BRISER LA MALEDICTION - Comment les impôts équitables peuvent la richesse minière de l'Afrique en opportunité de développement l'imposition - TWN ...

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BRISER LA MALEDICTION

Comment l’imposition transparente et les
impôts équitables peuvent transformer la
richesse minière de l’Afrique en opportunité de
développement
Briser la malédiction : Comment l’imposition transparente et les impôts équitables
peuvent transformer la richesse minière de l’Afrique en opportunité de
développement est publié par :
Open Society Institute de la République d’Afrique du Sud, Johannesburg
Third World Network Africa, Accra
Tax Justice Network Africa, Nairobi
Action Aid International, Johannesburg
Christian Aid, London

© Mars 2009
Ce rapport peut être librement cité et reproduit en faisant mention des auteurs
et des éditeurs.
Sommaire
Remerciements                                                                 3
Glossaire                                                                      5
Résumé analytique                                                              6
   Comment les subventions et l'évasion fiscales font
   chuter les revenus de l'exploitation minière

   Historique des régimes fiscaux              miniers
   encouragés par la Banque mondiale

   Comment augmenter les revenus perçus des
   activités minières ?

    Recommandations
Introduction                                                                                  12

Bref historique des régimes fiscaux miniers en Afrique                                       16
   Première phase: augmentation des prix et des revenus                                      16
   Deuxième Phase: prix bas et taxes peu élevées                                             17
   Troisième phase: boom des matières premières et faiblesse des recettes publiques          24

Pourquoi les taxes sont-elles importantes ?                                                    28
  Les recettes constituent le principal avantage de l'extraction minière                          28
  Les gouvernements africains ne parviennent pas à toucher une part équitable de la rente minière 29

Perte de recettes fiscales due aux allégements fiscaux et à l'évasion fiscale                  32
   Les avantages fiscaux que les gouvernements accordent aux compagnies minières              32
   Pratique d’évasion fiscale par les compagnies minières                                      51

Briser la Malédiction: Stratégies devant contribuer à l’augmentation des revenus et au
renforcement de la transparence                                                    60
   Révision des législations et contrats miniers aux fins d’accroissement des revenus              60
   Transparence des systèmes budgétaires et de fiscalité                                        63
   Déclaration transparente par les sociétés                                                    68
   Les bailleurs de fonds, facilitent ou compliquent-ils la collecte transparente des revenus ? 69
   Réaction des compagnies minières face aux réformes de la fiscalité minière                  74

   Recommandations                                                                                 75

Notes de fin de texte
                                                                                                   77
Sigles

NEPAD             Nouveau partenariat pour le développement Economique de
l’Afrique
CEA               Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique
PMA               Partenariat minier africain
ITIE             Initiative pour la transparence dans les industries extractives
FMI              Fonds monétaire international
AID              Association internationale de développement
DfID             Département britannique pour le
Développement international
BIP             Produit intérieur brut
PNUD               Programme des Nations-Unies pour le développement
CNUCED            Conférence des Nations Unies sur le commerce et le
développement
OCDE              Organisation de coopération et de développement
économiques
NU                Nations-Unies
CEDEAO             Communauté économique des Etats de
l’Afrique de l’ouest
SADC              Communauté de développement de l'Afrique
australe
CDS               I nvestissements pour le développement
économique des collectivités
IDE               l'investissement direct étranger
TVA               Taxe sur la valeur ajoutée
TRS              Taxe sur le
revenu des sociétés
AGA               AngloGold Ashanti’s
KCM               Konkola Copper Mines
P.A               Protocole d’accord
IPIS              International Peace Information Service
 IASB              Conseil international des normes
comptables
 IFRS              Normes internationales d'information
financière

                                   4
Remerciements:

Ce rapport a été édité par Kato Lambrechts en collaboration avec Claude Kabemba,
Abdulai Darimani, et Wole Olaleye. Les principales conclusions de ce rapport sont
basées sur des recherches menées par Mark Curtis, Tundu Lissu, Thomas Akabzaa,
John Lungu, Alastair Fraser, Laurent Okitonemba, Dona Kampata, et Patrick
Kamweba. Alex Cobham, Rachel Moussie, Paul Valentin, et Richard Murphy ont
fourni des commentaires.

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Résumé analytique

 En décembre 2008, le marché des métaux a été secoué par une « tempête parfaite » mettant
 fin à la période de prospérité de cinq ans marquée par l’envolée des cours internationaux des
 métaux. Les effets combinés de chute de la demande des métaux et de la forte baisse de la
 demande des intrants par les investisseurs ont conduit à l’effondrement des cours du cuivre
 de deux tiers et de l’once d’or d’un tiers par rapport à leur niveau record de juillet 2008.

 La chute des cours des métaux a porté un sérieux coup aux réformes fiscales minières
 menées dans certains pays africains riches en ressources minières au cours de ces deux
 dernières années. Encouragés par la flambée des cours des métaux, les gouvernements de la
 Zambie, de la Tanzanie, d’Afrique du Sud et de la République démocratique du Congo ont
 dû modifier leurs législations fiscales ou les contrats miniers qu’ils ont signés avec les
 compagnies minières en vue d’accroître les revenus qu'ils perçoivent des rentes minières.
 Cette révision de contrats fiscaux est en partie due à la pression des citoyens – les
 populations africaines se sont rendus compte que l’essor de l’industrie minière ne s’est pas
 accompagné de l’augmentation des recettes fiscales sur l'exploitation minière ou des dépenses
 liées à leurs besoins de développement de base.

 Le bilan négatif des recettes fiscales générées de l'exploitation minière au cours de la période
 marquée par la hausse des prix des métaux et des minéraux a motivé les organisations non
 gouvernementales africaines et internationales à collaborer pour commanditer une étude sur
 le régime de fiscalité minière et la transparence dans sept pays africains. Les pays retenus sont
 le Ghana, la Tanzanie, la Sierra Leone, la Zambie, le Malawi, la République d’Afrique du Sud
 et la République démocratique du Congo (RDC). Chaque étude pays a examiné les régimes
 fiscaux précédents et actuels, les taux d'imposition ainsi que les motivations des changements
 fiscaux, et a comparé les modalités des contrats miniers avec les législations fiscales
 nationales.

Le principal argument développé dans le rapport est que les gouvernements africains n'ont pas
été en mesure d’optimiser les revenus fiscaux de l'exploitation minière qui leur sont dus par les
compagnies minières avant la flambée des prix entre 2003 et 2008. Ils n’ont pas été non plus
en mesure de profiter des profits exceptionnels résultant de la flambée des prix. Cet argument
se fonde sur deux raisons principales: ( i) les sociétés minières opérant en Afrique bénéficient
de nombreuses subventions et concessions fiscales ( ii ) Il y a une forte incidence de l'évasion
                                               6
fiscale par les sociétés minières à cause des contrats miniers, des fusions et acquisitions
d'entreprises de nature secrète, et divers mécanismes comptables «innovateurs». Associés aux
lacunes institutionnelles, ces deux facteurs contribuent dans une large mesure à la diminution
des recettes fiscales qui doivent rentrer dans les caisses des gouvernements africains. En outre,
ces facteurs concourent à la diminution de la contribution de la rente des ressources minérales
au développement national. C'est ce qui explique la prépondérance des indicateurs de pauvreté
dans les communautés et pays africains riches en ressources minières. Pour inverser cette
tendance et assurer la maximisation des recettes fiscales générées de l'exploitation minière en
vue du développement national, le rapport recommande des réformes politiques, législatives et
institutionnelles susceptibles de règlementer les paiements effectués par les sociétés minières
aux gouvernements nationaux.

Les sociétés minières prétendent qu’elles doivent être rémunérées pour les risques particuliers
auxquels elles sont exposées tels que la flambée des prix et la récession à travers des
exonérations et aux autres allégements fiscaux spéciaux. Mais ces subventions fiscales ainsi
que l’évitement fiscal et l’évasion fiscale pratiqués par les compagnies minières ont dépouillé
les trésors africains de millions de dollars de manque à gagner fiscal de l'industrie minière. Le
manque de transparence et du contrôle des transactions financières qu’effectuent les sociétés
minières aux institutions gouvernementales conjugués à l'incapacité des institutions
gouvernementales à vérifier les comptes complexes des sociétés minières multinationales
contribuent également à ces pertes.

Comment les subventions et l'évasion fiscales font chuter les revenus de
l'exploitation minière

Ce rapport soutient que les gouvernements africains n'ont pas réussi à percevoir les rentes
supplémentaires générés par les sociétés minières avant et pendant le bond des prix des
minéraux et pour cause : (i) ils ont accordés des subventions fiscales aux compagnies
minières et (ii) les sociétés minières n’ont sans cesse fait des pressions sur les gouvernements
en vue de l’introduction des clauses liées à l’allégement fiscal dans les contrats miniers
secrètes résultant à une stratégie agressive d’évasion fiscale. En conséquence, les populations
des pays riches en ressources minières continuent de vivre dans la pauvreté et sont, dans
certains cas victimes de conflits violents alimentés par la richesse de leurs sous-sols comme
c'est le cas aujourd'hui dans l'est de la RDC. Pour briser cette «malédiction des ressources» et
transformer la richesse minérale en revenus en vue du développement, la réforme des lois,
des politiques et des institutions qui régissent les paiements effectués par les sociétés minières
aux gouvernements s’impose.

Dans le rapport, les estimations sont données sur le manque à gagner par les gouvernements
                                                7
du Malawi, d’Afrique du Sud, de la RDC, de la Tanzanie, de la Sierra Leone, du Ghana et de la
Zambie suite aux allègements fiscaux spéciaux accordés aux entreprises dans les contrats
secrets ou dans les lois sur l'impôt minier promulgué dans ces pays depuis les années 1990. Le
rapport estime que les taux de redevance plus faibles ont coûté ou coûteront respectivement
jusqu'à 68 millions de dollar américain, 359 millions de dollar américain et 30 millions de dollar
américain par an au trésor public ghanéen, sud-africain et tanzanien. Au Malawi et en Sierra
Leone, des allégements fiscaux accordés dans les contrats miniers ont coûté ou coûteront aux
trésors publics jusqu’à 16,8 millions de dollar et 8 millions de dollar par an. En RDC, les
exonérations fiscales dans un seul contrat minier ont coûté au trésor 360.000 dollars par an.

En Afrique, les régimes de fiscalité minière sont un mélange de transactions fiscales secrètes et
discrétionnaire de même que les lois fiscales votées par le Parlement. La plupart des lois
fiscales minières datent des années 1990 et ont permis de réduire considérablement les impôts
afin d’attirer de nouveaux investissements étrangers directs dans le secteur. Cette politique de
réduction des impôts a été encouragée par la Banque mondiale dans tous ses pays clients en
Afrique comme un moyen de redynamiser le secteur minier. Nombre de ces lois permettent
aux ministres de négocier à leur discrétion des accords fiscaux avec les sociétés minières
individuelles, ce qui conduit souvent à la baisse des redevances, des impôts sur le revenu des
sociétés, des prélèvements sur les carburants, des rentes minières et à l’institution d’autres
taxes que celles prévues par la loi. Dans le pire des cas, les contrats peuvent exempter
complètement les compagnies minières de toutes taxes ou redevances, comme ce fut le cas
dans un certain nombre de contrats miniers signés entre les sociétés privées et les sociétés
publiques en RDC entre 1997 et 2003.

Historique des régimes fiscaux miniers encouragés par la Banque mondiale

Ce rapport retrace l’historique des régimes fiscaux miniers en Afrique depuis l'indépendance et
durant la période de fluctuation des prix internationaux des métaux. Il accorde une attention
particulière aux motivations de la Banque mondiale à ouvrir le secteur minier africain aux
investisseurs privés étrangers dans les années 1990, politique qui a conduit à la mise en œuvre
des régimes fiscaux miniers dans tous ses pays clients. Ensuite, le rapport indique que les
revenus constituent le principal profit de l'exploitation minière, ce qui indique qu’un régime
fiscal minier équitable et transparent revêt d’une importance capitale si la richesse minière est
traduite en développement. Le principal aspect de ce rapport examine les avantages fiscaux
accordés aux sociétés minières dans les lois et contrats fiscaux miniers, et donne des
estimations sur certains des coûts de ces exonérations. Ces subventions prennent la forme de
faibles taux d'imposition et des revenus non soumis à l’impôt. Il examine ensuite les stratégies
d'évasion fiscale utilisées par les sociétés minières tout en se concentrant principalement sur la
négociation des allégements fiscaux dans les contrats miniers confidentiels. Cette stratégie

                                                  8
d'évasion fiscale viole les directives de l'OCDE relatives aux multinationales à laquelle
nombre de ces compagnies prétendent adhérer. Certaines compagnies minières ont également
été accusées d’évasion fiscale - en Tanzanie, un commissaire de compte mandaté par le
gouvernement a révélé que quatre grandes compagnies d'exploitation des mines d’or du pays
auraient surévalué leurs pertes à des millions de dollars.

Comment augmenter les revenus perçus des activités minières ?
Pour inverser le « paradoxe de l’abondance », (le fait que les pays riches en ressources
naturelles sont le plus souvent les plus pauvres et mal gouvernés) caractéristique de
nombreuses sociétés africaines riches en ressources minières, des changements radicaux
doivent s’opérer. Ainsi, deux changements majeurs s’avèrent indispensables. Premièrement,
la transparence du processus d’élaboration des régimes fiscaux et des mécanismes de
paiement de l'impôt. Cette transparence exige que les citoyens soient en mesure de contrôler
les paiements, les recettes et l'utilisation des recettes fiscales minières. Pour contribuer à une
telle transparence, une nouvelle norme comptable internationale exigeant que toutes les
multinationales rendent compte des versements effectués aux gouvernements. Les bénéfices
qu’elles réalisent et les dépenses qu’elles effectuent dans chacun des pays où elles opèrent
doivent être déclarés de manière transparente. Le Conseil international des normes
comptables discute actuellement de l’introduction d’une telle norme dans le secteur de
l’industrie extractive. Cette initiative serait une réforme importante et permettrait aux
gouvernements et aux citoyens de suivre et superviser la collecte et l’affectation des recettes
budgétaires. Cela rendrait plus difficile le transfert des bénéfices entre filiales de sociétés
différentes. Deuxièmement, les régimes fiscaux miniers africains doivent être réformés afin
de s'assurer que les gouvernements africains sont en mesure de recueillir une part équitable
des rentes de l'exploitation minière pour financer leurs plans de développement nationaux.
Dans certains pays, cela nécessiterait une augmentation des taux de redevances et autres
taxes; dans d'autres, cela exigerait la fin de la pratique selon laquelle les clauses d’allégements
fiscaux contenues dans les contrats sont négociées en secret avec les entreprises
individuellement.

La chute des prix internationaux des matières premières minérales et la réduction du
financement international disponible pour de nouveaux investissements miniers pourraient
retarder les réformes fiscales de l'exploitation minière en cours ou récemment lancées dans
des pays comme la Tanzanie et la Zambie. En Zambie, le ministre des Finances a annoncé
lors de la présentation du budget à la fin janvier 2009 l’annulation d’une modification
fiscale adoptée par le Parlement il y a moins d'un an et l'introduction d'une nouvelle taxe sur
les bénéfices exceptionnels. S’adressant directement en juin 2008 aux sociétés minières lors
de la présentation du budget, le ministre tanzanien des finances a indiqué son incapacité à
                                                 9
mettre en œuvre les recommandations relatives à l’augmentation des taxes faites par une
commission présidentielle chargée de réviser le régime fiscal minier du pays bien qu'il n'ait
pas introduit une taxe sur le chiffre d'affaires des entreprises déclarant des pertes pendant
trois années consécutive ou plus .

 Nombre de gouvernements africains sont encore réticents à rendre transparent leurs
 transactions et recettes fiscales provenant des sociétés minières aux citoyens et aux
 parlementaires. De nombreuses sociétés minières continuent donc à faire pression pour
 obtenir des exonérations fiscales et ne parviennent pas à rendre compte de leurs revenus et
 des redevances qu’elles versent au gouvernement pour les communautés dans lesquelles elles
 opèrent. La crise du crédit et ses impacts, notamment la réduction des financements
 disponibles pour l'investissement minier serviront de motivation aux gouvernements pour
 poursuivre ces transactions secrètes. La crise servira aussi d’argument moral aux sociétés
 minières pour exiger beaucoup plus d'exemptions. Ces complications systémiques et ces
 politiques freinent la mise en œuvre de la réforme fiscale.

 Le rapport soutient cependant que des solutions à la fois systémiques et politiques sont
 nécessaires pour permettre l’augmentation des revenus de l'exploitation minière et
 promouvoir la transparence. Au niveau systémique, il est nécessaire que toutes les
 compagnies cotées dans les bourses de valeurs mettent en place une nouvelle norme
 internationale d'information financière. Il faut les obliger à rendre compte de leurs opérations
 financières et les redevances qu’elles versent au gouvernement et à d'autres structures selon
 les pays. Cela permettra aux citoyens et aux parlements de contrôler les flux financiers entre
 les sociétés mères et les filiales, et de détecter les pratiques d'évasion fiscale.

 Les gouvernements africains doivent également réviser leurs lois sur la société afin d’exiger
 que les filiales des multinationales minières incorporées dans leurs juridictions publient les
 informations financières requises par l'Initiative pour la transparence de l'industrie extractive
 (ITIE). Cela permettra d'assurer que les sociétés minières privées ou étatiques comme le
 nombre croissant de sociétés minières chinoise appartenant ou financées par l’Etat chinois
 soient tenues comptables par la législation nationale quant à leurs profits et pertes, et aux
 versements effectués au gouvernement et à d'autres structures.

Recommandations aux gouvernements africains
   1. Collaborer avec la Commission économique des Nations Unies pour
      l'Afrique (CENUA) pour élaborer et publier un guide facile à utiliser
      sur la fiscalité minière. Le guide doit mettre en exergue les meilleures
      pratiques, détailler les objectifs, évaluer les pertes de revenus et les
      avantages de chaque type d'instrument fiscal et de système de
                                               10
concession fiscale.

   2. Réviser les lois sur les sociétés et les règlements financiers pour exiger
      que toutes les entreprises de l'industrie extractive utilisent le modèle
      de l'ITIE dans leurs rapports financiers annuels.

   3. Mettre un terme à la pratique visant à accorder des exonérations
      fiscales aux sociétés minières dans les contrats miniers. Toutes les
      clauses portant fiscalités minières devraient être légiférées
      conformément aux lois en vigueur et confirmées dans les accords
      d’exploitation minière.

Aux parlements africains
   1. Adopter des lois exigeant des accords d’exploitation minière qui doivent être
      ratifiées par les parlements, comme c'est le cas au Ghana et en Sierra Leone, et les
      rendre public

   2. Insister à l’utilisation d’une nouvelle norme comptable internationale qui obligerait
      les compagnies minières à rendre compte de leurs profits, les dépenses et taxes, les
      redevances et subventions communautaires payées à chaque exercice selon les pays.

Au Conseil international des normes comptables
Adopter une nouvelle norme comptable internationale pour les industries extractives qui les
obligera à rendre compte de leurs profits, les dépenses et taxes, redevances et subventions
communautaires payées à chaque exercice selon les pays.

Aux bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux
Accroître leurs aides financières aux gouvernements africains afin qu’ils puissent améliorer
leurs capacités de supervision et de vérification des comptes des sociétés minières et réviser
leurs lois fiscales. Les gouvernements africains devraient être libres d'utiliser ce financement
pour recourir à l'assistance juridique et à d’autres formes d’assistance technique de n'importe
quel fournisseur de services de leur choix

                                               11
Introduction

 Ce rapport a été rédigé par un groupe d'organisations de la société civile africaine et
 internationale préoccupé par le manque de transparence dans les contrats miniers et par que
 la perte de revenu en raison des avantages fiscaux miniers excessifs accordés aux sociétés
 multinationales minières qui évitent parfois de payer les taxes et pratiquent l’évasion fiscale .

 En s’appuyant sur des recherches menées au Ghana, en Zambie, en Tanzanie, en Sierra
 Leone, au Malawi, en RDC et en Afrique du Sud, nous avons démontré dans nos analyses
 que les gouvernements africains enregistrent des pertes estimées à des millions de dollars en
 recettes fiscales provenant de l'industrie minière. Ces pertes sont en grande partie attribuées
 aux allègements fiscaux trop généreux accordés aux compagnies minières généralement de
 façon illégale dans les contrats miniers secrets, ainsi qu’à l'évitement fiscal et à l’évasion
 fiscale. Ces pertes sont alimentées par le manque de transparence et de contrôle des
 redevances que les sociétés minières versent aux institutions gouvernementales et à
 l'incapacité des institutions gouvernementales à vérifier les comptes complexes des
 multinationales minières.

 Quatre décennies après les indépendances, de nombreux Africains continuent de nourrir de
 grands espoirs sur le développement économique et social du continent à cause de sa
 richesse énorme en ressources minières. Le plan de développement de l'Union africaine, le
 Nouveau partenariat économique pour le développement de l'Afrique (NEPAD), estime que
 l'activité minière, si elle est bien gérée, peut transformer les économies du continent. Cette
 conviction a conduit le NEPAD à instituer en 2002 un Partenariat minier africain (PMA)
 avec les sociétés minières.

 En outre, la Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique (CENUA) est le fer
 de lance du développement d'une Vision minière pour l'Afrique et conduit le processus de
 l’élaboration des lignes directrices sur les meilleures pratiques à l’intention des
 gouvernements africains afin d’assurer que leurs lois minières protègent l'environnement et
 les communautés tout en favorisant la transparence et la responsabilisation dans le paiement
 des redevances aux gouvernements.

Enfin, de nombreux gouvernements africains ont revu leurs contrats miniers et les lois fiscales
depuis l’essor des prix1 en 2003 et ont mis en place des systèmes de fiscalité minière plus
transparents et plus avantageux.

Ces nouvelles initiatives font partie des réponses au fait que ni la nationalisation, ni la
libéralisation des activités minières dans les pays africains riches en ressources minérales
                                               12
n’ont pas pu apporter une transformation durable à leurs économies et à leurs sociétés. Les
richesses minières ont plutôt alimenté des conflits et sont sources de conflits violents dans
des pays tels que l'Angola, la République démocratique du Congo et la Sierra Leone. Elles
ont retardé la diversification économique dans les pays tels que le Botswana et la Zambie, et
n’ont pas pu contribuer au développement des communautés et des économies des pays
riches en ressources minérales. Bien que les dirigeants africains aient reconnu cela 2, ils n’ont
pas pu saisir l’opportunité offerte par la flambée des prix des minéraux durant la période
faste de 2003-2008 pour maximiser les profits de l'exploitation minière.

L’opinion qui prévaut au sein de la communauté internationale3 est que les rentes provenant
de l’exploitation des ressources naturelles sont des sources sûres de déstabilisation dans les
pays riches en minéraux qui sont dirigés par un régime dictatorial (Zaïre sous Mobutu Sese
Seko) ou otages des conflits internes violents (Angola et la Sierra Leone). Dans le passé,
l’inexistence de l’Etat ou l’absence de l’autorité étatique reconnue pour exercer des fonctions
de l'Etat dans ces territoires ont conduit à l’absence d'institutions légitimes capables de
promulguer ou d'appliquer de manière démocratique et transparente des règles et des lois
convenues pour régir le fonctionnement et l’imposition des activités minières.

En conséquence, les entreprises ont souvent fini par faire des affaires avec des individus
plutôt que des institutions publiques. A titre d’exemple, les contrats miniers secrets signés
pendant la guerre de 1998-2003 en RDC ou pendant le conflit 1991-2001 en Sierra Leone ont
été largement influencés par des relations clientélistes entre les sociétés minières et les élites
politiques – les sociétés minières voulaient obtenir des avantages fiscaux en échange des
rétro-commission4 à verser aux élites politiques. L’exploitation minière artisanale par les
forces de l'opposition et leurs partisans contribue à la prolongation des conflits dans les
pays possédant des gisements minéraux à la surface de la terre ravagés par la guerre.

Les ressources naturelles ne doivent pas être une «malédiction» pour le développement. Les
citoyens - qui sont les bénéficiaires ultimes des ressources naturelles dans la plupart des
constitutions africaines - mettent de plus en plus de pressions sur les élites politiques du
continent afin d’assurer que les rentes d’exploitation minière soient fixées de manière
transparente et les revenus soient équitablement distribués sur la base des objectifs de
développement de la société. En définitive, c'est la qualité des processus législatifs et politiques
nationaux, les institutions de l'Etat et les dirigeants politiques qui vont déterminer si les
richesses naturelles servent à financer les projets de développement ou servent à garnir les
poches des élites politiques et économiques. Ce point de vue est partagé par la CEA qui
indique que « c’est la qualité des institutions qui détermine les gains de l'exploitation minière »
et que « la faiblesse des institutions a été à l'origine de la malédiction des ressources en
Afrique», et non l'activité minière en elle-même5». Le directeur des Mines du Botswana partage
                                                13
le même point de vue. Il attribue le fait que le gouvernement arrive à percevoir 75 pour cent
de taxes sur les bénéfices nets déclarés par les sociétés diamantaires et des dividendes aux
politiques stables , à un leadership politique efficace, une bureaucratie fiscale de qualité et à la
bonne gouvernance6 .

Ce rapport se penchera sur les lois, les politiques et les institutions qui régissent les
  paiements que les compagnies minières effectuent aux gouvernements sous forme de
  taxes, de redevances et droits. Il soutiendra que l'augmentation des recettes budgétaires
  dans les pays africains ne correspond pas à l'augmentation des bénéfices des sociétés
  minières pendant la période de la flambée des prix des produits minéraux entre 2003 et
  2008 parce que (i) les gouvernements ont accordé des subventions fiscales à l'industrie
  et (ii) les sociétés minières ont manœuvré pour obtenir des allégements fiscaux dans les
  contrats miniers secrets, entraînant       une stratégie d'évasion fiscale abusive. Afin
  d'optimiser les recettes fiscales pour le développement, les gouvernements africains
  doivent :

• Cesser d’accorder des subventions aux compagnies minières étrangères à travers des
  concessions fiscales.

• Mettre en place des régimes de fiscalité minière conformes à une stratégie industrielle
  globale.
• Interdire l'utilisation des contrats confidentiels pour négocier des allègements fiscaux qui
  aident les compagnies minières à éviter de payer des taxes et qui contribuent à la réduction
  des revenus générés auprès des sociétés minières à des fins des travaux de développement
• Améliorer la surveillance institutionnelle du régime de fiscalité minière

Actuellement en Afrique, les régimes de fiscalité minière sont un ensemble de transactions
fiscales discrétionnaires et confidentielles et de lois votées par le Parlement. Les transactions
minières secrètes et discrétionnaires doivent être exclues du régime fiscal minier. Les
gouvernements et les parlements devraient par contre élaborer et adopter des lois fiscales
que les citoyens, les compagnies, les élus et les investisseurs peuvent superviser par le biais
d’une procédure budgétaire. En outre, le rapport soulignera une nouvelle norme comptable
internationale qui obligerait les multinationales minières à publier toutes leurs opérations
financières, y compris toutes leurs redevances aux gouvernements et aux autres structures
des pays dans lesquels elles opèrent.

Ce rapport présentera ces requêtes sous la forme suivante : tout d'abord, il fera un bref
aperçu historique de la fiscalité minière en Afrique dans le contexte du boom minier et de
                                                14
l'implication de la Banque mondiale. Deuxièmement, il fournira des explications sur les
raisons pour lesquelles la communauté africaine et la communauté internationale doivent
accorder une attention particulière à la fiscalité minière. Troisièmement, il donnera un
aperçu de la méthode qu’utilisent les sociétés minières pour éviter de payer des taxes
dans les pays africains. Enfin, il présentera les deux principaux changements nécessaires
pour inverser la fuite des ressources minières qui pourraient servir à financer les projets de
développement dans les pays africains riches en ressources minières : primo, les régimes
fiscaux et les paiements de taxes doivent devenir transparents afin que les citoyens
puissent contrôler les redevances versées par les compagnies minières. Secundo, les
régimes fiscaux miniers devraient être réformés afin de s'assurer que les États africains
recueillent une part équitable des revenus miniers pour financer leurs plans de
développement.

Les recherches effectuées dans les pays concernés dans le cadre de ce rapport ont été
commanditées et financées par Third World Network Africa, Tax Justice Network Africa,
Southern African Resource Watch, Action Aid International et Christian Aid. Nous avons
travaillé avec des experts miniers au Ghana, au Malawi, en République démocratique du
Congo, en Sierra Leone, en Tanzanie, en Zambie et en Afrique du Sud pour étudier en
détail l'évolution de la fiscalité minière nationale, les forces motrices justifiants ces
régimes, ainsi qu'un certain nombre de contrats miniers dans ces pays7.

Dans chacun de ces pays, les organisations de la société civile nationale suivent activement
l'impact des activités minières sur l'environnement et sur les communautés et militent en
faveur du changement des législations minières et de comportement dans l’industrie
minière. Nombre de ces organisations sont membres de L'Initiative africaine sur
l'exploitation minière, l'environnement et la société (AIMES), un réseau d'organisations de
la société civile africaine et internationale qui mène une campagne active en vue d’une
exploration minière plus responsable et plus transparente en Afrique. Le réseau est
coordonné par Third World Network Africa, basé au Ghana.

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Chapitre un
Bref historique des régimes de fiscalité minière en Afrique

 Depuis l'indépendance, les régimes fiscaux miniers africains ont été étroitement liés au prix
 international des minéraux et des évolutions de la demande des métaux. La Conférence des
 Nations unies sur le commerce et le développement distingue trois phases dans l'économie
 mondiale des métaux - les années 1960 et 1970 , une décennie de forte demande de métaux ,
 la hausse de prix internationaux des minéraux et l’augmentation de la production , les années
 1980 et 1990 , une décennie marquée par la baisse de la demande des métaux par les pays
 industrialisés , la surproduction des minerais brut et la baisse des prix et la phase actuelle,
 commencée en 2002 et marquée par une envolée record des prix internationaux des matières
 premières minérales soutenue par les demandes en métaux demande des pays nouvellement
 industrialisés comme la Chine et l’Inde8 . Ce boom des prix n’a été que de courte durée –en
 janvier 2009, les prix internationaux des produits de base étaient revenus à leurs niveaux du
 début des années 2000. Les gouvernements africains ont adopté des approches très
 différentes à chacune de ces phases

 Première phase: augmentation des prix et des revenus

Durant les années 60 et 70, les gouvernements des pays africains riches en minéraux
nouvellement indépendants ont tous exprimé leur souhait de développer, de diversifier et
d’industrialiser leurs économies en se basant sur l'industrie minière. Dans la plupart des pays,
l’exploitation minière est devenue une activité dirigée par l’Etat. En nationalisant l'industrie,
les gouvernements espéraient générer plus de bénéfices de l'exploitation minière en créant des
emplois locaux, en consacrant les revenus générés aux services sociaux pour les communautés
minières et en enregistrant des recettes budgétaires plus élevées tout en ayant un intérêt direct
dans l'entreprise.

Durant cette période, les cours des minéraux ont connu une forte hausse à la suite de l'essor
de la demande internationale des matières premières minérales stimulée par une croissance
axée sur les métaux à la fois dans les pays industrialisés et dans les pays nouvellement
industrialisés. En Afrique, la plupart des opérations d'exploration et d'extraction minières ont
été gérées par des entreprises publiques – beaucoup d'entre elles étaient auparavant privées
avant d'être nationalisées. Compte tenu de la nature étatique des redevances minières, les
revenus miniers forment une part importante des recettes publiques et ont été utilisés dans des
Etats plus orientés vers le développement à financer des plans de développement nationaux.
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Soutenus par la flambée des prix internationaux des métaux, le produit intérieur brut de la
Zambie a, en 1969, dépassé celui de la Corée du Sud et du Brésil. Dans les années 70, les
revenus provenant des opérations d'extraction du cuivre, gérés par Zambia Consolidated
Copper Mines, une société étatique, a fourni deux-tiers des recettes publiques, financé la
prestation de services de santé et d'éducation pour tous, ainsi que l'investissement dans le
développement de l'agriculture et d'autres secteurs. En 1989, les revenus provenant de
l'extraction minière ont contribué à 35 % des recettes publiques dans l'ex-Zaïre et 58 % au
Botswana –grâce en grande partie aux actions détenues par l’Etat dans l'exploitation minière.
D'ici là, cependant, les impôts miniers contribuaient seulement à 16 % des recettes publiques
en Zambie, reflet de la situation désastreuse de l'industrie.

Toutefois, malgré les grands espoirs et des déclarations politiques de nombreux
gouvernements africains à cet effet, l’exploitation minière n'a pas stimulé l'industrialisation
des économies du continent, à l'exception peut-être du régime d’apartheid en Afrique du Sud.
Néanmoins, dans des pays comme le Botswana et la Zambie, les activités d'extraction du
cuivre et du diamant ont permis à ces deux Etats de générer des revenus significatifs et ont
permis le développement économique des communautés minières.

Deuxième Phase: prix bas et taxes peu élevées
Durant les années 80 et 90, une croissance plus lente des activités extractives sur le plan
international ainsi que la surproduction ont conduit à un effondrement des prix
internationaux – à l'exception de la période comprise entre 1990 et 1997 marquée par
l’augmentation des cours. Nombre de pays africains riches en minéraux ont été subitement
confrontés à une crise de la dette souveraine étant donné qu’ils n’ont plus gagné
suffisamment de devises de leurs exportations minières pour financer les remboursements de
prêts qu'ils ont contractés pendant les années d’essor. En dernier recours, la Banque
mondiale, par le biais, de l'Association internationale de développement s’est substituée aux
prêteurs traditionnels, ce qui lui a donné la possibilité de réécrire la législation et la fiscalité
minières dans toute l’Afrique. Cela s’est traduit par une diminution des taux d’imposition et
par des allègements fiscaux au profit des sociétés minières (voir encadré 1.1).

Ces réformes fiscales et les avantages fiscaux offerts par certains principaux pays miniers
tels que l'Australie, le Canada et les États-Unis à leurs multinationales minières pour
contrôler les explorations ont entraîné la montée en flèche des « juniors » qui obtiennent
des permis d’exploration minières et échange leurs concessions ou tente d’accumuler des
profits en un temps record.

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Encadré 1.1
Stratégie minière de la Banque mondiale en Afrique

Avant les années 80, le financement des projets d'exploitation minière entrepris par le
secteur public ou privé dans les pays en développement était la principale préoccupation
du groupe de la Banque mondiale. A l'époque, c'était la seule source de financement
disponible à ces opérateurs. Toutefois, à partir de la moitié des années 1980, la BM a
décidé de mettre l’accent sur l’appui à la réforme des programmes de développement
minier dans les pays en développement. Elle a, en effet, commencé à fournir un soutien
financier et des conseils techniques à ses pays clients pour les aider à stimuler une plus
grande participation du secteur privé dans l'industrie minière grâce aux régimes fiscaux
«compétitifs ». A partir de la moitié des années 90, la BM a joué un rôle prépondérant
dans la formulation de nouveaux cadres juridiques miniers dans un certain nombre de pays
africains clients à « faibles capacités institutionnelles», dont la Tanzanie, le Ghana, la
Zambie, la Sierra Leone et la République Démocratique du Congo9.

En 1992, la Banque mondiale a publié sa « stratégie pour l'exploration minière en
Afrique ». Cela faisait partie d'un processus mondial de la Banque mondiale pour définir ce
qu’elle considérait comme son rôle dans le renforcement de l'exploitation minière en vue
du développement. A l'époque, l’exploitation minière commerciale se déroulait dans 20
pays d'Afrique.

L'objectif principal de la stratégie de la Banque mondiale pour l'exploitation minière en
Afrique et dans d'autres pays en développement était d’attirer des investissements « des
capitaux à haut risque » dans l'exploration de nouveaux gisements et se charger ensuite de
la gestion de l’exploitation des mines qui se faisait de manière hasardeuse par les Etats. La
stratégie africaine prévoit expressément que « la principale motivation de la Banque et des
bailleurs de fonds devrait être la réduction des « risque » pour l'investisseur ».

Cette proposition de la Banque mondiale s’appuie sur le fait que les investissements
étrangers directs dans le secteur minier sont importants pour la redynamisation de
l'industrie qui a été en partie ravagée par la mauvaise gestion et la corruption dans les
entreprises publiques. L’industrie avait donc besoin de capitaux et des technologies qui
n’étaient pas disponibles dans les pays africains.

Cette impulsion de réforme des régimes miniers africains afin d’attirer des investissements
étrangers faisait partie d'une stratégie globale visant à réduire le rôle que doit jouer l’Etat
dans le processus de développement. Il était également lié à la nécessité pour les
                                                18
gouvernements africains de gagner des devises étrangères pour rembourser les prêts
contractés durant la période de la flambée des prix. La Banque mondiale a utilisé les
conditionnalités liées à l'attribution de l’aide et d'autres moyens pour persuader les
gouvernements africains réticents à privatiser leurs industries minières et attirer des
investissements étrangers dans le secteur, souvent au prix du manque à gagner qui pourrait
être consacré au développement.

Le changement du taux d'impôts et autres avantages fiscaux offerts aux compagnies
minières étrangères s’explique par la pénurie du capital consacré à l'exploitation minière
compte tenu des prix internationaux. C'est pourquoi les pays africains ont rivalisé entre
eux et avec d'autres économies minières pour attirer des capitaux à hauts risques en
mettant en place des régimes fiscaux « compétitifs ». Selon la stratégie, les investisseurs
exigent des conditions compétitives et des garanties absolues quant à la stabilité du climat
d'investissement et le respect des règles du jeu ».

Toutefois, ces régimes fiscaux ne font pas partie d'une plus grande stratégie industrielle
dans aucun pays africain. Ils seront plutôt contraires à l'opinion internationale dominante–
appelée le Consensus de Washington – selon laquelle le secteur privé et non des Etats,
devraient stimuler le développement.

La stratégie minière de la Banque mondiale n’a en aucune façon pu apporter de la
transparence dans les activités minières notamment les activités de collecte de taxes et
autres redevances que les gouvernements perçoivent des activités minières. Cette situation
a changé pendant ces dernières années :
la Banque mondiale est maintenant devenue un grand défenseur de l'Initiative pour la
transparence dans les industries extractives (voir l'encadré 4) et encourage activement les
gouvernements des pays clients riches en ressources à approuver l'ITIE. Elle aide même à
financer leur capacité à mettre en œuvre l'initiative. En RDC, par exemple, la Banque
mondiale a dénoncé le caractère secret des contrats miniers et a financé une étude
technique des contrats10. Toutefois, une étude récente menée par Global Witness et le
Centre d'Information de la Banque sur comment le FMI et la Banque mondiale utilisent
leur influence pour promouvoir la transparence des industries extractives a révélé que
s’agissant de la transparence, l'engagement de la Banque mondiale n'est ni cohérent ni
absolu dans tous les pays riches en ressources.11

 « Les redevances sont souvent la seule importante source de revenus que gagnent les gouvernements durant
les premières années de nouvelles exploitations minières en raison des allégements fiscaux offerts aux
sociétés minières ».

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La stratégie de la Banque mondiale a soutenu qu’il pourrait y avoir d’importants
investissements privés dans l'exploration et l'exploitation minière si les gouvernements
africains pourraient réduire les risques des petits et moyens investisseurs surtout –
appelés « juniors », basés au Canada et en Australie. En conséquence, « en structurant la
fiscalité en vue de réduire le risque d'impôts ou de redevances qui contribuent aux pertes
liées à exploitation, les gouvernements devraient prendre des mesures pour garantir plus
d'investissements et augmenter des taxes [recettes] durant la durée de vie de la mine ».
Etant donné que la plupart des pays africains appartiennent à la catégorie de pays à haut
risque, des régimes fiscaux très compétitifs et des incitatifs fiscaux devraient être mis en
place pour attirer des investissements des sociétés internationales ». La Banque mondiale
a fait valoir au nom de sociétés minières que les régimes fiscaux « compétitifs » leur
permettraient de «contrôler les coûts»

Concernant les recettes publiques, la stratégie a démontré que la politique fiscale devrait
se pencher sur la maximisation des recettes publiques pendant toute la durée de
l’exploitation minière – entre 10 et 20 ans. Cela nécessiterait des politiques qui favorisent
l'investissement dans les nouvelles mines étant donné que les nouveaux investisseurs
miniers devaient gérer leurs flux de trésorerie compte tenu de l’ampleur des fluctuations en
matière de rentabilité à cause de la nature cyclique des flux des prix. La Banque mondiale a
donc soutenu que le système fiscal devrait s’appuyer sur les taxes basées sur le profit.

Compte tenu de ce point de vue, la stratégie de la Banque a déconseillé fortement aux
gouvernements africains de fixer les redevances en se basant sur la valeur des ventes mais
plutôt sur les bénéfices déclarés par les compagnies minières. La Banque a maintenu que,
lorsque les redevances sont facturées en fonction de la juste valeur marchande à part égale
aux compagnies qui réalisent des profits et à celles qui réalisent des pertes, cela a)
augmente le risque de pertes d’exploitation et b) dissuade les compagnies d’entreprendre
les activités d’exploitation des mines souterraines à des coûts exorbitants et de qualité
inférieure, ce qui réduit la durée de vie de la mine. Paradoxalement, aucun des pays clients
de la Banque mondiale n’a suivi ses conseils pour supprimer complètement les
redevances. Ils ont plutôt diminués les redevances basées sur les valeurs marchandes
fixées aux compagnies. Le troisième chapitre montrera comment les redevances sont
souvent la seule plus importante source de revenus des gouvernements durant les
premières années de nouvelles exploitations industrielles, en raison des allégements fiscaux
offerts aux sociétés minières. Si elle insiste sur les risques que courent les compagnies
impliquées dans l'exploitation minière, la stratégie de la Banque ne dit rien sur les risques
importants auxquels font face les communautés environnantes des gisements miniers qui
comprennent notamment la perte de moyens de subsistance, des habitations et des
ressources naturelles de même que les risques sanitaires. Ironie du sort, la Banque
                                               20
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