Colloque sur le louage résidentiel: La légalisation du cannabis en matière de logement et ses conséquences - Barreau de Montréal
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Colloque sur le louage résidentiel: La légalisation du cannabis en matière de logement et ses conséquences Me Valérie Cuierrier-Besner Gagnon & Associés, avocats Montréal, le 30 octobre 2018 MISE EN GARDE: Le Barreau de Montréal organise de nombreuses activités et conférences à l'intention de ses membres. Certains conférenciers acceptent gracieusement que le Barreau de Montréal publie leurs textes et présentation sur son site Internet au bénéfice de l'ensemble des avocats. Ces textes et documents reflètent l'état du droit au moment de leur présentation et ils ne font l'objet d'aucune mise à jour, sauf indication contraire. Ils ne dispensent pas les avocats qui s'y réfèrent de la lecture de la législation en vigueur.
Encadrement législatif 1. Loi sur le cannabis (fédéral) ❖Éléments à retenir • Entrée en vigueur le 17 octobre 2018 • La légalisation concerne les personnes de 18 ans ou plus (art. 8) • Possession de 30 gr maximum de cannabis séché (ou son équivalent sous forme non séchée) (art. 8) • La possession de 4 plants (à la fois) est permise (art. 8 et 12) • La vente de produits comestibles et concentrés n’est pas encore autorisée mais devrait l’être d’ici un an • Le programme actuel de cannabis médical est maintenu
Encadrement législatif 2. Loi encadrant le cannabis (Québec) ❖Adoptée le 12 juin 2018 et est entrée en vigueur le 17 octobre 2018, pour la majorité des dispositions (certaines étant entrées en vigueur le 12 juin 2018 et le 7 août 2018) ❖Éléments importants à retenir • La production est interdite pour les particuliers (art. 10); • La vente ne pourra s’effectuer que par la SQDC (art. 23 et 25); • Les lieux dans lesquels la consommation du cannabis est permise sont similaires à ceux où il est permis de fumer le tabac et autres produits de tabagisme.
Encadrement législatif Récapitulatif des interdictions générales ❖ « Lieux fermés » (art. 12 de la Loi encadrant le cannabis) • 1° les installations maintenues par un établissement de santé ou de services sociaux visé par la Loi sur les services de santé et les services sociaux ou par la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris (chapitre S-5) • 3° les résidences privées où sont offerts des services de garde en milieu familial […] • 8° les aires communes des immeubles d’habitation comportant deux logements ou plus • 9° les aires communes des résidences privées pour aînés au sens du deuxième alinéa de l’article 346.0.1 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux • 10° les maisons de soins palliatifs et les lieux où l’on offre des services de prévention, d’aide et de soutien aux personnes en détresse ou démunies, y compris des services d’hébergement temporaire, sauf si ces services sont offerts dans une résidence privée • 15° les milieux de travail, à l’exception de ceux situés dans une résidence privée • 17° tous les autres lieux fermés qui accueillent le public
Encadrement législatif Récapitulatif des interdictions générales ❖Interdiction totale de faire la culture du cannabis non thérapeutique à des fins personnelles (art. 10 de la Loi encadrant le cannabis) ❖Dans une résidence où habite plus d’une personne majeure, la possession de plus de 150 grammes de cannabis séché est proscrite (art. 7(2) de la Loi encadrant le cannabis)
Application au droit locatif 1. Ce que le bail peut prévoir 2. À quel moment l’interdiction peut être incluse au bail 3. La jurisprudence liée au cannabis
Application au droit locatif 1. Ce que le bail peut prévoir ❖La clause d’interdiction de fumer dans un bail • Koretski c. Fowler, 2008 QCCQ 2534 • St-Hilaire c. Dorion 2017 QCRDL 3654 (CanLII), • Manoir Lady Maria (9189-0954 Québec inc.) c. Dee, 2018 QCRDL 29057 (CanLII) • White c. Prospect Belvedere Services Corporation, 2012 QCCQ 9242 (CanLII))
Application au droit locatif 2. À quel moment l’interdiction peut être incluse au bail ❖ Nouveaux locataires ❖ Disposition transitoire de la Loi encadrant le cannabis (art. 107) ❖ Locataires existants
Disposition transitoire Loi encadrant le cannabis 107. Un locateur peut, d’ici le 15 janvier 2019, modifier les conditions d’un bail de logement en y ajoutant une interdiction de fumer du cannabis. À cette fin, le locateur remet au locataire un avis de modification décrivant l’interdiction de fumer du cannabis applicable à l’utilisation des lieux. Le locataire peut, pour des raisons médicales, refuser cette modification. Il doit alors aviser le locateur de son refus dans les 30 jours de la réception de l’avis. Dans un tel cas, le locateur peut s’adresser à la Régie du logement dans les 30 jours de la réception de l’avis de refus pour faire statuer sur la modification du bail. En l’absence de refus, l’interdiction est réputée inscrite au bail 30 jours après la réception par le locataire de l’avis de modification.
Locataires existants 1. L’entente / la négociation en cours de bail 2. La modification du bail (art 1942 et suivants C.c.Q.) ❖ Avis à transmettre ❖ Délais respecter ❖ Refus du locataire
Application au droit locatif 3. La jurisprudence liée au cannabis ❖Le cadre législatif ❖La résiliation du bail et les troubles de voisinage
Le cadre législatif ❖ 976. Les voisins doivent accepter les inconvénients normaux du voisinage qui n’excèdent pas les limites de la tolérance qu’ils se doivent, suivant la nature ou la situation de leurs fonds, ou suivant les usages locaux. ❖ 1855. Le locataire est tenu, pendant la durée du bail, de payer le loyer convenu et d’user du bien avec prudence et diligence. ❖ 1860. Le locataire est tenu de se conduire de manière à ne pas troubler la jouissance normale des autres locataires. Il est tenu, envers le locateur et les autres locataires, de réparer le préjudice qui peut résulter de la violation de cette obligation, que cette violation soit due à son fait ou au fait des personnes auxquelles il permet l’usage du bien ou l’accès à celui-ci. Le locateur peut, au cas de violation de cette obligation, demander la résiliation du bail.
La résiliation du bail et les troubles de voisinage ❖Canada Procureur général c. JTI Macdonald Corp, 2007 CSC 30 (par. 30) La Cour suprême du Canada reconnaît que la protection de la population contre la fumée secondaire est un objectif d’intérêt légitime.
La résiliation du bail et les troubles de voisinage ❖ Tessier c. Ruseva, 2016 CanLII 151344 (QC RDL) • Faits : Demandes croisées, soit une demande de diminution de loyer, dommages et ordonnances d’exécution de la part de la locataire et demande de résiliation de bail pour plusieurs motifs, dont les odeurs de cannabis, de la part de la locatrice • Question en litige : La locataire contrevient-elle à ses obligations et cause-t-elle un préjudice sérieux à la locatrice? Dans l'affirmative y a-t-il lieu d’émettre des ordonnances plutôt que de prononcer la résiliation du bail? • Motifs et conclusions : La demande de la locataire est rejetée. La résiliation du bail est accordée.
La résiliation du bail et les troubles de voisinage ❖ Tessier c. Ruseva, 2016 CanLII 151344 (QC RDL) - suite [60] Même si il peut paraître superfétatoire d'en traiter à ce stade, la consommation de cannabis de la locataire cause clairement de sérieux préjudices et la preuve, dont le certificat médical de la locataire lui permettant de consommer cette drogue pour son aspect thérapeutique, démontre clairement que cette consommation ne cessera pas or, ce n'est pas parce qu'une personne ne commet pas une infraction criminelle en possédant ou en consommant de la marijuana prescrite par un médecin que cela crée un droit d'indisposer les voisins en leur imposant ce que l'on appelle couramment la fumée secondaire. [61] Cette appellation de « fumée secondaire » ne signifie pas que cette fumée contient moins de produit hallucinogène que la « fumée principale » mais simplement que cette fumée est inhalée par des personnes qui ne sont pas les consommateurs de ce produit et qu'elle est diluée dans l'air. Or, s'il est légal et volontaire pour la locataire d'en consommer, elle ne saurait imposer ce choix à des gens qui n'en veulent pas et pour qui la consommation de ce produit demeure une infraction criminelle. [62] Cette consommation quotidienne de stupéfiant qui cause en l'espèce un préjudice sérieux aux propriétaires et aux voisins constitue un autre motif qui justifie, à lui seul, la résiliation du bail.
La résiliation du bail et les troubles de voisinage ❖ Chassé c. Chartier, 2018 QCRDL 235 (et Chartier c. Chassé 2018 QCCQ 2823) • Faits : le locataire fait la culture de plants de cannabis et le consomme à des fins thérapeutiques, et le tout cause des troubles et inconvénients importants au locateur • Question en litige : l’utilisation régulière de cannabis, même à des fins thérapeutiques, peut-elle entraîner la résiliation du bail? • Motifs et conclusions : Le locateur a rempli les deux conditions démontrant qu’il a subi des troubles de voisinage au sens de l’art. 976 C.c.Q. (anormal et illégitime) Ce n’est pas parce que le locataire détient une prescription médicale pour la consommation de cannabis qu’il a le droit d’indisposer ses voisins en leur imposant sa fumée secondaire
La résiliation du bail et les troubles de voisinage ❖ Cholette c. Cuellar, 2018 QCRDL 23044 • Faits : Le locateur demande la modification du bail afin que soit interdit la consommation de cannabis dans le cadre du renouvellement du bail • Question en litige : le recours en modification des conditions du bail est-il le recours approprié lorsque la demande du locateur vise à ajouter des interdictions au bail à la suite d’un usage fait par le locataire ? • Motifs et conclusions : On ne peut permettre au locateur, dans le cadre d’une demande de modification de bail d’ajouter une condition, laquelle vise plutôt à sanctionner un comportement problématique aux yeux du locateur. Il n’est donc pas approprié de procéder à une telle détermination dans le cadre d’une demande de fixation de loyer ou de modification aux conditions du bail. La demande de modification de clause du bail est rejetée.
La résiliation du bail et les troubles de voisinage ❖ Khouildy c. Quintal, 2018 QCRDL 62644 • Faits : Demande de diminution de loyer et dommages de la part du locataire N.B. il s’agit d’une décision rendue par défaut contre le locateur • Question en litige : Le locataire a-t-il droit à une diminution de loyer? • Motifs et conclusions : On accorde une diminution globale pour les bruits et les odeurs de 75$ pour un mois.
La résiliation du bail et les troubles de voisinage ❖ Ce qu’on peut prévoir pour le futur: • Le trouble de voisinage devrait être interprété de la même façon vu les analyses précédentes dans la jurisprudence • La modification du bail pour ajouter une interdiction de fumer le cannabis devrait subir le même sort que les demandes visant l’interdiction liée au tabac • On devrait interdire de fumer le cannabis dans les lieux où il est déjà interdit de fumer le tabac (et autres produites de tabagisme) • La production devrait demeurer interdite dans les logements à moins de contestation quant à la légalité de la Loi encadrant le cannabis
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