Si Beale Street pouvait parler - Les Fiches du Cinéma
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LE MENSUEL Si Beale Street pouvait parler de Barry Jenkins JANVIER 2019 Bienvenue à Marwen de Robert Zemeckis L’Ange de Luis Ortega Doubles vies de Olivier Assayas Green Book de Peter Farrelly Un berger et deux perchés à l’Élysée de Pierre Carles et Philippe Lespinasse • rencontre avec #1 Bi Gan pour Un grand voyage vers la nuit
SOMMAIRE FILMS DU 2 JANVIER 2019 A Bread Factory Part 2 de Patrick Wang HHH Asako I & II de Ryûsuke Hamaguchi HH Bienvenue à Marwen de Robert Zemeckis HHH Never-Ending Man de Kaku Arakawa HHH Premières vacances de Patrick Cassir H Qui a tué Lady Winsley ? de Hiner Saleem H Un beau voyou de Lucas Bernard H Undercover de Yann Demange HH FILMS DU 9 JANVIER 2019 An Elephant Sitting Still de Hu Bo HH L’Ange de Luis Ortega HHH Border de Ali Abbasi HH Creed II de Steven Caple Jr. H Edmond de Alexis Michalik H Forgiven de Roland Joffé HH L’Heure de la sortie de Sébastien Marnier HH In My Room de Ulrich Köhler HHH Les Invisibles de Louis-Julien Petit HH Jean Vanier de Frédérique Bedos HHH Les Révoltés de Michel Andrieu et Jacques Kebadian HHH FILMS DU 16 JANVIER 2019 Ayka de Sergey Dvortsevoy HH Ben Is Back de Peter Hedges HH Capri-Révolution de Mario Martone H Colette de Wash Westmoreland H Doubles vies de Olivier Assayas HHH The Front Runner de Jason Reitman HH Glass de M. Night Shyamalan HH L’Incroyable histoire du facteur Cheval de Nils Tavernier HH Une jeunesse dorée de Eva Ionesco H
FILMS DU 23 JANVIER 2019 Another Day of Life HH de Raúl de la Fuente et Damian Nenow Continuer de Joachim Lafosse HH Eric Clapton : Life in 12 Bars de Lili Fini Zanuck HH Les Fauves de Vincent Mariette H Green Book de Peter Farrelly HHH The Hate U Give de George Tilmman Jr. HH Ma vie avec James Dean de Dominique Choisy HHH Moskvitch mon amour de Aram Shahbazyan HH L’Ordre des médecins de David Roux HH Un berger et deux perchés à l’Élysée HHH de Pierre Carles et Philippe Lespinasse Yao de Philippe Godeau HH FILMS DU 30 JANVIER 2019 L’Amour debout de Michaël Dacheux H Don’t Forget Me de Ram Nehari HH Les Estivants de Valeria Bruni Tedeschi H Minuscule 2 de Thomas Szabo et Hélène Giraud HHH Pearl de Elsa Amiel HH The Place de Paolo Genovese HH P’tites histoires au clair de lune Film collectif H Qu’est-ce qu’on a encore fait au Bon Dieu ? m de Philippe de Chauveron Si Beale Street pouvait parler de Barry Jenkins HHH Skate Kitchen de Crystal Moselle HHH Sorry to Bother You de Boots Riley HHH Ulysse & Mona de Sébastien Betbeder H Un grand voyage vers la nuit de Bi Gan HHH Rencontre avec Bi Gan
ÉDITO Les portes sont ouvertes Depuis plus de dix ans, à intervalles réguliers, parfois timidement, parfois à grands coups, les crises frappent à la porte des Fiches du cinéma. Dehors, souffle le vent d’une époque qui voit se réduire, LES FICHES DU CINÉMA implacablement, les espaces de réflexion, d’échange, de liberté et 26, rue Pradier d’indépendance. Jusqu’à présent, la méthode a toujours été la même: 75019 Paris barricader les issues, souffler les bougies et s’arc-bouter contre Administration & Rédaction : la porte en espérant qu’elle tienne bon. Aujourd’hui, elle est devenue 01.42.36.20.70 tellement fragile que nous préférons l’ouvrir en grand - et faire circuler Fax : 09.55.63.49.46 .............................................................. l’air, l’énergie et les idées. Cette période de grands changements RÉDACTEUR EN CHEF a été une fois de plus l’occasion de voir à quel point la communauté Nicolas Marcadé des Fiches est soudée, et solidaire. Nous avons lu avec attention les redaction@fichesducinema.com nombreux retours de nos abonnés et de nos adhérents sur la nouvelle RÉDACTEUR EN CHEF ADJOINT Michael Ghennam formule - entièrement numérique - que nous mettons en place pour la michael@fichesducinema.com revue. Nous avons été touchés d’y lire votre attachement à nous suivre, SECRÉTAIRE DE RÉDACTION non pas seulement pour notre exhaustivité, mais également pour Thomas Fouet la qualité de nos commentaires critiques, pour les entretiens réguliers thomas@fichesducinema.com .............................................................. que nous menons avec les cinéastes, bref pour ce que l’on pourrait ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO appeler notre ligne éditoriale, qui consiste certes à rendre compte François Barge-Prieur, Clément des presque 700 films sortant chaque année en France, mais surtout Deleschaud, Paul Fabreuil, Thomas à vous aider à vous y retrouver dans cette multitude vertigineuse Fouet, Michael Ghennam, (Pierre-) de propositions. Car c’est parce que nous voyons tous les films que Simon Gutman, Roland Hélié, Simon Hoareau, Astrid Jansen, nous avons une conscience aigue de la profonde crise que traverse Aude Jouanne, Corentin Lê, Amélie actuellement le Septième Art. Pour une sortie médiatisée, combien Leray, Julie Loncin, Jacques-Antoine de films restés dans l’ombre, condamnés à ne rencontrer que quelques Maisonobe, Nicolas Marcadé, Marine spectateurs en salle ? De cette mission d’exhaustivité qui est notre Quinchon, Gaël Reyre, Chloé Rolland, Gilles Tourman, Marie Toutée, marque de fabrique, nous tirons une grande responsabilité : mettre Valentine Verhague. en lumière la diversité du cinéma, et notamment le travail collossal Les commentaires des «Fiches» des producteurs, distributeurs et exploitants indépendants. C’est de reflètent l’avis général du comité la partie immergée de l’iceberg (invisible, mais largement majoritaire) .............................................................. PRÉSIDENT que nous souhaitons rendre compte avant tout.Notre site internet sera François Barge-Prieur le nouveau point de rendez-vous sur lequel nous continuerons d’étudier ADMINISTRATRICE les rouages de la création cinématographique dans toute sa diversité. Chloé Rolland En plus de l’actualité, nous y développerons les rubriques qui nous administration@fichesducinema.com TRÉSORIER tiennent à coeur depuis longtemps : portraits de professionnels, espace Guillaume de Lagasnerie dédié à l’éducation à l’image pour le jeune public, tribunes, podcasts Conception Graphique et vidéos… Les possibilités sont infinies. Nous avons ouvert les portes 5h55 du numérique : la bicoque branlante qui grinçait sous les bourrasques www.5h55.net se transforme en laboratoire ouvert et convivial. Mais il ne faut pas .............................................................. DÉPÔT LÉGAL s’y méprendre : le vent continue de souffler, et il faudra être nombreux Janvier 2019 pour se tenir chaud. Un journal a besoin de lecteurs, donc d’abonnés. COMMISSION PARITAIRE Nous espérons être 1 500 d’ici le mois de Mars, et 3 000 d’ici la fin de 0320 G 86313 - ISSN 0336-9331 l’année. Nous comptons donc sur vous pour être de l’aventure, et pour «Les Fiches du Cinéma». Tous droits réservés. la relayer autour de vous. Nos vœux pour 2019 sont simples, et, nous Toute reproduction même partielle l’imaginons si vous lisez ces lignes, exhaucés d’avance : restez curieux, des textes est soumise à autorisation. exigeants, humbles et passionnés. Que cette année 2019 soit pour vous Photo de couverture : la plus cinéphile et chaleureuse possible. Nous serons honorés, Si Beale Street pouvait parler (Mars Films) © Annapurna Pictures et heureux, de la traverser à vos côtés. WWW.FICHESDUCINEMA.COM FRANÇOIS BARGE-PRIEUR
A Bread Factory Part 2 Un petit coin de paradis de Patrick Wang (A Bread Factory Part 2 : Walk With Me a While) Cette deuxième partie du diptyque de Patrick CHRONIQUE Adultes / Adolescents Wang consacré au centre culturel d’une petite ville des États-Unis est une merveille d’inventivité et u GÉNÉRIQUE d’intelligence, et un manifeste vibrant pour les arts Avec : Tyne Daly (Dorothea), Elisabeth Henry-Macari (Greta), James collectifs, comme le théâtre, la “thérapie du pauvre”. Marsters (Jason), Nana Visitor (Elsa), Zachary Sayle (Max), Brian Murray (Sir Walter), Philip Kerr (Jean-Marc), Janet Hsieh (May), George Young (Ray), Trevor St. John (Karl), Martina Arroyo (Sandra), Eugene Brell (Darren), Jake Brinskele (Dima), James Chen (Ray Prime), Chris Conroy (le brigadier Jaymes), Keaton Nigel Cooke (Simon), Erica Durham (Julie), Maddox Elliot (Omar), Kit Flanagan (Pat), Jane Gennaro (Ann), Leo Heller (AJ), Jonathan Iglesias (Mariano), Bekka Lindstrom (Linda), Noah Matthews (Leo), Milton Craig Nealy (Sam), Nan-Lyn Nelson (Mavis), Glynnis O’Connor (Jan), Joe Paparone (Alec), Jessica Pimentel (Teresa), Raoul Silver (Joe), Logan Smith, Barak Tucker, Ann Davies, Sara Harman, Nicole Molinski, Linda Mussmann, Billy Thomas Myott, Wayne Pyle, Taylor Watson Seupel, Anni Krueger, Ashley Kobre, Jeremy Shinder. Scénario : Patrick Wang Images : Frank Barrera Montage : Elwaldo Baptiste 1er assistant réal. : Max O’Brasky Scripte : C. Rynne Musique : Melissa Li, Chip Taylor, Aaron Jordan, Andy © ED Dist. Wagner et Patrick Wang Son : Eric Thomas et Michael Suarez Décors : Bekka Lindstrom Costumes : Michael Bevins Maquillage : Paula Kelly Casting : Cindi Rush Production : In the Family et HHH On se demandait ce qui allait se passer après Vanishing Angle Producteurs : Patrick Wang, Daryl Freimark et la première partie de la chronique de Patrick Wang : Matt Miller Distributeur : ED Distribution. à la fin, Greta et Dorothea avaient gagné les subventions de la ville et pouvaient continuer à gérer leur centre 120 minutes. États-Unis, 2018 culturel, la Bread Factory, avec le soutien manifeste de Sortie France : 2 janvier 2019 la communauté. Dans cette deuxième partie, les enjeux u RÉSUMÉ dramatiques sont a priori moindres. Mais la survie est Jana partie, Max se retrouve seul pour s’occuper du journal un sport de combat, et la défense de l’art, dans une société local, mais elle lui a laissé beaucoup d’argent. Dorothea de plus en plus indifférente à la culture - la ville est envahie propose à Alec, mis sur la touche par le maire, un travail par des agents immobiliers qui chantent tels des sirènes de surveillance à la Bread Factory. Greta, qui gère toujours pour obtenir gain de cause et des touristes étranges qui se le lieu culturel avec Dorothea, décide de reprendre prennent en photo dans le parking “où Dieu a été créé” -, les répétitions d’ Hécube d’Euripide. Elle propose à une bataille permanente. En fin de compte, cette deuxième Teresa, la serveuse du restaurant, d’interpréter sa fille partie est encore plus réussie que la première. Il y est Polyxène. toujours question d’art et d’artisanat, de passion, de SUITE... Les touristes viennent à Checkford admirer résilience et de transcendance. De cette idée que n’importe “ le plus vieux parking d’Amérique ”. Des agents qui peut se révéler - ici, c’est une serveuse qui joue pour immobiliers, danseurs de claquettes à leurs heures perdues, s’intéressent de près à la grange de Dorothea, où la première fois dans une pièce de théâtre. Patrick Wang est celle-ci entrepose le matériel de la Factory, mais elle un poète du quotidien, qui fait surgir une comédie musicale refuse de vendre. Greta reprend les répétitions d’Hécube sur un trottoir ou dans un restaurant, qui nous transporte avec Teresa. May Ray, toujours en vue, fait une nouvelle en racontant les péripéties d’un jeune journaliste entouré de performance et obtient la subvention accordée par gamins reporters et de deux vieux bonshommes qui boivent le conseil de l’école. Max, qui s’est disputé avec son père et leur thé au samovar. Un délicieux délire qui pointe aussi les passe son temps au journal, se sent coupable d’un article travers de la société individualiste. La guerre n’aura pas lieu, qu’il a écrit sur le duo artistique. Peu de gens viennent la tragédie, elle, est annoncée. A Bread Factory s’achève assister à la Première d’Hécube, mais le public est ravi. Le sceptique Jason est enthousiasmé et très fier que sur la représentation d’Hécube d’Euripide. C’est magnifique, sa femme, Elsa, ait traduit la pièce. Ils apprennent que bouleversant, remarquablement filmé. Du grand art Sandra, qui assistait à toutes les répétitions, est décédée. qu’ils ne sont qu’une poignée à admirer dans le public. On Greta console Dorothea qui perd l’espoir de réussir à espère qu’il sera plus nombreux à aller voir ce petit bijou entretenir la Factory. Elles évoquent leur histoire d’amour de cinéma. _M.Q. et d’art. Visa d’exploitation : 149982. Format : 1,66 - Couleur - Son : Dolby SRD. 30 copies (vo). 5 © les Fiches du Cinéma 2019
Asako I & II (Netemo sametemo) de Ryûsuke Hamaguchi Poursuivant son étude des mœurs après Senses, CHRONIQUE SENTIMENTALE Adultes / Adolescents Hamaguchi emporte une jeune femme et ses deux amants à la ressemblance troublante dans les vertiges u GÉNÉRIQUE de l’amour. Bien que riche de subtils reliefs, son œuvre Avec : Masahiro Higashide (Baku / Ryôhei), Erika Karata (Asako), offre une réflexion à l’ampleur quelque peu vaine. Koji Seto (Kushikashi), Rio Yamashita (Maya), Sairi Itoh (Haruyo), Daichi Watanabe (Okazaki), Kôji Nakamoto (Hirakawa), Misako Tanaka (Eiko). Scénario : Sachiko Tanaka et Ryûsuke Hamaguchi D’après : le roman Nete mo samete mo de Tomoka Shibasaki (2010) Images : Yasuyuki Sasaki Montage : Azusa Yamazaki 1er assistant réal. : Yu Koreyasu Musique : DJ Tofubeats Production : Nagoya Broadcasting Network et Bitters End Coproduction : Comme des Cinémas Production exécutive : C&I Entertainment Producteurs délégués : Yuji Sadai, Teruhisa Yamamoto et Yasuhiko Hattori Coproducteur : Masa Sawada Distributeur : Art House Films. © Art House Films HH Quelques mois après son ambitieux Senses (diffusé en plusieurs parties en France), Ryusuke Hamaguchi revient avec un film-dyptique s’inscrivant dans la continuité de ses précédentes œuvres. Présenté en sélection officielle 119 minutes. Japon - France, 2018 lors du dernier festival de Cannes, Asako I & II suit une jeune Sortie France : 2 janvier 2019 femme sur plusieurs années. De sa rencontre avec le fougueux u RÉSUMÉ Baku à sa relation plus mature avec le fidèle Ryohei, la jeune Au sortir d’une exposition, Asako rencontre Baku. C’est le coup et innocente Asako voit un coup du destin. La narration et de foudre. Malgré la mise en garde d’Haruyo, Asako s’attache la mise en scène d’Hamaguchi - cultivant toujours l’art de à Baku. Bien qu’amoureux, ce dernier s’absente parfois sans l’ellipse et de l’énigme – tendent à faire de cette résurgence donner de nouvelles. Un jour, Baku disparaît et ne revient pas. du passé un élément fantastique. À bien des égards, Deux ans plus tard, Asako est installée à Tokyo et propriétaire le propos n’est pas sans rappeler un certain Vertigo. d’un café. Dans l’entreprise voisine, elle rencontre Ryohei, À partir de ce trouble et de cette affiliation, l’œuvre déploie qui ressemble trait pour trait à Baku. Troublée, elle le fuit. une variation dramatique au rythme fébrile. Entre irrationalité Les jours suivants, ce dernier tente de discuter avec elle. Il sympathise avec Maya, la colocataire d’Asako. Un soir, et léthargie, l’errance d’Asako agace par son impression de Ryohei et son collègue Kushikashi dînent chez Maya et déjà-vu et son non-aboutissement. Et si ces deux parties Asako. Les premiers rapports avec Maya et Kushikashi sont peuvent être envisagées comme des films indépendants, tendus. Un matin, Ryohei avoue son amour à Asako. Malgré elles peinent néanmoins à offrir un propos clair. Si bien que les hésitations de cette dernière, une relation débute. l’on pourrait confondre l’introspection des protagonistes SUITE... Cinq ans plus tard, Asako et Ryohei vivent ensemble, avec une paresse d’écriture, les nœuds dramaturgiques avec Maya est enceinte de Kushikashi. Asako retrouve Haruyo. une nonchalance formelle. Mais à d’autres moments, Celle-ci est surprise quand elle rencontre Ryohei. Asako le cinéaste renoue avec les belles heures de ses projets apprend par Haruyo que Baku est devenu un mannequin antérieurs. Notamment lorsqu’il décortique les rapports célèbre. Asako parle de son premier amant à Ryohei. sociaux et amoureux de ses personnages. À l’image de Ce dernier avoue avoir déjà fait le rapprochement. Il demande Senses, ce nouvel essai synthétise, non sans une acuité Asako en mariage. Le couple prépare son déménagement pour Osaka. Lors du dîner d’au revoir, Asako voit arriver fascinante, le symbolisme des interactions sociales et Baku. Ce dernier demande à Asako de le suivre. La jeune la culture des sentiments (honnêteté, frustration, colère, femme quitte ses amis et Ryohei et s’enfuit avec Baku. pardon). Auteur prometteur, Hamaguchi révèle avec Le lendemain, Asako renonce à Baku et part retrouver Asako I & II une bien meilleure appétence dans l’étude des Ryohei. Furieux et blessé, ce dernier la rejette. Mais Asako mœurs que dans la capacité à faire vibrer son récit. _S.H. persévère et parvient à discuter avec lui. Visa d’exploitation : 149380. Format : 1,66 - Couleur - Son : Dolby SRD. 80 copies (vo). 6 © les Fiches du Cinéma 2019
Bienvenue à Marwen (Welcome to Marwen) de Robert Zemeckis Victime d’une agression qui l’a laissé amnésique et DRAME Adultes / Adolescents traumatisé, Mark Hogencamp se réfugie dans un monde imaginaire qu’il a créé de toute pièce. La psychologie u GÉNÉRIQUE épaisse du récit ne nuit en rien à son usage inspiré de Avec : Steve Carell (Mark Hogancamp / le capitaine Hogie), Leslie la motion capture, ni à la performance de Steve Carell. Mann (Nicol), Diane Kruger (Deja Thoris), Merritt Weaver (Roberta), Janelle Monáe (G.I. Julie), Eiza González (Carlala), Gwendoline Christie (Anna), Leslie Zemeckis (Suzette), Neil Jackson (Kurt / le commandant SS), Conrad Coates (Darius Johnson), Veena Sood (Martha Harter), Falk Hentschell (le Hauptstrumführer Ludwig Topf), Nikolai Witschl (le SS Rudolph), Stefanie von Pfetten (Wendy), Siobhan Williams (Elsa), Matt O’Leary (Benz), Eric Keenleyside (Larry), Jason Burkart (Tiny), Patrick Roccas (Stevie / le SS Stefan), Alexander Lowe (le SS Werner), Christie-Lee Britten, Robert Mann, Ralph Escamillan, Kate Gajdosik, Matt Ellis, Samantha Hum. Scénario : Robert Zemeckis et Caroline Thompson Images : C. Kim Miles Montage : Jeremiah O’Driscoll 1er assistant réal. : Lee Grumett Musique : Alan Silvestri Son : Chris Duesterdiek, Dennis S. Sands et Michael Semanick Décors : Stefan Dechant Costumes : Joanna Johnston Effets visuels : Kevin Baillie Dir. artistique : Chris Beach Maquillage : Ve Neill Casting : Scot Boland et Victoria © Universal Burrows Production : ImageMovers Pour : Universal Pictures et DreamWorks Pictures Production associée : Perfect World Pictures Producteurs : Robert Zemeckis, Jack Rapke, Steve HHH Certes, Bienvenue à Marwen ne fait pas dans Starkey et Cherylanne Martin Producteurs délégués : Jacqueline la finesse : ni dans l’énoncé du traumatisme de son personnage Levine et Jeff Malmberg Distributeur : Universal Pictures. (qui, victime d’une agression et laissé pour mort, trouve refuge dans un monde imaginaire qu’il a créé de toute pièce, 116 minutes. États-Unis, 2018 et dans lequel un alter ego héroïque affronte pour lui tous Sortie France : 2 janvier 2019 les dangers), ni dans l’exposé de ses enjeux dramatiques u RÉSUMÉ (dépasser ledit traumatisme, reprendre pied dans le réel). Belgique, années 1940. Surpris par cinq soldats allemands, Il n’empêche que Zemeckis, vétéran qui, enfin, s’y envisage le capitaine Hogie doit son salut à cinq jeunes femmes comme tel (moins d’un an après Ready Player One, un nouveau aussi vaillantes que séduisantes : Wendy, GI Julie, Anna, clin d’œil littéral à Retour vers le futur y produit une émotion Roberta et Caralala. État de New York, années 2000 : ces moins geek que mélancolique), y trouve la plus belle aventures, imaginaires, sont l’œuvre de Mark Hogancamp. application, l’aboutissement peut-être bien, des recherches Hogie est son alter ego, et les jeunes femmes les avatars de en motion capture entamées avec Le Pôle express (2004). celles qu’il a connues, ou connaît, depuis que cinq hommes C’est dans la cohabitation entre deux récits, l’un réel, l’ont tabassé à la sortie d’un bar, le laissant pour mort, amnésique et incapable de dessiner - il était illustrateur. l’autre fictif, puis dans la concurrence qu’ils se livrent, puis Depuis lors il met en scène et photographie, dans le village enfin, toute frontière abolie par la psyché tourmentée du fictif, et en modèle réduit, de Marwen, le combat de Hogie personnage, dans leur interpénétration, que le film puise contre les nazis. Wendy est ainsi la serveuse qui, la nuit ses plus belles scènes. De par son jeu sur les échelles, mais de l’agression, l’avait secouru ; Roberta tient le magasin aussi dans sa façon de feinter le devenir-jouet et l’horizon- où Mark se fournit en poupées... Le jour de l’énoncé du figurine - le mieux que puissent envisager les interprètes du verdict des agresseurs de Mark approche, ainsi que celui multiverse Marvel - auxquels la génération Amblin, Zemeckis de l’expo consacrée à son travail, mais, traumatisé, victime d’hallucinations, il ne compte pas s’y rendre. Un jour, Nicol, compris, n’est pas tout à fait étrangère, Bienvenue... figure une nouvelle voisine, s’installe en-face de chez lui. en somme l’envers du récent Ant-Man et la guèpe (2018). Car le grand coffre à jouets qu’y déverse l’auteur sert ici SUITE... Nicol, qui sympathise avec Mark, devient l’une des un ludisme aux entrées multiples - la voie d’une création héroïnes de Marwen, où une sorcière, Deja Thoris, empêche Hogie de vivre en paix. Lors de l’énoncé du verdict, Mark est artistique envisagée comme thérapeutique, d’un retour en victime d’un accès de terreur. La séance est reportée. Mark enfance mêlée de problématiques adultes - un homme seul demande en mariage Nicol... qui ne voit en lui qu’un ami. se rêvant couvert de femmes, et dont l’alter ego affronte Victime d’une crise, Mark se reprend : à Marwen, Hogie le Mal chaussé de talons aiguilles... Steve Carell, comme triomphe des nazis et de Deja. Au tribunal, Mark fait face à toujours, y est impérial. _T.F. ses agresseurs, puis, lors de l’expo, invite Roberta à dîner. Visa d’exploitation : en cours. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 7 © les Fiches du Cinéma 2019
Never-Ending Man Hayao Miyazaki (Owaranai hito : Miyazaki Hayao) de Kaku Arakawa Kaku Arakawa nous offre, sur son ami Hayao PORTRAIT DOCUMENTAIRE Adultes / Adolescents Miyazaki, magicien du film d’animation japonais, le fruit de deux années de travail : un accès intime u GÉNÉRIQUE et éclairant sur l’artiste, et son œuvre, brossant Avec : Hayao Miyazaki, Toshio Suzuki, Yuhei Sakuragi, Yukinori le constat nostalgique d’un changement de monde. Nakamura, Nobuo Kawakami, Atsushi Okui, Michiyo Yasuda. Montage : Tetsuo Matsumoto Production : NHK Distributeur : Eurozoom. © NHK 70 minutes. Japon, 2016 HHH Alors qu’on visite les locaux du studio Ghibli Sortie France : 2 janvier 2019 qu’il a cofondé et qui est fermé depuis son départ à la retraite en 2015, la voix du Maître résonne : “Aujourd’hui, c’est nostalgie et legs testamentaire, l’effort désespéré le passé. La fin d’une époque. C’est peut-être mieux ainsi”. d’un artiste (au sens plein) qui, s’il a intégré sa propre Deux séquences puissantes illustrent cette phrase liminaire. mort à venir, lutte contre les effets du vieillissement Dans la première, on découvre le début “définitif” du court au fil de l’annonce des décès de ses proches. Ainsi de métrage Boro la chenille pour lequel il n’a cessé de tarauder sa coloriste Michiyo Yasuda, disparue en 2016, après l’équipe 3D pendant des mois. Devant la beauté du résultat 50 ans de travail en commun. En ombres collatérales, - et comparé aux premiers essais - on se sent tel le Salieri une horloge égrenant son tic-tac dans la séquence de Forman comprenant enfin (dans la sublime scène du d’ouverture et l’affrontement de deux mondes Requiem) le gouffre séparant le génie du bon faiseur. Dans irréconciliables : la grosse machinerie d’un côté et la seconde, comme le contre-miroir de celle-ci, sollicité l’artisanat de l’autre, la technologie face à l’humain. pour donner son avis sur une sorte de zombie 3D marchant “Vous dessinez des gens, pas des personnages”, avec sa tête (test virtuel d’un logiciel destiné à remplacer explique-t-il aux dessinateurs 3D des productions l’homme), il lâche, comme blessé, en évoquant un handicapé Ishii. “Ça manque de magie”, déplore-t-il plus tard. de sa connaissance : “Vous n’avez pas réfléchi à la douleur, La magie, ce petit plus qui fait que “seuls les enfants c’est moche. C’est une insulte à la vie”. Il faut voir les jeunes verront que les poils bougent quand Boro sort de son techniciens semblant découvrir, gênés, leur hubris cocon”, s’émerveille-t-il, enfin satisfait du résultat prométhéenne, fascinés qu’ils sont par leur technologie sans final. Voilà pourquoi, quand il dit, “Je monopolise conscience. “Bientôt, on n’aura plus besoin des hommes” toutes les bonnes idées”, il convient d’y entendre conclut Miyazaki avant de refuser de travailler avec eux, nous la juste conscience d’un artiste sachant à quoi son rappelant salutairement qu’à l’inverse du clavier, la main talent l’oblige envers son public. Et pourquoi, torturé est le prolongement du cerveau et des sentiments qu’il par l’anxiété du perfectionniste, la cigarette et le rire transmet. Découpé en sept chapitres qui alternent, sur aux lèvres, il “avance”, tendu à se “dépasser” (ses une musique piano bluesy, entretiens et images d’archives deux maîtres-mots). “Je suis heureux, j’ai fait ce que ou actuelles, cet émouvant documentaire de Kaku Arakawa, je voulais”, assure-t-il. Aussi, en le voyant remettre, réalisé entre juin 2015 (six mois après que Miyazaki a angoissé, son ouvrage sur sa table de travail pour annoncé sa retraite) et octobre 2016 alors qu’il entame un long métrage qui devrait sortir en 2019 pour finalement un nouveau long métrage avec la complicité de ses 78 ans, on se dit, perplexe et paraphrasant Camus : son ami producteur Toshio Suzuki... nous fait découvrir, entre “Il faut imaginer Miyazaki heureux”. _G.To. Visa d’exploitation : en cours. Format : 1,77 - Couleur - Son : Stéréo. 8 © les Fiches du Cinéma 2019
Premières vacances de Patrick Cassir Une fêtarde et un casanier tentent l’aventure du couple COMÉDIE SENTIMENTALE Adultes / Adolescents en commençant par partir en vacances ensemble. Malgré un duo vedette assez efficace dans le comique u GÉNÉRIQUE de situation, le scénario déploie des gags un peu trop Avec : Camille Chamoux (Marion), Jonathan Cohen (Ben), Camille caricaturaux pour conserver un récit crédible. Cottin (Fleur), Jérémie Elkaïm (Romain), Vincent Dedienne (Arthur), Dominique Valadié (Nicole), Svetlana Gergova (Koukou), Bar Levy (Yuval), Sagi Halperin (Almog), Alex Alexiev (Boyan), Jean-Charles Clichet (Jérôme), Zoé Bruneau (Pauline), Émilie Caen (Géraldine), Caroline Anglade (Élise). Scénario : Camille Chamoux et Patrick Cassir Images : Yannick Ressiegac Montage : Stéphane Couturier 1re assistante réal. : Bonnie Pirès Scripte : Bérengère Saint-Bezar Son : Stéphane Bucher Décors : Samantha Gordowski Costumes : Emmanuelle Youchnovski Effets visuels : Stéphane Bidault Maquillage : Christophe Oliveira Casting : Constance Demontoy Production : The Film Coproduction : NJJ Entertainment, Le Pacte et C8 Films Producteur : Michael Gentile Producteur associé : David Pierret Dir. de production : François Lamotte Distributeur : Le Pacte. © The Film H Écrit à quatre mains, celles de la comédienne Camille Chamoux et du réalisateur Patrick Cassir, Premières vacances est le déploiement sur 1h40 d’une idée : c’est en passant des vacances ensemble que l’on sait si l’on 102 minutes. France, 2018 est fait l’un pour l’autre. À partir de ce postulat de départ, Sortie France : 2 janvier 2019 le film se déroule en trois temps : le choix de Marion, u RÉSUMÉ la communauté, le choix de Ben. Évidemment le bonheur Marion et Ben se rencontrent via Tinder, et bien qu’ils est dans les interstices. Taillé sur mesure pour le duo n’aient rien en commun - Marion est aussi spontanée que vedette Chamoux-Cohen, le scénario réserve des Ben est prévoyant – ils décident, sur un coup de tête, de situations en forme de gags bêtes et méchants (les toilettes partir en vacances ensemble. Marion devait aller à Beyrouth étant dans la chambre, Ben ira faire ses besoins dans avec Fleur et Romain, ses colocs. Ben devait retourner à le jardin... face au voisin ; dans le chalet communautaire, Biarritz avec sa famille. Ils partiront donc à mi-chemin : en se partage aussi... le sexe) et fonctionne sur une dichotomie Bulgarie. Marion a réservé une chambre d’hôte au bord de basique entre les habitudes et caractères de chacun (l’une la mer : celle-ci se révèle spartiate et la plage loin d’être paradisiaque ! Ben fait des efforts, mais les toilettes dans délurée, l’autre coincé ; l’une aveuglément mondialiste, la chambre, c’est trop pour lui. Ils quittent la chambre l’autre aveuglément individualiste...). Cette opposition précipitamment sur un quiproquos et rejoignent un chalet systématique peut être ici ou là un peu drôle, mais c’est communautaire. Après quelques jours, ils se font plumer surtout la caricature que l’on retient. Car, à l’instar par des colocataires peu scrupuleux. Marion réserve alors de beaucoup de films français actuels, celui de Chamoux une surprise à Ben : rejoindre enfin un hôtel de luxe. et Cassir, trouve sa dynamique en misant essentiellement SUITE... Entre cocktail et spa, Ben est ravi. Marion, en sur la technique de la vanne. Ce que renforce encore la revanche, est dépitée par tant d’inanité, d’autant plus présence de Jonathan Cohen. L’histoire est donc un simple qu’ils croisent un copain d’école de Ben, accompagné prétexte à épingler les petits travers de la “normalité” de femme et enfant, qui sont plus ennuyeux que jamais. actuelle et chacun en prend finalement pour son grade. Marion finit par suivre un beau serveur pour aller faire la Venu de la pub, où il a fait ses armes autant que ses preuves, fête, mais déchante vite en constatant qu’il lui réclame de l’argent. Le couple rentre à Paris fâché et chacun reprend Patrick Cassir filme ces aventures amoureuses en servant ses habitudes. Marion découvre que Fleur et Romain sont à parts égales ses interprètes. Ceux-ci forment un duo tombés amoureux : elle va devoir déménager. Ben réalise complice à l’écran, mais un couple un peu moins crédible que son quotidien très bordé n’est plus ce qui le satisfait. compte tenu du peu de place que réserve la mécanique du Après quelque temps de séparation, il retrouve donc Marion récit à ce qui les rapproche. _Ch.R. et la reconquiert. Visa d’exploitation : 147187. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 9 © les Fiches du Cinéma 2019
Qui a tué Lady Winsley ? de Hiner Saleem Ne trouvant jamais sa juste place entre le pastiche FILM NOIR Adultes / Adolescents burlesque et la fable politique, Qui a tué Lady Winsley ? prend bien malgré lui les atours d’une catastrophe u GÉNÉRIQUE industrielle aussi embarrassante que prévisible, malgré Avec : Mehmet Kurtulus (Fergan), Ergün Kuyucu (le commissaire l’investissement certain de toute la production. Çelik), Ezgi Mola (Azra), Turgay Aydin (Burak), Arin Kusaksizoglu (Fuat), Mesut Akusta (Ismail), Korkmaz Arslan (Sercan Birol), Senay Gürler (Lady Winsley), Haydar Sisman (le jardinier), Hülya Darcan (la mère de Birol), Ahmet Varli (Sadullah), Aytac Usun (le fils du jardinier), Aliye Uzunatagan (Dünya), Asli Samat (la femme de Sadullah), Feriha Eyüboglu (Mecmiye), Goncagül Sunar (Fatma), Laçin Çeylan (la servante), Lila Gürmen (Eylem), Serhat Midyat (le propriétaire du bar), Tugçe Tanis (l’infirmière). Scénario : Véronique Wüthrich et Hiner Saleem, avec la collaboration de Thomas Bidegain Images : Andreas Sinanos Montage : Marion Monnier, Sophie Reine, Claire Fieschi et Thomas Glaser 1res assistantes réal. : Sevgi Melis Silahtaroglu et Johana Katz Musique : Xavier Demerliac et Florence Caillon Son : Fabrice Osinski, Marc Bastien, Armelle Mahé et Emmanuel de Boissieu Décors : Burak Yerlikaya Costumes : Selin Sözen Casting : Harika Uygur Production : AGAT Films & Cie Coproduction : IFP, Versus © AGAT Films & Cie Production, Memento Films Production, Playtime, Les Films Chaocorp et Rebel Taste Producteurs : Marc Bordure et Robert Guédiguian Coproducteurs : Emre Oskay, Adnan M. Sapçi, Sadik H Cinq ans après le sympathique mais fouillis Ekinci, Alican Yazicioglu et Bugra Pamuksüzer Dir. de production : My Sweet Pepper Land, Hiner Saleem décide ici d’investir un autre Bünyamin Babaoglu Distributeur : Memento Films. genre cinématographique devenu aussi sacré que raidi par le temps : le film noir classique, sous perfusion d’Agatha Christie. 90 minutes. France - Turquie - Belgique, 2018 Sur une île perdue, restée au stade atavique d’une insularité Sortie France : 2 janvier 2019 aussi topographique que symbole d’une involution sans cesse u RÉSUMÉ croissante (évidemment, terreau fertile aux secrets consanguins, L’inspecteur Fergan débarque sur l’île turque de Büyükada, enfouis dans les recoins des arbres généalogiques touffus), pour récupérer une enquête insoluble : le meurtre de Lady un taciturne (mais pas trop) inspecteur enquête sur un meurtre Winsley, une romancière américaine qui passait l’hiver sur sordide (mais pas trop), et va voir le piège xénophobe et cocardier l’île. Pas de traces de violences, juste une goutte de sang se refermer sur lui (mais pas trop). Comme dans son film dans l’œil. Fergan se rend dans la maison de la victime et précédent, Saleem a de l’idée politique, et sait la dissoudre y croise Burak, un journaliste local, puis se rend dans son dans l’air pour laisser les personnages de son cinéma hôtel, où il rencontre Azra. Entre eux, un jeu de séduction l’attraper au vol. Las, ces rares séquences séduisantes s’installe. L’enquête piétine : tous les habitants de l’île étant plus ou moins cousins, l’ADN du sang de l’œil correspond sont arrimées au sol grossier du burlesque le plus toujours partiellement. Fergan se dit alors que l’ancêtre de apathique possible, fait de trognes improbables, de chutes cette grande famille, vétérinaire, devait bien avoir quelque incongrues, de circonvolutions débullées - tout l’attirail de liaison extraconjugale, et veut retrouver ce fils illégitime. l’épate moderne. Saleem surligne plus qu’il ne suggère, SUITE... Fergan apprend que Winsley enquêtait sur le meurtre figure plus qu’il n’esquisse, et finit par usiner une comédie irrésolu d’un jeune poète et qu’elle s’apprêtait à révéler policière tendue entre le pire des deux genres cités, ni le pot-aux-roses. Entre-temps, Burak découvre les origines suffisamment drôle pour instiller une inquiétante étrangeté, de l’inspecteur : Fergan est kurde, peuple que l’île entière, ni suffisamment captivante pour que le hors-champ fascine sauf Azra, méprise. Pris en grippe, Fergan se réfugie autant le spectateur que ce qu’il saisit dans l’écran. Qui a tué à Istanbul, chez sa mère, afin d’en savoir plus. Il revient Lady Winsley ?, à vouloir nous perdre, se perd - pêché véniel sur l’île, et découvre qu’un jeune réserviste de l’armée peut-être, mais éloquent : rendu exsangue par ses afféteries est le fils illégitime du vétérinaire. Cependant, il se doute que ce jeune meurtrier protège quelqu’un d’autre. Suite baroques, le film ne finit par dégager qu’une énergie en vase à une filature, il découvre que Burak avait tué le jeune clos, car constamment en train de se regarder rire, sans poète kurde, avait étouffé l’affaire, et tué Winsley, qui allait cesse lorgnant vers des cimes absurdes et inconséquentes. tout révéler. Piégé et faisant face à Burak, Fergan est sauvé Il serait peut-être temps de rallumer la pesanteur que par le chef de police local. Avant de repartir, il embrasse l’histoire personnelle d’Hiner Saleem mérite. _C.D. Azra. Visa d’exploitation : 146163. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 10 © les Fiches du Cinéma 2019
Un beau voyou de Lucas Bernard À la veille du départ à la retraite, un commissaire de COMÉDIE POLICIÈRE Adultes / Adolescents police poursuit un mystérieux voleur de tableaux. Premier long métrage de fiction de Lucas Bernard, u GÉNÉRIQUE Un beau voyou vaut essentiellement pour le couple Avec : Charles Berling (le commissaire Beffrois), Swann Arlaud de restaurateurs, père et fille, qu’il met en scène. (Bertrand), Jennifer Decker (Justine), Jean-Quentin Châtelain (Charles), Erick Deshors (Bertaud), Anne Loiret (Madame Maupas), Pierre Aussedat (Étienne), Marina Moncade (Nicole), Victor Pontecorvo (Arthur), Samuel Brafman (Paul), Renan Carteaux (Olivier), Christian Benedetti (Georges), Alassane Diong (le petit cambrioleur). Scénario : Lucas Bernard Images : Alexandre Léglise Montage : Valentin Durning 1er assistant réal. : Franck Morand Scripte : Marie Prual Musique : Christophe Danvin Son : Simon Dumetz, Florent Vrac et Matthieu Dallaporta Décors : Anne-Charlotte Vimont Costumes : Julie Miel Maquillage : Amélie Salomon Casting : Tatiana Vialle Production : Les Grands Espaces Coproduction : France 3 Cinéma Producteur : Florian Môle Dir. de production : Julien Bouley Distributeur : Pyramide. © Claire Nicol / Les Grands Espaces H Adossé à une structure bizarre, ce premier film de Lucas Bernard semble ne pas bien savoir à qui s’intéresser de son gendarme, veuf à la veille du départ à la retraite, ou de son voleur, personnage mystérieux 104 minutes. France, 2018 dont motivations et ressorts resteront du domaine de Sortie France : 2 janvier 2019 la pure spéculation. Ce qui ne serait pas bien grave si u RÉSUMÉ le film ne prenait l’allure d’un vide-greniers à la chalandise Le commissaire Beffrois surprend un monte-en-l’air en bobo où acquérir, pour le prix d’une place de cinéma par train de cambrioler son appartement avant de le laisser conséquent, de vagues considérations sur l’art, la beauté repartir, non sans avoir récupéré les bijoux de son épouse et, plus exactement encore, sur le goût - bon ou mauvais défunte. Deux vols de tableaux consécutifs le remettent c’est selon -, sur l’avancée de l’âge et son déni, apparié au sur la piste d’un voleur qu’il poursuit, en vain, depuis sentiment d’inutilité ou de vacuité qui se profile à l’approche 3 ans. Invité à dîner chez Charles et Justine Lazare, père et de la retraite, sur la culture du secret hypothétiquement, fille, restaurateurs qui avaient eu à travailler sur l’une des de la confiance qu’on n’accorde pas à ses proches, toute œuvres volées, il fait la connaissance du laconique Bertrand, le petit ami de Justine. Une nuit, qu’ils passent ensemble, réflexion de seconde main, il va sans dire. Bref, ici un voleur Justine découvre qu’ils ne sont pas chez Bertrand comme d’œuvres d’art dont nul ne saura rien aide, par sa seule elle le croyait et le somme de lui montrer où il vit. Lequel existence, un fonctionnaire de police à franchir le cap de son Bertrand semble gagner sa vie en arnaquant de riches imminente mise au rancart. Tout cela endossé avec allant par étrangères en quête de locations immobilières. un casting pas franchement des plus audacieux qui place, SUITE... Censés se retrouver chez Bertrand, Justine et celui-ci face à face en haut de l’affiche, Charles Berling et Swann sont obligés de fuir quand arrivent les véritables locataires. Arlaud en duel à fleuret moucheté. Restent Justine - Jennifer Bertrand n’a plus d’autre choix dès lors que de l’emmener Decker, de la Comédie Française - formidable personnage dans son très modeste appartement. L’un des tableaux dont la liberté d’allure, de ton, sexuelle, en fait une figure retrouvés, Beffrois confond le juge qui en a fait l’acquisition féminine comme le cinéma français mainstream ne sait illégale. Et parvient à tendre un piège à son voleur. Après plus en concevoir depuis longtemps, et son père Charles l’avoir poursuivi sur les toits, puis démasqué, il reconnaît Bertrand et, sans en avoir l’intention, provoque son - Jean-Quentin Châtelain toujours épatant décidément - qui arrestation. En dupant l’avocat commis d’office, Bertrand n’esquive jamais quand il s’agit de mettre les pieds dans parvient à se faire libérer. Quelques mois plus tard, au cours le plat. C’est sur ce couple-là qu’à nos yeux très agréablement d’un séjour en Angleterre, alors que Justine et Bertrand surpris se concentre tout l’intérêt d’Un beau voyou. Tout n’est visitent un musée, Beffrois, désormais retraité, surgit et pas perdu donc. _R.H. menotte Bertrand à une table de la cafétéria puis s’en va. Visa d’exploitation : 145370. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD. 11 © les Fiches du Cinéma 2019
Undercover Une histoire vraie (White Boy Rick) de Yann Demange Parfaitement incarné par Matthew McConaughey DRAME Adultes / Adolescents et le prometteur Richie Meritt, ce deuxième long métrage de Yann Demange, au rythme assez inégal, u GÉNÉRIQUE convainc par sa capacité à placer le drame intime Avec : Matthew McConaughey (Richard Wershe Sr.), Richie Merritt avant le contexte social dans lequel il s’inscrit. (Rick Wershe Jr.), Bel Powley (Dawn Wershe), Jennifer Jason Leigh (l’agent du FBI Snyder), Brian Tyree Henry (l’inspecteur Jackson), Rory Cochrane (l’agent du FBI Byrd), RJ Cyler (Rudell “Boo” Curry), Jonathan Majors (Johnny “Lil Man” Curry), Eddie Marsan (Art Derrick), Taylour Paige (Cathy Volsan-Curry), Bruce Dern (le grand-père Roman “Ray” Wershe), Piper Laurie (la grand-mère Verna Wershe), Raekwon Haynes (Edwin “Nugg” Crutcher), Ishmael “Ishdarr” Ali (“Freaky Steve” Roussell), James Howard (l’inspecteur en chef de la brigade des homicides Hill), YG (Leo “Big Man” Hanserd), Danny Brown (“Black Ed” Hanserd), Kyanna Simone Simpson, Morerice Thornton, Isaiah Ali, E’Xavion Walker, Lawrence Adimora, Alan Bomar Jones, Art Terry, Santos Velasquez, Heidi Sulzman. Scénario : Andy Weiss et Logan & Noah Miller Images : Tat Radcliffe Montage : Chris Wyatt 1er assistant réal. : Thomas Patrick Smith Scripte : Scott Peterso Musique : Max Richter Son : Willie D. Burton Décors : Stefania Cella Costumes : Amy Westcott Effets © Sony spéciaux : William Dawson Effets visuels : Pete Sussi Dir. artistique : Bryan Felty Maquillage : Anita Gibson Casting : Francine Maisler Production : LBI Entertainment, Le Grisbi et Protozoa Pour : Columbia HH Quatre ans après son Prix du Jury au festival Pictures et Studio 8 Producteurs : John Lesher, Julie Yorn, Scott du Film policier de Beaune et une pluie de nominations Franklin et Darren Aronofsky Distributeur : Sony Pictures. prestigieuses pour ‘71, Yann Demange s’envole outre- Atlantique pour son deuxième long métrage. Undercover 111 minutes. États-Unis, 2018 (White Boy Rick en version originale, un titre bien plus Sortie France : 2 janvier 2019 évocateur) conte l’histoire vraie de Richard “Rick” Wershe u RÉSUMÉ Jr. - le plus jeune informateur du FBI de l’Histoire - dans 1984. Richard vit à Détroit avec ses enfants, Dawn et Rick. le Détroit des années 1980, qui fut condamné à la plus Avec son activité de revente d’armes, il peine à joindre longue peine de prison pour possession de drogue sans fait les deux bouts. Sous l’influence de son petit ami, Dawn se de violence. C’est sur Richie Meritt, lycéen de Baltimore drogue et fuit la maison. Rick, 14 ans, aide son père et se sans aucune expérience du jeu, que Demange a jeté lie d’amitié avec une bande d’Afro-Américains, la Curry son dévolu pour incarner Rick. Le jeune homme livre Crew. Deux agents du FBI, Alex et Frank, demandent à Rick une interprétation étonnamment juste et mature face à d’infiltrer le réseau de drogue du coin. L’adolescent se prend un Matthew McConaughey qui, après quelques prestations au jeu de l’argent et s’attache réellement aux membres de la bande. Il a une brève liaison avec Brenda. 1985. outrancières, émeut dans sa composition plus sobre Les activités de Rick prennent de l’ampleur. Il continue à de Richard Wershe Sr. Malgré quelques lenteurs, le scénario fournir des informations au FBI. est intelligemment construit sur les trois années qui SUITE... Ses complices s’en rendent compte : l’un d’entre ont fait basculer la vie de l’adolescent et ne s’égare d’eux lui tire une balle dans le ventre. Il s’en tire après jamais dans des futilités. Le cinéaste privilégie le drame une longue convalescence et la collaboration avec le FBI intime tout en l’inscrivant dans un contexte social violent prend fin. Il apprend par le petit frère de Brenda qu’il a et confus - les tensions raciales dans Undercover , une fille d’un mois, Keisha. Il convainc son père d’aller le conflit nord-irlandais dans ‘71. Sur une mise en scène chercher Dawn, véritable junkie, et de l’aider à s’en efficace et délicate, c’est à travers le parcours de Rick et sortir. Pour leur avenir et celui de Keisha, Rick persuade de son père, trahis par le système auquel ils s’étaient Richard de lancer leur propre trafic de drogue. 1986. alliés et freinés dans leur poursuite du rêve américain, Dawn va mieux, Richard ouvre enfin le vidéo-club dont il rêvait. Mais Rick est arrêté en possession de 8 kilos qu’Undercover dresse le portrait d’une ville gangrenée par de crack. Pour une telle quantité, la loi prévoit la prison la corruption des forces de l’ordre et l’expansion du trafic à vie et Rick est jugé coupable à l’unanimité. Alex et de drogue. Le film abaisse subtilement les frontières Frank tentent furtivement, en vain, d’obtenir une réduction du genre policier et constitue surtout un très beau drame de peine. Dawn, Richard et Keisha lui rendent visite en familial. _A.L. prison. Visa d’exploitation : 148966. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. 12 © les Fiches du Cinéma 2019
An Elephant Sitting Still (Da xiang xi di er zuo) de Hu Bo Le premier (et dernier) film de Hu Bo opère une plongée DRAME SOCIAL Adultes / Adolescents dans une ville sinistre, où une poignée d’habitants se heurte à la violence et à la misère sociales. u GÉNÉRIQUE Une œuvre-fleuve dont la mélancolie accablante Avec : Peng Yuchang (Wei Bu), Zhang Yu (Cheng Yu), Wang Yuwen étouffe continuellement le récit et les personnages. (Huang Ling), Liu Congxi (Wang Jin), Ling Zhenghui (Li Kai), Zhang Xiaolong (Yu Shuai), Li Kai Suyun (la mère de Bu), Wang Ning (la mère de Ling), Shunzi (la mère de Cheng), Wang Chaobei (l’ami de Cheng), Wang Xueyang (la femme de l’ami de Cheng), Li Danyi (la fille de Jin), Kong Yixin (la petite-fille de Jin), Kong Wei (le gendre de Jin), Rong Dong Xiang (le doyen), Guo Jing (la femme du doyen), He Miaomiao (la mère de l’ami de Cheng), Liu Jianmin (l’oncle de Bu), ZhaoYan Guozhang (le père de Bu), Zhuyan Manzi (la maîtresse de Cheng), Zhang Zhouqiang (le chef-cuisinier), Ember Yu (la réceptionniste de la salle de billard), Li Qing (le propriétaire du chien blanc), Huang Ximan (la propriétaire du chien blanc), Li Binyuan (le revendeur clandestin). Scénario : Hu Bo Images : Fan Chao Montage : Hu Bo 1er assistant réal. : Zhou Xiaoyan Musique : Hua Lun Son : Ren Yiming Décors : Bai Ruizhou Effets visuels : Feng Jingtao Production : Dongchun Films Producteur : Fu Dongyan Distributeur : Capricci Films. © Dongchun Films HH De son affiche à son argument, An Elephant Sitting Still exhibe malgré lui un apparat tragique. Son réalisateur, Hu Bo, s’est en effet suicidé quelque temps après avoir achevé la post-production de son film et s’être 234 minutes. Chine, 2018 battu pour en conserver la durée initiale (3h54). Avant même Sortie France : 9 janvier 2019 d’avoir visionné l’œuvre, le spectateur peut se retrouver u RÉSUMÉ pris en otage par cette information, savamment mise en Dans un immeuble, Wei Bu subit les remontrances de son exergue par les louanges des pairs et des maîtres du défunt père. Son voisin Wang Jin comprend que ses enfants veulent (Béla Tarr, Gus Van Sant, Wang Bing). Ni chef-d’œuvre ni le placer en maison de retraite. Au même moment, Yu Cheng déshonneur, le résultat se veut la somme encombrée de raconte à une femme avec qui il a couché la légende de la ville dénonciations dévastatrices, traversées par quelques de Manzhouli. Selon celle-ci, un éléphant de cirque y reste assis tableaux bouleversants. De l’égoïsme familial à la violence toute la journée, immobile. Plus tard, le compagnon de sociale, le monde dans lequel évoluent les protagonistes la femme se suicide. Il n’était autre que le cousin de Yu Cheng. est aussi répugnant qu’infernal. En témoigne un brouillard Dans un autre immeuble, Huang Ling réveille sa mère en état d’ébriété. Au lycée, Wei Bu et son ami sont persécutés par grisâtre qui nappe les moindres recoins de la ville post- un autre camarade. Ce dernier tombe violemment dans industrielle. Aucun sourire ni aucun espoir ne traversera les escaliers en voulant frapper Wei Bu. Yu Cheng reçoit le visage des protagonistes, victimes comme bourreaux. un appel de sa mère lui annonçant que son frère a été Telles des âmes errant dans les limbes, ces derniers se attaqué au lycée. croisent dans un récit choral à l’écriture (trop) millimétrée. SUITE... Le chien de Wang Jin est tué par un chien errant. Si la maîtrise est exemplaire, elle épuise également le potentiel Recherché par Yu Cheng, Wei Bu se réfugie chez sa grand- contemplatif, discursif et émotionnel du dispositif. Ne laissant mère, morte dans son sommeil. Wang Jin se confronte aux jamais ses personnages souffler ni souffrir complètement, propriétaires du chien. Huang Lin refuse de partir avec Wei Bu le long métrage pêche par son excès de mésaventures mais à Manzhouli. Wang Jin découvre Yu Cheng fouillant le domicile se rattrape de justesse par son absence de complaisance de Wei Bu. Huang Lin entretient une relation avec le proviseur misérabiliste. En découle une œuvre continuellement sous du lycée. Yu Cheng apprend la mort de son frère. Alors que sa relation est dévoilée au grand jour, Huang Lin se dispute avec tension, prise au piège par des désirs et des directions sa mère. Le proviseur et son épouse viennent les voir. Avec contradictoires. Entre introspection mélancolique, brûlot une batte de base-ball, Huang Lin frappe l’homme. Yu Cheng politique et fable intime, An Elephant Sitting Still peine retrouve Wei Bu mais le laisse partir. Il est blessé par l’ami à trouver son identité et manque de devenir une œuvre de Wei Bu, qui se suicide ensuite. Wei Bu, Huang Lin, Wang percutante. _S.H. Jin et sa petite fille quittent la ville pour rejoindre Manzhouli. Visa d’exploitation : en cours. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD. 13 © les Fiches du Cinéma 2019
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