Coronavirus, Titanic l'effet papillon ou quand tout bascule pour trois fois rien
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Coronavirus, Titanic… l’effet papillon ou quand tout bascule pour trois fois rien En croisant un pangolin sur un marché, un homme a-t-il déclenché la crise du Covid-19 ? Voici cinq épisodes où certains faits anodins provoquent des réactions en chaîne imprévisibles dans le monde. 30/05/2020 Pour avoir croisé un pangolin sur un marché chinois, un client aurait initié la pandémie mondiale de Covid-19. Beverly Joubert/Getty Après « l'effet papillon », « l'effet pangolin »? Il est encore trop tôt pour affirmer avec certitude que la pandémie mondiale de Covid-19 a été provoquée par un client du marché aux animaux de Wuhan, qui aurait croisé un pangolin ou une chauve-souris infectée. « Le marché a joué un rôle, c'est clair. Mais quel rôle ? Nous ne savons pas si c'était la source, le facteur d'amplification ou si c'était juste une coïncidence que certains cas ont été détectés sur ces étals de viande et alentour », a déclaré, le 8 mai, le Dr Peter Ben Embarek, expert en sécurité sanitaire des aliments à l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Une chose est sûre : une situation banale, dans une ville moyenne du centre de la Chine au nom jusqu'ici peu connu, a provoqué une réaction en chaîne aux conséquences planétaires.
Un phénomène qui rappelle le célèbre « effet papillon », résumé en 1972 par le météorologue américain Edward Lorenz (1917-2008) en une question : « Le battement d'ailes d'un papillon au Brésil peut-il provoquer une tornade au Texas ? » A l'origine, cette expression signifie qu'une modification infime d'une variable mathématique peut entraîner des résultats imprévisibles sur le long terme. Elle est devenue une métaphore de la vie quotidienne ou de l'Histoire, une image pour dire qu'à « petites choses, dégâts immenses », comme le chante Bénabar dans « L'Effet papillon » (2008). Et il n'y a pas eu que le pangolin. Des averses qui ont participé à la défaite de Napoléon à Waterloo, en 1815, jusqu'à la gaffe d'un porte-parole conduisant à la chute du mur de Berlin, en 1989, en passant par la catastrophe écologique causée par l'importation de 24 lapins en Australie en 1859, voici cinq « petits » événements qui ont fini par changer la face du monde. Un volcan indonésien défait Napoléon à Waterloo Causée par un orage, Waterloo, la défaite la plus cuisante de Bonaparte, entraînera la chute de son empire./Ilbusca/Getty/iStock Victor Hugo en est convaincu : « Quelques gouttes d'eau de plus ou de moins ont fait pencher Napoléon. Pour que Waterloo fût la fin d'Austerlitz, la providence n'a eu besoin que d'un peu de pluie, et un nuage traversant le ciel à contresens de la saison a suffi pour l'écroulement d'un monde », écrit l'auteur dans Les Misérables. Le 18 juin 1815, les troupes françaises affrontent celles, anglaises, du duc de Wellington, à Waterloo, en Belgique. La veille, un violent orage a éclaté et des pluies diluviennes ont détrempé le sol. En empêchant notamment la cavalerie et l'artillerie de se déplacer, ce champ de bataille inondé participe à la défaite la plus cuisante de Bonaparte. Il signe même la chute de l'empire et porte un coup d'arrêt à sa conquête de l'Europe.
« Napoléon aurait pu gagner […] si le terrain avait été sec, écrivent les historiens Dennis Wheeler et Gaston Demarée, en 2006. Il y a des arguments convaincants appuyant l'idée que la météo, en particulier celle de la nuit précédant la bataille, a été un facteur déterminant dans son issue. » Sacrée pluie ! D'autant que, selon des travaux récents, elle aurait été provoquée par un volcan situé dans l'actuelle Indonésie, à 12 000 kilomètres de la Belgique! Dans la revue scientifique « Geology », en août 2018, Matthew Genge, de l'Imperial College of London, explique que les cendres propulsées dans l'atmosphère par les explosions volcaniques atteignent des hauteurs bien plus importantes que ce qu'on pensait jusque-là, et provoquent des effets sur le climat à court et moyen terme. Il estime donc que l'éruption du mont Tambora, sur l'île indonésienne de Sumbawa serait à l'origine des fortes averses et des températures glaciales observées en Europe à l'été 1815. Notamment à Waterloo. Des lapins anglais ravagent l'Australie Sans prédateurs naturels, les 24 lapins importés en Australie se sont reproduits et ont progressé à la vitesse moyenne de 110 km par an, dévorant toute la végétation à leur portée. /National Archives of Australia Thomas Austin a eu une très mauvaise idée en introduisant des lapins sur le sol australien. En 1859, ce colon britannique amateur de chasse fait venir depuis l'Angleterre jusque dans l'Etat de la Nouvelle-Galles du Sud douze couples de ces animaux aux longues oreilles. Après l'incendie de leur enclos, ils vont s'échapper et dévaster le pays entier. Sans prédateurs naturels, les 24 lapins de Thomas Austin se reproduisent et progressent à la vitesse moyenne de 110 kilomètres par an, dévorant toute la végétation à leur portée. Résultat, on en compte 600 millions dans les années 1910. Ils ont colonisé 60 % du territoire, au détriment d'autres espèces, et causé une grave crise agricole et écologique.
Pour endiguer cette invasion, les autorités australiennes vont tout tenter : construire 3000 kilomètres de clôtures, introduire des renards, importer la puce espagnole… Dans les années 1950, l'introduction d'un virus, la myxomatose, semble régler le problème, mais cinq ans plus tard, les lapins y sont devenus résistants. Malgré la diffusion d'un nouveau virus, en 2017, l'Australie en dénombre encore aujourd'hui 200 millions, à l'origine de dégâts estimés à plus de 120 millions d'euros par an, rien que dans les secteurs agricole et horticole. Ce qui fait cher la partie de chasse. Une lettre ignorée déclenche la guerre du Viêt Nam Nguyen Ai Quo, ignoré par les Américains en 1919, s’est ensuite engagé dans le communisme révolutionnaire. Et il est devenu Hô Chi Minh, leur adversaire pendant la guerre du Viêt Nam. /Cultura RF/Getty Images/iStock En 1919, Nguyen Ai Quoc est un militant vietnamien de 29 ans émigré en France. Lors de la conférence de la paix de Paris, à l'issue de laquelle sera signé le traité de Versailles, et créée la Société des nations (future ONU), il rédige avec quatre camarades un manifeste à destination du président américain, Woodrow Wilson, lui demandant d'appuyer l'indépendance de l'Indochine, une colonie française. La lettre, adressée au secrétaire d'Etat américain Robert Lansing, reste sans réponse. Le jeune nationaliste s'engage alors dans le communisme révolutionnaire. Cinquante-six ans après, la guerre entre le Sud Viêt Nam, soutenu par les Etats-Unis, et les troupes de Nguyen Ai Quo, devenu Hô Chi Minh, a coûté la vie à 58 000 Américains et plus de 1 million de soldats vietnamiens.
Une clé manquante fait sombrer le « Titanic » Cette clé oubliée à terre aurait pu sauver le Titanic, car elle menait à la réserve des jumelles qui auraient permis d’éviter le naufrage./The Irish Sun Dans la nuit du 14 avril 1912, le Titanic heurte un iceberg au sud-est de Terre- Neuve, au large du Canada, lors de sa traversée inaugurale entre le port britannique de Southampton et New York, aux Etats-Unis. Le paquebot, réputé insubmersible, sombre dans les eaux glaciales de l'Atlantique Nord et 1500 passagers périssent. Une simple paire de jumelles aurait peut-être permis d'éviter le naufrage, mais elle était sous clé. La faute à l'officier David Blair, 37 ans. « Quelques jours avant le départ du Titanic, Mr. Blair dut quitter le navire, une décision qui lui sauva sans doute la vie, a raconté Alan Aldridge, de la maison Henry Aldridge & Son lors de la mise aux enchères de la fameuse clé, en 2007. Mais, dans sa précipitation, il emporta la clé et ne la remit pas à son remplaçant, Charles Lightoller. Il ne s'en rendit compte qu'après le départ du paquebot et la garda en souvenir. » Si Lightoller avait eu la clé, il aurait probablement pu accéder à des jumelles et sauver le Titanic. Même si les causes du naufrage sont multiples, cet oubli l'a peut-être précipité. Lors de l'enquête américaine de 1912, Frederick Fleet, l'une des vigies du bateau, a déclaré que des jumelles auraient permis de voir l'iceberg, et de l'éviter.
Trois mots précipitent la chute du mur de Berlin Pris au dépourvu, le porte-parole du gouvernement va improviser une réponse qui va accélérer la chute du mur de Berlin./Image Source/Getty/iStock C'est ce qui s'appelle faire une boulette. Lorsqu'il commence sa conférence de presse, le 9 novembre 1989, le porte-parole du gouvernement est-allemand, Günter Schabowski, n'imagine pas que trois malheureux mots vont conduire à la chute du mur de Berlin, quelques heures plus tard. Membre du Parti socialiste unifié d'Allemagne, qui dirige alors la RDA, il annonce à 18h57, à la fin de la conférence, qu'une nouvelle loi permet aux Allemands de l'Est de voyager librement. « A partir de quand ? » demande un journaliste ouest-allemand. Pris au dépourvu et mal préparé par ses supérieurs, Schabowski répond : « Pour autant que je sache… immédiatement, sans délai ! » A peine ces trois mots prononcés, des Berlinois se ruent en masse vers les points de contrôle entre l'Est et l'Ouest de la ville. A 23h30, les gardes-frontières ne peuvent plus contenir la foule, et les autorités donnent l'ordre d'ouvrir les portes. Dans la nuit et les jours suivants, des milliers d'Est-Allemands franchissent le mur qui a divisé Berlin pendant plus de vingt-huit ans, ouvrant la voie à la réunification de l'Allemagne, un an plus tard. Par Julien Solonel
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