Revue de presse Comité Consultatif National d'Ethique - du 8 juillet au 4 août 2017 - CHU St Etienne
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Comité Consultatif National d’Ethique pour les sciences de la vie et de la santé Revue de presse du 8 juillet au 4 août 2017 N° 337 35, rue Saint-Dominique – 75700 Paris 01.42.75.66.44 DIFFUSION RESTREINTE
SOMMAIRE n° 337 du 8 juillet au 4 août 2017 I- ÉTHIQUE L’interdiction des soins funéraires aux séropositifs a été levée 1/2 Ouest France, 20/07/17 En Angleterre, l’implant « North Sense » créé par Liviu Babitz indique le nord2/4 Le Monde, 25/07/17 Les nouveaux modes de procréation en détresse éthique 4/5 La Croix, 13/07/17 « Le terrain de la PMA a été préparé en amont, par des minorités qui œuvrent en ce sens » 5/6 Boulevard Voltaire, 13/07/17 Insolite : Handylover, l’outil pour faciliter la sexualité 6/7 Handicap.fr, 02/08/17 Quand et comment informer les patients ? 7/8 Le Quotidien du Médecin, 10/07/17 Faut-il une limite d’âge pour la PMA ? 8/9 Le Figaro, 29/07/17 Mieux évaluer les violences pendant l’accouchement 9/10 L’Humanité, 27/07/17 Des ciseaux moléculaires pour corriger les gènes : La technique CRISPR-Cas9 progrès ou dérive de la science ? 10/11 20 Minutes, 04/08/17 II- SOCIÉTÉ Soupçons autour des implants contraceptifs Essure 12/15 Le Monde, 09/07/17 « L’impasse » de l’affaire Lambert devant le Conseil d’Etat 15/16 Le Monde, 10/07/17 Le président de l’Agence nationale de la recherche écarté 16/18 Le Monde, 22/07/17 Les parents de Charlie Gard retirent leur demande de traitement aux Etats-Unis 18/19 Libération, 25/07/17 Le « portrait-robot »génétique commence à se dessiner 19/21 Le Monde, 26/07/17
Agnès Buzyn croit la France « prête » pour une PMA élargie 21/22 La Croix, 12/07/17 Le Chili pourrait légaliser l’avortement dans certains cas 22/23 La Croix, 21/07/17 La PMA sans père, hubris des temps modernes ? 23/24 Le Figaro, 12/07/17 PMA à Barcelone : « Les Françaises n’ont pas d’autre choix que de participer au tourisme médical » 24/26 Equinox Magazine, 13/07/17 Bientôt la PMA pour toutes ? 26/27 La Semaine, 17/07/17 Congeler ses ovocytes n’est pas une assurance maternité 27/29 The Conversation, 17/07/17 Procréation médicalement assistée pour toutes : une étape anthropologique qui reste à consacrer dans le droit 30/31 The Conversation, 30/07/17 Sida, l’enjeu de l’accès aux traitements 31/32 La Croix, 21/07/17 Congélation des ovocytes : pourquoi ça bloque 32/34 Elle, 24/07/17 Baclofène : la colère des médecins monte d’un cran 34/35 Le Figaro, 26/07/17 Pourquoi deux sexes ? 35/37 La Libre Belgique, 27/07/17 Montpellier. La manif Pour Tous s’affiche sur les autoroutes et prépare sa rentrée 37/38 Lengadoc-info, 31/07/17 Le médecin coordonnateur, ce funambule 38/39 Le Quotidien du Médecin, 10/07/17 Inquiets ou indignés, typologie des anti-vaccins sur Internet 39/40 Libération, 12/07/17 Codéine : la drogue des ados désormais uniquement sur prescription 41/42 Le Figaro, 08/07/17 La « PMA pour toutes » face au risque de pénurie de gamètes 42/43 Le Figaro, 11/07/17 L’enfant greffé des deux mains écrit 43/44 Le Figaro, 19/07/17 III – RECHERCHE Un film encodé et stocké dans le génome de bactéries 45/46 Le Monde, 18/07/17
L’autisme serait plus difficile à diagnostiquer chez les filles 46/47 La Croix, 01/08/17 Crispr : édition génétique d’embryons humains aux Etats-Unis 47/48 Sciences et Avenir, 02/08/17 L’IRM le plus puissant au monde s’installe à Saclay pour explorer le cerveau humain 48/49 Le Figaro, 10/07/17 Des chercheurs réussissent à corriger un gène défectueux dans des embryons humains 50/51 Le Monde, 04/08/17 IV - PERSONNALITÉS, FILMS ET OUVRAGES « La GPA doit-elle entrer dans nos mœurs ? Non » 52/53 Le Monde, 09/07/17 Frédérique Kuttenn : Ceux qui demandent un enfant par GPA ne réalisent pas l’intensité de leur demande » 54/55 Le Monde, 12/07/17 Le droit des femmes, celui des enfants 55/56 Ouest France, 11/07/17 Surdiagnostic médical : Le point sur la question 56/57 Notre Temps, 02/08/17 Mgr Lebrun dénonce le « droit absolu à l’enfant » et prône le droit de l’enfant à être accueilli 57/59 La Croix, 05/07/17 Mgr Brouwet souhaite un débat citoyen sur la PMA où la raison l’emporterait sur l’émotion 59/63 La Croix, 14/07/17 « Prohiber le marché des mères porteuses » 63/64 Ouest France, 21/07/17 2 priorités en faveur de la GPA pour mettre fin à la discrimination des femmes et des enfants 64/65 Huffington Post, 27/07/17 PMA pour toutes : le « conformisme idéologique » du CCNE 65/66 Valeurs Actuelles, 27/07/17 PMA aux couples de femmes et aux femmes seules : ne pas se précipiter et débattre 66/68 La Croix, 31/07/17 « Une reconnaissance pour la recherche française » 68/69 Le Quotidien du Médecin, 20/07/17 Les camps de vacances vigilants face à la maladie de Lyme 69/70 Le Figaro, 02/08/17
ÉTHIQUE L’interdiction des soins funéraires aux séropositifs a été levée Ouest France du 20 juillet par Florence Thune D'après un arrêté paru ce jeudi au Journal officiel, les personnes porteuses du VIH ou de l'hépatite peuvent désormais avoir accès à des soins funéraires. Les personnes séropositives décédées pourront désormais recevoir des soins funéraires, ce qui leur était interdit depuis 1986, selon un arrêté paru ce jeudi au Journal officiel. La levée de cette interdiction, qui concerne aussi les personnes décédées atteintes d'hépatites, était réclamée de longue date par les associations de lutte contre le sida. Elle prendra effet le 1er janvier 2018. Selon l'arrêté fixé le 12 juillet et signé ce jeudi par la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, le sida et les hépatites ont été retirés de la liste des maladies concernées par cette interdiction. Elle était réclamée de longue date par les associations de lutte contre le sida et a été annoncée à trois jours de l'ouverture de la conférence internationale de recherche sur le sida, dimanche à Paris. L'interdiction était « une discrimination et une situation indigne pour les familles et l'entourage. Quand elles rendaient visite au corps, celui-ci était dans un état de délabrement du fait de la maladie », a réagi pour l'AFP Joël Dumier, président de l'association SOS homophobie. Les soins de conservation des corps (thanatopraxie), qui visent à retarder le processus de décomposition, consistent notamment à injecter dans le système vasculaire un produit antiseptique et conservateur à la place du sang. En 2013, un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) et de l'Inspection générale de l'administration (IGA) estimait que la thanatopraxie concernait environ 200 000 des 545 000 personnes décédées en France, soit plus d'un décès sur trois. Ces soins étaient jusque-là interdits aux personnes décédées séropositives et atteintes d'hépatites en vertu de deux textes datant de 1986 puis 1998, par crainte de contamination. « C'était une mesure tellement anachronique », s'est félicité Christian Andreo, directeur général adjoint de l'association Aides, auprès de l'AFP. « Elle datait du temps de la terreur du VIH, une maladie dont on ne savait rien. On voulait alors placer les personnes séropositives dans des cercueils plombés », a-t-il poursuivi. « Il n'y a jamais eu un seul thanatopracteur, un seul professionnel de la mort qui s'occupe de ces personnes, qui a été infecté par le VIH », a souligné auprès de l'AFP Jean-Luc Romero, conseiller régional d'Ile-de-France et militant de la lutte contre le sida. « On était un des seuls pays aux monde à appliquer cette discrimination », a-t-il ajouté. « On faisait tout pour que ça reste une maladie taboue, une maladie honteuse ». De précédents ministres de la Santé, Xavier Bertrand en 2012 puis Marisol Touraine en 2014, s'étaient déjà prononcés en faveur de la fin de l'interdiction. Elle avait également été recommandée par le Haut conseil à la santé publique et d'autres organismes. Mais elle s'est faite à petits pas. D'abord, un décret a été publié en décembre dernier pour rendre obligatoire la vaccination des thanatopracteurs contre l'hépatite B. Puis, le 11 mai, un décret et un arrêté sont parus pour préciser les conditions d'intervention des thanatopracteurs (information des familles, équipement des lieux, précautions d'hygiène, soins funéraires à domicile sous certaines conditions). C'est à ce moment-là, juste après l'élection d'Emmanuel Macron à la présidence de la République, que des associations de lutte contre le sida l'ont interpellé pour lui demander la levée de l'interdiction. Le décret paru jeudi précise que les soins funéraires de conservation des corps restent interdits dans le cas de personnes décédées de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, de tout « état septique grave », de la rage, du choléra ou de la peste. 1
En Angleterre, l’implant « North Sense » créé par Liviu Babitz indique le nord Le Monde du 25 juillet 2017 par Yves Eudes Rebelles high-tech. Le Londonien a conçu North Sense, une boussole sous-cutanée fixée comme un piercing, qui permet de se repérer dans l’espace. Londres, dans un pub animé du centre-ville. Avant même toute explication, Liviu Babitz déboutonne son col et entrouvre sa chemise. Il dévoile un boîtier translucide de trois centimètres de long et d’un centimètre d’épaisseur, accroché dans sa chair, au milieu de sa poitrine, avec quatre clous de piercing à bout rond. « Voici le North Sense, il vibre dès qu’il est orienté vers le nord magnétique. A chaque fois que je fais face au Nord, j’en suis averti par une sensation physique, brève mais très présente. » Au lieu d’avoir seulement cinq sens comme un simple mortel, Liviu Babitz en possède un sixième, le sens du nord. Né en Roumanie il y a trente-six ans, élevé en Israël et installé à Londres, Liviu Babitz est l’inventeur de cet appareil électronique inédit et le patron de la start-up qui le commercialise, baptisée Cyborg Nest – le « nid de cyborgs », ces créatures de science-fiction surpuissantes mi-hommes, mi-machines. Selon lui, l’avènement des cyborgs dans le monde réel est imminent : « L’industrie des implants intelligents est en plein essor, mais elle est uniquement médicale − pacemakers, pompes à insuline, prothèses articulées, cœurs artificiels… Il est grand temps de mettre ces technologies au service des gens valides, qui vont pouvoir accroître leurs capacités physiques, sensorielles et intellectuelles selon leurs désirs. » Malgré sa petite taille, North Sense, qui pèse à peine 8 grammes, est un objet complexe : plus de 200 composants sont disposés sur trois couches. Son cœur, construit en Israël, est un magnétomètre (une « puce-boussole » qui sert à mesurer l’intensité ou la direction d’un champ magnétique) semblable à ceux qui équipent les smartphones haut de gamme et couplé à un vibreur. Il contient aussi un émetteur Bluetooth qui permet de se connecter à une application sur smartphone pour le configurer. La mini-batterie se recharge par l’intermédiaire d’une prise USB et possède une autonomie variant entre vingt-cinq et soixante heures, selon les déplacements. Le boîtier, en plastique souple non irritant, est fabriqué en Allemagne. La monture et les clous sont produits aux Etats-Unis par Steve Haworth, célèbre « artiste de la modification corporelle » et pionnier des piercings extrêmes. Militantisme et caméras embarquées Liviu Babitz, qui a une formation en mathématiques, n’en est pas à sa première invention. Pendant cinq ans, il fut l’un des responsables de l’ONG humanitaire Videre Est Credere, qui aide des militants africains pour les droits de l’homme, en lutte contre des dictatures, à filmer clandestinement les exactions perpétrées par des policiers ou des soldats. Pour les aider à accomplir ces missions dangereuses, Liviu Babitz fabriquait des caméras miniatures camouflées dans des objets usuels : stylos, calculettes, montres bracelet, mais aussi un crucifix à porter sur la poitrine… Lui-même fit de nombreux séjours en Afrique, dans la clandestinité. Il mène aujourd’hui une vie calme à Londres avec sa famille, mais il a transposé son esprit militant et sa passion pour la technologie dans son nouveau projet. Le North Sense peut s’enlever à volonté, pour être rechargé ou nettoyé : il suffit de le décrocher de sa monture qui, elle, reste clouée à la peau. Mais Liviu Babitz recommande de le porter en permanence : « North Sense n’est pas un outil que l’on utilise ponctuellement puis que l’on range, comme on pourrait le faire avec une boussole. Il n’a pas de bouton marche-arrêt, ni d’écran, ni de voyant lumineux, ni de jingle. C’est un nouvel organe sensoriel fonctionnant en continu, sans 2
intervention consciente, comme les organes naturels. » Liviu Babitz porte un North Sense depuis six mois. « Au début, c’est excitant. Grâce aux vibrations fréquentes de l’appareil à chaque fois que je fais face au nord, j’ai acquis un sens plus aigu de ma localisation. Quand on sait où est le nord, on ressent aussi la direction du sud, de l’est et de l’ouest. En fait, c’est un sens simple, basique, primitif. Dans une ville inconnue, dès que je sors de mon hôtel pour découvrir le quartier, je me sens connecté à l’environnement de façon instinctive, je suis en confiance. Et, quand je me promène dans la nature, je ressens profondément que je suis en train de me déplacer à la surface de cette planète. » De même, sa connaissance de Londres s’améliore : quand il se trompe de chemin, le North Sense lui montre que le nord est à l’opposé de ce qu’il croyait et redessine la carte de la ville dans sa tête. Perception extrasensorielle ? Au fil des mois, les choses changent : « Le cerveau commence à filtrer la vibration, c’est plus cool. Je capte le nord en toile de fond, comme une donnée subliminale qui vient s’ajouter à ma perception générale. Quand vous regardez quelque chose avec attention, vous continuez à entendre les sons et à sentir les odeurs, et tout ça se combine dans votre esprit. C’est la même chose avec le sens du nord. On reçoit l’information en arrière-plan, et on peut la faire passer en premier plan en cas de besoin. » Il a déjà le sentiment que North Sense fait partie de lui : « Un jour, mon appareil s’est arrêté, car j’avais oublié de le recharger. J’ai ressenti un vrai manque physique. » A terme, il espère que l’utilisation prolongée provoquera de nouvelles connexions neuronales permanentes dans son cerveau, qui sera ainsi doté d’une nouvelle faculté. Pour monter la société Cyborg Nest, Liviu Babitz s’est associé à Scott Cohen, 51 ans, un New- Yorkais installé à Londres, connu dans le monde de l’Internet pour avoir créé un service de distribution de musique en ligne dès 1997. Scott a l’habitude d’être en avance sur son temps : « A l’époque, c’était compliqué d’expliquer aux gens que l’avenir de la musique était sur le Net, mais ça ne m’a pas découragé. » Aujourd’hui, il répète l’expérience avec North Sense. « Nous baignons dans une soupe immense, que nos sens innés ne perçoivent pas : lumière infrarouge ou ultraviolette, rayons X ou gamma, ultrasons, ondes de toutes sortes… Que se passerait-il si nous pouvions les percevoir ? » Il n’a pas la réponse, mais il y travaille, en portant un North Sense jour et nuit. « Grâce à ces centaines de petites vibrations quotidiennes, je ressens le champ électromagnétique qui entoure la planète. » Plus généralement, il constate que l’industrie high-tech dépense beaucoup d’argent et d’énergie pour rendre les objets plus intelligents − téléphones, voitures, maisons : « Pourquoi ne pas essayer, aussi, de rendre notre cerveau plus efficace et plus perceptif ? » En ce sens, selon lui, North Sense se positionne à l’opposé de l’intelligence artificielle. Cela dit, à ce stade, ce sixième sens est surtout esthétique : « Regarder une boussole, c’est comme lire une partition musicale. Ressentir North Sense, c’est comme en entendre la musique. Physiquement, la musique n’est qu’une vibration à laquelle notre cerveau donne un sens. » Les premiers clients sont des adeptes… du piercing Dans sa version actuelle, North Sense coûte 425 dollars. Cyborg Nest n’a pas encore de locaux, mais elle a déjà prévendu 250 appareils sur Internet au cours de l’hiver et en vend désormais cinq à dix par semaine. Les premiers clients, presque tous des hommes, furent en majorité des adeptes du piercing extrême. A Barnstaple, station balnéaire du sud-ouest de l’Angleterre, la boutique de tatouage et de piercing Electric & Steel vend et pose des North Sense. Son patron, Nick Pinch, 32 ans, sévèrement percé et tatoué de partout, a entendu parler du projet en septembre 2016 dans un salon professionnel en Allemagne : « J’ai tout de suite été enthousiasmé. Je suis fan de science- fiction, le concept de cyborg m’est familier. J’ai préacheté six North Sense sur le champ. » Les appareils ont été livrés en avril 2017 et Nick Pinch les a vendus en quelques semaines à des habitués de sa boutique. Il va en commander un nouveau lot et s’en faire poser un par un de ses collègues. Une autre clientèle a aussi été séduite : les amateurs de puces électroniques sous- cutanées, déjà nombreux dans certains pays, comme le Royaume-Uni et la Suède. Semblables aux puces d’identification implantées dans les animaux, elles se placent dans le gras de la main et 3
servent à déverrouiller des ordinateurs, ouvrir des portes, transmettre ses coordonnées à un smartphone, stocker des données… A Barnstaple, Nick Pinch en a posé plusieurs centaines en un an. Les clients viennent de tout le pays. Récemment, il leur a proposé le North Sense, et certains se sont dits intéressés. Cyborg Nest vend désormais ses appareils dans le monde entier, surtout dans les pays anglo-saxons, mais aussi au Mexique ou en Autriche. Les nouveaux clients sont informaticiens, avocats, aviateurs, artistes… Mohsen Minae, 34 ans, un ingénieur pétrolier vivant à Dallas (Texas), s’en est fait offrir un par sa femme pour son anniversaire : « J’ai vu une photo sur Facebook et, aussitôt, je me suis dit : “J’en veux un.” » Cet attrait lui semble naturel : « En tant que technicien, ma mission est d’améliorer tout ce qui m’entoure, y compris le corps humain. » Il constate que l’évolution de l’espèce est en panne depuis des millénaires : « Elle a été bloquée par notre mode de vie civilisé, par l’utilisation de technologies qui nous donnent de nouveaux pouvoirs, extérieurs à nous-mêmes. Pour relancer le processus, nous devons installer ces technologies à l’intérieur de notre corps. » Il remarque déjà que, grâce au North Sense, sa mémoire des lieux s’est transformée, pour inclure l’orientation des intérieurs et des paysages. Grâce à ce succès initial, Liviu Babitz va lancer d’autres projets. Il imagine déjà de nouveaux types de machines implantables : « par exemple, un capteur qui détecterait des polluants chimiques dangereux indécelables à la vue ou à l’odorat et qui m’avertirait pour que je m'éloigne de la zone contaminée ». Bonne nouvelle, les cyborgs prendront soin de leur santé. Les nouveaux modes de procréation en détresse éthique La Croix du 13 juillet 2017 par Paul Valadier* Le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) s’est dit favorable à l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de femmes ainsi qu’aux femmes célibataires. Dans son avis rendu public le mardi 27 juin, l’instance s’est prononcée par ailleurs contre l’ouverture de l’autoconservation ovocytaire à toutes les femmes et contre la gestation pour autrui (GPA), estimant notamment « qu’il ne peut pas y avoir de GPA éthique ». Le récent avis du Comité consultatif national d’éthique mérite attention et vigilance. Le texte très attendu par l’opinion publique et le législateur résulte de longues discussions, il témoigne d’une délibération poussée, conduite dans le souci d’honorer des positions divergentes, voire opposées. Ces pages très fouillées ont aussi le mérite d’aboutir à des conclusions précises, concernant aussi bien l’autoconservation ovocytaire que la gestation pour autrui, sujets sur lesquels les plus grandes réserves sont avancées. Par contre, l’assistance médicale à la procréation (AMD) est ouverte à toutes les femmes qui la souhaitent. D’où vient donc le malaise qui saisit le lecteur et qui laisse l’impression d’une détresse de la pensée ? Comment ne pas éprouver un contraste frappant entre la bonne volonté affichée de répondre à des "demandes sociétales" et l’impuissance à avancer une réflexion éthique ou morale un peu ferme ? Malgré toute la minutie des précisions techniques qui émaillent ces pages, on a l’impression que l’émotion l’emporte sur la rigueur intellectuelle. Visiblement le souhait de répondre aux "demandes sociétales", de supprimer autant que possible les "souffrances" liées au "désir d’enfant", de faire face, voire d’anticiper les "changements anthropologiques majeurs" qui se profilent à l’horizon, commande les conclusions, de même que la volonté à tout prix d’honorer l’autonomie et le souhait d’enfant chez la femme. Ainsi encore de l’expression étrange des "points de butée" pour désigner les opinions divergentes, nombreuses puisque le texte n’est pas signé par un quart des membres du Comité. S’agit-il d’oppositions majeures, mais si tel est le cas, comment les ranger dans les marges, comme s’il s’agissait de remarques secondaires, ou de concessions bienveillantes à des avis de peu de poids ? 4
On se défend mal de l’impression d’un désarroi des auteurs, fascinés par les "mutations" et démunis pour y faire face. On est surpris d’ailleurs de relever un aveu inquiétant. Les auteurs sont certainement conscients de la fragilité de leur réflexion intellectuelle, puisqu’ils attendent des confirmations plus fortes d’un double côté. Ils comptent, non pas sur une réflexion morale et anthropologique cohérente, mais d’abord à l’avenir sur "des productions académiques fiables, offrant une information aussi complète que possible" : autant s’appuyer sur du sable mouvant, car ces "productions" seront nécessairement marquées par le provisoire, caractéristique de toute recherche scientifique ; autant aussi croire qu’une information "complète" (?) dispensera d’une approche théorique et rationnelle. Mais ils comptent encore, et semble-t-il surtout, sur l’apport de "conférences citoyennes", donc sur la contribution de la société civile, pour ouvrir des voies nouvelles. Autant dire qu’on attend de l’opinion publique qu’elle tranche en des questions aussi délicates et aussi techniques, autant avouer que l’on s’incline devant l’avis (ou la tyrannie ?) de la majorité, comme s’il s’agissait là d’un fondement moral crédible et substantiel, autant dire encore qu’on s’appuie sur le vide, car personne ne sait au juste ce que pourraient être de telles conférences dites citoyennes. Il semble presque impossible de reconnaître plus clairement que le Comité s’avoue tributaire de l’opinion dominante ou des groupes de pression les plus forts. Il donne un avis tout provisoire dans l’attente de l’évolution sociale. Les bases fournies dans cet avis ouvrent d’ailleurs la voie à la justification future de pratiques inquiétantes. Ainsi au sujet du suicide assisté, un futur avis pourra invoquer la nécessité de pallier une extrême souffrance et au désir d’en finir, deux notions clés avancées ici et dont l’usage abusif ne manquera pas de justifier toutes sortes de pratiques, bousculant au passage les bases même d’une pratique médicale authentique. Ce texte ouvre la voie au législateur. On veut espérer que celui-ci ne renouvellera pas l’attitude de mépris et de suffisance qui a caractérisé le débat (si débat il y eut) sur le "mariage pour tous", et qu’il saura prendre au sérieux les "points de butée" évoqués ici. Il devra se souvenir que de la faiblesse intellectuelle à la défaite politique, il n’y a pas loin. *Professeur émérite aux Facultés jésuites de Paris nous aide à réfléchir. « Le terrain de la PMA a été préparé en amont, par des minorités qui œuvrent en ce sens » Boulevard Voltaire du 13 juillet 2017 par Adeline Le Gouvello, avocate au barreau de Versailles La société française « prête à un élargissement de la PMA » ? affirmation de la ministre des Solidarités et de la Santé : ce n’est pas la société qui est prête, mais des minorités agissantes. Et l’on va entériner des situations contraires à la loi. Suite à l’avis rendu par le CCNE (Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé), la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn, a estimé que la société française était prête à un élargissement de la PMA. Que peut-on dire de cet avis ? La ministre dit cela mais, en réalité, seules des minorités sont prêtes à cette avancée vers la PMA. Ce sont elles qui œuvrent dans ce sens. Le terrain a été préparé en amont. En mars 2016, 130 gynécologues signaient un manifeste à l’initiative du professeur Frydman. Ils disaient avoir aidé des 5
couples homosexuels à avoir un enfant malgré l’interdiction de la loi. C’était le titre de leur manifeste. Aucune poursuite pénale n’a été retenue, alors que de telles violations étaient passibles de sanctions. Parallèlement, les couples de femmes avaient obtenu de la Cour de cassation la possibilité de valider l’adoption par la conjointe de l’enfant conçu à partir d’une insémination artificielle avec un donneur réalisée à l’étranger en contournement de la loi française. Tout un terrain a été préparé en amont. On sait, en outre, que le Comité consultatif national d’éthique a vu sa formation changer avec la nomination de personnalités favorables à cette avancée. Finalement, nous n’avons donc plus affaire à un comité qui étudie les fondements éthiques et anthropologiques permettant de légiférer ou pas en ce sens. Nous avons affaire à une institution qui, désormais, répond aux revendications d’adultes avec des motivations très légères. Lorsqu’on voit que le CCNE donne un avis favorable à cette avancée en invoquant que l’on peut faire confiance aux femmes, l’argument laisse assez pantois, tellement sa pauvreté est manifeste. On voit deux problématiques dans ce que vous dites, une partie légale et une partie éthique. Pour la partie légale, ne pensez-vous pas qu’il soit choquant que la légitimé d’une décision politique repose sur une violation de la loi ? La pratique que l’on observe actuellement est de faire entériner, de donner des conséquences juridiques à des situations qui sont pourtant contraires à la loi. On le voit dans diverses matières. On le voit en matière de PMA et de GPA. Les institutions ne passent même plus par la loi, puisque ce sont les juges qui entérinent pas à pas les conséquences de ces contournements légaux. En définitive, ce processus vide ces interdictions légales de toute substance. Pour la partie éthique, ne pensez-vous pas que le fait de dire qu’il faille faire confiance aux femmes soit complètement vide de sens ? Effectivement, c’est complètement vide de sens. Il n’y a de fondement ni juridique ni éthique. En revanche, les droits des enfants sont totalement écartés. Le CCNE accepte, par-là, de valider la fabrication d’enfants dépourvus d’une partie de la filiation et d’écarter définitivement le père. Pourtant, ces enfants ont un père. On écarte la Convention internationale des droits de l’enfant, qui garantit à ce dernier de connaître son père et sa mère et, dans la mesure du possible, être éduqué par eux. D’un point de vue tant juridique qu’éthique, cet avis est très surprenant. Insolite : Handylover, l'outil pour faciliter la sexualité Handicap.fr du 2 août 2017 par Aimée Le Goff Pour permettre à toutes les personnes en situation de handicap moteur d'accéder à la sexualité sans assistant, Rodolphe Brichet a imaginé une aide technique qui facilite leur mobilité. Un concept récompensé par un prix Ocirp handicap fin juin 2017. Une vie sexuelle sans tabou malgré le handicap ? C'est ce que propose le Handylover, outil d'aide à la sexualité, imaginé par l'association Mobility desire. Ce dispositif d'assistance sexuelle destiné aux personnes handicapées est un produit personnalisable et réglable, avec différentes options ergonomiques pour permettre plus de mobilité et faciliter certains mouvements ou positions. Il offre à tous, seul ou en couple, toutes les possibilités répondant aux orientations et pratiques sexuelles de chacun. Il a été conçu pour répondre aux recommandations du CCNE (Comité consultatif national d'éthique) qui préconise de « faciliter l'accès à des moyens mécaniques de satisfaction sexuelle ». 6
Pour Corinne Del Aguila-Berthelot, médecin sexologue, le Handylover est un nouveau moyen pertinent d'accéder à la sexualité. « Il m'a paru très intéressant d'avoir un outil qui met le corps en mouvement », confie-t-elle. Rodolphe Brichet, son concepteur, s'explique : « J'avais des compétences dans le domaine des machines de sport. Le Handylover est une solution alternative mécanique dans un pays où l'assistanat sexuel est assimilé à de la prostitution. ». Aujourd'hui, seulement 10 % du produit est finalisé ; le reste doit encore être développé. Le 29 juin 2017, ce projet innovant a été récompensé lors de la 10ème édition des Prix Ocirp handicap, dans la catégorie « vie affective et sexualité ». « La sexualité est désormais reconnue comme un droit ; l'impossibilité d'y accéder constitue donc un préjudice. Handylover permet d'éviter la problématique des assistants sexuels et de trouver un projet intime avec un partenaire ou seul. C'est la seule innovation dans ce domaine », expliquait alors Pr Thierry Troussier, responsable du DU (Diplôme universitaire) de santé sexuelle et droits humains à l'université Paris-Diderot. Risque génétique Quand et comment informer les patients ? Le Quotidien du Médecin du 10 juillet 2017 par le Dr Alain Marié Dans le cadre de son congrès, à Montpellier, la Société française de médecine prédictive et personnalisée (SFMPP) a présenté ses recommandations sur la gestion des données secondaires, découvertes à l’occasion d’une analyse génétique motivée par une autre cause. Dès lors, la question difficile se pose : que peut-on dire, ou plus exactement, que ne peut-on pas cacher au patient ? En sachant que ce dernier doit être maître du choix, a priori… On sait que les séquençages de génome deviennent de plus en plus fréquents (le plan France médecine génomique en prévoit 235 000 en 2020). On sait moins que chez des patients symptomatiques, il peut être prescrit par tout clinicien, l’intervention d’un généticien s’imposant en cas contraire (un accès à l’analyse que les généticiens souhaiteraient plus encadrés, pour que les quotas affectés permettent de couvrir les besoins les plus justifiés). Comme le souligne le Pr Pascal Pujol, 2 % des analyses pratiquées découvrent des données fortuites ou secondaires, liées à un risque élevé de maladies graves et sur lesquelles on peut agir. C’est le cas pour 29 gènes « actionnables » parmi les 73 reconnus comme prédisposant à divers types de cancers. Que faire dans ce cas ? C’est à cette question que vient de répondre une commission multidisciplinaire composée de cancérologues, de généticiens, d'éthiciens et de patients de la SFMPP. En premier lieu, il est affirmé que c’est au patient de décider, raison pour laquelle il est prévu un recueil de consentement éclairé avant la réalisation du patient mais aussi avant la remise des résultats. « La liberté de savoir ou de ne pas savoir est fondamentale, insiste le Pr Pujol… Les choses devenant moins simples quand une enquête familiale se justifie. La présentation des résultats doit être elle-même très préparée et effectuée par des médecins compétents, en respectant les dispositions législatives ». Surtout, conclut Pierre Le Coz, professeur de philosophie (Marseille), ancien membre du Comité consultatif national d’éthique, « l’information n’est pas un but en soi, pour le médecin : elle n’a de sens que si elle permet une action préventive. Sinon on contribuerait à favoriser une société de l’angoisse… ». Sûrement pas l’objectif des médecins présents, n’en déplaise à certains militants venus dénoncer la « prison génétique » qu’on nous préparerait… 7
Faut-il une limite d’âge pour la PMA? Le Figaro du 29 juillet 2017 par Pauline Fréour Des experts de l’Agence de la biomédecine veulent fixer à 60 ans l’âge limite d’assistance à la procréation pour les hommes. Peut-on être trop vieux pour devenir parent ? En temps ordinaire, la nature se charge de trancher, parfois cruellement. Les femmes voient leurs chances de concevoir quasi disparaître avec l’entrée dans la quarantaine, les hommes gardent ce pouvoir jusqu’à la fin de leur vie. Mais quand il s’agit de concevoir un enfant en recourant à l’assistance médicale à la procréation (AMP ou PMA), c’est à la société que la question se pose. En France, la loi de bioéthique réserve ces techniques médicales aux hommes et aux femmes « en âge de procréer », sans plus de précision. La Sécurité sociale prend en charge l’AMP chez la femme jusqu’à 43 ans (âge au-delà duquel ses chances de grossesse avec ses propres gamètes deviennent trop minces). Toutefois, le don d’ovocytes permet désormais d’obtenir des grossesses bien plus tard. Les repères sont moins nets pour les hommes, mais dans la pratique, de nombreux centres médicaux se montrent réticents ou du moins prudents quand le patient approche de la soixantaine. Devant ce flou juridique, le conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine (ABM), chargé de la conseiller sur les questions éthiques, s’est emparé du sujet début juillet. Compte tenu des risques éventuels pour la santé de la mère et/ou de l’enfant, des incertitudes quant à l’avenir de l’enfant, mais aussi de la légitimité du désir d’enfant d’un couple, est-il nécessaire de fixer un âge « limite » à la procréation assistée, se sont interrogés les experts médicaux, juristes et associations de patients qui le composent. La révision programmée de la loi de bioéthique l’an prochain et l’actualité judiciaire ne peuvent être étrangères au choix de se prononcer sur le sujet maintenant. En juin, un Français de 69 ans a obtenu le droit d’utiliser ses gamètes dans le cadre de l’AMP malgré l’opposition de l’Agence de la biomédecine. À 65 ans, l’homme avait fait congeler son sperme avant un traitement qui l’avait rendu stérile. La clinique qui le suivait en France refusant de reprendre le processus d’AMP après sa convalescence, jugeant son état de santé trop fragile, il avait demandé le transfert du prélèvement en Belgique pour y poursuivre sa démarche. Ce genre de transfert nécessite le feu vert de l’Agence de la biomédecine qui ne l’avait pas donné. Le couple a saisi la justice et l’agence s’est vue contrainte en appel de laisser partir les gamètes. Le conseil d’orientation de l’ABM s’est prononcé pour la fixation d’un âge limite explicite, de 43 ans pour les femmes et 60 ans pour les hommes. Les arguments sont multiples. Concernant la santé de la mère, l’avis note que les risques d’embolie pulmonaire, d’infarctus, d’arrêt cardiaque, ou d’insuffisance rénale sont « significativement » augmentés, passé 45 ans, et que le risque de décès est multiplié par 7,9 par rapport aux femmes de 20-29 ans. Pour l’enfant, l’âge de la mère augmente le risque de mort in utero, de prématurité et de trisomie 21. L’âge du père élève le risque de certaines maladies génétiques rares (achondroplasie, épilepsie, trisomie 21), et, possiblement, de schizophrénie et d’autisme. L’âge des parents diminue aussi, tout simplement, les chances de succès de l’AMP. Sur le plan psychologique, les auteurs s’inquiètent des difficultés éducatives que pourront rencontrer les parents âgés, ainsi que du risque que l’un des parents décède avant que l’enfant ait atteint l’âge adulte. Ils redoutent encore les effets d’un bouleversement générationnel : « Il risque de ne plus y avoir de grands-parents présents pour l’enfant, alors que ces “adultes de recours” sont d’une grande aide lors des crises à l’adolescence. » « Il existe une demande de la part de certains de nos confrères d’avoir des repères officiels », explique le Pr Louis Bujan, chef du pôle mère-couple du CHU de Toulouse, membre du conseil d’orientation. « Fixer un âge permettrait d’éviter de discuter sans arrêt. Parfois, nos objections sont bien entendues par les couples, mais elles peuvent aussi être très mal prises. » Convaincue de la nécessité de fixer une limite d’âge au recours à l’AMP, et d’accord avec ceux qui ont été retenus dans l’avis, Frédérique Dreifuss-Netter, membre du conseil d’orientation de 8
l’agence, regrette cependant certaines faiblesses de l’argumentation. « Mettre sur le même plan les pathologies plurifactorielles comme l’autisme et la schizophrénie, dans lesquelles l’impact de l’âge du père est incertain, avec les risques prouvés et quantifiés de certaines maladies génétiques ou de pathologies maternelles liées aux grossesses tardives, ne me paraît pas juste », explique-t-elle. La conseillère à la Cour de cassation prend aussi ses distances avec l’évocation de supposés risques sociaux, qui relève selon elle d’une « ingérence dans le domaine de la morale, qui stigmatise les parents âgés en général. Cela n’avait pas sa place dans un avis relatif à l’AMP », juge-t-elle. Professeur de gynécologie-obstétrique à Strasbourg, Israël Nisand est d’accord avec l’âge limite fixé pour le père, « il y a des arguments médicaux en ce sens », mais déplore la « sévérité de l’agence » à l’égard des femmes. « L’âge de procréer cité par la loi, c’est 50 ans pour les femmes, si l’on regarde les données de l’Ined, car il y a encore des grossesses naturelles à cet âge ! », rappelle-t-il. Ce qui n’interdit pas une certaine prudence au cas par cas. « Deux femmes de 43 ans ne se valent pas. Or la grossesse, c’est comme une épreuve sportive. On peut être en bonne forme à 48 ans, sans contre-indication, et présenter au contraire des risques à 35 ans parce qu’on a fait une embolie et un infarctus. » Israël Nisand plaide pour une certaine flexibilité dans l’interprétation du concept de limite. « Se baser sur une date anniversaire stricte ne me paraît pas sain. Que se passe- t-il par exemple si un homme devient père à 59 ans mais perd le bébé. Ne peut-il avoir de seconde chance ? » Une souplesse également prônée par le Pr Paul Barrière, chef du pôle mère-enfant au CHU de Nantes. « Je suis partisan du cas par cas, car je crois en l’autonomie de l’individu quand il est bien informé sur les risques de ses actes. Réfléchir à l’âge est une bonne chose, mais vouloir être normatif sur ce sujet, cela relève à mon sens du paternalisme. » « Je comprends que certains confrères ressentent le besoin d’une loi, mais je ne suis pas sûr que fixer un âge limite ferme soit juste, poursuit-il. Il existe des parcours de vie différents, des femmes qui mettent du temps avant de rencontrer le père de leur enfant, des militaires qui ne se “posent” qu’à la cinquantaine. Il faut en tenir compte. Et en cas de demandes extrêmes, on arrive à raisonner les gens si l’on prend le temps de les écouter. » Mieux évaluer les violences pendant l’accouchement L’Humanité du 27 juillet 2017 par Marie Barbier La secrétaire d’Etat chargée de l’Egalité entre hommes et femmes a commandé un rapport sur les maltraitances obstétricales. Les gynécologues S’insurgent. Un tabou tombe en France. Et pas des moindres. Celui des violences subies par les femmes au moment de leur accouchement. Les témoignages se font de plus en plus nombreux de mères qui racontent des épisiotomies pratiquées à vif (un acte chirurgical qui consiste à sectionner partiellement le périnée), des déclenchements abusifs, de l’ocytocine injectée sans consentement (hormone utilisée pour déclencher les contractions utérines qui n’est pas sans conséquences), voire des pieds attachés pendant l’expulsion… Le tout dans une absence d’information et de consentement magistrale. La secrétaire d’Etat à l’Egalité entre les hommes et les femmes Marlène Schiappa s’en est émue et vient de commander un rapport sur les « violences obstétricales ». Une première dans un pays où aucun chiffre n’existe sur la question. « Ce n’est pas marginal » 9
« On sait que 6 % des femmes qui accouchent sont touchées par le syndrome post-traumatique, 20 % par des dépressions post-partum souvent liées à leurs conditions d’accouchement et 20 à 25 % des femmes ont mal vécu leur accouchement, explique Marie-Hélène Lahaye, juriste et auteure du blog féministe Marie accouche là. Sur les 800 000 accouchements chaque année en France, ça représente des dizaines de milliers de femmes, ce n’est pas marginal ». Sans surprise, l’initiative de Marlène Schiappa n’a pas été du goût du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), qui par la voix de son président, Israël Nisand, a fustigé lundi une secrétaire d’Etat « mal informée » : « Lorsque vous parlez de violences obstétricales, vous maltraitez notre profession dans son ensemble ». La secrétaire d’Etat avait évoqué un taux de 75 % d’épisiotomies quand les derniers chiffres de 2010 en comptabilisaient 44 %. Mais cette querelle de chiffres ne doit pas masquer le débat sur la réalité de ces violences subies par les femmes. « C’est une révolution que le politique s’empare enfin de ce sujet sans le déléguer aux médecins, se félicite Marie –Hélène Lahaye. On va enfin pouvoir prendre conscience de ce qui se passe dans les salles d’accouchement ». Des ciseaux moléculaires pour corriger les gènes: La technique CRISPR-Cas9 progrès ou dérive de la science ? 20 Minutes du 4 août 2017 par Fabrice Pouliquen CRISPR-Cas 9 est une technique révolutionnaire qui permet, avec une grande précision, d’enlever des parties indésirables du génome pour les remplacer par de nouveaux morceaux d’ADN. Un outil très puissant qui peut nous échapper…. CRISPR-Cas9 refait à nouveau couler de l’encre depuis la publication, ce mercredi, dans la revue Nature de nouveaux travaux menés par de chercheurs américains, chinois et sud-coréens. Cette technique, découverte en 2012, permet de supprimer et d’insérer des gènes à un endroit précis du chromosome, au sein du génome de n’importe quelle cellule et quelle que soit l’espèce, y compris l’homme. Pour se faire, CRISPR-Cas9 utilise une enzyme (Cas 9) qui agit comme des ciseaux moléculaires. Ces derniers peuvent enlever des parties indésirables du génome pour les remplacer par de nouveaux morceaux d’ADN, un peu comme lorsqu’un corrige une faute de frappe dans un logiciel de traitement de texte. « D’autres techniques permettaient déjà de découper de l’ADN, CRISPR-Cas9 le fait avec plus de précision, plus facilement et à moindres frais », explique à 20 Minutes Mylène Weill, directrice de recherche au CNRS, généticienne à l’Institut des sciences de l’évolution de Montpellier. La technique ouvre potentiellement la voie à des progrès dans le traitement des maladies génétiques et leur non-transmission aux générations futures. L’étude publiée mercredi, menée au sein de l’université des sciences et de la santé d’Oregon, a par exemple utilisé cet outil révolutionnaire pour corriger dans les embryons humains le gène porteur de la cardiomyopathie hypertrophique. Cette maladie cardiaque héréditaire peut entraîner des morts subites, notamment lors de la pratique d’un sport. Fin 2016, des chercheurs chinois annonçaient, eux, plancher sur l’utilisation de Crispr- cas9 sur des patients pour tenter de lutter contre une forme agressive de cancer du poumon. Mais jouer avec le génome ouvre aussi la « porte » à des dérives. La méthode CRISPR-Cas9 peut ainsi être déviée de son utilisation première à des fins de modification génétique non-nécessaire. Théoriquement, cette technique pourrait servir aussi à produire des bébés génétiquement modifiés afin de choisir la couleur de leurs cheveux ou d’augmenter leur puissance physique. Interrogé par 10
L’Express, le généticien Radman Moroslav, directeur d’unité à l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) ne croit pas à cette perspective. « Il ne s’agit pas de faire en sorte que tout le monde ait la même séquence génétique. Il ne s’agit pas de faire une armée de clones, estime- t-il. […] Si on enlève une différence de l’ADN parmi 10 à 30 millions d’autres et que cela permet d’enlever une maladie, je ne vois pas en quoi c’est mal. Je ne vois aucun danger. » Mais ce débat n’a pas tant à voir avec CRISPR-Cas9, estime Mylène Weill. « Il se posait déjà avec les techniques existantes de modifications du génome », note-t-elle. Mais la généticienne voit une autre dérive possible dans l’utilisation de CRISPR-Cas 9. « C’est le gene drive ou "forçage génétique", poursuit-elle. Cette application particulière de CRISPR-Cas9 va faire que la modification génétique qu’on introduit se transmet à la descendance de manière très efficace. Beaucoup plus efficace en tout cas que les techniques de transmission utilisées habituellement. » Cette technique du « forçage génétique » a été testée en laboratoire par des chercheurs sur des mouches drosophiles. « Ils se sont rendu compte qu’ils arrivaient à envahir la cage avec leurs mutants de manière extrêmement rapide », indique Mylène Weill. Autrement dit, CRISPR-Cas9 donne potentiellement à l’homme un nouveau pouvoir : celui de transformer les espèces de la nature selon son bon vouloir, voire celui d’en éradiquer certaines. Le « forçage génétique » est une application de Crispr « la moins mise en lumière par les médias mais qui nous semble la plus préoccupante », écrivent le philosophe Baptiste Morizot, maître de conférences à l’Université Aix- Marseille, et la biologiste Virginie Orgogozo, directrice de recherche au CNRS à l’Institut Jacques- Monod, dans un article en ligne intitulé « Faut-il relâcher le gene drive dans la nature ? ». La technique est envisagée pour éliminer des espèces nuisibles comme les moustiques Anophales qui transmettent le paludisme. « Avec la technique Crispr-Cas9, on pourrait par exemple transmettre une mutation atteignant la fertilité d’une espèce, explique Mylène Weill. C’est complètement nouveau comme concept. » Une première question se pose : Doit-on éliminer une espèce sous prétexte qu’elle nuit à l’homme ? Ce n’est pas la seule. Baptiste Morizot et Virginie Orgogozo insistent aussi sur les effets collatéraux involontaires du « gene drive » même dans le cas d’une intention bienveillante. Ils identifient des risques majeurs. La cassette gene drive (c’est-à-dire la portion d’ADN élaborée par l’homme) peut déjà se répandre dans de nouvelles populations qui n’étaient pas ciblées, suite à un phénomène d’hybridation ou de transfert horizontal de l’ADN. Autre risque : « si une séquence d’ADN étrangère s’insère par mégarde dans la cassette "gene drive" alors que la cassette n’est pas encore présente dans tous les individus de la population, alors cette séquence d’ADN étrangère va pouvoir se répandre comme une trainée de poudre, à la vitesse du "gene drive" », écrivent Baptiste Morizot et Virginie Orogozo. Si cette séquence apporte, par malchance, une résistance aux insecticides ou une meilleure attirance envers les odeurs humaines, alors la manipulation « gene drive » des moustiques peut se retourner contre nous. Et là, on ne parle que d'usages bienveillants de Crispr-Cas9. La technique est simple et à faible coût. « La protéine Cas-9 est disponible en poudre pour quelques centaines d’euros sur Internet », rappellent Baptiste Morizot et Virginie Orgogozo. De quoi soulever quelques questions sur le plan sécuritaire et militaire à l'heure du terrorisme. Le forçage génétique pourrait « détruire les récoltes d’un état insulaire en introduisant en douce un forçage génétique ou en insérant un forçage génétique chez un insecte pour délivrer une toxine », imagine l'association environnementale américaine ETC Group. CRISPR a été déclarée découverte scientifique de l'année 2015, mais a aussi été classée au rang des armes de destruction massive par les Agences de sécurité américaines, rappellent alors trois chercheurs de l'Inserm dans La Tribune. SOCIÉTÉ 11
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