Robert E. Buswell Jr. & Donald S. Lopez Jr. (éd.), The Princeton Dictionary of Buddhism, 2013

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Bulletin de l'Ecole française
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Robert E. Buswell Jr. & Donald S. Lopez Jr. (éd.), The Princeton
Dictionary of Buddhism, 2013
François Lachaud

Citer ce document / Cite this document :

 Lachaud François. Robert E. Buswell Jr. & Donald S. Lopez Jr. (éd.), The Princeton Dictionary of Buddhism, 2013. In:
 Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 104, 2018. pp. 429-434;

 https://www.persee.fr/doc/befeo_0336-1519_2018_num_104_1_6289

Fichier pdf généré le 07/01/2020
Comptes rendus                                                                                    429

                            Robert E. Buswell Jr. & Donald S. Lopez Jr. (éd.), The Princeton Dictionary
                            of Buddhism, Princeton—Londres, Princeton University Press, 2013,
                            1265 pages, 1 tableau chronologique, 8 cartes – ISBN 9780691157863
                            (relié) ; 9781400848058 (e-book)

                                Les débuts de l’étude du bouddhisme comme « discipline académique »
                            en Occident peuvent être situés précisément avec l’arrivée à Paris de vingt-
                            quatre manuscrits sanskrits le 20 avril 1837. Ceux-ci avaient été offerts par
                            Brian Houghton Hodgson (1800-1894), administrateur colonial britannique
                            en Inde puis résident au royaume du Népal, mais également polymathe
                            pratiquant avec autant d’aisance l’ethnologie, la philologie, l’ornitholo-
                            gie ou encore l’histoire naturelle – et figure illustre de la transmission et,
                            moindrement, de l’étude des textes bouddhiques1. La connaissance de cette
                            religion allait devenir une discipline à part entière grâce aux efforts du « père
                            des études bouddhiques » Eugène Burnouf (1801-1852), notamment par
                            son Introduction à l’histoire du buddhisme indien (1844) dont le retentis-
                            sement fut considérable au point de transformer radicalement l’ancienne
                            idole asiatique en un être de chair et d’os dont le message pouvait séduire
                            l’Occident2. Le bouddhisme, en passant de l’Asie qui l’avait vu naître à
                            l’Europe qui voulait l’étudier allait changer d’image : Burnouf, grâce à son
                            travail sur les textes, s’était donné pour ambition de défaire la « connaissance
                            du bouddhisme » des scories accumulées au fil de siècles durant lesquels
                            missionnaires et voyageurs avaient laissé accroire que celui-ci n’était qu’une
                            forme d’idolâtrie ; grâce à son travail, le bouddhisme allait être considéré
                            comme une religion de la raison dont le message ultime consiste à mettre
                            fin à la souffrance, à pratiquer la non-violence, mais aussi à prôner les
                            réformes sociales (ainsi la critique radicale du système des castes en Inde),
                            voire, comme le pensait Nietzsche, à prêcher un détachement, un retrait
                            radical du monde dépourvu – à l’inverse du christianisme – de toute hosti-
                            lité. Religion de la raison, de l’exténuation, de la mort de Dieu, philosophie
                            adaptée à la modernité : ces conceptions, filles du positivisme du xixe siècle
                            et de conceptions traditionnelles de la religion héritées du christianisme
                            contribuent encore à l’image du bouddhisme dans l’Occident moderne. En
                            même temps que l’étude scientifique du bouddhisme, celui-ci allait susciter
                            un intérêt dans de nombreux courants liés à l’ésotérisme, aux « spiritualités

                            1. Voir Brian Houghton Hodgson, « Sketch of Buddhism, Derived from Bauddha Scriptures of
                            Nipál », Transactions of the Royal Asiatic Society of Great Britain and Ireland 2, 1830. Il semble,
                            toutefois, que Hodgson, à l’inverse de Burnouf, n’ait pas été capable de lire avec aisance le sanskrit,
                            ce qui explique qu’il soit considéré comme un « amateur éclairé » tandis que Burnouf est considéré
                            comme un « savant professionnel ».
                            2. Sur les étapes de la découverte et de l’interprétation du bouddhisme en Occident, se reporter
                            à Donald Lopez Jr., From Stone to Flesh: A Short History of the Buddha, Chicago, University of
                            Chicago Press, 2013 et à l’anthologie éditée par Donald Lopez Jr., Strange Tales of an Oriental
                            Idol, Chicago, University of Chicago Press, 2016. Ces deux livres permettent un parcours érudit
                            et ironique des étapes de la transformation de l’image du Buddha – longtemps considéré comme
                            l’« idole la plus dangereuse de l’Orient » – depuis les écrits classiques, les récits médiévaux, les
                            témoignages des voyageurs, des missionnaires et des diplomates jusqu’à Eugène Burnouf qui mit
                            fin à de longs siècles d’hostilité et fit de Śākyamuni un « ascète rationnel », tandis qu’en Asie, les
                            vies du Buddha perpétuaient l’image d’un être doué de multiples pouvoirs surnaturels.

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                            et aux mysticismes de l’Orient, puis, plus tard, avec diverses formes de
                            contre-cultures (notamment outre-Atlantique).
                                Les études bouddhiques demeurent les filles de l’érudition extraordinaire
                            de Burnouf. Les savants qui poursuivirent son œuvre furent rapidement
                            confrontés à un problème qui depuis toujours avait marqué l’histoire de cette
                            religion en Asie : à savoir la coexistence de plusieurs langues dans l’aire de
                            diffusion du bouddhisme depuis le sous-continent indien jusqu’au Japon ;
                            langues mutuellement inintelligibles et dont le spécialiste de cette religion
                            doit pouvoir maîtriser plusieurs familles (ainsi le sanskrit, le chinois, le
                            tibétain ou le japonais3), même si, pendant longtemps selon un schéma bien
                            connu dans l’étude des religions les formes « primitives » (c’est-à-dire, en
                            l’occurrence, le bouddhisme indien et ses avatars) furent considérées comme
                            les plus dignes de l’intérêt des savants. Faute d’être une religion de philo-
                            sophes, le bouddhisme constitue plutôt, dans la perspective occidentale mais
                            aussi en Asie moderne une religion de philologues – les traditions d’exégèse
                            textuelle prémodernes relèvent d’autres formes de savoirs textuels – ou, pour
                            être plus précis, une religion de lexicographes. La lexicographie bouddhique
                            a formé depuis de très longs siècles l’un des champs de recherche privilégiés
                            en Asie (de l’Inde au Japon) puis en Occident à l’époque moderne. Aucune
                            autre religion n’a posé avec une telle acuité la question de la traduction d’une
                            langue dans une autre et de l’intelligibilité des textes. Une évidence demeure,
                            le vocabulaire issu du bouddhisme, en admettant une très grande variété de
                            différences sémantiques entre les ensembles linguistiques – possède en Asie
                            une familiarité qu’il n’a pas dans les langues d’Occident. Ainsi la langue
                            japonaise emploie-t-elle couramment des centaines sinon des milliers de
                            mots et d’expressions empruntés au bouddhisme chinois, lus à la manière
                            sino-japonaise puis traduits/adaptés dans la langue classique comme dans
                            la langue vernaculaire. Chaque évolution doctrinale mais aussi chaque évo-
                            lution linguistique – ainsi certaines formes de chinois vernaculaire propres
                            au Zen – amenant de nouveaux mots et de nouvelles formes de pratique.
                                La préface du dictionnaire édité par Buswell et Lopez4 rappelle les
                            exemples du Mahāvyutpatti – lexique tibétain-sanskrit à l’usage des traduc-
                            teurs de textes bouddhiques – et des dix volumes du Mochizuki Bukkyō daijiten
                            望月佛教大辞典 (Grand dictionnaire du bouddhisme de Mochizuki [Shinkō])
                            du nom du moine japonais qui avait initié sa publication au début des années
                            trente (édition courante, Kyōto, Sekai kankō kyōkai, 1954-1957, 10 vol.).

                            3. La langue japonaise jouit d’un statut particulier dans les études bouddhiques. Après avoir été
                            l’une des langues de diffusion du bouddhisme d’abord en reprenant le vocabulaire chinois (sino-
                            japonais), puis en adaptant celui-ci aux contraintes de la langue écrite classique qui, notamment
                            en poésie, a longtemps refusé les emprunts de l’étranger, elle est devenue la langue dans laquelle
                            sont écrites le plus grand nombre de publications savantes consacrées au bouddhisme dans toute
                            l’étendue géographique de son extension. Nombre de publications occidentales n’intéressent que
                            très peu les savants japonais dès lors qu’elles s’écartent de la rigueur philologique (celle du modèle
                            germanique au seuil de l’époque moderne) et des sciences du textes pour voiler derrière un sfumato
                            théorique une lecture hâtive, partiale, sinon anachronique des sources originales.
                            4. Robert Buswell Jr. est l’un des meilleurs spécialistes du bouddhisme coréen et chinois ainsi
                            que des religions coréennes ; Donald Lopez Jr. est tibétologue et historien de la transmission du
                            bouddhisme en Occident de l’époque médiévale à l’époque moderne.

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                            Deux autres entreprises consacrées à la terminologie bouddhique peuvent
                            être mentionnées également pour mieux comprendre le propos de l’ouvrage :
                            1o l’entreprise au long cours du Hōbōgirin qui, initiée par les diverses sociétés
                            asiatiques d’Europe réunies à Londres, à Paris et à Bruxelles prirent la décision
                            de se consacrer à la rédaction collective d’un dictionnaire/encyclopédie du
                            bouddhisme fondé sur les documents chinois et japonais, s’efforce de tenir
                            compte des derniers acquis de la recherche lexicographique (terminologie,
                            onomastique) japonaise – hier comme aujourd’hui la plus avancée en termes
                            de rigueur philologique – et n’utilise les sources sanskrites, palies et tibétaines
                            qu’à des fins d’illustration, même si, pour chaque entrée, les équivalents
                            dans ces langues des mots sino-japonais sont systématiquement donnés5 ;
                            2o la publication de l’Iwanami bukkyō jiten 岩波佛教辞典 (Dictionnaire du
                            bouddhisme des éditions Iwanami) qui demeure l’un des meilleurs ouvrages de
                            lexicographie bouddhique6 à destination de ce que l’on appelle encore parfois
                            le « grand public cultivé ». Cet ouvrage, remarquable, présente – comme le
                            Princeton Dictionary of Buddhism – une histoire du bouddhisme sous la forme
                            d’un dictionnaire – noms propres et noms communs – au long des 2 500 années
                            qui vont de sa fondation jusqu’à aujourd’hui. Les interactions culturelles entre
                            les divers pays d’Asie et entre les disciplines (histoire religieuse, histoire de
                            l’art, archéologie, architecture, littérature, anthropologie religieuse) étaient
                            au cœur du projet éditorial et expliquent la grande variété des spécialistes
                            retenus pour sa rédaction. La seconde édition, entièrement revue, comporte
                            plus de 4 800 entrées, ainsi que de nombreuses chronologies, cartes, plans,
                            diagrammes et croquis. Elle explore non seulement la terminologie, mais aussi
                            les textes, les figures principales de l’histoire de cette religion, ses déités, ses
                            rites, ses instruments, ses habitudes d’être ; elle comprend une chronologie
                            générale, deux index permettant de retrouver les entrées à partir du japonais ou
                            du sanskrit/pali. Cet ouvrage, dont une nouvelle édition semble être en cours
                            de préparation, maniable, précis, bien informé et fournissant de nombreux
                            exemples tirés de textes sino-japonais et japonais demeure l’une des références
                            les plus facilement accessibles, les moins onéreuses et les plus sûres mais il
                            suppose que l’on connaisse la langue japonaise.
                                Buswell et Lopez signalent que leur ouvrage constitue aujourd’hui la
                            somme la plus importante en langue anglaise consacrée à la terminologie
                            technique, à l’onomastique et à l’histoire du bouddhisme. Ne serait-ce qu’à
                            ce titre The Princeton Dictionary of Buddhism s’avère utile aux curieux,
                            aux jeunes chercheurs, mais aussi aux savants confirmés. Les quelque
                            5 000 entrées qui le composent, un nombre comparable à celui du diction-
                            naire Iwanami, constituent un bagage plus que suffisant pour aborder avec
                            confiance ce domaine d’études en constante expansion. L’auteur de ce
                            compte rendu a pu observer la présence et l’utilisation (parfois compulsive)
                            de l’ouvrage sous son format électronique (e-book) parmi les participants à
                            des colloques ou des conférences – et ce malgré les difficultés d’affichage

                            5. Se reporter aux entrées du Princeton Dictionary of Buddhism consacrées à Sylvain Lévi (1863-
                            1935), Takakusu Junjirō 高楠順次郎 (1866-1945) et Paul Demiéville (1894-1979).
                            6. Iwanami bukkyō jiten, Tōkyō, Iwanami shoten, 2002 (1989).

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                            que peuvent engendrer signes diacritiques et caractères chinois sur certains
                            écrans – ce qui semble indiquer une adoption assez large parmi les étudiants,
                            les chercheurs et les responsables de musées. Il n’en reste pas moins vrai
                            que les éditeurs incitent à la modestie en considérant le legs pluriséculaire
                            de leurs prédécesseurs asiatiques et, bien sûr, occidentaux. En effet, com-
                            ment ne pas lever les yeux vers des figures héroïques comme celles de
                            Louis de la Vallée Poussin (1869-1938), Étienne Lamotte (1903-1983) ou
                            Paul Pelliot (1875-1945) qui savaient manier avec compétence un nombre
                            impressionnant de langues et de systèmes d’écriture (sanskrit, tibétain,
                            japonais, chinois, ouïgour, mongol…) sans oublier une solide formation aux
                            langues classiques et modernes de l’Europe, mais également en épigraphie,
                            en paléographie, en histoire de l’art ? Le constat fait par les éditeurs est que,
                            dans le domaine des études bouddhiques et des études sur l’Asie en général
                            (sans doute le constat vaut-il pour l’ensemble des sciences humaines), ce
                            type de profil scientifique est une espèce en voie de disparition.
                                Comme toutes les disciplines savantes la lexicographie bouddhique a
                            connu de profonds bouleversements liés principalement à deux phénomènes :
                            le développement exponentiel des études bouddhiques en tant que tel depuis
                            les années 1990 avec la mise à disposition des chercheurs de plusieurs corpus
                            de textes et le développement d’outils numériques permettant de nouvelles
                            formes d’analyse. Le nombre de publications consacrées aux différentes aires
                            linguistiques d’expansion du bouddhisme et la spécialisation des chercheurs
                            font qu’il n’est plus possible de maîtriser avec autant d’expertise plusieurs
                            langues – ce qui remet quelque peu en cause l’idée de progrès de l’éduca-
                            tion – mais, en même temps, elle atteste de la vitalité d’un domaine qui est
                            entré dans une sorte d’Âge d’Or dont témoignent l’immense bibliographie
                            qui lui est consacrée et la multiplicité des approches employées.
                                Les entrées du dictionnaire attestent pleinement de ce changement
                            de paradigme : un schéma ancien voulant que les études bouddhiques
                            s’attachent aux « textes classiques » de l’Inde et, dans une moindre mesure,
                            à ceux du Tibet, de la Chine servant à les illustrer est, depuis longtemps
                            déjà, caduc. The Princeton Dictionary of Buddhism prend le parti d’uti-
                            liser « principalement » six langues bouddhiques : sanskrit, pali, tibétain,
                            chinois, japonais et coréen mais contient également de nombreuses entrées
                            consacrées à la terminologie et à l’onomastique lao, birmane, mongole,
                            thaïe, vietnamienne ou singhalaise. Les esprits chagrins trouveront, ici et
                            là, à redire sur des erreurs de transcription (faut-il rappeler que l’immense
                            majorité d’entre elles sont exactes ?) ou sur l’absence d’un terme ou d’une
                            personne importante : il convient de rappeler ici que ce dictionnaire est
                            conçu sur le mode d’une encyclopédie et ne saurait prétendre rivaliser en
                            exhaustivité avec les meilleurs ouvrages des savants japonais. La notion
                            de dictionnaire parfait demeure une vue de l’esprit et, il en va des études
                            boud­dhiques comme des autres disciplines, le lecteur a la possibilité (le
                            devoir ?) de consulter plusieurs ouvrages de nature différente. À défaut de
                            proposer une encyclopédie en plusieurs volumes, de maniement difficile,
                            réservée aux bibliothèques ou aux spécialistes les plus exigeants (sinon
                            aux plus fortunés), Buswell et Lopez, ainsi que leurs collaborateurs, sont

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Comptes rendus                                                                            433

                            parvenus à un compromis heureux évitant des entrées trop longues qui
                            empêchent un ouvrage de ce type de voir le jour, des entrées trop courtes
                            qui se contentent de donner des équivalents d’un terme en d’autres langues
                            et une traduction en anglais (sur le modèle du dictionnaire de 1937 de
                            William Soothill et de Lewis Hodous, A Dictionary of Chinese Buddhist
                            Terms), enfin des entrées « sectaires » qui se focalisent sur une école ou
                            sur une tradition. Le projet rédactionnel et éditorial a nécessité plus d’une
                            douzaine d’années pour être mené à bien. Force est de constater en fré-
                            quentant avec assiduité l’ouvrage que non seulement l’étudiant comme le
                            chercheur confirmé trouveront largement de quoi satisfaire leur curiosité
                            mais aussi leur sens critique qui leur permettra de corriger certaines erreurs
                            et partis pris d’interprétation (par exemple sur le bouddhisme des écoles
                            Chan). Le bouddhisme est situé non seulement dans ses divers espaces
                            linguistiques mais aussi temporels grâce aux chronologies des différentes
                            périodes de l’histoire asiatique, de celle de l’expansion du bouddhisme
                            proprement dit, de cartes géographiques et de schémas cosmologiques.
                            Les index linguistiques en fin d’ouvrage (chinois, japonais, coréen, pali,
                            sanskrit, tibétain translittéré selon le système de Wylie, tibétain en trans-
                            cription phonétique simplifiée) permettent d’établir des parallèles précieux,
                            de repérer des changements entre les aires culturelles et, au gré des intérêts
                            et des recherches de chaque lecteur, d’approfondir diverses pistes. Autant
                            l’écrire sans craindre de se tromper, The Princeton Dictionary of Buddhism
                            constitue aujourd’hui un ouvrage précieux pour toutes les personnes qui
                            s’intéressent de près ou de loin au bouddhisme. Aucune religion ne saurait
                            tenir dans les pages d’un seul volume, si imposant soit-il, mais, faute de
                            relever un pari perdu d’avance, les éditeurs et leurs collaborateurs sont
                            parvenus à un équilibre entre les diverses traditions du bouddhisme, leurs
                            figures principales et leurs terminologies respectives qui force l’admiration.
                                Un autre constat est que l’étude du bouddhisme ne saurait se limiter
                            à l’Asie mais qu’elle se doit désormais d’inclure sa pérégrination vers
                            l’Ouest en Europe et aux États-Unis7. L’un des très nombreux mérites de ce
                            dictionnaire est de consacrer plusieurs entrées à de nombreux orientalistes
                            et spécialistes occidentaux du bouddhisme : ainsi (la liste est loin d’être
                            exhaustive) Ippolito Desideri (1684-1733), Eugène Burnouf, Friedrich
                            Max Müller (1823-1900), Émile Sénart (1847-1928), Hermann Oldenberg
                            (1854-1920), Sergueï Oldenbourg (1863-1934), Étienne Lamotte, ou
                            Giuseppe Tucci (1894-1984) ; ces derniers demeurant le plus souvent ignorés
                            des lexicographes japonais considérés, à juste titre, comme les meilleurs
                            spécialistes du domaine. Les éditeurs n’hésitent pas non plus à évoquer
                            des personnalités plus controversées associées mais tout aussi essentielles
                            au développement de cette religion en Occident comme Helena Petrovna
                            Blavatsky (1831-1891), Henry Steel Olcott (1832-1907), Dwight Goddard
                            (1861-1939), Walter Y. Evans-Wentz (1878-1965), Alan Watts (1915-1973),

                            7. Les formes de la découverte et de la transmission du bouddhisme en Occident sont l’une des
                            directions du travail de Donald Lopez depuis Prisoners of Shangri-La: Tibetan Buddhism and the
                            West, Chicago, Chicago University Press, 1998.

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                            Allen Ginsberg (1926-1997), Jack Kerouac (1922-1969) ou Gary Snyder (né
                            en 1930) – même Bob Dylan apparaît au détour d’une page. L’on passe ainsi
                            des déserts de l’Asie centrale et des marches occidentales de la Chine aux
                            communautés de laïcs pratiquant le Zen dans la Sierra Nevada (Ring of Bone
                            Zendo) confirmant que le bouddhisme n’a pas échappé à la globalisation.
                                S’il s’avère impossible de retrouver toutes les traces attestant d’une unité
                            rédactionnelle qui facilite la lecture ou encore de la densité des échanges
                            entre les différents auteurs – rappelons que ceux-ci étaient des doctorants
                            de UCLA et de l’université de Michigan – il est plus facile de repérer ce
                            qu’il conviendrait d’appeler le gai savoir de Lopez et Buswell, à savoir
                            l’alliance d’une érudition très large et d’un humour d’une grande finesse. La
                            conclusion de l’introduction mérite d’être citée ici, qui renvoie à la « Liste
                            des listes » (List of Lists), placée en fin d’ouvrage avant les correspon-
                            dances linguistiques. Elle témoigne de l’attention quasi obsessionnelle de
                            la terminologie bouddhique aux listes ordonnées (voir l’entrée fashu 法數
                             « énumération des dharmas ») ; celle-ci pourrait servir d’épreuve décisive
                            pour tester les connaissances de chaque lecteur, amateur ou professionnel,
                            en matière de bouddhisme :
                                  Anyone with the slightest familiarity with Buddhism has been struck
                                  by the Buddhist propensity of making lists for almost anything. The
                                  Mahāvyutpatti is in fact organized not alphabetically but by list, including
                                  such familiar lists as the four noble truths, the twelve links of dependent
                                  origination, and the thirty-two major marks of the Buddha, as well as less
                                  familiar lists, such as various kinds of grain (twenty items), and types
                                  of ornaments (sixty-four items). Here we have endeavored to include
                                  several of the most important lists, beginning with the one vehicle and
                                  ending with the one hundred dharmas of the Yogācāra school. After some
                                  discussion, we decided to forgo listing the 84,000 afflictions and their
                                  84,00 antidotes.

                                                                                   François Lachaud (EFEO)

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