Ajaccio, Palais Fesch-musée des Beaux-Arts - Rencontres à Venise: Étrangers et Vénitiens dans l'art du

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Ajaccio, Palais Fesch-musée des Beaux-Arts - Rencontres à Venise: Étrangers et Vénitiens dans l'art du
Rencontres à Venise: Étrangers et Vénitiens dans l’art du
                        XVIIe siècle

                                   Commissariat :

Linda Borean, professeur d’histoire de l’art moderne, Università di Udine
Stefania Mason, professeur d’histoire de l’art moderne, Università di Udine
Andrea Bacchi, directeur de la Fondation Federico Zeri, Università di Bologna

         Ajaccio, Palais Fesch-musée des Beaux-Arts
                  29 juin – 1er octobre 2018
Ajaccio, Palais Fesch-musée des Beaux-Arts - Rencontres à Venise: Étrangers et Vénitiens dans l'art du
Sommaire

Fiche Presse 01        Présentation de l’exposition Rencontres à Venise: Étrangers et
                       Vénitiens dans l’art du XVIIe siècle

Fiche Presse 02        Propos de l’exposition

Fiche Presse 03        Sections de l’exposition

       Section 1 : Visions célestes et cauchemars terrestres
       Section 2 : « La mort viendra » : homicides, suicides, martyrs et mémento mori
       Section 3 : Anciens et nouveaux protagonistes entre le sacré et le profane
       Section 4 : Allégories
       Section 5 : Portraits et autoportraits
       Section 6 : À l’origine de la création artistique
       Section 7 : Vers le nouveau siècle

Fiche Presse 04        Le Palais Fesch et ses collections

Fiche Presse 05        Informations pratiques
Ajaccio, Palais Fesch-musée des Beaux-Arts - Rencontres à Venise: Étrangers et Vénitiens dans l'art du
Présentation de
                                FICHE PRESSE 01                                 l’exposition

Rencontres à Venise: Étrangers et Vénitiens dans l’art du XVIIe siècle

                            Le Palais Fesch-musée des Beaux-Arts d’Ajaccio organise
                            durant l’été 2018 une exposition dédiée à l’art vénitien du
                            XVIIe siècle, la première sur le territoire français.

                            En 1959 fut organisée à Venise une première exposition
                            fondamentale sur la peinture vénitienne du XVIIe siècle : un
                            évènement qui ouvrit à la recherche de nouvelles pistes,
                            débouchant notamment en 1981 sur les deux volumes de
                            Rodolfo Palluchini et sur une série de monographies et de
                            catalogues raisonnés autour de ses principaux protagonistes.
                            Le siècle reste toutefois - à tort – négligé, coincé entre le
                            siècle des Génies et celui de la Gloire, pour paraphraser deux
                            expositions célèbres sur le XVIe et le XVIIIe siècle vénitien.
                            Le baroque vénitien constitue pourtant une période très riche
                            du point de vue des propositions stylistiques, active sur le
                            circuit international du marché, ainsi que l’ont mis en
                            évidence de récentes études sur le collectionnisme et le
                            commerce de l’art.
                            L’exposition que nous proposons ici entend montrer la vitalité
                            et la variété de l’école picturale vénitienne du Seicento qui se
                            renouvelle par des idées originales, apportées surtout par des
                            artistes étrangers, dont les forces locales vont s’emparer en les
                            mûrissant. Les critiques d’art de l’époque – en premier lieu
                            Carlo Ridolfi (1648) et Marco Boschini (1660) – marquent
                            l’aboutissement d’une période de transformation où les
                            peintres ont dû s’adapter aux nouvelles exigences de la
                            commande publique et surtout privée. Cette dernière jouera un
                            rôle de premier plan au XVIIe siècle vénitien, en
                            accompagnant        le     développement        grandissant   du
                            collectionnisme,      un     phénomène       crucial    pour   la
                            compréhension de la peinture vénitienne baroque, de sa
                            fortune et de sa diffusion, non seulement à l’intérieur des
                            frontières de la Sérénissime, mais jusqu’aux cours
                            européennes.
                            Les artistes et les œuvres ont été sélectionnés pour offrir un
                            panorama de la période la plus dense de la peinture
                            vénitienne, comprise entre 1630 et 1670, c’est-à-dire depuis
                            l’arrivée des “étrangers” (Fetti, Liss, Strozzi), sans toutefois
                            oublier les “nouveautés” apparues dès avant les années vingt
                            (avec par exemple Saraceni de retour de Rome), et le plein
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épanouissement de la nouvelle génération vénitienne – celle
née pendant la terrible épidémie de peste. Cette génération fut
en mesure de donner une nouvelle accélération aux diverses
typologies de la peinture, avec l’impulsion encore une fois
donnée par des personnalités d’autres écoles, comme le
Florentin Sebastiano Mazzoni ou le Génois Giambattista
Langetti.
Ce dernier est le chef de file du courant des tenebrosi, un
mouvement plutôt éphémère, favorisé par l’arrivée dans la
ville d’œuvres de Luca Giordano et en nette rupture du point
de vue des compositions et des solutions formelles avec la
production de Liberi ou de Forabosco par exemple. Mais les
ténèbres quittèrent rapidement les ciels de la peinture
vénitienne et avec Sebastaino Ricci et Giambattista Tiepolo la
lumière reprit pleinement ses droits.

L’articulation de l’exposition combine la succession
chronologique à des noyaux thématiques relatifs aux genres et
à l’iconographie, mettant en évidence les échanges entre
artistes locaux et étrangers ainsi que la fortune particulière de
certains sujets, tels que les portraits et autoportraits d’artistes,
catégorie d’un intérêt notable étant donné que c’est
précisément au XVIIe siècle que la position professionnelle
des peintres connaît une première reconnaissance avec la
création du Collège des peintres. D’autres sujets se
développent tels qu’allégories des arts, visions célestes, héros
et héroïnes de la bible ou de l’histoire antique. Enfin les
thèmes macabres et la mort violente semblent
particulièrement exciter l’imagination des commanditaires
comme des artistes.
Le choix des œuvres et leur combinaison reflètent une
transformation essentielle survenue à Venise au XVIIe siècle
dans le milieu artistique : la diminution de la commande
publique (surtout venant de l’État) et l’accroissement parallèle
de la production de tableaux destinés à des collections privées
et à un commerce qui commençait à prendre un caractère
international.
Les œuvres choisies proviennent de Venise et surtout de
musées français, lesquels comptent un nombre significatif
d’œuvres de peintres vénitiens de grande qualité. Les œuvres
de collections et de musées européens ont été intégrées
seulement lorsqu’elles manquaient en France. L’exposition se
clôt d’ailleurs par un hommage à la France : L’Allégorie de la
France en Minerve, “morceau de réception” présenté par
Sebastiano Ricci à l’Académie Royale en 1718.

Le Palais Fesch-musée des Beaux-Arts d’Ajaccio constitue le
lieu idéal pour cette exposition, qui devient ainsi le troisième
volet d’un triptyque sur la culture figurative du Seicento
italien, après celles dédiées à Florence et à la Lombardie.
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FICHE PRESSE 02                    Propos de l’exposition

Venise dans le XVIIe siècle devient le théâtre où circulent des
peintres d’origines géographiques diverses, chacun avec son
apport personnel au développement d’une école profondément
hétérogène, caractérisée par l’osmose d’énergies locales et
étrangères. Au début des années 1620 déjà, des talents formés
ailleurs étaient arrivés dans la ville, il suffit de penser à
Domenico Fetti et Johann Liss. Mais c’est surtout après la
peste de 1630 que l’effet produit par la venue de tant d’artistes
étrangers devient significatif, en rendant conceptuellement
problématique la définition du peintre vénitien. Au-delà de
cette considération, l’apport du Génois Bernardo Strozzi, du
Florentin Sebastiano Mazzoni, du Romagnol Guido Cagnacci
et du Bavarois Johann Carl Loth, pour ne citer que quelques
noms, est indéniable dans les décennies du milieu du siècle.
Toutefois, ce phénomène ne signifie pas que les artistes
locaux (c’est-à-dire natifs de Venise) - comme Tiberio
Tinelli, Girolamo Forabosco, Pietro Liberi, Giulio Carpioni et
Antonio Zanchi - jouent un rôle secondaire, parce que c’est
justement la confrontation et les interconnections entre ceux-
ci et les étrangers qui donnent naissance à l’originalité de la
culture artistique du Seicento vénitien.

L’exposition est organisée en séries de thèmes relatifs aux
genres et aux iconographies qui illustrent les échanges entre
les artistes locaux et étrangers, et le succès particulier de
certains sujets qui semblent attirer l’attention des
commanditaires et des artistes : visions extatiques, héros ou
héroïnes tirés de la Bible et de l’Antiquité, portraits et
autoportraits, allégories, thèmes macabres ou privilégiant la
mort violente. Des exemples du parcours de création depuis sa
phase initiale, avec un choix, quoique limité, de la production
graphique jusqu’à celle finale des modèles à l’huile qui
précèdent immédiatement la solution définitive, entendent
faire pénétrer plus en profondeur dans la pratique du métier
d’artiste.
Le choix des toiles, accompagnées d’une sélection de
sculptures, realisées par Gian Lorenzo Bernini, le Flamand
Giusto Le Court ou le Génois Filippo Parodi, en révélant
combien le sort de la sculpture du Seicento vénitien est
marqué aussi, positivement, par la présence d’artistes
étrangers, reflète une transformation cruciale qui a eu lieu à
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Venise au XVIIe siècle dans le ferment des dynamiques
artistiques : la réduction des commandes publiques (surtout de
la part de l’État) et l’augmentation parallèle de la production
de tableaux et de sculptures « de chambre » destinée au
collectionnisme privé et à un commerce qui commence à
prendre des proportions internationales.
Les œuvres choisies, parmi lesquelles certaines n’ont encore
jamais été exposées, proviennent de Venise, grâce à la
collaboration des Gallerie dell’Accademia et à la disponibilité
généreuse de collectionneurs privés, mais surtout des musées
français, qui possèdent de nombreux témoignages de grande
qualité d’auteurs vénitiens de l’époque baroque. L’exposition
apparaît donc comme l’occasion d’apprécier le patrimoine des
institutions muséales françaises, et s’achève de façon
significative avec l’Allégorie de la France sous les traits de
Minerve, le morceau de réception que Sebastiano Ricci a
envoyé à Paris en 1718 pour son admission à l’Académie
Royale de peinture et de sculpture.
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FICHE PRESSE 03                 Sections de l’exposition

                               Section 1 : Visions célestes et cauchemars terrestres

                               Une clientèle de niveau social divers et culturellement active,
                               avertie dans les domaines de la musique, du théâtre, des
                               discussions littéraires et des débats théologiques, plus
                               dynamique que celle des siècles précédents, entraîne des
                               demandes de thèmes inhabituels, visionnaires ou de caractère
                               érotique. La figure de la femme y assume un rôle dominant,
                               dans le domaine religieux aussi bien que profane, comme on
                               peut le constater dans cette première section.
                               L’inquiétude et l’angoisse du temps touchent en profondeur
                               l’expressivité d’artistes d’origine géographique et de
     Domenico Fetti,
      La Mélancolie,           formation diverses. Un Romain (Domenico Fetti), un
Huile sur toile, 171x128 cm    Allemand (Johann Liss), un Florentin (Sebastiano Mazzoni) et
Musée du Louvre, ©RMN-         un Vénitien (Pietro della Vecchia) vont partager le choix de
 Grand Palais (musée du
  Louvre)/ Gérard Blot         travailler dans la ville lagunaire et de dialoguer avec son
                               extraordinaire patrimoine culturel, surtout le mythique
                               Cinquecento. Cette tradition glorieuse sera cependant revisitée
                               à travers l’expérimentation de formes nouvelles et de
                               nouveaux modèles.
                               Les personnages des peintures exposées ici incarnent tous,
                               chacun à sa façon, une expérience intérieure traduite en
                               image.
                               Une méditation solitaire presque impénétrable est celle qui se
                               matérialise dans la dimension humaine de la Mélancolie de
                               Domenico Fetti. La jeune femme à genoux qui dialogue avec
                               la mort (la tête de mort, memento mori traditionnel) peut
                               surmonter sa tristesse par la notion chrétienne du salut,
  Pietro della Vecchia,        comme le suggère la plante de vigne accrochée au mur devant
Rosemonde forcée de boire
 dans le crâne de son père     elle, ou bien s’agit-il d’une Madeleine/Vanitas qui a renoncé
Huile sur toile, 111x120 cm,   aux choses terrestres symbolisées par les objets qui
 Don Guerillot-Regnault,       l’entourent, parce que tout ce qui est au monde est caduc ?
 1864, musées de Lons-le-      Pour rendre visible l’expérience intérieure du divin, Johann
Saunier,© musées de Lons-      Liss adopte plusieurs registres dans la Vision de saint Jérôme
   le-Saunier/Jean-Loup
          Mathieu              pour l’église des Teatini et dans l’Extase de sainte Marie
                               Madeleine, très probablement destiné à la dévotion privée
                               d’une femme.
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Premier exemple de la peinture baroque à Venise, pour le
                                   dynamisme des formes qui créent une spirale vibrante par
                                   l’effet de la lumière, la Vision de Saint Jérôme où se découpe
                                   le corps à demi-nu du saint anachorète qui tient le calame ; un
                                   ange presse son avant-bras appuyé sur un crâne pour lui
                                   montrer le grand livre ouvert, une allusion à la traduction en
                                   latin de la Bible que le saint devra entreprendre.
                                   La Marie Madeleine de la même période semble poursuivre le
        Johann Liss,               discours sur la Mélancolie resté en suspens : pécheresse
  Vision de saint Jérôme,          convertie, elle a obtenu la réponse du ciel à ses méditations,
Huile sur toile 225 x 175 cm,
                                   qui transparaît dans son attitude extatique, avec son regard
Chiesa dei Tolentini, © Curia
   patriarcale di Venezia          intérieur, les lèvres entr’ouvertes, la rougeur délicate qui
                                   colore le visage et le sein, tandis qu’elle serre le crucifix,
                                   source du salut.
                                   Symbole de la Vanité, la tête de mort, attribut de tous les
                                   grands mystiques représentés par les artistes dans sa
                                   contemplation, devient un instrument de torture dans
                                   Rosemonde contrainte de boire dans le crâne de son père de
                                   Pietro della Vecchia, qui se détache sur la scène vénitienne
                                   par son goût du macabre dans ses thèmes rares et
                                   extravagants. L’histoire de la princesse germanique contrainte
                                   par son mari Alboïn de boire dans la coupe faite du crâne de
                                   son père vaincu, laisse deviner un aspect moral, un jugement
                                   critique à l’égard des hommes de pouvoir indignes.
  Sebastiano Mazzoni,              Et c’est un tombeau vivant qu’incarnera l’Artémise buvant les
 Artemisia boit dans une           cendres de son époux Mausole de Sebastiano Mazzoni : elle a
 coupe les cendres de son          aimé son mari d’une passion qui dépasse toutes les histoires
       mari Mausole,               d’amour, comme l’écrit Aulu-Gelle dans ses Nuits Attiques
Huile sur toile, 111x107cm,        (159 après J.C). Après avoir réduit ses os en cendres, elle les
 © Collection particulière
                                   fait fondre dans l’eau et les boit. Le peintre la présente de dos
                                   tenant à la main le verre déjà vide, appuyée sur une urne de
                                   marbre qui fait allusion au monument funéraire qu’elle lui a
                                   fait élever, le célèbre Mausolée d’Halicarnasse ; elle tourne
                                   vers le spectateur un regard mélancolique mais aussi de
                                   provocation sur le véritable sépulcre de son bien-aimé.

                                   Section 2 : « La mort viendra » : homicides, suicides,
                                   martyrs et mémento mori

                                   Au XVIIe siècle les hommes vivent chaque jour avec la
                                   pensée de la fin, sans l’exorciser ni la retarder. Les raisons en
                                   sont la succession incessante des guerres (se rappeler la
                                   saignée du conflit avec les Turcs) et d’épidémies.
                                   L’imaginaire de la mort à l’époque agit sur les collectivités en
                                   se prêtant à la transposition figurative et visuelle à travers des
                                   formes, des thèmes et des acteurs très divers qui sont les
   Pietro della Vecchia,
   La vocation de Saint
                                   protagonistes de cette section.
     François Borgia,
Huile sur toile 179.5 x 127.9 cm   En réalité, à côté de tableaux destinés aux édifices religieux,
© musée des Beaux-Arts de          représentant la Passion du Christ ou des conversions
    Brest métropole                provoquées par le spectacle du macabre, comme dans la
                                   Conversion (ou Vocation) de François Borgia de Pietro della
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Vecchia, l’iconographie de la mort trouve toujours plus de
                               place dans les œuvres destinées aux collectionneurs privés,
                               qui ornent le portego de leurs palais de bustes de philosophes
                               soucieux, comme le Démocrite de Michiel Fabris ; autant de
                               thèmes de réflexion sur la vie et le destin de l’homme et de
                               toiles consacrées aux héros mythologiques et de l’histoire
                               ancienne, surpris par la mort par imprudence, rivalité ou
                               châtiment de la part d’un dieu de l’Olympe.
                               Giovan Battista Langetti, et avec lui le courant des ténébristes
                               dont il est élu le ‘prince’, jouent un rôle essentiel dans le
  Giambattista Langetti,
   Le suicide de Caton,
                               développement et la diffusion d’images liées au thème de la
Huile sur toile, 160x190 cm,   mort, avec une prédilection particulière pour l’homicide et le
 Collection Pier Luigi Pizzi   suicide de caractère héroïque, répandu aussi à la suite du
 Venise, © Pier Luigi Pizzi    succès renouvelé de la pensée philosophique néostoïcienne, à
                               travers laquelle la mort devient le véhicule de la libération de
                               l’âme. Une œuvre emblématique en ce sens est Le suicide de
                               Caton de Langetti, symbole d’une humanité détachée du
                               monde et contrainte à se débattre dans la pénombre pour ne
                               pas se laisser absorber par l’obscurité.
                               Toutefois, la veine macabre de Langetti ne dominera pas, à
                               cause de l’attitude typique de la société vénitienne qui associe
                               l’hédonisme à la peur de l’extinction de la chair et de l’esprit,
                               et préfère supprimer plutôt qu’exhiber les aspects les plus
                               sinistres de la mort elle-même. Dans la spectaculaire Mort de
                               Lucrèce de Antonio Zanchi, le premier Vénitien ‘affilié’ à la
      Antonio Zanchi,          mode ténébriste, on préfère une mise en scène entre drame et
    La mort de Lucrèce,        héroïsme, où le ton tragique est tempéré par le caractère
 musée Antoine Lécuyer,
                               théâtral. De telles déclinaisons dominent dans les scènes, très
       Saint-Quentin,
Huile sur toile, 241x308.8cm   fréquentes dans l’art vénitien du Seicento, de représentations
                               de suicides d’héroïnes célèbres de l’Antiquité. Ces thèmes
                               offrent en effet des trouvailles narratives et l’occasion de
                               représenter, dans une veine entre extase et mélancolie,
                               l’instant dans lequel s’accomplit l’acte ultime de l’existence.
                               Il s’agit d’ailleurs de mettre en scène des femmes exemplaires
                               de l’histoire ancienne, qui ont défendu leur honneur ou la
                               liberté par la mort ou la vengeance, préférant le suicide à la
                               honte de la défaite.
                               Ces épisodes renvoient aux discussions alors à la mode dans
                               le cercle de l’Accademia degli Incogniti, fondée par Giovan
                               Francesco Loredan. On y débat des droits des femmes et de la
                               nature même de l’être féminin, dispute sans ton polémique,
                               selon les règles habituelles des entretiens littéraires. Ce climat
                               est propice au succès de sujets liés aux héroïnes du passé, de
                               Lucrèce à Cléopâtre. Cette dernière jouit d’un succès
                               extraordinaire : femme cultivée, la séduisante souveraine se
                               donne la mort pour ne pas devenir captive d’Octavien, par la
                               morsure d’un serpent, capable selon les Égyptiens d’assurer
                               l’immortalité. La mort de Cléopâtre devient prétexte à
                               montrer la nudité féminine et l’occasion de constructions
                               scéniques et spatiales à la limite du visionnaire, où la
                               souveraine gisant sur son lit de mort se contracte dans les
                               spasmes de l’agonie comme dans l’étonnante Mort de
                               Cléopâtre de Sebastiano Mazzoni.
Ajaccio, Palais Fesch-musée des Beaux-Arts - Rencontres à Venise: Étrangers et Vénitiens dans l'art du
Section 3 : Anciens et nouveaux protagonistes entre le
                                sacré et le profane

                                Le XVIIe siècle vénitien propose à son public de
                                commanditaires et d’amateurs un large éventail de thèmes en
                                élargissant le répertoire du siècle précédent, dont il reste
                                cependant proche par certains aspects ‘classiques’ appréciés
                                dans les cercles ecclésiastiques, mais surtout dans le monde
                                laïc où les classes sociales intéressées par l’art se sont
                                considérablement accrues. À côté des thèmes présents depuis
                                toujours dans la culture figurative vénitienne, on en voit
                                apparaître de nouveaux, en accord avec l’esprit religieux et la
                                culture laïque de l’époque. Dans les thèmes « anciens », plus
                                traditionnels, on voit surgir des mutations iconographiques ou
       Domenico Fetti,          des changements de ton, sentimental ou dramatique, qui
David et la tête de Goliath,    peuvent leur donner un aspect inhabituel.
Huile sur toile 175x128 cm,
                                On trouve déjà un exemple de cette nouvelle approche d’un
  Galleria dell’Accademia,
   © Archivio fotografico       sujet classique dans David avec la tête de Goliath de
 G.A.VE, « su concessione       Domenico Fetti, de la fin de la deuxième décennie du XVIIe
del Ministero dei beni e dell   siècle. Le thème, qui connait un succès particulier dans la
    attività culturali e del
 turismo. Museo Nazionale       peinture du Seicento, est vidé de sa charge de violence
Gallerie dell’Accademia di      potentielle par l’artiste, qui imagine le héros en jeune homme
            Venezia             vêtu à la mode empoignant l’épée comme un instrument de
                                musique, presque comme pour évoquer ses dons de musicien
                                et de poète.
                                Le thème des Sybilles, en tant que prophétesses de la venue
                                du Christ, subit au XVIIe siècle un changement par rapport à
                                la Renaissance : la figure individuelle se trouve transposée des
                                vastes ensembles décoratifs pour devenir protagoniste de
                                véritables monologues avec Dieu. Si, par l’absence d’attributs
                                précis, quelque doute demeure sur l’identification
                                traditionnelle avec une Sybille de la jeune femme dans la toile
       Pietro Ricchi,
  La lutte de Jacob et de       de Nicolas Régnier, les modèles d’inspiration de référence
           l’ange,              sont ceux du classicisme émilien, et en particulier les Sybilles
Huile sur toile, 164x160 cm,    de Guido Reni et de Guercino dont il partage la majesté de la
 Don Marcel Puech, 1986,
  Avignon, musée Calvet         figure au premier plan animée d’un geste éloquent.
       ©A.Guerrand              Tiré de l’Ancien Testament (Genèse 32, 22-23), l’épisode de
                                la lutte entre Jacob et l’ange, qui a soulevé la perplexité des
                                exégètes à propos des événements magiques et symboliques
                                du corps à corps entre l’homme et Dieu, est rendu encore plus
                                mystérieux par Pietro Ricchi, natif de Lucques, par l’obscurité
                                nocturne qui enveloppe les deux figures et la clarté
                                vertigineuse qui les illumine par des lueurs, en soulignant
                                l’effet de combat spirituel.
                                C’est encore la Bible (Exode 2, 1-10) qui est la source du
                                Moïse sauvé des eaux de Johann Liss, preuve évidente de
                                l’admiration de l’artiste allemand pour la tradition vénitienne
et en particulier pour Véronèse. De l’exemplaire aujourd’hui
                                  au Prado Liss reprend l’atmosphère lumineuse dans laquelle
                                  sont situées les élégantes figures féminines, mais il en
                                  accentue le pathos dans l’élan d’affection de la fille du
                                  pharaon envers le petit Moïse.
                                  Si au XVIe siècle Saint Laurent est représenté de préférence
                                  au moment de son cruel martyre sur le gril, en revanche la
                                  toile de Strozzi propose un message religieux en plein accord
                                  avec les courants spirituels des Théatins, commanditaires de
 Giulio Caprioni, Liriopé
  présentant Narcisse à
                                  l’œuvre, qui donnent ce saint comme modèle d’une église
         Tiresias,                catholique qui distribue aux mendiants et aux orphelins
Huile sur toile, 91.5x106.5 cm,   jusqu’aux objets liturgiques.
 musée des Beaux-Arts de
 Pau, © musée des Beaux-          Quant à la production de sujets profanes, en symbiose avec la
Arts de Pau, Jean-Christophe      création théâtrale et musicale de la Venise de l’époque, les
         Poumeyrol                artistes et commanditaires vénitiens sont attirés par certains
                                  passages des Métamorphoses d’Ovide, souvent modifiés dans
                                  le registre émotif par rapport au siècle précédent. Francesco
                                  Maffei, dans son Persée qui coupe la tête de Méduse,
                                  s’empare du moment dramatique de l’épisode (IV, 772-803),
                                  où le héros est sur le point de couper la tête, en la regardant
                                  fixement reflétée dans le bouclier de bronze poli, mais
                                  l’artiste le transpose dans une atmosphère foisonnante et
                                  visionnaire où les deux protagonistes paraissent suspendus
                                  dans leurs mouvements élégamment entrelacés.
                                  La corporalité de l’étreinte dans laquelle Orphée cherche à
                                  retenir Eurydice (X, 1-77), déjà rappelée aux Enfers, est
                                  l’interprétation que donne le Padovanino pour évoquer la
                                  tentative désespérée du poète mythique, parvenu à apitoyer les
                                  dieux eux-mêmes, de ramener sur la terre l’épouse tuée par le
                                  venin d’un serpent.
                                  Le choix figuratif de Giulio Carpioni pour traduire le mythe
                                  de Narcisse (III, 339-510) est tout à fait insolite : au lieu du
                                  moment le plus connu où le protagoniste se reflète dans l’eau
                                  jusqu’à en mourir, le peintre préfère, dans un cadre de style
                                  classique, représenter l’épisode antérieur, la présentation du
                                  petit Narcisse par sa mère au devin Tirésias, qui prophétise le
                                  destin tragique auquel il est condamné à cause de son amour
                                  excessif de soi.
                                  Les divinités de l’Antiquité, représentées aussi par le plus
                                  grand sculpteur de la Venise baroque, le Flamand Giusto Le
                                  Court, dans les bustes de la Villa Pisani, figurent également
                                  dans la curieuse Scène mythologique de Pietro Liberi, qui
                                  jouit d’une grande popularité à Venise pour cette typologie
                                  d’œuvres qui associent mythologie et intentions
                                  moralisatrices, par contraste ou par analogie.
Section 4 : Allégories

                                 Dans le milieu de la production artistique destinée aux
                                 collectionneurs et au marché dans le sens le plus large, les
                                 images allégoriques ont joui d’un succès et d’une circulation
                                 notables, comme en témoignent les sources documentaires et
                                 textuelles ainsi que les œuvres qui nous sont parvenues. Le
                                 genre était évidemment issu d’une solide tradition
                                 d’expression visuelle de concepts abstraits, souvent investis
                                 d’une valeur moralisatrice, tout comme la veine également
Francesco Maffei, Allégorie
du Temps et de la Renommée       prolifique de la représentation allégorique des saisons, des
Huile sur toile, 110x124 cm,     éléments, des sens.
Beauvais, MUDO, musée de         Dans la Venise du XVIIe siècle ces repères iconographiques
l’Oise, ©RMN-Grand Palais        sont revisités et renouvelés, tandis qu’apparaissent à leurs
  / Martine Beck-Coppola         côtés des images issues de conversations ou d'arguments
                                 académiques, de spéculations philosophiques, de débats sur le
                                 statut des arts. Certains artistes se montrent davantage séduits
                                 par le thème allégorique, en obtenant un succès particulier
                                 auprès de la clientèle à la recherche de tableaux à admirer
                                 dans l’intimité d’un cabinet, aussi bien que dans l’espace
                                 d’exposition par excellence, le portego ou camaron de’
                                 quadri (salle de réception du palais vénitien), où les tableaux
                                 côtoient souvent des exemples de l’art jumeau, la sculpture,
                                 disposée à accueillir les nouvelles demandes de l’aristocratie
                                 vénitienne.
                                 Parmi les peintres Pietro Liberi et le Romagnol Guido
                                 Cagnacci, ce dernier installé à Venise pour une dizaine
                                 d’années à partir de 1649, étaient particulièrement doués pour
                                 donner une présence visuelle à des idées et des « concepts de
                                 valeur «. Leurs allégories, où le sens moral est souvent mêlé
                                 de volupté et de sensualité, vont constituer un répertoire
                                 reconnaissable et de réussite, offrant des schémas répétés avec
                                 des variations minimales et jouées sur des nus féminins aux
 Giulio Carpioni, Allégorie      physionomies       génériques       accompagnées        d’attributs
       de la Fragilité,          symboliques sommaires.
 Huile sur toile 125.8x100 cm,   Une telle approche, fort critiqué par Marco Boschini, se
  Museo Civico di Palazzo        retrouve dans l’Allégorie du Temps de Cagnacci, l’un des
Chiericati-Vicenza, © Museo      sommets de l’œuvre de l’artiste pour la poésie du corps
Civico di Palazzo Chiericati-
            Vicenza              féminin. Le thème du Temps, lié peut-être à la spéculation
                                 philosophique la plus en vogue à l’époque, offre plusieurs
                                 inspirations figuratives aux artistes, qui tour à tour l’associent
                                 à la Vérité, à la Beauté, ou à la Renommée, comme dans le
                                 tableau de Francesco Maffei, dont la dimension temporelle,
                                 continuellement tendue entre éternité et éphémère, est
                                 naturellement liée au destin de l’homme et à la fragilité
                                 physique et mentale, celle-ci mise en scène par Giulio
                                 Carpioni dans une très intéressante peinture faite en
                                 collaboration avec Jacobus Victor, un maître hollandais
                                 spécialiste de natures mortes.
Section 5 : Portraits et autoportraits

                                La société vénitienne du XVIIe siècle est le théâtre d’un culte
                                prépondérant de la personnalité individuelle. De nouvelles
                                impulsions vers la promotion sociale, alimentées aussi par le
                                phénomène de l’acquisition, moyennant finances, de titres
                                nobiliaires, engendrent une période féconde pour la diffusion
                                de l’art du portrait.
                                La demande de la clientèle vénitienne d’être immortalisée à
                                travers des images – en peinture comme en sculpture –
  Tiberio Tinelli, Portrait
        d’Alvise Molin,
                                connaît un accroissement considérable, les portraits venant au
Huile sur toile 133x115 cm,     troisième rang derrière les œuvres sacrées ou historiques. Les
  Gallerie dell’Accademia,      modèles du XVIe siècle, comme on pouvait le prévoir,
   © Archivio fotografico       exercent leur emprise, mais ils sont investis de stimulations et
G.A.VE, « su concessione        de suggestions aux effets divers, issues de différentes zones
del Ministero dei beni e dell
    attività culturali e del
                                géographiques : de Rome, où entre 1626 et 1627 le cardinal
 turismo. Museo Nazionale       Pietro Valier est immortalisé par Le Bernin dans un buste qui
Gallerie dell’Accademia di      présente des détails d’un naturalisme extraordinaire, et du
            Venezia             nord, non seulement par des œuvres mais surtout des artistes,
                                le premier entre tous étant Anton van Dyck, en visite à Venise
                                en 1622.
                                À cette époque l’un des portraitistes les plus doués de la ville
                                se fraie rapidement la voie : Tiberio Tinelli, le seul parmi les
                                peintres vénitiens à se consacrer presque exclusivement au
                                portrait. L’attrait de l’étranger et les nouveaux canons de l’art
                                du portrait qui se développent à travers l’Europe caractérisent
                                les œuvres de Tinelli : il a su assimiler et amplifier des
                                inspirations dérivées de Rubens et de Van Dyck, que l’on
                                constate dans la mise en scène et la pose de la représentation
                                d’Alvise Molin, diplomate et collectionneur. Bernardo Strozzi
                                également, qui depuis son arrivée à Venise en 1633 vise à
                                immortaliser des membres influents de l’aristocratie
  Alessandro Varotari,          vénitienne, comme le cardinal Federico Cornaro, qui constitue
       Autoportrait,            l’un de sommets du catalogue du peintre.
Huile sur toile 108x94.8 cm,    Mais c’est Tinelli qui s’impose comme l’animateur du
   Musei Civici Padoue,
  © Giuliano Ghiraldini
                                renouveau du portrait vénitien, dont les aboutissements
                                ‘baroques’ seront développés par son élève Girolamo
                                Forabosco. Celui-ci est représenté ici par deux
                                impressionnants portraits en pied du doge Carlo Contarini et
                                de sa femme, Paolina Contarini: tenus pour des sommets du
                                portrait du XVIIe siècle vénitien, capables de rendre
                                immortelles les personnes représentées.
                                Si le modèle en pied offre des précédents aux images de
                                célébration du patriciat vénitien qui seront exécutées plus tard
                                par Sebastiano Bombelli et Andrea Celesti, le format du
                                portrait en buste sur un fond surtout neutre garde longtemps la
                                préférence, car il permet une concentration plus éloquente sur
                                les gestes et les expressions, en rendant le sujet plus ‘présent’,
                                surtout dans le cas des lettrés, des intellectuels, comme Carlo
                                Ridolfi, ou des artistes.
La catégorie du portrait d’artiste connaît une évolution
                                 importante au XVIIe siècle, en devenant un manifeste militant
                                 de connaissance de soi capable d’assurer la mémoire
                                 posthume. Alessandro Varotari nous propose un cas
                                 exemplaire avec son Autoportrait, tel un récit visuel de
                                 l’éducation, de la poétique, des sources d’inspiration, des
                                 ambitions, et aussi de la conscience d’être un peintre de la
                                 modernité. Dans le domaine des autoportraits on trouve en
                                 application la typologie du portrait allégorique ou historié,
                                 peut-être surgie ou favorisée par des conjonctures
                                 particulières et des relations entre les peintres, les lettrés et les
  Girolamo Forabosco,            collectionneurs dilettantes, donnant lieu à un mélange
 Portrait de la Dogaresse        séduisant du genre historique-mythologique-allégorique avec
Paolina Loredan Contarini,       le portrait d’artiste, comme en témoigne l’Autoportrait sous
Huile sur toile, 209x134 cm,
   © Venise, collection          les traits de la Stupeur de Pietro Bellotti.
        particulière
                                 Section 6 : À l’origine de la création artistique

                                 À Venise au XVIIe siècle, comme dans toute l’Italie, le dessin
                                 est tenu pour essentiel dans la formation et l’exercice de la
                                 profession d’un artiste. Les ateliers traditionnels d’origine
                                 familiale se font plus rares au XVIIe siècle alors qu’augmente
                                 le nombre d’artistes ‘indépendants’, qui parfois ne sont même
                                 pas inscrits à la corporation des peintres, souvent des
                                 étrangers arrivés dans la ville pour y travailler.
                                 La quantité de dessins parvenus jusqu’à nous est sans doute
                                 moindre en comparaison de ceux des XVIe et XVIIIe siècles,
                                 en dépit d’abondants témoignages contemporains qui
   Bernardo Strozzi, Tête        expriment l’admiration pour l’habileté graphique de
d’homme aux cheveux longs,       nombreux peintres et l’existence d’une série d’académies non
les yeux levés, tourné vers la   officielles pour l’enseignement du dessin d’après nature et
           gauche,
     Dessin, 19x17.4 cm,
                                 d’après des sculptures, tenues par les principaux artistes.
musée du Louvre D.A.G., ©        Bernardo Strozzi semble faire retour à la tradition de l’atelier
RMN – Grand Palais (musée        de la Renaissance bien que sous une forme profondément
 du Louvre) / Michel Urtado
                                 nouvelle : dans sa demeure à Santa Fosca il tient une sorte
                                 d‘’école-laboratoire’. Une grande partie des dessins de la
                                 période vénitienne du peintre génois paraît orientée vers la
                                 formation et le travail de ses collaborateurs, auxquels il
                                 fournit un répertoire de solutions figuratives tirées de ses
                                 tableaux.
                                 C’est à ce type « pour répertoire » qu’appartiennent les deux
                                 feuilles du Louvre, utilisées des deux côtés, et l’emploi de la
Andrea Celesti, Le supplice      technique de la pierre noire, douce et pâteuse, correspond au
     de Paolo Erizzo,
    Dessin, 75x105 cm,
                                 développement vers la couleur des recherches du Strozzi
 Ecole nationale supérieure      ‘vénitien’.
      des Beaux-Arts,            Une étude de composition caractéristique est en revanche
© Beaux-Arts de Paris, Dist.
RMN – Grand Palais / image
                                 celle pour la Conversion (ou Vocation) de saint François
   Beaux-Arts de Paris           Borgia de Pietro della Vecchia - une première idée pour le
                                 tableau de Brest -, dont l’objet était de vérifier le
                                 positionnement des principales figures, l’effet de raccourci, et
encore les contrastes de lumière par le dosage de l’aquarelle.
                             Le Dessin pour un plafond avec trois tableaux de célébration
                             consacrés à Paolo Erizzo se situe à la limite entre dessin
                             préparatoire à grande échelle et modèle sur papier. La
                             commande importante pour une grande salle du palazzo
                             Erizzo sur le Grand Canal devait prévoir un contrôle de la part
                             des commanditaires à travers l’examen d’une feuille
                             représentant la composition toute entière, également très
                             aboutie dans les détails.
                              Un rare bozzetto à l’huile sur papier est celui produit par
                             Sebastiano Mazzoni, apparemment pour le commanditaire du
                             Saint Benoît porté en gloire par les Vertus théologales, le curé
                             de San Beneto.
                             La série de modèles relatifs au Martyre de saint Gerardo
                             Sagredo de Johann Carl Loth est utile pour comprendre le
                             développement d’une idée jusqu’à son achèvement sous le
                             regard attentif des Bénédictins de Santa Giustina à Padoue.
                             Dans le passage du modèle de collection privée à celui du
                             musée de Strasbourg, le peintre développe l’épisode
                             dramatique en soulignant toujours davantage l’aspect violent,
                             avec l’intention didactique évidente de l’effet produit sur les
 Johann Carl Loth, dit
 Carlotto, Le martyre de     fidèles, qu’il poursuit au point d’apporter dans le grand
 Saint Gérard Sagredo,       retable des variantes ultérieures qui en augmentent un sens
Huile sur toile 214x138 cm   dramatique de l’horreur. Antonio Zanchi lui même, lorsqu’il
 © musées de Strasbourg
                             doit affronter l’immense mur du côté droit de l’escalier
                             monumental de la Scuola grande di San Rocco, en 1666,
                             étudie le thème de la peste à Venise sur un modèle qu’il doit
                             soumettre au jugement de ses confrères avant la solution
                             picturale finale, et ce sont peut-être les commanditaires eux-
                             mêmes qui lui ont fait supprimer le détail de la gondole pleine
                             de pestiférés, dans une Venise qui n’aime pas trop les excès
                             de macabre.
                             La pratique du modèle d’étude ou de présentation pour le
                             commanditaire est également documentée pour la sculpture ;
                             ce sont parfois les modèles qui restituent, quoique dans des
                             dimensions réduites, des images disparues. Les terres cuites
                             de Giacomo Piazzetta avec quatre Figures d’hérétiques sont
                             en fait l’unique souvenir visuel des télamons du grand
                             ensemble décoratif en bois sculpté qui ornait la bibliothèque
                             de la basilique des Saints Giovanni et Paolo, qui a été détruit.

                             Section 7 : Vers le nouveau siècle

                             La culture artistique de la fin du XVIIe siècle offre de
                             nombreux prémisses à la naissance et au développement de la
                             culture picturale et sculpturale du XVIIIe siècle, un siècle
                             associé à l’idée d’un renouveau glorieux des fastes de la
                             tradition artistique de la Sérénissime.
                             Sebastiano Ricci est l’un des artistes les plus représentatifs de
                             ce passage que reflète sa carrière. Personnalité exubérante et
vouée à de perpétuelles expérimentations, Ricci, après ses
                               premiers pas dans le sillage des ténébristes (de Langetti à
                               Zanchi), oriente sa recherche formelle vers cette peinture de
                               lumière favorisée par l’exemple de Pietro da Cortona, en
                               contribuant au tournant de l’art vénitien vers la ‘clarté’ au
                               cours des deux dernières décennies du siècle.
                               Dans ce processus, la réélaboration accomplie par Ricci est
                               fondamentale : le langage décoratif de Paolo Véronèse est
                               revisité à travers les expériences baroques, de Rubens à
                               Mazzoni, avec aussi l’impulsion classicisante mûrie par
 Sebastiano Ricci, Allégorie   l’artiste au cours de son séjour à Bologne dans les années
 de la France sous la figure   1690, comme en témoigne la toile avec Hercule et Omphale
   de Minerve (la Sagesse)
                               montrée ici.
 Huile sur toile, 113x85 cm,
musée du Louvre, © RMN –       À cette époque, pour la génération à laquelle appartient Ricci,
   Grand Palais (musée du      née au milieu du siècle, le voyage de formation hors de
Louvre) Stéphane Maréchalle    Venise devient de plus en plus fréquent, surtout à Bologne et
                               Rome, où se trouve peut-être en 1679 le sculpteur Andrea
                               Brustolon. En outre, à la fin du siècle les artistes vénitiens
                               voient aussi leurs ambitions sociales et professionnelles
                               s’accroître toujours davantage. Selon eux, c’est surtout au
                               niveau      international qu’ils   pourront     atteindre    la
                               reconnaissance à laquelle ils aspirent : en 1693 Mathieu de la
                               Teulière, alors directeur de l’Académie de France à Rome,
                               observe que Sebastiano Ricci «a une grande envie d’aller en
                               France». Sa reconnaissance officielle sur la scène parisienne
 Sebastiano Ricci, Hercule     aura lieu en 1718, quand le maître fera venir son morceau de
filant aux pieds d’Omphale,    réception afin d’être reçu parmi les membres de l’Académie
          vers 1705.           Royale de peinture et de sculpture. En France, à l’époque, le
Huile sur toile, 101x123 cm,
   collection du musée de
                               goût pour la peinture vénitienne, et surtout pour son coloris,
   Picardie, Amiens (photo     atteint son apogée. Ricci, peintre cultivé et pleinement
Marc Jeanneteau/ musée de      conscient de ses capacités, s’adapte au code élogieux de la
           Picardie)           cour du Roi Soleil défunt, en célébrant la France comme la
                               nouvelle Minerve.

Andrea Brustolon, Junon ou
     l’Allégorie de l’Air,
bois, 121x60x38 cm,
Ca’Rezzonico, Museo del
Settecento Veneziano, Photo
De Fina © Photo Archive-
Fondazione Musei Civici di
Venezia
FICHE PRESSE 04                    VISITE DU PALAIS
LE PALAIS FESCH-MUSÉE DES BEAUX-ARTS
ET SES COLLECTIONS

                         Le Palais Fesch doit son existence à la volonté du cardinal
                         Fesch, demi-frère de la mère de Napoléon. Par testament,
                         le cardinal voulait que soit fondé à Ajaccio un « Grand
                         Institut des Études », nanti d’une collection d’œuvres
                         d’art. Joseph Bonaparte, comte de Survilliers, son
                         exécuteur testamentaire, contesta le legs. La ville dût
                         ériger le bâtiment à ses propres frais, mais elle reçut
                         toutefois, provenant de l’immense collection de 17 000
                         œuvres et objets du cardinal, environ 1500 objets d’art.
                         Différents dons et legs enrichiront par la suite les
                         collections, notamment ceux de Félix Baciocchi en 1866,
                         du duc de Trévise en 1892, de Jérôme Napoléon en 1897,
                         de la famille Rothschild en 1889 et 1909.
                         L’État, pour sa part, procède dès 1854 et régulièrement
                         jusqu’en 1973 à des dépôts à la ville d’Ajaccio.

                         Aujourd’hui le musée expose sur quatre niveaux environ
                         500 œuvres. La collection s’articule autour de plusieurs
                         grands axes : la peinture italienne du XIVe au XVIIIe
                         siècle, ce qui en fait l’un des principaux musées français
                         de peinture italienne, le département napoléonien,
                         comprenant les portraits peints ou sculptés de la famille
                         Bonaparte et, depuis 2010 et grâce à la générosité de
                         donateurs locaux, un département de peinture corse.

                         Le Palais organise et accueille plusieurs expositions par
                         an, partagées entre art ancien et art contemporain. Lieu de
                         recherche et d’activités culturelles, il dispose d’une
  Palais Fesch           documentation-bibliothèque d’histoire de l’art, d’une salle
  musée des Beaux-Arts   polyvalente accueillant ateliers et conférences et d’une
                         Grande Galerie où sont proposés tout au long de l’année
                         divers événements culturels.
FICHE PRESSE 05                       INFORMATIONS
                                                                    PRATIQUES
INFORMATIONS PRATIQUES
                        HORAIRES
TARIFS
Plein tarif : 8 €       Le musée est ouvert tous les jours de la semaine
Tarif réduit : 5 €         - de 9h à 17h du 1er novembre au 30 avril
                           - de 9h15 à 18h du 1er mai au 31 octobre
                        Fermeture annuelle : 25 décembre & du 1er au 15 janvier

                        URARII
PREZZI
Tariffa piena : 8 €     Urarii novi : U museu hè apartu tutti i ghjorni di a
Tariffa ridutta : 5 €   sittimana
                             - da 9 ori à 5 ori di sera da u 1 di nuvembri sin’à 30
                                d’aprile
                             - da 9 ori è quartu à 6 ori di sera da u 1 di maghju
                                sin’à u 31 d’uttrovi
                        Sarratura annuale u 25 di dicembre & da u 1 sin’à u 15 di
PALAIS FESCH            ghjinnaghju
Musée des beaux-arts

50, rue Fesch           Contact :
20 000 Ajaccio          Emmanuelle Taverni
Musee-fesch.com         +33(0)4 95 26 26 18
+33(0)4 95 26 26 26     emtaverni.musee@ville-ajaccio.fr
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