Dossier Burkina Faso Dans les mines d'or, des enfants travaillent au péril de leur vie - FabLab Rendre les jeunes plus autonomes - Terre des hommes
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N° 73 | Juin 2021 Dossier Burkina Faso FabLab Travail forcé Dans les mines d’or, des enfants Rendre les jeunes Qu’en disent travaillent au péril de leur vie plus autonomes les enfants ?
Sommaire ©Tdh ©Tdh/S. Garcia 04 Tour d’horizon ➜ Résurgence du virus Ebola en Guinée ➜ Ce que nous avons réalisé 06 pour les enfants en 2020 ➜ La situation alarmante du Myanmar Dossier : Dans les mines d’or du Burkina Faso Au Burkina Faso, des milliers d’enfants travaillent dans les mines d’or artisanales, dans des conditions qui mettent en danger leur santé et leur sécurité. ©Tdh/S. Garcia ©Tdh/D. Martenet ©Pexel 12 14 15 Parole à Focus Agenda Hamza Goumbane, responsable Le travail des enfants est souvent Malgré la pandémie, nos bénévoles du FabLab dans la province du illégal et caché. En Asie, Tdh fait se mobilisent ! Retrouvez-les pour Ganzourgou, au Burkina Faso. Il la lumière sur ce phénomène en des événements aux quatre coins accompagne les enfants sur le écoutant ce qu’en disent les enfants. de la Suisse. chemin de la formation. Chaque enfant dans le monde a le droit d’être un enfant, tout simplement. Nous aspirons à un monde où les droits des enfants, tels que définis dans la Convention relative aux droits de l’en- fant, sont toujours respectés. Un monde où les enfants peuvent grandir à l’abri du danger et devenir les acteurs et les actrices du changement qu’ils et elles souhaitent voir dans leur vie. Rédaction et réalisation Diffusion Changements d’adresse Resp. édition : Cécile Kirwan Parution : 4 fois par an T +41 58 611 06 11, donorcare@tdh.ch Rédactrices : Tatjana Aebli, Tirage : 120’000 exemplaires Isabel Zbinden en allemand, français et italien Courrier des lecteurs Siège | Hauptsitz | Sede | Headquarters Traduction : Barbara Staub Impression : Stämpfli AG redaction@tdh.ch Av. Montchoisi 15, CH-1006 Lausanne Graphisme et mise en page : T +41 58 611 06 66, E-mail : info@tdh.ch Photo de couverture Angélique Bühlmann www.tdh.ch, CCP : 10-11504-8 ©Tdh/Sophie Garcia Reportage au Burkina Faso réalisé avec le soutien de Désirée Kanyala.
Editorial 2021 : Année mondiale de l’élimination du travail des enfants Sur le marché aux poissons de San Pya à Yangon au Myanmar, j’ai rencontré des adolescents qui, une grande partie de la nuit, portaient des sacs de glace de 15kg sur leurs épaules, à même Sendrine Constant la peau. Dès 2h du matin, des jeunes filles triaient et coupaient poissons, crevettes et autres Responsable de la protection produits de la mer, sans gants ni protection. Lorsque la tâche était trop pénible, ils oubliaient un de l’enfance instant leur réalité en jouant avec des glaçons. Ces enfants m’ont aussi raconté les situations ©Tdh/Cristian Nistor de violences physiques, d’insultes et de harcèlement sexuel auxquelles ils doivent faire face, en particulier les filles dès qu’elles atteignent l’âge de la puberté. Cette situation n’est malheureusement pas isolée et se retrouve dans d’autres régions du monde. Au Burkina Faso par exemple, l’industrie de l’or – l’une des plus importantes du pays – emploie des enfants très jeunes pour extraire le précieux matériel, dans des conditions épouvantables. Malgré les progrès de ces dernières années, on estime que 152 millions d’en- « La plupart d’entre eux fants travaillent dans le monde, dont 72 millions dans des conditions dange- rêvent de devenir docteurs reuses. Lorsqu’ils travaillent, les enfants mettent en péril leur santé physique ou enseignants, ou au moins et mentale, leur éducation et leur avenir. Dans les pays les plus défavorisés, la d’avoir un métier qui ne met situation actuelle risque encore de se dégrader. Parmi les causes, la pandémie pas leur vie en danger. » de Coronavirus, qui a détruit bon nombre d’emplois, poussant les parents à envoyer leurs enfants travailler pour subvenir aux besoins de la famille. L’ONU a déclaré 2021 l’année mondiale de l’élimination du travail des enfants. Dans les pages de ce magazine, vous découvrirez l’engagement de nos équipes auprès des communautés locales au Burkina Faso et ailleurs. Afin de s’assurer que les enfants ne soient pas obligés de travailler pour subvenir aux besoins de leurs familles, une collaboration étroite entre les états, les entreprises, la société civile et les communautés est essentielle. Nous avons toutes et tous un rôle à jouer pour contribuer à offrir un avenir plus prometteur à ces enfants, aujourd’hui et pour les générations à venir. Car comme partout, la plupart d’entre eux rêvent de devenir docteurs ou enseignants, ou au moins d’avoir un métier qui ne met pas leur vie en danger. Merci de tout cœur pour votre soutien. Sendrine Constant Venir en aide aux enfants, c’est aussi... Rejoindre nos communautés Faire un don Devenir bénévole www.tdh.ch/newsletter www.tdh.ch/donner Soutenez-nous en rejoignant www.facebook.com/tdh.ch CCP 10-11504-8 un groupe dans votre région : www.twitter.com/tdh_ch 058 611 06 11 benevolat@tdh.ch, 058 611 06 76 www.instagram.com/tdh_ch Courage | Juin 2021 | www.tdh.ch 3
Tour d’horizon tdh.ch/fr/actualites Résurgence d’Ebola en Guinée Depuis le 13 février, la Guinée fait face à la résurgence du virus Ebola ; ©Tdh une épidémie qui s’ajoute à celles de la rougeole et de la fièvre jaune contre lesquelles le pays se bat déjà – sans compter la pandémie du COVID-19. Cette situation dramatique met le système de santé du pays sous forte pression. Terre des hommes (Tdh) soutient les auto- rités sanitaires dans la campagne de sensibilisation à la vaccination auprès des communautés touchées par l’épidémie. « Des rumeurs prétendent que le vaccin et les dispositifs de lavage de mains sont utilisés par le gouvernement pour propager la maladie au sein de la population. Ces rumeurs nourrissent la réticence de la population à se faire vacciner et créent de la méfiance envers les autorités. Il faut absolument les identifier et les déconstruire pour obtenir l’adhésion de la communauté. L’absence de traitement et le manque d’équipements sanitaires rendent la situation extrêmement urgente », souligne David Bridier, chef de la délégation de Tdh en Guinée. Après avoir contribué à la lutte contre le COVID-19 dans le pays, notre équipe locale est sollicitée par les autorités régio- nales pour soutenir la riposte Ebola dans les préfectures de Nzérékoré, Lola et Beyla. Son objectif : déconstruire les rumeurs concernant le virus et le vaccin et sensibiliser la population pour qu’elle adopte les mesures à même de la protéger. Savez-vous ce que nous avons réalisé pour les enfants en 2020 ? Testez vos connaissances en reliant chaque nombre à une phrase* ! d’enfants et membres de leurs communautés ont été soutenu·e·s 35 par Tdh en 2020 4,8 millions personnes ont reçu une formation 129’100 projets à travers le monde 86’300 pays d’activité 1240 enfants ont participé à l’enquête #CovidUnder19 243 de nos projets ont été adaptés au COVID-19 enfants ont été libéré·e·s de prison pendant la pandémie 100% enfants et jeunes migrant·e·s ont participé à des sessions 26’200 d’information ou des activités psychosociales *Réponses en page 15. Retrouvez l’essentiel de 2020: www.tdh.ch/rapport-annuel 4 Courage | Juin 2021 | www.tdh.ch
Médiathèque tdh.ch/mediatheque Podcast The Field : Qui sont Situation alarmante au Myanmar ces humanitaires ? ©Tdh/M.-L. Dumauthioz ©Tdh/G. Bell Découvrez la toute nouvelle saison de The Field. Dans le premier épisode, vous Depuis que les militaires ont pris le pouvoir le 1er février, le vous plongerez dans la vie d’un humanitaire Myanmar est en proie à une crise politique, économique et au Népal qui nous raconte son aventure en famille à l’autre bout du monde. sociale sans précédent. En plus de l’insécurité dans laquelle vivent des millions de personnes, la pandémie de Coronavirus www.tdh.ch/podcast a exacerbé les besoins des familles. Près d’un million de per- sonnes se trouvent dans une situation de vulnérabilité extrême. Les familles avec de jeunes enfants et les femmes enceintes Vidéo : Les répercussions du sont particulièrement à risque. Les cas de malnutrition dans les COVID-19 sur les enfants zones urbaines les plus pauvres sont en augmentation. Terre des hommes apporte une aide d’urgence à 115’000 femmes et enfants dans la communauté de Hlaing Thar Yar. Nos équipes y distribuent de l’eau, des produits d’hygiène et des compléments nutritifs pour les familles les plus vulné- rables. Les femmes enceintes présentant des complications potentiellement mortelles sont orientées vers des soins Le Covid-19 chamboule notre quotidien médicaux d’urgence. Nous proposons aussi du soutien psy- depuis plus d’un an. Victimes collatérales ou chosocial pour les enfants les plus fragiles. Le Programme cachées de la pandémie, les enfants sont Alimentaire Mondial (PAM) a récemment annoncé que confronté·e·s à de nouveaux obstacles. 3,4 millions de Birman·e·s supplémentaires risquent de souf- www.tdh.ch/covid-enfants frir de la faim au cours des six prochains mois. Merci et bravo ! Vidéo : la e-santé en Inde Vous avez été plus de 1800 à relever notre défi en récoltant des oranges virtuelles. Vos nombreux dons nous permettront de venir en aide aux enfants, là où les besoins sont les plus importants. Rendez-vous l’année prochaine pour une nouvelle édition ! Après avoir fait ses preuves en Afrique de l’Ouest, notre outil digital pour l’amélioration des diagnostics chez les enfants de moins de cinq ans se déploie pour la première fois en Inde. www.tdh.ch/ieda-inde Courage | Juin 2021 | www.tdh.ch 5
Dossier Burkina Faso Enfant, pas chercheur d’or Au Burkina Faso, l’industrie de l’or représente près de 10% du PIB. A côté des sites industriels, des centaines de mines d’or sont exploitées de manière artisanale par la population locale. Poussé·e·s par la pauvreté, des enfants quittent l’école pour y travailler dans des conditions qui mettent en danger leur santé et leur sécurité. Photos ©Tdh/S. Garcia
Une chaleur étouffante enveloppe la mine d’or où travaille Hamidou*. Dans ce paysage désertique jonché de trous, quelques équipements rudimentaires sont éparpillés sur le sol, un âne fatigué tire une charrette. « Quand on creuse les trous, il faut utiliser de la dynamite pour faire exploser la roche. Le travail est difficile. On peut passer quatre ans sur un site comme celui-ci à travailler avant de trouver une seule pépite d’or », raconte Hamidou, 17 ans. Comme lui, ils sont environ 20’000 enfants à travailler dans les centaines de Les enfants descendent dans des trous comme celui-ci – de 60cm de diamètre, et jusqu’à 80m de profondeur – dans l’espoir de trouver le précieux minerai. mines d’or artisanales du Burkina Faso. Pour la majorité, il s’agit du seul moyen de gagner quelques sous pour survivre. « Si je ne faisais pas ce travail, ça serait concassées et lavées pour en extraire quatre mines informelles de la province difficile pour moi de manger quotidienne- l’or, un travail souvent réalisé par des du Ganzourgou. Dans ces zones éloi- ment », confie Zalissa*, 16 ans, qui tra- filles car considéré comme moins phy- gnées des centres urbains, nous avons vaille sur le même site. sique. « Dans ce processus, les enfants mis en place un système de protection respirent de la poussière et utilisent des sociale pour chaque localité avec le Ces mines ne sont pas officiellement produits chimiques dangereux comme soutien des autorités. Nous avons éga- réglementées par l’Etat et le travail des du mercure. Cela provoque des maladies lement développé des relations avec enfants n’y est pas contrôlé. Les condi- respiratoires, des problèmes de peau », les communautés et les familles pour tions de travail y sont extrêmement affirme Birba Wendsongo, adjoint à la difficiles et les mesures de sécurité coordinatrice du programme de protec- inexistantes. Les enfants contribuent à tion de l’enfance au Burkina Faso. toutes les étapes du travail d’extraction qui se fait entièrement à la main, met- Hamidou lave la poussière de roche tant en danger leur santé et parfois leur « Si je ne faisais pas ce pour détecter la vie. Certains comme Hamidou creusent présence d’or. des trous dans le sol jusqu’à 80m de travail, ça serait difficile profondeur et remontent les bouts de pour moi de manger roche. « J’utilise une corde pour des- quotidiennement. » cendre. Le dispositif est en bois. Parfois Zalissa, 16 ans ça lâche et on peut tomber », explique- t-il. Les éboulements sont fréquents. Tisser un réseau de protection Une fois remontées, les roches doivent Depuis 2009, les équipes de Terre des être chargées dans des charrettes puis hommes (Tdh) sont présentes dans < Dans les mines d’or artisanales du Burkina Faso, les filles sont souvent chargées du transport, du concassage et du nettoyage des pierres pour en extraire l’or. Elles aident aussi à préparer les repas.
contenant les informations sur l’enfant et sur sa situation est ensuite directe- ment envoyé aux services sociaux et à tous les autres acteurs qui entreprennent les démarches nécessaires. Dans cer- tains cas, cela commence par aider l’enfant à obtenir un acte de naissance ou d’autres papiers officiels qui lui per- mettront par exemple d’aller à l’école », précise Julienne Wanre Ouedraogo, responsable du projet. Ce travail est fait main dans la main avec la communauté pour que les effets soient durables. Elisabeth Marty, coordinatrice Un agent de saisie de Tdh rencontre Zalissa. Grâce au système d’alerte, il pourra la du programme de protection au Burkina mettre en contact avec les services dont elle a besoin. Faso, explique :« Quand on identifie un enfant qui travaille, on met tout en œuvre pour le sortir du site minier. On mobilise tisser un réseau de protection pour les Un système d’alerte les différents acteurs locaux qui peuvent enfants. Cela nous permet d’être Beaucoup d’enfants sont victimes de l’aider. Cette manière de faire permet proches de la réalité des familles et de violences et d’exploitation. Pour iden- aux communautés de s’approprier les leurs besoins. tifier ces enfants en danger, nous avons mécanismes de protection de l’enfant. développé un système d’alerte numé- On n’apporte pas de solutions exté- Sur ces sites d’extraction d’or, les condi- rique. Cet outil sur tablette permet à rieures, car on veut renforcer le système tions de vie sont terribles. Les familles des agents de saisie – des personnes qui existe déjà. » Les familles sont éga- vivent dans des maisons rudimentaires, de la communauté que nous avons for- lement sensibilisées et accompagnées. à quelques minutes de la mine. Faute mées – d’évaluer leur situation et de « On implique les parents, et s’ils ne sont d’alternative, les enfants déjà très les mettre en contact avec l’hôpital, les pas sur place, on lance une enquête pour jeunes accompagnent leurs parents sur services sociaux ou la police. « Des les retrouver. » les sites. Certain·e·s se retrouvent agents de saisie parcourent les mines. même sans leurs parents, parce qu’ils Dès qu’ils observent ou sont informés En parallèle, nos équipes rencontrent les sont décédés ou parce que l’enfant s’est d’un enfant dans une situation difficile, gérants de la mine pour les sensibiliser déplacé·e seul·e, ce qui fragilise encore ils le rencontrent et parlent avec lui. Ils aux besoins et aux droits spécifiques des sa situation. l’inscrivent dans leur tablette. Un SMS enfants. « Dans plusieurs mines, nous « Les enfants n’ont pas leur place dans les mines » La directrice générale de Terre des hommes Barbara Hintermann s’est rendue au Burkina Faso en mars 2021 pour visiter nos projets. Elle a pu constater la situation dans la mine d’or de Kagtanga. « C’est une chose d’ être informée sur le contexte et de voir des photos, c’en est une autre de le voir en vrai. La situation est très inquiétante. Les trous creusés dans le sol ne font que 60cm de diamètre et l’ installation pour descendre est une improvisation en bois et en corde. J’aurais peur de descendre moi-même, alors pourquoi un enfant devrait-il y descendre ? Les enfants n’ont pas leur place dans les mines ! », témoigne-t-elle. « Je suis convaincue par notre manière de collaborer avec la communauté. On les sensibilise et on travaille avec eux pour que les enfants réintègrent l’ école ou une formation. Notre travail se fait également avec les services sociaux institutionnels. C’est une approche holistique. » 8 Courage | Juin 2021 | www.tdh.ch
Alice* a 14 ans. Sourde de naissance, elle a eu beaucoup avons négocié avec les employeurs de de difficultés à l’école où les cours n’étaient pas adaptés ne pas attribuer les activités les plus à sa situation. « Elle devait suivre attentivement tout ce qui dangereuses aux enfants, comme des- était écrit au tableau et ne prenait pas de pauses », raconte cendre dans les trous pour creuser et sa maman. Mais à 10 ans, les difficultés financières de sa famille ont eu raison de sa scolarité. Alice commence alors à remonter la roche », affirme Julienne travailler dans une mine d’or avec ses parents. Wanre Ouedraogo. « Maintenant, ils s’oc- cupent plutôt de faire la cuisine ou de Il y a deux ans, elle a rencontré Issaka Saouré, agent de saisie communautaire de Tdh. Après une discussion avec ses revendre de l’eau qu’ils vont chercher au parents, Issaka propose à Alice de suivre une formation dans puits. Ce n’est pas idéal mais c’est déjà le centre de Tdh. Elle choisit la couture. Sa mère raconte : beaucoup moins dangereux. » « Depuis ce moment-là, la vie d’Alice a changé. Elle a acquis des compétences qu’elle n’aurait jamais pu développer si Une formation pour l’avenir elle n’avait pas suivi cette formation. Elle a elle-même cousu La plupart des enfants qui travaillent les habits qu’elle porte, et elle commence à les vendre dans des fêtes. C’est une grande fierté. Et elle va continuer à en dans les mines ne sont jamais allé·e·s apprendre davantage ». à l’école ou l’ont quittée très tôt. La distance est parfois en cause. Les écoles se trouvent souvent trop loin des sites miniers pour que les enfants puissent s’y rendre régulièrement. Mais c’est surtout le manque d’argent qui pousse les familles à envoyer leurs enfants travailler. Car lorsqu’il s’agit de survivre, l’éducation n’est plus la prio- rité. « J’ai arrêté d’aller à l’école car mes parents avaient besoin que je tra- vaille » explique le jeune Hamidou. « Dans les écoles de seconde chance, nous organisons des cours d’alphabétisation et développons les compétences digitales des enfants. » Klena Abdoulaye Traoré, responsable de projet FabLab Nos équipes accompagnent ces enfants pour qu’ils et elles réintègrent le sys- tème scolaire. Tdh prend en charge les frais de scolarité et leur fournit du maté- riel scolaire. Lorsqu’un retour en classe n’est pas possible, nous proposons aux enfants une formation adaptée dans
Dans le FabLab, Hamidou apprend à se servir d’un Zalissa suit une formation sur l’utilisation de ordinateur et se familiarise avec les outils numériques. l’imprimante 3D. Ce dispositif permet aux enfants de produire des petits objets du quotidien. les «écoles de seconde chance». « Dans de ces cours de rattrapage, nous orga- A 15 minutes à vélo de la mine où tra- les écoles de seconde chance, en plus nisons des formations professionnelles vaillent Zalissa et Hamidou se trouve le du cursus scolaire normal, nous organi- et mettons à disposition un laboratoire centre de Tdh. Plusieurs salles se sons des cours d’alphabétisation et FabLab (pour Fabrication Laboratory) dressent autour d’une cour centrale développons leurs compétences digi- pour que les jeunes développent des recouverte d’un parvis. Chacune accueille tales », explique Klena Abdoulaye compétences utiles pour leur futur. une vingtaine d’enfants de tous âges. Traoré, responsable de projet. A côté Dans l’une d’elles, une majorité de filles s’entraîne à utiliser un ordinateur. Plus loin, on enseigne des techniques d’agri- Schéma d’une mine culture avec des moyens très simples : d’or artisanale. une bouteille en plastique, un bouchon et un tuyau permettent déjà de créer un système d’irrigation pour cultiver un potager. Un autre groupe apprend à mon- ter et à utiliser une imprimante 3D qui permet aux enfants de produire des objets qu’ils et elles ont modélisés, dont du matériel de bureautique comme des 20kg : les enfants porte-crayons ou des règles. transportent des 5h00 : le travail dans les seaux de 20kg mines commence très tôt remplis de pierres pour éviter la chaleur « Tous les enfants sont les bienvenus ici. Lorsqu’ils arrivent, on leur fait décou- vrir les formations qui existent. On prend le temps de parler avec eux, de voir ce qui leur plaît et ce qu’ils souhaitent faire 80m : les enfants pour ensuite les orienter vers une for- doivent descendre dans mation qui leur correspond. La formation des galeries jusqu’à 80m de profondeur peut se faire soit dans un centre comme 50°C : dans les tunnels, la température peut être étouffante
ici ou dans des petites entreprises pri- Environ 400 enfants ont déjà pu suivre aura un futur prometteur ». Hamidou vées avec lesquelles nous avons un ces formations. Parmi eux, Hamidou se confirme, souriant et bien décidé à chan- contact », poursuit Klena Abdoulaye rend régulièrement au centre de Tdh. ger son avenir :« Quand je finirai ma Traoré. « C’est un tremplin vers leur « Depuis que je viens ici, je suis moins formation, je pourrai arrêter le travail de insertion professionnelle. » souvent sur le site minier. » Son papa chercheur d’or. J’aimerais lancer ma témoigne :« Quand tu as un enfant, ta propre entreprise d’électronique. » « J’ai découvert que ces enfants avaient préoccupation est qu’il ait un bon avenir. une réelle envie d’apprendre pour se Ca me réconforte qu’il suive une forma- Isabel Zbinden sortir d’un travail dangereux pour leur tion car je sais qu’il apprend et qu’il santé. Je suis fière de dire que certains enfants que nous avons accompagnés sont devenus chefs d’entreprise et aident à leur tour d’autres enfants à se Découvrez en vidéo le quotidien des enfants dans former dans un métier », déclare Julienne les mines d’or au Burkina Faso : Wanre Ouedraogo. « Ils transmettent un www.tdh.ch/fr/mines-or-burkina-faso message positif et plein d’espoir. » *Les prénoms ont été changés pour le respect de la vie privée. Avec votre don, nous pouvons par exemple CHF 25.- CHF 120.- CHF 145.- organiser une couvrir les frais de financer la formation séance d’information scolarisation et de nour- professionnelle d’un·e communautaire sur les riture pour un·e enfant enfant pendant droits de l’enfant pendant 6 mois 6 mois Pour faire un don, veuillez utiliser le bulletin de versement de la lettre ci-jointe ou l’une des possibilités décrites en page 3.
Parole à Hamza Goumbane, responsable d’un FabLab Dans la province du Ganzourgou, à proximité d’une mine d’or artisanale, le centre de formation de Tdh héberge un laboratoire FabLab. Hamza Goumbane est responsable du projet et accompagne les enfants dans leur formation. Hamza Goumbane (à droite) explique à un jeune à utiliser un ordinateur et à se servir d’internet. Que proposez-vous dans le FabLab ? Comment accompagnez-vous les jeunes ? Mon travail consiste à orienter chaque enfant vers la forma- Le plus important est de montrer aux enfants et aux jeunes tion qui lui convient le mieux, en fonction de ses attentes que le travail sur les sites d’orpaillage n’est pas la meilleure et ses envies. Nous proposons trois cursus différents. Il y a solution pour s’en sortir. Les différentes formations que nous le cursus informatique dans lequel on apprend aux jeunes à leur proposons leur permettent de gagner de l’argent et d’être manipuler un ordinateur, à faire des recherches sur internet autonomes. L’informatique par exemple, peut leur être utile pour par exemple trouver du travail. Nous avons une forma- dans bien des domaines. Sur les sites miniers, ils sont em- tion sur l’utilisation de l’imprimante 3D et une autre sur des ployés par des gens qui ne les payent que 1000 CFA (environ techniques d’agriculture. Un quatrième module sera bientôt 1.70 CHF) par jour ou d’autres encore qui ne les payent que disponible et abordera l’énergie renouvelable et les maté- lorsqu’ils tombent sur un filon. riaux recyclables. En ce moment, nous encadrons environ 200 enfants. C’est un défi car les enfants n’ont pas tous le même Y a-t-il une histoire en particulier qui vous a marqué ? âge et ont des intérêts très différents. Adama* travaille avec ses parents sur le site d’orpaillage 12 Courage | Juin 2021 | www.tdh.ch
depuis qu’il a cinq ans. Il n’est jamais allé à l’école et ne maltraitances et souffrir autant juste pour se procurer à man- savait pas écrire son nom. La première fois qu’il est venu au ger. Je travaillais en ville. C’est en allant en province que j’ai FabLab, il a refusé d’entrer car les ordinateurs lui faisaient vu d’autres réalités. Quand je me lève le matin, je pense à ces peur. On l’a rassuré en lui disant qu’on allait apprendre en- enfants qui ont creusé toute la nuit et qui après, au lieu de semble. Aujourd’hui, il a dix ans. Il apprend à lire et à écrire, se reposer, viennent au FabLab, déterminés à apprendre dans et il s’est familiarisé avec les ordinateurs. l’espoir de se sortir de leur situation. Ça me donne beaucoup d’énergie et m’encourage à les aider du mieux que je le peux. Vous êtes informaticien de formation. Qu’est-ce qui J’apprends des enfants et les enfants apprennent de moi. vous a poussé à travailler avec des enfants ? Travailler avec des enfants m’a ouvert l’esprit. Avant, je Propos recueillis par Désirée Kanyala n’imaginais pas que des enfants pouvaient subir de telles « Quand je me lève le matin, je pense à ces enfants qui ont creusé toute la nuit et qui après, au lieu de se reposer, viennent au FabLab, déterminés à apprendre dans l’espoir de se sortir de leur situation. » *Le prénom a été changé pour le respect de la vie privée. Une des formations apprend aux enfants des techniques d’agriculture. Des moyens très simples permettent déjà de créer un système d’irrigation Photos ©Tdh/S. Garcia pour cultiver un potager. Courage | Juin 2021 | www.tdh.ch 13
Focus Comprendre le travail des enfants en les écoutant Dans le monde, on estime que 72 millions d’enfants exercent un travail dangereux. Mais ces chiffres n’apparaissent pas dans les statistiques officielles des pays concernés. Le travail des enfants est souvent illégal et caché. Dans plusieurs pays d’Asie, Terre des hommes (Tdh) tente de faire la lumière sur ce phénomène en écoutant ce que les enfants ont à dire. Farida* a 11 ans. Elle travaille dans une usine de traitement région au nord du Bangladesh, sa famille a dû migrer vers la du cuir à Dhaka, la capitale du Bangladesh. Tous les jours, ville pour échapper aux inondations qui ravageaient la région. elle porte les peaux sur son dos jusqu’au cinquième étage et Un jour, son père est tombé malade. C’est pour permettre les fait sécher au soleil. Onze heures par jour pour moins de à sa famille de survivre que Farida a commencé à travailler 90 CHF par mois. Une situation qui met en danger sa santé. dans l’industrie du cuir. Au Bangladesh, au Myanmar et au Népal, Terre des hommes, « Les enfants choisissent eux-mêmes de nous raconter leur en collaboration avec d’autres partenaires du consortium histoire. Ils sont généralement reconnaissants de pouvoir CLARISSA [1], veut rendre visibles et lutter contre les pires s’exprimer sans que personne ne les juge. Cela leur donne formes de travail des enfants. Nous collaborons avec des confiance en eux. Souvent, cela fait aussi remonter des organisations locales, les communautés et les familles pour émotions, raison pour laquelle nous leur offrons également comprendre le fonctionnement des secteurs qui ont recours un soutien psychologique si nécessaire », explique Sudarshan à ce travail dangereux. L’objectif est aussi d’identifier les Neupane, coordinateur régional du programme. « Nous for- raisons qui poussent les enfants à risquer leur santé en mons ensuite les enfants pour qu’ils puissent eux-mêmes échange d’un revenu. Pour cela, nous écoutons les enfants récolter et analyser d’autres témoignages. » raconter leurs histoires de vie. Des groupes d’enfants analysent ces histoires pour identifier En écoutant Farida, on apprend qu’elle vit dans un des les causes principales qui poussent les enfants à travailler, nombreux bidonvilles de Dhaka. Originaire du Kurigram, une et pour repérer les tendances. Les jeunes participant·e·s proposent aussi des solutions à ces difficultés. Les résultats de ces réflexions sont ensuite utilisés pour formuler des de- mandes et des recommandations aux gouvernements, mais aussi aux employeurs. L’objectif est d’améliorer la situation des familles les plus défavorisées et ainsi diminuer le nombre d’enfants contraint·e·s de travailler dans des conditions dangereuses et d’exploitation. « C’est une nouvelle façon de travailler, dans laquelle on combine la recherche, l’action, et la participation des enfants », poursuit Sudarshan Neupane. « Les solutions sont développées par les enfants eux-mêmes et ne leur sont pas imposées. Elles sont donc différentes et adaptées à chaque contexte. » Isabel Zbinden ©Tdh/D. Martenet *Le prénom a été changé pour le respect de la vie privée. Child Labour: Action-Research-Innovation in South and South-Eastern Asia [1] 14 Courage | Juin 2021 | www.tdh.ch
Agenda Calendrier des manifestations sur tdh.ch/evenements* Vente de roses Marché aux puces StraLugano ©Pexel ©Tdh/C. Michel ©Pexel Lausanne, début juin Neuchâtel, 26 juin 2021 Lugano, 28 et 29 août 2021 Le groupe bénévole de Lausanne sera Le groupe bénévole de Neuchâtel Cette année encore, Tdh sera présent dans les rues de la ville avec tiendra un stand de vente avec un partenaire caritatif de la course plusieurs stands de vente de roses. assortiment d’articles pour enfants et StraLugano. Les coureurs et La date exacte et la liste des points adultes, tels que jouets, habits pour coureuses peuvent choisir de soutenir de vente sont à consulter sur : bébé ou vaisselle. Les fonds récoltés nos projets d’aide à l’enfance au www.tdh.ch/evenements seront attribués aux projets d’aide à moment de l’inscription sur l’enfance de Tdh. Samedi de 10h à 17h www.stralugano.ch au Jardin anglais. *Sous réserve de modifications, selon la situation sanitaire en Suisse. Réponses de la page 4 - Ce que nous avons réalisé pour les enfants ➜ 4,8 millions d’enfants et membres de leurs com- ➜ 26’200 enfants ont participé à l’enquête ➜ 1240 enfants ont été libéré·e·s de prison munautés ont été soutenu·e·s par Tdh en 2020 #CovidUnder19 pendant la pandémie ➜ 129’100 personnes ont reçu une formation ➜ 100% de nos projets ont été adaptés ➜ 86’300 enfants et jeunes migrant·e·s ont ➜ 243 projets à travers le monde au COVID-19 participé à des sessions d’information ou ➜ 35 pays d’activité des activités psychosociales ©Tdh/O. Meylan L’avenir est dans les mains des enfants Faites le bon geste en soutenant la génération de demain. Inscrivez Terre des hommes dans votre testament. Pour perpétuer votre soutien dans le temps, il vous suffit de mentionner Terre des hommes dans votre testament. Vous marquerez durablement votre en- gagement aux côtés des enfants ! Pour plus d’informations sur les legs et héritages, téléchargez notre bro- chure via le QR code ou contactez nos collaborateurs. « Quand je serai grand, ➜ Pascal Pittet, pascal.pittet@tdh.ch 058 611 06 56 (Suisse romande et Tessin) je serai docteur. » ➜ Laurent Zbinden, laurent.zbinden@tdh.ch 058 611 06 81 (Suisse alémanique) Courage | Juin 2021 | www.tdh.ch 15
©Tdh/M.-L. Dumauthioz « Quand je serai grande, je serai enseignante. » L’avenir est dans les mains des enfants. Faites le bon geste en soutenant la génération de demain. Inscrivez Terre des hommes dans votre testament. www.tdh.ch/testament Siège | Hauptsitz | Sede | Headquarters www.tdh.ch/donner Av. Montchoisi 15, CH-1006 Lausanne www.facebook.com/tdh.ch T +41 58 611 06 66, E-mail : info@tdh.ch www.twitter.com/tdh_ch www.tdh.ch, CCP : 10-11504-8 www.instagram.com/tdh_ch
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