Samu Social Ville de Marseille
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IEJ Marseille - juin 2014 / Photographies : Ville de Marseille - Virginie Lecable -Canèle Bernard Ville de Marseille Samu Social
Ce livret a été réalisé par les étudiants de 3e année de l’Institut Européen de Journalisme de Marseille en partenariat avec le Samu Social de la Ville de Marseille Pour prolonger la découverte des actions du Samu Social, rendez-vous sur le site Internet développé pour l’occasion par l’équipe rédactionnelle de l’IEJ Marseille : www.ecs-marseille.com
Le sommaire L’édito M ettreenlumière,c’estextrairedel’obscuritécequel’onnevoitpasouque l’onneveutpasvoir.C’estsansdoutel’intentionquiaguidécesjeunes Un Samu Social unique p. 5 à 15 journalistes de l’Institut Européen de Journalisme quand ils choisirent comme projet de fin d’études, de sortir de l’ombre le travail patient de ces hommesetfemmesquiquotidiennementsoulagentceuxquelamisèreécrase. Vivre en foyer p. 16 à 38 Enparcourantcemagazineondécouvrelesstructuresmisesenplaceparla municipalitécommeleSamuSocial,lesUnitésd’Hébergementd’Urgence. Marseilleestlaseulemunicipalitéàs’êtredotéedecesbrigadessocialesqui La santé dans la rue p. 39 à 50 travaillentjouretnuitàredonnerunpeudedignitéauxsans-abri,enpartenariat aveclesnombreusesassociationsquiœuvrentdansMarseille. Lereportagequisuitestlerésultatd’uneenquêtedeplusieurssemaines.Ilestle Les partenariats p. 51 à 66 fruitd’unetripleexpérience: - professionnelle pour cette dizaine de jeunes journalistes qui signent là leur premierlongreportage, Grandes actions p. 67 à 72 -politique,ausensnoble,oùl’onvoitcombienilestcomplexedegérerladéshérence d’unepartiedelapopulationetl’exaspérationdeceuxquelamisèredérange, - humaine riche avec ces hommes et ces femmes qui méritent toute notre Le mot du Maire attention. Jeremerciepersonnellementtousceuxquiontcontribuéàréalisercemagazine «Jesuisheureuxquel’InstitutEuropéende etcesiteInternetimaginépourleSamuSocial.Ilspermettrontdecélébrerla JournalismedeMarseilleaitretenuleSamu bonté et l’abnégation de tous ces acteurs silencieux qui travaillent à rendre SocialdelaVilledeMarseillecommeprojet Marseilletoujoursplushumaine,plusaccueillanteetplusgénéreuse. pédagogiqueannueldefind’études. Dèsmonarrivéeàlatêtedelamunicipalité, Xavier Méry j’ai créé ce service, unique en France avec AdjointauMaire,déléguéàlaSolidarité celuideParis,quiadémontrésonutilitésociale etàlaLuttecontrel’Exclusion,SamuSocial et humaine au quotidien. La générosité des Marseillaisparticipeàsoulagerladétressedes plus vulnérables grâce à leurs dons en tous ©VilledeMarseille genres. Continuons à nous mobiliser pour rendrel'espoiràceuxquisouffrent.» Jean-Claude Gaudin MairedeMarseille SénateurdesBouches-du-Rhône ©VilledeMarseille 4 UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme 5
“Allo, ici le standard auneautrefonctiontoutaussiimpor- tante. du Samu Social” "Tenir à jour la main courante" "Voiture5àPC". Commeavantchaque tournée,lesvoituressortantesappellent Christophesurlaradio.Lestandardiste répondafindenoterlenombredekilo- mètressuruncahier.à chaquesortie, les informations de kilométrage, les points de rendez-vous avec les SDF et les destinations sont notées sur le cahier des charges. "Tenir à jour le cahier de la main courante est très ©ElisaPhilippot important.Celanousapermisdevoir les abus de certains marginaux ou arrivaientsurplace,iln’yavaitplusper- particuliers.Lesgensnousappelaient, sonne.C’estpourcelaquemaintenant ©VilledeMarseille onsedéplaçaitmaisquandlesvoitures ondemandeauxpersonnesdenepas bougerouauxSDFderestersurplace Le 115 reçoit chaque jour quantité d’appels qu’il bascule vers le standard afindelestrouverfacilement",explique du Samu social. Beaucoup pensent que le numéro n’est actif que l’hiver Christophe. mais à Marseille c’est toute l’année que le Samu Social est au bout du fil. Letéléphonesonne,unautreSDFque “S amu Social bonjour !" Cette Je demande également les informa- leSamusocialdoitrécupérerauCentre phraseChristophe,lestandar- tionssurlapersonnequelesvoitures Bourse.“C'esttoi,Germinal?”,demande diste,larépètetoutaulongde doiventrécupéreretlelieuoùellese Christophe. l’après-midi.LeSamuSocialdeMarseille trouve", confie le jeune standardiste. L'hommeautéléphoneacquiesceetle aunespécificité,ilasonproprestandard. Une fois les informations en main, il standardisteluiannoncequ'unevoiture Le115estlenuméronationald’urgence saisit la radio et communique les vavenirlechercher.“à forcedelesavoir et d’accueil des personnes sans-abri. renseignements à la voiture la plus autéléphone,oncommenceàbienles Unnumérod’urgenceaumêmetitreque proche.Levéhiculerécupèrelapersonne connaître.Ilrestesouventdanslemême le 17, le 18 ou le 15. En appelant ce ensituationprécaireetl’amènedansun secteur,ducoup,c’estplusfacilepour numéro,lespersonnessontdirectement centred’hébergement. nousdelesretrouvermaiségalementde basculées vers Christophe ou l’un de La principale mission de Christophe : reconnaîtrelapersonneque l’on a au sestroiscollègues.Autreparticularité dispatcherlesvoituressurlesdifférents boutdufil.” de cette centrale d’appels, elle est endroitsoùlesSDFattendentlesvéhi- Même si c’est l’hiver que Christophe ouvertetouslesjours,365joursparan, culespourleurtransportversunendroit reçoitleplusd’appels,auprintempsou de5hà1hdumatin. oùdormir. enété,laligneestloind’êtremuette.Les "Quecesoitdesparticuliers,desSDF Christopherépondauxpersonnesqui SDFontbesoind’aidetoutel’année. oule115,jerépondsàchaquepersonne appellentettraiteleurdemandedans le plus professionnellement possible. lesplusbrefsdélais.Maislerégulateur Florent Peyre 6 UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme Historique Historique UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme 7
Samu Social Story Ainsi, dès que cela a été possible, en 2003,leSamuSocialmarseillaiss’est lancé dans une action de bien plus Socialmarseillais.Unrenouveauincarné parunhomme,RenéGiancarli. Ancienpolicier,ilprendladirectionde C’est à Paris que le Samu grande envergure : le Plan Hivernal, l'association, à la demande de Jean- axéautourdelamiseàdispositiond’un ClaudeGaudin,etchangeenprofon- Social a fait son nid. gymnase,celuideSaint-André.Undis- deur son fonctionnement. "Quand je Créé en 1993 par Xavier positifexceptionnelquiaenfinpermis suis arrivé, le service aspirait à se Emmanuelli, médecin d’accueillirunnombreconséquentde développeravectoutel’équipe.Nous et militant humaniste, SDFpourlesmettreàl’abridesgrands avons exploré toutes les portes, froids. rencontrétouslespartenaires,rénové il a depuis pour but premier Mais comme en Provence le calvaire les locaux, aménagé les horaires de lutter chaque jour caniculairedel’étépeutêtreluiaussi d’interventionafind’êtreauplusprès contre la misère des plus tout aussi redoutable, cette même dessans-abri",explique-t-il.LeSamu vulnérables. Mais comme année2003lepremierplancaniculea Social entre alors dans une nouvelle étémisenplace.Dèsle1er juillet,des ère. Mais le Samu Social c'est aussi Marseille aime se distinguer, équipesspécialessillonnentlavilleet unehistoiredepartenariats.2006sera la ville s’est permis ©VirginieLecable délivrent tout azimut de l’eau potable une année phare, avec l'éducation d’inventer un Samu Social auxsans-logis,oùqu’ilssoientsurla nationaletoutd’abord. unique en son genre. commune. Leséquipesvontalorsdanslesécoles Aprèsplusde10ansd'existence,2005 afin de sensibiliser les jeunes à la E n 1997, le nouveau Maire de étaientorganisées.Mais,trèsvite,l’orga- estaussiuneannéemarquantesous misère,véritableprioritéduservice. Marseille, Jean-Claude Gaudin, nisation avec plus de moyens a su le signe du renouveau pour le Samu décidedecréerunSamuSocial se développer. Le Samu Social a fait quiseramunicipal. l’acquisition d’un véhicule puis de Unepremière.Pourquoil’intégreràla plusieurs, ce qui l’a rendu bien plus ville?Lamisèreneprendpasdecongés, présentsurleterrain.Aujourd’hui,avec pourquoileSamuSocialenprendrait-il? 16 véhicules au moins, il a enfin les Grâce à la municipalité, l’association moyens de ses ambitions premières : fonctionnedoncdésormais“365jours aiderdansl’immédiattoutendonnant paran,dejourcommedenuit”,seréjouit unechancedes’ensortiretderegagner RenéGiancarli,sondirecteur. uneplacedanslasociété. “ChaquepersonneduSamuSocialest fonctionnairevolontaireetsalariéede Œuvrerpourlessans-abri,c’estaussi lamairie.350élèvesdeslycéesprofes- les protéger de leur environnement sionnelsaccompagnentleséquipesdu immédiat.Parcequelapériodedesfêtes SamuSocial,chaqueannée,aucours accroîtdouloureusementcesentiment deleurstageenentreprise.” d’exclusion,en2001,leSamuSocial Le Samu Social a débuté et fait ses marseillaisamisenplaceunedistribu- premièresarmesavecunepetiteéquipe tiondecolisdeNoëlpourquepersonne de neuf personnes.Au départ, seules neresteàl’écart.Maislesfêtesdefin desmaraudesàpieddejour etdenuit, d’annéessontaussisynonymesd’hiver. ©VilledeMarseille 8 UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme Historique Historique UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme 9
d'hébergements.Réponseimmédiate, avec l'ouverture en janvier 2012 de l'écoleSaintLouis,quin'accueilleque à l’international desfemmes. Commelamisère,leSamun'apasde Trop longtemps négligé, le secteur frontière et agit tout autour du globe médicalestenpleindéveloppement. depuis 1998, date de la création du Uneinfirmièredevraitintégrerlesma- SamuSocialInternationalparledocteur raudes courant 2014 pour traiter la Emmanuelli. Depuis, de nombreuses "bobologie" et surtout détecter si la structuressesontétabliesàl'étranger, personne a besoin de soins. Une notamment sur le continent africain, partieplusaffinéeparleSamuSocial veillant toujours au bien-être des plus parisien,Marseillesaitaussis'inspirer démunis. delacapitale. Guillaume Lopez Rencontre réalisée dans le cadre “EPRUS“ ©VirginieLecable LeTribunaldeGrandeInstancedevient aussiunpartenaire. Environ 120 personnes par an effec- tuent des travaux d’intérêt général. Une relation avantageuse pour les deuxparties:“Ilnousarrived’aiderles travailleurs que nous recevons car ils sont souvent dans une situation difficile.Nousleursdonnonsparfoisdes vêtements,desadresses…” La force du service est d'évoluer au rythmedelaprécarité.Depuisplusieurs années,cevisageévolue,avecnotam- ment une augmentation importante de femmes SDF, qui engendre de nombreusesviolencesdanslescentres ©CanèleBernard ©VilledeMarseille 10 UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme Historique Historique UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme 11
Le Samu Social en chiffres Le Samu Social de Marseille, c’est l’aide, l’acheminement et la réinsertion d’un public précaire. Mais ce sont aussi des besoins et des outils, sans lesquels il ne pourrait répondre à la demande. Coup d'œil sur la logistique du service aux mille visages Fonctionnement des services Autres associations solidaire Unité d’hébergement d’urgance ©VirginieLecable “L’UHU de la Madrague-Ville, représente les 3/4 de nos subventions” René Giancarli, directeur du Samu Social Le nombre d’appels reçu par le Samu Social en 2013 Janvier Février Mars Avril Mai Juin Juillet Août Septembre Octobre Novrmbre Décembre 0 500 1000 1500 2000 2500 ©VilledeMarseille 12 UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme Historique Historique UnecollaborationSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme 13
Marseille sans frontières Les étudiants infirmiers sont restés n’apassespapiersenrègles,nepeut interloqués, par le fonctionnement de malheureusementpasbénéficierd’aide l'organisationmaisaussidesproblèmes ou du fameux CPAS (Centre Public auxquelsMarseilledoitfaireface."Déjà d’ActionSociale)quiœuvrecontrela cheznousàCharleroi,iln'yapasde précarité. Samu Social. Il se situe seulement à Bruxelles. Nous avons quand même Biensûr,lavillebelgetentetantbien des associations qui luttent contre la quemaldesoutenirleserrants.Sile précarité", expliqueuneétudiante. système de maraude est inédit pour eux, l'Urgence sociale de Charleroi, Maislesdifférencesnes’arrêtentpas peutpermettreletransportdessans-abri là.“Lafaçondetraiterlaprécaritén'est et leur hébergement, mais les places pas du tout la même dans les deux restent très limitées et les conditions pays,notammentauniveaudessans- d’admissionrelèvent,encoreune,fois papier.” duCPAS. Pas de papiers, pas d'aide. Telle est laréalitéenBelgique.Unsans-abriqui Guillaume Lopez ©VirginieLecable Rencontre avec des infirmières belges Comme la Canebière, le Vieux-Port ou la Bonne Mère, le Samu Social marseillais attire “son monde“. Depuis sa création en 1997, l’originalité de son fonctionnement a suscité la curiosité. L eSamuSocialmarseillaisestune pourlesaideràcréerleurpropreSamu véritableattraction.Chine,Suède, Socialetsurtoutlefaireévolueravec ou encore Norvège se sont déjà eux au fil du temps”, explique René déplacées afin de piocher des idées Giancarli,directeurduSamuSocialde dans le fonctionnement particulier de Marseille. ceSamu.DémuniedeSamuSocialily Au printemps dernier, une délégation aencorequelquesannées,l’Algériea d’étudiantsinfirmiersbelgesestvenue aussifaitledéplacementdececôté-ci à son tour en visite à Marseille. Une delaMéditerranéeets'estinspiréede conférence de bilan sur la précarité l’exemplemarseillais. àMarseilleetlesactionsmenéespar “Onaeuplusieursfoisdeséchanges,on le Samu Social leur a fait prendre abeaucouptravailléaveclesAlgériens consciencedelasituation. 14 UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme Historique Historique UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme 15
centred’accueiloud’hébergement.Les Bien se connaître… ©VirginieLecable maraudesdusoir,elles,ontavanttout pour mission de convaincre les SDF Lamarchereprend.L'étapequisuitest deserendreàl’Unitéd'Hébergement unbureaudetabacqueJulienconnaît d'Urgence (UHU), ou vers d’autres bien."Onpasseiciparcequelepatron centres. Histoire de pouvoir manger, connaît les personnes qui viennent prendreunedoucheetsereposer…En régulièrementfairelamanchedevant hiver, nous sommes beaucoup plus son commerce. Donc je prends des présentsenjournée." nouvellespoursavoirquiilavurécem- Juliensortlaglacièreducoffre,ilsait ment, si quelqu'un a été envoyé à oùaller,droitdevantsurlesmarches l'hôpital. Toutes ces connaissances, d'un bâtiment. Là, trois matelas sont commerçants,habitantsduquartier… alignés,chacunentredeuxcolonnes. constituent le carnet de contacts des Sur l'un d'entre eux, un homme se maraudeurs",expliquel'agentenrepre- réveille et répond encore groggy au nantlamarche.Ilvadelieuxenlieux bonjourdumaraudeur."Lasanté,çava habituellement fréquentés par les à Marseille, en rade ? Je vous sers un café ?", demande SDF,unecartographiequ’ilconnaîtpar Julien en pointant le thermos. "Oui, cœur. “Les équipes de maraudes merci", répond Gérard, SDF depuis créentlelien.Petitàpetit,onlesvoit Matin et soir, le Samu Social parcourt la ville à la rencontre quatreans.Lesdeuxhommesdiscutent maisilsnousvoienteuxaussitousles des personnes vivant dans la rue. Les équipes sont sur le terrain etlemaraudeurdemandeàsoninterlo- jours.” “Eh!Jeveuxducafé”.Julienest cuteurs'ilabesoind'autrechose:pull, interrompu par un jeune homme qui tout au long de l’année. La maraude : une mission cruciale. veste,couvertures...Avantdelequitter, se dirige droit sur lui, une bouteille G ants, gel assainissant, radio fairelamanche.Normal,ilyaplusde illuiremetunguidedesadressesd'aide d’alcoolentaméeàlamain.Derrière, reliéeaupostedecontrôledu passage,doncplusd’argent", explique et de secours utiles à connaître sur les personnes avec lesquelles il était SamuSocial...Ilesthuitheures, t-il.Premierarrêtdansunepetiterue, Marseille:leGuidedel'urgencesociale. assisleregardentfaire. Julien,agentdemaraude,terminede toutprèsduVieux-Port. préparer le petit camion cinq places. Danslecoffre,ilrangeminutieusement Soir et matin, été comme hiver sonoutildetravailleplusprécieux:la glacière.à l'intérieur,toutyest,café, Levéhiculegaré,lamissioncommence. gâteaux,sucre,thermosd’eauchaude. "Auprintemps,lesmatinssontencore à côté de la caisse bleue, un grand frais. Aussi, de huit heures à midi, je sac de croquettes. "J’en donne aux marche dans Marseille pour proposer personnesdansunpetitsachet,pour des petits encas aux personnes qui leurchien",expliqueJulienenclaquant refusentdeserendredanslesaccueils la double porte arrière. D'un appel dejour.C'estégalementl'occasionde radio,ilprévientsescollèguesdeson partageruncontacthumainaveceux. ©VirginieLecable départetenclenchelemoteur. L'après-midi,ilfaitbeauetchaud. Direction le centre-ville. "Une grande Les gens bougent et préfèrent rester partiedesSDFsetrouvelà-baspour à l'extérieur plutôt qu'aller dans un 16 UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme Immersion Immersion UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme 17
Le "SDF" ne s’encombre pas de poli- quiouvreledébat."Dites,est-ceque Maraude demondeetplusd’argent.” Lavieille tesses, il exige presque de l’agent ou femmeracontequ'ellesorttoutjustede vouspourriezmeramenerunepolaire? qu’illuifournissedesproduitsd’hygiène. l'hôpital après une opération. Mais à Vous savez, avec la capuche là...", lance-t-elleenfaisantminederabattre Contrairement à son sens pre- Aujourd'hui,iln'yenapas.“Enatten- nouveausurpieds,elleaaussitôtrepris lecapuchonsursatête.Enentendant mier plutôt négatif, la ma- dant si tu veux j’ai ça”, propose lamanche,touslesmatins.Sarahest Julien accepter, Cati ose du coup raude a pris aujourd'hui un Juliensanssedémonterenluitendant rapidementrejointeparuneamie,Cati demander,elleaussi,dequoisecouvrir. sens très positif. Grâce à elle, unebouteilledegelassainissant.Refus etsonpetitchienditLulu.Méfiante,la Le maraudeur sort de sa poche un le contact se noue entre les catégorique, l'homme s'échauffe et nouvellevenuerépondaubonjourde téléphoneportable,semetencontact équipes du Samu Social et les commence à suivre le maraudeur en Julienparunsourireunpeucrispéet avecd’autreséquipesduSamuSocial, gens dans le besoin. sous-entendantqu'illuiment,avantde éluderapidementlesujetdelablessure finalement laisser tomber et partir. qu’elle a au visage. L'une à côté de pourfairepasserlemessageetfixerun “Danscescas-là,ilfauttoujoursrester l'autre,lesdeuxfemmesdiscutententre point de rendez-vous, où des agents calmeetnepaschercheràargumenter copines pendant que le maraudeur remettrontàCaticedontelleabesoin. troplongtemps.Lorsqu’ilsdécidentde leursertuncaféetdesgâteaux.Julien “Lorsqu’ils n’ont pas de téléphone ou tournertoutestesphrasescontretoi,ce n'est pas pressé, il sait qu'il faut du d’endroit en particulier où on peut les n’est pas la peine de continuer pour tempspourmettreenconfiance.Etça trouver,ons’entendsurunedate,une rien…” marche. La maîtresse du petit chien, heure et un point de rendez-vous. Lulu,sedétendprogressivement.Elle CommeonvientdelefaireavecCati”, Garder le contact… souritplusvolontiers.Maisc'estSarah explique Julien en repartant vers le camionduSamuSocial. En haut de la Canebière, l'agent du SamuSocialaperçoitSarah*,unevieille Elisa Philippot *Leprénomaétéchangé ©ElisaPhilippot damequ'ilal'habitudedevoirlà,assise sur un carton. Elle fait la manche à l’ombre, emmitouflée dans un grand Mission transport O manteauqu’elletientbienserrépourse utrelesmaraudes,leséquipes àl’arrièreducamion,pouvantaccueillir protéger du froid. Pas question pour duSamuSocialontégalement jusqu’à cinq personnes, les agents elle de se mettre au soleil. “Il y a la pourmissiondetransporterles contactentlePCpourqu’ilenregistre sortiedemétrodemoncôté,doncplus personneslesplusdémuniesjusqu’aux l’heureetétablisseunsuiviminutieux différentscentresd’accueiletd’héber- desmissions. gementdeMarseille.à borddesplus “La gestion du temps a une grande grands modèles de camions, les importance”, explique Laurent, agent agents,engénéralpardeuxoutrois, depuisprèsde16ansauSamuSocial. sontenliaisonconstanteaveclePoste “Ilfautserendrerapidementsurplace deContrôle.à l’autreboutdelaligne, pour récupérer les hommes et les lestandardcommuniquelesinforma- femmesàemmenerdanslesdifférentes tionsnécessairescommelenomoule structures de Marseille. Le transport prénomdesSDFqueleséquipesdoi- représente une part importante des ventretrouver,ainsiqueleslieuxoùles missions.” conducteursdoiventlesemmener.Dès qu’unsans-abriestrécupéréetinstallé E.P. ©VirginieLecable ©VirginieLecable 18 UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme Immersion Immersion UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme 19
Les nouveaux d’origine et de la perte du logement. 26% visages de à Marseille, le Samu Social s’occupe d’environ1800personneschaqueannée. desSDFmajeurs ontentre18 la précarité La faute à la crise ? et29ans(Insee) L’undeschangementsmajeursdepuis quelques décennies reste celui de l’explosiondestravailleurssansdomi- Plus de jeunes, plus de personnes cile : un quart des adultes SDF a un âgées emploi (Insee, 2012), la majorité est en CDD (24%), en travail temporaire Autreconstat,plusdejeunes,etnotam- (15%) ou sans aucun contrat (22%). mentceuxquisortentdeprison.“Au- Cesemploissontsouventpeuqualifiés jourd’huilesystèmecarcéralaccueille et,pourlamoitié,seulementàtemps tropdeprisonniers”, expliqueledirec- partiel : 37% chez les hommes, 63% teurduSamuSocial.“Ilsn’ontplusnile chezlesfemmes. tempsnilesmoyenspourlaréinsertion, devenuetrèsdifficile.Lesfamilles,déjà pauvres, n’ont pas forcément envie de reprendre ces jeunes chez elles. ©SimonViens 25% Nous avons dû revoir notre prise en desSDFmajeurs comptepsychologiquepourlesrelancer Depuis une décennie, la population de Sans Domicile Fixe a beaucoup ontplusde50ans etressouderlesliensavecleurfamille.” évolué : plus de jeunes, plus de personnes âgées, plus de femmes (Insee) et plus de travailleurs. état des lieux àl’opposé,deplusenplusdepersonnes âgéessontsanslogementàcausede L orsqueRenéGiancarliestdevenu de précarité venant de l’emploi, ex- retraitestropminces;notammentdes directeur du Samu Social il y a plique René Giancarli. Licenciement, Plustouchéesparlacrise,lesfemmes femmessuiteaudécès deleurmari.Le neufans,l’organisationaccompa- harcèlement au travail obligeant à la sont en effet de plus en plus nom- chômage des seniors est également gnait les “clochards” comme on les démissionetfaisantperdrepiedàses breusesdanslarue.Alorsqu’ilyaune unecauseimportante.S’ilyaencore appelaient à l’époque. à l’époque, victimes. Un divorce ou une rupture dizaine d’années. Celles-ci représen- peu de SDF âgés par rapport à leur beaucoupétaientSDFdepuisdesan- peuvent également précipiter une taient seulement 20% des SDF, ce présence dans la population totale nées, de grands marginaux qui pas- personnedanslaprécarité.” chiffreaaujourd’huidoublé.Ontrouve (47%desFrançaisontplusde50ans), saient leur vie dans la rue. Mais ça, aussi régulièrement des jeunes filles leurnombres’accroîtrapidement:en c’étaitavant.Selonledirecteur,depuis DansledépartementdesBouches-du- jetées à la rue parce qu’elles sont 2001,ilsneconstituaientque2%des environsixanslaprécaritéachangéde Rhône, plus de 7000 personnes ont enceintes.Pours’adapteràcenouveau SDF.Ilssontaujourd’hui25%. visage. demandé un hébergement d’urgence publicleSamuSocialetsespartenaires en2013.Unsurseptétaitunenfant. ontcréédenouveauxcentres,comme D’après l’Insee, le nombre de SDF a Laraisonlaplussouventcitéepourla celuidel’écoleSaint-Louis. Elise Lasry augmentéde50%entre2001etdébut demandeestlaruptureaveclafamille 2012.“Nousavonsvuarriverbeaucoup etlesamis,suiviedudépartdupays 20 UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme Immersion Immersion UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme 21
Un jour Le Samu Social toujours à quai en gare ©CanèleBernard Saint-Charles, point de rendez-vous dans une vie de vagabond. Depuis 2010, une convention a été signée avec la SNCF. Les égarés savent désormais à qui parler. A useindecettefouleimmensede “Iciilyadestoilettes,ducafédel'eau voyageurs,lessans-abripasse- potable...Essayezdetrouverdel'eau raient presque inaperçus. Mais potable à Marseille”, explique Gilles, detempsentemps,ilscréentquelques SDF,quipassesesjournéesàlagare désagréments.Rarement,maisassez depuisqu’ilaquittél’Unitéd’Héberge- pourgênerlesusagers,expliquantla mentd’UrgencedelaMadragueVille,il créationdupartenariatentreleSamu yadeuxmois. SocialetlaSNCF. Depuis2010,deuxéquipesduSamu “Nous voulons éviter que certaines Socialeffectuentleurmaraudeengare, personnespuissentrester7ou8ans unelematinetl’autrel’après-midi. ici,ilpeutarriverqu’elless’enkystent. “Lesgaresontdetouttempsfaitoffice Les agents du Samu Social font un derefuge,parcequ'ilyauntoit,parce formidabletravaildefourmi.Sanseux, quec'estunlieud'abrienpleincœurde ces personnes en difficulté n’auraient laville”,expliquePhillippeDijol,manager pasd’interlocuteurdumondeextérieur, del'engagementsocialàlaSNCF. et le lien serait définitivement rompu”, “Ilyaenpermanenceunevingtainede racontePhilippeDijol,citantl’exemple précaires, de SDF sur la gare. Face à de cet homme en fauteuil roulant, cette problématique, la SNCF a voulu méconnaissable depuis que le Samu ©SimonViens apporteruneréponsesocialeethumaine, Sociall’aprisencharge.Désormais,il quiadébouchésuruneconventionavec s’occupe d’enseigner le jeu d’échecs leSamuSocial.” dansuneassociation. Immersion UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme 23
Salle Voltaire L asallequisertd’abriauxSDFporte ruerefusedesedoucher,cettevieilledame lenomd’unpoèteendéshérence.Il auxcheveuxblancrefusemêmedeparler. ou Salle Rimbaud mourutàMarseilleaprèsavoirreçu Pour Gilles, “la salle d’attente, c’est une des soins à l’hôpital de la Conception, sallederepos.Lanuit,àl’extérieur,onne celui-là même qui accueillait les sans- dortpas,alorsonvienticisereposer.C’est abri. calmeetsurveillé”. La salle d’attente Arthur Rimbaud est Iln’apasfermél’œildelanuit,cramponné la plus fréquentée de la gare avec la àsesaffaires.“Lanuit,àpartirde22h,il billetterie.Elleestcentrale,bienenvue. fautquitterlesgares.Ellesattirentd’autres Au milieu de cette salle inaugurée en rôdeurslesoir,desgensplusdangereux”, fanfare par Patti Smith, en novembre confie-t-il. 2011,vousneverrezpasdeSDF.Ilsne LesagentsduSamuSocialnefontguère souhaitent pas qu’on les voit. Mais ils que quelques pas entre deux interven- sontlà,assissurlesbancsquijouxtent tions.Toutlemondelesconnaîtici.Gilles, lesmursdelasalle. RumeneetNasko,AlainaliasGeronimo, Sécurité et confort sont difficilement Jérome, Ramzy... Jeanne et Stéphanie, conciliablesquandoncohabiteavecdes sont,avectantd’autres,leshabitantsde ©SimonViens SDF.Parfois,lesusagersseplaignent, lagare.Certainsontoubliédepuisquand commelorsqu'unhommedécided'uriner ils la fréquentent, d’autres jurent qu’ils dans un coin. L'hygiène justement, les quitterontbientôtsesquais.Demain,encore, I lssontnombreuxàprofiterdusoleilà Bulgarie, Nasko a même une fille au l’extérieurdelagare.Ilssontpeuà pays, mais il ne gagnait pas assez, agentsduSamuSocialenfontunpoint lesagentsduSamuSocialviendrontleur restersurlesquais.Cettegareestun mêmepoursurvivre.Stéphanie,agentdu d'honneur. “Des habits propres, une porter assistance. Demain, encore, les lieudemouvement.Difficiledetrouver Samu Social, les aide à faire les dé- douche,çachangelavie”, confirmeune agents du Samu Social trouveront de qui que ce soit sans compter sur la marches administratives nécessaires jeunefemmeSDF. nouveauxégarésGareSaint-Charles. chance.Sicen’estlorsqu’onaprisren- pour s’inscrire à Pôle Emploi, avoir un Toutn'estpasparfait.Telvétérandela dez-vous Square Narvik, ou que l’on compteenbanque,uneadresse,unnu- Simon Viens entre salle d’attente Arthur Rimbaud. méro de sécurité sociale... Depuis un C’estsouventparlàquecommencent mois ils remplissent des formulaires. lesmaraudes,toujoursàpiedetsans “Vousverrez,c'estçalaFrance”,rigole distributiondecouverture,carnuln’est Stéphanie. “Nomenclatura”, répond censédormirengare. Nasko,rieur.Poureux,ilexisteuneporte desortieàlaprécarité.C’estunlongche- “C’est peut-être un nouveau départ” minmaisàforcedepatienceetd'effort certainsyparviennent. La salle d’attente Voltaire est peu “Rumene et Nasko sont extrêmement connuedupublic.Situéeauboutd'un motivés, c'est un plaisir de les aider”, quai,c’estunendroitdepassagepour confieStéphanie. lesvoyageursquipeuventytrouverde L’administratif est une partie du travail lalectureets'yrestaurer.C'estsurla desagentsduSamuSocial,etpouren terrassequenousretrouvonsRumene expliquer les subtilités, la Gare Saint- etNasko,deuxBulgares.Ilssontvenus Charlesestunbonlieuderendez-vous. trouverdutravail,l’unestroutier,l’autre Detouslescoinsdelaville,Rumeneet maçon.Tousdeuxavaientunemploien Naskosaventlaretrouver. ©SimonViens 24 UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme Immersion Immersion UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme 25
Apache en LIBERté P arvisdelaGareSaint-Charles,unaprès-mididemai,Geronimo discuteavecsesamis,commetouslesautresjoursdel’année. Touslesjoursoupresque.Ilvientjustedesortirdeprison.Trois moisauxBaumettespourdélitdefuite.“J’étaisbourré”,dit-il. Geronimo,c’estsonsurnom."Unhommageaupremierpeupleexterminé parlesblancs." Enréalité,ils’appelleAlain.Quandonluidemanded'où ilvient,ilrépond,sourirenarquois,frondeur:"Jesuiscitoyendumonde, ettoi?" Couvertdenombreuxtatouages,ilamêmesonnumérodeSécurité Socialegravédansledos.Unsouvenirdeprison."Parcequetuvois, onn’estquedesnuméros." Ilracontesonhistoire :unemoto,unevoiture,unemaison,untravail danslesVosges.Unesituation.Puis,en2008,terminé,ilquittetout, claquelaporteetseretrouveàMarseille. Queluiest-ilarrivé?D’oùluiestvenuecetteenviedemettreles voiles,pour,aufinal,vivredanslarue? “Jesuisplusheureuxcommeça”,rétorque-t-il.Peut-êtreest-cevrai. Alors,touslesjours,ilretrouvesa"bandedepotes" surleparvisde laGareSaint-Charles.IlycroiseaussilesagentsduSamuSocial. "C’estgrâceàeuxquel’onvitbien",souffle-t-il,avantdenouslancer, droitdanslesyeux:"JesuisunTerrien,unhabitantdelaterre,et j’aimelaviequejemène." Geronimoestunhommelibre.Unhomme quisembleheureux. Simon Viens ©CanèleBernard Portrait UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme 27
Femmes aux foyers à l’école des femmes confort rêvé. Collectivité et proximité sontderigueurchaquesoir,maisoffre Oùdormir?Lapremièredesquestions encontrepartieunpeudechaleur,un dans la rue. Depuis deux ans, les repas,unlitetsurtout,lasécurité. Elles sont de plus en plus nombreuses, mais toujours motivées femmes isolées ont quitté la mixité au Psychologue,assistantsocial,infirmière pour s’en sortir. à Marseille, les centres d’accueil et d’hébergement seindel’Unitéd’Hébergementd’Urgence se succèdent dans le petit bureau du tentent d’offrir aux femmes soutien et sécurité. (UHU) de la Madrague-Ville pour se dernier étage qui sert également de retrouver, entre elles, au sein de vestiaire,àladispositiondesfemmes U ne petite entrée discrète, une l’ancienne école Saint-Louis. Prêtée danslebesoin,oudesallederéunion. cour intérieure couvée par la par la Ville de Marseille et gérée par “Le bâtiment semble grand, mais statue de la Vierge Marie, l’ArméeduSalut,lastructurehautede finalement nousmanquonsdeplace”, l’accueil de jour pour femmes. La troisétagesestrestéeenl’état:une expliquelegérantPhilippeLeRendu. Fontaine Saint-Vincent se présente douzaine de lits ont remplacé les Depuis le 21 janvier dernier, l’école commeunvéritablehavredepaixau bureauxd’écoliersdanslesanciennes ouvresesportesà15 h,aulieude 17 h, cœur de la circulation dense du sallesdeclasseauxcôtésdesgrands “maisellesarriventplutôtentre17 het boulevard Baille. Douches, lessives, tableauxblancs. 19 h,surtoutquandilfaitbeau”, précise collations, depuis 1994, l’association SeulementquatreWCetdeuxdouches Christelle Leclerc, éducatrice spécia- offreunaccèsàl’hygièneàuneving- pourprèsdecinquantefemmes,instal- lisée.Lespensionnaireschangentd’un taine de femmes démunies par jour, lésàl'extérieur,àl’autreextrémitédela jour sur l’autre, difficile alors pour maispasseulement.Lieudevieavant cour ; le site Saint-Louis est loin du l’équiped’établirunsuivioumêmede tout,l’accueilproposedenombreuses ©ManonMathieu animationspourrecréerunliensocial, maison”,expliqueMarie-ThérèsePrud’- collectifaveccespersonnes. homme,gérantedulieu. Ouvertdésormaisseulementleslundis, Au jour le jour mercredisetvendredis,fautedebéné- Peinture, couture, cuisine ou simples voles,l’accueildejourorganiseégale- momentsdedétenteetdediscussion ment des sorties, des après-midi de autourd’uncafé,prêtduchauffageen jeuxpourlesenfantsetunekermesse, hiver, sur la terrasse ensoleillée les àlafindumoisdemai.Lesfemmesy beaux jours. “Pour beaucoup de vendent leurs tableaux ou ouvrages femmes,noussommesleurdeuxième textiles,“l’occasionderécolterquelques fonds pour rénover le local”. De tous âges, de toutes cultures, les nécessi- teusessontaccueilliesàbrasouverts. “On exige qu’elles viennent avec un papier d’une assistante sociale pour que l’on connaisse leur histoire et leur besoin, mais nous ne refusons personnepourautant”,préciseMarie- ThérèsePrud’homme.“Notreporteest toujours ouverte.” Du moins pendant ©ManonMathieu lesheuresd’accueil. 28 UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme Immersion ©VilledeMarseille
savoir combien elles seront chaque soir. Qui dit vie en communauté dit bien souvent aussivolsetviolencesdansces milieux instables, d'extrême pauvreté. Uneproblématiquesurlaquelle ladirectionseveutaussistricte quesurcelledel’hygiène.“Nous offronsunaccueilinconditionnel mais pas à n’importe quelles conditions, se plaît à rappeler ©CanèleBernard PhilippeLeRendu. “S’ilfautexclureunepersonne ©CanèleBernard pour le bien-être et la sécurité des 40 autres, je le fais.” Ces L’héritage de Jane Pannier litshaltesoinsantédestinésauxfemmes dernierstemps,l’établissement vivant dans la rue avec de graves pourfemmesfaitrarementsalle Hébergerunecentainedefemmes,les problèmes de santé et nécessitant un comble, une bonne nouvelle écouter, les protéger, les orienter... traitement mais pas nécessairement pour le dirigeant comme pour Depuis1948,plusdemilleaccidentées unehospitalisation, poursuitledirecteur. l’éducatricequiconstatenttous de la vie, marginales ou violentées, Nouslaissonscinqplacesàdisposition deux “plus de volonté pour sontaccueillieschaqueannéeausein du 115, pour les cas d’urgence. En s’en sortir et d’espoir chez les de la Maison de la Jeune Fille du général,lesfemmesrestentdeuxmois femmesquechezleshommes”. CentreJanePannier.Véritablerefuge ici,dansunpremiertemps.” Enréalité, ©CanèleBernard dequatreétages,auhautdelaCane- les résidentes peuvent rester tant bière, partagé entre chambres indivi- qu’ellesenontbesoin,àconditionde duelles, salles de bain, pièce de vie, réellementvouloirs’ensortir.“Réguliè- entouréedebibliothèques,etcuisines. rement, on fait le point avec elles. “Notre but est de pouvoir garantir un Chaquefemmetravailleavecunédu- accueil inconditionnel aux femmes cateur social référent, qui l’accompa- majeures qui viennent ici”, explique gneraletempsnécessaire”,développe OlivierLandes,directeurdelastructure Olivier Landes. Le directeur explique depuis1987. qu’en20ans,lapopulationdefemmes Ouvertseptjourssursept,vingt-quatre dansdessituationsd’urgence,livréesà heuressurvingt-quatre,l’établissement elles-mêmes dans la rue ou victimes pourfemmesdémunies,leurpermetde de violences s’est multipliée par dix. constituer de nouveaux projets avec “Maisnousn’avonspasplusdeplaces uneéquipe,decréerundossierainsi qu’avant.RentreràJanePannierde- qu’un suivi, si compliqués à mettre mande parfois d’attendre près de six enplacedanslesaccueilsdejourou mois…”,admet-ilàregrets. d’extrême urgence. “Nous disposons entoutde45lits,encomptantlescinq Elisa Philippot et Manon Mathieu ©CanèleBernard Immersion UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme 31
“Il y a toujours pire que soi” “J ’aihonte.HontedevenirunefoisparmoisprendreuncolisdelaBanque Alimentaireetdénicherquelquesvêtements.Hontelorsquemesvoisins mevoientici.” Yasmina*,venuefrapperàlaportedel’associationdes équipesSaintVincentparhasard,pourtrouverdutravail,refusel’assistanat. Sonmarietelleconnaissentbiendesdifficultés,sansemploietavecdeuxenfants desixetseptansàleurcharge.Ilsnesontpasàlarue,maisleurquotidienn’est pasunlongfleuvetranquille.“Jechercheunemploidepuisdesmois,vraiment, etjeseraisprêteàtoutaccepter,mêmelestâcheslesplusingrates”,prometla jeunefemmedetrenteans,dontleCVdeboulangèreestpourtantimpressionnant. “Aumoinsmesenfantsnesontpascapricieux,ilsn’ontqu’uncadeauparanmais saventlemériteretl’apprécier”,plaisante-t-elleavecoptimisme.Yasminaveut s’ensortir,pourelle,safamillemaisaussipour“laissersaplaceàceuxdontla situationestpirequelasienne”, confiet-elleavecbeaucoupd’altruisme. Manon Mathieu *Leprénomaétéchangé ©VilledeMarseille L’ABC de la réinsertion D es vêtements de rechange, une boisson chaude et un peu d’écoute. Aucoeurd’uneruellecalmedu6èmearrondissement,les équipesSaint- Vincentaccueillentetrassurentunpublictrèslargementféminin.Précaires, seulesouavecenfants,ellesviennentenquêtedeconseilsetdesoutien.Créées parSaintVincentDepaulen1617,souslenomdelapremièreCharitéàl'hôpital deChâtillon,leséquipesSaint-Vincenttravaillentenétroitecollaborationavecle SamuSocialquienassurelefinancementvialaVilledeMarseille. “Lesfemmesconstituententre70et80%despersonnesquiviennentcheznous”, assureFrançoise,l’unedes22bénévolesducentre. “Lapopulationprécaireest deplusenplusjeune”, ajoutet-elle.Plusencorequedesvêtementsoudescolis alimentaires,lesateliersd’alphabétisationsontuneprioritéetunefiertépourles équipes Saint-Vincent, permettant aux femmes de passer le DILF (Diplôme d’Initiationdelalanguefrançaise),que“quatreélèvesontréussiàobtenirl’année dernière”,affirmeChristineMarch,uneautrebénévole. ©VilledeMarseille Romain Risso 32 UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme Immersion Immersion UnpartenariatSamuSocial-InstitutEuropéendeJournalisme 33
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