Vertus du dialogue sur les politiques - Adea Hub
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LETTRE D’INFORMATION DE L’ADEA VOLUME 13, NUMERO 4 OCTOBRE-DECEMBRE 2001 Vertus du dialogue sur les politiques Les biennales de l’ADEA sont avant tout un lieu d’approfondissement du dialogue sur les politiques. Mamadou Ndoye, Secrétaire exécutif de l’ADEA et ancien ministre de l’éducation au Sénégal fait le point sur leur raison d’être et sur les enseignements tirés à Arusha. A l’issue de la biennale d’Arusha, cité, aux énormes défis posés au dévelop- approche professionnelle et développe- un ministre faisait cette ré- pement de l’éducation en Afrique. mentale excluant tout monologue collec- flexion : « Que vais-je chercher tif, toute langue de bois. Ouvertes et cri- ailleurs ? Mes attentes ont été comblées Revitaliser et renouveler tiques, les discussions engagent à une ré- par les échanges que nous avons eus ici ». les politiques flexion collégiale où l’introspection et Loin d’être pour l’ADEA une simple la découverte de l’autre, le donner et le source de fierté, ce témoignage souligne C’est bien à ce besoin fondamental de recevoir sur les bonnes pratiques, condui- un besoin et une réponse. Besoin d’un dia- renouvellement et de revitalisation des sent à mieux se connaître, à bâtir des com- logue qui enrichisse la vision et les politi- politiques et stratégies éducatives que préhensions communes et à établir des ques. Besoin de « confrontations » qui ap- l’ADEA apporte une réponse. Unique fo- convergences sur les perspectives. Tou- profondissent la compréhension des pro- rum de ministres africains, d’agences et tes choses favorables à de nouveaux par- cessus, conditions et facteurs des de professionnels de l’éducation, la bien- tenariats, dynamiques et efficaces. changements impliqués dans les réformes. nale offre à cet égard un espace incitatif Ce processus d’apprentissage, social Besoin d’échanges sur les modèles straté- et un moment fort de rencontres et et constructiviste, a enregistré des avan- giques et les instruments de mise en œuvre d’échanges entre le leadership politique cées remarquables à Arusha. La biennale des transformations. Besoin, en somme, de africain et la coopération internationale, de Johannesburg (1999) avait permis capitaliser et de partager expériences et entre la décision politique et l’expertise d’identifier et d’analyser des expériences connaissances africaines et internationa- scientifique et technique. L’interaction prometteuses montrant l’Afrique qui réus- les afin de faire face, avec plus d’effica- féconde s’y déroule au travers d’une sit. Celle d’Arusha (2001) a approfondi l’approche « praxique » adoptée en fo- Jeunes écolières en Tanzanie. calisant la réflexion et l’action qu’elle Photographe : JHU/CCP implique sur des défis majeurs posés pré- cisément à ces expériences : pérennisa- tion, généralisation, lutte contre le SIDA. Les articles de ce bulletin présentent une analyse certes condensée, mais suf- fisamment instructive, aussi bien des ■ Compte rendu de la biennale d’Arusha ■ Expériences d’Amérique du Sud et d’Asie ■ Lancement du Prix africain du journalisme d’éducation ■ Revoir la distribution des manuels scolaires en Afrique
approches et pratiques efficaces qui ont échelle, est un processus complexe et dif- la biennale (voir l’article sur l’expérience fait l’objet de communications, que des ficile à achever. Les réussites sont rares et de la Tanzanie en page 9). réflexions menées au cours de la biennale. les obstacles nombreux : reproductibilité Un tel engagement a été particulière- On ne saurait rendre compte ici de toute la ardue à cause des contraintes de coûts ou ment sollicité dans la lutte contre le SIDA. richesse et de toute la fécondité du dialo- des différences de contexte, absence de En s’appuyant sur les « pratiques effica- gue : éclairages conceptuels sur les modes demande locale, capacités inadéquates de ces » identifiées, les discussions ont sur- et types de politiques de développement gestion et de conduite de l’innovation, tout révélé l’urgence de l’action (voir l’ar- de l’innovation, identification des facteurs résistances et oppositions corporatistes ou ticle en page 7). Dans le secteur de l’édu- et des risques déterminant le sort de l’in- sociales… Plus radicalement, le succès cation, les stratégies porteuses, basées sur novation, stratégies et instruments pour la d’une innovation pilote peut reposer sur des activités intra et extra-curriculaires, en- pérennisation et la généralisation… La la petite taille de l’expérimentation ; dans gagent à la fois les enseignants et les ap- leçon principale, reproduire les conditions ce cas la généralisation réussie ne serait prenants, non seulement en tant que ci- plutôt que le contenu de l’innovation, in- pas de l’ordre du possible. D’où un certain bles de changement du comportement, terpelle. Il postule aussi qu’une fois lan- pessimisme. La biennale a montré qu’il mais aussi de vecteurs de la lutte contre le cée, l’innovation se développe selon une s’agit bien d’un pessimisme de la raison, SIDA. Ces stratégies, associées à l’utilisa- trajectoire imprévisible et que les acteurs qui commande lucidité et réalisme dans tion des médias et à la collaboration avec qui se l’approprient la recréent en fonc- les choix en matière de conception et de les autres secteurs, ont été prônées pour tion de leur espace d’initiative et d’auto- conduite des réformes. Mais il n’interdit ouvrir le champ à des approches systémi- nomie. D’où l’importance des réseaux en- pas « d’aller plus loin, d’aller vers tous », ques, multi-sectorielles et multi-dimen- tre les acteurs pour l’échange et le partage (voir l’article en page 3) une fois les bon- sionnelles, dans le cadre de politiques na- d’expériences dans le processus de déve- nes options prises. tionales globales et cohérentes. loppement de l’innovation qui est aussi A contrario, un leadership déterminé, Enfin, le dialogue a permis de faire un processus d’apprentissage. une allocation conséquente des ressour- l’état des défis posés à la connaissance ces, une stratégie pertinente de communi- dans les domaines visités. Nous n’en sa- Leçons apprises et tâches futures cation, une responsabilisation et un ren- vons pas assez sur la généralisation des forcement des acteurs locaux, représentent, réformes parce qu’en Afrique, trop peu Au-delà des connaissances acquises, il me entre autres, des atouts majeurs de succès. d’expériences ont été documentées. Nous semble opportun de souligner deux en- Il s’agit de l’autre face révélée par la bien- n’en savons pas assez sur l’impact du SIDA seignements importants, apparemment nale : l’optimisme de la volonté et de « la sur le système éducatif, car il existe très contradictoires, mais nécessairement liés, flamme » qui mobilise, motive et crée le peu de données fiables sur le sujet. Ce pour tous ceux qui entreprennent des ré- contexte favorable pour réussir l’action. A sont autant de tâches analytiques à entre- formes dans le secteur de l’éducation. cet égard, l’engagement de Julius K. prendre et l’ADEA se doit d’y contribuer. Le passage d’une innovation (ou Nyerere pour la réforme et la démocratisa- MAMADOU NDOYE d’une réforme) du stade-pilote à plus grande tion de l’éducation a été un symbole pour SECRÉTAIRE EXÉCUTIF DE L’ADEA Dossier : La biennale d’Arusha VIH/SIDA VIH/SIDA et éducation : Leçons de la biennale ................ 7 Vertus du dialogue sur les politiques ............................... 1 Aller plus loin, aller vers tous – pérenniser et généraliser Les GT à Arusha les politiques et pratiques efficaces ................................ 3 Un projet « d’éducamusement » à l’échelle d’une région . 14 Ouverture de la biennale par Ally Mohammed Shein, Pour l’intégration de l’éducation non-formelle ................. 15 vice-président de Tanzanie ........................................... 6 Le Forum des ministres à Arusha .................................. 13 Autres articles Lancement du Prix africain du journalisme d’éducation .... 16 Expériences pays Les journalistes à l’école des chiffres ............................. 17 La Tanzanie face aux défis de l’Education Pour Tous ......... 9 Guinée : un programme décentralisé d’amélioration Livres de la qualité .............................................................. 6 Revoir la distribution des livres en Afrique ...................... 18 Leçons venues d’ailleurs : Expériences du Guatemala, Pour une expertise du management des du Salvador, d’Inde et du Bangladesh ......................... 10 personnels enseignants .............................................. 19 Calendrier .................................................... 2 0 2 La lettre d’information de l’ADEA octobre - décembre 2001
Biennale ADEA Aller plus loin, aller vers tous Pérenniser et généraliser les politiques et pratiques efficaces A Arusha, ministres, représentants d’agences de coopération et de développement, ONG, chercheurs et autres professionnels de l’éducation se sont penchés sur une question essentielle dans le cadre des efforts faits par les pays vers la réalisation d’une éducation pour tous : comment pérenniser et généraliser les politiques et pratiques qui se sont avérées efficaces ? Plusieurs axes ont été explorés. C ommencer à petite échelle, éten- que des initiatives venues d’autres dre l’expérience au-delà du ca- régions du monde. En outre, plusieurs ins- dre initial, puis la généraliser à truments permettant de faciliter le pas- l’ensemble du système éducatif. Cette stra- sage à plus grande échelle ont été explo- tégie présente de nombreux avantages, rés, parmi lesquels les réseaux, la com- notamment lorsqu’il s’agit de générali- munication et les approches non ser une réforme éducative d’envergure au formelles. niveau d’un pays. Elle permet de tester et d’évaluer une initiative pilote dans un cadre contrôlé, de limiter les risques au Ce qui importe n’est pas tant cas où elle ne s’avérerait pas viable, et de reproduire le contenu de d’établir un modèle susceptible d’être l’innovation, que de reproduit à plus grande échelle. Pourtant, et malgré la grande richesse reproduire et recréer les d’expériences porteuses qui ont fleuri conditions qui lui ont permis dans les pays africains au cours des vingt de s’épanouir. dernières années, très peu d’entre elles sont parvenues à franchir le cadre et le contexte de leur naissance, à devenir des Différents modes et types projets ou programmes à plus grande d’expansion échelle et à faire l’objet d’une générali- sation durable. Quelles sont les stratégies Le Professeur Samoff a commencé par utilisées pour le passage à plus grande définir le concept d’expansion et par échelle ? Quels sont les facteurs clés de C’est une tradition à L’ADEA d’illustrer le thème de donner un aperçu des différentes straté- succès ? Que faut-il au contraire éviter ? la biennale par une œuvre d’art d’un artiste du gies envisageables pour passer à plus Quels enseignements tirer de l’expérience pays hôte de la conférence. Pour la biennale grande échelle. Deux typologies ont été 2001 c’est une sculpture Makonde de Robert africaine et des autres régions ? Ces ques- Joseph Francis qui a été retenue. « Arbre de vie », présentées, la première s’intéressant au tions, débattues à Arusha, présentent un totem de la fraternité et de la solidarité, elle processus d’expansion ; la deuxième à intérêt particulier pour la majorité des symbolise un élan vers le futur, l’amour de la vie et l’objet de l’expansion. des autres, illustrant ainsi l’esprit de réseau, de La première typologie identifie trois pays africains confrontés à des réformes partenariat et de partage qui anime l’ADEA. importantes de leurs systèmes et à la mise types de passage à plus grande échelle. en place d’une éducation pour tous. La généralisation par expansion (ou re- Aller plus loin, Aller vers tous : pérennisation et de généralisation de ré- production) se fait graduellement. Assi- comment pérenniser les politiques et pra- formes éducatives. Sa présentation a servi milée à un processus d’apprentissage, tiques efficaces pour l’éducation en Afri- de fil conducteur à l’ensemble des inter- cette stratégie est devenue le modèle le que ? – le thème central de la biennale a ventions faites au cours de la conférence. plus couramment retenu pour étendre le été introduit par une présentation des pro- L’expérience de la Tanzanie a posé les champ d’application d’une intervention. fesseurs Joël Samoff et Molapi Sebatane. questions de la durabilité et de la qualité Le processus de généralisation passe par Basé sur un document préparé spéciale- des programmes de scolarisation univer- différentes étapes qui comprennent 1 ment pour la biennale , ce document part selle. Quelques expériences de générali- l’apprentissage de l’efficacité et de l’étude d’expériences africaines de sation en Afrique ont été présentées ainsi l’adaptation de l’initiative aux capacités La lettre d’information de l’ADEA octobre - décembre 2001 3
Biennale ADEA organisationnelles existantes et aux réa- les cas, ce sont les conditions qui ont en Afrique du Sud et l’utilisation de ca- lités locales. conduit à la réussite qui doivent être étu- hiers des charges comme instruments de La généralisation par explosion part diées de près, beaucoup plus que les élé- pilotage de la qualité de l’enseignement d’un modèle de réforme applicable à l’en- ments spécifiques de l’expérience. Pour primaire au Sénégal. semble du pays, sans passer par une phase que l’expansion soit réussie, l’important Deux documentaires filmés ont pré- pilote. Les modifications et les ajuste- n’est pas tant de reproduire le contenu senté des stratégies d’Education Pour ments pour tenir compte des spécificités de l’innovation, que de reproduire et re- Tous mises en place en Amérique latine locales se font généralement a posteriori. créer – avant de procéder à l’expansion et en Asie à travers un voyage d’études Les réformes nationales de grande enver- ou à la généralisation de l’innovation – de ministres africains dans les pays con- gure appuyées par les autorités politiques les conditions qui lui ont permis de cernés (Nueva Escuela Unidad au Guate- au plus haut niveau font partie de ce type s’épanouir. mala, EDUCO au Salvador, BRAC au d’initiatives qui demandent la mobilisa- En outre, dans toutes les expérien- Bangladesh et DPEP en Inde). Les docu- tion de ressources importantes. Plusieurs ces de généralisation réussie, trois fac- mentaires ont suscité un grand intérêt et pays africains ont appliqué cette straté- teurs semblent être essentiels : leur présentation a été un moment fort de gie pour mener des campagnes nationa- • la ferme résolution des acteurs de l’in- la biennale (voir « Leçons venues les d’alphabétisation visant à atteindre novation ; d’ailleurs », page 10). la scolarisation primaire universelle. Les • l’intérêt perçu par tous les acteurs et Les réactions des ministres africains initiatives de lutte contre le SIDA, mises bénéficiaires locaux, ainsi que leur qui ont pu observer et analyser les expé- en œuvre actuellement, indiquent un re- participation active et démocratique riences d’Asie et Amérique latine sont par- gain d’intérêt pour cette approche. – conditions nécessaires à l’appro- ticulièrement intéressantes : tous souli- La généralisation par association priation du projet et à son succès ; gnent que si, en termes de théorie péda- vise à combiner des initiatives distinctes • un financement, un suivi et une éva- gogique les méthodes participatives ne répondant aux besoins d’environnements luation adéquats, permettant de rec- sont pas une nouveauté pour les pédago- spécifiques. On peut ainsi créer des cen- tifier ou d’infléchir le programme mis gues africains, c’était la première fois tres de soutien pédagogique dans un dis- en œuvre en fonction des besoins. qu’ils voyaient ces méthodes appliquées trict et les lier à un programme d’ensei- Le contexte, le moment et les acteurs par des enseignants confiants en eux, bien gnement spécifique dispensé par d’autres seront nécessairement différents et le pro- formés et débordant d’enthousiasme. institutions de formation des enseignants jet d’expansion devra en tenir compte Tous estiment qu’un facteur clé de réus- ou à de nouveaux modes de recrutement avant d’être mis en œuvre. En outre, on site réside dans la formation continue or- afin de réaliser une réforme plus générale risque fortement de ne pas être en mesure ganisée au niveau local et dans le sou- de la formation des enseignants. de reproduire les conditions de soutien tien pédagogique efficace donné aux en- Une deuxième typologie part de qui existaient dans l’expérience pilote : seignants sur le terrain. l’étude de l’objet de la généralisation. La soit du fait des coûts insoutenables in- généralisation peut porter sur la structure, duits par la généralisation, soit en dépas- Intégrer l’éducation les programmes, la stratégie ou la base sant la capacité de gestion et de finance- non-formelle financière d’une organisation. Une or- ment des administrations (locales et/ou ganisation peut s’accroître, en termes de centrales), soit en mesurant mal les capa- Au cours des trente dernières années, se taille ou de composantes (expansion cités de nuisance ou de résistance des sont développés en Afrique des systèmes quantitative) ; augmenter le nombre ou parties prenantes (bureaucratie, conser- d’éducation parallèles au système étati- le type d’activités (expansion fonction- vatisme, ou encore intérêts des uns et des que, qu’on a nommés « non-formels » ou nelle) ; changer de stratégie (expansion autres mis en péril). « informels », selon les temps, les lieux, politique) ; ou encore renforcer sa base et les modes. Souvent ignorés, ces systè- financière et institutionnelle (expansion Expériences d’Afrique mes d’éducation sont pourtant indispen- organisationnelle). Ces catégories ne et d’autres régions sables dans le cadre des efforts faits par s’excluent pas mutuellement et une stra- les pays pour parvenir à offrir une éduca- tégie quantitative peut reposer sur une A la suite de l’exposé des professeurs tion à tous leurs citoyens, dans un con- stratégie efficace d’expansion fonction- Samoff et Sebatane, différents exemples texte où des contraintes particulièrement nelle et organisationnelle. de passage à plus grande échelle ont été lourdes pèsent sur les budgets. présentés ; la mobilisation des ensei- M. Wright, chef du département de l’édu- Risques et facteurs de réussite gnants guinéens grâce à un programme cation au secrétariat du Commonwealth, décentralisé d’amélioration de la qualité s’est fait l’avocat d’une approche globale Le point le plus important qui a été souli- de l’enseignement élémentaire ; la géné- qui se traduirait par l’établissement d’un gné pendant la présentation est que, si ralisation d’un programme de lecture en système intégrant toutes les formes d’édu- diverses stratégies de passage à grande langue maternelle en Zambie ; la mobili- cation existant dans un même pays. échelle ont été développées, dans tous sation de ressources humaines latentes Chaque système pourrait ainsi bénéficier 4 La lettre d’information de l’ADEA octobre - décembre 2001
Biennale ADEA des points forts des autres systèmes sans gagement et le soutien des commu- en gommer pour autant les spécificités. Toutes les connaissances acquises par l’ex- nautés. Les outils de communication peu- Ils et elles périence serviraient à mettre en place un vent être fort divers : réunions et sémi- système intégré, décentralisé, flexible et naires, nouvelles technologies de l’infor- ont dit adapté aux besoins des différentes régions mation et de la communication, médias, et populations concernées, dont le minis- théâtre, etc. Dans tous les cas, il faut se tère serait le chef d’orchestre dynamique. rappeler que la communication a un coût, Des stratégies doivent être élaborées afin (qu’il convient de prévoir et d’assumer Sur l’éducation et la que les ministères africains soient en me- par des budgets adéquats) et qu’elle démocratie... sure d’accueillir, de gérer et de tirer profit exige l’existence de structures organisées de la diversité des approches éducatives. pour élaborer et appliquer des plans et ❝ L’éducation joue un rôle majeur Des exemples d’intégration réussie du stratégies de communication. dans le processus démocratique et la non-formel, au Mexique et en Argentine, bonne gouvernance. ❞ ont été présentés, ainsi que les tentatives Réflexions sur le SIDA Ali Mohammed Shein, faites dans huit pays africains (Burkina vice président de la Tanzanie Faso, Kenya, Mali, Ouganda, Sénégal, La biennale a également présenté une expérience de généralisation d’un pro- Sierra Leone, Zambie, Zimbabwe). Les gramme télévisé de lutte contre le SIDA Sur le processus de difficultés pour faire accepter les écoles non-formelles ont été soulignées. destiné aux jeunes. Conçu en Afrique du généralisation... Sud, Soul City a été étendu à plusieurs pays de la sous région (voir l’article en ❝ Il s’agit de recréer et étendre Développer des systèmes page 7). D’autres séances se sont intéres- les conditions spécifiques qui ont de communication efficaces sées au VIH/SIDA, sous un angle diffé- permis le succès de la réforme La communication comme instrument rent. Les actions menées par les pays pour initiale et qui ont nourri les racines pour faciliter la mise en place de nouvel- lutter contre les effets néfastes du SIDA locales. ❞ les approches éducatives ou le passage à sur les systèmes éducatifs ont été analy- Professeur Joël Samoff, plus grande échelle a également été dis- sés ainsi que la contribution des confé- université de Stanford cutée. Des stratégies de communication rences internationales. sont à développer, tant à l’intérieur qu’à Sur le SIDA... l’extérieur des ministères. Dans les divers Conclusion exemples présentés, on a insisté sur l’im- Les expériences africaines de générali- ❝ L’éducation par les pairs est effi- portance du dialogue, au niveau de la base cace et populaire chez les adolescents. sation bien documentées sont malheu- (entre les différentes parties prenantes), et reusement peu nombreuses et les pays Cette approche pour lutter contre le entre la base et le sommet. La communication peut avoir plu- gagneraient à enrichir leurs bases de con- SIDA doit être conduite en parallèle sieurs objectifs : naissances dans ce domaine. On retien- avec des programmes de communi- • le partage de l’information, afin d’évi- dra cependant des enseignements tirés cation riches en information. ❞ qu’il s’agit avant tout de tenter de recréer Mwalimu Sawaya, Tanzanie ter les interprétations erronées et les des conditions qui ont permis à l’initia- oppositions non-fondées qui peuvent tive de s’épanouir ; de s’assurer de la con- entraver le processus de passage à plus viction et de la participation des acteurs Sur la grande échelle ; et bénéficiaires locaux ; de prévoir un communication... • le dialogue, afin d’augmenter la con- financement et un suivi adéquat ainsi que fiance, l’appropriation et l’engage- des stratégies de communication et de ❝ La communication est essentielle ment de toutes les parties prenantes ; coordination efficaces ; que des réseaux dans le processus de passage à plus • la création de consensus ; • le plaidoyer, afin de créer l’adhésion bien développés contribuent également grande échelle. Les ministères de et le soutien ; à la diffusion d’idées, de compétences et l’éducation doivent mettre en place d’expériences ; que tous ces éléments un cadre global et systémique per- • la mise en réseaux des acteurs pour constituent des leviers pour réussir la gé- discuter des problèmes rencontrés, des mettant une communication effi- néralisation d’initiatives porteuses. ■ solutions apportées et des leçons ap- cace. ❞ prises et renforcer le processus d’im- Professeur Opubor, programme plantation de l’innovation ; Communication pour l’éducation et le 1. « Partir du terrain pour généraliser des développement (COMED) de l’ADEA • la mobilisation sociale, pour faire tentatives de réformes », par J. Samoff et E. M. accepter le changement et susciter l’en- Sebatane en collaboration avec M. Dembélé. La lettre d’information de l’ADEA octobre - décembre 2001 5
Ali Mohammed Shein préside l’ouverture La biennale d’Arusha a été honorée par la présence du vice-président de la Tanzanie, Ali Mohammed Shein. M. Shein a rappelé qu’en Tanzanie l’éducation et la lutte contre la pauvreté étaient des priorités nationales depuis l’indépendance. Il a également rappelé que l’éducation était à la base de la démocratie et de la bonne gouvernance ; que les efforts pour offrir une éducation à tous étaient nécessaires mais qu’il fallait également veiller à la qualité de l’éducation. Il a enfin lancé un appel pour qu’une attention particulière soit donnée à l’éducation des filles et pour que l’éducation des adultes ne soit pas oubliée. A propos des politiques... de qualité… ... Lier les politiques à leurs applications pratiques est … Il faut nous assurer que les efforts pour développer capital... Je salue également l’ADEA lorsqu’elle met l’ac- l’accès à l’éducation ne compromettent pas la qualité cent sur la démocratisation de l’éducation et lorsqu’elle de l’éducation et nous interroger sur les causes des aban- associe le développement quantitatif à l’amélioration dons scolaires. Si nous continuons à dépenser des res- de la qualité. Vous recherchez aussi la pertinence. Ce sources pour augmenter les taux de scolarisation sans sont là de nobles idéaux qui, si nous les atteignons, résoudre le problème des abandons, cela reviendra à ver- donneront à l’Afrique un avantage compétitif dans un ser de l’eau dans une passoire… monde en évolution rapide, caractérisé par la globalisation, et la domination des technologies de l’in- d’éducation des filles… formation... … Les filles sont les premières victimes de l’échec sco- d’éducation en Tanzanie... laire. Nous en connaissons certaines causes, comme les grossesses et les mariages précoces. Mais les parents afri- ...Lorsque nous avons retrouvé notre liberté politique, cains n’ont peut-être pas accordé suffisamment d’im- le gouvernement a déclaré la guerre à l’ignorance, à la portance à l’éducation des filles. La mentalité qui pré- pauvreté et à la maladie. L’éducation est depuis long- vaut encore voudrait que la place de la femme fût dans temps une priorité en Tanzanie. Nous avons quarante la cuisine. Ceci constitue une véritable violation des ans d’expérience de développement, semés de succès et droits humains dans le contexte de l’Education Pour de défis, toujours guidés par les principes philosophi- Tous.… ques du Père de la Nation, Mwalimu Julius Kambarage Nyerere ; une philosophie qui a toujours mis l’accent d’éducation des adultes… sur le bien-être de tous les citoyens, sans aucune discri- mination. Il n’est donc pas étonnant que l’éducation … En Tanzanie, nous avons toujours accordé une grande primaire universelle et l’éducation à l’autonomie aient importance à l’éducation des adultes... cela fait partie été des objectifs majeurs pour nos gouvernements... de notre philosophie qui tient à assurer une éducation L’éducation aujourd’hui est essentielle dans tous les do- aux personnes de tous âges et de toutes conditions. Nous maines, pour une meilleure gestion de notre environne- avons réussi dans les années 1970 à atteindre un taux ment et de notre habitat, pour réduire la pauvreté... d’alphabétisation de 90 %. Mais ce taux est descendu à 71 % en 1991. L’alphabétisation dans le seul but d’al- de démocratie… phabétiser, sans relier le processus d’apprentissage aux préoccupations quotidiennes des apprenants, ou encore ... L’éducation joue un rôle majeur dans le processus l’absence d’une culture de lecture expliquent sans doute démocratique et la bonne gouvernance. Depuis l’indé- en partie cette baisse... Je saisis cette occasion pour lan- pendance, tous nos gouvernements se sont efforcés de cer un appel à tout le continent pour investir dans l’édu- démocratiser l’éducation. Les efforts consentis en fa- cation des adultes... Il n’est jamais trop tard pour ap- veur de l’enseignement primaire universel nous ont per- prendre... mis d’atteindre un taux brut de scolarisation impres- sionnant de 98 % en 1997. Mais ce taux n’était plus que EXTRAITS DU DISCOURS D’OUVERTURE PRONONCÉ PAR de 74 % en 2000. ALI MOHAMMED SHEIN, VICE PRÉSIDENT DE LA TANZANIE
VIH/SIDA VIH/SIDA et éducation : leçons de la biennale Les systèmes éducatifs africains n’ont malheureusement pas été épargnés par le VIH/ SIDA. La pandémie affecte aussi bien l’offre que la demande d’éducation ainsi que le fonctionnement général des systèmes éducatifs. A Arusha, la biennale s’est interrogée sur les moyens concrets de lutte contre le VIH/SIDA. Le sujet a été abordé sous trois angles : les réponses apportées jusqu’à présent par les pays ; la contribution des conférences internationales ; une expérience réussie “d’éducamusement” destinée à informer et à provoquer des changements de comportements en Afrique du Sud et dans la sous-région. Identifier les approches démie, soit dans le domaine de la gestion développés. La synthèse a également ré- prometteuses du secteur, afin de garantir le bon déve- vélé que : loppement du secteur fragilisé par le VIH/ • la plupart des pays ont adopté des La biennale a d’abord fait le point sur SIDA, soit pour enrayer la progression du programmes dont l’objectif est de l’initiative « Identifier les réponses effi- VIH/SIDA, grâce à la transmission d’in- faire changer le comportement des caces face au VIH/SIDA » mise en place formations, de savoirs, ou de valeurs. individus ; par l’ADEA. Cette activité a pour objec- La synthèse des études entreprises • le sentiment qu’il faut abattre le mur tif de recenser les approches et les prati- dans 17 pays a ainsi été présentée. Il en du silence, qui existe encore face à la ques prometteuses mises en œuvre par les ressort que tous les ministres africains sont maladie et aux questions de sexua- systèmes éducatifs africains face à la pan- conscients du danger que le VIH/SIDA re- lité en général, commence à être lar- présente pour le gement partagé ; développement • les pays souhaitent également que Afrique du Sud, Durban : Concert Kora All-Africa Awards au profit de la de l’éducation des programmes soient proposés aux lutte contre le SIDA. Jeune fille avec sur son front « Mon ami(e) qui a le SIDA est toujours mon ami(e) ». Photographe : Africa Alive! JHU/CCP dans leurs pays et élèves avant qu’ils ne deviennent de ce que l’édu- sexuellement actifs ; cation constitue • « l’éducation par les pairs » est un le seul « vaccin » moyen efficace de communication trouvé à ce jour sur le VIH/SIDA parmi les élèves ; pour lutter contre • il est urgent de faire participer le plus la pandémie. On grand nombre de partenaires et d’ac- constate égale- teurs dans la lutte contre le SIDA, no- ment que les pays tamment les représentants des grou- se sont surtout in- pes religieux ; téressés à l’inté- • l’impact des campagnes contre le gration du VIH/ SIDA commence à se faire sentir sur SIDA dans les les comportements et les valeurs ; programmes sco- Mais il ressort également de l’étude que : laires plutôt • la plupart des programmes de lutte qu’aux questions contre le SIDA dans le domaine de de gestion et de l’éducation sont récents ; l’évalua- survie du sys- tion de leur impact est donc difficile tème ; seul le à pratiquer, surtout lorsqu’il s’agit Ghana s’est pen- d’analyser des changements de com- ché sur cette der- portements, en particulier de com- nière question et portement sexuel ; a décrit le proces- • il est difficile de faire la part de l’im- sus par lequel des pact des programmes éducatifs en plans stratégi- matière de changements comporte- ques d’interven- mentaux et celle d’autres programmes tion contre le ou d’autres facteurs extérieurs plus VIH/SIDA ont été ou moins bien définis ; La lettre d’information de l’ADEA octobre - décembre 2001 7
VIH/SIDA • la formation des maîtres à l’informa- La diffusion du programme dans les qua- Réflexions des participants tion sur le SIDA est trop parcellaire et tre derniers pays étant récente, les analy- insuffisante pour qu’ils soient prépa- ses de son impact n’ont pas encore été A Arusha, des groupes de discussion ont rés à réussir les changements de com- effectuées. Le processus d’extension à approfondi certaines questions abordées portement souhaités. plus grande échelle n’en demeure pas en plénière. Celui sur le VIH/SIDA s’est moins intéressant pour les ministères de intéressé à deux questions : Comment pro- l’éducation. téger le système afin qu’il continue à don- Soul City - généralisation d’un ner une éducation de qualité au plus grand programme télévisé en Afrique australe L’apport des conférences nombre d’enfants ? Comment répondre internationales aux besoins des bénéficiaires du système ? Un programme multimédia d’éducation A partir des leçons apprises, le groupe a à la santé mis en œuvre en Afrique du Sud, Enfin, la conférence a pris connaissance tenté de résumer les démarches positives : a ensuite été présenté. Conçu pour édu- du résultat de l’analyse d’ensemble de • Le plaidoyer : une forte volonté po- quer les jeunes et les distraire dans le même 17 conférences, réunions ou séminaires litique est indispensable ; il faut par- mouvement, Soul City a atteint ses ob- sur le VIH/SIDA. ler de la pandémie le plus possible ; jectifs : informer les jeunes sur le VIH/ Si le nombre même de ces conféren- mener des actions de mobilisation so- SIDA, ses conséquences et sur les moyens ces prouve que la pandémie mobilise l’at- ciale ; utiliser les moyens légaux qui de lutter contre la propagation de la pan- tention de beaucoup de gens, en particu- peuvent induire des changements de démie ; initier un changement dans le lier en Afrique où 14 (sur 17) ont eu lieu, comportement positifs face à la mala- comportement sexuel pour lutter contre il n’en demeure pas moins assez difficile die et protéger les filles et les femmes, la propagation de la pandémie. Une éva- de voir leur impact réel sur le terrain et premières victimes du virus. luation du programme montre qu’il a at- sur quelles actions concrètes elles ont pu • La prévention : il faut intégrer le VIH/ teint 89% des personnes visées, y com- déboucher. Le présentateur a donc recom- SIDA dans les programmes scolaires pris les analphabètes et les gens vivant mandé que toute conférence : et impliquer les jeunes, les parents et dans les régions les plus reculées du pays. • soit reliée à toutes celles qui l’ont pré- les responsables religieux ; utiliser L’émission a également contribué à retar- cédée et tienne compte de leurs l’éducation par les pairs, moyen effi- der le début de la vie sexuelle et à faire résultats ; cace d’information et de prévention ; adopter des pratiques moins risquées. • se donne des objectifs précis ; inclure l’éducation au VIH/SIDA dans Soul City a eu un grand succès en • veille à ce que les participants soient les programmes d’enseignement su- Afrique du Sud et a été adopté dans des d’un rang assez élevé pour être en périeur et de formation initiale et con- pays voisins : Botswana, Lesotho, Nami- mesure de mettre en œuvre les déci- tinue des maîtres ; utiliser les médias bie et Swaziland. Son adaptation réussie sions prises par la conférence ; pour atteindre le plus grand nombre est attribuée à plusieurs facteurs: • associe les personnes qui connaissent de personnes. • dans chacun des pays, des partenaires vraiment la maladie et celles qui en • La formation des enseignants : les nationaux variés ont été choisis afin souffrent ; enseignants doivent être formés et d’assurer une bonne appropriation du • fasse parvenir les informations et la devenir des agents d’information et programme ; documentation nécessaires aux par- de conseil sur le SIDA. • le projet a été développé en partena- ticipants à l’avance afin qu’ils puis- • Les études sur l’impact de la pandé- riat avec les ministères de l’éducation sent activement jouer leur rôle ; mie sur le système : des études sont et de la santé des pays ; • réduise la durée de la conférence afin nécessaires pour mieux définir et an- • des pré-tests ont été effectués et les de s’assurer du concours des sommités ticiper les besoins, notamment en en- programmes ont été adaptés en tenant en la matière, souvent très occupées ; seignants ; il est conseillé de colla- compte de leurs résultats ; • définisse clairement, à l’issue de la borer avec les autres ministères, celui • des matériels spécifiques à chaque conférence, les recommandations et de la santé en particulier. pays ont été créés, prenant en consi- les actions à mettre en œuvre ; • Les plans d’action multisectoriels et dération langues, coutumes et autres • diffuse les résultats de la conférence nationaux : l’ensemble des partenai- spécificités locales ; largement et de manière ciblée ; res doivent être consultés et impli- • le marketing du programme a été • produise un compte rendu complet et qués pour lutter contre l’extension de adapté à chaque pays même si le nom lisible par des non-spécialistes. la pandémie. sud-africain a été conservé ; Le présentateur a également recom- Enfin, le groupe a recommandé que • une campagne ciblée a utilisé des mandé que soient centralisées toutes les l’ADEA mette en place un mécanisme moyens variés pour distribuer des dé- données, informations et expériences sur pour « suivre » l’évolution de la pandé- pliants sur le programme (dans des sacs la pandémie ainsi que sur les résultats, mie et son impact sur les systèmes éduca- de maïs, stations d’essence, écoles ou recommandations et actions à mettre en tifs ; la création d’un groupe de travail a par l’intermédiaire d’ONG). place. ainsi été suggérée. ■ 8 La lettre d’information de l’ADEA octobre - décembre 2001
Expériences Pays Education Pour Tous : les défis de la Tanzanie Dès son indépendance, en 1961, la Tanzanie s’est donné comme priorité la lutte contre l’ignorance et la pauvreté. Sous la conduite du père de la nation, Julius K. Nyerere, le pays atteignait rapidement, à la fin des années 1970, des taux de scolarisation proches de 100%. Mais ce développement rapide ne s’est malheureusement pas maintenu et le taux de couverture scolaire a chuté dans les années 1980. L ’histoire de l’enseignement de base priment dans une nouvelle Facteurs qui ont contribué en Tanzanie est étroitement liée à vision de l’école : celle-ci à la chute des TBS en Tanzanie : l’histoire politique et économique doit obéir aux lois du mar- du pays. A Arusha, cette évolution a été ché et aux impératifs de • l’approche « du haut vers le bas » dans la exposée par le Professeur Justinian coût-efficacité. Le pays planification et la mise en œuvre de l’éducation ; Galabawa, de l’université de Dar-Es- traverse une crise écono- • la volonté du gouvernement de ne compter que sur Salaam. Le professeur Galabawa a tout mique pendant laquelle il lui-même pour financer l’éducation ; • l’application rigide des plans d’ajustement d’abord rappelé l’engagement en faveur n’est plus capable de sou- structurels ; de l’éducation du père de la nation, tenir le développement de • la contribution financière trop grande demandée l’ancien président J.K. Nyerere, que ses l’éducation. Un plan aux ménages ; compatriotes appelaient affectueusement d’ajustement structurel est • la crise économique prolongée ; « Mwalimu », le maître d’école. Après adopté, qui conduit au gel • un niveau d’endettement croissant ; avoir remarqué que seul un effort collectif du recrutement des maî- • un budget de l’éducation en diminution ; • des taux de croissance démographiques élevés ; national permettrait d’atteindre une tres, à une diminution du • la propagation du VIH/SIDA. scolarisation universelle, le Professeur budget du ministère de Galabawa a présenté les trois phases de l’éducation et à la baisse l’histoire de l’enseignement primaire des taux de scolarisation ; ceux-ci • La période actuelle connaît un ac- universel en Tanzanie : chutent à 83% en 1990. La part de croissement des inscriptions et une • Une période de fort développement l’Etat dans les dépenses d’éducation remontée significative de la partici- vers l’Education Pour Tous au cours passe de 67% avant l’introduction du pation de l’Etat au financement de des années 1960 et 1970, pendant la- plan d’ajustement structurel (PAS) à l’éducation. Aujourd’hui, l’accent est quelle le pays a réussi à atteindre un 43% après le PAS. La contribution des mis sur une plus grande implication taux brut de scolarisation (TBS) pro- parents passe à 57% des dépenses des communautés (en plus de celle des che de 100%. Cette période est asso- d’éducation, niveau insoutenable à ciée au socialisme et à l’autonomie long terme. ➟ Suite page 12 pronés par J.K. Nyerere. L’école fait partie de la transformation socio-éco- nomique recherchée par les autorités et annoncée dans la Déclaration d’Arusha. L’éducation primaire uni- verselle (UPE), est mise en œuvre par le gouvernement, seul fournisseur des services sociaux du pays, à travers des plans de développement centralisés ; l’éducation ne reçoit que très peu d’aide des agences de développement internationales. En 1980, le TBS at- teint 98%. Mais cette réussite cache des faiblesses structurelles internes et externes. • La seconde époque (1980-1990), se caractérise par une forte baisse du taux de couverture scolaire et l’in- Source : « Problématique et évolution de l’enseignement primaire universel (EPU) troduction d’idées libérales, qui s’ex- en Tanzanie » par Justinian Galabawa La lettre d’information de l’ADEA octobre - décembre 2001 9
Leçons venu Expériences du Guatemala, du Sa tion des écoles et la responsabilisation des communautés villageoises qui ont en Vidéo « Nous avons vu... Vidéo charge la gestion administrative, finan- ... des enfants détendus et expressifs apprenant dans la joie, partici- cière et matérielle des écoles ainsi que le Vidéo pant à la gestion de leurs écoles recrutement et la gestion des enseignants. Les programmes du Guatemala et du ... l’auto-apprentissage Salvador ont en commun les caractéristi- ... des programmes d’enseignement flexibles ques suivantes : ... des stagiaires dirigeant leur propre programme de formation • les parties prenantes (parents, enfants, enseignants, gouvernement, média, ... des enseignants dans le rôle de facilitateurs et de guides ... des inspecteurs dans le rôle de conseillers Vidéo secteur privé et partenaires du déve- loppement) partagent la même philo- ... des écoles gérées par les communautés sophie en matière d’éducation ; • le passage à plus grande échelle s’est ... des parents analphabètes impliqués dans la gestion des écoles. » effectué de manière progressive ; Ministres africains et autres participants aux voyages d’étude « Partage et apprentissage » - Inde, Bangladesh, Guatemala et Salvador • le souci constant des opérateurs a été de consolider le projet avant de le faire connaître à l’extérieur ; • les élèves organisent la vie dans A Arusha, deux documentaires fil- Pour les parents il s’agit d’assurer un ave- l’école (notamment la discipline) et més ont présenté les nouvelles nir pour leurs enfants à travers la paix, leur formation s’effectue de façon coo- stratégies d’Education Pour mais aussi le droit à l’éducation. pérative et par auto-apprentissage ; Tous mises en place dans deux pays Au Guatemala, la réforme vise avant • l’école est gérée par les parents et la d’Amérique latine (Guatemala et Salva- tout à améliorer la couverture scolaire et communauté qui sont formés à la ges- dor) et deux pays d’Asie du Sud-est (Ban- la qualité de l’apprentissage au sein des tion de l’école ; gladesh et Inde). Dans tous les cas, il s’agit groupes défavorisés, notamment dans les • les processus démocratiques sont le d’expériences en direction des pauvres zones rurales où les résultats sont nette- socle de la gestion, de l’enseignement mises en œuvre depuis plusieurs années. ment inférieurs à la moyenne nationale. donné et de l’enseignement reçu ; Dans tous les cas également on a com- Deux programmes ont été mis en place : • le gouvernement, ainsi que le secteur mencé petit, mais en gardant présente à la Nueva Escuela Unidad (NEU) et le privé, participent activement au fi- l’esprit la nécessité d’étendre l’expé- PRONADE (Programme national pour le nancement des écoles. rience à d’autres enfants, à d’autres éco- développement de l’éducation). Introduit Dans les deux cas, le processus d’ex- les et à d’autres régions. en 1992, NEU ne cesse d’être amélioré. tension a été facilité par : Les méthodes utilisées mettent l’accent • une forte volonté politique ; Guatemala et Salvador sur l’auto-apprentissage, la progression • un financement adéquat attribué di- de l’apprentissage basée sur les rythmes rectement au niveau local ; Au Guatemala et au Salvador, les réfor- individuels et l’auto-gestion par des gou- • un suivi régulier de l’innovation ; mes s’inscrivent dans le dessein plus large vernements mis en place dans les écoles. • une gestion décentralisée au niveau de faire régner la paix après plusieurs an- Au Salvador, la réforme vise égale- des communautés de base et, dans le nées de guerre civile. Elles ont pour ob- ment à accroître l’accès à l’éducation et à cas du Salvador, une vraie réforme du jectifs d’améliorer l’accès à l’éducation, améliorer la qualité de l’éducation ; il ministère de l’Education pour décen- d’assurer une éducation de qualité, de ré- s’agit notamment de réduire les taux de traliser le pouvoir et les budgets. duire les disparités et d’encourager l’ap- redoublement et d’abandon scolaire dans propriation des écoles par les communau- les zones rurales défavorisées. La réforme Inde et Bangladesh tés. Les réformes résultent d’une volonté est mise en œuvre à travers divers pro- politique des gouvernements doublée grammes dont EDUCO. Ce dernier met Au Bangladesh, l’éducation de base est d’une forte volonté des communautés. l’accent sur la décentralisation de la ges- obligatoire et gratuite depuis 1971. Les vidéos « Partage et Apprentissage » sur les expériences d’Asie et d’Amérique du Sud peuvent être obtenues auprès du Secrétariat de l’ADEA (Voir modalités de commande en page 20). 10 La lettre d’information de l’ADEA octobre - décembre 2001
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