Utilisation des pesticides en cultures maraîchères sur l'île d'Idjwi à l'est de la République démocratique du Congo : connaissances et pratiques ...
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Cah. Agric. 2023, 32, 5 © A. Mushagalusa Balasha et al., Hosted by EDP Sciences 2023 https://doi.org/10.1051/cagri/2022033 Disponible en ligne : www.cahiersagricultures.fr ARTICLE DE RECHERCHE / RESEARCH ARTICLE Utilisation des pesticides en cultures maraîchères sur l’île d’Idjwi à l’est de la République démocratique du Congo : connaissances et pratiques des agriculteurs Arsène Mushagalusa Balasha1,* , Dominique Aganze Mulume2 , Sage Weremubi Mwisha2 , Jules Nkulu Mwine Fyama1 et John Tshomba Kalumbu1 1 Unité de Recherche en Économie et Développement Agricoles, Faculté des Sciences Agronomiques, Université de Lubumbashi, PO Box 1825, Lubumbashi, République démocratique du Congo 2 Faculté des Sciences Agronomiques et Environnement, Université Evangélique en Afrique, PO Box 3323, Bukavu, République démocratique du Congo Résumé – Une enquête a été réalisée sur l’île d’Idjwi, à l’est de la République démocratique du Congo, pour évaluer les pratiques phytosanitaires actuelles et les risques perçus par les agriculteurs. Les maraîchers, constitués en majorité de femmes (68 %) utilisent en cultures de tomate, de choux et d’aubergine, une diversité de fongicides, souvent en combinaison (43 %) avec des insecticides tels que la cyperméthrine. Le choix de ces pesticides est principalement déterminé par la perception de leur efficacité par les maraîchers et leur disponibilité sur les marchés locaux, où les revendeurs sont la principale source d’information des agriculteurs. L’incapacité des autorités compétentes (Office national de la protection des végétaux, Office congolais de contrôle) à limiter la distribution des pesticides non autorisés et très dangereux (e.g., profénofos), l’analphabétisme (39 % des agriculteurs) et l’absence de formation à l’usage des pesticides ne favorisent pas de bonnes pratiques phytosanitaires. De plus, le non port des équipements de protection (62 % des cas) et le non-respect des délais de sécurité ainsi que la négligence des pratiques d’hygiène après traitement (50 % de cas) exposent les maraîchers aux risques des pesticides, avec un impact potentiel direct sur leur santé. Enfin, les déchets de pesticides abandonnés sur les exploitations (60 %) et la mauvaise gestion de la bouillie restante après traitement contribuent à polluer l’environnement. Nous proposons donc une série d’actions pour favoriser une gestion rationnelle des pesticides et une amélioration des pratiques phytosanitaires des agriculteurs de l’île d’Idjwi. Mots clés : pratiques phytosanitaires / maraîchage / pesticides / risques sanitaires / Idjwi Abstract – Pesticide use in vegetable production on the Idjwi Island in eastern Democratic Republic of Congo: farmers’ knowledge and practices. We conducted a survey on the Idjwi Island (eastern Democratic Republic of Congo) to assess pesticide use practices and risks perceived by vegetable farmers. Results show that most of the vegetable farmers are women (68%), using a variety of fungicides, often (43%) combined with insecticides, such as cypermethrin. The choice of used pesticides is mainly determined by their perceived effectiveness by farmers and their availability in local markets, where retailers are considered experts to provide information on pesticide use. The failure of the Congolese authorities to regulate the pesticide market and to limit the distribution of unapproved pesticides (e.g., profenofos), illiteracy (39% of farmers), and the absence of training on the use of pesticides do not promote good phytosanitary practices. In addition, the non-wearing of personal protective equipment (62% of cases) and the non-respect of the restricted-entry intervals, as well as the neglect of hygiene practices after pesticide application (50% of cases), expose vegetable farmers to the risks of pesticides with a potential direct impact on their health. Moreover, poor disposal of pesticide leftovers and emptied packages of pesticides (60%) could pollute the environment. Thus, we propose a series of actions for good pesticide management, in order to improve farmers’ pest management practices and reduce the risks related to pesticide use. Keywords: crop protection practices / market gardening / pesticides / health risks / Idjwi Island *Auteur de correspondance : mushagalusabalasha@unilu.ac.cd This is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution License CC-BY-NC (https://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0), which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, except for commercial purposes, provided the original work is properly cited.
A. Mushagalusa Balasha et al. : Cah. Agric. 2023, 32, 5 1 Introduction produites par les maraîchers à l’est de la RD Congo, des résidus de mancozèbe (famille des dithiocarbamates) qui dépassent la La FAO (2010) estime que 150 000 tonnes de légumes sont limite maximale de résidus selon les normes européennes de produites par an au sein de petites exploitations familiales en sécurité alimentaire (Muyisa et al., 2014). Or, depuis République démocratique du Congo (RDC) pour nourrir janvier 2022, le mancozèbe a été ajouté à une longue liste principalement les populations urbaines en forte croissance et de matières actives interdites au sein de l’Union européenne, procurer rapidement des revenus aux producteurs. Sur l’île du fait de risques de perturbation endocrinienne et pour la d’Idjwi, à l’est de la RDC, 83 % des ménages considèrent reproduction. Il est donc crucial que l’utilisation des pesticides l’agriculture comme leur occupation principale (Balasha et al., soit évaluée pour attirer l’attention des agriculteurs et des 2022). Cependant, au cours de la dernière décennie, le autorités sur les risques associés au mauvais usage des flétrissement bactérien du bananier (wilt), la mosaïque pesticides et sur la nécessité de respecter de meilleures africaine du manioc et la rouille du café ont entrainé une pratiques phytosanitaires (Gouda et al., 2018 ; Kouakou et al., chute drastique des rendements de ces cultures (The New 2019). L’objectif de ce travail est d’étudier les pratiques Humanitarian, 2012 ; Bisimwa et al., 2019). Cette situation a phytosanitaires actuelles des agriculteurs d’Idjwi, afin de contraint de nombreux exploitants agricoles, également comprendre les déterminants du choix des pesticides, leur soucieux de diversifier leurs revenus, à orienter leurs efforts mode d’utilisation et leur impact potentiel sur la santé des et leurs investissements dans le maraîchage. Dans les bas- utilisateurs. fonds où la plupart des exploitations maraîchères sont localisées, les agriculteurs produisent du chou, de la tomate, 2 Méthodologie de l’aubergine et de l’amarante, pour l’autoconsommation et l’approvisionnement des villes de Bukavu et de Goma. 2.1 Zone d’étude et choix des sites Cependant, les ravageurs et les maladies des cultures L’étude a été conduite sur l’île d’Idjwi à l’est de la constituent des menaces pour les exploitations maraîchères République démocratique du Congo, précisément dans les de la région (Balasha et Nkulu, 2021 ; Chuma et al., 2021). Par groupements de Mugote, de Mpene et de Nyakalengwa exemple, Walangululu et Mushagalusa (2000) montrent que la (Fig. 1). pression des pucerons cendrés et des chenilles (Plutella Le choix du territoire d’Idjwi est lié à l’intensification xylostella, Agrotis ipsilon) peut entraîner près de 60 % de perte observée des cultures maraîchères pour permettre l’approvi- dans les exploitations de choux de la région. Pour minimiser de sionnement des villes de Bukavu et de Goma. telles pertes et continuer à répondre à la demande alimentaire croissante, les maraîchers utilisent des fongicides et des insecticides (Muyisa et al., 2014 ; Munyuli et al., 2017). Bien 2.2 Enquêtes auprès des agriculteurs et des qu’il leur soit reconnu l’avantage d’agir sur un large spectre de vendeurs des pesticides nuisibles et d’améliorer la quantité ainsi que la qualité des récoltes (Okolle et al., 2016 ; Bafada et al., 2019), l’utilisation Le nombre total d’agriculteurs et le volume de production répétée et mal maîtrisée des pesticides conduit à la résistance dans la zone d’étude ne sont pas connus précisément, du fait du des bioagresseurs et à la suppression des auxiliaires des manque de statistiques agricoles en RDC. À partir d’une liste cultures (Bommarco et al., 2011), à la pollution environne- de 150 agriculteurs précédemment interrogés dans la même mentale et à de graves problèmes de santé pour les agriculteurs région (Balasha et al., 2022), 90 agriculteurs ont été retenus et et les consommateurs (Damalas et Koutroubas, 2016 ; interviewés entre mars et avril 2021, période durant laquelle le Kouakou et al., 2019). maraîchage était pratiqué. Le choix de ces agriculteurs était La situation apparaît inquiétante en RDC parce que la essentiellement dicté par leur utilisation des pesticides, leur défaillance des autorités congolaises à réguler et à contrôler le accord à participer volontairement à l’enquête et les superficies marché des pesticides a contribué à la distribution d’insecti- allouées aux cultures maraîchères (Tab. 1). À l’aide d’un cides non autorisés et très dangereux, tels que le profénofos et questionnaire semi-structuré, les entretiens individuels avec le dichlorvos (Balasha et Nkulu, 2020 ; SOS-FAIM, 2021). De les maraîchers ont porté trois points : (1) les caractéristiques plus, le faible niveau d’instruction de la plupart des socio-économiques des agriculteurs (niveau d’instruction, âge, agriculteurs, le manque d’encadrement, d’information et de surfaces cultivées, importance accordée à la production formation sur l’usage des pesticides conduisent les maraîchers maraîchère, cultures pratiquées) ; (2) les dégâts observés et à de mauvaises pratiques phytosanitaires. Selon Son et al. les pratiques phytosanitaires (facteurs déclenchant du traite- (2017), ces mauvaises pratiques phytosanitaires comprennent ment, coût des pesticides, type de produits utilisés et le mauvais choix des pesticides, le non-respect des doses déterminants de leur choix, ainsi que mode d’emploi, moyens prescrites, le non-respect des règles de protection et d’hygiène de protection utilisés et gestion des emballages) ; (3) la conseillées lors des traitements, ainsi que la mauvaise gestion perception des agriculteurs des risques sanitaires (problèmes des emballages vides. De plus, par méconnaissance des délais ressentis après l’application des pesticides). Ces entretiens de sécurité et d’attente avant la récolte pour les pesticides avec les maraîchers ont été complétés par des observations utilisés, de nombreux agriculteurs restent souvent travailler directes lors de la préparation des bouillies et de l’application dans les parcelles traitées et récoltent des produits impropres à des pesticides ; ces deux étapes sont cruciales en termes la consommation, avec des résidus qui dépassent la limite d’exposition au risque car, d’une part, les agriculteurs sont en maximale (Schiffers, 2011 ; Toumi et al., 2019). Ainsi, une contact avec les produits concentrés et dilués (Schiffers, 2011 ; étude récente dans la ville de Bukavu a détecté dans les tomates Gouda et al., 2018) et d’autre part, c’est le moment où la Page 2 de 12
A. Mushagalusa Balasha et al. : Cah. Agric. 2023, 32, 5 Fig. 1. Carte de l’île d’Idjwi montrant les trois groupements étudiés. Source : auteurs, sur base du shapefile du référentiel géographique commun du Congo. Fig. 1. Map of Idjwi Island showing the study areas. qualité des matériels utilisés et le comportement ainsi que déterminer si la matière active est autorisée ou non sur le l’attitude des agriculteurs sont correctement évalués (Schiffers, marché, nous avons consulté la base de données Pesticides de 2011 ; Mushagalusa et al., 2019). l’Union européenne (https://food.ec.europa.eu/plants/pestici De plus, nous avons réalisé une enquête dans trois des/eu-pesticides-database_en). boutiques agricoles locales dans le but d’identifier les matières Les données collectées ont été saisies et traitées à l’aide des actives des pesticides utilisés. Les boutiques visitées sont tableurs Microsoft Excel 2016 et du logiciel XLSTAT. Elles celles où la plupart des agriculteurs ont déclaré s’approvi- ont été soumises à une analyse descriptive (fréquences et sionner en intrants agricoles. pourcentages). Une analyse des correspondances multiples a été effectuée pour analyser le lien existant entre les variables qualitatives susceptibles de motiver le choix des fongicides et 2.3 Classement toxicologique des pesticides et des insecticides recensés chez les maraîchers interrogés. phrases de risque pour les agriculteurs 3 Résultats Pour déterminer le niveau de danger de chaque pesticide, nous avons utilisé le guide de classement des produits 3.1 Caractéristiques socio-économiques des phytopharmaceutiques selon leur niveau de toxicité de maraîchers. l’Organisation mondiale de la santé – OMS (WHO, 2020). Pour préciser les phrases de risque pour chacun des pesticides Ces caractéristiques sont présentées dans le tableau 1. Les utilisés, les fiches individuelles de données de sécurité émises maraîchers interrogés sont en majorité des femmes (68 %) dont par les fabricants de chaque produit ont été consultées. Pour l’âge va principalement de 46 à 59 ans (42 %). Nombre de ces Page 3 de 12
A. Mushagalusa Balasha et al. : Cah. Agric. 2023, 32, 5 Tableau 1. Caractéristiques socio-économiques des agriculteurs interrogés. Table 1. Socioeconomic characteristics of vegetable farmers on Idjwi Island. Variables Modalités Effectif (n = 90) % Féminin 61 67,8 Sexe Masculin 29 32,2 17–30 8 8,9 31–45 36 40,0 Intervalle d’âge (ans) 46–59 38 42,2 ≥ 60 8 8,9 N’a jamais étudié 35 38,9 Primaire 12 13,3 Secondaire (inachevé) 12 13,3 Niveau d’étude Diplôme d’État 18 20,0 Graduat 10 11,1 Licencié 3 3,3 Non 20 22,2 Activité principale Oui 70 77,8 Achat 22 24,4 Mode d’accès à la terre Héritage 43 47,8 Location ou métayage 25 27,8 < 10 ares 8 9,0 Surfaces cultivées 10–49 ares 57 63,0 > 50 ares 25 28,0 Pour la subsistance 14 15,6 Objectif de production Pour la vente 13 14,4 Subsistance et vente 63 70,0 Artisanat 4 4,4 Fonctionnaire 15 16,7 Activités secondaires Pêche 8 8,9 Petit commerce 63 70,0 agriculteurs ne savent ni lire ni écrire (39 %) et n’ont jamais matières actives, 4 fongicides et 6 insecticides ont été recensés suivi de formation à l’utilisation des pesticides chimiques. dans le milieu d’étude. Les résultats du tableau 2 indiquent que L’agriculture est l’activité principale pour la majorité d’entre les fongicides les plus utilisés par les maraîchers dans les eux (78 %). Les maraîchers interrogés produisent à la fois pour exploitations sont formulés à partir des matières actives leur subsistance et pour le marché (70 %). Les terres cultivées suivantes : oxychlorure de cuivre 50 % WP (32,7 %), métalaxyl sont principalement obtenues par héritage (48 %) et prise en 4 % þ mancozèbe 64 % (22 %), métalaxyl 80 g/kg þ mancozèbe métayage (28 %). Le petit commerce des produits agricoles 640 g/kg (14,3 %), soufre 80 % (11,3 %) et mancozèbe 80 % alimentaires (70 % des cas) ainsi que la pêche constituent les (1,8 %). activités secondaires génératrices de revenus pour les ménages Les insecticides les plus utilisés par les agriculteurs sont rencontrés. formulés à base des matières actives suivantes : profénofos Les principales cultures maraîchères pratiquées sont la 40 % þ cyperméthrine 4 % (24,4 %), abamectine 1,8 % tomate (Solanum lycopersicum L.), les choux (Brassica (9,8 %), abamectine 20 g/L þ acétamipride 3 % (7 %), cyper- oleracea L.) et l’aubergine (Solanum melongena L.). Les méthrine 5 % (6,1 %), cyperméthrine 25 g/L (3,9 %), dichlor- cultures secondaires sont l’amarante (Amaranthus sp.), le vos 77 % EC (2,8 %), malathion (1,3 %), Endosulfan 400 g/L haricot (Phaseolus vulgaris L.) et l’oignon (Allium Cepa L.). (0,8 %). Les résultats du tableau 2 montrent aussi que presque la moitié des matières actives utilisées par les agriculteurs sont 3.2 Typologie des pesticides utilisés par les déjà retirées du marché européen. 54 % des matières actives maraîchers d’Idjwi identifiées sont classées modérément dangereuses par l’OMS et 23 % très dangereuses pour les êtres vivants et l’environne- Sur l’île d’Idjwi, les maraîchers utilisent une large gamme ment (dichlorvos, abamectine). Au même tableau 2, l’analyse de pesticides dont les principaux sont des fongicides et des des phrases de risque (H) des matières actives utilisées montre insecticides. Ces produits sont classés dans le tableau 2 selon que la plupart d’entre elles sont toxiques ou nocives en cas leurs matières actives, leurs phrases de risque et leur niveau de d’ingestion (H301, H302) et peuvent provoquer l’irritation ou danger conformément aux normes de l’OMS. Sur la base des endommager les yeux (H318, H319) et la peau (H315, H317) Page 4 de 12
Tableau 2. Typologie, classement toxicologique des pesticides et fréquence d’utilisation. Table 2. Pesticide toxicology and use frequency among farmers. Type de Nom Matières actives Classe de Statut Phrases de risques Fréquence pesticides commercial danger OMS d’utilisation (%) Commando Oxychlorure de cuivre 50 % WP II Autorisé H302, H317, H319, H373, H410, H433 32,7 Dithane Mancozebe 80 % U Non autorisé H317, H361, H400 1,8 Mancolax Métalaxyl* 80 g/kg þ Mancozèbe 640 g/kg II et U Pas déterminé H302, H318, H319, H332 H412 14,3 þ H317, H361, H400 Fongicides Miovit Soufre 80 % WG III Pas déterminé H302, H315 þ H320, H355 11,4 Ridomil Métalaxyl 4 % þ Mancozebe 64 % II et U Non autorisé H302, H318, H319 H332 H412 22,0 þ H317, H361, H400 Thiop Soufre 80 % WG III Pas déterminé H302, H315 þ H320, H355 2,0 Africyper Cyperméthrine 5 % II Autorisé H301, H315, H317, H332, H335, 6,2 H373, H400, H410 Cyper Star Cyperméthrine 25 g/L II Autorisé H301, H315, H317, H332, H335, 3,9 H373, H400, H410 Dudu Abamectine 20 g/L þ Acétamipride 3 %* Ib et II Autorisé H300 H302, H330, H360, H372 H410 7,0 Insecticides Guarantee Malathion 2 % III Autorisé H302, H317, H410 1,4 Lava Dichlorvos 77 % EC Ib Non autorisé H300, H330, H310, H317, H400 2,9 Rocket Profénofos 40 % II Non autorisé H302, H312, H332, H335 24,4 Supa dudu Abamectin 1,8 % EC Ib Autorisé H300, H330, H360, H372 9,8 Thiodan Endosulfan 400 g/L II Non autorisé H300 þ H310 þ H330, H400 0,8 Page 5 de 12 * Le métalaxyl est un fongicide autorisé au sein de l’Union européenne, l’acétamipride est sur la liste de surveillance. Abréviations : EC : concentrés émulsifiables ; WP : poudre mouillable ; WG : granulés mouillables. Classe Ib : très dangereux ; Classe II : modérément dangereux ; Classe III : légèrement dangereux ; U : non connu comme présentant un danger aigu dans les bonnes conditions d’utilisation. H300 : fatal en cas d’ingestion ; H301 : toxique en cas d’ingestion ; H302 : nocif en cas d’ingestion ; H310 : fatal en cas de contact avec la peau ; H312 : nocif par contact cutané ; H315 : peut causer une irritation de la peau ; H317 : peut causer des réactions sur la peau ; H318 : peut endommager les yeux ; H319 : peut causer une grave irritation des yeux ; H320 : peut causer une irritation des yeux ; H330 : fatal en cas d’inhalation ; H332 : nocif par inhalation ; H335 : peut irriter les voies respiratoires ; H360 : peut affecter la fertilité ou la grossesse ; H372 : peut détruire le système nerveux central ; H373 : risque présumé d’effets graves pour les organes affectés ; H400 : très toxique pour la vie aquatique ; H410 : très toxique pour la vie aquatique avec effets à A. Mushagalusa Balasha et al. : Cah. Agric. 2023, 32, 5 long terme.
A. Mushagalusa Balasha et al. : Cah. Agric. 2023, 32, 5 Fig. 2. Résultats de l’analyse de correspondance multiple sur les déterminants du choix des pesticides. Fig. 2. Results from the multiple correspondence analysis on pesticides choice determinants among farmers. en une seule exposition. Le profénofos, qui est parmi les issues de l’analyse des correspondances multiples est présenté matières actives les plus utilisées, est aussi nocif par inhalation sur la figure 3. (H332) alors que la cyperméthrine peut irriter les voies respiratoires (H335) et endommager gravement les yeux et la 3.4 Pratiques paysannes d’utilisation des pesticides peau qui sont des organes très exposés pendant les traitements phytosanitaires. et gestion des risques par les agriculteurs Les résultats du tableau 3 portent sur les coûts d’acquisition 3.3 Déterminants du choix des pesticides des pesticides, leur mode d’utilisation et la gestion des risques. Les résultats montrent que 71 % des agriculteurs dépensent Les résultats de l’analyse des correspondances multiples à entre 20 000 et 40 000 francs congolais (soit 10 à 20 US$) pour la figure 2 mettent en évidence deux axes (F1 : 36,49 % et F2 : l’achat des pesticides pendant une saison culturale. L’analyse 18,37 %). Le total de ces deux axes explique à 54,87 % la des coûts par production a montré que 43 % des agriculteurs variation de la décision du choix des pesticides chez les qui considèrent la tomate comme leur culture principale, agriculteurs. Il en ressort que les huit modalités de trois dépensent entre 42 000 et 80 000 francs congolais pour l’achat variables (choix de pesticides, fongicides utilisés et insecti- des pesticides, spécialement des fongicides. cides utilisés) ont contribué à la formation de l’axe 1 tandis que La plupart des agriculteurs (43 %) combinent généralement sept modalités ont contribuées à la formation d’axe 2. Les deux ou plusieurs pesticides pour protéger les cultures ; 40 % modalités prises en considération se sont comportées de la utilisent uniquement des fongicides. À l’instar de l’interviewé manière suivante : le mancozèbe 80 % est utilisé pour sa n° 12, nombre de maraîchers déclarent : « la combinaison de disponibilité tandis que l’oxychlorure de cuivre est utilisé pour ces produits renforce l’efficacité du traitement. Cela rassure son efficacité. Par ailleurs, la cyperméthrine 5 %, le malathion que divers nuisibles soient atteints et tués en un seul tour de et l’abamectine sont surtout utilisés par les maraîchers pour pulvérisation ». leur efficacité, de même pour l’abamectine 1,8 % EC et le Par ailleurs, il a été noté que les pesticides sont appliqués profénofos 40 %. En général, il a été remarqué que la plupart de à des fréquences différentes selon les préférences de chaque pesticides sont choisis pour leur efficacité perçue par les agriculteur. La majorité des agriculteurs (46 %) appliquent les maraîchers. L’histogramme d’éboulis des valeurs propres pesticides deux fois par semaine, peu importe la présence ou Page 6 de 12
A. Mushagalusa Balasha et al. : Cah. Agric. 2023, 32, 5 Fig. 3. Éboulis des valeurs propres des déterminants de choix des pesticides. Fig. 3. Scree plot of eigenvalues of pesticides choice determinants. pas des bioagresseurs ; d’autres (28 %) les emploient une fois 4 Discussion par semaine. Les principaux moments d’application des produits sont le matin (64 %) et le soir (27 %) ; peu le font 4.1 Faible niveau d’instruction et manque de à midi (9 %). On peut également retenir qu’une grande partie formation sur les pesticides des agriculteurs (60 %) abandonnent les emballages vides au champ (Tab. 3) ; 20 % les incinèrent et 9 % les réutilisent à la Evaluer les connaissances des agriculteurs sur les maison pour la conservation de denrées alimentaires telles que pesticides, leur usage et la perception des risques est important le sel et l’huile (Tab. 3). car cela permet de s’assurer de la santé des maraîchers et des Les résultats montrent aussi que 91 % des agriculteurs consommateurs (Kouakou et al., 2019) et d’identifier les maraîchers ne respectent pas les délais d’attente avant la besoins spécifiques des agriculteurs. Les résultats ont mis en récolte liés aux pesticides utilisés. La majorité des agriculteurs évidence un faible niveau d’instruction et l’absence de (67 %) ne lisent pas les étiquettes des pesticides à cause de leur formation relative à l’utilisation des pesticides. Des constats faible niveau d’instruction. Malgré les recommandations des similaires ont été notés au Burkina Faso par Tarnagda et al. fabricants de ces pesticides sur le port d’équipements de (2017) et au Niger par Hachimou et al. (2018) où il a été retenu protection pendant leur usage, les résultats du tableau 3 que le taux élevé d’analphabétisme chez les agriculteurs montrent que 62 % des applicateurs ne portent pas d’équipe- pourrait être la cause de la mauvaise utilisation des pesticides ments de protection. La moitié des maraîchers interrogés (50 % chimiques. L’analphabétisme limite la compréhension des des cas) ne se lavent pas immédiatement après usage des instructions d’usage des pesticides. Il a été aussi montré que de pesticides chimiques et seuls 17 % se lavent les mains au nombreux maraîchers ne lisent pas les instructions d’usage savon ; seuls 9 % des agriculteurs partent se laver tout le corps figurant sur les étiquettes des emballages des pesticides parce à la maison, souvent après une très longue distance de marche. que ces dernières sont écrites généralement en anglais, une Pour ce qui est de la gestion de la bouillie restante, 61 % langue que les agriculteurs ne comprennent pas. Les barrières effectuent un deuxième passage, 8 % la déversent dans les linguistiques ont été identifiées comme importantes par champs, 7 % l’enfouissent dans le sol et une minorité (4 %) la plusieurs chercheurs, car les instructions en langues étrangères conserve pour une prochaine application. ne permettent pas aux petits agriculteurs d’utiliser correcte- ment les produits phytosanitaires (Bayendi et al., 2017 ; Son et al., 2017 ; Balasha et Kesonga, 2019). Les barrières 3.5 Usage des pesticides et risques pour la santé linguistiques et le faible niveau d’éducation sont cités parmi les facteurs qui limitent la compréhension des consignes de La figure 4 indique les problèmes de santé ressentis par les sécurité, même dans les pays développés ; par exemple aux agriculteurs suite à l’usage des pesticides. Les principales États-Unis, où la plupart de la main-d’œuvre agricole est affections rapportées sont l’irritation de la peau (62 %), les constituée d’immigrants ayant des connaissances limitées en problèmes respiratoires et la forte sudation (16 %), les maux de anglais (Arcury et al., 2010). Cependant, il y a une possibilité tête et les toux persistantes (16 %), ainsi que l’irritation et le d’alphabétiser et de former les agriculteurs en langues locales picotement des yeux (6 %). pour assurer une meilleure utilisation des pesticides, par Page 7 de 12
A. Mushagalusa Balasha et al. : Cah. Agric. 2023, 32, 5 Tableau 3. Pratiques d’utilisation des pesticides, protection et gestion des risques des pesticides. Table 3. Pesticides use practices, safety and risk management among farmers on Idjwi Island. Paramètres Modalités Effectif (n = 90) % Pourriture des fruits 64 70 Problèmes observés Nécrose des feuilles 11 12 Trous sur les feuilles 15 17 < 20 000 19 21 Coût d’acquisition (CDF) par saison* 20 000–40 000 64 71 41 000–80 000 7 8 Fongicides seuls 39 40 Type de pesticides Fongicides et Insecticides 36 43 Insecticides seuls 15 17 1 fois par semaine 25 28 Fréquence d’application 2 fois par semaine 41 45 3 fois par semaine 24 27 Matin 58 64 Moment d’application Midi 8 9 Soir 24 27 Enfouissement dans le sol 10 11 Brûlage/Incinération 18 20 Gestion des emballages Abandon dans nature (champ) 54 60 Utilisation domestique 8 9 Non 82 91 Respect de délai d’attente Oui 8 9 Non 60 67 Lecture des étiquettes avant usage Oui 30 33 Non 56 62 Port d’une tenue de protection Oui 34 38 Longs habits 19 21 Bottes 21 23 Tenue portée lors de la pulvérisation Cache-nez 20 22 Gants 16 18 Lunettes 14 16 Laver les mains avec du savon 15 17 Laver les mains sans savon 22 24 Comportement des agriculteurs après usage Laver tout le corps 8 9 Ne se lave pas 45 50 Double passage 55 61 Traitements des alentours 13 14 Déversement dans le champ 7 8 Gestion des restes de produits Enfouissement dans le sol 6 7 Conservation pour usage ultérieur 4 4 Utilisation dans une autre parcelle 5 6 * CDF : Francs Congolais ; Taux de change : 1 US$ = 2000 CDF au moment de l’enquête. exemple par des champs-écoles et des discussions en groupe. d’utiliser les pictogrammes phytosanitaires et les expliquer Celles-ci éveillent la prise de conscience du danger des pour renforcer la compréhension des consignes de sécurité par pesticides, ce qui amène les agriculteurs qui partagent leurs les agriculteurs. expériences à améliorer leurs pratiques phytosanitaires et agricoles, à explorer et à tester des méthodes alternatives de 4.2 Typologie des pesticides, choix et pratiques gestion des bioagresseurs (Garming et Herman, 2007 ; aggravant les risques d’exposition Damalas et Koutroubas, 2017 ; Henk et al., 2020). Par ailleurs, Tourneux (1994) et Schiffers (2011) recommandent aux La majorité des pesticides recensés à Idjwi appartiennent à formateurs et aux agronomes qui encadrent les agriculteurs la classe II (pesticides modérément dangereux) selon les Page 8 de 12
A. Mushagalusa Balasha et al. : Cah. Agric. 2023, 32, 5 Fig. 4. Problèmes de santé rapportés par les hommes et les femmes interrogés. Fig. 4. Self-report of health issues related to pesticide use by men and women farmers. normes de l’OMS, à l’exception notable du dichlorvos 77 % est le manque d’argent pour s’en procurer. La même raison a EC et de l’abamectine qui appartiennent à la classe Ib été avancée par les agriculteurs urbains du Togo et de (pesticides très dangereux). L’inhalation est la principale voie Lubumbashi où respectivement Kanda et al. (2013) et d’exposition pour les utilisateurs du dichlorvos, qui est très Mushagalusa et al. (2019) ont également évoqué la négligence volatile (Okoroiwu et Iwara, 2018). Malgré sa présence des pratiques d’hygiène, c’est-à-dire se laver le corps, ou au significative sur le marché congolais et son usage en cultures moins les mains après le traitement. Cette négligence, associée maraîchères (Balasha et Nkulu, 2020), le dichlorvos est déjà à des imprudences observées, telles que manger et fumer bani au sein de l’Union européenne (European Parliamentary pendant le traitement, accroît significativement les risques Research Service, 2018) et au Sahel en Afrique de l’Ouest d’intoxication, de brûlures et dans les cas extrêmes, peut (Rabiou, 2019). Les agriculteurs qui en ont utilisé à conduire à la mort (Schiffers, 2011 ; Zikankuba et al., 2019 ; Lubumbashi contre les ravageurs du chou tels que les chenilles Lekei et al., 2020). Ce qui est le plus inquiétant à Idjwi, c’est la de Plutella xylostella et d’Agrotis Ipsilon n’ont pas obtenu de présence de jeunes enfants (moins de 6 ans) sur les champs en résultats satisfaisants (Balasha et Kesonga, 2019). Même si les cours de traitement. Ces enfants emmenés aux champs sont pesticides ont l’avantage d’agir sur un large spectre de aussi exposés aux pesticides, tout autant que leurs parents. nuisibles, les maraîchers ont déclaré pulvériser jusqu’à trois Une interviewée rencontrée à Mugote a déclaré : « je viens fois par semaine. Cela montre les limites des pesticides liées au avec le bébé aux champs car ses frères qui le gardent sont à développement de la résistance des ravageurs et à la l’école. Je sais que le pesticide est un poison mais, quand je destruction de la faune auxilliaire. pulvérise, je place le bébé là au coin (bord du champ). Je ne Nos résultats indiquent que l’un des critères de choix des sais pas s’il est affecté par les pesticides mais, peut être oui, pesticides utilisés était leur disponibilité sur le marché. Cela est car l’odeur de ce produit se répand partout ». en accord avec de nombreuses études qui montrent que le choix des produits phytosanitaires est souvent influencé par les 4.3 Perception des risques sanitaires et revendeurs d’intrants agricoles (Okolle et al., 2016 ; Sun et al., environnementaux liés à l’usage des pesticides 2021 ; Mergia et al., 2021). Cependant, la plupart des revendeurs ont aussi une connaissance limitée des pesticides De nombreux agriculteurs ont rapporté des affections et des ravageurs. Certains chercheurs ont même relevé que les dermatologiques ainsi que des maux de tête et des toux conseils et les orientations proposés par ces revendeurs persistantes. Cela pourrait s’expliquer par le caractère irritant d’intrants n’ont pas toujours de fondement technique, ce qui et toxique des produits utilisés et la mauvaise protection des amène les agriculteurs à utiliser les pesticides moins agriculteurs (Damalas et Koutroubas, 2016 ; Lekei et al., correctement (Balasha et Kesonga, 2019 ; Sun et al., 2021). 2020). Ce caractère irritant, nocif et toxique est confirmé par Par exemple, à Idjwi, de nombreux agriculteurs ont déclaré les résultats de l’analyse des phrases de risque de chaque mélanger deux ou trois pesticides sur la base des conseils pesticide (Tab. 2). Les voies d’exposition identifiées sont donnés par les revendeurs de pesticides. La prise en compte des l’ingestion, le contact cutané et l’inhalation. La connaissance matières actives dans le choix phytotsanitaire est une notion de ces voies d’exposition est importante parce que cela peut encore ignorée. Or, la non prise en compte des matières actives, aider les applicateurs des pesticides à protéger correctement les le manque d’information sur le calcul des doses et la pression organes les plus exposés pendant le traitement (Schiffers, des bioagresseurs poussent les agriculteurs au surdosage dans 2011 ; Gouda et al., 2018). Les problèmes de santé évoqués sur l’espoir d’obtenir plus d’efficacité. la figure 4 ont également été rapportés après une exposition aux Les résultats ont aussi montré que la plupart des pesticides chimiques dans d’autres milieux agricoles (Lekei agriculteurs interrogés ne se protégeaient pas pendant et al., 2014 ; Son et al., 2017). Pour sensiblement réduire les l’application des pesticides. La raison principale donnée par risques d’exposition aux pesticides, Schiffers (2011) et Gouda les interviewés pour le non-port des équipements de protection et al. (2018) recommandent le port obligatoire d’équipements Page 9 de 12
A. Mushagalusa Balasha et al. : Cah. Agric. 2023, 32, 5 de protection individuelle (gants, combinaisons, bottes, cache- et de leurs expériences partagées entre agriculteurs pour nez, lunette de protection). Les résultats ont également mis en réaliser des mélanges risqués de plusieurs pesticides, évidence une mauvaise gestion des déchets ainsi que des restes conduisant au surdosage. Malgré le danger que ces pesticides de bouillie après traitement. Par exemple, plus de 11 % des présentent pour la santé humaine, de nombreux maraîchers ne agriculteurs interrogés enfouissent les emballages des produits se protègent pas, ne respectent pas les délais de sécurité et et d’autres les abandonnent sur les exploitations. Ces n’observent pas de pratiques d’hygiène (changer ses vêtements emballages sont non biodégradables et augmentent les risques et se laver après traitement). Cela entraîne une forte exposition de contamination du sol et des eaux (Schiffers, 2011). Par aux pesticides pour les agriculteurs. À l’utilisation des ailleurs, 9 % des agriculteurs interrogés réutilisent ces pesticides, les maraîchers présentent des problèmes de santé emballages pour la conservation de produits alimentaires tels tels que l’irritation de la peau, des maux de tête et une forte que le sel et l’huile. La même observation a été faite au Kenya sudation. Ces symptômes confirment le caractère nocif des et en Ouganda, où la mauvaise gestion des déchets et la pesticides utilisés. De plus, les déchets de pesticides qui sont réutilisation des emballages vides à des fins domestiques abandonnés sur les exploitations ainsi que la mauvaise gestion constituent un problème de santé publique jusque-là négligé de la bouillie restante après traitement contribuent à polluer par les autorités (Loha et al., 2018). Mal nettoyés, ces l’environnement. emballages peuvent contenir des traces de pesticides suscepti- Pour favoriser une gestion rationnelle et un usage sécurisé bles de conduire à l’intoxication et entraîner la mort, comme le des pesticides et limiter leurs impacts sur la santé humaine et confirment de nombreux cas en Tanzanie et en Éthiopie sur l’environnement, les recommandations suivantes sont (Chelkeba et al., 2018 ; Lekei et al., 2020). Pour ce qui est de la proposées pour l’île d’Idjwi : gestion des restes de bouillie des pesticides, 61 % des – Retirer du marché les pesticides non autorisés par l’autorité agriculteurs finissent ces restes par un second passage sur la compétente ; parcelle déjà traitée. Une pratique similaire a été observée en – Organiser deux fois par an une formation intégrée (Police Grèce, où 55 % des agriculteurs ont admis qu’ils pulvérisaient des frontières, Office national de la protection des le reste de la bouillie sur les cultures déjà traitées (Damalas végétaux, Office congolais de contrôle, revendeurs et al., 2008). Le double passage est une recommandation des d’intrants agricoles) pour sensibiliser sur le danger que bonnes pratiques agricoles pour détruire l’excès de bouillie et présentent les pesticides non autorisés sur la santé publique éliminer les fonds de cuve, notamment lors du rinçage et du et l’environnement ; nettoyage du pulvérisateur (FAO, 2001). Cependant, les – Vulgariser la loi phytosanitaire en langues locales et rendre producteurs calculent mal le volume de bouillie nécessaire, ce régulièrement publique la liste des pesticides non autorisés qui conduit à des restes importants. Cela peut conduire à une en RDC ; phyto-toxicité et exposer les consommateurs suite à l’accu- – Organiser des formations sous forme de champs-écoles mulation de beaucoup de résidus dans les récoltes (Schiffers, pour renforcer la connaissance des agriculteurs sur les 2011 ; Jon et al., 2021). Sur l’île d’Idjwi, où l’agriculture est ennemis des cultures, les pesticides, et l’importance des souvent l’unique source de nourriture et d’argent, de nombreux équipements de protection dans la réduction de risque ; producteurs ne respectent pas le délai d’attente avant la récolte – Explorer des méthodes alternatives, orientées vers la lutte et cela les amène à mettre sur le marché des produits impropres intégrée (FAO, 2012 ; Son et al., 2017), ce qui nécessitera à la consommation, c’est-à-dire contenant potentiellement des une implication conjointe de la recherche et des résidus qui dépassent le seuil acceptable pour la sécurité agriculteurs. alimentaire. Pour réduire ces résidus et fournir aux consom- mateurs des produits de qualité, le respect des délais d’attente avant la récolte et la lutte intégrée sont vivement recommandés Remerciements. Nous remercions les relecteurs anonymes (FAO, 2012 ; Santé Canada, 2022). pour leurs observations pertinentes et leurs commentaires constructifs qui nous ont permis d’améliorer la qualité de cet 5 Conclusion article. L’intensification des productions maraîchères locales pour Références répondre à la demande alimentaire croissante dans la région du Nord et Sud-Kivu est caractérisée par l’usage mal maîtrisé des Arcury T, Estrada J, Quandt S. 2010. Overcoming language and pesticides. La situation est inquiétante car les revendeurs de literacy barriers in safety and health training of agricultural pesticides, qui ont des connaissances très limitées des workers. 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