ouverte ne
nel pendant les vacances au ski que la phrase est devenue une remplacera jamais le trajet à vélo jusqu’au travail. Depuis la
blague récurrente avec mon frère et mes sœurs. Qui s’inquiète mi-mars, le salon accueille, aux côtés du canapé et de la biblio-
encore de savoir d’où notre interlocuteur·rice nous répond? Dans thèque, une petite table en bois qui, ces dernières années, se
le monde professionnel, les paradigmes ne cessent d’évoluer. sentait bien seule dans l’obscurité de la cave.
Déjà dans «la vie d’avant», la définition de la place de tra- La chaise des premiers jours – un tabouret de cuisine en bois –
vail était souple. L’ATE offrait aux collaborateur·rices qui le a retrouvé sa place. Son successeur, un ballon de gymnastique
souhaitaient la fl xibilité de travailler à la maison bien avant bleu, n’a de cesse de me rappeler l’optimisation du moi actuelle-
que le coronavi- ment si tendance. Pour-
S’éloigner de la routine pour trouver rus n’y oblige la
plupart d’entre
Les vidéoconférences sont quoi être nostalgique
du fitness quand on
inspiration et créativité. nous. Limitation source de profond désespoir. peut rester chez soi? Au
des déplacements, moins, mon postérieur
gain de temps, autres horaires, autre dynamique de travail: les ne se plaint plus. En plus du cours de sport à la sauce des Jane
enthousiastes y trouvent des avantages qui leur correspondent. Fonda modernes, mes rares visites au bureau mettent un peu de
Le télétravail forcé bouscule nos habitudes. Et les conseils mouvement dans mon quotidien. Soyons honnêtes: qui a une
fl urissent: installer une routine, s’imposer des horaires, s’ha- imprimante chez soi?
biller, aménager un espace. Mais rien de tout cela n’est obli- Les vidéoconférences sont, pour moi, source de profond
gatoire – au contraire. Cette situation exceptionnelle offre désespoir. Aucune forme de communication non verbale n’est
l’occasion d’expérimenter une autre façon de travailler, de possible, l’encouragement par hochement de tête disparaît dans
questionner notre fonctionnement et de découvrir dans quelles le no man’s land numérique et tout «oui» approbateur inter-
conditions s’épanouit notre productivité. rompt l’autre dans son élan.
Au sortir de cette crise, certain·es auront apprécié de s’éloi- J’avoue cependant que le travail à domicile fonctionne. Ce
gner de la rigueur d’une routine professionnelle «traditionnelle» numéro du magazine est entièrement né au salon ou à la cui-
et y auront trouvé inspiration et créativité. Mais évidemment, les sine, voire sur le balcon. Mais cela n’intéresse personne, car
perspectives ne sont pas les mêmes pour tout le monde. La tâche seul le résultat compte. Les échanges personnels ne sont-ils pas
est plus aisée lorsque le travail à la maison ne doit pas se conju- plus importants qu’une atmosphère de travail détendue sur le
guer avec une fonction imprévue de maîtresse d’école, d’éduca- balcon?
teur, de cuisinière, d’homme de ménage – ou tout cela à la fois.
Camille Marion est rédactrice pour le Magazine ATE et travaille un jour par Nelly Jaggi est responsable de la rédaction de l’ATE Magazine et se réjouit
semaine à la maison depuis plusieurs années. de rédiger le numéro de septembre au bureau.
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© ATE/Nelly Jaggi
DOSSIER
Livraison à domicile: ce type d’achat
est-il bon ou mauvais pour l’environ-
nement? La réponse n’est pas la même
dans tous les cas, mais un guide permet
d’y voir plus clair.
Achats, livraison et environnement
Par Laura Schmid Il est impossible d’estimer globalement le bilan écologique des
services de livraison à domicile. Pour l’environnement, il y a une
grande différence entre livrer à la porte une laitue en camionnette
ou un téléviseur en vélo cargo. Un guide pour s’y retrouver.
C es dernières semaines, nous avons
dû rester le plus possible à la maison.
Pour cette raison, et parce que de nom-
2. Où habitez-vous?
Une seule voiture de livraison peut-elle
desservir tout le quartier? Cela ne fonc-
pour les livraisons express ou les livrai-
sons le jour même.
breux magasins étaient fermés, com- tionne que dans les zones densément ha- 5. Avec quel véhicule livre-t-on
mander des produits en ligne a souvent bitées. Si vous vivez à la campagne, ce la marchandise?
été la seule option. Il a fallu par exemple gain d’efficacité est perdu. Le véhicule de livraison joue évidem-
se faire livrer des boutures à la maison ment un grand rôle: un vélo cargo ou une
pour fl urir le balcon. 3. Qu’avez-vous commandé? voiture de livraison électrique préservent
Mais au moment de recevoir le paquet Du point de vue environnemental, il vaut beaucoup plus l’environnement qu’une
à la porte, une question s’est posée: cette mieux commander à domicile un télé- voiture de livraison à moteur diesel.
manière d’acheter, est-elle un plus ou un viseur qu’une laitue. Ce n’est pas clair?
moins pour l’environnement? Il est mal- Imaginez: quand vous allez dans un ma- Résumé: il est difficile d’évaluer globa-
heureusement difficile de répondre. En gasin d’électronique, vous achetez rare- lement l’impact des services de livraison
réalité, cela dépend principalement de ment plusieurs téléviseurs et deux aspira- à domicile sur l’environnement. Les tra-
cinq facteurs: teurs. Il y a un déplacement par article. Si jets à vélo, à pied ou en transports publics
le magasin groupe les commandes et les restent la meilleure option. Dans les autres
1. Comment faites-vous vos courses livre en une fois, cela préserve l’environ- situations, il faut juger au cas par cas.
d’ordinaire? nement. À l’inverse, quand vous achetez
Comment auriez-vous acheté les bou- des denrées alimentaires, il est peu pro- Laura Schmid est spécialiste des transports
tures normalement? À vélo, à pied, en bable qu’il n’y ait qu’une laitue dans votre publics pour l’ATE Suisse. Elle possède un vélo
cargo qui lui permet de faire ses courses sans
transports publics? Dans ces cas, la ré- panier. Ce serait inefficace.
émettre de CO2.
ponse est simple: la livraison à domi- D’une manière générale, on dit qu’en
cile est un moins pour l’environnement groupant les achats, on préserve l’envi-
(sauf s’il s’agit d’une livraison à vélo ronnement. Quand on prend la voiture Quelques règles pratiques:
mais nous y reviendrons). À l’inverse, si pour faire les courses, il vaut mieux faire
vous aviez fait vos courses en voiture, il les courses de la semaine en une fois. Faire le plus possible ses courses à vélo, en trans-
est fort possible que la livraison à domi- ports publics ou à pied.
cile soit un plus. Une voiture de livrai- 4. Quel est le délai de livraison? Regrouper les courses le plus possible et faire
son peut desservir un quartier et éviter Un magasin livre plus facilement les un seul trajet est toujours préférable.
plusieurs trajets en voiture pour ache- commandes de manière groupée quand Renoncer aux livraisons express.
ter des boutures. C’est plus efficace, mais il peut les rassembler et les livrer en Préférer les services de livraison dont les véhi-
pas toujours. même temps. C’est presque impossible cules sont respectueux de l’environnement.
ATE MAGAZINE 3/20 27Vous pouvez aussi lire
