DGA : commandes et contrats

La page est créée Bernard Lacroix
 
CONTINUER À LIRE
DGA : commandes et contrats
DGA : commandes et contrats
Au cours des quatre premiers mois de 2017, la Direction générale de l’armement
(DGA) a lancé des programmes et notifié des contrats pour la Marine nationale et
l’armée de l’Air.

Navires. Le 21 avril, le programme des 5 frégates de taille intermédiaire (FTI) de
la classe Belharra a été lancé (photo). Réalisées par le groupe DCNS, elles seront
dotées de capacités d’autodéfense élargies et de projection de forces spéciales, du
nouveau radar à 4 antennes planes Sea Fire et de missiles Aster 30. Chacune
représente 2 millions d’heures de travail dont 300.000 pour les bureaux d’études.
La première sera livrée en 2023 pour une entrée en service actif en 2025, avec
une capacité d’évolution pour une durée de vie de 40 ans. A l’horizon 2030, la
Marine Nationale disposera de 15 frégates de premier rang : 8 frégates multi-
missions (6.000 t de déplacement) ; 2 frégates de défense aérienne de la classe
Horizon (7.000 t) ; 5 FTI de lutte anti-sous-marine (4.000 t). Le 19 janvier, la DGA
a notifié au industriels Piriou et DCNS la réalisation du 4ème bâtiment multi-
missions (B2M, 2.300 t) Dumont-d’Urville. Les B2M assurent présence, protection
des intérêts français dans les zones économiques exclusives, soutien logistique,
sauvegarde et assistance au profit des populations en cas de catastrophe
DGA : commandes et contrats
naturelle. Destinés à la souveraineté outre-mer, ils sont ainsi répartis :
D’Entrecasteaux en Nouvelle-Calédonie depuis le 29 juillet 2016 ; Bougainville en
Polynésie française depuis le 16 décembre 2016 ; Champlain à La Réunion à l’été
2017 ; Dumont-d’Urville aux Antilles en 2018.

Missiles. Le 28 mars, le délégué général pour l’armement Laurent Collet-Billon
et son homologue britannique Harriett Baldwin, ministre pour les Acquisitions de
Défense, ont signé un accord sur le programme FMAN/FMC (futur missile
antinavire/futur missile de croisière) pour remplacer et améliorer les systèmes de
missiles employés par la Marine Nationale et l’armée de l’Air à l’horizon 2030.
Chaque pays contribuera à hauteur de 50 M€ à cette étude, menée par MBDA, et
profitera d’un accès réciproque aux expertises technologiques et moyens d’essais
et de tests. La coopération franco-britannique porte aussi sur la rénovation des
missiles de croisière aéroportés SCALP-EG/Storm Shadow, dont les premiers
seront livrés fin 2018 en Grande-Bretagne et en 2020 en France. Le 5 janvier, la
DGA a annoncé la commande de nouveaux AASM (armement air-sol modulaire)
« Block 4 », kits montés sur des bombes standards OTAN et livrables à partir de
2019. L’AASM se décline en plusieurs versions selon le type de guidage :
inertie/GPS ; inertie/GPS + imagerie infrarouge ; inertie/GPS + laser. Equipé d’un
kit de propulsion, il peut être tiré à distance de sécurité sur tous les types de
cibles terrestres, même mobiles. L’armée de l’Air et la Marine Nationale ont déjà
reçu 1.700 AASM.

Drones. La loi de programmation militaire 2014-2019 prévoit 4 systèmes de
drones Reaper MALE (moyenne altitude longue endurance) de 3 drones chacun
pour l’armée de l’Air en 2019. Le 10 janvier, la DGA a annoncé la réception du
2ème système, dont 2 drones ont été livrés le 31 décembre 2016 à Nyamey pour
l’opération Barkhane. Le 3ème drone est destiné à l’entraînement des personnels
de l’escadron 1/33 « Belfort » à Cognac. Une campagne d’essais doit valider :
l’aérotransport du système Reaper, notamment à bord de l’A400M ; les conditions
techniques de son utilisation dans l’environnement électromagnétique de la base
de Cognac et du territoire métropolitain. Le 4ème système a été commandé fin
2016.

Loïc Salmon

Marines : l’approche globale, indispensable à la sécurisation future du milieu
maritime
DGA : commandes et contrats
Drones Air et Marine : surveillance, renseignement et… combat

MBDA : coopération industrielle européenne pour les missiles
DGA : commandes et contrats
DGA : commandes et contrats
Tout savoir sur les drones
Engins autonomes ou télépilotés, les drones sont utilisés dans les milieux aérien,
terrestre et maritime, au cours des conflits successifs depuis 1944, pour le
renseignement et le combat.

Après les essais de la première guerre mondiale, une percée technologique se
produit avec le V1 allemand à aile droite et réacteur dorsal, mis en œuvre lors de
la seconde. Dès 1946, des bombardiers américains B17G sont télépilotés à partir
d’autres B17, pour récupérer des échantillons dans l’atmosphère après les
explosions nucléaires. La perte de deux avions de reconnaissance à haute altitude
U2, abattus au-dessus de l’Union soviétique (1960) et Cuba (1962), incite les
Etats-Unis à développer les avions sans pilote. Pour éviter les tirs de barrage
meurtriers adverses pendant la guerre du Viêt Nam, les Ryan AQM-34 Firebee
effectuent plus de 3.000 missions de reconnaissance de 1965 à 1975. Suite à celle
du Kippour (1973), Israël met au point le drone tactique Mastiff, déployé lors de
la 1ère crise du Liban (1982) pour identifier les radars syriens et monter des
opérations de leurrage. Pendant la 2ème crise (2006), la planification de toute
action au sol inclut des reconnaissances par des drones, en appui des forces
spéciales. Dès le début des années 1960 et pendant deux décennies, les Etats-
Unis utilisent des engins sous-marins CURV pour récupérer des matériels perdus
en mer par 1.000 m de fond. Pendant la guerre du Golfe (1990-1991), l’armée de
l’Air américaine teste les drones de reconnaissance à longue portée Sentinel,
Pointer et Pioneer (800 km, 60 heures). En 2000, le Predator, équipé de missiles
antichar, participe à des opérations de combat ciblées. Lors des conflits d’Irak
(2003) et d’Afghanistan (2001-2014), apparaissent les drones HALE (haute
altitude longue endurance) et MALE (moyenne altitude longue endurance) puis
les drones terrestres pour la détection d’engins explosifs improvisés et
l’exploration de caches d’armes. Les drones navals Protector (israélien) et
Spartan (franco-américain) sont chargés du déminage, de la lutte anti-sous-
marine et antinavire, de la protection de ports et du déni d’accès de zone. Le
micro-drone américain MUV VideoRay, sous-marin et filoguidé, peut filmer
jusqu’à 300 m de profondeur dans des eaux de moins de 50 cm de visibilité.
Toutefois, la transmission des informations entre le drone et la station sol peut
constituer un facteur de vulnérabilité. Ainsi, au Levant en 2009, les insurgés
irakiens ont piraté les flux de données des Predator américains avec un logiciel
grand public et ont eu ainsi le temps de se préparer à l’éventualité d’une attaque
ou de localiser les régions visées. Après l’embuscade d’Usbeen en 2008 (10 morts,
21 blessés), la France envoie des drones en appui des troupes en Afghanistan.
Lors de l’offensive contre le Hezbollah au Liban (2006), des drones israéliens ont
tué des civils par erreur. Depuis, les drones sont équipés de senseurs combinés à
des radars, lasers et caméras électro-optiques et thermiques pour fournir, en
temps réel, des images nettes distinguant les enfants des adultes, les
équipements et matériels avec une grande précision, de jour comme de nuit. Le
drone terrestre américain de reconnaissance armée Talon peut riposter et
attaquer selon son armement : fusil d’assaut, mitrailleuse, roquette antichar,
lance-grenade et arme non létale. Enfin, deux démonstrateurs aériens de combat
sont en cours de développement : le X-47B américain, utilisable sur un porte-
avions, et le nEURon européen.

Loïc Salmon

Les drones Un peu d’histoire

Les drones : de l’OPEX au territoire national

Drones civils : réponses opérationnelles et juridiques aux usages malveillants

« Tout savoir sur les drones » par Jean-Christophe Damaisin d’Arès. Editions JPO,
132 pages, 9,90 €.
DGA : une industrie d’armement
forte, pilier de la souveraineté
La souveraineté du système de défense français se construit sur une solide
industrie d’armement, qui repose notamment sur l’investissement, l’innovation et
l’exportation.

Tel est l’enjeu majeur de la Direction générale de l’armement (DGA), dont le bilan
2016 a été présenté à la presse, le 6 mars 2017 à Paris, par son délégué général,
Laurent Collet-Billon.

L’investissement. Pour équiper les forces, la DGA a dépensé 10,8 Md€ en 2016
et s’est engagée sur 9,8 Md€ en 2017. Pour préparer l’avenir, elle a dépensé 804
M€ en études amont et s’est engagée sur 672 M€. En 2016, les livraisons incluent
: 1 lot de missiles M51 pour les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) ;
8 Rafale ; 2 avions de transport tactique A400M ; 1 système de drones moyenne
altitude longue endurance Reaper ; 6 hélicoptères d’attaque Tigre ; 6 hélicoptères
de transport tactique NH90 ; 1 frégate multi-missions ; 2 bâtiments multi-
missions (B2M) ; 10 modules projetables du système d’information des armées ; le
système numérique Auxylium pour « smartphone » ou tablette, qui permet de se
passer des réseaux de téléphonie mobile en cas de crise. En 2016, les commandes
ont porté sur : les équipements sécurisés cyber ; le programme de
télécommunications militaires sécurisées Descartes ; les drones tactiques
Patroller ; 2 avions légers de surveillance et de reconnaissance ; les roquettes à
guidage laser ; la rénovation des avions Mirage 2000 D ; un système de drones de
guerre des mines ; les AASM block 4 (armements air-sol modulaires) ; la
rénovation à mivie du missile de croisière Scalp EG ; un 4ème système de drones
Reaper ; 4 avions de transport tactique C-130J, dont 2 capables de ravitailler des
hélicoptères en vol ; le programme FOMEDEC (formation modernisée et
entraînement différencié des équipages de chasse) ; le fusil d’assaut allemand
HK-41F, qui remplacera le Famas ; le véhicule léger tactique polyvalent ; le
programme CERBERE (centres d’entraînement représentatifs des espaces de
bataille et de restitution des engagements) ; 2 bâtiments d’assistance et de
soutien hauturier ; un 4ème B2M.

L’innovation. Les grands projets portent d’abord sur la modernisation de la
dissuasion nucléaire : 2 nouveaux SNLE ; le système de missiles M51 au-delà de
2021 ; le successeur du missile ASMP-A (air sol moyenne portée amélioré).
Ensuite, le système de combat aérien futur inclut la mise en réseau du Rafale.
Enfin, le combat aéroterrestre prend en compte la robotisation et l’intelligence
artificielle sur le champ de bataille. De nouvelles orientations stratégiques seront
données aux organismes sous tutelle de la DGA (Ecole Polytechnique, Supaéro,
ONERA et doctorants) avec des contrats d’objectifs et de performance 2017-2021.
En 2017, le projet « DGA Lab » sera lancé auprès des « start up » et des petites et
moyennes entreprises spécialisées dans la recherche duale, à usage civil et
militaire. Par ailleurs, 80 experts en informatique ont été recrutés en 2016 sur un
objectif de 2.600 « combattants numériques » d’ici à la fin 2019.

L’exportation. Les partenariats avec les pays étrangers apportent une visibilité
sur le long terme aux chaînes de production et aux bureaux d’études pour le
maintien d’une longueur d’avance technologique. Le 19 janvier 2017, le ministre
de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a annoncé plus de 20 Md€ de prises de
commandes (+ 3 Md€ en un an), grâce à la vente de 12 sous-marins à propulsion
classique à l’Australie.

Loïc Salmon

DGA : 2015, un excellent millésime pour l’armement
« DGA Innovation » : rendre les projets possibles et rentables sur le long terme

DGA : la révolution numérique et industrielle de l’impression 3D

Sécurité : détection, identification
et neutralisation des drones
malveillants
La présence de drones malveillants à proximité des centrales nucléaires et des
aéroports a conduit à la promulgation d’une loi à leur sujet et à l’élaboration de
moyens techniques de lutte.

Louis Gautier, secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale, et Yves
Fort, directeur des opérations scientifiques de l’Agence nationale de la recherche,
ont exposé la situation et organisé une présentation dynamique de trois
démonstrateurs, le 18 novembre 2016 à la base aérienne de Villacoublay. L’appel
à projets « Protection des zones sensibles vis-à-vis des drones aériens » en a reçu
24, dont 3 ont été retenus en avril 2015 et financés. Dénommés ANGELAS,
BOREADES et SPID, ces projets, portés par des groupements d’industriels, de
laboratoires publics et privés et d’opérateurs, ont abouti 12 à 18 mois plus tard à
des systèmes intégrés de détection de petits drones, de leur identification (amis
ou ennemis) et de leur neutralisation, testés en environnement opérationnel.

Démonstration de matériels. Des drones, mis au point par la SNCF pour
l’observation des voies ferrées, ont servi de plastron à la démonstration,
accompagnée d’une exposition statique des matériels (photo). Quatre scénarios
ont été mis en œuvre : survol d’un site nucléaire par un drone isolé ; attaque lors
d’un événement sportif dans un environnement semi-urbain ; attaque lors d’une
cérémonie importante dans un environnement urbain ; survols de plusieurs
drones à proximité des départs et des trajectoires d’approche d’avions d’un
aéroport. Le projet ANGELAS utilise pour la détection : un radar actif d’une
portée de 3 km et associé à un algorithme de pistage multicibles ; la goniométrie
qui localise la direction des émissions du drone ou de la station sol jusqu’à
plusieurs km ; un radar passif (très longue portée) ; des moyens acoustiques
(plusieurs centaines de mètres) ; un système laser qui scanne l’environnement et
détecte les échos renvoyés. L’identification recourt à : des caméras haute
résolution (portée supérieure à 3 km) ; des émissions infrarouges (jusqu’à 2 km) ;
un radar passif qui sépare les objets à rotor de la scène ; l’imagerie qui identifie
de jour et de nuit (jusqu’à 2 km). Enfin, la neutralisation du drone se fait par :
brouillage par émission directive des liaisons de commande et vidéo ;
éblouissement de la caméra vidéo par laser ; brouillage du système GPS. Le projet
BOREADES consiste à brouiller et leurrer le système de navigation du drone pour
en prendre le contrôle, choisir son point de récupération et estimer la position du
télépilote. Le projet SPID présente des moyens similaires, sur véhicules
spécialisés, pour la protection d’installations fixes, d’événements ou de théâtres
d’opérations et de cibles mobiles (jusqu’à 500 m) avec interpellation du télépilote.

Encadrement juridique. Selon Louis Gautier, plus de 400.000 drones privés et
4.000 drones professionnels sont en service en 2016. La loi du 24 octobre 2016,
relative au renforcement de la sécurité de l’usage des drones civils, concerne
ceux d’une masse inférieure ou égale à 800 g. Ils sont soumis à un régime
d’enregistrement par voie électronique et doivent être équipés de dispositifs de
signalements lumineux et électronique ou numérique. Un télépilote
« professionnel » (hors usage de loisir) doit avoir suivi une formation visant à
permettre le contrôle de l’évolution du drone, selon les règles de sécurité et les
conditions d’emploi relatives à la navigation aérienne.

Loïc Salmon

Les drones : de l’OPEX au territoire national

Les drones, dualité militaire et civile

Drones civils : réponses opérationnelles et juridiques aux usages malveillants

Armée de Terre : choix du «
Patroller » comme futur système
de drones tactiques
Le groupe français Safran va réaliser le programme « Système de drones
tactiques » (SDT), en s’appuyant sur le « Cluster Patroller » (groupement de
petites et moyennes entreprises de hautes technologies) et la société allemande
Ecarys, spécialisée dans les moto-planeurs et les avions légers.

Le contrat a été signé le 5 avril 2016 à Montluçon, sur le site de la société
SAGEM (groupe Safran), par la Direction générale de l’armement. Le programme
SDT a été présenté à la presse, le 13 avril à Paris, par le général de division
Bernard Barrera, sous-chef d’état-major Plans/Programmes de l’armée de Terre.

Le contrat. Selon le ministère de la Défense, Safran va livrer 2 systèmes
opérationnels, composés chacun de 5 vecteurs aériens de type « Patroller »
(photo), 2 stations sol pour le pilotage et le contrôle des drones et des moyens de
communication. Le contrat inclut : un système de 4 vecteurs aériens et 2 stations
sol pour la formation et l’entraînement en métropole ; le système de soutien ; le
maintien en condition opérationnelle des systèmes pendant 12 ans. Ces matériels
remplaceront les « Systèmes de drones tactiques intérimaires » (SDTi), en service
depuis 2004 au 61ème Régiment d’artillerie de Chaumont. Le programme SDT
offrira une plus grande endurance, des images de meilleure qualité et une
capacité de recherche plus efficace, grâce à une conception multi-senseurs. Il
pourra en effet emporter simultanément deux charges utiles totalisant 250 kg :
l’une avec des moyens optique/infrarouge/laser et radar utilisable dans un
premier temps ; l’autre de guerre électronique, susceptible de se substituer au
radar.

Le programme SDT. Le drone tactique (SDTi puis SDT) présente une forte
réactivité au plus près de la manœuvre, en renseignant le chef d’un groupement
tactique interarmes ou d’une brigade interarmes, explique le général Barrera. Il
effectue des missions de reconnaissance de terrain, d’axes et d’itinéraires,
d’observation, de surveillance et de détection, localisation et désignation de
cibles. Le SDT, rapide et pratique, rejoindra en une demi-heure sa zone de 150
km de diamètre et pourra y rester plus d’une dizaine d’heures à 1.900 m
d’altitude. Avec des livraisons en 2018 et 2019, les SDT entreront en service
opérationnel en 2020, date de retrait des SDTi. Le SDT complète les drones au
contact (DRAC) et MALE (moyenne altitude longue endurance). Le DRAC, auquel
succèdera le SMDR (système de mini-drone de reconnaissance), constitue les
jumelles déportées du combattant pour les missions de reconnaissance et d’appui
renseignement après un accrochage ou une embuscade. Lançable à bout de bras
et destiné aux armes de mêlée et aux forces spéciales, il évolue pendant 2 heures
à 100 m d’altitude sur une zone de 15-20 km de diamètre. Le SMDR, dont 30
exemplaires seront livrés en 2018, permettra de voir, par exemple, les
manœuvres d’un groupe adverse. Le drone MALE Harpang, déployé en
Afghanistan, puis le Reaper en service dans la bande sahélo-saharienne et, à
terme, le drone européen assurent des missions de surveillance et de
reconnaissance dans la profondeur. Volant à 3.500 m d’altitude sur une zone de
1.000 km de diamètre, ils permettent l’anticipation des menaces d’un théâtre
d’opération, le ciblage d’objectifs et l’évaluation des effets d’une action. A terme,
les drones pourront effectuer des vols d’entraînement dans des « espaces
ségrégués » au-dessus du territoire national. Des recherches sont en cours sur les
mesures de sécurité à prendre.

Loïc Salmon

Le 61ème Régiment d’artillerie (drones et imagerie)

Forces spéciales : outil complémentaire des forces conventionnelles

Drones et robots en mer : toujours garder l’homme dans la boucle de décision
Drones    civils    :   réponses
opérationnelles et juridiques aux
usages malveillants
La protection contre le large spectre d’utilisation malveillante de drones aériens
nécessite des solutions techniques pour leurs détection, identification et
neutralisation. L’arsenal juridique doit être renforcé en matière de
responsabilisation et de sanctions.

Ces aspects de la prolifération des drones civils ont été abordés au cours d’un
colloque organisé, le 28 mai 2015 à Paris, par le Secrétariat général de la défense
et de la sécurité nationale et le Conseil économique, social et environnemental. Y
sont notamment intervenus : le contre-amiral Frédéric Renaudeau, directeur de la
protection des installations, moyens et activités de la défense au ministère de la
Défense ; Patrick Espagnol, directeur de la sécurité d’EDF ; Thierry Michal,
directeur technique général de l’Office national d’études et de recherches
aérospatiales (ONERA) ; Thomas Andrieu, directeur des libertés publiques et des
affaires juridiques au ministère de l’Intérieur ; Bruno Delor, président de la
Fédération française d’aéromodélisme.

Adaptation du dispositif de défense. Il s’agit d’abord d’évaluer les besoins de
protection, à savoir les installations sensibles, événements particuliers
(rencontres politiques, musicales ou sportives), populations et personnalités dans
des environnements parfois complexes. Selon l’amiral Renaudeau, un drone
distant de 6.000 m et volant à 70 km/h est détecté avec 5 minutes de préavis, dont
1 minute pour la prise de décision. La radiogoniométrie seule ne suffit pas pour
interpeller un téléopérateur malveillant, en raison de la diversité des modes de
pilotage. Elle est complétée par le radar et les détections acoustique et
optronique (équipement combinant l’optique et l’électronique). L’identification,
principe de base de la sécurité aérienne, est essentielle pour éviter les méprises :
vol licite ou non, objet volant ou oiseau. Le sentiment d’impunité se combat ainsi
depuis le sol par les moyens optroniques. Les accords avec les grands opérateurs
de téléphonie mobile permettent d’obtenir un signalement du drone, du
« télépilote » ou de l’intention de survol. La neutralisation porte d’abord sur la
protection passive par des systèmes aériens, aquatiques ou terrestres, simples et
intégrés aux autres fonctions d’autoprotection des sites. Ensuite, elle consiste à
brouiller ou leurrer le système de navigation du drone sans le détruire. Enfin, la
destruction du drone s’effectue par tir d’arme de précision ou d’un fusil de chasse
à chevrotine, selon un cadre juridique de l’emploi de la force après analyse des
risques et dommages collatéraux possibles. Une autre solution implique la
capture du « microdrone » malveillant au moyen d’un filet transporté par un
drone intercepteur. Le commandement et le contrôle des actions de neutralisation
reste en cohérence avec la défense aérienne, qui centralise les informations. Le
ministère de la Défense élabore des plans d’équipement des sites sensibles, en
fonction des vulnérabilités et réponses technologiques disponibles. Mais, souligne
l’amiral, le cadre juridique doit évoluer en priorité en matière de
neutralisation/destruction et de signalement des drones.

Filière industrielle de la sécurité. Soucieux de protéger son patrimoine, EDF
doit assumer ses responsabilités de sécurisation de la population et de
l’environnement, dont les centrales nucléaires, rappelle Patrick Espagnol. Il doit
donc anticiper cette nouvelle menace complexe et sophistiquée avec
surmultiplication des cibles par l’interconnexion. Chaque famille de drones suit sa
logique propre, qu’il convient de détecter par expérimentation. Puis, il faut
maîtriser le drone malveillant en l’obligeant à se poser à un endroit déterminé.
Opérateur privé avec obligation de résultat, EDF compte sur l’État, client et
fournisseur de sécurité, pour une mise en commun des réflexions et expertises
dans ce domaine. La Gendarmerie et l’armée de l’Air sont chargées de faire
respecter l’interdiction de survol de sites sensibles. En matière de sécurité, la
réponse doit être adaptée, sans coût excessif, supranationale et s’appuyer sur
l’existant, la recherche et le développement, selon Patrick Espagnol.

Vaste domaine de recherche. L’ONERA, explique Thierry Michal, présente un
aspect dual. Acteur de la recherche aéronautique, il doit remplir des missions de
plus en plus exigeantes dans le respect des règlements. Parallèlement, avec son
volet défense, il doit lutter contre tout usage malveillant dans ce domaine. Le
contenu très sophistiqué de la charge utile du drone correspond à des besoins
variables. Dans ce contexte, il s’agit de mettre en place un système pour contrer
la menace future. La détection restera complexe, compte tenu de l’évolution
rapide de la technologie des drones. Par ailleurs, la réponse sera globale avec la
mise en œuvre d’une chaîne de mesures reposant sur le dynamisme de la filière
robotique. Compte tenu de la prolifération des drones bon marché et aux
discrétion et capacité d’action accrues, il faudra des capteurs compacts et des
senseurs performants. Ceux-ci devront être autonomes en matière de durée
d’intervention et de furtivité, à savoir peu détectables ou identifiables. Les drones
civils sont en effet particulièrement furtifs, car construits sans métal et volant à
très basse altitude dans un environnement urbain. La lutte anti-drones va
privilégier la rapidité et « l’approche système », à savoir détection, identification,
décision et neutralisation, cohérence essentielle de la chaîne de défense. La
tendance s’oriente vers une solution la plus automatisée possible. Mais, prévient
Thierry Michal, il faut réfléchir à la place de l’homme dans la boucle, domaine de
recherche de l’ONERA.

Difficultés juridiques. Il n’est pas toujours possible d’identifier la provenance
des drones et de les arrêter, indique Thomas Andrieu. Par ailleurs, la lutte contre
leur usage malveillant ne doit pas conduire à brider un domaine économique en
plein essor, au nom de la liberté du commerce et de l’industrie ainsi que du
développement de ce secteur. Les critères retenus portent sur le poids et la taille
du drone. Les conséquences dommageables posent la question de l’assurance, pas
encore disponible. La destruction à distance n’est autorisée que si la menace est
identifiable et prouvable. La réglementation prévoit des obligations : information
sur les conditions d’utilisation ; formation minimale ; enregistrement et
signalement électronique. Il faut ensuite faire le tri entre les types de drones et
les malveillances potentielles. Au niveau de l’Union européenne, certains États
exigent la présence d’une puce d’identification électronique.

Loïc Salmon

Drones civils : avantages, mais aussi sources de menaces complexes et évolutives

Les drones Un peu d’histoire

La Fédération française d’aéromodélisme regroupe 850 associations totalisant
28.000 licenciés. Pour limiter le risque d’utilisation malveillante des drones de
loisir, elle recommande notamment : la mise en place d’un site internet officiel de
sensibilisation ; l’incitation des fabricants et vendeurs à une information pour une
utilisation licite ; le renforcement du principe de déclaration des sites de vol en
groupe ; l’identification électronique et un brevet de « télépilote » pour les drones
au dessus d’un seuil de masse à définir.
Armée de Terre : nécessité du
renseignement au « bon endroit »
et au « bon moment »
Facteur de réduction de l’incertitude de l’action, le renseignement assure
l’autonomie du chef tactique, grâce à la « recherche multi-capteurs ». Le
raccourcissement de sa boucle contribue à préserver l’intégrité du combattant au
contact de l’adversaire.

Le renseignement dans les forces terrestres a fait l’objet d’une conférence-débat,
organisée le 26 mai 2015 à Paris, par le Cercle Prospective Terre. Y sont
notamment intervenus le général Éric Maury, commandant la Brigade de
renseignement, et Alexandre Papaemmanuel, directeur « Grands Comptes
Renseignement » chez Airbus Defence and Space.

Enjeux opérationnels. Depuis 2009, les différents chefs interarmes peuvent
disposer immédiatement d’outils de recherche et d’exploitation du renseignement
à leur niveau et par des capteurs d’origines humaine, électromagnétique, image
et géographique, explique le général Maury. Les patrouilles profondes du 2ème
Régiment de hussards s’infiltrent discrètement dans un environnement sensible
avant le déclenchement d’une opération. Elles constituent des réseaux de sources
humaines dans la durée et procèdent aux interrogatoires d’adversaires capturés.
Elles peuvent guider n’importe quel système d’armes, des hélicoptères, des unités
d’infanterie ou de blindés et des avions de chasse sur un objectif pour le
neutraliser ou même le détruire. De son côté, le 54ème Régiment de
transmissions intercepte, localise ou brouille les télécommunications adverses
(VHF et téléphonie mobile). Ses patrouilles légères d’appui électronique
accompagnent au plus près les groupements tactiques interarmes, en vue de leur
fournir du renseignement d’alerte, comme la détection d’engins explosifs
improvisés, sur les itinéraires empruntés. De nombreux soldats leur doivent la vie
au cours des dernières opérations extérieures. Les drones du 61ème Régiment
d’artillerie sont totalement dédiés aux chefs tactiques sur le terrain,
contrairement aux drones MALE (moyenne altitude longue endurance) Harfang et
Reaper de l’armée de l’Air. Leurs informations, communiquées en temps réel par
le biais d’un élément de liaison, permettent un ciblage au profit de l’artillerie et
des hélicoptères. Le 28ème Groupe géographique contribue à renforcer la
compréhension de la situation des chefs opérationnels par des produits
cartographiques précis, géo-référencés, réalisés et délivrés au plus près du
terrain et en situation de combat. Il envoie également des détachements
temporaires, à l’intérieur et à l’extérieur du territoire national, pour renforcer un
théâtre d’opérations ou, par exemple à la demande des attachés de défense, sur
une zone présumée sensible qui pourrait faire l’objet d’une intervention future.
Par ailleurs, ajoute le général, l’armée de Terre alimente la Direction du
renseignement militaire (DRM) en flux de données depuis la métropole et les
théâtres d’opérations. Ainsi, le centre de guerre électronique du 44ème Régiment
de transmissions intercepte, en permanence, des communications HF et
satellitaires dans des zones estimées stratégiques. Les forces spéciales disposent
du 13ème Régiment de dragons parachutistes pour le renseignement humain.
Elles profitent aussi du renseignement de l’armée de Terre par le biais du
Groupement d’appui aux opérations spéciales. Ainsi, pendant l‘opération « Ares »
en Afghanistan (juillet 2003- décembre 2006), les forces spéciales ont fait appel
aux patrouilles légères d’appui électronique. La DRM a récemment ouvert le
« Centre de renseignement géospatial interarmées », auquel contribue le 28ème
Groupe géographique par sa capacité « Geoint » (renseignement multi-sources
intégré sur un support géographique). Les renseignements recueillis par les
capteurs de l’armée de Terre sur un théâtre d’opérations sont centralisés,
exploités et recoupés avec des informations d’autres sources, en vue d’enrichir
des bases de données. Elles renseignent le niveau stratégique ou politico-
militaire, à savoir le chef d’État-major des armées, et, en retour, les chefs
interarmées de ce même théâtre.

« L’info-numérisation ». La numérisation du renseignement en raccourcit la
boucle entre le capteur et l’utilisateur, souligne Alexandre Papaemmanuel.
Chaque combattant et véhicule devient un capteur et un « effecteur » (qui
échange des informations avec un ordinateur) capable, sur un théâtre
d’opérations, de communiquer avec les autres et la métropole. Dans la guerre
« asymétrique » d’aujourd’hui, l’adversaire est, lui aussi, équipé de
« Smartphone », de messagerie instantanée et de cartographie numérique pour
synchroniser son action, même en plein désert. Pour réagir au plus vite, la
« numérisation du champ de bataille » contient une application dédiée au
renseignement. Celle-ci détecte les « signaux faibles », grâce à des algorithmes
de traitement de l’information. Ce sera, par exemple, au milieu de dizaines de
millions de communications, la conversation qui annonce la pose d’une bombe ou
la planification d’une attaque imminente. L’industrie française, indique Alexandre
Papaemmanuel, permet : la traduction automatique des langues étrangères ; la
détection automatique, dans un flux vidéo, d’une forme permettant de retrouver
un véhicule, un regard ou une silhouette ; de reconnaître une voix dans des
millions d’heures de conversations téléphoniques. La visualisation sur une même
carte des données des multi-capteurs permet de croiser des informations
géographiques et météorologiques, la traçabilité des routes ou pistes praticables,
les dernières localisations de téléphone pour comprendre les axes de transit de
l’adversaire, les bâtiments pouvant servir de caches ou les puits disponibles
utilisables comme lieux d’approvisionnement. Désormais, une infrastructure
réseau sécurisée diffuse le renseignement en quelques secondes sur un théâtre
d’opérations entre ceux qui ont besoin de le connaître. Pour éviter de dépendre
du concept américain « Geoint » et pour le dépasser, Alexandre Papaemmanuel
préconise de définir un concept français, basé sur le retour d’expérience
opérationnelle, le savoir-faire industriel et la recherche universitaire.

Loïc Salmon

Renseignement militaire : clé de l’autonomie stratégique et de l’efficacité
opérationnelle

Renseignement aérospatial : complémentarité entre drones et aéronefs légers ISR

Le 61ème Régiment d’artillerie (drones et imagerie)

Anticipation, planification et conduite des opérations terrestres procèdent du
renseignement. L’anticipation stratégique repose sur la veille (sources
« ouvertes » comprises), la recherche documentaire et la mobilisation des
capteurs de terrain, afin de connaître exactement la complexité de
l’environnement du théâtre d’opérations. La planification valide des scénarios et
prépare la manœuvre en mobilisant toutes les sources alliées et nationales
(Direction générale de la sécurité extérieure et Direction du renseignement
militaire). Pendant la conduite des opérations, la chaîne du renseignement
s’adapte à la manœuvre et intensifie ses processus de recherche. Coordination et
circulation du renseignement permettent au chef d’organiser, de commander et
de contrôler, en permanence, la participation maximale des moyens déployés pour
atteindre les objectifs.
Drones et robots en mer : toujours
garder l’homme dans la boucle de
décision
Les drones navals et les robots sous-marins permettront une protection accrue
des navires, de leurs équipages et du territoire maritime national. L’emploi de la
force, décision politico-militaire, exclut de tout automatiser.

Un colloque sur l’expérience acquise sur ces engins et leurs perspectives a été
organisé, le 17 décembre 2014 à Paris, par le Centre d’études stratégiques de la
Marine (CESM). Y ont notamment participé : Océane Zubeldia de l’Institut de
recherches stratégiques de l’École militaire ; les capitaines de vaisseau Olivier
Lebas et Marc Aussedat de l’État-major des armées ; l’ingénieure Sophie Vacher
de la Direction générale de l’armement (DGA) ; le capitaine de vaisseau François
Moreau et le capitaine de corvette Raphaël Burgun de l’état-major de la Marine.

Besoins opérationnels. Le drone naval doit s’adapter au sévère milieu marin et
permettre d’économiser du personnel, explique Océane Zubeldia. Il s’agit de
l’intégrer au système de combat du bâtiment et de le mettre en condition
opérationnelle. Par ailleurs, drone et robot constituent des capteurs de
renseignement déportés en altitude, en profondeur ou en immersion dans un
environnement hostile, indique le capitaine de vaisseau Aussedat. Leur discrétion
dans l’espace littoral contourne l’avantage militaire adverse et, du point de vue
national, assure une meilleure surveillance des côtes et exerce un effet dissuasif
pour leur protection. A l’horizon 2040-2050, les systèmes embarqués à bord des
drones pourront analyser automatiquement toutes les informations recueillies
pour choisir la plus opérationnelle ou bien la masse d’informations disparates
sera analysée par des hommes à terre. Aujourd’hui, la capacité à déceler les
signaux faibles (indices) reste du ressort de l’homme, qui simplifie la situation
tactique en vue de prendre la décision la plus efficace. Par son déplacement, le
drone perturbe l’environnement tactique, mais ne doit pas gêner l’intervention
décidée par l’autorité politique. L’ouverture du feu dépend d’une appréciation de
la situation globale. A terme, cette appréciation pourra être automatisée si la
situation est simple, mais pas si elle est complexe. L’art de la guerre ne se
modélise pas. Neutre, le drone n’affecte pas le déroulé des opérations et de la
planification. En outre, explique le capitaine de vaisseau Lebas, l’évolution
technologique du drone nécessite de repenser son concept d’emploi. Il s’agit d’en
saisir les opportunités pour qu’elles répondent aux besoins opérationnels, tout en
maintenant la chaîne de commandement. En 1988, dans le contexte de la guerre
Iran/Irak, un avion de ligne iranien avait été abattu dans le golfe Persique par
deux missiles surface/air tirés du croiseur américain USS-Vincennes, dont le
système radar/tir entièrement automatisé l’avait identifié comme hostile ! Depuis,
l’industrie de défense a capitalisé les retours d’expérience technique des drones
aériens militaires et civils, comme les matériaux, la miniaturisation, la puissance
des calculs embarqués et la communication, indique Sophie Vacher. Après les
essais de drones à ailes fixes ou tournantes en 2003-2004, la Marine nationale a
privilégié les seconds, susceptibles d’apponter sur une frégate (photo). Les
concepts d’emploi et performances sont étudiés en amont. Les drones et robots
marins permettent d’économiser heures de vol et jours de mer et de créer des
métiers nouveaux, mais leur coût élevé de développement exige les bons
compromis de performance et de polyvalence. Les efforts portent sur
l’optronique, la guerre électronique, le radar, la communication (bandes
passantes) ainsi que la standardisation et « l’encapsulage informatique » des
messages.

Retour d’expérience. En 2012, au large de Toulon, la DGA a procédé avec
succès aux essais de décollage et d’appontage automatiques du drone D2AD, à
partir de la frégate Guépratte. Le système D2AD comprend : un segment « vol »
avec une balise et un harpon ; un segment « sol » avec des senseurs sur le pont
d’envol du bâtiment, une station de prédiction des mouvements du navire et une
station de guidage du drone. Les essais se sont poursuivis à partir du patrouilleur
l’Adroit avec le Serval (encadré), qui a effectué quelque 170 h de vol et 300
appontages à la date du colloque du 17 décembre 2014. Selon le capitaine de
corvette Burgun, divers enseignements ont été tirés : coûts d’emploi réduits par
rapport à l’effectif optimal de l’équipe et à la surface maritime surveillée ;
performances de la charge utile optronique ; entraînement et qualification des
opérateurs ; dimensionnement du lot de soutien ; capacité de transmissions de
vidéos en temps réel. Il fallait éviter que l’Adroit brouille les signaux d’autres
bateaux. En effet, les futures missions du drone porteront sur la police des pêches
dans l’océan Indien, la lutte contre les trafics illicites, la surveillance côtière et
l’identification des pistes détectées par le bâtiment porteur. En outre, des
solutions ont été identifiées pour l’embarquement sur des frégates de 1er rang et
l’intégration minimale sur des bâtiments de projection et de commandement
(BPC). Un shelter pourrait être installé sur le pont d’envol du BPC, d’où un drone
décollerait pour une mission amphibie avec retour vers une installation au sol.
Des réflexions sont en cours sur la complémentarité d’emploi des drones et des
hélicoptères embarqués. Parallèlement, depuis 2011 au large de Brest, la DGA
explore l’usage de drones et robots marins dans la guerre des mines, à partir du
concept de « drone porte drones ». Un projet d’études amont, dénommé
« Espadon » (Évaluation incrémentale de solutions potentielles d’automatisation
de déminage pour les opérations navales), prépare le programme SLMAF
(Système de lutte antimines futur) pour remplacer les moyens actuels. Les mines
sont présentes dans tous les conflits maritimes (golfe Persique 1988 et Libye
2011). D’un emploi simple et d’une gamme très large, rudimentaires ou très
sophistiquées, elles peuvent être mouillées jusqu’à 300 m de fond par des moyens
non spécialisés.

Impact stratégique. Les drones faciliteront de nouvelles missions de la mer vers
la terre et diminueront les risques en opérations, souligne le capitaine de vaisseau
Moreau, qui met en garde contre la focalisation sur l’engin au détriment de
l’entraînement. Le « tout technologique » doit être robuste pour affronter
l’environnement marin (météo, courants, corrosion et distances), car la
récupération d’engins en mer est plus difficile qu’à terre. Enfin, l’intelligence
humaine peut faire autre chose que le traitement de l’information, qui peut être
automatisé, conclut le capitaine de vaisseau Moreau.

Loïc Salmon

Marine : « navalisation » d’un drone aérien et test d’un système vidéo embarqué

Marine : une FGM projetable partout dans le monde

La Marine nationale a expérimenté un système de drone S-100 Camcopter,
rebaptisé « Serval » (Système embarqué de reconnaissance vecteur aérien
léger) : longueur, 3,10 m ; diamètre rotor, 3,40 m ; emport charge utile, 50 kg ;
vitesse en patrouille, 60 nœuds (111 km/h) ; endurance, 5h30. Le robot naval est
un véhicule sous-marin autopropulsé et filoguidé par fibre optique. Équipé de
capteurs pour une imagerie en deux ou trois dimensions, il permet une
localisation précise par transpondeur acoustique.
Drones et armes hypersoniques :
futurs enjeux de puissance
A l’horizon 2035, les drones et missiles hypersoniques, difficiles à intercepter en
raison de leur très grande vitesse, pourront agir dans la profondeur, avec
précision et à distance de sécurité. Leur coût élevé nécessitera des choix
budgétaires et opérationnels.

Ils ont fait l’objet d’un colloque organisé, le 3 novembre 2014 à Paris, par le Club
Participation et Progrès. Y sont notamment intervenus : le général Denis Mercier,
chef d’état-major de l’armée de l’Air ; Laurent Serre, responsable des
programmes hypersonique à l’Office national d’études et de recherches
aérospatiales (ONERA) ; Philippe Migault, directeur de recherche à l’Institut des
relations internationales et stratégiques ; André Geoffroy, consultant.

Drones de demain. Un drone de reconnaissance hypersonique se rendra très
vite sur zone et en reviendra avec des informations fraîches immédiatement
utilisables, explique Laurent Serre (ONERA). Ce drone peut être tiré sous avion,
du sol ou depuis la mer (bâtiment de surface ou sous-marin). Un propulseur
d’appoint lui donne une accélération jusqu’à Mach 2 (680 m/s), qu’il maintient par
son statoréacteur aux conditions de croisière à haute altitude. Sa portée croît
alors avec sa vitesse. En conséquence, il peut réaliser une mission loin à
l’intérieur d’un territoire hostile sans disposer de la supériorité aérienne. A une
altitude donnée, voler plus vite lui donne un avantage de manœuvrabilité face à
un intercepteur (avion ou missile sol/air). En outre, à une vitesse donnée, voler
plus haut réduit les performances de l’intercepteur. La mission du drone est
entièrement automatique. Pendant sa phase de croisière, il atteint un territoire,
même très défendu, en 20 mn, puis y parcourt plus de 600 km dans la profondeur
et capte des images par son radar SAR à haute résolution (10 à 30 cm) sur une
sélection de sites de points chauds d’intérêt du moment. Sa phase de
récupération se décompose en : vol de retour vers le lieu choisi ; décélération
jusqu’à une vitesse subsonique ; descente freinée par parachute ; récupération
par hélicoptère, méthode utilisée pendant la guerre du Viêt Nam (1955-1975) ;
retour vers l’infrastructure de base. Les données captées au cours de la
reconnaissance ont été extraites et disséminées vers les destinataires pendant le
vol du retour. Par exemple, au cours d’une mission d’une heure, le drone
hypersonique peut recueillir des informations sur une dizaine de zones (4 km de
côté) réparties dans un carré (500 km de côté) et sous 2 angles d’observation
aller/retour pour les reconstituer en 3 dimensions. Mais l’expression du besoin de
« renseignement stratégique réactif tout temps » reste à affiner, souligne Laurent
Serre. Des missions, quotidiennes ou hebdomadaires, permettraient d’affiner la
base de données, de détecter les changements et de prendre des vues dans de
nouvelles conditions, elles porteraient notamment sur : la surveillance de sites de
missiles ou de radars fixes ou déplaçables ; l’indice d’activité de réseaux de
communications terrestres et fluviaux ; l’indice d’activité d’installations
sensibles ; le recensement de capacités aériennes ou navales.

Projets français. Face aux menaces futures, la technologie des armes
hypersoniques fera la différence entre les grandes puissances qui s’en doteront,
estime le général Mercier. Leur concept d’emploi sera le même qu’aujourd’hui
pour garder la capacité d’entrer en premier sur un théâtre, mais avec une
différence importante : la distance de tir ! L’armée de l’Air a déjà entrepris des
études très poussées sur les techniques essentielles et les enjeux opérationnels.
La constante restera la liberté d’action sur les espaces terrestre et maritime, qui
dépend de celle dans l’espace aérien. Contrer le déni d’accès à ces espaces
nécessite d’imaginer des armements à forte réactivité, longue portée et précision
des effets. La furtivité des avions de chasse se trouve déjà mise à mal par les
Vous pouvez aussi lire