Vieilles forêts et Coléoptères saproxyliques Le rapprochement des respon-VIEILLESFORETS.COM
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
Arbre tombé au sol et envahi par la végétation dans une vieille forêt de Roumanie - Cliché Laurent Larrieu Ci-contre, vieux chêne à cavité en zone pastorale du Pays basque - Cliché Cyrille Van Meer Par Hervé Brustel et Jean Marie Savoie Vieilles forêts et Coléoptères saproxyliques L e rapprochement des respon- sur le terrain. Il implique de lais- un statut de réserve et la France est sables des politiques publi- ser vieillir des arbres et pourrir du loin derrière les autres pays d’Euro- ques, des gestionnaires fores- bois, pratique qui se heurte aux pe comparables sur le plan forestier. tiers et des entomologistes pour la pressions actuelles de nos gouver- conservation des vieux bois et des nants pour le bois énergie et les Ces « vieilles forêts » se rangent, Coléoptères saproxyliques a été matières premières renouvelables. selon les auteurs, sous des concepts déclenché par le rapport écrit par reflétant des interprétations contras- Martin Speight (ci-contre) pour le ■ LES VIEILLES FORÊTS tées : forêts anciennes, semi-na- Conseil de l’Europe en 1989. Après La forêt française est en expansion turelles, sauvages, primitives... plus de deux décennies de recher- mais c’est essentiellement une forêt Très souvent, le « repos » récent ches et d’actions, jeune, souvent gagnée sur des ter- – l’absence d’activités humaines – l’enjeu de conser- rains agricoles en déprise. On esti- permet une cicatrisation, au moins vation des orga- me qu’en 1830, elle n’occupait que dans l’aspect des peuplements. nismes qui vi- la moitié de sa surface actuelle. Les Pour autant, la maturation ne suf- vent aux dépens forêts où l’influence humaine est fit pas à restaurer toutes les carac- des vieux ar- restée négligeable (forêts ancien- téristiques d’une forêt naturelle, bres et du bois nes matures ou « vieilles forêts ») en particulier en matière de diver- mort est lar- ne représenteraient que 0,2% de la sité biologique, même si son fonc- gement com- surface forestière. Très morcelées, tionnement devient comparable. pris et relayé la moitié seulement a aujourd’hui Elle atteint un état proche de la na- I NSECTES 15 n°162 - 2011 (3)
L’indigénat des essences3 d’arbres et des flores liées aux ambiances forestières peut en premier lieu dé- terminer des ensembles d’espèces particuliers, depuis des phytopha- ges – comme par exemple le cha- rançon Rutidosoma fallax (Curcu- lionidé) vivant sur l’oxalis petite oseille Oxalis acetosella – jusqu’à l’ensemble des saproxylophages du chêne, du hêtre ou du sapin, es- sences caractéristiques de forêts au terme de leur évolution écologique. Cette typicité végétale ne suffit pas pour parler de « naturalité » fores- tière car on la retrouve dans des fo- Champignons Hericium sur bois mort de hêtre dans une vieille forêt des Pyrénées dans la réserve naturelle nationale de la Massane - Cliché Joseph Garrigue rêts très intensément exploitées par l’homme, sans gros et vieux bois, turalité originelle qui est en particu- pour améliorer la connaissance du forêts qui ne peuvent héberger que lier caractérisé par le retour de pro- fonctionnement des écosystèmes des faunes restreintes aux taxons cessus sylvigénétiques1 originaux, forestiers. Elles assurent la conser- thermophiles4 peu exigeants. rares en forêt exploitée : apparition vation des ressources génétiques, dans le couvert de phases de dé- servent de réservoir de biodiversité Des essences diversifiées, dont gradation (ou d’effondrement) et et maintiennent les possibilités de celles peu prisées des exploitants de phases d’innovation2 qui génè- séquestration du carbone. Ces res- forestiers, comme par exemple le rent de grandes proportions de bois sources sont indispensables pour tilleul, le tremble, le charme ou morts. Il en résulte une mosaïque nos paysages forestiers de plus en certaines espèces pionnières (sau- instable et complexe de stades fo- plus fragmentés par les activités les, bouleaux…) sont très riches restiers (clairières, fourrés, jeunes humaines et soumis à des risques en Coléoptères saproxyliques spé- peuplements, grands arbres, etc.) de changements climatiques rapi- cifiques : Bupreste du tilleul (Lam- variés permettant d’assurer l’exis- des et d’arrivée de nouveaux ra- tence de très nombreuses espèces vageurs et maladies. Ces vieilles Quelques caractéristiques fonda- mentales des forêts anciennes animales et végétales, quelles que forêts doivent donc être une préoc- matures : soient leurs exigences écologi- cupation au cœur des politiques pu- ■ un âge des plus vieux arbres (qui ques. Parmi les groupes taxino- bliques issues des lois du Grenelle donne une idée de l’âge minimum de miques les plus favorisés, on peut de l’environnement : « Trame verte la couverture forestière) proche de leur longévité naturelle ; citer notamment les oiseaux, les et bleue » et « Stratégie de création ■ une structure caractérisée par une insectes (en particulier les Colé- des aires protégées ». stratification importante du couvert ; ■ une diversité des essences ligneuses optères saproxyliques), les cham- plus importante qu’en forêt exploitée, pignons, les chiroptères et autres ■ INSECTES SAPROXYLIQUES LIÉS AUX car intégrant des espèces « non petits mammifères. Parmi tous les VIEILLES FORÊTS marchandes » ; ■ un volume sur pied très important, de milieux naturels, c’est dans les Les « vieilles forêts » offrent des 600 à 1000 m3/ha en station riche, là vieilles forêts que la diversité bio- conditions de vie indispensables où une forêt gérée économiquement n’en comporte tout au plus que quel- logique est la plus importante, per- à certains organismes saproxy- ques centaines dans les peuplements mettant de les considérer comme liques, Coléoptères et champi- les plus âgés ; ■ une quantité notable de bois mort, des écosystèmes exceptionnels. gnons en particuliers, et, en retour, dans des états variés de décomposi- ces organismes aux exigences et tion, généralement comprise entre 10 et 200 m3/ha, contre un peu plus de Les vieilles forêts constituent les sensibilités variées, peuvent de- 2 m3/ha en moyenne dans les forêts témoins du fonctionnement ori- venir des indicateurs utiles à la exploitées ; ■ un nombre important de troncs morts, ginel des forêts et représentent lecture de la qualité biologique en particulier des tiges de gros donc le modèle le plus pertinent des forêts et de leur naturalité. diamètre ; ■ une fréquence très importante de 1. Ensemble des phases évolutives d’une forêt, de l’installation (stades pionniers) à la maturité défauts sur les arbres : cavités, 2. Régénération par semis avec présence d’essences pionnières comme les saules, les bouleaux... fentes… qui peuvent devenir autant 3. Essences indigènes : qui ont naturellement toujours été présentes sur le site. de microhabitats particuliers pour la 4. Qualifie les milieux chauds ouverts par opposition à sciaphile, de l’ombre, des ambiances faune saproxylique. forestières plus fraîches I NSECTES 16 n°162 - 2011 (3)
plement. Une ripisylve (ensemble morts mais qui n’est pas regardant d’arbres le long d’un cours d’eau) sur l’essence et est très endurant peut être mature avant 80 ans alors à la marche. Certains charançons qu’un pin à crochet (en haute mon- des genres Acalles et proches, liés tagne) sera naturellement peu sus- aux branches mortes, peu mobiles, ceptible d’accueillir des cortèges peuvent survivre sur des brindilles saproxyliques diversifiés avant de bruyère dans des landes secon- plusieurs siècles. Les phases de sé- daires ayant remplacé leurs forêts Stenostola dubia dont les larves se développent sur tilleul nescence des arbres, survenant dans d’origine. Par contre, d’autres espè- Cliché DR le dernier tiers de leur propre cycle ces (A. camelus, A. echinatus ou A. sylvigénétique, sont tronquées dans fallax et Ruteria hypocrita) font fi- la majorité des forêts exploitées ; gure de « fantômes du passé » dans on les observe parfois relative- les sites anciens où ils restent pré- ment plus fréquemment dans des sents. Quand ces Coléoptères sont parcs artificiels ou sur des arbres et à la fois exigeants et peu mobiles, haies champêtres. L’entomofaune leurs populations sont en danger ; saproxylique répond toujours très c’est le cas de quelques genres sa- favorablement à la maturité des ar- proxyliques riches en endémiques bres mais cela ne suffit pas et il faut comme par exemple les Colydiidés des réservoirs d’espèces, permet- du genre Tarphius, ça et là signalés tant d’ensemencer ces nouveaux du sud-ouest du Bassin méditerra- sites favorables dans le paysage néen et particulièrement diversifiés environnant (de l’ordre de quel- dans les îles Atlantiques au sein ques centaines de mètres). Des ha- des laurisylves, formations fores- bitats fugaces dans l’espace et dans tières héritées de l’aire tertiaire. le temps, comme par exemple des pleurotes ou des foliotes croissant sur des bois morts, sont détectés de loin par certaines espèces (Triplax spp Col. Erotylidé, Mycetopha- Triplax sp. se nourrissant de pleurotes en gus spp Col. Mycétophagidé) et se forêt de Fontainebleau Cliché Vincent Lefebvre trouvent colonisés rapidement et massivement. Les habitats durables pra rutilans, (Buprestidé), Saperda et relativement stables comme les octopunctata, Oplosia fennica et cavités hébergent à l’inverse des es- Stenostola spp. (Cérambycidés), pèces moins mobiles et moins pro- Isorhipis marmottani (Eucnemidé). lifiques (comme le Pique-prune Os- Au même titre que les phytophages moderma eremita Col. Cétoniidé). primaires (qui attaquent les arbres sains), ces espèces liées à des essen- L’ancienneté et la continuité du Morime rugueux sur sol forestier ces toujours inégalement distribuées couvert forestier : toutes les espèces Cliché Nicolas Gouix semblent relativement mobiles et ne sont pas mobiles par le vol et cer- capables de réagir favorablement à taines ne supportent pas de quitter l’offre massive de ressources suite une ambiance forestière fraîche et à une trouée liée à une tempête par ombragée pour coloniser une nou- exemple, à condition bien entendu velle entité boisée distante et isolée que des zones refuges existent aux par des milieux hostiles (cultures, environs (à quelques kilomètres). zones construites, voire forêt arti- ficielle d’essences exotiques dans La maturité des arbres : c’est un certains cas). Les Coléoptères sa- point déterminant pour l’offre des proxyliques aptères sont rares et différents microhabitats, tant pour comprennent quelques espèces très les champignons que pour l’ento- rustiques, longévives, peu spéciali- mofaune saproxylique. Cette ca- sées… comme le Morime rugueux ractéristique s’apprécie différem- Morimus asper (Cérambycidé) qui Le charançon Ruteria hypocrita en forêt de ment pour chaque essence ou peu- exige tout de même des gros bois Fontainebleau - Cliché Vincent Lefebvre I NSECTES 17 n°162 - 2011 (3)
tégorie particulière parmi les forêts Le Groupe d’études des vieilles fo- anciennes : les forêts refuges d’es- rêts pyrénéennes (GEVFP) mène pèces en situation précaire. Elles ont une étude pluridisciplinaire – dont souvent été retenues comme habitats en entomologie – qui a mis ainsi d’espèces pour constituer des sites en évidence quelques vielles fo- Natura 2000 et leur connaissance, rêts peu connues comme le massif sans être complète, est déjà avan- du Burat et le Bois-Neuf (Haute- cée, au moins pour les sites les plus Garonne) et la sapinière du Bar- étendus et les plus remarquables. rada (Hautes-Pyrénées). Le WWF procède de même dans le Sud-Est, Aujourd’hui, les forêts présentant depuis les montagnes de l’Aude, un fort degré de naturalité doivent jusqu’aux Hautes-Alpes et en Corse. être recherchées dans les zones d’altitude, surtout aux étages mon- ■ SITUATIONS CONTRASTÉES DANS tagnard et subalpin, beaucoup plus L’OUEST PALÉARCTIQUE rarement à l’étage collinéen du fait Hors de nos frontières, des situa- des plus forts impacts des activités tions comparables à la France ou humaines à basse altitude. La pré- singulières commencent à être do- sence d’accidents topographiques, cumentées pour les Coléoptères sa- comme par exemple les gorges et proxyliques. Dans les Carpates, de Vieille forêt des Pyrénées falaises dans le Verdon (Var) ou le grandes forêts matures roumaines, Cliché Michel Bartoli plateau de Sault (Aude), peut être slovaques, ukrainiennes ou polonai- aussi garante de la conservation de ses, comme par exemple Bialowie- ■ VIEILLES FORÊTS DE FRANCE, lambeaux forestiers restés long- za, bien qu’ayant toujours connu REFUGES D’ESPÈCES temps en libre évolution. des activités humaines, présentent, En France, des massifs forestiers Les enquêtes auprès des gestionnai- en plus de cortèges saproxyliques comme ceux de Fontainebleau (Sei- res de terrain permettent d’identifier extrêmement riches, une dimension ne-et-Marne), Compiègne (Oise), des sites n’ayant fait l’objet d’aucu- unique dans les forêts de plaine Grésigne (Tarn), de Sare (Pyrénées- ne opération sylvicole depuis au ouest-paléarctiques : la grande fau- Atlantiques), de la Sainte-Baume moins 50 ans, mais cette approche ne de vertébrés aimant les refuges (Bouches-du-Rhône), de la Mas- ne tient pas compte de l’âge réel sylvestres les plus riches, avec les sane (Pyrénées-Orientales) sont les des boisements concernés. Pour en lynx, ours, élan, bison… hauts-lieux reconnus de la biodi- isoler les forêts vraiment anciennes, versité entomologique. Mais c’est à forte naturalité, des accrus sur En Scandinavie, et en Finlande davantage aux particularités de leur d’anciens terrains agricoles aban- en particulier, la continuité spa- gestion passée et à leur ancienneté donnés dans la première moitié du tio-temporelle de la couverture qu’à leur naturalité qu’elles le doi- XXe siècle, le recours aux cartes boisée est la plus forte d’Europe ; vent, ces sites ayant toujours fait anciennes et aux archives reste in- cependant, la forte pression de la l’objet jusqu’aujourd’hui d’une in- dispensable. La présence de cer- sylviculture a considérablement ra- tense utilisation par l’homme : cou- taines espèces rares et exigeantes jeuni les peuplements qui peinent pe de bois, charbonnage, pâturage. joue un double rôle d’alerte et de à offrir les niches écologiques des Ces forêts constituent donc une ca- validation dans ce type d’approche. Coléoptères saproxyliques les plus Ci-dessus, vieille forêt en Roumanie - Cliché Laurent Larrieu. À droite, bison surpris en forêt primaire de la Bialowieza (Pologne) - Cliché domaine public I NSECTES 18 n°162 - 2011 (3)
Quelques Coléoptères saproxyliques emblématiques et leurs rapports aux vieilles forêts Environ 2 500 espèces de Coléoptères saproxyliques existent prune vit dans de grosses cavités de feuillus surmatures divers en France ; parmi elles, 10 espèces seulement bénéficient d’un (châtaigniers d’anciens vergers, saules têtards, chênes émondés statut légal au niveau national (protection, annexe de la direc- et têtards des bocages, ensembles d’arbres champêtres sous les- tive habitat), elles représentent ainsi des outils de conserva- quels paît le bétail, très vieux hêtres ou chênes forestiers…). Le tion en lien avec leurs ressources vitales liées au bois. Pour Grand Capricorne colonise les parties aériennes bien exposées autant, ces 10 espèces ne sont pas toujours dans de vieilles des vieux chênes dépérissants. Le Taupin violacé mène une vie forêts et certaines de ces formations n’hébergent pas d’es- cryptique dans les cavités basses très évidées et évoluées des pèces caractéristiques à statut qui permettraient d’aider à les feuillus forestiers ou champêtres. Le Lucane cerf-volant se déve- conserver. loppe dans les parties volumineuses mortes sous terre de tous les De ces 10 espèces, la moitié est peu utilisable pour la feuillus (souches, racines, parties d’arbres vivants ou restes d’ar- conservation : 3 d’entres elles sont extrêmement localisées bres morts). Les recherches récentes ont montré des capacités et méconnues (les Bostrichidés Stephanopachys linearis et de dispersion de ces espèces supérieures à ce qui était jusque-là S. substriatus, le Carabidé Rhysodes sulcatus) et la présence mesuré ou supposé, de l’ordre de 1 km pour le Pique-prune en un actuelle en France est sujette à caution pour Phryganophilus seul vol, et au moins 2 km pour le Lucane. On vient en outre de ruficollis (Mélandryidé) et Cucujus cinnaberinus (Cucujidé). mettre en évidence le caractère « d’espèce ingénieur des écosys- Rosalie des Alpes - Cliché Peter Krimbacher , licence Creative Pique-prune - Cliché Lionel Valladares Commons 3.0 ■ La Rosalie des alpes Rosalia alpina (Cérambycidé) est surtout tèmes boisés » du Grand Capricorne, dont les forages profonds dépendante des hêtres morts sur pied ; elle peut aussi se déve- et larges dans le bois dur de chênes morts ou mourants créent de lopper dans de l’aulne ou du frêne morts, en ripisylves. Actuelle- nombreux micro-habitats aux trajectoires de maturation différentes ment répartie en aire discontinue, elle est présente en populations sous l’action et la colonisation d’autres organismes (champignons, éparses dans les Pyrénées, les Alpes, en Provence, dans le Mas- insectes, chiroptères…). sif central, le Val-de-Loire, sur la façade atlantique et en Corse. Sa réponse rapide à l’offre d’habitat en fait un bon indicateur de Ces éléments auxquels s’ajoute la relative facilité de leur détection maturité et de restauration des milieux boisés là où elle est pré- directe ou indirecte (trous de Grand Capricorne, crottes du Pique- sente. Cette espèce p ne suffit p pas p pour caractériser et aider à prune) permettent d’utiliser ces espèces ensemble pour mettre en la conservation de toutes les vieilles forêts fo mixtes et évidence la qualité de la forêt de plaine telle qu’elle est ou ses résineuses de montagne car elle e n’est pas besoins de restauration. Par contre, la protection stricte du Grand présente dans d tous nos Capricorne est malheureusement inadaptée : c’est un insecte massifs montagneux commun et localement abondant au sud de la France et il faut nationaux. nationau considérer bien d’autres espèces de Coléoptères que celles pré- sentes dans les listes d’espèces protégées pour repérer, en vue de Le Lucane Luc cerf-vo- ■ leur conservation, tous les types de vieilles forêts. lant Lucanus Luc cervus (Lucanidé), (Lucanid le Grand Capricorne Capricor Cerambyx cerdo (C (Cérambycidé), Le Taupin violacé Li- moniscus violaceus (Élatéridé) et le Pique- prune Osmoderma Osm ere- mita (Cét (Cétoniidé) sont de bonnes espèces in- dicatrices de la qualité du réseau rése boisé de plaine (continuum d’arbres, d’arb cham- pêtres pêtr ou fores- tiers, tiers dont arbres sur-matures sur- à cavités cav hautes ou basses). Sur Lucane cerf-volant mâle le plan biologi- Aquarelle de Xavier Houard que, qu le Pique- Grand Capricorne - Cliché Robert Minetti I NSECTES 19 n°162 - 2011 (3)
Cucujus cinnaberinus - © Nicolas Gouix et Hervé Brustel Grande Cétoine bleue - Cliché Pierre Zagatti exigeants en vieux bois. Les Co- de conservation des cortèges sa- (pillés, ébranchés, mutilés). La fau- léoptères répondent très bien aux proxyliques : les déhésas ibériques. ne xylophage en tire encore profit ; opérations récentes de restauration Sous les chênes lièges exploités et les endémiques saproxyliques terri- (bois brûlés, coupes abandonnées autres chênes caducifoliés ou sem- coles sont par contre introuvables, ça et là, ilôts non exploités, cou- pervirents, souvent taillés, creux et disparus peut-être avant d’avoir été pes en souches hautes) et à un ré- surmatures, paissent sur d’immen- décrits dans certains lieux. ■ seau lâche mais largement réparti ses étendues dépourvues de vieilles Les auteurs de vieilles forêts en réserve. Des forêts (sud, centre-ouest et ouest espèces très rares considérées au de la péninsule ibérique) cochons Université de Toulouse UMR INP Dynafor bord de l’extinction (Cucujus cin- et bovins. Taupin violacé, Grande École d’ingénieurs de Purpan naberinus, Tragosoma depsarium, Cétoine bleue Eupotosia mirifica et 75 voie du TOEC Stephanopachys spp., etc.) recolo- bien d’autres Coléoptères exigeants 31075 Toulouse cedex 3 Contact : herve.brustel@purpan.fr nisent massivement ces espaces. y trouvent refuge. En zone méditerranéenne, on doit Bibliographie au vin, à la corrida et au jambon La Macaronésie est intéressante à ■ Barthod C., 1997. La protection des de belota une situation originale plus d’un titre, en particulier pour ses forêts dans la politique forestière fran- çaise. Cas particulier des réserves inté- cortèges endémiques de Coléoptères grales. Communication orale, colloque saproxyliques terricoles fidèles aux Naturalité et forêts d’Europe, Conseil de forêts où ils ont coévolué depuis des l’Europe, Strasbourg. ■ Bergeron J.F., Bouchard R., Villeneuve millénaires. Aux Canaries, les mi- N., 1997. Les écosystèmes forestiers lieux boisés sont isolés. Maintenant exceptionnels du Québec, éléments- clés de la biodiversité. L’Aubelle, 117, protégés (donc stables en surface et 8-11 soumis à la restauration et la matu- ■ Brustel, H., 2004. Coléoptères saproxy- liques et valeur biologique des forêts ration), ils révèlent facilement leurs françaises. Les dossiers forestiers de richesses. À Madère, plus humide l’ONF, 297 p. ■ Buse, J., 2011. “Ghosts of the past“: et moins anciennement peuplée par flightless saproxylic weevils (Coleoptera, l’homme – le minimum forestier re- Curculionidae) are relict species in ancient woodlands. J Insect Conserv. monte vraisemblablement à un siè- pp. 1-5. cle – la faune y est très riche mais ■ Schnitzler A., Génot J.-C., Wintz M., introuvable car les lambeaux an- 2008. Espaces protégés : de la gestion conservatoire vers la non-intervention. ciens sont isolés dans une immense Le Courrier de l'environnement de l'IN- forêt de reconquête. Au Maroc enfin, RA, n°56, pp. 29-43. En ligne à www. nous observons actuellement un mi- inra.fr/dpenv/pdf/schnitlzerc56.pdf ■ Schnitzler-Lenoble A., 2002. Ecologie nimum forestier, les gens ne pouvant des forêts naturelles d’Europe. Biodi- plus piller davantage le milieu et y versité, sylvigenèse, valeur patrimoniale des forêts primaires. Tec&Doc, 271 p. survivre. Les derniers lambeaux fo- ■ Speight M.C.D., 1989. Les invertébrés restiers anciens et matures sont com- saproxyliques et leur protection. Conseil de l’Europe, coll. sauvegarde de la na- plètement déstructurés par le surpâ- ture, 42 : 1-78. Version anglaise en ligne turage qui exerce une pression sur les à : http://entomology.lsu.edu/lsam/intro/ Ripisylves à têtards de frênes en Espagne speight1989c.pdf Cliché Hervé Brustel sols (décapés) et sur les peuplements I NSECTES 20 n°162 - 2011 (3)
Vous pouvez aussi lire