REVUE DE L'ANNÉE DÉCISIONS MARQUANTES EN DROIT DU TRAVAIL - Formation syndicale

 
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REVUE DE L’ANNÉE
    DÉCISIONS MARQUANTES EN DROIT DU TRAVAIL
              29E SÉMINAIRE SUR LE DROIT DU TRAVAIL ET L’ARBITRAGE DE GRIEFS

                               Présentée par :

            Me Alexandre Grenier, Me Laure Tastayre
                    Me Elizabeth Perreault

                                                                               1

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    SOCIÉTÉ DES CASINOS DU QUÉBEC C. TRIBUNAL ADMINISTRATIF
                    DU TRAVAIL, 2018 QCCS 4781

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SOCIÉTÉ DES CASINOS DU QUÉBEC C. TRIBUNAL ADMINISTRATIF
                      DU TRAVAIL, 2018 QCCS 4781
    RÉSUMÉ DES FAITS
     Après consultation et pour réglementer les rapports collectifs de travail des cadres, le gouvernement
      du Québec adopte un Guide de la bonne gouvernance prévoyant notamment un processus de
      négociation et de recours en cas d’impasse des négociations. Comme la Société des casinos est
      indépendante du gouvernement, celui-ci ne peut imposer ce guide à la Société.
     La Société, bien que le gouvernement ait fortement conseillé à celle-ci d’adopter le Guide, ne l’adopte
      pas.
     En conséquence, l’Association des cadres de la Société des casinos du Québec a fait une requête en
      accréditation devant le TAT pour représenter certains cadres de premier niveau de la Société.
     Le TAT, après de longues années de bataille juridique sur des sujets connexes entre l’Association et
      l’employeur (compétence du TAT, par exemple), rend sa décision le 7 décembre 2016.

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                      DU TRAVAIL, 2018 QCCS 4781

    HISTORIQUE JUDICIAIRE
    Tribunal administratif du travail
     Dans sa décision interlocutoire, le TAT déclare inopérant l’exclusion des cadres de l’application du Code du
       travail (article 1l) par. 1 C.t.), parce qu’il porte atteinte à la liberté d’association des cadres de premier
       niveau (les superviseurs des opérations, les SDO).

    Pourvoi en contrôle judiciaire devant la Cour supérieure

     L’employeur conteste cette décision interlocutoire au moyen d’un pourvoi en contrôle judiciaire.

     La Procureure générale du Québec intervient comme mise en cause.

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    DROIT APPLICABLE

    La norme de contrôle
     La Cour considère que comme il s’agit d’une décision d’un tribunal administratif se prononçant sur la
       constitutionnalité d’une disposition législative, la norme de contrôle applicable est la norme de la
       décision correcte, comme nous l’enseigne l’arrêt Dunsmuir.

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                      DU TRAVAIL, 2018 QCCS 4781
    DROIT APPLICABLE (suite)
    Le test Dunmore
    La Cour se questionne ensuite sur la cadre d’analyse applicable en l’espèce.
    Considère-t-on la démarche de l’Association comme :
     Une demande de déclarer inconstitutionnelle l’ingérence de l’État (en lui demandant de ne pas être
       assujettie à une loi qui contrevient à sa liberté d’association)
                                                         OU
     Une demande d’intervention positive de l’État (en lui demandant ainsi de légiférer afin de lui garantir
       l’exercice de la liberté d’association), qui entraînerait l’application du test de l’arrêt Dunmore ?

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                      DU TRAVAIL, 2018 QCCS 4781
    DROIT APPLICABLE (suite)

    Le test Dunmore (suite)
      [72] En l’espèce, l’ACSCQ recherche une intervention positive de l’État. Elle ne demande pas que les SDO soient exclus de l’application
      d’une loi qui limiterait leur liberté d’association. Au contraire, elle demande précisément leur assujettissement au Code du travail par
      l’élimination de l’exclusion des cadres prévu à l’article 1l) 1° de cette loi.
    APPLICATION EN L’ESPÈCE

    Première étape du test Dunmore : la recherche de l’accès à un régime légal précis
       [100] Le Tribunal considère donc que le TAT rend une décision correcte lorsqu’il conclut au paragraphe 380 de son jugement que
       l’ACSCQ ne recherche pas l’accès à un régime légal précis, mais plutôt pouvoir exercer son droit à un processus de véritable négociation
       collective.

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    APPLICATION EN L’ESPÈCE (suite)
    Deuxième étape du test Dunmore: l’entrave substantielle
    Son contenu
    La protection constitutionnelle du droit à la liberté d’association (article 2d) de la Charte canadienne et 3 de la
    Charte québécoise) n’est pas un droit absolu. Selon la Cour suprême, elle ne protège cette liberté que contre
    les entraves substantielles à celle-ci (arrêts Health Services and Support, Fraser et APMO).
    Qu’est-ce que l’entrave substantielle ?
       [110] Pour que l’entrave soit qualifiée de substantielle, elle doit non seulement toucher des aspects importants pour le processus
       de véritable négociation collective, mais aussi avoir un impact important sur le droit à un tel processus de
       négociation. L’atteinte doit être telle qu’elle compromet la capacité des salariés d’agir d’une seule voix par le biais de leur
       représentant en vue de réaliser des objectifs communs et qu’elle devient un frein à l’activité associative.

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     APPLICATION EN L’ESPÈCE (suite)
     Deuxième étape du test Dunmore : l’entrave substantielle (suite)
     L’entrave substantielle: qu’en est-il ici ?
      Lors de l’entrée en vigueur du Code du travail, en 1964, l’objectif du législateur n’était pas d’exclure les cadres de
        l’application du Code du travail, mais bien d’assurer une communauté d’intérêts pour les salariés qui ne sont pas
        cadres en permettant à ceux-ci de se syndiquer.
      Pour ne pas créer de conflit d’intérêts, le régime qu’offrait le Code du travail se devait de séparer les employés
        cadres des employés non-cadres, pour qu’au final un syndicat ne soit pas dominé par l’employeur s’il était
        autrement possible d’inclure les cadres, fidèles à l’employeur, comme membre d’une association accrédité au sens
        du Code.

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     APPLICATION EN L’ESPÈCE (suite)
     Deuxième étape du test Dunmore: l’entrave substantielle (suite)
     L’entrave substantielle: qu’en est-il ici ? (suite)
      Or, comme nous le dit la Cour suprême (arrêt R. c. Big M Drug Mart), il se peut tout de même que, dans ses
        effets, l’exclusion des cadres crée une entrave substantielle à la liberté d’association des cadres.
      La Cour déplace donc son cadre d’analyse sur les effets de l’exclusion des cadres.

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     APPLICATION EN L’ESPÈCE (suite)
     Deuxième étape du test Dunmore: l’entrave substantielle (suite)
     Les effets analysés
     Ils sont au nombre de 2 :
     1. La reconnaissance de l’Association par la Société
     2. L’incapacité à mener de véritables négociations collectives
           Absence de recours devant des tribunaux spécialisés
           Sur les négociations
           Sur l’exercice du droit de grève

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     APPLICATION EN L’ESPÈCE (suite)
     Deuxième étape du test Dunmore : l’entrave substantielle (suite)
     Les effets analysés (suite)
     1. Reconnaissance de l’Association par la Société
     La Cour considère que :
         La liberté d’association telle que définie par la Cour suprême n’inclut pas le monopole syndical ou encore les unités
         d’accréditation qui pourraient être reconnues appropriées selon le Code du travail.
     Comme la Société reconnait l’Association et que celle-ci est indépendante de l’employeur, les barèmes
     constitutionnels sont respectés.
         [180] Le TAT considère donc qu’en l’absence d’un modèle identique à celui du monopole syndical prévu au Code du
         travail, il y a violation de la liberté d’association. Or, aucune des décisions de la Cour suprême n’a constitutionnalisé un
         modèle de représentativité identique à celui du monopole syndical.

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     APPLICATION EN L’ESPÈCE (suite)
     Deuxième étape du test Dunmore : l’entrave substantielle (suite)
     Les effets analysés (suite)
     2. Incapacité à mener de véritables négociations collectives
     Sur l’absence de recours devant des tribunaux spécialisés
     La Cour reproche au TAT d’avoir une fois de plus considéré le Code du travail comme une base de comparaison
     (lequel prévoit des recours spécialisés) et qu’à défaut d’un régime conforme à cette loi, d’avoir déclarer que la liberté
     d’association des cadres souffre d’une entrave substantielle.
     Or, d’autres recours existent.
      Le recours prévu à la Charte québécoise similaire à l’article 24(1) de la Charte canadienne.
      Les recours prévus devant les tribunaux de droit commun pour faire valoir leur droit.

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     APPLICATION EN L’ESPÈCE (suite)
     Deuxième étape du test Dunmore : l’entrave substantielle (suite)
     Les effets analysés (suite)
     2. Incapacité à mener de véritables négociations collectives (suite)
     Sur les négociations :
         [223] Le refus de la Société de négocier certaines conditions de travail importantes, sa décision d’en modifier
         unilatéralement d’autres, ses délais à entreprendre des discussions concernant la modification du protocole, les échanges
         avec les nombreux intervenants du côté de la Société et, finalement, la menace à peine voilée que si le protocole était
         rouvert, ce serait pour enlever des droits à l’ACSCQ, convainc le Tribunal que le TAT n’a pas erré en concluant qu’il y a une
         entrave substantielle à la liberté d’association des SDO. Le Tribunal aborde plus loin la responsabilité de l’État à cet égard.
     C’est ici que, pour l’instant, le bât blesse pour la Société.
     Or, la troisième étape du test Dunmore est-elle remplie ?

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     APPLICATION EN L’ESPÈCE (suite)
     Deuxième étape du test Dunmore : l’entrave substantielle (suite)
     Les effets analysés (suite)
     2. Incapacité à mener de véritables négociations collectives (suite)
     Sur l’exercice du droit de grève
     Elle estime que l’exclusion des cadres du Code n’empêche pas les cadres de faire la grève dans le cadre d’un
     processus de négociation collective de leurs conditions de travail, puisqu’il n’existe pas de loi leur interdisant de faire
     la grève.
         Dans l’éventualité où la Société leur imposerait un congédiement en raison de leur participation à une grève, comme le craint le TAT, ils
         pourraient tous contester une telle décision en s’appuyant sur leur liberté d’association.
     Selon la Cour, si une violation était avérée, il y aurait des réparations possibles (ceux prévus aux articles 24(1) de la
     Charte canadienne, 49 de la Charte québécoise et 128 de la Loi sur les normes du travail).

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     APPLICATION EN L’ESPÈCE (suite)
     Troisième étape du test Dunmore : la responsabilité de l’État
     La Cour considère que les entraves substantielles à la liberté d’association révélées par la preuve administrée ne sont
     pas attribuables à l’exclusion par l’État de l’application du Code du travail à l’égard des cadres, mais plutôt au
     comportement de l’employeur.
         [248] L’entrave substantielle identifiée par le Tribunal provient principalement des modifications unilatérales des conditions de travail des
         SDO par la Société sans même consulter ou aviser l’ACSCQ. La seule responsable de cette entrave est la Société et non l’État par
         l’exclusion des cadres de l’application du Code du travail.

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                       DU TRAVAIL, 2018 QCCS 4781

     CONCLUSION
     Troisième étape du test Dunmore : la responsabilité de l’État
     Comme ce n’est pas l’État qui est responsable, mais bien la Société :
      Elle accueille la demande en contrôle judiciaire
                                                             ET
      Déclare applicable, valide et opérante constitutionnellement l’exclusion prévue à l’article 1l) par. 1 du Code du
       travail.

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                       DU TRAVAIL, 2018 QCCS 4781

                        Une procédure d’appel à venir ?

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SYNDICAT DES PROFESSIONNELLES EN SOINS DE SANTÉ DE L’OUEST-DE-
                L’ILE-DE-MONTRÉAL (SPSSODIM-FIQ) ET CIUSSS DE
                 L’OUEST-DE-L’ILE-DE-MONTRÉAL, 2018 QCTA 207

      Le litige : Grief sur le fardeau de tâches
      Les faits
        • Manque d’effectifs sur le quart de nuit (infirmières).
        • Comité de soins a fait son étude.
        • Personne-ressource désignée en vertu de la convention collective.
        • Rapport volumineux remis avec recommandations qui vont au-delà du travail des infirmières de nuit.

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       SYNDICAT DES PROFESSIONNELLES EN SOINS DE SANTÉ DE L’OUEST-DE-
                L’ILE-DE-MONTRÉAL (SPSSODIM-FIQ) ET CIUSSS DE
                 L’OUEST-DE-L’ILE-DE-MONTRÉAL, 2018 QCTA 207

      La décision
         • L’arbitre considère qu’il peut ordonner l’application de la totalité des recommandations du rapport et non
          seulement celles concernant les infirmières du quart de nuit puisqu’il a juridiction sur le « fardeau de tâches »
          ou « question se rapportant directement aux soins ».
         • L’arbitre Bertrand cite Me Jean-Marie Lavoie pour décrire la notion de fardeau de tâches, d’où on peut retenir
          les critères suivants.
         • Les salariées affectées peuvent-elles accomplir toutes les tâches qui sont exigées d’elles durant leur horaire
          régulier de travail ? Doivent-elles, au contraire, compléter leurs tâches normales en temps supplémentaire ?
         • Accessoirement, s’il leur est possible de tout accomplir durant leur horaire régulier de travail, ce résultat est-il
          atteint par le recours à un rythme de fonctionnement anormal, générateur de stress, de fatigue ou
          d’insatisfaction quant aux conditions de travail ou à la qualité de la prestation fournie ?

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SYNDICAT DES PROFESSIONNELLES EN SOINS DE SANTÉ DE L’OUEST-DE-
                  L’ILE-DE-MONTRÉAL (SPSSODIM-FIQ) ET CIUSSS
                DE L’OUEST-DE-L’ILE-DE-MONTRÉAL, 2018 QCTA 207

      La décision (suite)
         • Les salariées pour accomplir leurs tâches normales doivent-elles empiéter sur leur période repas ou de repos?
         •…est-ce que le problème est continu ou purement occasionnel …?

        • La preuve a démontré qu’il existe un problème de fardeau de tâches pour les infirmières.
        • L’arbitre ordonne de :
           o Créer un poste d’infirmière de jour.

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       SYNDICAT DES PROFESSIONNELLES EN SOINS DE SANTÉ DE L’OUEST-DE-L’ILE-
                     DE-MONTRÉAL (SPSSODIM-FIQ) ET CIUSSS DE
                   L’OUEST-DE-L’ILE-DE-MONTRÉAL, 2018 QCTA 207

      La décision (suite)
        • Créer un poste d’infirmière auxiliaire de jour.
        • Transformer plusieurs postes de PAB à temps partiel en poste à temps plein.
        • Rétablir les anciens horaires de travail.
        • Combler les postes vacants.

      Suivi :
        • Requête pour sursis d’exécution accordée.

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SYNDICAT DES PROFESSIONNELLES EN SOINS DE SANTÉ DE L’OUEST-DE-
                L’ILE-DE-MONTRÉAL (SPSSODIM-FIQ) ET CIUSSS DE
                 L’OUEST-DE-L’ILE-DE-MONTRÉAL, 2018 QCTA 207

      Suivi (suite)
        • Pourvoi en contrôle judiciaire accueilli en parti le 11 avril 2019.
        • La Cour supérieure considère que l’Arbitre ne pouvait pas se prononcer sur autre chose que le
         poste d’infirmière de nuit.
        • Cour supérieure maintient l’ordonnance relative aux horaires et au comblement des postes vacants.

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         LAROCHELLE ET GOUVERNEMENT DU QUÉBEC, DIRECTION DES
      RELATIONS PROFESSIONNELLES, CONSEIL DU TRÉSOR, 2018 QCTAT 207

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LAROCHELLE ET GOUVERNEMENT DU QUÉBEC, DIRECTION DES
       RELATIONS PROFESSIONNELLES, CONSEIL DU TRÉSOR, 2018 QCTAT 207

     RÉSUMÉ DES FAITS
      Larochelle, un salarié et vice-président de son syndicat, dépose une plainte en vertu des articles 15 et suivants du
        Code du travail.
      Le 9 mai 2017, il accorde une entrevue téléphonique à la radio (107,7 FM) pour y dénoncer des pratiques du
        MTQ et ce, sans l’autorisation de son employeur (le MTQ).
      Il qualifie les gestionnaires du MTQ de mauvais. L’employeur juge que ses propos sont diffamatoires et erronés.
      Le 14 juin 2017, il est suspendu de ses fonctions pour une durée de 15 jours (du 15 au 29 juin inclusivement).
      Il dépose une plainte devant le TAT le 17 juillet 2017.

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          LAROCHELLE ET GOUVERNEMENT DU QUÉBEC, DIRECTION DES
       RELATIONS PROFESSIONNELLES, CONSEIL DU TRÉSOR, 2018 QCTAT 207

     DROIT APPLICABLE
     Le salarié croit avoir subi une mesure de représailles dû à l’exercice d’un droit qui résulte du Code (activités
     syndicales de représentation), ce qui contraire à l’article 15 du Code du travail.
     Article 17 C.t. :
         S’il est établi à la satisfaction du Tribunal que le salarié exerce un droit qui lui résulte du présent code, il y a présomption simple en sa
         faveur que la sanction lui a été imposée ou que la mesure a été prise contre lui à cause de l’exercice de ce droit et il incombe à
         l’employeur de prouver qu’il a pris cette sanction ou mesure à l’égard du salarié pour une autre cause juste et suffisante.
     Pour analyser la justification de l’employeur, le Tribunal rappelle que la raison invoquée par l’employeur ne doit
     pas cohabiter avec un motif illicite. Si cela se produit, « le moindre antisyndicalisme qui entache une décision
     procédant de « motifs multiples » contrera la défense de l’employeur, même en présence d’autres raisons
     valables d’imposer la sanction » (arrêt Plourde c. Compagnie Wal-Mart du Canada, par. 48).

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LAROCHELLE ET GOUVERNEMENT DU QUÉBEC, DIRECTION DES
       RELATIONS PROFESSIONNELLES, CONSEIL DU TRÉSOR, 2018 QCTAT 207

     APPLICATION EN L’ESPÈCE

     Prétention de l’employeur

      L’autre cause juste et suffisante présentée par l’employeur est à l’effet que le salarié a contrevenu à son obligation
        de loyauté envers lui ainsi qu’à son devoir de discrétion et de réserve lors de son entretien radiophonique du 9
        mai 2017.

      L’employeur mentionne que les activités syndicales n’ont eu aucune influence sur sa décision.

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          LAROCHELLE ET GOUVERNEMENT DU QUÉBEC, DIRECTION DES
       RELATIONS PROFESSIONNELLES, CONSEIL DU TRÉSOR, 2018 QCTAT 207

     APPLICATION EN L’ESPÈCE (suite)

     Décision du Tribunal

      Le Tribunal mentionne, de prime abord, qu’en effet le salarié a contrevenu à son obligation de loyauté puisqu’il a
        bien discrédité l’employeur.

      Or, comme le salarié était un dirigeant syndical, celui-ci a le droit de s’exprimer publiquement à ce titre sur des
        enjeux syndicaux légitimes, et ce, sans l’autorisation nécessaire de la part de l’employeur.

      Dans ce cas, « son droit de parole syndical l’emporte sur l’obligation de loyauté à l’endroit de l’employeur ».

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LAROCHELLE ET GOUVERNEMENT DU QUÉBEC, DIRECTION DES
      RELATIONS PROFESSIONNELLES, CONSEIL DU TRÉSOR, 2018 QCTAT 207

     APPLICATION EN L’ESPÈCE (suite)
     Décision du Tribunal (suite)
     Cette immunité est cependant relative : elle ne doit pas permettre au salarié de commettre des actes illégaux ou
     préjudiciables envers l’employeur.
        [31] Or, les propos du dirigeant syndical, en l’instance, ne constituent pas de la diffamation et le préjudice à l’employeur est loin d’être
        établi. Personne n’est nommé. C’est le droit syndical à l’expression qui est en jeu.
        [33] Pour le Tribunal, les propos tenus par le plaignant sont reliés à un enjeu syndical et ils s’inscrivent dans les limites acceptables de la
        liberté d’expression et de l’immunité relative dont jouit le représentant syndical.

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         LAROCHELLE ET GOUVERNEMENT DU QUÉBEC, DIRECTION DES
      RELATIONS PROFESSIONNELLES, CONSEIL DU TRÉSOR, 2018 QCTAT 207

     CONCLUSION

     Le TAT annule la suspension imposée le 14 juin 2017 et ordonne à l’employeur de verser au salarié une
     indemnité pour l’équivalent du salaire et des avantages perdus.

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                          GÉNÉRALE), 2018 CSC 18

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                          GÉNÉRALE), 2018 CSC 18

     RÉSUMÉ DES FAITS
      Lors de l’entrée en vigueur de la Loi sur l’équité salariale, en 1997, aucune méthode n’existait pour
       permettre les ajustements à apporter en matière d’équité salariale lorsqu’il n’y avait pas de
       comparateurs masculins dans un domaine de travail précis.
      Après consultations publique et parlementaire, le gouvernement décide donc de confier à la défunte
       Commission de l’équité salariale le mandat de faire les recherches nécessaires permettant de trouver
       les comparateurs masculins appropriés.
      Or, suivant l’article 114 de la Loi, un règlement ne pouvait être pris qu’une fois que les milieux avec
       comparateurs masculins auraient réalisé leur premier exercice d’équité salariale, ce qui fut fait le 21
       novembre 2001.

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                          GÉNÉRALE), 2018 CSC 18

     RÉSUMÉ DES FAITS (suite)
      Deux ans plus tard, soit en 2003, la Commission a retenu une méthode. Cette méthode de
       comparaison appropriée fut promulguée par règlement le 5 mai 2005.
      Selon l’article 38 de la Loi, un délai de grâce de deux ans fut donné aux entreprises concernées (dans
        les milieux sans comparateurs masculins) pour mettre en œuvre la méthode permettant de former un
        programme d’équité salariale. Dans ce cas, l’équité salariale fut donc reportée au 5 mai 2007, soit 6 ans
        après l’entrée en vigueur de l’application de l’équité salariale pour les entreprises avec comparateurs
        masculins (le 21 novembre 2001).
      Devant ce délai de 6 ans, plusieurs syndicats ont contesté cet accès différé de six ans à l’équité
        salariale au motif qu’il constituait une violation du droit à l’égalité de la Charte canadienne à l’égard des
        femmes travaillant dans des milieux sans comparateurs masculins.

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     HISORIQUE JUDICIAIRE

      Devant la Cour supérieure, le juge Yergeau a conclu que le délai de six ans ne violait pas le droit des
        femmes en cause à l’égalité, puisque l’accès différé à l’équité salariale reposait non pas sur le sexe, mais
        plutôt sur l’absence de comparateurs masculins.

      La Cour d’appel a rejeté l’appel des syndicats.

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     PRÉTENTIONS DES PARTIES

      Les syndicats plaident qu’il y a bel et bien eu discrimination. Le droit à l’égalité doit s’analyser sous son
        cadre réel et non sous un cadre formel, comme l’aurait fait le juge de première instance.

      La Procureure générale du Québec demande de rejeter l’appel.

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         CENTRALE DES SYNDICATS DU QUÉBEC C. QUÉBEC (PROCUREURE
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     DROIT APPLICABLE
     CHARTE CANADIENNE DES DROITS ET LIBERTÉS
           1. La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par
           une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d’une société libre
           et démocratique.
           15. (1) La loi ne fait acception de personne et s’applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même
           bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l’origine nationale ou
           ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l’âge ou les déficiences mentales ou physiques.

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     APPLICATION EN L’ESPÈCE (jugement majoritaire)
     Sur la violation du droit à l’égalité
     La Cour suprême retient l’analyse de l’égalité réelle et pourfend l’analyse du juge de première instance.

     Selon elle, la distinction est discriminatoire. Les femmes visées par le délai subissent les effets de la discrimination
     salariale, sans pouvoir obtenir de réparation pour la période du délai. Ségrégation professionnelle et faibles salaires
     vont souvent de pair. Il ne fait aucun doute que les demanderesses subiront des répercussions économiques
     considérables en raison du délai.

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     APPLICATION EN L’ESPÈCE (jugement majoritaire) (suite)
     Est-ce que cette violation est justifiable dans notre société ?
      Il fallait s’attendre à un certain délai. L’objectif réel et urgent de ce délai était de trouver la bonne façon
        d’atteindre l’équité salariale pour les femmes visées par le litige.
      Il s’agissait d’une question complexe qui commandait d’importantes recherches et analyses et il existait fort
        peu d’exemples de politiques adoptées ailleurs desquelles s’inspirer.
      De plus, les conséquences néfastes sont moins importantes que les bénéfices ultimes de l’approche élargie
        adoptée par le Québec.
          Le délai en cause est important et regrettable, mais il a toutefois eu l’avantage à long terme de faire en sorte que la Loi puisse
          véritablement remédier à la discrimination salariale dont était victime un groupe de femmes auparavant exclues.

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     APPLICATION EN L’ESPÈCE (dissidence des juges Côté,Wagner, Rowe et Brown)
     Les juges dissidents auraient préservé l’issu du jugement de première instance quant à savoir s’il y avait
     discrimination.

     Selon eux, il n’y avait pas de discrimination au sens de l’article 15(1) de la Charte canadienne.
         Sans être nécessairement parfaite, la Loi a un effet indéniablement améliorateur pour les salariées visées (…). Dans l’élaboration d’un
         régime complexe comme une loi sur l’équité salariale, il va de soi qu’un gouvernement ne sera pas toujours en mesure d’améliorer la
         situation de tous les membres d’un groupe défavorisé en même temps et de la même façon.

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          CENTRALE DES SYNDICATS DU QUÉBEC C. QUÉBEC (PROCUREURE
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     APPLICATION EN L’ESPÈCE (dissidence des juges Côté,Wagner, Rowe et Brown) (suite)
     Selon les juges, le Québec s’est notamment inspiré des consultations publiques et parlementaires qu’il a menées sur
     les expertises qu’il a développées et sur l’avis des intervenants concernés pour adéquatement développer un
     programme d’équité salariale pour les femmes visées par le litige.

     Le délai de six ans n’était donc pas souhaitable, mais justifié.

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     APPLICATION EN L’ESPÈCE (dissidence quant au résultat de la juge McLachlin)
     En accord avec la majorité sur le fait qu’il y eut discrimination, la juge McLachlin pense plutôt que le délai de six ans
     n’était pas justifié.
     Selon elle :
         [158] (…) Ce délai s’imposait en raison non pas des exigences de l’affaire, mais — du moins en partie — de la décision du
         gouvernement de négocier longuement avec les employeurs dans le but de concevoir un régime que ces derniers seraient disposés à
         accepter et à respecter.
     De ce fait, l’atteinte minimale aux droits des femmes touchées n’était pas rencontrée, à défaut de preuve contraire
     présentée par le Québec.

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     CONCLUSION
     Bien que l’accès différé de six ans à l’équité salariale résultant de l’article 38 de la Loi sur l’équité salariale pour les
     femmes travaillant dans des milieux sans comparateurs masculins viole le droit à l’égalité de ces femmes, cette
     violation est justifiée dans le cadre d’une société libre et démocratique.

     L’appel en Cour suprême des différents syndicats est donc rejeté.

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     RÉSUMÉ DES FAITS
      En 1996, le gouvernement du Québec adopte la Loi sur l’équité salariale (L.E.S.)

      Dix ans après son entrée en vigueur, les statistiques démontraient que seulement 47 % des entreprises
        québécoises assujetties à la loi avaient un programme d’équité salariale, obligation que la loi prévoyait.

      Devant l’ampleur du non-respect de la loi, le Québec décide d’adopter une approche plus constructive dans
        l’espoir de sensibiliser davantage les employeurs : il décide ainsi de réduire l’obligation des employeurs de
        maintenir l’équité salariale en remplaçant l’obligation continue de maintenir l’équité salariale par un système
        d’évaluations obligatoires tous les cinq ans.

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     RÉSUMÉ DES FAITS (suite)
      L’employeur est tenu de rectifier les salaires pour l’avenir seulement, sauf s’il y a eu mauvaise foi de sa part par
        une conduite délibérée et inappropriée, ce qui est difficile à prouver.

      Le Québec apporte ces changements par la Loi modifiant la Loi sur l’équité salariale, entrée en vigueur en 2009.

      Eu égard aux modifications, plusieurs syndicats (dont l’Alliance) contestent la constitutionnalité des nouvelles
        dispositions et des nouveaux effets de la Loi, pour motif que ceux-ci ont un effet discriminatoire causant aux
        bénéficiaires de la loi, les femmes, un préjudice irréparable.

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     HISTORIQUE JUDICIAIRE

     En Cour supérieure, le juge conclut que le refus des paiements rétroactifs dans le cas des iniquités
     salariales apparues au cours de la période comprise entre les évaluations (la période de 5 ans) entrainait
     des pertes financières importantes pour les femmes et perpétuait indument l’iniquité salariale.
     En Cour d’appel du Québec, la décision de la Cour supérieure est maintenue. La plus haute Cour du
     Québec maintient que les articles 76.3, 76.5 et 103.1 al. 2 L.E.S. perpétuent un désavantage pour les
     femmes en préservant le statu quo concernant l’iniquité salariale et en accordant aux employeurs une
     «amnistie» pouvant aller jusqu’à 5 ans.

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     PRÉTENTION DES PARTIES

     La Procureure générale du Québec argue que les dispositions en litige ne sont pas discriminatoires.

     L’Alliance rétorque quant à elle que les jugements de première instance et d’appel sont bien fondés.

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     DROIT APPLICABLE
     CHARTE CANADIENNE DES DROITS ET LIBERTÉS
       1. La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une
       règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d’une société libre et
       démocratique.
       15. (1) La loi ne fait acception de personne et s’applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice
       de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la
       couleur, la religion, le sexe, l’âge ou les déficiences mentales ou physiques.

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     APPLICATION EN L’ESPÈCE (jugement majoritaire)
     Sur la violation du droit à l’égalité
     La Cour suprême, sous la plume de la juge Abella, retient l’analyse de la Cour supérieure et de la Cour d’appel. Elle
     considère que les dispositions en cause ont un effet discriminatoire.
         (33) (…) Cela a pour effet de rendre épisodique et partielle l’obligation incombant à l’employeur en matière d’équité salariale. Les
         iniquités salariales qui apparaissent au cours de la période de cinq ans comprise entre les évaluations restent non corrigées jusqu’à la
         prochaine évaluation. Même lorsqu’une évaluation révèle l’apparition d’une iniquité salariale au cours des cinq années précédentes, l’art.
         76.5 prévoit que les ajustements salariaux sont payables pour l’avenir seulement (…).

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     APPLICATION EN L’ESPÈCE (jugement majoritaire) (suite)
     Sur la violation du droit à l’égalité (suite)
     Il y a ainsi violation de leur droit parce que, lorsqu’une évaluation révèle l’existence d’une iniquité salariale, les
     femmes se voient refuser des ajustements salariaux rétroactifs et priver des renseignements nécessaires pour évaluer
     et peut-être contester les décisions de l’employeur.
     Pendant ce temps (la période de cinq ans), les hommes reçoivent leur rémunération liée à la valeur de leur travail
     comme si cela allait de soit. Or, les femmes, suivant ce régime, sont quant à elles censées endurer des périodes de
     cinq ans d’iniquité salariale et recevoir une rémunération égale seulement lorsque leur employeur agit
     volontairement de manière non discriminatoire.

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     APPLICATION EN L’ESPÈCE (jugement majoritaire) (suite)
     Cette violation est-elle justifiable dans notre société ?
      La Cour suprême répond que non.

      L’appréciation globale de l’analyse comporte plus de désavantages (la création d’obstacle à l’accès à l’équité
         salariale) que de bénéfices (qui, faute de statistiques sur la proportion d’entreprises respectant la loi modifiée et
         plus permissive, sont pour le moment non discernables et hypothétiques, puisqu’aucune preuve n’existe à cet
         égard).

      Selon la Cour, la proposition conjecturale selon laquelle le fait de sacrifier ce droit dans l’espoir d’encourager un
         respect accru possible de la loi, ne l’emporte pas sur le préjudice causé par la restriction.

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     APPLICATION EN L’ESPÈCE (dissidence des juges Côté,Wagner et Rowe)
     La dissidence ne veut pas mettre le blâme sur le Québec.
     On devrait se garder de critiquer un régime qui octroie des droits et un programme d’accès à l’égalité si celui-ci
     n’est pas parfait.
        (67) (…) Notre Cour n’a pas le mandat de dicter le meilleur moyen d’atteindre un idéal social, ni celui de se prononcer sur la
        pertinence des politiques sous-jacentes à l’adoption des lois (…)

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     La dissidence critique l’approche de la majorité écrite par la juge Abella) qui, à son avis, constitutionnalise l’équité
     salariale, alors qu’il n’en est rien.
        (84) (…) Pourtant, bien que l’équité salariale soit souhaitable dans notre société, la Charte ne confère pas un statut constitutionnel à sa
        réalisation non plus qu’à son maintien. En critiquant le caractère « épisodique » et « partie[l] » des obligations de maintien prévues dans
        les modifications à Loi (…) et en signalant que ces mêmes modifications « suspendent » le droit des femmes à la protection contre toute
        discrimination salariale pour des intervalles de cinq ans (…), les propos de la juge Abella ont pour effet de constitutionnaliser l’équité
        salariale. Or, l’équité applicable aux entreprises privées est une création du législateur québécois et qui ne jouit d’aucun statut
        constitutionnel.

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      APPLICATION EN L’ESPÈCE (dissidence des juges Côté,Wagner et Rowe) (suite)
      Ce n’est pas parce qu’un autre moyen est pris en considération pour atteindre un objectif louable que ce moyen doit
      être déclaré inconstitutionnel, plus lent ou moins efficace (mais tout de même efficace) soit-il.
      Ainsi, ce n’est pas parce qu’une 2e mesure est peut-être moins avantageuse qu’une 1re mesure, que la 2e mesure n’est
      pas avantageuse quand même.
      Les syndicats auraient dû se tourner vers le terrain politique pour modifier la loi, puisqu’ils voulaient
      vraisemblablement un autre moyen (plus rapide ou plus efficace) pour atteindre l’objectif d’équité salariale.

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                        SERVICES SOCIAUX, 2018 CSC 17

     CONCLUSION
     Les articles 76.3, 76.5 et 103.1 al. 2 de la Loi sur l’équité salariale sont déclarés inconstitutionnels.
     Précisions :
      C’est la suspension des droits à l’égalité des femmes pendant la période de cinq ans              comprise   entre     les
        évaluations qui est déclarée inconstitutionnelle.
      En effet, c’est donc uniquement l’absence de paiement rétroactif après les périodes de 5 ans qui est jugé
        inconstitutionnel, et non pas la présence de période comme le prévoit la loi en tant que tel. Si la loi avait prévu
        dès le départ des paiements rétroactifs après une période de 5 ans, les articles en question n’auraient pas été
        jugés inconstitutionnels.

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             EMPLOYÉS D’HYDRO-QUÉBEC, SECTION LOCALE 1500 (SCFP) ET
                 HYDRO-QUÉBEC (PIERRE CHIASSON), 2018 QCTA 242

      Le litige
          • Demande d’expertise médicale et émissions de restrictions médicales.
      Les faits
          • Salarié électricien embauche en 1994 à Baie-James
          • 2002, opérateur Centrale Carillon
          • 19 mars 2014 :
            o Déclenchement de la Centrale (évacuateur ouvert)
            o Mesure disciplinaire parce que l’Employeur prétend que le déclenchement est dû à des manœuvres non complétées
               quelques jours avant

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EMPLOYÉS D’HYDRO-QUÉBEC, SECTION LOCALE 1500 (SCFP) ET
                      HYDRO-QUÉBEC (PIERRE CHIASSON), 2018 QCTA 242
       Les faits (suite)
          •     1er mai 2015 :
                 o Supérieur avait observé des difficultés de concentration et d’attention au travail.
                 o Salarié a délivré un régime de travail dont la zone chevauchait une autre zone ce qui est fautif.
                 o Supérieur le rencontre et ce dernier nie les faits reprochés.
         •      13 mai 2015 :
                 o Rencontre d’équipe – discussion sur un essai sur une génératrice. Levage de la vanne évacuatrice devait se
                    faire à partir de la génératrice et non à partir de la salle de contrôle
                 o Le salarié n’est pas présent tout le temps durant les rencontres car il devait s’occuper de son pupitre en
                    même temps.
                 o Il a ouvert la génératrice à partir de son pupitre.

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                  EMPLOYÉS D’HYDRO-QUÉBEC, SECTION LOCALE 1500 (SCFP) ET
                      HYDRO-QUÉBEC (PIERRE CHIASSON), 2018 QCTA 242

       • 28 mai 2015
              o Salarié a oublié de réarmer les alarmes lors de la vérification des pompes.
              o Supérieur se questionne sur la possibilité d’une condition médicale pour expliquer les écarts de 2015.

      Les démarches médicales
       • 4 juin 2015
              o Supérieur demande une évaluation médicale.
              o Motifs : tremblements excessifs et raison médicale de ceux-ci.
              o Syndicat est informé que le salarié serait soumis à des test de dépistage + DEM pour des problèmes de
               tremblement, plans de manœuvres rédigés illisiblement.

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EMPLOYÉS D’HYDRO-QUÉBEC, SECTION LOCALE 1500 (SCFP) ET
           HYDRO-QUÉBEC (PIERRE CHIASSON), 2018 QCTA 242

      Les démarches médicales (suite)
       •   Gestionnaire indique qu’il a des motifs de croire de le salarié consommait de l’alcool ou de la poudre – le
           représentant syndical ayant travaillé avec le salarié doutait fortement qu’il y ai un problème de consommation.
       •   5 juin 2015 : rencontre avec le Dr. Rivest (HQ)
            o Md ne connaît pas le poste, a vu la description de poste.
            o Rencontre dure une heure. S’attarde sur l’état d’esprit du salarié (problèmes avec une collègue).
            o Avise le salarié qu’il va évaluer la consommation de drogue / alcool. Salarié ne s’est pas opposé parce qu’il
              ne consomme pas mais trouve la demande insultante.

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      Les démarches médicales (suite)
           o Dx : tremblement essentiel héréditaire et trouble d’adaptation secondaire à relation avec collègue.
           o Tx : voir son md traitant, consulter PAE et obtenir une consultation en neurologie.
           o Autorisation de retour au travail sans restriction en attente des résultats de tests de dépistage.
       • 27 juillet 2015 : rencontre avec le Dr. Rivest (HQ)
           o Résultats des tests de dépistage : négatifs.
           o Retourne au travail sans restriction en attente d’un rapport neurologie (md traitant) et pas de suivi avec lui.
           o Le salarié a obtenu un nouveau poste et il entrera en fonction le 1er septembre 2015.

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      Les démarches médicales (suite)
        • 1er septembre 2015 : changement de poste - Montréal
            o Formation difficile.
            o Gestionnaire trouve que le salarié n’est pas structuré dans la prise de notes et se cherchaient sur les écrans, notes
              illisibles.
            o Gestionnaire communique avec responsable formation – informe que le salarié a des problèmes de mémoire et
              nécessite la présence d’un accompagnateur – communique avec service santé – rédige DEM.
        • 20 octobre 2015 : Rencontre Dre Courchesne (HQ)
            o En attente des résultats, émissions de restrictions médicales temporaires : ne doit pas être assigné seul à un poste de
              travail.

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       Les démarches médicales (suite)
         • 2 novembre 2015 : rencontre Dre Courchesne (HQ)
             o Tremblements légers, en attente d’un rv avec neurologue
             o Pas de pathologie psychologique évidente
             o Peu de motif pour demander une évaluation neuro-psy

         • 18 novembre 2015 : rencontre Dre Courchesne (HQ)
             o Résultats tests de dépistage (sanguin) : négatifs
             o Évaluations tests pour déficits cognitifs, Alzheimer, démence et TDAH : négatifs
             o Retrait des limitations médicales, apte au travail

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      Les démarches médicales (suite)
         • 18 décembre 2015 : abandon du poste de travail et retourne à Carillon
            o Salarié abandonne le poste parce que problématique de déplacement.
            o Gestionnaires de Montréal demandent DEM.
            o Infirmière service de santé avise le gestionnaire de Carillon qu’une rencontre avec le salarié était requise avant sa
              réintégration à Carillon
            o Fixe un rendez-vous pour expertise en neuro-psychologie pour le 26 janvier 2016.

         • 20 décembre 2015 : convocation avec le Dr. Rivest pour le 21 décembre 2015.

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      Les démarches médicales (suite)
        • 21 décembre 2015 : rencontre avec Dr. Rivest
          o Syndicat rencontre les gestionnaires qui informent d’une nouvelle DEM à la demande des gestionnaire de Montréal.
          o Finalement, le service de santé Laurentides vont poursuivre les démarches d’évaluation médicale malgré le changement
            de poste.
          o Salarié surpris. Il avait remis les résultats du neurologue qui confirmait qu’il s’agissait d’un tremblement familial et lui a
            prescrit médication.
          o Lacune d’apprentissage et d’acclimatation donc, exige évaluation neuro-psy.
          o Émission de restrictions médicales en attendant les résultats de l’expertise.
          o LF : le travailleur ne pouvait occuper ses fonctions seuls.

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      Les démarches médicales (suite)
       • 23 décembre 2015 : retour au travail
           o Nouvel horaire pour assister un autre opérateur.
       • 7 janvier 2016 : réception de la convocation pour l’expertise
           o Le salarié n’y va pas à la recommandation du syndicat.
           o Le Dr Rivest maintient les limitations qui sont toujours en vigueur au moment des audiences, dont la
            dernière les le 20 février 2018.
           o Salarié humilié, questionné par ses pairs et pas droit au temps supplémentaire.

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                ET HYDRO-QUÉBEC (PIERRE CHIASSON), 2018 QCTA 242

      La décision
       •   Examen ou expertise médicale
            o Exigence de soumettre un employé à des examens et des tests portent atteinte aux droits fondamentaux
              (article 1,4 et 5 de la Charte, 3, 10,11, 35 et 2087 du C.c.Q.).
            o L’employeur doit avoir des motifs raisonnables d’exiger un examen médical et/ou un test de dépistage
              d’alcool ou de drogues

                  [166] Cependant, comme l’indique cette dernière jurisprudence, l’employeur doit avoir des motifs justes et raisonnables pour
                  exiger de tels examens ou expertises. Il ne lui est pas permis d’agir de façon arbitraire, de mauvaise foi de manière
                  discriminatoire considérant le caractère envahissant de ces examens et les inconvénients qu’ils peuvent avoir sur la vie privée
                  ou les activités normales de ce salarié.

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