VIAN, TOUJOURS VIVANT - DOSSIER D'ACCOMPAGNEMENT - Labo des histoires

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VIAN, TOUJOURS VIVANT - DOSSIER D'ACCOMPAGNEMENT - Labo des histoires
VIAN, TOUJOURS VIVANT
         DOSSIER D’ACCOMPAGNEMENT
VIAN, TOUJOURS VIVANT - DOSSIER D'ACCOMPAGNEMENT - Labo des histoires
À propos

                               «    L’histoire est entièrement vraie,
                               puisque je l’ai imaginée d’un bout à l’autre.
                                                                               »
                                                                               Boris Vian, L’Écume des jours

Selon ses notes personnelles, Boris Vian commence à écrire à l’âge de 23 ans. Romancier, poète,
dramaturge, traducteur, nouvelliste, chroniqueur, scénariste amateur, journaliste jazz... Pour
Boris Vian, c'est toujours écrire.

Boris Vian reste inclassable et comme le disait son ami Raymond Queneau en 1953 : « Tout ceci
n'est rien encore car Boris Vian va devenir Boris Vian ! »
Ses vies parallèles lui permettent de tout tenter et de tout espérer. Il noircit des milliers de pages
sans rencontrer le succès et aujourd'hui 33 titres sont publiés. Beau pied de nez à la mort qui l'a
fauché à 39 ans.

Boris Vian est né le 10 mars 1920 à Ville d’Avray. A l’occasion du centenaire de sa naissance, le
Labo des histoires propose, avec l’aide précieuse de la Cohérie Boris Vian1, de la Bibliothèque
Nationale de France et du Livre de Poche, un dossier d’accompagnement afin d’encourager les
projets d’écriture inspirés par l’éclectisme de l’œuvre de l’auteur. Les enfants, adolescents et
jeunes adultes de moins de 25 ans sont ainsi invités à découvrir ou redécouvrir l’œuvre de Boris
Vian et à s’inspirer des univers qui la caractérisent.

Ce dossier d’accompagnement s’adresse en priorité aux enseignants, éducateurs et animateurs
qui, sur le temps scolaire, périscolaire ou hors temps scolaire, souhaitent proposer des activités
éducatives en lien avec l’écriture. Ils trouveront notamment dans les pages qui suivent une
tentative de biographie de Boris Vian, des extraits de textes, des chansons, des éléments de la
vie de Boris Vian plus confidentiels, l’ensemble toujours associé à des activités d’écriture.

La majorité des biographes s’accordent à dire qu’il est extrêmement complexe de résumer la vie
et l’œuvre de Boris Vian tant sa courte vie fut riche et multiple. Nous avons donc fait le choix
et pris la liberté de faire l’impasse sur plusieurs aspects de sa vie : son métier d’ingénieur et sa
carrière professionnelle, sa famille et ses très nombreuses correspondances, entre autres.

Une adresse mail dédiée – borisvian@labodeshistoires.com – est mise en place afin de pouvoir
faciliter l’utilisation de ce dossier. Vous pouvez y adresser vos questions, solliciter un
accompagnement pour organiser une sortie scolaire ou un atelier d’écriture ou tout simplement
partager votre expérience de l’utilisation du dossier.

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    Source : Cohérie Boris Vian : www.borisvian.org

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VIAN, TOUJOURS VIVANT - DOSSIER D'ACCOMPAGNEMENT - Labo des histoires
Sommaire

Vian, centenaire ! ................................................................................ 4
Cohérie Boris Vian .............................................................................. 5
Quelques repères biographiques ....................................................... 10-11
Écrire, toujours écrire ......................................................................... 12-17
Jazz ! ...................................................................................................... 18-22
Un « langage-univers » ....................................................................... 23-26
Bison Ravi, Vernon Sullivan et les autres ........................................ 27-29
Cité Véron ............................................................................................ 30-32
‘Pataphysique ....................................................................................... 33-36
Pour aller plus loin : le Tournoi des mots ........................................ 37-41
Bibliographie ........................................................................................ 42-43
Fiche pratique « Plan Mercredi » ...................................................... 45
Contact ................................................................................................. 46

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VIAN, TOUJOURS VIVANT - DOSSIER D'ACCOMPAGNEMENT - Labo des histoires
Vian, centenaire !
Sous le parrainage du ministère de la Culture et celui de la Ville de Paris, le centième
anniversaire de la naissance de Boris Vian sera célébré tout au long de l’année 2020 à travers
une multitude d’événements qui se tiendront partout en France mais aussi en Belgique, en
Suisse, au Canada et aux États-Unis.
Le Centenaire de la naissance de Boris Vian est sélectionné parmi les anniversaires qui seront
célébrés au titre de commémorations nationales en 2020.

    Edito de Patrick Vian et de Nicole Bertolt pour le programme du centenaire Boris Vian

                                                 « Lorsqu’il y a quelque mois, nous avons annoncé que
                                                 Boris aurait eu 100 ans en 2020, un formidable
                                                 enthousiasme est né. De là, ce programme conçu et
                                                 construit avec l’élan de tous : les amis de toujours, bien
                                                 sûr, fervents de la première heure de l’œuvre littéraire
                                                 de Boris Vian qu’ils ont fait découvrir et redécouvrir,
                                                 ses premiers éditeurs, le collège de ‘Pataphysique ; et
                                                 tous ceux qui relaient, depuis des décennies, le travail
                                                 de la cohérie Boris Vian, créée par Ursula Kübler-
                                                 Vian, sa veuve, en 1959, pour faire vivre l’œuvre et la
                                                 mémoire, facétieuse et poétique, de son auteur. Qu’ils
                                                 en soient ici tous remerciés.
                                                 D’autres les ont rejoints. Autour de la Cité Véron, qui
                                                 conserve l’empreinte de Boris Vian, s’est constituée au
                                                 fil des ans une confrérie complice où figurent
                                                 désormais de jeunes Borissiens revendiquant un
                                                 même esprit. Metteurs en scène de théâtre, comédiens,
                                                 musiciens ou documentaristes, leur enthousiasme a
                                                 contribué à faire du programme de ce Centenaire un
                                                 vrai feu d’artifice. Et ce clin d’œil de la jeune
                                                 génération à un homme qu’on savait en avance sur son
                                                 temps nous réjouit tout particulièrement.
                                                 Vous retrouverez dans cet hommage tout Boris Vian :
                                                 l’écrivain, l’auteur-interprète, le trompettiste, le
              Création graphique : Kévin Faroux scénariste, l’acteur, le peintre, le critique, l’ingénieur,
                                                 le « Prince » du jazz, de Saint-Germain-des-Prés, et de
l’anagramme… Faut-il tout redire ? Nous vous laissons y piocher à votre guise, sachant que bien
d’autres initiatives personnelles ou collectives viendront enrichir ce programme officiel.
Enfin, nous sommes heureux d’annoncer que Mathias Malzieu, chanteur du groupe Dionysos,
nous fait l’amitié de parrainer cet hommage-anniversaire. Que ce frère de cœur (et de sa
mécanique), lui aussi artiste aux multiples talents, prenne la tête de ce Centenaire au moment
même où lui échoit la direction artistique du théâtre des Trois Baudets, la mythique salle de
Jacques Canetti à Montmartre où Boris Vian a fait ses débuts de chanteur, n’est-ce pas un
signe ? »
                                                                         Patrick Vian, fils de Boris Vian,
                                             et Nicole Bertolt, mandataire pour l’œuvre de Boris Vian.

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VIAN, TOUJOURS VIVANT - DOSSIER D'ACCOMPAGNEMENT - Labo des histoires
Cohérie Boris Vian
Faire vivre une œuvre, c’est être uni dans la longévité car il s’agit d’accompagner durant 70 ans
la vie et la diffusion des écrits de l’auteur.
Pour Boris Vian, peu de choses sont publiées et diffusées de son vivant, un immense travail reste
à faire autant en termes d’édition que d’image.

Au décès de Boris Vian, en 1959, Ursula Kü̈bler-Vian, sa deuxième épouse, n’a pas d’enfant. De
son union avec Michelle Léglise, la première femme de Boris, sont nés Patrick, en 1942, et
Carole, en 1948. Boris Vian laisse donc trois ayants-droit, dont deux enfants mineurs. Ursula
est nommée usufruitière et mandataire. Un ami proche propose l’appellation « cohérie », peu
usitée à l’époque, pour l’appliquer aux membres de la famille, appelés à gérer la succession.
Ursula Vian n’appréciait pas le terme d’héritier et souhaitait être présentée d’une autre manière.

Jusqu’en 1998, au décès prématuré de Carole, la cohérie a fonctionné avec les enfants mineurs
puis majeurs, dans un esprit de cohérence, comme l’indique le mot choisi à dessein de
« cohérie », pour promouvoir l’œuvre de Boris Vian et sa diffusion.

                                                  À la disparition d’Ursula Vian, en janvier 2010,
                                                  Nicole Bertolt, qui travaille pour et avec la
                                                  famille depuis 1980, a été nommée mandataire à
                                                  son tour, comme l’a alors souhaité Patrick Vian,
                                                  le fils de Michelle et Boris.

                                                  Une partie de l’œuvre de Boris Vian sera dans le
                                                  domaine public en 2029 en vertu du droit
                                                  français. La cohérie continuera d'exercer un
                                                  droit patrimonial sur l’œuvre publiée après le
                                                  décès de l'auteur tandis que le droit moral est
                                                  inaliénable et imprescriptible.

                               ©Youri Zakovitch

                                                                                                5
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Quelques repères biographiques
Cette tentative de biographie est tirée du site internet de la cohérie Boris Vian.

10 mars 1920 : il naît à Ville-d’Avray, il est le second fils d’Yvonne Ravenez et de Paul Vian. La famille
vit dans l’opulence, la culture et la convivialité, mais perd presque toute sa fortune lors de la crise de
1929.
1932 : il entre en classe de 3e au lycée Hoche à Versailles, il a une première complication cardiaque.
1935 : il tombe gravement malade et son insuffisance cardiaque l’affaiblit terriblement, mais il se rétablit
et quelques mois plus tard, se met à la trompette.
23 avril 1937 : il adhère au Hot Club de France.
3 avril 1939 : il assiste au concert de Duke Ellington au Palais de Chaillot.
31 juillet 1940 : il rencontre sa future épouse Michelle Église à Cap-Breton. Il l’épouse l’été suivant.
Automne 1941 : il commence l’écriture d’un recueil de poésies, Cent sonnets.
12 avril 1942 : Patrick, son premier fils, vient au monde.
5 août 1942 : il obtient son diplôme de l’École centrale et, dans la foulée, devient ingénieur à l’Afnor.
Été 1942 : il entre dans le groupe de jazz de Claude Abadie ainsi que ses deux frères Alain et Lélio.
Mai 1943 : il a terminé son premier roman, Trouble dans les Andains.
22 novembre 1944 : lors d’un cambriolage, le père de Boris Vian est tué.
12 février 1946 : il quitte l’Afnor et entre à l’Office professionnel des industries et commerces du papier
et du carton.
Mars 1946 : il commence la rédaction de L’Écume des jours, qui paraît en avril 1947 chez Gallimard.
12 mai 1946 : première réunion avec l’équipe de rédaction des Temps modernes où lui seront confiées
Les Chroniques du menteur.
Août 1946 : il écrit en deux semaines J’irai cracher sur vos tombes à Saint-Jean-de-Monts.
Septembre 1946 : il commence à rédiger L’Automne à Pékin, qui sortira en librairie un an plus tard.
26 septembre 1946 : il publie son premier article sur Charles Delaunay dans Combat dont Albert Camus
est rédacteur en chef.
Octobre 1946 : grâce à ses amis Jean Rostand et Raymond Queneau, il remporte une première grande
victoire : il publie son premier roman Vercoquin et le plancton chez Gallimard.
20 novembre 1946 : les premiers exemplaires de J’irai cracher sur vos tombes sont en vente.
11 avril 1947 : il participe à l’inauguration du Tabou, dont il devient le trompette attitré. Le célèbre trio
se forme avec Juliette Gréco et Anne-Marie Cazalis. Son Écume des jours ne remporte ni le Prix de la
Pléiade, ni le succès.
26 juin 1947 : Boris Vian met un terme à sa carrière d’ingénieur en même temps qu’il quitte l’Office du
papier, pour se consacrer à l’écriture. J’irai cracher sur vos tombes fait déjà beaucoup de bruit…
Septembre 1947 : L’Automne à Pékin sort en librairie, suivi de Les morts ont tous la même peau. C’est
toujours le silence des critiques.
20 février 1948 : il accueille Dizzy Gillespie à la Gare du Nord. Un grand bonheur.
Avril 1948 à juillet 1949 : la radio new yorkaise WNEW diffuse 45 émissions écrites par Boris Vian en
anglais sur le jazz français des années 1930-1940.
16 avril 1948 : Carole fait son entrée dans la famille Vian.
23 avril 1948 : la pièce tirée de J’irai cracher sur vos tombes est présentée pour la première fois au théâtre
Verlaine.
20 juin 1948 : Et on tuera tous les affreux paraît en volume aux éditions du Scorpion après avoir été
publié par épisodes dans France Dimanche. Boris Vian ne veut pas « tuer » Vernon Sullivan.
Juillet 1948 : Duke Ellington est à Paris, Boris est son guide à Saint-Germain-des-Prés.
18 février 1949 : il signe un contrat d’édition pour un recueil de poèmes, Cantilènes en gelée, qui sera
lancé le 14 mai au Club Saint-Germain en présence de Miles Davis.
19 mars 1949 : il rencontre Jacques Canetti, alors directeur artistique chez Polydor.
5 juillet 1949 : son recueil de nouvelles Les Fourmis est édité par les éditions du Scorpion.

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Novembre 1949 : il devient rédacteur en chef de Jazz News dont Eddie Barclay est le
bienfaiteur.
Décembre 1949 : Gallimard refuse de publier son prochain roman L’Herbe rouge.
Mars 1950 : le nom de Boris Vian apparaît pour la première fois sur une pochette de
disques : Henri Salvador chante C’est le be-bop sur son 78 tours.
13 mai 1950 : il est condamné à 100 000 F. d’amende pour « complicité d’outrage aux
bonnes mœurs par voie du livre » pour J’irai cracher sur vos tombes.
8 juin 1950 : il rencontre Ursula Kübler à un cocktail chez Gallimard, qu’il épousera en
février 1954.
Juin 1950 : les Éditions Tourain - Le Guide Vert font paraître L’Herbe rouge et
L’Équarrissage pour tous, tandis que Elles se rendent pas compte sort aux éditions du
Scorpion.
Novembre 1951 : il entre au comité de rédaction de Jazz Hot auquel il collabore depuis
1946.
Avril 1952 : il crée le spectacle Cinémassacre à la Rose Rouge.
8 juin 1952 : il est nommé « Équarrisseur de Ire classe » par le Collège de Pataphysique.
Janvier 1953 : Ursula et Boris s’installent cité Véron (rejoints par Jacques Prévert en
1954), L’Arrache-coeur est édité chez Vrille, avec une préface de Raymond Queneau.
C’est son dernier roman, il le sait.
Été 1953 : Boris Vian remporte un grand succès avec la pièce théâtrale et musicale Le
Chevalier de Neige donnée à Caen.
8 mai 1954 : Mouloudji chante Le Déserteur au théâtre de l’Œuvre avec la fin réécrite
par Boris.
23 novembre 1954 : il enregistre pour la première fois une de ses chansons, La Java des
chaussettes à clous, avec Jimmy Walter au piano.
Novembre 1954 : il rencontre Alain Goraguer, pianiste, arrangeur et compositeur qu’il
considère comme un des meilleurs pianistes de jazz.
4 janvier 1955 : il chante en première partie aux Trois Baudets, sous l’impulsion de
Jacques Canetti, entre Fernand Raynaud et Pierre Repp.
15 juin 1955 : les paroles de sa chanson La Java des bombes atomiques sont publiées
dans Le Canard enchaîné.
Octobre 1955 : Jacques Canetti le fait entrer chez Philips où il crée l’illustre collection
« Jazz pour tous ».
20 juillet 1956 : il fait une première crise d’œdème pulmonaire.
Janvier 1957 : il passe directeur artistique adjoint pour le jazz et les variétés chez Philips.
31 janvier 1957 : c’est l’avant-première dans une forme opéra du Chevalier de Neige à
Nancy, dont il a signé le livret et dont Georges Delerue a réécrit la musique.
Août 1957 : il écrit sa pièce Les Bâtisseurs d’empire pendant ses vacances à Saint-
Tropez.
Mai 1958 : il devient directeur artistique du label Fontana chez Philips.
12 mai 1958 : la chanson Faut rigoler, écrite par Boris avec Henri Salvador à la musique,
est déposée à la SACEM, c’est la 200 ou 300e sur les 600 chansons environ qu’il a écrites
depuis 4 ans.
14 janvier 1959 : il envoie sa lettre de démission à Fontana, il en avait « plein le Q » !
Mars 1959 : il tourne dans Les Liaisons dangereuses de Roger Vadim.
Avril 1959 : Eddie Barclay le nomme directeur artistique de sa maison de disques. Boris
Vian est fatigué et préfère travailler chez lui à son prochain opéra Le Mercenaire.
11 juin 1959 : champagne-acclamation du Baron Mollet sur la Terrasse des Trois-
Satrapes, cité Véron.
20 juin 1959 : il assiste à la projection privée du film tiré de J’irai cracher sur vos
                                                                                                  Création graphique :
tombes, son cœur le lâche…                                                                               Kévin Faroux

                                                                                                      7
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Écrire, toujours écrire
      «  J’ai essayé de raconter aux gens des histoires qu’ils n’avaient jamais lues.
  Connerie pure, double connerie : ils n’aiment que ce qu’ils connaissent déjà ; mais moi j’y
                    prends pas plaisir, à ce que je connais, en littérature.
                           Au fond, je me les racontais les histoires.
                         J’aurais aimé les lire dans les livres d’autres.»
                                                                   Boris Vian, Journal à rebrousse-poil

Selon ses notes personnelles, Boris Vian commence à écrire à l’âge de 23 ans, soit en 1943. C’est
en 1947 qu’il écrit son premier roman Troubles dans les Andains qui ne le satisfait pas. Il
récidive avec Vercoquin et le Plancton et à l’occasion d’une rencontre avec Raymond Queneau,
le roman sera publié chez Gallimard la même année.
Celui-ci croit en la consécration mais déchante rapidement car certains membres du jury du
Prix de la Pléiade de Gallimard ne soutiennent pas son nouveau roman, L’écume des jours, qui
paraîtra en avril 1947, alors que J’irai cracher sur vos tombes, son pastiche de roman noir
américain, sort en novembre 1946.
La production de Boris Vian est phénoménale, il sillonne Saint-Germain-des-Prés la nuit et
écrit le jour, ne dormant que très peu. Mais il n’avait pas prévu que les choses tourneraient ainsi
: le scandale de J’irai cracher sur vos tombes stigmatise le jeune auteur dans un rôle qui ne lui
déplaît pas un court temps puis lui pèse sérieusement.
Il enchaîne sous les deux plumes et presque simultanément l’écriture de L’automne à Pékin, Les
morts ont tous la même peau, Et on tuera tous les affreux, Les fourmis, L’herbe rouge,
L’équarrissage pour tous, Elles se rendent pas compte et esquisse son futur Arrache-cœur.

Il se lance alors à corps perdu dans toutes sortes
d’aventures et de collaborations, car il vit pour l’écriture
et n’est jamais en mal d’inspiration. Il poursuit
notamment un genre qui lui va bien : la nouvelle, dont
émergeront Les fourmis, Le loup-garou ou encore Les
chiens, le désir et la mort. Il publie également des
Chroniques du menteur dans la célèbre revue de Jean-
Paul Sartre et Simone de Beauvoir Les temps modernes,
ainsi que des dizaines d’articles présentés notamment
dans Jazz-Hot et dans le journal Combat, alors dirigé
par Albert Camus.
Malgré les appuis de Queneau et Sartre, Boris Vian
restera sur la touche entre écriture et musique.
                                                                                   DR Cohérie Boris Vian

Il rencontre une dernière chance avec Jérôme Lindon,
des éditions de Minuit, qui souhaite republier L’automne à Pékin et peut-être également L’herbe
rouge mais le succès n’est pas au rendez-vous et Boris est passé à autre chose et s’investit
notamment dans de riches échanges au sein du Collège de ‘Pataphysique.

                                                                                                     8
VIAN, TOUJOURS VIVANT - DOSSIER D'ACCOMPAGNEMENT - Labo des histoires
En 1956 et en 1957, il est victime d’œdèmes pulmonaires dont il ressort chaque fois plus
diminué. Alors, couché ou assis, il continue d’écrire chansons, comédies, accepte encore des
traductions. Si le monde de la littérature tourne le dos à Boris Vian, le monde musical le
plébiscite encore et encore. Pourtant il avoue un soir à Magali Noël combien il a mal de ne pas
avoir été reconnu comme un « vrai » écrivain pour son Écume des Jours... Jusqu’à son dernier
souffle, en 1959, il noircit carnets et feuilles volantes.
Il laisse sur son bureau le 23 juin 1959 une ébauche d’opéra intitulé Le Mercenaire et quelques
traductions de chansons américaines sur lesquelles il travaillait. Ursula n’a pas encore découvert
les poèmes de Je voudrais pas crever et nombre de nouvelles, chroniques, romans inachevés,
arguments de ballets, traductions et chansons sont rangés sur ses étagères en attendant un jour
meilleur...
Perçu comme incontrôlable, unique en son genre mais sans genre précis, homme sans
compromis avec un zeste d’ironie, il continue pourtant sur sa trajectoire, laissant derrière lui
une trace indélébile qui est parvenue jusqu’à nous puisque ses écrits sont enseignés dans les
livres scolaires.
Pour Boris Vian, peu importe le genre pourvu qu’il écrive. S’intéressant à tout, il souhaite, avant
tout, rester un amateur éclairé et son œuvre est riche de sujets variés. Pourtant dans toute son
œuvre émergent la cruauté et la mort ; il écrit à de nombreuses reprises et sous différentes
formes son rejet de la guerre. Il rêve d’une société où l’humain n’aurait qu’à créer et se cultiver
pendant que les robots travailleraient pour lui...
A ce jour, c’est plus de dix mille pages qui sont éditées, avec une large proportion à titre
posthume. Ses livres ne cessent de faire l’objet de traductions sur tous les continents et des
centaines d’adaptations scéniques de son œuvre ont été interprétées un peu partout dans le
monde.

                                                       DR Cohérie Boris Vian

                                                                                                 9
VIAN, TOUJOURS VIVANT - DOSSIER D'ACCOMPAGNEMENT - Labo des histoires
Activité #1

                                      « – Prendras-tu un apéritif ? demanda Colin. Mon
                                      pianocktail      est   achevé,      tu    pourrais     l’essayer.
                                      – Il marche ? demanda Chick.
                                      – Parfaitement. J’ai eu du mal à le mettre au point, mais le
                                      résultat dépasse mes espérances. J’ai obtenu, à partir, de la
                                      Black and Tan Fantasy, un mélange vraiment ahurissant.
                                      – Quel est ton principe ? demanda Chick.
                                      – A chaque note, dit Colin, je fais correspondre un alcool,
                                      une liqueur ou un aromate. La pédale forte correspond à
                                      l’œuf battu et la pédale faible à la glace. Pour l’eau de Selbtz,
                                      il faut un trille dans le registre aigu. Les quantités sont en
                                      raison directe de la durée : à la quadruple croche équivaut le
                                      seizième d’unité, à la noire l’unité, à la ronde le quadruple
                                      unité. Lorsque l’on joue un air lent, un système de registre
                                      est mis en action, de façon que la dose ne soit pas augmentée
                DR Cohérie Boris Vian – ce qui donnerait un cocktail trop abondant – mais la
                                      teneur en alcool. Et, suivant la durée de l’air, on peut, si l’on
veut, faire varier la valeur de l’unité, la réduisant, par exemple au centième, pour pouvoir
obtenir une boisson tenant compte de toutes les harmonies au moyen d’un réglage latéral.
– C’est compliqué, dit Chick.
– Le tout est commandé par des contacts électriques et des relais. Je ne te donne pas de détails,
tu connais ça. Et d’ailleurs, en plus, le piano fonctionne réellement.
– C’est merveilleux ! dit Chick.
– Il n’y a qu’une chose gênante, dit Colin, c’est la pédale forte pour l’œuf battu. J’ai dû mettre
un système d’enclenchement spécial, parce que lorsqu’on joue un morceau trop « hot », il
tombe des morceaux d’omelettes dans le cocktail, et c’est dur à avaler. Je modifierai ça.
Actuellement, il suffit de faire attention. Pour la crème fraîche, c’est le sol grave.
– Je vais m’en faire un sur Loveless Love, dit Chick. Ça va être terrible.
– Il est encore dans le débarras dont je me suis fait un atelier, dit Colin, parce que les plaques
de protection ne sont pas vissées. Viens, on va y aller. Je le règlerai pour deux cocktails de
vingt centilitres environ, pour commencer.

                                                                     Boris Vian, L’Écume des jours,
                                                                           Le Livre de Poche, 1963.

                                                                                                    10
Activité #1
A la manière de Boris Vian, invente un objet du quotidien sous la forme d’un mot-valise puis
décris à l’un de tes amis l’utilité de cet objet et la manière dont il est possible de l’utiliser.
Respecte la forme du dialogue.

Suggestion : Pour composer ton mot-valise, fais attention à ce qu’on en comprenne le sens en
reconnaissant les deux mots.

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Activité #2
       Je voudrais pas crever               La belle que voilà
        Avant d'avoir connu             Mon Ourson, l'Ursula
    Les chiens noirs du Mexique          Je voudrais pas crever
      Qui dorment sans rêver                Avant d'avoir usé
          Les singes à cul nu        Sa bouche avec ma bouche
       Dévoreurs de tropiques        Son corps avec mes mains
       Les araignées d'argent           Le reste avec mes yeux
       Au nid truffé de bulles        J'en dis pas plus faut bien
       Je voudrais pas crever             Rester révérencieux
        Sans savoir si la lune          Je voudrais pas mourir
     Sous son faux air de thune          Sans qu'on ait inventé
           A un côté pointu                Les roses éternelles
          Si le soleil est froid     La journée de deux heures
         Si les quatre saisons           La mer à la montagne
    Ne sont vraiment que quatre          La montagne à la mer
           Sans avoir essayé              La fin de la douleur
         De porter une robe            Les journaux en couleur
     Sur les grands boulevards        Tous les enfants contents
          Sans avoir regardé            Et tant de trucs encore
       Dans un regard d'égout       Qui dorment dans les crânes
      Sans avoir mis mon zobe          Des géniaux ingénieurs
     Dans des coinstots bizarres         Des jardiniers joviaux
         Je voudrais pas finir         Des soucieux socialistes
       Sans connaître la lèpre          Des urbains urbanistes
        Ou les sept maladies            Et des pensifs penseurs
         Qu'on attrape là-bas            Tant de choses à voir
        Le bon ni le mauvais             A voir et à z-entendre
      Ne me feraient de peine         Tant de temps à attendre
            Si si si je savais         A chercher dans le noir
       Que j'en aurai l'étrenne           Et moi je vois la fin
            Et il y a z aussi       Qui grouille et qui s'amène
       Tout ce que je connais           Avec sa gueule moche
       Tout ce que j'apprécie           Et qui m'ouvre ses bras
       Que je sais qui me plaît       De grenouille bancroche
       Le fond vert de la mer            Je voudrais pas crever
    Où valsent les brins d'algues   Non monsieur non madame
          Sur le sable ondulé              Avant d'avoir tâté
        L'herbe grillée de juin      Le gout qui me tourmente
        La terre qui craquelle        Le gout qu'est le plus fort
        L'odeur des conifères            Je voudrais pas crever
        Et les baisers de celle           Avant d'avoir gouté
           Que ceci que cela            La saveur de la mort...

                                     Boris Vian, Je voudrais pas crever,
                                              Le Livre de Poche, 2013.

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Activité #2
En prenant pour exemple le poème de Boris Vian « Je voudrais pas crever », écris un texte
commençant par « Je voudrais pas crever avant… » et raconte tout ce que tu aimerais voir,
connaître, découvrir.

Suggestion : Tu peux écrire un texte en vers ou en prose, tu es libre de choisir la forme que tu
souhaites.
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Jazz !
                         «       Sans le jazz, la vie serait une erreur.      »
                                                                                             Boris Vian [citation]

Compositeur, interprète, parolier, chanteur, trompettiste, critique musical, directeur artistique,
musicien : durant toute sa vie, Boris Vian a baigné dans la musique (sa mère joue de la harpe et
du piano) sans pourtant l’avoir vraiment apprise. Ses parents lui choisissent un prénom
provenant d’un célèbre opéra : Boris Godounov de Modeste Moussorgski, inspiré d’une pièce
de Pouchkine.
La musique est un univers essentiel dans la vie de Boris Vian. Dès 1937, il s’inscrit au Hot Club
de France, présidé notamment par Louis Armstrong. Avec ses deux frères, il monte un groupe
amateur qui rejoindra en 1942 l’orchestre amateur de son ami Claude Abadie. Cet orchestre
amateur acquiert une certaine notoriété et animera de nombreuses soirées dont Boris Vian sera
l’organisateur, c’est ainsi qu’il sera surnommé le « prince de Saint-Germain-des-Prés ».
Après le scandale de J’irai cracher sur vos tombes et malgré ses problèmes cardiaques qui
l’obligeront à renoncer à la trompette, Boris Vian se concentre sur son goût pour le swing et le
jazz. Il devient directeur artistique chez Philips, écrit des chroniques pour le journal Jazz Hot et
continue d’écrire des chansons dont certaines seront plus tard interprétées par Serge
Gainsbourg, Juliette Gréco, Serge Reggiani, Henri Salvador ou encore Jeanne Moreau.

Il a écrit environ 600
chansons dont certaines
deviendront des « tubes »2
mais aussi des livrets
d'opéras, des arguments de
ballets et des comédies
musicales.
Du Déserteur à J'suis snob en
passant par Le blouse du
dentiste ou On est pas là
pour se faire engueuler,
Boris Vian étonne par la
variété de son répertoire.

                                      Miles Davis, Michelle et Boris Vian en 1948 - DR Archives Cohérie Boris Vian

2
  C’est Boris Vian qui a inventé ce mot pour désigner une chanson à succès. Avant cela, les gens du métier
employaient le mot « saucisson ».

                                                                                                                14
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