DISPOSITIFS MÉDICAUX BESOINS DE SANTÉ ET RÉGULATION - #223

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DISPOSITIFS MÉDICAUX BESOINS DE SANTÉ ET RÉGULATION - #223
A U TOMNE 2021

                                                                    #223

                                  DISPOSITIFS
                                  MÉDICAUX
                                  BESOINS DE SANTÉ
                                  ET RÉGULATION

4                                 17
    ENJEUX / NUMÉRIQUE EN SANTÉ        ÉCO-SYSTÈME / POLITIQUE INDUSTRIELLE
    TÉLÉSURVEILLANCE MÉDICALE          RELOCALISATION INDUSTRIELLE
    GÉNÉRALISATION RÉUSSIE             LES LEVIERS NÉCESSAIRES
DISPOSITIFS MÉDICAUX BESOINS DE SANTÉ ET RÉGULATION - #223
DISPOSITIFS MÉDICAUX BESOINS DE SANTÉ ET RÉGULATION - #223
A UTOMN E 2 0 2 1                             #223

 04 ENJEUX / Numérique en santé
                     Télésurveillance médicale
                                                                                                               ÉDITO
                     Huit recommandations pour une
                     généralisation réussie

 07 ÉCO-SYSTÈME / Politique industrielle

                                                                                                                                      © DR
                     Pénurie de matières premières
                     70 % des entreprises du DM impactées

                                            DOSSIER
                                                                                                               Cher lecteur,
                                                                                                               À l’heure où nous bouclons ce numéro, le Projet
                                            PAGES I À VIII                                                     de loi de financement de la Sécurité sociale pour
                                                                                                               2022 (PLFSS) est toujours en cours d’examen
                                            PLFSS pour 2022                                                    à l’Assemblée nationale. Il s’agit là d’un texte
                                                                                                               essentiel pour nos entreprises. On y fixe,
                                            Des avancées… et des                                               notamment, les montants d’économies attendus
                                            sources d’inquiétude                                               par l’Assurance maladie ainsi que de nombreuses
                                                                                                               mesures impactant directement le secteur
•Rencontres
             du progrès médical                                                                              du dispositif médical. Question économies, les
  – Quelle régulation pour répondre                                                                           entreprises du DM devraient y contribuer à hauteur
     aux besoins de santé ?                                                                                    de 200 millions d’euros, montant identique à celui
   – Comment concilier régulation                                                                            de 2020, sauf que la COVID-19 est passée par là
     et dynamisme industriel ?
                                                                                                               et que le secteur est loin d’avoir retrouvé son
•Dix
   propositions pour une régulation plus                                                                     équilibre… Le niveau d’activité des établissements
  juste, plus lisible et propice aux innovations                                                               de santé, conjugué à de fortes tensions sur les
                                                                                                               marchés du fret et des matières, laisse en effet
                                                                                                               craindre une reprise très lente (voir l’article

 17                  ÉCO-SYSTÈME / Politique industrielle                                                      page 7). Cette régulation arbitraire, doublée du
                     Relocalisation industrielle                                                               maintien de la clause de sauvegarde, vient en
                     Quels sont les leviers pour les entreprises                                               contradiction avec les nombreuses annonces faites
                     du DM ?                                                                                   depuis juin dernier, censées soutenir la reprise.

 18                  Désindustrialisation
                     Le Snitem auditionné à l’Assemblée nationale
                                                                                                               Les équipes du Snitem sont plus que jamais
                                                                                                               mobilisées pour porter tous les sujets critiques
                                                                                                               pour nos entreprises, petites ou grandes.

 19                  EN DIRECT DU SNITEM
                     Gouvernance
                     Assemblée générale
                                                                                                               En revanche, certaines mesures inscrites
                                                                                                               dans le projet de loi constituent des avancées
                     Deux nouvelles administratrices au sein du CA                                             non négligeables, notamment celle liée à la
                                                                                                               télésurveillance. À découvrir dans notre dossier

  21 Métiers du DM   L’emploi toujours au cœur des préoccupations
                     du Snitem
                                                                                                               spécial « PLFSS pour 2022 ».
                                                                                                               Bonne lecture.

                                                                                                                                                   Philippe Chêne
 Snitem INFO AUTOMNE 2021 #223                                                                                                                           Président
 Directeur de la publication : Éric Le Roy - Adresse postale du Snitem : 39/41, rue Louis Blanc, CS 30080,
 92038 La Défense Cedex - Rédacteur en chef : Natalie Allard, Snitem – Secrétaire générale de la rédaction :
 Christine Mebbani – Rédacteurs : Dominique Bellanger, Laura Chauveau, Louise Dobel, Gersende Guillemain,
 Louise Guillon, Alexandre Terrini – Secrétaire de rédaction : Slimane Zamoum – Graphiste : Louisa Akkouche
 Société éditrice : Décision & Stratégie Santé – 1, rue Augustine-Variot, 92245 Malakoff Cedex,
 Tél. : 01 73 28 16 10 – Illustration couverture : © ADOBE STOCK – Imprimerie : Solidaire, 1 rue Belatrix,
 53470 Matigné-sur-Mayenne.                                                                                                      Snitem INFO N° 223 - AUTOMNE 2021 3
DISPOSITIFS MÉDICAUX BESOINS DE SANTÉ ET RÉGULATION - #223
EN JE UX / Nu m é r i q u e e n sa n t é

   TÉLÉSURVEILLANCE MÉDICALE

   Huit recommandations
   pour une généralisation réussie
   Les membres du think tank « Numérique, DM et Santé » ont présenté,
   en septembre dernier, une série de recommandations en vue de la
   généralisation de la télésurveillance médicale. Elles sont le fruit d’un large
   consensus entre patients, praticiens, établissements de santé et entreprises
   du dispositif médical, comme le rappelle Lucile Blaise, vice-présidente Europe
   de l’Ouest chez Resmed.

                                                                   dans la transformation numérique de notre système de
                                                                   santé. Véritable espace de réflexion et d’échange, il a pour
                                                                   mission d’enrichir les débats précédant les décisions
                                                                   des autorités compétentes dans ce domaine. Il a ainsi,
                                                                   par exemple, travaillé pendant 18 mois sur des solutions
                                                                   novatrices expérimentées dans d’autres pays et pouvant
                                                                   inspirer la France : des indicateurs de type PREMs et PROMs
                                                                   pour évaluer la qualité des soins perçue par les patients (1),
                                                                   des applications en santé pour faciliter le suivi des patients
                                                                   atteints de maladie chronique ou encore, des plateformes
                                                                   de partage numérique en santé (2). Composé de différents
                                                                   sous-groupes de travail, le think tank s’est également
                                                                   emparé de la question de la télésurveillance médicale,
                                                                   à l’heure où celle-ci, après sept années d’expérimentation
                                                                   dans le cadre du programme Étapes (Expérimentations de
                                              © DR

                                                                   télémédecine pour l’amélioration des parcours en santé),
     Lucile Blaise, vice-présidente Europe                         s’apprête à passer dans le droit commun.

     de l’Ouest chez Resmed.                                       S.I. : Vous avez ainsi élaboré une liste de huit
                                                                   recommandations pour « une généralisation réussie
   Snitem Info : Pouvez-vous revenir, en quelques mots,            de la télésurveillance médicale », dévoilées en septembre
   sur la genèse du think tank « Numérique, DM et Santé »,         dernier…
   dont vous êtes membre ?                                         L.B. : En effet, après de nombreux échanges, nous sommes
   Lucile Blaise : Le think tank, créé en 2018 à l’initiative      parvenus à un consensus sur les « prérequis » qui, à nos
   du Snitem, réunit des représentants de l’ensemble des           yeux, sont indispensables à cette généralisation. Ils sont
   acteurs (patients, professionnels de santé, entreprises         au nombre de huit : garder l’objectif au cœur du projet,
   de santé, experts du système de santé et du numérique)          à savoir renforcer l’accès à la santé sur tout le territoire ;
   concernés par l’utilisation et l’apport du dispositif médical   ne pas créer de période de vide entre la fin d’Étapes et la

4 Snitem INFO N° 223 - AUTOMNE 2021
DISPOSITIFS MÉDICAUX BESOINS DE SANTÉ ET RÉGULATION - #223
ENJEUX / Numér iq ue en s an té

généralisation en droit commun ; ne pas se limiter aux cinq
pathologies chroniques d’Étapes ; ne pas repartir de zéro
et s’appuyer sur les apports des expérimentations menées                          LES MEMBRES DU THINK TANK
depuis sept ans ; faire impérativement l’effort de la f­ luidité                  – Lucile Blaise, vice-présidente Europe de l’Ouest,
et de la simplicité de mise en œuvre ; a­ ccompagner la                              Resmed
généralisation de la télésurveillance médicale d’une                              – Alain-Michel Ceretti, président de l’association
communication de haut niveau… et, bien sûr, vouloir                                  de patients Le Lien et premier président de France
réellement le succès du dispositif, en sachant que son                               Assos Santé
coût ne doit pas être vu isolément, mais bien en termes de                        – Antoine Groheux, responsable Innovation,
­complications et d’hospitalisations évitées. La démarche                            Medtronic France
                                                                                  – Jacqueline Hubert, consultante indépendante,
 doit être tournée vers l’efficacité thérapeutique et fondée
                                                                                     Hubert33 Consulting
 sur un modèle économique soutenable pour les entre-
                                                                                  – Carlos Jaime, directeur général Ascom France
 prises et les ­professionnels de santé. Telle est la clé                            & Spain
 du succès. La dernière recommandation, majeure, est                              – Christophe Lala, consultant
 celle d’embarquer tous les acteurs concernés (patients,                          – Dr Grégory Perrard, cardiologue et cofondateur
 ­professionnels de santé, entreprises, financeurs) en ­partant                      de Newcard
  d’une logique d’usage.                                                          – Dr Jean-Pierre Thierry, conseiller médical
                                                                                     de France Assos Santé
S.I. : Pouvez-vous nous en dire plus ?                                            Animateurs/coordonnateurs :
L.B. : La généralisation réussie de la télésurveillance                           Vincent Olivier (Recto Verso) et François-Régis
médicale, comme de toute pratique numérique, va bien                              Moulines (Snitem)
au-delà de la seule adoption d’une innovation technolo-
gique : structurante, elle modifie le parcours de soins et                        À noter :
implique l’ensemble des acteurs de la prise en charge de                          Les recommandations sur la télésurveillance ont été
                                                                                  élaborées par un sous-groupe de travail composé
la pathologie, à commencer par le patient. Elle doit avant
                                                                                  de Lucile Blaise, du Dr Grégory Perrard,
tout prendre en compte les utilisateurs et partir de la
                                                                                  du Dr Jean-Pierre Thierry et de François-Régis
réalité du parcours de soins et du suivi de la pathologie.                        Moulines (coordonnateur).
Les enjeux à relever touchent à l’organisation, à la culture
professionnelle, à la formation et aux compétences.

S.I. : L’article 24 du projet de loi de financement de la                    vieillissement de la population, d’essor des pathologies
Sécurité sociale pour 2022, qui fait passer la télésur-                      chroniques ou encore, de difficultés croissantes d’accès
veillance médicale dans le droit commun, répond-il aux                       aux soins dans certaines zones. Nous restons toutefois
attentes des membres du think tank ?                                         prudents : un certain nombre de points du projet de loi,
L.B. : Il s’agit d’une avancée tout à fait positive dans                     en l’état actuel, restent à clarifier, tels que la possibilité
son principe, en particulier dans le contexte actuel de                      de mettre progressivement un terme à la prise en charge

LA CRISE COVID-19, ACCÉLÉRATEUR DU NUMÉRIQUE EN SANTÉ
« La crise sanitaire a démontré l’intérêt des     permis de développer de nombreux usages,          numérique », l’investissement de 650 millions
solutions numériques et, tout particulièrement,   lesquels sont une clé de voûte essentielle        d’euros provenant notamment du Programme
celui de la télésurveillance médicale.            pour le déploiement de nouvelles solutions et     d’investissements d’avenir (PIA), pour le
La télésurveillance a permis de maintenir         de nouvelles organisations ». Des conditions      développement, la validation et l’expérimentation
la continuité du suivi de milliers de patients    propices à la transition numérique du système     des outils numériques nécessaires à l’essor de
atteints de pathologies chroniques à leur         de santé. Pour l’accompagner, le gouvernement     la « Médecine 5P » (personnalisée, préventive,
domicile, relève Lucile Blaise, vice-présidente   a d’ailleurs annoncé, le 18 octobre, dans le      prédictive, participative et basée sur des
Europe de l’Ouest chez Resmed. Elle a également   cadre de sa « stratégie d’accélération en santé   preuves).

                                                                                                      Snitem INFO N° 223 - AUTOMNE 2021 5
DISPOSITIFS MÉDICAUX BESOINS DE SANTÉ ET RÉGULATION - #223
EN J E UX / Nu m é r i q u e e n sa n t é

                                                                                             La télésurveillance
      Cette généralisation                                                                   au cœur des Rencontres
      de la télésurveillance                                                                 du progrès médical 2021
      médicale est un                                                                        Les participants à la deuxième session des Rencontres du
      enjeu clé pour ces                                                                     progrès médical 2021, organisées le 16 septembre, sont
      prochaines années.                                                                     unanimes : la prise en charge de la télésurveillance est
                                                                                             une urgence. Une fois la preuve de leur efficacité apportée,
                                                                                             l’absence de financement, par la collectivité, des appareils
                                                                                             et plateformes numériques pourrait, à terme, conduire à une
   d’une solution digitale, dès lors qu’une nouvelle solution                                médecine à deux vitesses, contraire au principe d’égalité
   représentant un progrès au regard des référentiels                                        d’accès au soin, insistent-ils. Mais ce n’est pas seulement
   existants arrive sur le marché. Cela pourrait priver des                                  l’objet (le respirateur ou le bracelet connecté, par exemple)
   patients et professionnels de santé de dispositifs qui,                                   qu’il faut financer. Dans l’élaboration du juste prix, encore
   malgré l’apparition de produits innovants, continuent                                     faut-il prendre en considération les systèmes d’information
   d’apporter un bénéfice organisationnel et/ou clinique (lire,                              et les services que rendent ces applications et plateformes,
   sur ce point, notre dossier en page II). Nous appelons par                                ainsi que l’évolution des parcours de soins qu’elles impliquent.
   ailleurs, comme évoqué, à ce que cette généralisation                                     Le numérique induit, en effet, des organisations nouvelles,
   de la télésurveillance médicale aille, à terme, au-delà de                                le déploiement de ressources dédiées… et fait intervenir
   l’insuffisance cardiaque, l’insuffisance rénale, l’insuffi-                               des professionnels de santé variés (médecins, infirmières,
   sance respiratoire, le diabète et la prise en charge des                                  ingénieurs...). La rémunération de ces derniers et la recon-
   patients porteurs de prothèses cardiaques implantables.                                   naissance de leur travail de surveillance et d’analyse des
   Le champ des possibles est vaste, même si cela nécessi-                                   données du patient sont indispensables.
   tera, bien entendu, spécialité par spécialité, l’élaboration                              Les synthèses et replays des Rencontres du progrès médical
   de cahiers des charges par la Haute Autorité de santé,                                    2021 sont disponibles sur snitem.fr.
   conjointement avec les sociétés savantes, les patients et
   les industriels, en tenant compte des
   progrès et efficiences générés par les
   technologies médicales numériques.
   Cette généralisation de la télésurveil-                            Les cinq                                     cardiaque, l’insuffisance rénale, l’insuf-
   lance médicale est un enjeu clé pour                               domaines de la                               fisance respiratoire, le diabète et la
   ces prochaines années, que nous
   soutenons fermement. C’est une étape
                                                                      télésurveillance                             prise en charge des patients porteurs
                                                                                                                   de prothèses cardiaques implantables
   déterminante pour renforcer les liens                              médicale                                     (défibrillateurs et pacemakers). Au total,
   ville-hôpital et, in fine, faciliter le par-                                                                    55 dispositifs de télésurveillance étaient
   tage et l’exploitation des données de         Initiées dans le cadre de la Loi de finan-                        couverts par l’expérimentation : 23
   santé recueillies, qui seront précieuses      cement de la Sécurité sociale (LFSS)                              concernaient l’insuffisance respiratoire,
   tant du point de vue de la recherche          pour 2014, « les Expérimentations de                              10 l’insuffisance cardiaque chronique, 6
   que de la démonstration de l’efficacité       télémédecine pour l’amélioration des                              le diabète, 4 les prothèses cardiaques et
   – ou non – de traitements, de solutions       parcours en santé (Étapes) concernaient,                          2 l’insuffisance rénale ; les 10 restants,
   technologiques et de nouveaux modes           à l’origine, la téléconsultation et la télé-                      polyvalents, assuraient la prise en charge
   organisationnels.                             expertise », avant d’être « étendues à la                         d’au moins deux de ces pathologies.
   (1) Patient-Reported Outcome Measures, PROMs (avis que             télésurveillance, puis reconduites pour      L’article 24 du PLFSS pour 2022 acte le
   peut donner chaque patient quand on lui offre la possibilité
   de s’exprimer sur les résultats d’une démarche ou d’un
                                                                      quatre ans dans la LFSS pour 2018 »,         passage dans le droit commun et la prise
   traitement qu’il vient de suivre) et Patient-Reported Experience   rappelle Armelle Graciet, directrice des     en charge par l’Assurance maladie de la
   Measures, PREMs (lorsque le patient exprime son ressenti           affaires industrielles au sein du Snitem.    télésurveillance médicale dans ces cinq
   au cours de cette démarche/ce traitement).
   (2) La synthèse de ces travaux est disponible sur le site
                                                                      Et ce, dans cinq domaines : l’insuffisance   domaines (lire notre dossier en page II).
   du Snitem, rubrique « Fiches et synthèses ».

6 Snitem INFO N° 223 - AUTOMNE 2021
ÉCO-S YS TÈM E / Po litiq ue ind us tr ielle

PÉNURIE DE MATIÈRES PREMIÈRES

70 % des entreprises du DM
impactées
Le Snitem appelle à prendre en compte les difficultés d’approvisionnement
et la tension sur les prix des matières premières dans les marchés publics
pour soutenir les entreprises du secteur.

D
          epuis fin 2020, dans le contexte de
          la crise COVID, les entreprises, tous                 Les délais d’approvisionnement
          secteurs confondus, sont confrontées                       se sont-ils allongés ?
          à une flambée inédite des coûts des
matériaux. « Les cours internationaux de l’acier,
du zinc, de l’aluminium, du plomb, du nickel et
du cuivre affichent des hausses comprises
entre 10 % et 20 % : + 11 % pour l’aluminium,                        20 %
+ 6,5 % pour le triptyque plomb-zinc-étain et
+ 18 % pour le cuivre (1). Cette explosion des                                                                    Oui
coûts touche aussi le bois de construction,                   11 %                                                Non
les produits plastiques ou encore le polyuré-
                                                                                        69 %                      NC
thane », développe Armelle Graciet, directrice
des affaires industrielles du Snitem.

DIFFICULTÉS                                                                                                               Source : Snitem, mai 2021

D’APPROVISIONNEMENT
À cela s’ajoutent des délais de livraison de plus
en plus en longs, liés à une reprise économique            Si oui, dans quelle proportion (en nombre de jours) ?
très intense et une forte demande à l’échelle              Moyenne : 50 jours               Minimum : 5 jours
mondiale. Le secteur du dispositif médical n’étant         Écart type : 48 jours            Maximum : 180 jours
pas épargné, le Snitem a lancé une enquête, en
mai 2021, auprès de ses adhérents. Conclusion : près de            confirment que les engagements des fournisseurs ne sont
70 % des entreprises du dispositif médical interrogées             pas fiables », détaille Armelle Graciet. Conséquence :
déclarent avoir des difficultés d’approvisionnement pour les       un tiers évoquent des ruptures de stocks de certains de
matières plastiques. Des difficultés similaires sont consta-       leurs DM.
tées vis-à-vis de l’acier, des composants électroniques
et des matériaux semi-conducteurs pour respectivement              HAUSSE DES COÛTS DE TRANSPORT
32 %, 34 % et 28 % des entreprises répondantes, mais               L’industrie fait également face à des hausses des coûts de
aussi pour le titane, les matières textiles et fils lycra,         transport sans précédent. Près de 30 % des entreprises
l’élasthanne, le polypropylène et polyéthylène, les résines…       du DM interrogées constatent des prix multipliés par plus
Au total, « 70 % d’entre elles constatent une augmentation         de trois. Certaines, faisant appel au transport maritime,
des délais d’approvisionnement de près de 50 jours en              subissent des augmentations de prix de presque dix fois
moyenne (minimum 5 jours, maximum 180 jours) et 84 %               le prix standard.

                                                                                        Snitem INFO N° 223 - AUTOMNE 2021 7
ÉCO-SY ST ÈME / Po l i ti q u e i n d us tr iel le

          Augmentation constatée du prix des transports

                                                      6%                                                           Ces tensions
          oins de 50 %
         M
         d’augmentation
                                                                                                                   risquent de
          ntre 50 % et 100 %
         E
                                                                                                                   peser fortement
         d’augmentation                  22 %                                                                      sur la reprise
         Prix multiplié par 2                                                                                      économique dans
                                                                   59 %
         Prix multiplié par 3                                                                                      le secteur.
         Supérieur à x 3
                                          11 %
                                                                                           commande. Ce mécanisme ­réduirait
                                                                                           la tension sur les variations de
                                                                                           prix. Il permettrait aux entreprises
                                          2%                                               de pouvoir elles-mêmes prépayer
     Source : Snitem, mai 2021
                                                                                           leurs fournisseurs, à condition de
   « Ce contexte génère un risque sans précédent pour les          maintenir une garantie de prix sur la durée du marché.
   entreprises du DM : celui de devoir supporter des péna-         Enfin, à l’heure où le président de la République prône
   lités de retard, sans possibilité de répercussion des prix      la souveraineté sanitaire de la France et de l’Europe,
   pour les marchés qui sont, la plupart du temps, signés          le Snitem invite à la cohérence et demande à l’État
   à prix fermes », pointe Armelle Graciet. Pour elles, les        d’inciter les acheteurs publics à tenir compte, dans leurs
   contrats risquent donc de se solder par une double perte :      achats, de la localisation des productions et de la réalité
   celle liée à la hausse « non répercutable » des matériaux       des hausses de prix qui frappent les entreprises du DM,
   et équipements mis en œuvre et celle causée par une             en particulier les PME françaises.
   livraison retardée. « Ces tensions risquent de peser
   fortement sur la reprise économique dans le secteur »,          AMÉNAGEMENT DES MARCHÉS PUBLICS
   alerte la directrice des affaires industrielles du Snitem.      « Le cabinet du Premier ministre a d’ores et déjà, le 16 ­juillet
   Pour rappel, 60 % des entreprises du DM ont été affectées       dernier, adressé une circulaire aux directeurs de cabinet et
   par la crise COVID. Elles sont toutefois moteur dans les        aux secrétaires généraux des membres du gouvernement
   projets de relocalisation industrielle et œuvrent dans un       pour assurer la poursuite de l’exécution des marchés
   « champ absolument essentiel », ainsi que l’a rappelé           publics touchés par ces difficultés d’approvisionnement »,
   Emmanuel Macron le 29 juin dernier.                             relate Armelle Graciet. Et ce, afin qu’ils demandent à leurs
                                                                   services respectifs et aux opérateurs de l’État placés sous
   RECOMMANDATIONS DU SNITEM                                       leur tutelle « de veiller à aménager les conditions d’exé-
   Dans ce contexte, et ce, le temps que le marché revienne        cution des contrats en cours ». Ce document a été signé
   à son niveau normal, le Snitem demande le gel des péna-         par Nicolas Revel, directeur de cabinet de Jean Castex (2).
   lités de retard sur l’ensemble des marchés publics en           « En parallèle, nous participons aux réunions organi-
   cas de difficultés d’approvisionnement, ainsi que la prise      sées par la Direction générale des entreprises (DGE)
   en compte, par les acheteurs publics, des mécanismes            sur ce sujet et nous restons attentifs aux travaux du
   d’indexation des prix. « L’objectif est d’éviter une fragili-   Haut-Commissariat au Plan, détaille Armelle Graciet.
   sation du secteur, alors que les entreprises du dispositif      Trois chargés de missions ont, en effet, été désignés
   médical subissent cette situation sans pouvoir l’anticiper »,   et vont entamer une série d’auditions. Certaines de nos
   explique Armelle Graciet.                                       entreprises adhérentes seront entendues ». Ces travaux
   Pour sécuriser les approvisionnements, le Snitem p­ ropose      aboutiront à une série de recommandations.
   également à l’État de créer un fond de garantie pour
   la commande publique qui viserait à sécuriser la mise           (1) Source : Medef.
   en place d’avances, à hauteur au moins de 20 % de la            (2) Circulaire n° 6293/SG du 16 juillet 2021.

8 Snitem INFO N° 223 - AUTOMNE 2021
dossier
                        le
                                          A U TO MNE 2 0 2 1     #223

PLFSS POUR 2022
                         RENCONTRES DU PROGRÈS MÉDICAL
                         •Q
                           uelle régulation pour répondre aux besoins
                          de santé ?
                         • Comment concilier régulation et dynamisme
Des avancées… et des      industriel ?
                         DIX PROPOSITIONS POUR UNE

 sources d’inquiétude    RÉGULATION PLUS JUSTE, PLUS LISIBLE
                         ET PROPICE AUX INNOVATIONS
ledossier

 PLFSS POUR 2022

DES AVANCÉES… ET DES
SOURCES D’INQUIÉTUDE
Le « budget de la Sécurité sociale pour 2022 » est actuellement
en discussion au Parlement. Plusieurs mesures concernent
le dispositif médical. Aperçu.

L
         e Projet de loi de f­ inancement   « Innovation Santé 2030 », dévoilé fin      retiennent notre attention », ­nuance-t-il.
         de la Sécurité sociale (PLFSS)     juin par le chef de l’État et confirmé le   Il prévoit, en effet, la p  ­ ossibilité de
         pour 2022 est examiné au           12 octobre lors de la présentation du       mettre un terme à la prise en charge
         Parlement depuis le 7 octobre.     plan « France 2030 » destiné à favoriser    d’un produit, à l’issue d’une période de
Le contexte est particulier, puisque        l’innovation dans des secteurs d’avenir.    dégressivité du remboursement, dès
la crise COVID-19 n’est pas encore                                                      lors qu’un ­nouveau produit représentant
achevée et ses impacts, durables.           TÉLÉSURVEILLANCE                            un progrès au regard des référen-
Le ­gouvernement est, par ailleurs, resté   Au-delà de ces sujets, loin d’être          tiels existants arrive sur le marché.
discret sur les économies qui seront        négligeables, le PLFSS pour 2022            « Il y a là le risque de désappareiller des
demandées aux différents secteurs de la     porte un certain nombre d’avancées.         ­patients qui se seraient habitués à une
santé en 2022. « Nous comprenons que        « Plusieurs dispositions vont dans le        solution qui, quant à elle, continuerait à
ce montant atteindrait, comme en 2020,      bon sens, observe le directeur des           leur apporter une véritable plus-value,
les 200 millions d’euros pour le secteur    affaires gouvernementales du Snitem.         décrypte-t-il. Il s’agit également d’un
des dispositifs médicaux », s’inquiète      Par exemple, le passage dans le droit        mauvais signal adressé aux entreprises
François-Régis Moulines, directeur des      commun de la télésurveillance est            innovantes, dont les solutions, malgré
affaires gouvernementales au Snitem.        tout à fait positif dans son principe ».     leurs bénéfices cliniques ou organisa-
Il appelle donc à une « régulation plus     Le texte de l’article 24, inséré dans le     tionnels, seraient susceptibles d’être
équilibrée » dans « cette période de        chapitre « Poursuivre la transforma-         déremboursées à l’arrivée de solutions
crise sanitaire et économique », ainsi      tion du système de santé », « nous           jugées ­supérieures ».
qu’à « la cohérence » avec le plan          convient globalement, mais deux points
                                                                                        ACCÈS ANTICIPÉ
                                                                                        AU MARCHÉ
                                                                                        L’article 33 prévoit, quant à lui, que
                                                                                        les DM numériques, revendiquant un
         Le passage dans le droit                                                       impact clinique ou organisationnel
                                                                                        et figurant sur la liste des produits et
         commun de la télésurveillance                                                  prestations (LPP) ou sur la liste spé-
         est tout à fait positif.                                                       cifique qui sera créée pour les solu-
                                                                                        tions technologiques communicantes
                                                                                        dédiées à la télésurveillance médicale,

II Snitem INFO N° 223 - AUTOMNE 2021
ledossier

                                                                                                                                        © ADOBE STOCK
                                                                                     On ne peut certainement
                                                                                     pas parler de rattrapage
                                                                                     dans notre secteur.

pourront bénéficier d’une prise en
charge ­anticipée et transitoire pen-
dant l’évaluation de leur dossier par la         200 MILLIONS D’EUROS D’ÉCONOMIES EN 2022 ?
Haute Autorité de santé (HAS). Celle-ci          « Le secteur des DM a connu, avec la crise COVID-19, une décroissance des
sera limitée à un an non renouvelable.           dépenses en matière de dispositifs médicaux en 2020, évaluée à - 1,7 % sur la
À noter toutefois que les entreprises            LPP selon les chiffres de la CNAM. Elle est notamment liée à la déprogrammation
se voient soumises à une obligation de           de soins dans les établissements de santé », rappelle François-Régis Moulines,
continuité des traitements. En cas de            directeur des affaires gouvernementales au Snitem. Et si la situation semble
manquement, une pénalité financière              s’améliorer en cette rentrée 2021, l’année en cours « ne peut toujours pas
                                                 être qualifiée de “normale” : « nous sommes, en effet, plutôt dans une année
pourra leur être imputée, dont le montant
                                                 de reprise, mais on ne peut certainement pas parler de rattrapage dans notre
pourra atteindre jusqu’à 30 % de leur
                                                 secteur », détaille-t-il. Et ce, d’autant plus que les entreprises du dispositif
chiffre d’affaires hors taxes réalisé en         médical, comme celles des autres secteurs, font face, mais dans un cadre de prix
France au titre du dispositif concerné           administrés, à une explosion des coûts des matières premières et du transport
et ce, durant les vingt‑quatre mois              à l’échelle mondiale, ce qui a un impact non négligeable sur leurs coûts de
précédant la constatation de rupture             production (lire notre article en p.7). « Sur le plan politique, le chef de l’État
des soins. « Nous pensons que la durée           a rappelé fin juin, à l’issue du Conseil stratégique des industries de santé (CSIS),
de référence de 24 mois sur laquelle             dans un discours très fort, sa volonté de relancer l’économie et de veiller à la
porte la pénalité devrait être ramenée à         pression mise sur les prix des produits de santé », poursuit M. Moulines. Dans ce
12 mois, pour éviter le cas d’entreprises        contexte, « si nous comprenons la nécessité de réguler les dépenses, nous
qui ­pourraient se voir fixer une pénalité       insistons sur la nécessité de tirer les enseignements de la crise COVID-19 et de
sur un chiffre d’affaires réalisé en partie      ne pas revenir à la situation antérieure », pointe-t-il. Or, à ce jour, « le montant
sur une période antérieure à la période
                                                 des économies qui seront demandées au secteur en 2022 atteindrait 200 millions
                                                 d’euros, soit un montant similaire à celui des années précédant la crise », ­
de prise en charge anticipée », relève
                                                 alerte-t-il. Un chiffre loin d’être rassurant.
François-Régis Moulines.

IMPLANTATION DES SITES                         leurs dispositifs, d’un nouveau critère       de nom commercial », la fixation de leur
DE PRODUCTION                                 devant le Comité économique des                tarif pourra également « tenir compte
Par ailleurs, en vertu de l’article 38,       ­produits de santé (CEPS). En effet,           de la sécurité ­d’approvisionnement du
les entreprises pourront se prévaloir,         « pour les produits ou prestations ins-       marché français que garantit l’implanta-
dans le cadre de la fixation du prix de        crits sous forme de nom de marque ou          tion des sites de production », évoque le

                                                                                           Snitem INFO N° 223 - AUTOMNE 2021 III
ledossier

                                                     Les autres principales mesures du PLFSS pour 2022

                                                        1 2,5 milliards d’euros pour poursuivre la mise en œuvre
Le secteur                                              des engagements du Ségur de la santé.
                                                        2 milliards d’euros d’investissements dans les hôpitaux, les EHPAD
du dispositif                                            et les outils numériques.
médical ne se                                           2 7,5 milliards d’euros (+ 0,6 milliard par rapport à l’an dernier)
résume pas                                               pour favoriser le maintien à domicile des personnes âgées en perte
                                                         d’autonomie et transformer le modèle de l’EHPAD.
aux dispositifs                                         P rise en charge de la contraception par l’Assurance maladie
à usage individuel.                                      jusqu’à 25 ans.
                                                        A utorisation des orthoptistes à prescrire des aides visuelles
                                                         (lunettes, lentilles de contact) sans passage par l’ophtalmologiste,
                                                         après réalisation d’un bilan visuel.
                                                        N ouveaux parcours de soins axés sur la prévention
projet de loi. Pour limiter les risques de              (lutte contre l’obésité infantile, dépistage…).
pénuries et favoriser la relocalisation
en France, voire en Europe de certaines
industries, « il est pertinent, entre autres      Les objectifs de dépenses d’Assurance maladie en 2022
leviers à actionner, (…) de se doter
de capacités de production flexibles                    H ors coût de la COVID-19 et du Ségur : 218,8 milliards d’euros,
en ­prenant en compte l’empreinte                        soit une augmentation de l’Ondam de + 2,6 % par rapport à 2020.
industrielle dans la fixation des prix des
                                                         Avec les mesures du Ségur : 231,4 milliards d’euros, soit une augmentation
produits de santé », précise, en effet,                   de l’Ondam de + 3,8 % par rapport à 2020.
le texte dans son exposé des motifs.
                                                          Avec les mesures du Ségur et le coût prévisionnel de la COVID-19 :
Le Snitem espère voir, à terme, cette
                                                           236,3 milliards d’euros.
disposition élargie aux entreprises
répondant aux critères d’implantation,
mais dont les produits sont inscrits            des dispositifs utilisés dans les hôpitaux     CLAUSE DE SAUVEGARDE
sous descriptions génériques.                   et financés via les forfaits hospitaliers      Enfin, l’article 16 maintient pour 2022
« De plus, le secteur du dispositif             (GHS). Dans ce cadre et afin d’être            le mécanisme dit de « clause de sauve-
médical ne se résume pas aux dispo-             force de proposition concernant des            garde » qui vise à encadrer la croissance,
sitifs à usage individuel éligibles à un        mesures concrètes qui permettraient            à l’hôpital, des dépenses remboursées
financement sur la LPPR : l’ensemble            de rendre la France plus attractive,           sur la liste en sus liées aux dispositifs
du secteur devrait pouvoir bénéficier de        le Snitem travaille sur des propositions       médicaux. Cette année, la loi fixe un
mesures incitatives », note M. Moulines.        de mesures d’ordre fiscal et social            montant global de 2,15 milliards d’euros
En effet, de nombreuses entreprises             qui pourraient rapidement être mises           de dépenses au-delà duquel la clause
fabriquent, sur le marché français,             en place.                                      se déclenche. La base de calcul de ce
                                                                                               montant n’a pas encore été précisée.
                                                                                               « Nous appelons, une fois de plus, à un
                                                                                               aménagement de ce mécanisme fiscal
LE COÛT DE LA COVID-19                                                                         que nous jugeons confiscatoire au-delà
Le coût de la crise COVID-19 a été évalué à 33,1 milliards d’euros (18,3 milliards             du seuil, insiste M. Moulines. Non seu-
en 2020 et 14,8 milliards en 2021). Son coût en 2022 est encore inconnu.                       lement celui-ci est injuste et inadapté à
Le gouvernement a toutefois déjà provisionné 5 milliards d’euros pour financer                 l’hétérogénéité du secteur, mais il n’est
les tests de dépistage et les vaccins, dans le cadre du PLFSS.                                 pas le reflet d’une fiscalité moderne,
                                                                                               car il ne prévoit ni progressivité, ni seuil

IV Snitem INFO N° 223 - AUTOMNE 2021
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d’exonération. En cas de déclenchement
de la clause, les entreprises concernées                                  Plans « France 2030 » et « Innovation Santé 2030 »
devront, dans leur ensemble, contribuer
à hauteur de l’intégralité du montant
perçu a­ u-dessus du seuil. A minima,                                    Le 12 octobre, le président de la République a présenté un plan
nous souhaiterions que les dispositifs les                               de 30 milliards d’euros pour favoriser l’innovation dans des
plus innovants soient exclus de l’assiette                               secteurs d’avenir.
de ce mécanisme fiscal pendant un ou                                                                      Il a, dans ce contexte, rappelé son
deux ans, afin que celui-ci soit moins                                                                    engagement de consacrer 7 milliards
décourageant pour l’innovation. Il s’agit                                                                 d’euros au secteur de la santé dans le
là d’une proposition que nous avions                                                                      cadre du plan « Innovation Santé 2030 »
déjà soutenue les années précédentes.                                                                     présenté en juin dernier. Il a réitéré sa
Elle n’a pas été retenue, mais nous la                                                                    volonté de créer une « agence d’innovation
jugeons suffisamment majeure pour                                                                         en santé » et de nouveau plaidé pour
la réitérer ».                                                                                            une « médecine plus prédictive, plus
                                                                                                          innovante » avec « un tissu productif
DÉSINCITATION À L’ACCÈS                                                                                   davantage en France ». « L’objectif concret
PRÉCOCE                                                                                                   que nous devons nous donner d’ici à 2030,
                                                                                                          c’est d’avoir au moins 20 biomédicaments
Malheureusement, le texte déposé
                                                                                                          contre les cancers, les maladies émergentes
à l’Assemblée nationale ne va pas du tout
                                                                                                          et les maladies chroniques, dont celles liées
dans ce sens : il prévoit, au contraire, une                                                              à l’âge, et de créer les dispositifs médicaux
extension de la clause de sauvegarde aux                                                                  de demain en France », a-t-il complété.
dépenses transitoires plus connues sous
                                                                                                          Dans ce cadre, le gouvernement a d’ores
le nom de dépenses en vue d’un « accès                                                                    et déjà lancé, le 18 octobre, la « Stratégie
précoce » de dispositifs médicaux très                                                                    d’accélération en Santé numérique »
innovants. « Cette disposition apparaît                                                                   pour « permettre à la France de devenir
particulièrement contestable dans la                                                                      leader mondial » dans ce domaine. Il entend
mesure où elle revient à faire financer,                                                                  ainsi consacrer 81 millions d’euros (M€)
lorsque la clause se déclenche, au moins                                                                  dans la formation de l’ensemble des
en partie, les produits très innovants                                                                    acteurs de la filière santé numérique ;
issus du dispositif d’accès précoce par                                                                   investir 60 M€ dans des Programmes et
les entreprises elles-mêmes », déplore                                                                    équipements prioritaires de recherche
François-Régis Moulines.                                                                                  (PEPR) et 95 M€ pour soutenir l’excellence
                                                                                                          de la filière de l’imagerie en France ;
En outre, il s’agit d’innovations qui sont
                                                                                                          dédier 20 M€ par an à l’appel à projet
financées par le biais d’un processus
                                                                                                          pour l’évaluation du bénéfice médical et/
dérogatoire et la présente mesure                                                                         ou économique des dispositifs médicaux
apparaîtrait comme désincitative pour                                                                     numériques ou à base d’intelligence
les entreprises aspirant au dispositif                                                                    artificielle ; créer 30 tiers-lieux
d’accès précoce. Là encore, le Snitem                                                                     d’expérimentation d’ici 2025 pour un budget
                                                © PHOTOS : ADOBE STOCK

appelle à une forme de cohérence avec                                                                     de 63 M€ ; enfin, renforcer de 50 M€ les
la volonté fortement proclamée du                                                                         aides à l’innovation ciblées sur les nouveaux
gouvernement de soutenir l’innovation                                                                     usages numériques en santé.
en santé en France.

AU PARLEMENT JUSQUE                             Parlement d’octobre à fin novembre,                           dérogera pas à la règle. D’ici là, le
FIN NOVEMBRE                                    avant de passer entre les mains du                            Snitem suivra donc attentivement
Pour rappel, présenté chaque année              Conseil constitutionnel et d’être publié                      l’avancée des débats législatifs et
fin septembre-début octobre, le                 avant le 31 décembre au Journal                               continuera à proposer des aména-
PLFSS est débattu, puis adopté au              ­officiel . Le PLFSS pour 2022 ne                              gements du texte.

                                                                                                             Snitem INFO N° 223 - AUTOMNE 2021 V
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RENCONTRES DU PROGRÈS MÉDICAL
QUELLE RÉGULATION POUR
RÉPONDRE AUX BESOINS DE SANTÉ ?
Organisée le 4 octobre dernier, la troisième et dernière session
de la 9e édition des Rencontres du progrès médical a réuni, le temps
d’une table ronde, six acteurs issus des mondes de l’entreprise, de la santé
et de la politique pour échanger sur la nécessaire articulation entre besoins
de santé et régulation.

I
    ls sont entrepreneurs, médecins,            estime Christophe Duhayer, ­président      CONFIANCE ET OUTILS
    élus et, durant près d’une heure, ils       de Johnson & Johnson, rappelant que        D’ANALYSE
    ont esquissé des pistes de réflexion        les budgets des entreprises sont fina-     Autre axe défendu par plusieurs
    pour concilier besoins de santé et          lisés bien avant que les PLFSS ne          ­intervenants : la nécessité d’accéder
modèles de régulation du système de             soient votés. Enfin, « il faut raisonner    aux données de santé pour que les
santé. De quoi avons-nous besoin pour           différemment et envisager la prévention     ­différentes parties prenantes puissent
y parvenir ? De confiance, de visibilité        comme de l’investissement et le curatif      avoir les mêmes outils d’analyse.
et d’outils d’analyse communs : un              comme du fonctionnement », a avancé          « Le système peut évoluer grâce à ces
triptyque partagé par divers interlo-           Élisabeth Hubert, présidente de la           données, a soutenu le député Cyrille
cuteurs. Une approche concertée de la           Fédération nationale des établissements      Isaac-Sibille. Pour que les citoyens
régulation apparaît également comme             d’hospitalisation à domicile (FNEHAD),       aient confiance, il faut que leur utili-
un préalable indispensable.                     ajoutant que la régulation ne peut être      sation soit totalement transparente.
                                                uniquement comptable.                        Et c’est d’autant plus important à l’heure
IMPLIQUER LES
INDUSTRIELS EN AMONT
« Dans un esprit de co-construc-
tion avec les autorités de santé,                   COMMENT CONCILIER RÉGULATION
                                                    ET DYNAMISME INDUSTRIEL ?
nous p   ­ ourrions nous saisir, bien en
amont des d     ­ iscussions sur le PLFSS,
des ­propositions de régulation afin
de r­ éaliser des études d’impact et

                                                                                                 «U
­d’amender le texte pour que les m ­ esures
 prises puissent être opérantes »,                  Invité des Rencontres                                         n e partie des moyens
 a ­exposé en préambule Philippe Chêne,             du progrès médical,                                           du plan de relance a été
 président du Snitem. Les entreprises               Thomas Courbe, directeur                                      focalisée sur les indus-
 du DM demandent ainsi une forme de
                                                    général des entreprises                                       tries de santé, rappelle
 visibilité. « La proposition formulée par le                                                     Thomas Courbe. À terme, 700 ­millions
 Haut Conseil pour l’avenir de l­’Assurance
                                                    (DGE), a détaillé les                         d’euros permettront de financer des
 maladie (HCAAM) d’envisager des                    mesures gouvernementales                      investissements de relocalisation ou des
 budgets à cinq, voire à dix ans pour le            engagées en faveur des                        investissements productifs ». Des finan-
 secteur de la santé est une bonne idée »,          entreprises de santé.                         cements émaneront également du plan

VI Snitem INFO N° 223 - AUTOMNE 2021
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                                                                                                                        Les vidéos
                                                                                                                        et synthèses
                                                                                                                        sur le site du Snitem
                                                                                                                        En 2021, les Rencontres du progrès médical
                                                                                                                        se sont articulées autour de trois sessions :
                                                                                                                        « Dispositif médical & besoins de santé :
                                                                                                                        quelle réalité ? » (le 28 juin), « Besoins
                                                                                                                        de santé & numérique : quels enjeux
                                                                                                                        pour mieux soigner ? » (le 16 septembre)
                                                                                                                        et « Vers une régulation adaptée à la réponse
                                                                                                                        aux besoins de santé ? » (le 4 octobre).
                                                                                                                        Retrouvez les vidéos et synthèses des débats

                                                                                                                 © DR
          En haut de gauche à droite : Christophe Duhayer, Thierry Wathelet, Philippe Chêne, Guirec Le Lous.            sur www.snitem.fr, rubrique « Actualités
          Et dans l’écran : Cyrille Isaac-Sibille, Guy Vallancien, Élisabeth Hubert (présidente de la FNEHAD).          et événements ».

         où nous devons sortir le télésuivi de                        Measures (PREMs) et recueille ainsi                       innovants et fabriqués en France ».
         l’expérimentation pour le faire entrer                       le ressenti et les attentes des patients.                L’accès rapide au marché des
         dans le droit commun ».                                                                                               ­innovations, grâce auquel « la France
         Un principe de confiance partagé par le                       AU BÉNÉFICE D’UN PLUS                                    pourrait devenir leader dans le domaine
         Pr Guy Vallancien, membre de l’Acadé-                         GRAND NOMBRE                                             du dispositif médical », comme l’évoque
         mie nationale de médecine, qui souhaite                      « Chaque année, la quinzaine de ­produits                 M. Le Lous, fait également consensus.
         que les patients soient plus systé-                          validés par la HAS devraient bénéficier                   « Nous avons des équipes médicales
         matiquement « sollicités et associés                         d’une meilleure diffusion auprès des                      de pointe, conclut Philippe Chêne. Nous
         à l’évaluation des produits pour faire                       patients pour une meilleure équité des                    sommes capables de développer de bons
         état des problèmes rencontrés à l’utili-                     soins, souligne Guirec Le Lous, président                 dispositifs médicaux, y compris dans le
         sation ». Une démarche déjà développée                       du Groupe Urgo. Cela bénéficierait aux                    numérique. Mais à quoi bon financer la
         par Johnson & Johnson qui travaille                          systèmes de santé et à la filière indus-                  recherche si rien ne peut être développé
         sur les Patient-Reported Experience                          trielle, car ces produits sont bien souvent               sur un marché pérenne ».

« Innovation Santé 2030 », présenté en                         du PLFSS pour 2022 prévoit la prise                           entreprises. En parallèle, une trentaine
juin dernier : 2 millions d’euros seront                       en compte de l’empreinte industrielle                         de structures de soins vont devenir,
investis, en fonds propres, pour la crois-                     dans la fixation du prix des dispositifs                      d’ici 2025, des lieux d’expérimentation
sance et l’industrialisation. Le soutien se                    médicaux », complète-t-il.                                    des dispositifs médicaux ». Cela s’ajoute
veut également européen, « un échelon                                                                                        à l’introduction, dans le PLFSS, d’un
pertinent pour augmenter les capacités                         SANTÉ NUMÉRIQUE                                               accès précoce et transitoire au marché
de production globale », insiste le DGE.                       Sur le front de l’innovation, l’État mise                     pour certains DM numériques (lire notre
L’accès des PME à la commande publique                         sur la stratégie d’accélération de la santé                   article en début de dossier).
sera, par ailleurs, favorisé notamment                         numérique dotée de 650 millions d’euros                       Enfin, sur un accès plus rapide au
à travers les appels d’offres multi-attribu-                   sur cinq ans. « Nous visons le lancement                      ­marché, il admet qu’il reste du « chemin
taires. Thomas Courbe évoque également                         de modules sur la santé numérique dans                         à ­parcourir ». L’objectif du gouvernement
la possibilité d’intégrer un chapitre dédié                    les formations initiales des secteurs                          reste toutefois inchangé : « obtenir des
à l’attractivité du territoire dans l’accord-                  sanitaire et médico-social à la rentrée                        délais inférieurs à ceux de la moyenne
cadre relatif aux DM. « Une disposition                        2022, annonce le directeur général des                         européenne ».

                                                                                                                            Snitem INFO N° 223 - AUTOMNE 2021 VII
ledossier

  DIX PROPOSITIONS POUR UNE
  RÉGULATION PLUS JUSTE, PLUS
  LISIBLE ET PROPICE AUX INNOVATIONS
  Convaincu que le modèle de financement des soins de santé a atteint ses
  limites au détriment de l’ensemble des acteurs de santé, le Snitem formule
  dix propositions pour une meilleure régulation

  «
        L
                   es outils de maîtrise           De plus, « la régulation actuelle du           médicalisée des dispositifs médicaux de
                   des dépenses ont généré         secteur prend très peu en compte la            la LPPR dans les Lois de financement
                   des effets d’aubaine et des     pertinence et la qualité des soins », tout     de la Sécurité sociale (LFSS). La deu-
                   dérives dans la p ­ ratique     en étant « déconnectée de la réalité et        xième prône, en prévision de chaque
  et la qualité des soins », a ­déploré            de l’évolution des besoins de santé ».         projet d’économies sur un secteur du
  Laurence Comte-Arassus, membre du                D’où la nécessité d’une « régulation           DM, « un constat partagé de tous les
  conseil d’administration du Snitem et            plus juste, plus lisible et plus propice       membres du CEPS et entreprises sur
  directrice générale de GE Healthcare             à l’innovation », a-t-elle conclu.                 les pratiques, le bon usage, la qualité,
  France, Belgique, Luxembourg et                                                                 etc. » pour évaluer s’il convient de
  Afrique francophone, à l’occasion des            PROPOSITIONS ET                                baisser le prix du produit ou de réviser
  ­dernières Rencontres du progrès médical         RÉUNIONS D’ÉCHANGES                            le parcours des patients.
   ­organisées le 4 octobre. La sanction           À cette fin, le Snitem a formulé dix           Autres suggestions : adapter les
    « se traduit quasiment toujours par des        ­propositions (1). La première, par exemple,   ­critères d’efficience de la Commission
    baisses des tarifs des produits de santé »      vise à fusionner les objectifs d’écono-        ­d’évaluation économique et de santé
    ce qui, in fine, pénalise l’innovation.         mies (les baisses de prix) et la maîtrise       publique (CEESP) aux DM, mettre en
                                                                                                    place une gestion dynamique de la
                                                                                                    liste en sus afin de laisser la place aux
UNE GOUVERNANCE DES FINANCES PUBLIQUES                                                              innovations, améliorer le processus de
                                                                                                    création et de tarification des actes ou
TROP « COURT-TERMISTE », SELON LE HCAAM                                                             encore, mettre en place un « programme
Le Haut Conseil pour l’avenir de l’Assurance maladie (HCAAM) a publié,                              pluriannuel actualisé concernant, d’une
en mai dernier, un rapport sur la régulation du système de santé (disponible sur                    part, les plans d’économies qui seront
www.strategie.gouv.fr). Il y défend « un scénario de rupture » pour « une réponse de                négociés et, d’autre part, les révisions de
qualité à l’ensemble des besoins de santé » et « maintenir l’excellence ». Il propose,              nomenclatures envisagées »... L’ensemble
par exemple, de changer de temporalité. « L’approche actuelle de la régulation est
                                                                                                    de ces propositions a été transmis
trop centrée sur les questions budgétaires à court terme », au risque de se priver de
« bénéfices à moyen et long termes en matière d’investissement, d’innovation et de                  aux pouvoirs publics et fait l’objet de
prévention », a observé Nathalie Fourcade, secrétaire générale du HCAAM, à l’occasion               ­réunions d’échanges avec les différentes
des dernières Rencontres du progrès médical. En outre, « nous ne donnons pas aux                     parties prenantes, en vue notamment de
acteurs une trajectoire qui leur permette de se projeter dans l’avenir, d’investir et de             ­l’élaboration du PLFSS 2022.
tirer les bénéfices de leurs actions ». Le Haut Conseil prône, par ailleurs, d’« améliorer
les modalités de dialogue afin de progresser vers la définition d’un objectif partagé pour        (1) « Dix propositions pour une régulation économique du
le système de santé qui donne du sens à l’action de tous les acteurs ».                           dispositif médical plus juste, plus lisible et propice aux
                                                                                                  innovations », avril 2021, Snitem. À retrouver sur snitem.fr,
                                                                                                  rubrique « Guides et documents de référence ».

   VIII Snitem INFO N° 223 - AUTOMNE 2021
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