Vertus du dialogue sur les politiques - Adea Hub

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Vertus du dialogue sur les politiques - Adea Hub
LETTRE D’INFORMATION DE L’ADEA                                    VOLUME 13, NUMERO 4                            OCTOBRE-DECEMBRE 2001

                      Vertus du dialogue
                       sur les politiques
    Les biennales de l’ADEA sont avant tout un lieu d’approfondissement du dialogue sur les politiques. Mamadou Ndoye, Secrétaire exécutif
    de l’ADEA et ancien ministre de l’éducation au Sénégal fait le point sur leur raison d’être et sur les enseignements tirés à Arusha.

    A
               l’issue de la biennale d’Arusha,     cité, aux énormes défis posés au dévelop-    approche professionnelle et développe-
              un ministre faisait cette ré-         pement de l’éducation en Afrique.            mentale excluant tout monologue collec-
              flexion : « Que vais-je chercher                                                   tif, toute langue de bois. Ouvertes et cri-
    ailleurs ? Mes attentes ont été comblées        Revitaliser et renouveler                    tiques, les discussions engagent à une ré-
    par les échanges que nous avons eus ici ».      les politiques                               flexion collégiale où l’introspection et
         Loin d’être pour l’ADEA une simple                                                      la découverte de l’autre, le donner et le
    source de fierté, ce témoignage souligne        C’est bien à ce besoin fondamental de        recevoir sur les bonnes pratiques, condui-
    un besoin et une réponse. Besoin d’un dia-      renouvellement et de revitalisation des      sent à mieux se connaître, à bâtir des com-
    logue qui enrichisse la vision et les politi-   politiques et stratégies éducatives que      préhensions communes et à établir des
    ques. Besoin de « confrontations » qui ap-      l’ADEA apporte une réponse. Unique fo-       convergences sur les perspectives. Tou-
    profondissent la compréhension des pro-         rum de ministres africains, d’agences et     tes choses favorables à de nouveaux par-
    cessus, conditions et facteurs des              de professionnels de l’éducation, la bien-   tenariats, dynamiques et efficaces.
    changements impliqués dans les réformes.        nale offre à cet égard un espace incitatif         Ce processus d’apprentissage, social
    Besoin d’échanges sur les modèles straté-       et un moment fort de rencontres et           et constructiviste, a enregistré des avan-
    giques et les instruments de mise en œuvre      d’échanges entre le leadership politique     cées remarquables à Arusha. La biennale
    des transformations. Besoin, en somme, de       africain et la coopération internationale,   de Johannesburg (1999) avait permis
    capitaliser et de partager expériences et       entre la décision politique et l’expertise   d’identifier et d’analyser des expériences
    connaissances africaines et internationa-       scientifique et technique. L’interaction     prometteuses montrant l’Afrique qui réus-
    les afin de faire face, avec plus d’effica-     féconde s’y déroule au travers d’une         sit. Celle d’Arusha (2001) a approfondi
                                                                                                 l’approche « praxique » adoptée en fo-
                                                               Jeunes écolières en Tanzanie.     calisant la réflexion et l’action qu’elle
                                                               Photographe : JHU/CCP             implique sur des défis majeurs posés pré-
                                                                                                 cisément à ces expériences : pérennisa-
                                                                                                 tion, généralisation, lutte contre le SIDA.
                                                                                                       Les articles de ce bulletin présentent
                                                                                                 une analyse certes condensée, mais suf-
                                                                                                 fisamment instructive, aussi bien des

                                                                              ■ Compte rendu de la biennale d’Arusha
                                                                              ■ Expériences d’Amérique du Sud
                                                                                  et d’Asie
                                                                              ■ Lancement du Prix africain
                                                                                  du journalisme d’éducation
                                                                              ■ Revoir la distribution
                                                                                  des manuels scolaires en Afrique
Vertus du dialogue sur les politiques - Adea Hub
approches et pratiques efficaces qui ont              échelle, est un processus complexe et dif-         la biennale (voir l’article sur l’expérience
fait l’objet de communications, que des               ficile à achever. Les réussites sont rares et      de la Tanzanie en page 9).
réflexions menées au cours de la biennale.            les obstacles nombreux : reproductibilité                Un tel engagement a été particulière-
On ne saurait rendre compte ici de toute la           ardue à cause des contraintes de coûts ou          ment sollicité dans la lutte contre le SIDA.
richesse et de toute la fécondité du dialo-           des différences de contexte, absence de            En s’appuyant sur les « pratiques effica-
gue : éclairages conceptuels sur les modes            demande locale, capacités inadéquates de           ces » identifiées, les discussions ont sur-
et types de politiques de développement               gestion et de conduite de l’innovation,            tout révélé l’urgence de l’action (voir l’ar-
de l’innovation, identification des facteurs          résistances et oppositions corporatistes ou        ticle en page 7). Dans le secteur de l’édu-
et des risques déterminant le sort de l’in-           sociales… Plus radicalement, le succès             cation, les stratégies porteuses, basées sur
novation, stratégies et instruments pour la           d’une innovation pilote peut reposer sur           des activités intra et extra-curriculaires, en-
pérennisation et la généralisation… La                la petite taille de l’expérimentation ; dans       gagent à la fois les enseignants et les ap-
leçon principale, reproduire les conditions           ce cas la généralisation réussie ne serait         prenants, non seulement en tant que ci-
plutôt que le contenu de l’innovation, in-            pas de l’ordre du possible. D’où un certain        bles de changement du comportement,
terpelle. Il postule aussi qu’une fois lan-           pessimisme. La biennale a montré qu’il             mais aussi de vecteurs de la lutte contre le
cée, l’innovation se développe selon une              s’agit bien d’un pessimisme de la raison,          SIDA. Ces stratégies, associées à l’utilisa-
trajectoire imprévisible et que les acteurs           qui commande lucidité et réalisme dans             tion des médias et à la collaboration avec
qui se l’approprient la recréent en fonc-             les choix en matière de conception et de           les autres secteurs, ont été prônées pour
tion de leur espace d’initiative et d’auto-           conduite des réformes. Mais il n’interdit          ouvrir le champ à des approches systémi-
nomie. D’où l’importance des réseaux en-              pas « d’aller plus loin, d’aller vers tous »,      ques, multi-sectorielles et multi-dimen-
tre les acteurs pour l’échange et le partage          (voir l’article en page 3) une fois les bon-       sionnelles, dans le cadre de politiques na-
d’expériences dans le processus de déve-              nes options prises.                                tionales globales et cohérentes.
loppement de l’innovation qui est aussi                     A contrario, un leadership déterminé,              Enfin, le dialogue a permis de faire
un processus d’apprentissage.                         une allocation conséquente des ressour-            l’état des défis posés à la connaissance
                                                      ces, une stratégie pertinente de communi-          dans les domaines visités. Nous n’en sa-
Leçons apprises et tâches futures                     cation, une responsabilisation et un ren-          vons pas assez sur la généralisation des
                                                      forcement des acteurs locaux, représentent,        réformes parce qu’en Afrique, trop peu
Au-delà des connaissances acquises, il me             entre autres, des atouts majeurs de succès.        d’expériences ont été documentées. Nous
semble opportun de souligner deux en-                 Il s’agit de l’autre face révélée par la bien-     n’en savons pas assez sur l’impact du SIDA
seignements importants, apparemment                   nale : l’optimisme de la volonté et de « la        sur le système éducatif, car il existe très
contradictoires, mais nécessairement liés,            flamme » qui mobilise, motive et crée le           peu de données fiables sur le sujet. Ce
pour tous ceux qui entreprennent des ré-              contexte favorable pour réussir l’action. A        sont autant de tâches analytiques à entre-
formes dans le secteur de l’éducation.                cet égard, l’engagement de Julius K.               prendre et l’ADEA se doit d’y contribuer.
    Le passage d’une innovation (ou                   Nyerere pour la réforme et la démocratisa-                                   MAMADOU NDOYE
d’une réforme) du stade-pilote à plus grande          tion de l’éducation a été un symbole pour                        SECRÉTAIRE EXÉCUTIF DE L’ADEA

Dossier : La biennale d’Arusha                                                       VIH/SIDA
                                                                                 VIH/SIDA et éducation : Leçons de la biennale ................ 7
Vertus du dialogue sur les politiques ............................... 1
Aller plus loin, aller vers tous – pérenniser et généraliser                         Les GT à Arusha
les politiques et pratiques efficaces ................................ 3         Un projet « d’éducamusement » à l’échelle d’une région . 14
Ouverture de la biennale par Ally Mohammed Shein,                                Pour l’intégration de l’éducation non-formelle ................. 15
vice-président de Tanzanie ........................................... 6
Le Forum des ministres à Arusha .................................. 13                Autres articles
                                                                                 Lancement du Prix africain du journalisme d’éducation .... 16
    Expériences pays
                                                                                 Les journalistes à l’école des chiffres ............................. 17
La Tanzanie face aux défis de l’Education Pour Tous ......... 9
Guinée : un programme décentralisé d’amélioration                                    Livres
de la qualité .............................................................. 6   Revoir la distribution des livres en Afrique ...................... 18
Leçons venues d’ailleurs : Expériences du Guatemala,                             Pour une expertise du management des
du Salvador, d’Inde et du Bangladesh ......................... 10                personnels enseignants .............................................. 19
                                                                                 Calendrier .................................................... 2 0

2                                                            La lettre d’information de l’ADEA                        octobre - décembre 2001
Biennale ADEA

                            Aller plus loin,
                            aller vers tous
   Pérenniser et généraliser les politiques et pratiques efficaces
A Arusha, ministres, représentants d’agences de coopération et de développement, ONG, chercheurs et autres professionnels de l’éducation
se sont penchés sur une question essentielle dans le cadre des efforts faits par les pays vers la réalisation d’une éducation pour tous :
comment pérenniser et généraliser les politiques et pratiques qui se sont avérées efficaces ? Plusieurs axes ont été explorés.

C
         ommencer à petite échelle, éten-                                                              que des initiatives venues d’autres
         dre l’expérience au-delà du ca-                                                               régions du monde. En outre, plusieurs ins-
         dre initial, puis la généraliser à                                                            truments permettant de faciliter le pas-
l’ensemble du système éducatif. Cette stra-                                                            sage à plus grande échelle ont été explo-
tégie présente de nombreux avantages,                                                                  rés, parmi lesquels les réseaux, la com-
notamment lorsqu’il s’agit de générali-                                                                munication et les approches non
ser une réforme éducative d’envergure au                                                               formelles.
niveau d’un pays. Elle permet de tester et
d’évaluer une initiative pilote dans un
cadre contrôlé, de limiter les risques au                                                              Ce qui importe n’est pas tant
cas où elle ne s’avérerait pas viable, et                                                              de reproduire le contenu de
d’établir un modèle susceptible d’être                                                                     l’innovation, que de
reproduit à plus grande échelle.
      Pourtant, et malgré la grande richesse                                                             reproduire et recréer les
d’expériences porteuses qui ont fleuri                                                                 conditions qui lui ont permis
dans les pays africains au cours des vingt                                                                     de s’épanouir.
dernières années, très peu d’entre elles
sont parvenues à franchir le cadre et le
contexte de leur naissance, à devenir des
                                                                                                       Différents modes et types
projets ou programmes à plus grande
                                                                                                       d’expansion
échelle et à faire l’objet d’une générali-
sation durable. Quelles sont les stratégies                                                            Le Professeur Samoff a commencé par
utilisées pour le passage à plus grande                                                                définir le concept d’expansion et par
échelle ? Quels sont les facteurs clés de      C’est une tradition à L’ADEA d’illustrer le thème de    donner un aperçu des différentes straté-
succès ? Que faut-il au contraire éviter ?      la biennale par une œuvre d’art d’un artiste du        gies envisageables pour passer à plus
Quels enseignements tirer de l’expérience         pays hôte de la conférence. Pour la biennale         grande échelle. Deux typologies ont été
                                                  2001 c’est une sculpture Makonde de Robert
africaine et des autres régions ? Ces ques-    Joseph Francis qui a été retenue. « Arbre de vie »,
                                                                                                       présentées, la première s’intéressant au
tions, débattues à Arusha, présentent un           totem de la fraternité et de la solidarité, elle    processus d’expansion ; la deuxième à
intérêt particulier pour la majorité des       symbolise un élan vers le futur, l’amour de la vie et   l’objet de l’expansion.
                                                 des autres, illustrant ainsi l’esprit de réseau, de        La première typologie identifie trois
pays africains confrontés à des réformes
                                                  partenariat et de partage qui anime l’ADEA.
importantes de leurs systèmes et à la mise                                                             types de passage à plus grande échelle.
en place d’une éducation pour tous.                                                                    La généralisation par expansion (ou re-
      Aller plus loin, Aller vers tous :       pérennisation et de généralisation de ré-               production) se fait graduellement. Assi-
comment pérenniser les politiques et pra-      formes éducatives. Sa présentation a servi              milée à un processus d’apprentissage,
tiques efficaces pour l’éducation en Afri-     de fil conducteur à l’ensemble des inter-               cette stratégie est devenue le modèle le
que ? – le thème central de la biennale a      ventions faites au cours de la conférence.              plus couramment retenu pour étendre le
été introduit par une présentation des pro-    L’expérience de la Tanzanie a posé les                  champ d’application d’une intervention.
fesseurs Joël Samoff et Molapi Sebatane.       questions de la durabilité et de la qualité             Le processus de généralisation passe par
Basé sur un document préparé spéciale-         des programmes de scolarisation univer-                 différentes étapes qui comprennent
                        1
ment pour la biennale , ce document part       selle. Quelques expériences de générali-                l’apprentissage de l’efficacité et
de l’étude d’expériences africaines de         sation en Afrique ont été présentées ainsi              l’adaptation de l’initiative aux capacités

La lettre d’information de l’ADEA                    octobre - décembre 2001                                                                  3
Biennale ADEA

organisationnelles existantes et aux réa-      les cas, ce sont les conditions qui ont       en Afrique du Sud et l’utilisation de ca-
lités locales.                                 conduit à la réussite qui doivent être étu-   hiers des charges comme instruments de
      La généralisation par explosion part     diées de près, beaucoup plus que les élé-     pilotage de la qualité de l’enseignement
d’un modèle de réforme applicable à l’en-      ments spécifiques de l’expérience. Pour       primaire au Sénégal.
semble du pays, sans passer par une phase      que l’expansion soit réussie, l’important           Deux documentaires filmés ont pré-
pilote. Les modifications et les ajuste-       n’est pas tant de reproduire le contenu       senté des stratégies d’Education Pour
ments pour tenir compte des spécificités       de l’innovation, que de reproduire et re-     Tous mises en place en Amérique latine
locales se font généralement a posteriori.     créer – avant de procéder à l’expansion       et en Asie à travers un voyage d’études
Les réformes nationales de grande enver-       ou à la généralisation de l’innovation –      de ministres africains dans les pays con-
gure appuyées par les autorités politiques     les conditions qui lui ont permis de          cernés (Nueva Escuela Unidad au Guate-
au plus haut niveau font partie de ce type     s’épanouir.                                   mala, EDUCO au Salvador, BRAC au
d’initiatives qui demandent la mobilisa-             En outre, dans toutes les expérien-     Bangladesh et DPEP en Inde). Les docu-
tion de ressources importantes. Plusieurs      ces de généralisation réussie, trois fac-     mentaires ont suscité un grand intérêt et
pays africains ont appliqué cette straté-      teurs semblent être essentiels :              leur présentation a été un moment fort de
gie pour mener des campagnes nationa-          • la ferme résolution des acteurs de l’in-    la biennale (voir « Leçons venues
les d’alphabétisation visant à atteindre           novation ;                                d’ailleurs », page 10).
la scolarisation primaire universelle. Les     • l’intérêt perçu par tous les acteurs et           Les réactions des ministres africains
initiatives de lutte contre le SIDA, mises         bénéficiaires locaux, ainsi que leur      qui ont pu observer et analyser les expé-
en œuvre actuellement, indiquent un re-            participation active et démocratique      riences d’Asie et Amérique latine sont par-
gain d’intérêt pour cette approche.                – conditions nécessaires à l’appro-       ticulièrement intéressantes : tous souli-
      La généralisation par association            priation du projet et à son succès ;      gnent que si, en termes de théorie péda-
vise à combiner des initiatives distinctes     • un financement, un suivi et une éva-        gogique les méthodes participatives ne
répondant aux besoins d’environnements             luation adéquats, permettant de rec-      sont pas une nouveauté pour les pédago-
spécifiques. On peut ainsi créer des cen-          tifier ou d’infléchir le programme mis    gues africains, c’était la première fois
tres de soutien pédagogique dans un dis-           en œuvre en fonction des besoins.         qu’ils voyaient ces méthodes appliquées
trict et les lier à un programme d’ensei-            Le contexte, le moment et les acteurs   par des enseignants confiants en eux, bien
gnement spécifique dispensé par d’autres       seront nécessairement différents et le pro-   formés et débordant d’enthousiasme.
institutions de formation des enseignants      jet d’expansion devra en tenir compte         Tous estiment qu’un facteur clé de réus-
ou à de nouveaux modes de recrutement          avant d’être mis en œuvre. En outre, on       site réside dans la formation continue or-
afin de réaliser une réforme plus générale     risque fortement de ne pas être en mesure     ganisée au niveau local et dans le sou-
de la formation des enseignants.               de reproduire les conditions de soutien       tien pédagogique efficace donné aux en-
      Une deuxième typologie part de           qui existaient dans l’expérience pilote :     seignants sur le terrain.
l’étude de l’objet de la généralisation. La    soit du fait des coûts insoutenables in-
généralisation peut porter sur la structure,   duits par la généralisation, soit en dépas-   Intégrer l’éducation
les programmes, la stratégie ou la base        sant la capacité de gestion et de finance-    non-formelle
financière d’une organisation. Une or-         ment des administrations (locales et/ou
ganisation peut s’accroître, en termes de      centrales), soit en mesurant mal les capa-    Au cours des trente dernières années, se
taille ou de composantes (expansion            cités de nuisance ou de résistance des        sont développés en Afrique des systèmes
quantitative) ; augmenter le nombre ou         parties prenantes (bureaucratie, conser-      d’éducation parallèles au système étati-
le type d’activités (expansion fonction-       vatisme, ou encore intérêts des uns et des    que, qu’on a nommés « non-formels » ou
nelle) ; changer de stratégie (expansion       autres mis en péril).                         « informels », selon les temps, les lieux,
politique) ; ou encore renforcer sa base                                                     et les modes. Souvent ignorés, ces systè-
financière et institutionnelle (expansion      Expériences d’Afrique                         mes d’éducation sont pourtant indispen-
organisationnelle). Ces catégories ne          et d’autres régions                           sables dans le cadre des efforts faits par
s’excluent pas mutuellement et une stra-                                                     les pays pour parvenir à offrir une éduca-
tégie quantitative peut reposer sur une        A la suite de l’exposé des professeurs        tion à tous leurs citoyens, dans un con-
stratégie efficace d’expansion fonction-       Samoff et Sebatane, différents exemples       texte où des contraintes particulièrement
nelle et organisationnelle.                    de passage à plus grande échelle ont été      lourdes pèsent sur les budgets.
                                               présentés ; la mobilisation des ensei-        M. Wright, chef du département de l’édu-
Risques et facteurs de réussite                gnants guinéens grâce à un programme          cation au secrétariat du Commonwealth,
                                               décentralisé d’amélioration de la qualité     s’est fait l’avocat d’une approche globale
Le point le plus important qui a été souli-    de l’enseignement élémentaire ; la géné-      qui se traduirait par l’établissement d’un
gné pendant la présentation est que, si        ralisation d’un programme de lecture en       système intégrant toutes les formes d’édu-
diverses stratégies de passage à grande        langue maternelle en Zambie ; la mobili-      cation existant dans un même pays.
échelle ont été développées, dans tous         sation de ressources humaines latentes        Chaque système pourrait ainsi bénéficier

4                                                   La lettre d’information de l’ADEA                    octobre - décembre 2001
Biennale ADEA

des points forts des autres systèmes sans            gagement et le soutien des commu-
en gommer pour autant les spécificités.
Toutes les connaissances acquises par l’ex-
                                                     nautés.
                                                      Les outils de communication peu-              Ils et elles
périence serviraient à mettre en place un        vent être fort divers : réunions et sémi-
système intégré, décentralisé, flexible et       naires, nouvelles technologies de l’infor-            ont dit
adapté aux besoins des différentes régions       mation et de la communication, médias,
et populations concernées, dont le minis-        théâtre, etc. Dans tous les cas, il faut se
tère serait le chef d’orchestre dynamique.       rappeler que la communication a un coût,
Des stratégies doivent être élaborées afin       (qu’il convient de prévoir et d’assumer            Sur l’éducation et la
que les ministères africains soient en me-       par des budgets adéquats) et qu’elle                  démocratie...
sure d’accueillir, de gérer et de tirer profit   exige l’existence de structures organisées
de la diversité des approches éducatives.        pour élaborer et appliquer des plans et            ❝ L’éducation joue un rôle majeur
     Des exemples d’intégration réussie du       stratégies de communication.                       dans le processus démocratique et la
non-formel, au Mexique et en Argentine,                                                             bonne gouvernance. ❞
ont été présentés, ainsi que les tentatives      Réflexions sur le SIDA                                               Ali Mohammed Shein,
faites dans huit pays africains (Burkina                                                                      vice président de la Tanzanie
Faso, Kenya, Mali, Ouganda, Sénégal,             La biennale a également présenté une
                                                 expérience de généralisation d’un pro-
Sierra Leone, Zambie, Zimbabwe). Les
                                                 gramme télévisé de lutte contre le SIDA
                                                                                                     Sur le processus de
difficultés pour faire accepter les écoles
non-formelles ont été soulignées.                destiné aux jeunes. Conçu en Afrique du              généralisation...
                                                 Sud, Soul City a été étendu à plusieurs
                                                 pays de la sous région (voir l’article en             ❝ Il s’agit de recréer et étendre
Développer des systèmes
                                                 page 7). D’autres séances se sont intéres-             les conditions spécifiques qui ont
de communication efficaces
                                                 sées au VIH/SIDA, sous un angle diffé-                    permis le succès de la réforme
La communication comme instrument                rent. Les actions menées par les pays pour          initiale et qui ont nourri les racines
pour faciliter la mise en place de nouvel-       lutter contre les effets néfastes du SIDA                                     locales. ❞
les approches éducatives ou le passage à         sur les systèmes éducatifs ont été analy-                          Professeur Joël Samoff,
plus grande échelle a également été dis-         sés ainsi que la contribution des confé-                            université de Stanford
cutée. Des stratégies de communication           rences internationales.
sont à développer, tant à l’intérieur qu’à                                                                Sur le SIDA...
l’extérieur des ministères. Dans les divers      Conclusion
exemples présentés, on a insisté sur l’im-
                                                 Les expériences africaines de générali-
                                                                                                    ❝ L’éducation par les pairs est effi-
portance du dialogue, au niveau de la base                                                          cace et populaire chez les adolescents.
                                                 sation bien documentées sont malheu-
(entre les différentes parties prenantes), et
                                                 reusement peu nombreuses et les pays               Cette approche pour lutter contre le
entre la base et le sommet.
     La communication peut avoir plu-
                                                 gagneraient à enrichir leurs bases de con-         SIDA doit être conduite en parallèle
sieurs objectifs :
                                                 naissances dans ce domaine. On retien-             avec des programmes de communi-
• le partage de l’information, afin d’évi-
                                                 dra cependant des enseignements tirés              cation riches en information. ❞
                                                 qu’il s’agit avant tout de tenter de recréer                 Mwalimu Sawaya, Tanzanie
    ter les interprétations erronées et les
                                                 des conditions qui ont permis à l’initia-
    oppositions non-fondées qui peuvent
                                                 tive de s’épanouir ; de s’assurer de la con-
    entraver le processus de passage à plus
                                                 viction et de la participation des acteurs
                                                                                                           Sur la
    grande échelle ;
                                                 et bénéficiaires locaux ; de prévoir un               communication...
• le dialogue, afin d’augmenter la con-
                                                 financement et un suivi adéquat ainsi que
    fiance, l’appropriation et l’engage-
                                                 des stratégies de communication et de              ❝ La communication est essentielle
    ment de toutes les parties prenantes ;
                                                 coordination efficaces ; que des réseaux           dans le processus de passage à plus
• la création de consensus ;
• le plaidoyer, afin de créer l’adhésion
                                                 bien développés contribuent également              grande échelle. Les ministères de
    et le soutien ;
                                                 à la diffusion d’idées, de compétences et          l’éducation doivent mettre en place
                                                 d’expériences ; que tous ces éléments              un cadre global et systémique per-
• la mise en réseaux des acteurs pour
                                                 constituent des leviers pour réussir la gé-
    discuter des problèmes rencontrés, des                                                          mettant une communication effi-
                                                 néralisation d’initiatives porteuses. ■
    solutions apportées et des leçons ap-                                                           cace. ❞
    prises et renforcer le processus d’im-                                                                 Professeur Opubor, programme
    plantation de l’innovation ;                                                                      Communication pour l’éducation et le
                                                 1. « Partir du terrain pour généraliser des          développement (COMED) de l’ADEA
• la mobilisation sociale, pour faire            tentatives de réformes », par J. Samoff et E. M.
    accepter le changement et susciter l’en-     Sebatane en collaboration avec M. Dembélé.

La lettre d’information de l’ADEA                     octobre - décembre 2001                                                                 5
Ali Mohammed Shein
       préside l’ouverture
La biennale d’Arusha a été honorée par la présence du vice-président de la Tanzanie, Ali Mohammed Shein. M. Shein a
rappelé qu’en Tanzanie l’éducation et la lutte contre la pauvreté étaient des priorités nationales depuis l’indépendance. Il a
également rappelé que l’éducation était à la base de la démocratie et de la bonne gouvernance ; que les efforts pour offrir une
éducation à tous étaient nécessaires mais qu’il fallait également veiller à la qualité de l’éducation. Il a enfin lancé un appel
pour qu’une attention particulière soit donnée à l’éducation des filles et pour que l’éducation des adultes ne soit pas oubliée.

A propos des politiques...                                         de qualité…

... Lier les politiques à leurs applications pratiques est         … Il faut nous assurer que les efforts pour développer
capital... Je salue également l’ADEA lorsqu’elle met l’ac-         l’accès à l’éducation ne compromettent pas la qualité
cent sur la démocratisation de l’éducation et lorsqu’elle          de l’éducation et nous interroger sur les causes des aban-
associe le développement quantitatif à l’amélioration              dons scolaires. Si nous continuons à dépenser des res-
de la qualité. Vous recherchez aussi la pertinence. Ce             sources pour augmenter les taux de scolarisation sans
sont là de nobles idéaux qui, si nous les atteignons,              résoudre le problème des abandons, cela reviendra à ver-
donneront à l’Afrique un avantage compétitif dans un               ser de l’eau dans une passoire…
monde en évolution rapide, caractérisé par la
globalisation, et la domination des technologies de l’in-          d’éducation des filles…
formation...
                                                                   … Les filles sont les premières victimes de l’échec sco-
d’éducation en Tanzanie...                                         laire. Nous en connaissons certaines causes, comme les
                                                                   grossesses et les mariages précoces. Mais les parents afri-
...Lorsque nous avons retrouvé notre liberté politique,            cains n’ont peut-être pas accordé suffisamment d’im-
le gouvernement a déclaré la guerre à l’ignorance, à la            portance à l’éducation des filles. La mentalité qui pré-
pauvreté et à la maladie. L’éducation est depuis long-             vaut encore voudrait que la place de la femme fût dans
temps une priorité en Tanzanie. Nous avons quarante                la cuisine. Ceci constitue une véritable violation des
ans d’expérience de développement, semés de succès et              droits humains dans le contexte de l’Education Pour
de défis, toujours guidés par les principes philosophi-            Tous.…
ques du Père de la Nation, Mwalimu Julius Kambarage
Nyerere ; une philosophie qui a toujours mis l’accent              d’éducation des adultes…
sur le bien-être de tous les citoyens, sans aucune discri-
mination. Il n’est donc pas étonnant que l’éducation               … En Tanzanie, nous avons toujours accordé une grande
primaire universelle et l’éducation à l’autonomie aient            importance à l’éducation des adultes... cela fait partie
été des objectifs majeurs pour nos gouvernements...                de notre philosophie qui tient à assurer une éducation
L’éducation aujourd’hui est essentielle dans tous les do-          aux personnes de tous âges et de toutes conditions. Nous
maines, pour une meilleure gestion de notre environne-             avons réussi dans les années 1970 à atteindre un taux
ment et de notre habitat, pour réduire la pauvreté...              d’alphabétisation de 90 %. Mais ce taux est descendu à
                                                                   71 % en 1991. L’alphabétisation dans le seul but d’al-
de démocratie…                                                     phabétiser, sans relier le processus d’apprentissage aux
                                                                   préoccupations quotidiennes des apprenants, ou encore
... L’éducation joue un rôle majeur dans le processus              l’absence d’une culture de lecture expliquent sans doute
démocratique et la bonne gouvernance. Depuis l’indé-               en partie cette baisse... Je saisis cette occasion pour lan-
pendance, tous nos gouvernements se sont efforcés de               cer un appel à tout le continent pour investir dans l’édu-
démocratiser l’éducation. Les efforts consentis en fa-             cation des adultes... Il n’est jamais trop tard pour ap-
veur de l’enseignement primaire universel nous ont per-            prendre...
mis d’atteindre un taux brut de scolarisation impres-
sionnant de 98 % en 1997. Mais ce taux n’était plus que                EXTRAITS DU DISCOURS D’OUVERTURE PRONONCÉ PAR
de 74 % en 2000.                                                   ALI MOHAMMED SHEIN, VICE PRÉSIDENT DE LA TANZANIE
VIH/SIDA

   VIH/SIDA et éducation :
     leçons de la biennale
Les systèmes éducatifs africains n’ont malheureusement pas été épargnés par le VIH/ SIDA. La pandémie affecte aussi bien l’offre que
la demande d’éducation ainsi que le fonctionnement général des systèmes éducatifs. A Arusha, la biennale s’est interrogée sur les moyens
concrets de lutte contre le VIH/SIDA. Le sujet a été abordé sous trois angles : les réponses apportées jusqu’à présent par les pays ; la
contribution des conférences internationales ; une expérience réussie “d’éducamusement” destinée à informer et à provoquer des
changements de comportements en Afrique du Sud et dans la sous-région.
Identifier les approches                                 démie, soit dans le domaine de la gestion     développés. La synthèse a également ré-
prometteuses                                             du secteur, afin de garantir le bon déve-     vélé que :
                                                         loppement du secteur fragilisé par le VIH/    • la plupart des pays ont adopté des
La biennale a d’abord fait le point sur SIDA, soit pour enrayer la progression du                         programmes dont l’objectif est de
l’initiative « Identifier les réponses effi- VIH/SIDA, grâce à la transmission d’in-                      faire changer le comportement des
caces face au VIH/SIDA » mise en place formations, de savoirs, ou de valeurs.                             individus ;
par l’ADEA. Cette activité a pour objec-                      La synthèse des études entreprises       • le sentiment qu’il faut abattre le mur
tif de recenser les approches et les prati- dans 17 pays a ainsi été présentée. Il en                     du silence, qui existe encore face à la
ques prometteuses mises en œuvre par les ressort que tous les ministres africains sont                    maladie et aux questions de sexua-
systèmes éducatifs africains face à la pan- conscients du danger que le VIH/SIDA re-                      lité en général, commence à être lar-
                                                                                 présente pour le         gement partagé ;
                                                                                 développement         • les pays souhaitent également que
  Afrique du Sud, Durban : Concert Kora All-Africa Awards au profit de la        de l’éducation           des programmes soient proposés aux
  lutte contre le SIDA. Jeune fille avec sur son front « Mon ami(e) qui a le
  SIDA est toujours mon ami(e) ». Photographe : Africa Alive! JHU/CCP
                                                                                 dans leurs pays et       élèves avant qu’ils ne deviennent
                                                                                 de ce que l’édu-         sexuellement actifs ;
                                                                                 cation constitue      • « l’éducation par les pairs » est un
                                                                                 le seul « vaccin »       moyen efficace de communication
                                                                                 trouvé à ce jour         sur le VIH/SIDA parmi les élèves ;
                                                                                 pour lutter contre    • il est urgent de faire participer le plus
                                                                                 la pandémie. On          grand nombre de partenaires et d’ac-
                                                                                 constate égale-          teurs dans la lutte contre le SIDA, no-
                                                                                 ment que les pays        tamment les représentants des grou-
                                                                                 se sont surtout in-      pes religieux ;
                                                                                 téressés à l’inté-    • l’impact des campagnes contre le
                                                                                 gration du VIH/          SIDA commence à se faire sentir sur
                                                                                 SIDA dans les            les comportements et les valeurs ;
                                                                                 programmes sco-       Mais il ressort également de l’étude que :
                                                                                 laires       plutôt   • la plupart des programmes de lutte
                                                                                 qu’aux questions         contre le SIDA dans le domaine de
                                                                                 de gestion et de         l’éducation sont récents ; l’évalua-
                                                                                 survie du sys-           tion de leur impact est donc difficile
                                                                                 tème ; seul le           à pratiquer, surtout lorsqu’il s’agit
                                                                                 Ghana s’est pen-         d’analyser des changements de com-
                                                                                 ché sur cette der-       portements, en particulier de com-
                                                                                 nière question et        portement sexuel ;
                                                                                 a décrit le proces-   • il est difficile de faire la part de l’im-
                                                                                 sus par lequel des       pact des programmes éducatifs en
                                                                                 plans stratégi-          matière de changements comporte-
                                                                                 ques d’interven-         mentaux et celle d’autres programmes
                                                                                 tion contre le           ou d’autres facteurs extérieurs plus
                                                                                 VIH/SIDA ont été         ou moins bien définis ;

La lettre d’information de l’ADEA                         octobre - décembre 2001                                                               7
VIH/SIDA

•   la formation des maîtres à l’informa-       La diffusion du programme dans les qua-        Réflexions des participants
    tion sur le SIDA est trop parcellaire et    tre derniers pays étant récente, les analy-
    insuffisante pour qu’ils soient prépa-      ses de son impact n’ont pas encore été         A Arusha, des groupes de discussion ont
    rés à réussir les changements de com-       effectuées. Le processus d’extension à         approfondi certaines questions abordées
    portement souhaités.                        plus grande échelle n’en demeure pas           en plénière. Celui sur le VIH/SIDA s’est
                                                moins intéressant pour les ministères de       intéressé à deux questions : Comment pro-
                                                l’éducation.                                   téger le système afin qu’il continue à don-
Soul City - généralisation d’un
                                                                                               ner une éducation de qualité au plus grand
programme télévisé en Afrique
australe                                        L’apport des conférences                       nombre d’enfants ? Comment répondre
                                                internationales                                aux besoins des bénéficiaires du système ?
Un programme multimédia d’éducation                                                            A partir des leçons apprises, le groupe a
à la santé mis en œuvre en Afrique du Sud,      Enfin, la conférence a pris connaissance       tenté de résumer les démarches positives :
a ensuite été présenté. Conçu pour édu-         du résultat de l’analyse d’ensemble de         • Le plaidoyer : une forte volonté po-
quer les jeunes et les distraire dans le même   17 conférences, réunions ou séminaires             litique est indispensable ; il faut par-
mouvement, Soul City a atteint ses ob-          sur le VIH/SIDA.                                   ler de la pandémie le plus possible ;
jectifs : informer les jeunes sur le VIH/             Si le nombre même de ces conféren-           mener des actions de mobilisation so-
SIDA, ses conséquences et sur les moyens        ces prouve que la pandémie mobilise l’at-          ciale ; utiliser les moyens légaux qui
de lutter contre la propagation de la pan-      tention de beaucoup de gens, en particu-           peuvent induire des changements de
démie ; initier un changement dans le           lier en Afrique où 14 (sur 17) ont eu lieu,        comportement positifs face à la mala-
comportement sexuel pour lutter contre          il n’en demeure pas moins assez difficile          die et protéger les filles et les femmes,
la propagation de la pandémie. Une éva-         de voir leur impact réel sur le terrain et         premières victimes du virus.
luation du programme montre qu’il a at-         sur quelles actions concrètes elles ont pu     • La prévention : il faut intégrer le VIH/
teint 89% des personnes visées, y com-          déboucher. Le présentateur a donc recom-           SIDA dans les programmes scolaires
pris les analphabètes et les gens vivant        mandé que toute conférence :                       et impliquer les jeunes, les parents et
dans les régions les plus reculées du pays.     • soit reliée à toutes celles qui l’ont pré-       les responsables religieux ; utiliser
L’émission a également contribué à retar-           cédée et tienne compte de leurs                l’éducation par les pairs, moyen effi-
der le début de la vie sexuelle et à faire          résultats ;                                    cace d’information et de prévention ;
adopter des pratiques moins risquées.           • se donne des objectifs précis ;                  inclure l’éducation au VIH/SIDA dans
      Soul City a eu un grand succès en         • veille à ce que les participants soient          les programmes d’enseignement su-
Afrique du Sud et a été adopté dans des             d’un rang assez élevé pour être en             périeur et de formation initiale et con-
pays voisins : Botswana, Lesotho, Nami-             mesure de mettre en œuvre les déci-            tinue des maîtres ; utiliser les médias
bie et Swaziland. Son adaptation réussie            sions prises par la conférence ;               pour atteindre le plus grand nombre
est attribuée à plusieurs facteurs:             • associe les personnes qui connaissent            de personnes.
• dans chacun des pays, des partenaires             vraiment la maladie et celles qui en       • La formation des enseignants : les
    nationaux variés ont été choisis afin           souffrent ;                                    enseignants doivent être formés et
    d’assurer une bonne appropriation du        • fasse parvenir les informations et la            devenir des agents d’information et
    programme ;                                     documentation nécessaires aux par-             de conseil sur le SIDA.
• le projet a été développé en partena-             ticipants à l’avance afin qu’ils puis-     • Les études sur l’impact de la pandé-
    riat avec les ministères de l’éducation         sent activement jouer leur rôle ;              mie sur le système : des études sont
    et de la santé des pays ;                   • réduise la durée de la conférence afin           nécessaires pour mieux définir et an-
• des pré-tests ont été effectués et les            de s’assurer du concours des sommités          ticiper les besoins, notamment en en-
    programmes ont été adaptés en tenant            en la matière, souvent très occupées ;         seignants ; il est conseillé de colla-
    compte de leurs résultats ;                 • définisse clairement, à l’issue de la            borer avec les autres ministères, celui
• des matériels spécifiques à chaque                conférence, les recommandations et             de la santé en particulier.
    pays ont été créés, prenant en consi-           les actions à mettre en œuvre ;            • Les plans d’action multisectoriels et
    dération langues, coutumes et autres        • diffuse les résultats de la conférence           nationaux : l’ensemble des partenai-
    spécificités locales ;                          largement et de manière ciblée ;               res doivent être consultés et impli-
• le marketing du programme a été               • produise un compte rendu complet et              qués pour lutter contre l’extension de
    adapté à chaque pays même si le nom             lisible par des non-spécialistes.              la pandémie.
    sud-africain a été conservé ;                     Le présentateur a également recom-       Enfin, le groupe a recommandé que
• une campagne ciblée a utilisé des             mandé que soient centralisées toutes les       l’ADEA mette en place un mécanisme
    moyens variés pour distribuer des dé-       données, informations et expériences sur       pour « suivre » l’évolution de la pandé-
    pliants sur le programme (dans des sacs     la pandémie ainsi que sur les résultats,       mie et son impact sur les systèmes éduca-
    de maïs, stations d’essence, écoles ou      recommandations et actions à mettre en         tifs ; la création d’un groupe de travail a
    par l’intermédiaire d’ONG).                 place.                                         ainsi été suggérée. ■

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Expériences Pays

         Education Pour Tous :
       les défis de la Tanzanie
Dès son indépendance, en 1961, la Tanzanie s’est donné comme priorité la lutte contre l’ignorance et la pauvreté. Sous la conduite du père
de la nation, Julius K. Nyerere, le pays atteignait rapidement, à la fin des années 1970, des taux de scolarisation proches de 100%. Mais
ce développement rapide ne s’est malheureusement pas maintenu et le taux de couverture scolaire a chuté dans les années 1980.

L
       ’histoire de l’enseignement de base         priment dans une nouvelle
                                                                                                           Facteurs qui ont contribué
       en Tanzanie est étroitement liée à          vision de l’école : celle-ci
                                                                                                    à la chute des TBS en Tanzanie :
       l’histoire politique et économique          doit obéir aux lois du mar-
du pays. A Arusha, cette évolution a été           ché et aux impératifs de        • l’approche « du haut vers le bas » dans la
exposée par le Professeur Justinian                coût-efficacité. Le pays          planification et la mise en œuvre de l’éducation ;
Galabawa, de l’université de Dar-Es-               traverse une crise écono-       • la volonté du gouvernement de ne compter que sur
Salaam. Le professeur Galabawa a tout              mique pendant laquelle il         lui-même pour financer l’éducation ;
                                                                                   • l’application rigide des plans d’ajustement
d’abord rappelé l’engagement en faveur             n’est plus capable de sou-        structurels ;
de l’éducation du père de la nation,               tenir le développement de       • la contribution financière trop grande demandée
l’ancien président J.K. Nyerere, que ses           l’éducation. Un plan              aux ménages ;
compatriotes appelaient affectueusement            d’ajustement structurel est     • la crise économique prolongée ;
« Mwalimu », le maître d’école. Après              adopté, qui conduit au gel      • un niveau d’endettement croissant ;
avoir remarqué que seul un effort collectif        du recrutement des maî-         • un budget de l’éducation en diminution ;
                                                                                   • des taux de croissance démographiques élevés ;
national permettrait d’atteindre une               tres, à une diminution du       • la propagation du VIH/SIDA.
scolarisation universelle, le Professeur           budget du ministère de
Galabawa a présenté les trois phases de            l’éducation et à la baisse
l’histoire de l’enseignement primaire              des taux de scolarisation ; ceux-ci
                                                                                             • La période actuelle connaît un ac-
universel en Tanzanie :                            chutent à 83% en 1990. La part de
                                                                                                 croissement des inscriptions et une
• Une période de fort développement                l’Etat dans les dépenses d’éducation
                                                                                                 remontée significative de la partici-
    vers l’Education Pour Tous au cours            passe de 67% avant l’introduction du
                                                                                                 pation de l’Etat au financement de
    des années 1960 et 1970, pendant la-           plan d’ajustement structurel (PAS) à
                                                                                                 l’éducation. Aujourd’hui, l’accent est
    quelle le pays a réussi à atteindre un         43% après le PAS. La contribution des
                                                                                                 mis sur une plus grande implication
    taux brut de scolarisation (TBS) pro-          parents passe à 57% des dépenses
                                                                                                 des communautés (en plus de celle des
    che de 100%. Cette période est asso-           d’éducation, niveau insoutenable à
    ciée au socialisme et à l’autonomie            long terme.                                                     ➟ Suite page 12
    pronés par J.K. Nyerere. L’école fait
    partie de la transformation socio-éco-
    nomique recherchée par les autorités
    et annoncée dans la Déclaration
    d’Arusha. L’éducation primaire uni-
    verselle (UPE), est mise en œuvre par
    le gouvernement, seul fournisseur des
    services sociaux du pays, à travers des
    plans de développement centralisés ;
    l’éducation ne reçoit que très peu
    d’aide des agences de développement
    internationales. En 1980, le TBS at-
    teint 98%. Mais cette réussite cache
    des faiblesses structurelles internes et
    externes.
• La seconde époque (1980-1990), se
    caractérise par une forte baisse du
    taux de couverture scolaire et l’in-
                                                    Source : « Problématique et évolution de l’enseignement primaire universel (EPU)
    troduction d’idées libérales, qui s’ex-         en Tanzanie » par Justinian Galabawa

La lettre d’information de l’ADEA                    octobre - décembre 2001                                                            9
Leçons venu
                                                                                            Expériences du Guatemala, du Sa

                                                                                                    tion des écoles et la responsabilisation
                                                                                                    des communautés villageoises qui ont en
                                                                                                  Vidéo
 « Nous avons vu...

                                                                                                                             Vidéo
                                                                                                    charge la gestion administrative, finan-
 ... des enfants détendus et expressifs apprenant dans la joie, partici-                            cière et matérielle des écoles ainsi que le

                                                                                                 Vidéo
     pant à la gestion de leurs écoles                                                              recrutement et la gestion des enseignants.
                                                                                                          Les programmes du Guatemala et du
 ... l’auto-apprentissage                                                                           Salvador ont en commun les caractéristi-
 ... des programmes d’enseignement flexibles                                                        ques suivantes :
 ... des stagiaires dirigeant leur propre programme de formation                                    • les parties prenantes (parents, enfants,
                                                                                                        enseignants, gouvernement, média,
 ... des enseignants dans le rôle de facilitateurs et de guides
 ... des inspecteurs dans le rôle de conseillers                                                          Vidéo
                                                                                                        secteur privé et partenaires du déve-
                                                                                                        loppement) partagent la même philo-
 ... des écoles gérées par les communautés                                                              sophie en matière d’éducation ;
                                                                                                    • le passage à plus grande échelle s’est
 ... des parents analphabètes impliqués dans la gestion des écoles. »                                   effectué de manière progressive ;
                           Ministres africains et autres participants aux voyages d’étude
               « Partage et apprentissage » - Inde, Bangladesh, Guatemala et Salvador               • le souci constant des opérateurs a été
                                                                                                        de consolider le projet avant de le
                                                                                                        faire connaître à l’extérieur ;
                                                                                                    • les élèves organisent la vie dans

A
           Arusha, deux documentaires fil-        Pour les parents il s’agit d’assurer un ave-          l’école (notamment la discipline) et
           més ont présenté les nouvelles         nir pour leurs enfants à travers la paix,             leur formation s’effectue de façon coo-
           stratégies d’Education Pour            mais aussi le droit à l’éducation.                    pérative et par auto-apprentissage ;
Tous mises en place dans deux pays                     Au Guatemala, la réforme vise avant          • l’école est gérée par les parents et la
d’Amérique latine (Guatemala et Salva-            tout à améliorer la couverture scolaire et            communauté qui sont formés à la ges-
dor) et deux pays d’Asie du Sud-est (Ban-         la qualité de l’apprentissage au sein des             tion de l’école ;
gladesh et Inde). Dans tous les cas, il s’agit    groupes défavorisés, notamment dans les           • les processus démocratiques sont le
d’expériences en direction des pauvres            zones rurales où les résultats sont nette-            socle de la gestion, de l’enseignement
mises en œuvre depuis plusieurs années.           ment inférieurs à la moyenne nationale.               donné et de l’enseignement reçu ;
Dans tous les cas également on a com-             Deux programmes ont été mis en place :            • le gouvernement, ainsi que le secteur
mencé petit, mais en gardant présente à           la Nueva Escuela Unidad (NEU) et le                   privé, participent activement au fi-
l’esprit la nécessité d’étendre l’expé-           PRONADE (Programme national pour le                   nancement des écoles.
rience à d’autres enfants, à d’autres éco-        développement de l’éducation). Introduit                Dans les deux cas, le processus d’ex-
les et à d’autres régions.                        en 1992, NEU ne cesse d’être amélioré.            tension a été facilité par :
                                                  Les méthodes utilisées mettent l’accent           • une forte volonté politique ;
Guatemala et Salvador                             sur l’auto-apprentissage, la progression          • un financement adéquat attribué di-
                                                  de l’apprentissage basée sur les rythmes              rectement au niveau local ;
Au Guatemala et au Salvador, les réfor-           individuels et l’auto-gestion par des gou-        • un suivi régulier de l’innovation ;
mes s’inscrivent dans le dessein plus large       vernements mis en place dans les écoles.          • une gestion décentralisée au niveau
de faire régner la paix après plusieurs an-            Au Salvador, la réforme vise égale-              des communautés de base et, dans le
nées de guerre civile. Elles ont pour ob-         ment à accroître l’accès à l’éducation et à           cas du Salvador, une vraie réforme du
jectifs d’améliorer l’accès à l’éducation,        améliorer la qualité de l’éducation ; il              ministère de l’Education pour décen-
d’assurer une éducation de qualité, de ré-        s’agit notamment de réduire les taux de               traliser le pouvoir et les budgets.
duire les disparités et d’encourager l’ap-        redoublement et d’abandon scolaire dans
propriation des écoles par les communau-          les zones rurales défavorisées. La réforme        Inde et Bangladesh
tés. Les réformes résultent d’une volonté         est mise en œuvre à travers divers pro-
politique des gouvernements doublée               grammes dont EDUCO. Ce dernier met                Au Bangladesh, l’éducation de base est
d’une forte volonté des communautés.              l’accent sur la décentralisation de la ges-       obligatoire et gratuite depuis 1971.
       Les vidéos « Partage et Apprentissage » sur les expériences d’Asie et d’Amérique du Sud peuvent être obtenues
       auprès du Secrétariat de l’ADEA (Voir modalités de commande en page 20).

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