Deux cents ans de rectorat l'académie d'Amiens - pour académie Amiens
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Réalisation : service édition du CRDP de l’académie d’Amiens. Maquette et mise en pages : Christophe Malric, François Dumont. ISBN 978-2-86615-354-0 © CRDP de l’académie d’Amiens, rectorat de l’académie d’Amiens, 2009. Dépôt légal juillet 2009.
1808 2008 Sommaire Introduction par Anne-Sancier Chateau 7 Grandes dates de l’académie d’Amiens 8 Le recteur, une création de Napoléon maintenue par la monarchie 10 Les successions rectorales de 1809 à 1848 à Amiens 12 La nouvelle académie d’Amiens 26 Le rectorat, lieu de travail du recteur 14 Les successions rectorales depuis 1964 à Amiens 28 Le recteur et l’enseignement supérierur 16 Robert Mallet, premier recteur Le recteur et l’enseignement secondaire 18 de la nouvelle académie d’Amiens 30 Le recteur et l’enseignement primaire 20 Une fonction rectorale renouvelée 32 La fin du rectorat à Amiens (1848-1854) 22 L’académie d’Amiens aujourd’hui 34 L’action des recteurs de 1854 à 1964 24 Des relations partenariales avec les autorités locales 36 Comment s’organise le rectorat ? 38 Le recteur, responsable régional du système éducatif 40 Le quotidien du recteur 42 Entretien avec le recteur Anne Sancier-Chateau 44 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 46 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008
1808 2008 1808-2008, l’académie d’Amiens fêtait ses deux cents ans. Cette année 2009 s’inscrit dans la continuité de ce bicentenaire puisqu’en août 1809, le premier recteur de l’académie d’Amiens, Louis-Urbain de Maussion, prenait ses fonctions. C’est pourquoi, en cette rentrée, j’invite les écoles et les établissements à prolonger la célébration de cet anniversaire par le biais d’un ouvrage qui vient compléter l’exposition itinérante 200 ans de rectorat pour l’académie d’Amiens, toujours disponible gratuitement auprès du Centre régional de documentation pédagogique (CRDP) de l’académie d’Amiens. Réalisé, comme l’exposition, par le CRDP de l’académie d’Amiens, ce livre reprend in extenso les textes rédigés pour l’exposition itinérante par Claude Lelièvre, professeur d’histoire de l’éducation à l’université Paris V et Bruno Poucet, professeur d’histoire de l’éducation à l’université de Picardie Jules-Verne. Historique, esthétique, pratique, accessible à tous, l’ouvrage, comme l’exposition, donne à connaître l’académie et les établissements scolaires qui en sont autant les racines que le cœur. Tous deux offrent l’occasion de percevoir, au-delà des aspects de l’histoire académique, la multiplicité des efforts accomplis depuis deux siècles par l’État mais aussi par les collectivités et les élites locales pour développer les structures éducatives. Il portera, auprès de nos élèves et de la communauté éducative et pour les prochaines décennies, la mémoire de l’académie d’Amiens. Je vous en souhaite une bonne lecture, Anne Sancier-Chateau recteur de l’académie d’Amiens. 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008
Grandes dates de l’académie d’Amiens 1802-1808 Rattachement de l’académie d’Amiens La nouvelle académie d’Amiens (1964) 1802 : loi du 1 er mai sur la création des à celle de Douai, puis de Lille 1959 : ordonnance Berthoin du 6 janvier portant lycées. 1848 : création des vingt académies républicaines prolongation de la scolarité obligatoire à 16 ans ; loi 1803 : création du lycée d’Amiens. par la loi du 7 septembre 1848 – l’académie Debré du 31 décembre 1959 sur les rapports entre 1804 : création de l’école de médecine d’Amiens. d’Amiens supprimée est répartie entre l’académie l’État et les établissements d’enseignement privé. 1806 : loi du 10 mai qui crée l’Université de Douai (Somme), de Reims (Aisne) et de Paris 1964 : création de l’académie d’Amiens par décret impériale. (Oise). du 9 juin (Aisne, Oise et Somme). 1808 : décret du 17 mars qui organise l’Université 1850 : la loi Falloux du 15 mars crée quatre-vingt- 1966-1968 : création des facultés d’Amiens : impériale. six académies départementales : Amiens, Beauvais médecine, lettres, droit. et Laon sont siège d’une académie. 1969 : création de l’université de Picardie dont le La première académie d’Amiens 1854 : la loi du 14 juin crée seize académies. premier président est élu en 1971. (1809-1848) La Somme et l’Aisne dépendent de l’académie 1968 : loi d’orientation du 12 novembre, dite loi 1809 : nomination le 24 août du premier recteur de de Douai, l’Oise de celle de Paris. Création des Edgar Faure sur l’enseignement supérieur. l’académie d’Amiens et le 15 décembre des deux inspections académiques de l’Aisne, l’Oise et de 1972 : création de l’Université de technologie de inspecteurs de l’académie. la Somme. Compiègne. 1810 : nomination du secrétaire de l’académie, 1876 : ouverture de l’école normale de jeunes filles 1975 : loi du 11 juillet relative à l’éducation dite loi début de son fonctionnement. Elle est composée des de la Somme à Amiens. Haby sur le « collège unique ». trois départements de l’Aisne, l’Oise et la Somme. 1880-1886 : loi Camille Sée sur l’enseignement 1989 : loi d’orientation sur l’éducation du 10 juillet Ouverture de la faculté des lettres à Amiens dans secondaire des jeunes filles (21 décembre dite loi Jospin. les locaux du lycée. 1880), lois Ferry sur la gratuité (16 juin 1881), 1991 : création de l’IUFM de l’académie d’Amiens 1811 : installation de l’académie au 13, rue royale l’obligation et la laïcité (28 mars 1882), loi Goblet (par fusion des écoles normales et du centre péda- (emplacement de l’actuel musée) dans l’ancien [maire d’Amiens] sur l’organisation générale de gogique régional créé en 1952). arsenal. l’enseignement primaire (30 octobre 1886). 2005 : loi d’orientation sur l’avenir de l’École du 1812 : organisation du conseil académique (10 1881 : création de l’école normale de jeunes filles 23 avril 2005. membres). de l’Aisne à Laon. 2008 : intégration de l’IUFM de l’académie d’Amiens 1816 : suppression de la faculté des lettres 1884 : ouverture des écoles normales de garçons à l’université de Picardie Jules-Verne. d’Amiens. et de filles à Beauvais. 1818 : le rectorat quitte l’arsenal et s’installe rue 1887 : l’académie de Douai devient l’académie de Saint-Jacques, puis en divers lieux de la ville. Lille, par transfert du siège de l’académie de Douai 1831 : ouverture de l’école normale de garçons de à Lille. la Somme à Amiens. 1919 : loi Astier du 25 juillet sur l’organisation de 1833 : loi Guizot du 28 juin sur l’instruction l’enseignement technique. primaire. 1941 : création de l’école de droit à Amiens. 1833 : Ouverture de l’école normale de garçons de 1962 : le département de l’Aisne est détaché de l’Aisne à Laon. l’académie de Lille et intégré à la nouvelle académie de Reims. 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008
AD 2T416. Affiche organisant le baccalauréat ès lettres 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008 dans l’académie d’Amiens, alors que la faculté des lettres a érté supprimée.
Le recteur, une création de Napoléon maintenue par la monarchie Combien gagne le recteur ? À partir de 1808, un recteur est le chef de l’académie, circonscrip- Il préside le conseil académique et approuve la liste des ouvrages destinés aux écoles. À partir de 1816, il nomme et révoque les ins- Le recteur, initialement, ne devait pas être payé. Il l’a finalement été. Ses émoluments tion territoriale de l’Uni- tituteurs et partage ses compétences avec le annuels de 6 000 francs en font sans conteste versité impériale ; elle préfet et le curé qui surveillent également les le premier personnage de l’académie : loin recouvre le territoire de écoles primaires. Le recteur, à partir de 1824, devant le proviseur du lycée (classé en troi- la cour d’appel. Celle ne contrôle plus que les aspects pédagogiques sième classe) qui, comme l’inspecteur, gagne d’Amiens comprend les des établissements confessionnels. À partir 3 000 francs, le secrétaire 2 000 francs. À départements de l’Aisne, de 1833, il doit veiller à mettre en place des cette somme s’ajoutent des frais de tournée de l’Oise et de la Somme. écoles normales. ou de représentation. Le recteur contribue à unifier l’espace national et à répandre une Le recteur, chef de l’université AD 2T12. culture commune. L’académie commence dans l’académie réellement à fonctionner en 1810. Le recteur de l’académie, placé sous les ordres du Grand Maître de l’Université, est nommé La fonction de recteur pour cinq ans et aussi longtemps que le Grand Le recteur gouverne l’académie et assiste aux Maître le juge utile. Il réside dans le chef- examens des facultés, délivre les diplômes rati- lieu de l’académie. Il AD 2T12. fiés par le Grand Maître. Il entend les rapports représente sur l’administration des facultés, des lycées l’Université 10 et des collèges : il en contrôle les dépenses et devant les la discipline. Il doit récolter le vingtième des autres corps frais de pension versés par chaque élève des constitués établissements secondaires : c’est souvent et participe difficile à obtenir. à l’anima- Il fait surveiller les autres établissements tion de la vie d’enseignement ou d’éducation par les ins- culturelle de la pecteurs d’académie. Il visite lui-même des cité. Il occupe établissements et fait établir un registre du la septième personnel : ainsi en 1811, il part en tournée à place dans Péronne, en passant par Albert, il poursuit vers la hiérarchie Saint-Quentin et revient à Amiens en passant universitaire. par Roye. En 1837, il part en tournée pendant onze jours de Montdidier à Château-Thierry, en passant par Compiègne et Soissons. Compte sommaire des frais de tournées en 1836 (détail). 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008
AD 2T43 11 Lettre de Fontanes, Grand Maître de l’Université impériale, Budget de l’exercice de 1836 avec les rétributions 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008 du 8 janvier 1810 au recteur sur le découpage de l’académie.
Les successions rectorales de 1809 à 1848 à Amiens Louis-Urbain de Maussion (1765- L ’académie d’Amiens a été dirigée par onze recteurs de 1809 à 1848. (A.-L. Boubé à Metz, puis Orléans, J.-J. Soulacroix à Lyon, puis au ministère, L. Camaret à Douai). D’eux d’entre eux sont 1831) : une longévité inégalée Premier recteur de l’académie, originaire de Les recteurs de l’académie d’Amiens mis à la retraite à l’issue de leur passage à l’Yonne, il est le recteur napoléonien. Licencié originelle (1809-1848) : Amiens (J.-M. Guillon, P. Martin). en droit, officier de marine, professeur d’his- Oise, Somme, Aisne Trois sont titulaires d’un doctorat ès lettres toire ; après avoir été recteur à Amiens, il est Louis-Urbain De Maussion (Dijon, P. Durand, L. Camaret), ou d’un doctorat nommé préfet de la Meuse. Après sa retraite (24 août 1809-10 juin 1815) ès sciences (A.-L. Boubée, J.-J. Soulacroix), en 1817, il devient membre du Conseil royal Honoré Dobignie d’un doctorat en théologie (l’abbé Dallery), l’un de l’Instruction publique. Il est l’organisateur (10 juin-2 septembre 1815) d’une agrégation d’histoire (P. Martin), deux de la première académie. Alphonse-Louis Boubée de Lespin d’une simple licence (L.-U. de Maussion et (2 septembre 1815-avril 1818) J.-M. Guillon) ou même du seul baccalauréat Pierre Martin Jean-Baptiste Dijon (avril 1818-mars 1823) (S. de Coiffier, ancien député). (1793-1864) Simon de Coiffier de Moret L’itinéraire professionnel des recteurs com- Recteur pendant 14 (juin 1823-février 1826) prend généralement une période dans l’en- ans (du 7 janvier 1833- Chanoine Louis-Gabriel Dallery seignement (dans un collège communal ou au 23 juin 1847). (mars 1826-novembre 1826) royal, ou comme précepteur dans une famille Parisien, né en 1793, Jean-Marie Guillon (mars 1827-août 1830) noble), suivi d’une fonction administrative agrégé d’histoire, le rec- Pierre Durand (août 1830-juillet 1832) (quatre ont été proviseurs, sept inspecteurs teur Martin, après une Jean-Joseph Soulacroix d’académie). C’est après quarante ans que carrière dans divers collè- 12 (juin 1832-janvier 1833) l’on devient recteur (quatre d’entre eux), ou ges et lycées, doit sa pro- Pierre Martin (juin 1833-juin 1847) après la cinquantaine (trois d’entre eux), voire motion à ses qualités, mais Louis Camaret (octobre 1847-septembre 1848) au-delà (deux recteurs), l’accès à 37 ans est également à ses années une exception, au début d’une carrière féconde de préceptorat auprès de Les recteurs restent en fonction environ trois (A.-L. Boubée). petits-neveux de Talleyrand ans, cinq d’entre eux font exception : L.-U. de Les recteurs sont aidés par un secrétaire, un dont il est un temps secré- Maussion (six ans), P. Martin (quatorze ans), les garçon de bureau et un ou deux employés de taire (1818-1821). Inspecteur trois derniers pour leur brièveté (à peine trois, bureau, chargés de tenir l’abondante correspon- d’académie à Montpellier sept et neuf mois). dance, d’adresser les circulaires du ministre. (1830-1833), il termine sa Trois des onze recteurs sont des nobles, un est carrière à Amiens et prend sa ecclésiastique (le chanoine Dallery). Trois sont Secrétaires de l’académie d’Amiens retraite. Il met en œuvre la loi morts en fonction (l’abbé Dallery, J.-B. Dijon (1810-1848) Guizot, doit faire face à l’aug- et S. de Coiffier). Quelques-uns ont poursuivi M. de Villemagne (1810-1814) mentation de la charge de tra- leur carrière après leur passage à Amiens : soit M. Puzos (1815-1816) vail (envoi de 3 000 circulaires). comme préfet (L.-U. Maussion dans la Meuse, M. Devallée, secrétaire provisoire Il sillonne son académie, préside puis membre du Conseil royal de l’Instruction (1817-1819) les commissions d’examen. À la retraite, il se publique, secrétaire général du ministère de Pierre Vérany (1819-1830) montre un adversaire de la politique religieuse l’Instruction publique), soit comme recteur Pierre François Candas (1830-1848) italienne de Napoléon III. 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008
AD 2T43. 13 Lettre circulaire n° 1 du recteur du 31 janvier 1810 annonçant sa nomination ainsi que celle des deux inspecteurs de l’académie. AD 2T12. 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008 Lettre de Fontanes, 9 janvier 1809.
Le rectorat, lieu de travail du recteur Où loge le recteur ? cette académie dans une autre ville de son Le personnel rectoral Rien n’est prévu pour loger le recteur. « Il n’est arrondissement où elle serait assurée de jouir Le premier recteur est aidé par deux inspec- dû de logement à aucune des personnes qui des avantages que les actes du Gouvernement teurs particuliers d’académie : MM. Dobignies occupent des places dans l’académie. Si néan- lui ont assurés. » (Lettre du 28 mai 1818). et De Clausel. Ils sont chargés d’inspecter et moins dans le local choisi pour l’établissement, Finalement, la ville loge provisoirement le rec- de surveiller les écoles, les collèges, les insti- il se trouvait quelques parties où le recteur teur en face du lycée rue Watelets, puis dans tutions et les pensions : examiner les mœurs, pût se loger et placer son bureau, la ville n’y le cloître de l’abbaye des Prémontrés (actuelle surveiller la discipline et le personnel, le pro- mettrait pas d’obstacle ; mais elle n’aurait pour salle Dewailly). Le rectorat déménage de nou- grès des études, veiller à la bonne adminis- cela à faire aucune dépense et elle n’entrerait veau provisoirement en 1839, puis en 1848. tration financière des collèges, améliorer la pour rien dans les dispositions qui pourraient qualité de l’enseignement primaire. C’est une être nécessaires pour approprier, soit à cet fonction de suppléance du recteur. usage, soit à quelque autre de même nature, Le recteur dispose d’une administration diri- une portion quelconque de l’édifice. » (Circulaire gée par un secrétaire d’acadé- de Montalivet du 23 juin 1810.) mie et un employé, aidé par Le conseil municipal de la ville d’Amiens offre deux garçons de bureau. Le le 27 juillet 1810 une indemnité temporaire secrétaire de l’académie est de logement de 1 700 F. Par ailleurs, le préfet secrétaire du conseil acadé- demande au maire le bâtiment de l’arsenal mique, gardien des archives 13, rue Royale (future rue de La République, et du sceau, chef du secré- ancienne rue des Rabuissons), pour loger le tariat de l’académie. Il tient 14 recteur, ses bureaux et la faculté des lettres. le registre des élèves, celui des enseignants et celui de Déménagement la rétribution scolaire. Lui Mais en mars 1816, le ministre de la Guerre et ses aides remplissent réclame ce bâtiment pour le matériel de les tâches administratives l’artillerie. Par manque d’argent, ni la ville du recteur : expédition ni l’Instruction publique ne veulent payer les des brevets de capacité dépenses. La ville espérait loger l’académie pour enseigner à l’école dans le collège royal (lycée, rue Frédéric-Petit) primaire, procès-ver- mais le proviseur, dans une lettre au préfet du baux d’examens, cir- 25 avril 1817 refuse : « Je ne puis vous dési- culaires aux comités gner aucun bâtiment qui puisse être mis à dis- cantonaux, aux maires position de l’administration de l’académie. » des communes et aux Le ministre de l’Intérieur menace la ville de instituteurs, lettres et transférer l’administration académique : « Dans rapports au ministre de le cas où la ville d’Amiens (ce que je ne puis l’Instruction publique, croire) se refuserait à assigner un local, je me aux proviseurs et aux 1R29/1. verrai forcé de proposer le transfèrement de pr ot es ta tio n, 18 23. principaux. ral n’est pas logé, Le secrétaire géné 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008
les. Archives départementa Plan du rectorat. 15 Gravure de l’arsenal, fonds Duthoit. 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008
Le recteur et l’enseignement supérieur L a fondation de l’Université impériale entraîne l’ouverture de deux facultés auprès de chaque lycée du chef-lieu acadé- Une école pratique de santé est créée en 1804 à l’hôtel-Dieu (ruines près de l’actuel CRDP, à Amiens). Elle prépare au diplôme d’officier de Saint-Louis), Rothman (6e, maître élémentaire au collège de Rennes). « Le jury exprime son vœu pour qu’une correc- mique : une de sciences, une de lettres. Les santé et non de médecin. L’enseignement dure tion soit rapportée aux décisions qui ont fixé à facultés délivrent le baccalauréat, la licence cinq ans. Cette école se transforme en 1806 trois seulement le nombre d’agrégés de gram- et le doctorat, l’un des trois grades nécessai- en cours pratiques de médecine, de chirur- maire à donner dans le présent concours… res pour appartenir à l’Université impériale. gie et de pharmacie. C’est la seule institution S’il n’est pas possible que tous soient déclarés Pour remplacer les professeurs de lycée d’enseignement supérieur qui subsiste dans agrégés, le jury demande que les six premiers partant à la retraite, malades ou absents, le l’académie jusqu’à nos jours. au moins jouissent de ce titre. » Rapport du concours de l’agrégation (qui remonte à 1766) Au jardin botanique, des cours botaniques jury, 28 septembre 1827 : le ministre refuse est réaffirmé. Le nouveau concours ne sera sont délivrés. Enfin, une école de commerce d’accéder à cette demande. mis en place qu’à partir de 1821, d’abord a ouvert brièvement ses portes, mais a dû les académiquement (deux à Amiens en 1825 refermer par manque d’élèves. Des cours de et 1827) puis nationalement à partir de 1830. dessin, de droit, de chimie, de langues sont Un conseil académique assiste le recteur. donnés, sur initiative privée ou municipale, à Amiens et dans d’autres villes de l’académie (Saint-Quentin, par exemple). Un concours d’agrégation à Amiens en 1825 et 1827 16 Trois places sont mises au concours de l’agré- gation de grammaire en 1827. Le jury est com- posé de cinq personnes (le recteur, les deux inspecteurs de l’académie, M. Hubert profes- seur de rhétorique, l’abbé Vincent professeur de seconde). Le jury a classé les quinze candi- dats présents : Bedel (1er, bachelier ès sciences et droit, licencié ès lettres, répétiteur à Paris), Cadart Ferdinand (2e, né en 1800, bachelier Enseignement supérieur en 1821, régent de rhétorique au collège de La faculté des lettres, située dans le lycée Saint-Pol), Delalleau Adolphe (3e, né en 1801, impérial, fonctionne à partir de 1810. On y bachelier en 1822, régent au collège de enseigne la philosophie, les lettres latines et Maubeuge, nommé professeur de sixième au grecques. Les professeurs sont les mêmes collège d’Amiens, il est provisoirement chargé que ceux du lycée. Cette faculté, supprimée en 1831 de la chaire d’histoire et souhaite se AD2T427. en 1815, sera remplacée par une commission présenter à l’agrégation d’histoire en 1832), des lettres d’Amiens faisant office de jury du Joly (4e, régent de classe de sixième au collège médecine, 1847. Affiche pour l’école de baccalauréat. d’Armentières), Bardin (5e maître d’études à 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008
AD2T19. 17 Arrêté de nomination des membres du bureau d’administration du collège de l’arrondissement académique d’Amiens, 1810. 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008
Le recteur et l’enseignement secondaire Les bacheliers en 1809 L ’enseignement secondaire public et privé est peu développé et décerne moins de cent diplômes de bachelier par an, en Lucien ; dans la Somme à Montdidier, Saint- Acheul, Saint-Riquier, Roye. Dans ces éta- blissements, en principe, on se prépare à Herbette François (le 20 septembre) Horlier (le 5 octobre) moyenne, dans l’académie. Il est payant et la être prêtre, mais une partie des élèves envi- Lamotte (le 3 octobre) préoccupation du recteur est de faire rentrer sage uniquement de passer le baccalauréat. Henriet, principal du collège de Château- la rétribution universitaire dans les caisses Il existe des institutions dans l’Aisne (Laon, Thierry (le 31 octobre) de l’académie : l’affaire demande beaucoup Saint-Quentin, Soissons, Marle, Pontavert, Jean-Baptiste Charlet (le 15 novembre) d’énergie et de démarches. L’enseignement La Fère, Vervins, Flavy-le-Martel, Chevregny, Gérard Hanquet (le 15 novembre) secondaire est donné dans les lycées (pris en Mortefontaine, Guise), dans l’Oise (Beauvais, Claude Pignon (le 15 novembre) charge par l’État), les collèges communaux Menneville, Noyon, Senlis, Crépy-en-Valois), (pris en charge par les communes), les éco- dans la Somme (Abbeville, Amiens, Flixecourt, En 1842, soixante-dix-huit diplômes sont les secondaires ecclésiastiques (à la charge Léalvillers, Moreuil, Nesle, Roye, Péronne, décernés, mais soixante-dix candidats sont de l’évêque), les institutions et les pension- Saint-Valery-sur-Somme). ajournés. On relève les noms d’Édouard Branly nats (par des personnes privées). Il prépare (a fait des études « domestiques », il est né le au seul baccalauréat. C’est un enseignement Le baccalauréat 12 avril 1816 dans le Pas-de-Calais à Prétefin), humaniste où littérature française, latin et grec Jusqu’en 1830, cet examen se passe unique- Jules Baudelocque (né le 17 mars 1823 à occupent la place principale, les sciences étant ment à l’oral, devant une commission de pro- Montdidier, études au collège royal et à l’insti- réduites à peu de chose. fesseurs de facultés qui enseignent également tution de Montdidier), Alfred Duméril (20 février au lycée de garçons. Les dates d’examen sont 1825, élève au collège royal d’Amiens). 18 Les institutions d’enseignement en 1804 variables, en fonction de la disponibilité des Le lycée impérial d’Amiens est le premier lycée candidats et des examinateurs. Ainsi, entre créé dans l’académie en 1804. La première septembre et novembre 1809, sept élèves ont rentrée n’a lieu qu’en 1806 dans l’ancienne obtenu dans abbaye Saint-Jean des Prémontrés, rue des l’académie Loriots (actuelle rue Frédéric-Petit). Il remplace leur diplôme de l’école centrale située dans l’ancien collège bachelier. d’Amiens (en face de l’actuelle statue du Maréchal Leclerc). Il existe dix collèges com- munaux : Abbeville, Beauvais, Château-Thierry, Clermont de l’Oise, Compiègne, Laon, Péronne, Roye, Saint-Quentin, Soissons, Vervins. Les col- lèges particuliers comme celui de Montdidier et le collège Saint-Vincent de Senlis. On trouve les écoles secondaires ecclésias- tiques dans l’Aisne à Bucy-le-Long, Crouy, Oulchy-le-Château, Laon, Notre-Dame de Liesse, Soissons ; dans l’Oise à Beauvais, AD2T416. Compiègne, Noyon, Saint-Germer, Saint- Affiche pour le baccalauréat à Amiens, 1845. 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008
AD2T291. 19 Le diplôme de bachelier ès lettres décerné au sieur Charlet, 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008 en 1821.
Le recteur et l’enseignement primaire L AD 2T447. ’école primaire est payante, mais pas obli- possession gatoire. Il existe aussi, dans certaines villes d’un brevet de de plus de 6 000 habitants, des écoles primai- capacité mais res supérieures. dans la plupart En 1833, l’académie d’Amiens dispose de des départe- 2 700 écoles (1 025 dans la Somme, 752 ments, il n’y a dans l’Aisne et 983 dans l’Oise). Si la qualité pas d’école de des maîtres s’est progressivement améliorée, formation pro- la fréquentation scolaire est irrégulière : trop fessionnelle. souvent, les enfants travaillant aux champs ou Le jeune maître à l’usine, ne fréquentent pas l’école pendant apprend sur le toute l’année ou le font pendant une durée trop tas ou au sein limitée. Les maîtres, mal payés, mènent une de cours ratta- vie difficile : beaucoup préfèrent ignorer ces chés à une ins- absences ou être payés en nature plutôt que titution privée. voir les parents retirer leurs enfants de l’école. Brevet de capacité d’enseignement primaire, 1831. Instituteurs et curés constatent aussi que la loi Former sur le travail des enfants de 1841 n’est pas Beaucoup d’instituteurs sont recrutés et for- lieu à Amiens, puis ensuite également à l’école respectée. Ainsi, en 1844, le recteur estime més par leur congrégation : Frères des écoles normale de Laon : la participation est déce- que 40 000 enfants sont excessivement pau- chrétiennes, religieuses de la Sainte-Famille vante. Des conférences cantonales sont alors 20 vres et dépourvus de tout livre élémentaire. d’Amiens, sœurs de la Providence de Laon. progressivement mises en place. Pour la formation des laïcs, la grande affaire, Organiser une administration c’est la création en 1831 à Amiens de l’école Contrôler Le recteur doit organiser une administration normale, puis plus tard de celle de Laon. Mais Le recteur peut également prendre des mesu- nouvelle. En 1830, les comités d’arrondisse- les instituteurs de Beauvais sont formés à res disciplinaires à l’encontre des instituteurs : ment dans la Somme et les comités cantonaux l’école normale de Versailles jusqu’en 1882. suspension et plus souvent révocation. Ivresse (Aisne et Oise) ne lui permettent pas de fournir Comme les écoles normales ne sont ouver- ou ivrognerie, libertinage ou inconduite, sont au ministre un état exact des écoles. À partir tes qu’aux garçons, à Amiens, les institutri- les motifs les plus fréquents. Il s’agit plus de 1836, le recteur est aidé dans sa tâche par ces fréquentent le pensionnat normal de la rarement de motifs idéologiques, comme l’ir- trois inspecteurs primaires et autant de sous- Sainte-Famille. réligion (à Jouy-sous-Thelle en 1821, Beauvais inspecteurs, non sans résistance de la part de Dans un premier temps, les écoles norma- et à Compiègne en 1823, à Biarre en 1820, à certaines écoles congréganistes. les diffusent la méthode mutuelle (apparue à Saint-Léger-lès-Domart en 1822, Ecquencourt Amiens dès 1816, mais également à la cam- en 1829) ou encore de menées politiques Recruter pagne, à Caulincourt, à La Fère). (à Villers-Vermont en 1816, à Beauvais en Au début du xlxe siècle, il faut répondre à la Dans un second temps, le choix est fait de 1830). demande d’instruction élémentaire : toutes les promouvoir la méthode simultanée. bonnes volontés sont acceptées. L’ordonnance En 1833, le recteur organise des conférences de février 1816 impose théoriquement la pour les instituteurs de l’académie. Elles ont 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008
AD 2T190. 21 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008 Arrêté créant une école normale primaire à Amiens, 1831.
La fin du rectorat à Amiens (1848-1854) E n septembre 1848, le rectorat dispa- raît à Amiens. L’académie d’Amiens, démembrée, est répartie sur celles de L’ O i s e e s t i n t é g r é e d a n s l ’ a c a d é - mie de Paris : Hippolyte Rousselle (février 1848-mars 1850). Lettre du maire d’Orléans soutenant la protestation des élus d’Amiens à propos de la suppression de l’académie d’Amiens, 1848. Douai, Reims et Paris. Lors de la suppres- sion de l’académie de Reims, l’Aisne rejoint Les petites académies départementales la Somme dans l’académie de Douai ; l’Oise (15 mars 1850-juin 1854) est intégrée dans la grande académie Somme : Jean-Baptiste Allou de Paris. Il ne reste plus que dix- (mars 1850-juin 1854). neuf académies au lieu de vingt-sept Aisne : Achille François (mars 1850-1852), en France métropolitaine. Charles-Joseph Hubert (1852-juin 1854). De 1850 à 1854, l’académie d’Amiens réta- Oise : Pierre Laville (mars 1850-novem- blie n’a plus qu’un seul département. Chaque bre 1853), Jean-Baptiste Labastide département comportant une académie, (novembre 1853-juin 1854). Beauvais et Laon deviennent des chefs lieux d’académie. La France en compte quatre- L’académie d’Amiens disparaît vingt-six ! On parle des « petits recteurs ». (1854-1964) Leur rôle est essentiellement de contrôler et La loi du 14 juin 1854 réaffirme le pouvoir de de surveiller étroitement le corps enseignant. l’État sur l’Instruction publique : la France com- Ces recteurs ne sont pas exclusivement issus prend seize circonscriptions académiques. de l’enseignement public. Il suffit de posséder Jusqu’en 1964, l’administration académique 22 un titre de licence ou d’avoir exercé pendant est assurée pour la Somme et l’Aisne par . dix ans une responsabilité administrative pour l’académie de Douai, puis de Lille (à partir AM 1R29/1 être nommé par le Président de la République, de 1887-1888), puis brièvement par celle de puis par l’Empereur, en 1852. Le recteur prête Reims pour l’Aisne (1962-1964), pour l’Oise serment de fidélité entre les mains du préfet. par l’académie de Paris. Il est également surveillé par l’évêque du dio- Le recteur dirige les établissements d’ensei- cèse. La fonction rectorale sort très affaiblie gnement supérieur, il inspecte l’enseignement de cette période. secondaire ; il surveille aussi l’enseignement secondaire libre. Jusqu’à la Libération, le pré- Les académies républicaines fet conserve la haute main sur des instituteurs, (septembre 1848-15 mars 1850) mais le recteur veille sur leurs méthodes péda- La Somme est intégrée dans l’académie de gogiques. Signe de son importance retrouvée, Douai : Henri Braive (1848-février 1849), Louis il doit désormais être docteur. Et il reste sou- Camaret (février 1849-septembre 1852). vent en place très longtemps : Georges Lyon, L’Aisne est intégrée dans l’acadé- Albert Châtelet ou Guy Debeyre, ont occupé mie de Reims : Jacques Edom (1848- à Lille la fonction de recteur pendant 21, 13 décembre 1849), Bernard Forneron et 17 ans. 2. AD 2T1 (décembre 1849-mars 1850). 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008
AD 9T3616. 23 Lettre du 28 septembre 1848 sur l’apurement Première page d’un rapport mensuel du recteur des comptes de l’académie supprimée. 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008 départemental de la Somme au ministre, 1850.
L’action des recteurs de 1854 à 1964 D ans leur académie, les recteurs de Douai (puis de Lille) ou de Paris ont poursuivi le développement de l’Instruction publique. De nombreux collèges communaux sont construits ou reconstruits à Abbeville, Château- Thierry, La Fère, Péronne, Soissons. Des écoles raux, souhaitent que renaisse une académie à Amiens afin de développer l’enseignement supérieur. Par ailleurs, la gestion de plus Bénéficiant d’un pouvoir retrouvé grâce à la primaires supérieures sont également créées en plus lourde des académies de Lille et de loi de 1854 et d’une longévité dans la fonc- ou développées, par exemple à Abbeville, Paris, l’explosion des effectifs scolaires à partir tion, ils ont pu jouer un rôle important, non Corbie, Péronne, Villers-Bretonneux. des années 1940, font que les recteurs sont seulement en matière éducative, mais aussi Le recteur a relayé les nombreuses enquêtes favorables à une redéfinition du périmètre de en matière culturelle. Ils ont affirmé les pré- lancées par le ministère en matière d’ensei- leur académie. L’académie d’Amiens pouvait rogatives de l’État en matière éducative par gnement : la plus connue est l’enquête parle- renaître. rapport à l’Église catholique, en arbitrant la mentaire de 1899, à l’initiative du député AD 99T396584. concurrence, parfois rude, existant entre les du Pas-de-Calais, Alexandre Ribot, qui établissements publics et privés. aboutit à la réforme de l’enseignement Le recteur rédige pour le ministre un rapport secondaire de 1902. mensuel sur les établissements secondaires, En revanche, l’enseignement supérieur, il exerce la présidence du conseil académique à l’exception de l’école préparatoire et du conseil d’université (après 1896), il ins- de médecine d’Amiens (1804), s’est pecte les établissements secondaires publics. développé essentiellement soit grâce Il doit aussi faire face aux circonstances à des initiatives communales (école exceptionnelles : occupation prussienne, puis de droit à Amiens en 1941, puis allemande à trois reprises, programmes de école supérieure de sciences et de 24 reconstruction des nombreux établissements lettres), soit à des initiatives privées scolaires, détruits pendant les deux guerres – individus ou organismes (école de mondiales. L’action du recteur a été particuliè- commerce à Amiens, école d’agri- rement efficace pour l’enseignement féminin : culture à Beauvais, sur l’initiative création des lycées de jeunes filles d’Amiens des Frères des écoles chrétiennes). (1883), de Laon, de Saint-Quentin (1897), des Par ailleurs, des initiatives indivi- cours secondaires, puis des collèges d’Ab- duelles, comme celle d’un avocat, beville, de Château-Thierry (1880), d’Hirson donnent naissance à Amiens, en (1881), de La Fère (1878), un peu plus tard 1854, à des cours de droit com- de Péronne, Saint-Quentin, Soissons. Création mercial. Pour poursuivre leurs des écoles normales de jeunes filles dans les études supérieures, les étudiants trois départements. de Picardie doivent fréquenter les facultés lilloises ou parisiennes. De nouveaux établissements scolaires On crée de nouveaux lycées, répondant ainsi Pour une nouvelle académie aux vœux souvent anciens de villes, telles Dans les années 1950, nombre Saint-Quentin, Compiègne, Beauvais ou Laon d’édiles locaux, d’industriels, (1883). voire de responsables préfecto- Enquête parlementaire de 1899. 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008
AM1R29/1 25 Annonce par le recteur de Douai 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008 de la rentrée des facultés, 1866.
La nouvelle académie d’Amiens D epuis 1848 – 116 ans exactement – la Picardie avait cessé d’être le siège d’une académie. La création de l’académie est le résultat d’une volonté politique nationale et d’une volonté 1 500 étudiants. La ville d’Amiens prenait en charge l’essentiel des dépenses de fonctionnement et d’investissement et avait consenti à un effort financier important sous l’impulsion de politique locale désireuse de contribuer au développement de Camille Goret, puis de Maurice Vast. Naissait ainsi, en 1958, la région au moment où l’on commence à parler de déconcen- le Centre universitaire de Picardie (CUP) : en 1961, il organi- tration et de régionalisation : le préfet Henri Larrieu, les maires sait sa première rentrée solennelle. Toutefois, cette structure des villes d’Amiens, Beauvais et Saint-Quentin, le président du était uniquement d’ordre symbolique, car les écoles étaient conseil général de la Somme, des universitaires (les professeurs scientifiquement et juridiquement subordonnées à la maison Perdu, Moreau, Lebesgue), la chambre de Commerce et d’In- mère, l’université de Lille. Son président, le recteur Guy Debeyre, dustrie. En 1960 est née la circonscription d’action régionale pouvait ainsi en inaugurant le collège scientifique universitaire de Picardie, après bien des hésitations du pouvoir central. Le déclarer « qu’il [était] satisfait de voir son université s’agran- recteur de Lille soutient également ce projet. L’effectif scolaire dir » (Courrier Picard du 21 décembre 1957). lui paraît de plus en plus difficile à gérer, compte tenu de la taille de son académie : outre deux départements picards sur L’acte de fondation, enfin trois, elle inclut les Ardennes. La section permanente du Conseil supérieur des universités émet, le 17 décembre 1963, un avis favorable à la création d’une Une création difficile, mais voulue localement académie à Amiens et à Rouen. Pour autant, certains édiles La décision de création d’une nouvelle académie et – à terme de l’Aisne auraient souhaité que le siège de l’académie soit à – d’une université, est rien moins qu’évidente : si le pouvoir Saint-Quentin, voire que l’Aisne restât attachée à Reims. Le central avait fait le choix de déconcentrer les universités pari- 3 juin 1964, le Conseil des ministres prend un décret de création 26 siennes en créant des académies à Nantes, Reims et Orléans des académies d’Amiens et de Rouen, signé le 9 juin 1964 et en 1962, en revanche, il a hésité sur le périmètre à donner à publié au Journal officiel le 10 juin 1964 sous le n° 64-525, avec la nouvelle académie d’Amiens. Dans une étude de 1961, est effet au 1er octobre de la même année. Le 17 juin 1964, le recteur prévue la création d’une académie de Rouen regroupant les est nommé : il s’agit de l’universitaire Robert Mallet, doyen et départements de Seine-Maritime, Somme, Eure, Oise, le dépar- créateur de la faculté des lettres de Tananarive. La situation à tement de l’Aisne restant rattaché à l’académie de Reims dont laquelle il doit faire face est difficile. il relevait depuis 1962. Un tel projet affirmant la non-existence de la région picarde. Une situation scolaire difficile Il ne pouvait rencontrer l’assentiment des élites locales qui « Les effectifs du niveau du second degré dans les établisse- avaient contribué, en 1941, sous l’impulsion du docteur Perdu, ments publics et privés s’élevaient en 1958-1959 à 45 416 élèves au développement de l’école de médecine et de pharmacie pour les trois départements picards ; ils traduisent un taux de (fondée en 1804), à la création d’une école supérieure de droit scolarisation beaucoup plus faible que celui de la moyenne en 1941, d’une école de notariat et d’une école de commerce française (25,87 % au lieu de 39 %). Le rang occupé par chaque en 1942, puis d’un collège scientifique universitaire en 1957 et département rend compte de cette sous-scolarisation : l’Oise d’une école de lettres l’année suivante. Cinq cents étudiants en effet se place au 72e rang de l’ensemble des départements étaient ainsi répartis dans les locaux de l’ancien évêché ou ceux de la France métropolitaine avec un taux de 27,6 %, l’Aisne au de l’abbaye des Prémontrés, ancien lycée d’Amiens. La crois- 76e rang avec 26,1 % et la Somme au 86e rang avec seulement sance des effectifs était rapide, puisqu’en 1962, on comptait 24,1 %. » (Plan d’action régionale « Picardie » AD 80 31W15.) 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008
ole de droit. Enveloppe à en-tête de l’éc Organigramme du rec torat (1971). Collection particulière. 27 Collection particulière. Copie d’étudiant de l’école de droit, Collection particulière. 1944. 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008
Les successions rectorales depuis 1964 à Amiens L ’académie d’Amiens, dans sa configu- ration actuelle, a été dirigée par dix- neuf recteurs depuis 1964. 1985, professeur d’histoire contemporaine. Jean Gallot (né en 1934), recteur de 1985 à 1986, professeur de physique. Tanneguy Larzul (né en 1962), recteur du 13 juin 2007 au 25 juin 2008, professeur de droit. Ahmed Charaï (né en 1957), recteur du 25 juin Édouard Bridoux (né en 1945), recteur de 1986 à au 19 novembre 2008, professeur de physique. Robert Mallet (1915-2002), recteur de 1964 à 1990, professeur d’électronique. Anne Sancier-Chateau (née en 1946), recteur 1969, professeur de littérature française. Jérôme Chapuisat (né en 1943), recteur de 1990 depuis le 19 novembre 2008, professeur de lettres Marius-François Guyard (né en 1921), recteur de au 20 mai 1992, professeur de droit. modernes. 1969 à 1970, professeur de littérature française. Françoise Renversez (née en 1933), recteur Renaud Paulian (1913-2003), recteur de 1970 à du 20 mai 1992 au 13 octobre 1993, professeur Avec l’appui des secrétaires généraux 1972, professeur de sciences naturelles. d’économie. d’académie Marcel Bonvalet (né en 1928), recteur de 1972 à Claude Gour (né en 1930), recteur du 13 octobre M. Daumasson de 1964 à 1965 1975, professeur de sciences de l’ingénieur. 1993 à 1995, professeur de droit. Jacques Mouha de 1965 à 1971 Raymond Prieur (né en 1921), recteur de 1975 à Alain Morvan (né en 1944), recteur de 1995 Jean Mazel de 1971 à 1982 1978, docteur en sciences politiques, inspecteur au 3 juillet 2002, professeur d’anglais. Alain Bellet de 1982 à 1987 général de l’Instruction publique. Michel Leroy (né en 1948), recteur du 31 juillet Serge Ronchin de 1987 à 1996 Loïc Sparfel (né en 1937), recteur de 1978 à 2002 au 15 juillet 2004, inspecteur général de Alain Plaud de 1996 à 1999 1981, professeur de pharmacie. l’Éducation nationale. Brigitte Bruschini de 1999 à 2003 Christian Gras (né en 1935), recteur de 1981 à Marie-Danièle Campion (née en 1953), recteur Laurent Gérin de 2003 à 2008 1984, professeur d’histoire contemporaine. du 15 juillet 2004 au 23 mai 2007, professeur de Louis Masliah depuis 2008. Claude Mesliand (né en 1928), recteur de 1984 à pharmacie. 28 B rillants élèves, un certain nombre de recteurs sont pas- sés par l’École normale supérieure. Tous sont docteurs soit d’État, soit habilités à diriger des recherches. Presque tous sont teur d’école supérieure (trois), responsables d’administra- tion centrale (deux), voire inspecteurs généraux (deux). Quelques-uns, après leur rectorat, ont fait carrière dans la agrégés du second degré. Quelques-uns (dans les disciplines politique, en occupant souvent des fonctions de chargé de pharmaceutiques ou juridiques) sont agrégés de l’enseigne- mission ou de conseiller technique dans un cabinet ministé- ment supérieur. Il n’y a jamais eu à Amiens de recteur médecin, riel, ou auprès du maire d’une ville importante, voire auprès professeur de sciences et techniques du sport, professeur de d’un Premier ministre (Edouard Bridoux auprès de Jean-Pierre mathématiques ou de philosophie. Un recteur est donc un lit- Raffarin). Seul le recteur Sparfel, en devenant adjoint au maire téraire ou un juriste, sauf exception. Seulement trois femmes de Nantes, a tenu une fonction élective. Le parcours du recteur sur dix-neuf ont exercé la fonction, dont l’une très brièvement, Prieur est, lui, très atypique : il n’a jamais exercé dans l’en- à cause de l’alternance gouvernementale. seignement supérieur, mais a fait carrière dans l’inspection Même si la plupart d’entre eux ont enseigné brièvement avant de devenir brièvement secrétaire d’État aux Armées avant dans le second degré avant d’être, pour la plupart, profes- d’accéder au rectorat. seurs d’université (dix-sept), ils ont très vite exercé des Le plus jeune recteur avait 41 ans à sa nomination, le plus âgé fonctions administratives avant d’être nommés à Amiens : 63 ans : la moyenne d’âge est de 50 ans. Les recteurs restent en que ce soit comme recteurs d’autres académies (six), pré- fonction environ trois ans. sidents d’université (quatre), doyens de faculté ou direc- 1808 Deux cents ans de rectorat pour l’académie d’Amiens 2008
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