Avis de la Direction régionale de santé publique sur les émissions atmosphériques d'arsenic dans l'est de Montréal en 2019
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Avis de la Direction régionale de santé publique sur les émissions atmosphériques d’arsenic dans l’est de Montréal en 2019
-2- Avis de la Direction régionale de santé publique sur les émissions atmosphériques d’arsenic dans l’est de Montréal en 2019 est une production de la Direction régionale de santé publique (DRSP) du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) du Centre-Sud-de-l ’Île-de-Montréal. 1301 rue Sherbrooke Est Montréal (Québec) H2L 1M3 514 528-2400 ciusss-centresudmtl.gouv.qc.ca Coordination David Kaiser, M.D., Chef médical, Service Environnement urbain et saines habitudes de vie (EUSHV) Auteur Karine Price, M.Sc., Toxicologue, Service Environnement urbain et saines habitudes de vie (EUSHV) Remerciements Marie Pinard et Dr. David Kaiser pour la relecture du document. Notes Dans ce document, l’emploi du masculin générique désigne aussi bien les femmes que les hommes et est utilisé dans le seul but d’alléger le texte. Ce document est disponible en ligne à la section documentation du site Web : www.ciusss-centresudmtl.gouv.qc.ca Date de publication : 22 juillet 2020 © Gouvernement du Québec, 2020
-3- INTRODUCTION À l’automne 2018, la Direction régionale de santé publique (DRSP) de Montréal a publié un avis sur les émissions atmosphériques de l’affinerie de cuivre CCR, située dans Montréal-Est. Dans cet avis, la DRSP a émis trois recommandations générales dont « la mise en place de deux nouvelles stations de mesure des concentrations ambiantes des métaux, principalement l’As en milieu résidentiel de part et d’autres de l’entreprise, afin de mieux caractériser l’exposition de la population ». Faisant suite à cette recommandation, la DRSP présente le suivi des concentrations ambiantes de métaux échantillonnées dans les stations d’échantillonnage au cours de l’année 2019 par l’entreprise, en les comparant aux normes et recommandations de concentrations dans l’air pour les différentes substances. Suivi des concentrations ambiantes Faisant suite à la publication de l’avis de la DRSP, l’emplacement de deux nouvelles stations d’échantillonnage a été convenu avec l’entreprise CCR et la Ville de Montréal, ainsi que la reprise de l’échantillonnage à la station située sur le toit du Centre Édouard-Rivet. Les deux nouvelles stations d’échantillonnage se situent sur le terrain du jardin communautaire B.P. Tétreaultville (au coin des rues Aubry et de Teck) et sur le terrain de l’entreprise Chimie Parachem s.e.c. (au coin de l’avenue de Montréal-Est et de la rue Sainte-Catherine). Les substances échantillonnées sont les suivantes : particules totales, argent (Ag), arsenic (As), chrome (Cr), cadmium (Cd), cuivre (Cu), nickel (Ni), plomb (Pb), sélénium (Se), tellure (Te). L’échantillonnage a débuté le 1er octobre 2018 à la station Édouard-Rivet, le 7 décembre 2018 à la station B.P. Tétreaultville et le 18 novembre 2018 à la station située sur le terrain de l’entreprise Chimie Parachem. La DRSP et le Service de l’environnement de la Ville de Montréal ont reçu le suivi des données d’échantillonnage des premiers mois d’échantillonnage en provenance de l’entreprise, soit de décembre à mars. Par la suite, la DRSP a reçu toutes les autres données (du mois d’avril 2019 à décembre 2019) en février 2020. Des problématiques avec les laboratoires d’analyse ont été mentionnées afin d’expliquer ces délais. Une version finale révisée des valeurs échantillonnées a été reçue le 17 juin 2020 en raison d’une erreur dans le traitement des données.
-4- RÉSULTATS Historique En 2018, l’avis de la DRSP présentait à la fois des données de modélisation des concentrations de polluants, dont l’arsenic, en zone résidentielle ainsi que des concentrations mesurées dans l’air à la station d’échantillonnage du centre Édouard-Rivet, située à proximité de l’affinerie, en milieu résidentiel. L’avis de la DRSP décrivait les normes applicables sur le territoire de l’Île de Montréal comme suit : « Il est important de noter que les critères et normes du Règlement sur l’assainissement de l’atmosphère du MDDELCC ne sont pas applicables sur le territoire de l’île de Montréal, qui est régi plutôt par le Règlement 2001-10 de la CMM. La Ville de Montréal s’assure du respect de cette règlementation (Ville de Montréal, 2017). Pour l’As, des normes dans l’air ambiant sont inscrites au Règlement 2001-10 de la CMM pour 15 minutes, 1 h et 8 h, mais ne sont pas disponibles sur une année. Le règlement indique que la somme des concentrations émises de plusieurs cheminées sur la propriété d’une entreprise doit être inférieure à la norme sur 15 minutes au point d’impact maximal. Les valeurs hors de la limite de la propriété doivent également être inférieures aux normes sur 1 h et 8 h. Toutefois, dans le cadre de cet avis, les effets sur la santé retenue visent plutôt une exposition à long terme à l’As. En effet, dans ce cas- ci, l’évaluation des risques pour une exposition à long terme se fait généralement en se référant à des normes annuelles. La norme du MDDELCC pour cette substance a été développée afin de viser ce type d’exposition et est également applicable ailleurs au Québec. Ainsi, dans le cadre de cet avis, la norme annuelle du MDDELCC a été retenue à titre de référence. » Dans le cadre du présent avis, la valeur de référence retenue est également celle du règlement sur l’assainissement de l’atmosphère (RAA) du Ministère de l’environnement et de la lutte contre les changements climatiques (MELCC), d’une valeur de 3 ng/m3 pour l’arsenic. En 2018, la valeur modélisée par l’entreprise en zone résidentielle (contribution de CCR) était de 6 ng/m3 et de 4 ng/m3 au centre Édouard-Rivet, en tenant compte du nouveau dépoussiéreur (Hatch 2017). Concentrations d’arsenic échantillonnées en 2019 aux nouvelles stations Le tableau 1 présente les concentrations d’arsenic échantillonnées au centre Édouard-Rivet et aux deux nouvelles stations d’échantillonnage (sur le terrain de Chimie Parachem et au jardin communautaire B.P. Tétreaultville). Les données présentées sont celles recueillies du 3 janvier 2019 au 24 décembre 2019. La figure 1 présente les données détaillées échantillonnées à ces trois stations d’échantillonnage pour l’année 2019.
-5- La figure 2 quant à elle, permet de visualiser la tendance des concentrations dans l’air échantillonnée sur une plus longue période au centre Édouard-Rivet, soit de 2011 à 2019. Tableau 1. Concentration moyenne d’arsenic (ng/m3) d’après les données mesurées aux stations d’échantillonnage du centre Édouard-Rivet, sur le terrain de Chimie Parachem et au jardin communautaire B.P. Tétreaultville du 3 janvier au 24 décembre 2019. Concentration d’arsenic (As)a (ng/m³) Centre Édouard- Terrain de Chimie JC BP Tétreaultville Rivet Parachem Janvier 8,1 4,3 1,9 Février 6,4 3,7 2,8 Mars 5,9 15,9 2,7 Avril 2,4 4,1 1,8 Mai 3,2 4,7 2,4 Juin 4,3 5,7 2,6 Juillet 4,6 5,1 3,6 Août 3,8 5,5 2,6 Septembre 7,1 6,6 2,4 Octobre 5 4 3,8 Novembre 5,9 5,3 3,2 Décembre 7,3 5,2 2,9 Moyenne annuellea 5,1 5,4 2,8 Norme provinciale (RAAba 3,0 a La moyenne a été calculée à partir de données journalières, échantillonnées sur 24 heures. b RAA : Règlement sur l’assainissement de l’atmosphère (RAA) du Ministère de l’environnement et de la lutte contre les changements climatiques (MELCC).
-6- Figure 1. Concentration d’arsenic (ng/m3) échantillonnée aux stations d’échantillonnage du centre Édouard-Rivet, sur le terrain de Chimie Parachem et à la station du jardin communautaire BP Tétreaultville pour l’année 2019. Figure 2. Concentration d’arsenic échantillonnées au centre Édouard-Rivet, de 2011 à 2019 (ng/m3).
-7- Les données résumées au tableau 1 indiquent que la moyenne annuelle des concentrations d’arsenic échantillonnées à la station du jardin communautaire B.P. Tétreaultville pour l’année 2019 sont inférieures à la norme provinciale du Règlement sur l’assainissement de l’atmosphère (RAA) de 3 ng/m 3. En ce qui a trait aux concentrations échantillonnées au centre Édouard-Rivet et sur le terrain de Chimie Parachem, les concentrations moyennes annuelles (5,1 ng/m3 et 5,4 ng/m3) sont supérieures à la norme provinciale.
-8- Modélisation des contaminants atmosphériques – valeurs estimées d’As À la fin de l'année 2018, l’affinerie CCR a mis en fonction son dépoussiéreur qui avait pour but de diminuer les émissions atmosphériques en lien avec ses activités. Le 31 octobre 2019, l’affinerie CCR a produit une mise à jour de son étude de modélisation afin d’estimer les concentrations dans l’air des différentes substances émises, en incorporant de nouvelles données sur les sources d’émission et les taux d’émission suite à un nouvel échantillonnage des sources réalisé en juin 2019. Les résultats tiennent compte des émissions du nouveau dépoussiéreur et des autres nouvelles mesures d’atténuation (Hatch 2019). Cette modélisation présente la contribution des activités de l’affinerie CCR aux concentrations atmosphériques à différents points récepteurs, dont les trois stations d’échantillonnage (centre Édouard-Rivet, Chimie Parachem, jardin communautaire BP Tétreaultville). Les résultats de la modélisation représentent donc la contribution des émissions de CCR aux concentrations totales dans l’air en milieu résidentiel. Elles sont obtenues en estimant les émissions aux différentes sources de l’affinerie, en fonction des taux de production. Le tableau 2 présente les maximums des concentrations annuelles moyennes d’As estimées par modélisation aux trois stations d’échantillonnage pour l’année 2020. Ces valeurs représentent la contribution de l’affinerie CCR à ces points récepteurs. Le tableau 2 présente également les valeurs de concentration d’As mesurées à ces stations.
-9- Tableau 2. Concentration moyenne annuelle d’arsenic (ng/m3) mesurée et estimée par modélisation (contribution de l’Affinerie CCR) aux stations d’échantillonnage du centre Édouard-Rivet, sur le terrain de Chimie Parachem et au jardin communautaire B.P. Tétreaultville. Concentration d’arsenic (As) (ng/m³) Centre Terrain de JC BP Tétreaultville Édouard- Chimie Rivet Parachem Moyenne annuelle 5,1 5,4 2,8 d’après les données mesurées Moyenne annuelle 2,8 2,9 2,1 estimée par modélisation La moyenne a été calculée à partir de données journalières, échantillonnées sur 24 heures Modélisation de la contribution de l’Affinerie CCR aux concentrations atmosphériques pour l’année 2020 (Hatch 2019). La valeur initiale de 2 ng/m3 a été ajoutée aux concentrations estimées par la modélisation. DISCUSSION D’après les données, on observe une diminution des concentrations d’arsenic depuis la mise en place des mesures d’atténuation par l’entreprise CCR (dépoussiéreur et autre mesures). Une diminution des concentrations est observée par rapport aux années antérieures. Toutefois, les concentrations excèdent la valeur du RAA retenue à titre de référence dans le cadre de cet avis, à deux stations d’échantillonnage soit au centre Édouard-Rivet et sur le terrain de Chimie Parachem. Tel que décrit précédemment, les concentrations relevées aux stations d’échantillonnage représentent les concentrations totales d’arsenic dans l’air en provenant de différentes sources. L’affinerie CCR, par la mise en place de mesures de mitigation, dont le dépoussiéreur, estime, selon sa plus récente modélisation, que la contribution de ses émissions aux concentrations totales mesurées aux stations d’échantillonnage est inférieure à celle du RAA. Compte tenu des dépassements de la valeur
-10- du RAA observée aux stations d’échantillonnage, la différence entre les valeurs modélisées et les valeurs réelles échantillonnées peuvent s’expliquer soit par l’incertitude des estimations des modèles ou la présence d’autres sources d’émissions industrielles qui contribuent aux concentrations échantillonnées aux stations de mesure. La modélisation est un outil qui comporte beaucoup de paramètres afin de décrire les sources d’émissions, les taux de production, les conditions météorologiques, la dispersion des émissions sur le territoire, etc. Chaque paramètre comporte sa part d’incertitude. Les valeurs modélisées sont donc des estimations des contributions de chaque source à la pollution atmosphérique d’un secteur. La combinaison des outils de modélisation et le suivi des concentrations réelles aux stations est un outil efficace afin de dresser un portrait de la pollution du secteur et agir efficacement sur les sources de polluants. Il est important de maintenir un échantillonnage à long terme aux stations d’échantillonnage Édouard- Rivet, Parachem et du jardin communautaire BP Tétreaultville car les données recueillies reflètent la pollution totale dans un secteur, en provenance de différentes sources. La pollution totale est un bon indicateur de la concentration à laquelle la population du secteur est exposée. La diminution des concentrations totales d’As dans l’air, implique le maintien des efforts pour diminuer les émissions des sources connues, telle l’affinerie CCR et l’identification, le suivi et la mise en place de mesures pour diminuer les émissions des autres sources industrielles d’As dans le secteur. Tel que décrit dans le plus récent Bilan de la qualité de l’air du Réseau de Surveillance de la Qualité de l’air (Bilan RSQA 2019), la ville de Montréal possède une expertise dans le suivi de la qualité de l’air sur l’Île de Montréal. L’équipe de la ville participe au programme d’assurance et de contrôle de la qualité afin de répondre aux nouvelles lignes directrices du Programme de surveillance national de la pollution atmosphérique (PNSPA). Le PNSPA a le mandat de « fournir des données fiables à long terme et qui respectent des normes de qualité stricte » (Bilan RSQA, 2019). L’intégration des stations d’échantillonnage du centre Édouard-Rivet, sur le terrain de Chimie Parachem et sur le terrain du jardin communautaire BP Tétreaultville à ce réseau est un objectif souhaitable afin de permettre un traitement uniforme des données à travers le réseau. De plus, dans le cadre de cet avis, la valeur de la norme annuelle du RAA, de 3 ng/m 3, est utilisée à titre de référence pour une exposition à long terme de la population. Toutefois, cette norme n’est pas applicable sur le territoire de l’île de Montréal. La règlementation présentement en vigueur comporte des normes d’émission sur 15 minutes, 1 heure et 8 heures. La DRSP juge qu’en plus de la réglementation déjà en place, il serait souhaitable d’intégrer cette norme annuelle pour l’As à la règlementation applicable sur l’île de Montréal.
-11- CONSTATS ET RECOMMANDATIONS Suite à l’analyse des données de 2019 des trois stations d’échantillonnage situées au centre Édouard- Rivet, sur le terrain de l’entreprise Chimie Parachem et sur le terrain du jardin communautaire B.P. Tétreaultville, la DRSP constate et émet les recommandations suivantes : Constats : - Les concentrations d’arsenic (As) excèdent la norme provinciale à deux stations d’échantillonnage, soit au centre Édouard-Rivet et sur le terrain de Chimie Parachem (Tableau 1 ; Figure 1). - Les concentrations d’As ont diminué comparativement aux années antérieures, suite à la mise en place des mesures d’atténuation par l’entreprise CCR (dépoussiéreur et autre mesures) (Figure 2). Recommandations : - Que CCR maintienne le suivi des concentrations atmosphériques de métaux aux trois stations d’échantillonnage à court terme (centre Édouard-Rivet, terrain de Chimie Parachem et jardin communautaire BP Tétreaultville). - Que la Ville de Montréal intègre le suivi à long terme des concentrations atmosphériques de métaux dans les secteurs touchés à son réseau de surveillance de la qualité de l’air et rende disponible les données sur son site internet. - Que l’Affinerie CCR maintienne la mise en place des mesures de mitigation à long terme afin de s’assurer de la diminution des concentrations d’arsenic dans l’atmosphère. - Que la Ville de Montréal caractérise les sources d’As des autres entreprises du secteur qui pourraient être des sources potentielles ainsi que leur contribution aux concentrations totales dans le secteur et s’assure du respect des normes d’émissions atmosphériques d’arsenic. - En plus des normes d’émission sur le territoire de l’Île de Montréal applicables selon la méthodologie du règlement 2001-10 de la Communauté métropolitaine de Montréal (sur 15 min, 1 h et 8 h), rajouter une norme annuelle pour les concentrations atmosphériques d’arsenic afin de refléter les expositions à long terme de la population. S’arrimer avec les valeurs provinciales prescrites dans le RAA (3 ng/m3).
-12- RÉFÉRENCES Hatch (2019). Modélisation de la dispersion atmosphérique à l’affinerie CCR. Document H358242-0000- 200-066-0005. 31 octobre 2019. 34 pages. HATCH (2017). Mise à jour de la modélisation de la dispersion atmosphérique. Rapport. Affinerie CCR — Glencore. Projet dépoussiéreur four n° 8. H353566. Direction régionale de santé publique de Montréal (DRSP 2018). Avis de santé publique sur les émissions de l’affinerie de cuivre CCR de Montréal-Est. 36 pages. Bilan environnementale 2019. Qualité de l’air à Montréal. Service de l’environnement. http://ville.montreal.qc.ca/
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