Effets des Terrils de Manganèse de la Mine de Moanda (Gabon) sur Quelques Caractères Morphométriques de
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European Journal of Scientific Research ISSN 1450-216X / 1450-202X Vol. 153 No 3 July, 2019, pp. 335-352 http://www. europeanjournalofscientificresearch.com Effets des Terrils de Manganèse de la Mine de Moanda (Gabon) sur Quelques Caractères Morphométriques de l’Arachide (Arachis hypogea L) Ephrem Nzengué Auteur Correspondant, Institut de Recherche en Écologie Tropicale du Centre National de Recherches Scientifiques et Technologiques (IRET-CENAREST) Libreville-Gabon, Laboratoire de Physiologie Végétale et Protection des Plantes Unité de Recherche Agrobiologie (L3PV-URAB) Université des Sciences et Techniques de Masuku (USTM), Franceville-Gabon E-mail: nzengue_ephrem@yahoo.fr Tel: +24104936489 Alexis Nicaise Lepengué Laboratoire de Physiologie Végétale et Protection des Plantes Unité de Recherche Agrobiologie (L3PV-URAB) Université des Sciences et Techniques de Masuku (USTM); Franceville-Gabon E-mail: lepengue_nicaise@yahoo.fr Antoine Mitte Mbeang Beyeme Institut National Supérieur d’Agronomie et de Biotechnologies (INSAB) de l’Université des Sciences et Techniques de Masuku (USTM) Franceville, Gabon E-mail: antoine.mbeang@gmail.com Stéphane Mombo Laboratoire de Physiologie Végétale et Protection des Plantes Unité de Recherche Agrobiologie (L3PV-URAB) Université des Sciences et Techniques de Masuku (USTM); Franceville-Gabon E-mail: stephanemombo01@gmail.com Dhert Souviens Tshi-tshi Ontod Laboratoire de Physiologie Végétale et Protection des Plantes Unité de Recherche Agrobiologie (L3PV-URAB) Université des Sciences et Techniques de Masuku (USTM); Franceville-Gabon E-mail: ontodclif@yahoo.fr Aurélien Mokéa Laboratoire de Physiologie Végétale et Protection des Plantes Unité de Recherche Agrobiologie (L3PV-URAB) Université des Sciences et Techniques de Masuku (USTM); Franceville-Gabon E-mail: lebigau@gmail.com Jacques François Mavoungou Institut de Recherche en Écologie Tropicale du Centre National de Recherches Scientifiques et Technologiques (IRET-CENAREST); Libreville-Gabon E-mail: mavoungoujacques@yahoo.fr
Effets des Terrils de Manganèse de la Mine de Moanda (Gabon) sur Quelques Caractères Morphométriques de l’Arachide (Arachis hypogea L) 336 Alfred Ngomanda Institut de Recherche en Écologie Tropicale du Centre National de Recherches Scientifiques et Technologiques (IRET-CENAREST); Libreville-Gabon E-mail: ngomanda@yahoo.fr Donald Midoko Iponga Institut de Recherche en Écologie Tropicale du Centre National de Recherches Scientifiques et Technologiques (IRET-CENAREST); Libreville-Gabon E-mail: dmiponga@gmail.com Bertrand M’batchi Laboratoire de Physiologie Végétale et Protection des Plantes Unité de Recherche Agrobiologie (L3PV-URAB) Université des Sciences et Techniques de Masuku (USTM) Franceville-Gabon E-mail: mbatchibertrand@yahoo.fr Résumé Le manganèse est un micronutriment indispensable aux processus métaboliques des plantes, dont l’excès de disponibilité dans le sol peut exposer la plante aux phénomènes de toxicité. Le but de cet essai était de quantifier l’effet de terrils de manganèse sur la croissance et le développement d’une Fabaceae: Arachis Hypogea L. Les semences locales ont été pré-germées au laboratoire. Après 4 jours, les plantules ont été transférées en serre sur 5 milieux dont 4 enrichis en manganèse et 1 non enrichi. L’effet manganifère a été évalué par la mesure des paramètres morphologiques de croissance des plantes (nombre des feuilles, hauteur de la plante, nombre et diamètre des tiges). Les effets des 5 traitements ont été comparés sur R à partir d’une Anova et une Classification hiérarchique du degré de ressemblance morphologique des plantes traitées. Les résultats obtenus ont révélé que le manganèse induisait des symptômes visuels de toxicité et une réduction de la croissance longitudinale des tiges à forte concentration (C=75% et 100% Mn). Il entrainait également une réduction de l’abondance des feuilles (C=50%, 75% et 100% Mn) et de la croissance radiale des tiges (C=25%, 50%, 75% et 100% Mn). Motsclés: Arachis Hypogea L., Terrils, Manganèse, paramètres morphométriques, toxicité Abstract Manganese is a micronutrient essential for the metabolic processes of plants whose excess availability in the soil can expose the plant to toxicity phenomena. The purpose of this test was to quantify the effect of manganese slag heaps on the growth and development of a Fabaceae: Arachis Hypogea L. Local seeds were pre-germinated in the laboratory. After 4 days the seedlings were transferred to the greenhouse on 5 media, 4 of which were enriched with manganese and 1 not enriched. The manganiferous effect was assessed by measuring the morphological parameters of plant growth (number of leaves, height of the plant, number and diameter of stems). The effects of the 5 treatments were compared on R
337 Ephrem Nzengué, Alexis Nicaise Lepengué , Antoine Mitte Mbeang Beyeme, Stéphane Mombo, Dhert Souviens Tshi-tshi Ontod, Aurélien Mokéa and et al using an Anova and a hierarchical Classification of the degree of morphological similarity of the treated plants. The results obtained revealed that manganese induced visual symptoms of toxicity and a reduction in the longitudinal growth of the stems at high concentration (C=100% Mn). It also reduced leaf abundance (C=50%, 75% and 100% Mn) and radial stem growth (C=25%, 50%, 75% and 100% Mn). Keywords: Hypogea L. groundnuts, Terrils, Manganese, Morphometric parameters, Toxicity. 1. Introduction Le manganèse est un Elément Trace Métallique (ETM) naturellement présent dans la croûte terrestre (Millaleo et al., 2010). C’est aussi un micronutriment essentiel pour tous les organismes vivants, de par son rôle dans de nombreux processus métaboliques. Chez les végétaux, il participe à la structure des protéines et des enzymes photosynthétiques, à la respiration et l'assimilation de l’azote (Millaleo et al., 2010; Fernando et Lynch, 2015; Darmawan et al., 2017). Néanmoins, à des proportions anormalement élevées dans le sol, c’est-à-dire à une concentration supérieure à 20 mg.kg-1, il peut devenir toxique pour la croissance et le développement des plantes telles que l’arachide (Ollagnier et Prevot, 1955; Bénac, 1976). Ainsi, le manganèse a des rôles antagonistes pour les végétaux. Il joue le rôle de micronutriment à de faibles concentrations et d’élément toxique quand il est en excès dans le sol (Kochian et al., 2004; Dučić et Polle, 2005). L’arachide (Arachis hypogea L.) est une plante herbacée de la famille des légumineuses. Elle se caractérise par la présence de fruits souterrains (Schilling, 2001; Issa et al., 2016) mondialement appréciés pour leurs valeurs protéiniques et la qualité de l'huile alimentaire qui en est extrait (Issa et al., 2016). La culture de l’arachide est présente dans tous les continents, particulièrement dans les zones tropicales et subtropicales (Schilling, 2001; FAO, 2018). Selon les statistiques de la FAO, la production mondiale a atteint 45.84 millions de tonnes en 2013 (Frantz-Roby, 2017). Les pays en développement détiennent 94% de cette production (Ntare et al., 2008). Les premiers producteurs sont la Chine et l’Inde qui fournissent plus de 60% de la production mondiale (Kouadio, 2007). En 2017, en Afrique la production totale a atteint 12,3 millions de tonnes pour une superficie de 14,6 millions d’hectares. Les principaux producteurs étaient le Nigéria (2,42 millions de tonnes), le Soudan (1,64 millions de tonnes) et le Sénégal (915 milles tonnes). En Afrique centrale, le Cameroun reste le leader avec près de 480 milles tonnes dans ce secteur, devant les autres pays du Bassin du Congo dont le Congo (27,31 milles tonnes) et le Gabon (18,57 milles tonnes). Au Gabon, l’arachide fait partie des principales plantes cultivées avec une superficie de 17,75 hectares de terre utilisée pour sa culture, elle est génératrice de revenus pour les populations locales (Nasr et al., 1995; FAO, 2018). Les graines cultivées sont essentiellement destinées à l’autoconsommation et à la vente locale (Nasr et al., 1995; Magnagna, 2005). Elles sont consommées de diverses manières: crues, cuites, sucrées, grillées ou bouillies. A Moanda dans le Sud-Est du Gabon, l’utilisation de l’arachide dans de nombreux mets locaux en fait un ingrédient majeur de l’alimentation des riverains de cette localité du Gabon. Toutefois, dans cette ville minière, la culture de l’arachide peut être confrontée aux risques de toxicité dus aux fortes concentrations de Mn dans le sol (Eba et al., 2007; Lebas, 2010). Les sols de la région de Moanda sont manganésifères (Boupassia, 2004). Aussi, leur exploitation depuis 1962 par la Compagnie Minière de l’Ogooué (Comilog) a généré d’importants terrils miniers. Ces terrils sont constitués de fines particules du minerai de diamètres inférieurs à 8 mm qui étaient pendant une longue période, directement déversés dans les milieux environnements (Boupassia, 2004; Lebas, 2010; Boulamatari et al., 2017). Plusieurs travaux réalisés dans cette région indiquent que, du fait des résidus miniers, les végétaux cultivés présentent pour quelques-uns (manioc (Manihot esculenta), roselle (Hibiscus sabdariffa), Aubergine (Solanum melongena L), des symptômes caractéristiques d’une toxicité manganifère (Eba et al., 2007; Ontod et al., 2013; Xiong et al., 2014; Ontod et al., 2015; Messi-Me,
Effets des Terrils de Manganèse de la Mine de Moanda (Gabon) sur Quelques Caractères Morphométriques de l’Arachide (Arachis hypogea L) 338 2018). Par ailleurs, l’ingestion fréquente des aliments contenant une quantité excessive de Mn peut entraîner chez l’homme, des symptômes semblables à ceux de la maladie de Parkinson (Racette et al., 2001; Gerber et al., 2002; Erikson et Aschner, 2003; Racette et al., 2011) et des anomalies du système reproducteur et immunitaire (Vartanian et al., 2015). Aussi, une étude menée au Canada a révélé qu'une exposition excessive au manganèse était associée à une diminution du développement de l'intelligence chez les jeunes enfants (Takser et al., 2003). Cependant, la sensibilité au manganèse varie selon les espèces et suivant les cultivars au sein d’une même espèce (Horst, 1988; El‐Jaoual et Cox, 1998). Ainsi, la connaissance de l’effet des terrils de manganèse sur les plantes vivrières revêt un intérêt certain pour l’écotoxicologie et la santé publique dans la ville de Moanda. Bien que quelques informations relatives à la phytotoxicité du manganèse (Boupassia, 2004; Eba et al., 2007; Ontod et al., 2013; Ontod et al., 2015; Messi-Me, 2018) soient disponibles, aucune étude portant sur l’effet du manganèse sur l’arachide cultivée à Moanda n’a été réalisée à ce jour. Pourtant, pour les habitants de cette région, qui vivent d’une agriculture de subsistance et parfois de rente, une influence négative des résidus de manganèse sur la culture de l’arachide pourrait avoir un effet néfaste sur la santé. De ce fait, cette étude est un travail préliminaire qui vise à quantifier l’effet de terrils de manganèse sur les paramètres de croissance et de développement de l’arachide (Arachis Hypogea L). 2. Matériel et Méthodes 2.1. Matériel Le matériel végétal utilisé était l’arachide (Arachis Hypogea L) du groupe Valencia originaire de Boumango dans la province du Haut Ogooué (Gabon). Des graines saines, toutes de même couleur et de même taille, ont été sélectionnées pour la réalisation de l’expérience. 2.2. Préparation des Substrats de Culture Pour réaliser cette expérience, un sol sablo-argileux a été prélevé (à l’aide d’une petite pelle) dans les forêts galeries du quartier Mbaya à Franceville (Gabon), aux alentours du fleuve Mpassa (1°38'1.90"S ; 13°32'8.51"E). Les terrils de manganèse ont été prélevés à Moanda en aval de la rivière Mouilili (Lebas, 2010; Nguéma, et al., 2014; Boulamatari et al., 2017). L’ensemble des substrats, sol sablo- argileux et terrils, ont chacun été séchés pendant 7 jours à l'air libre à une température moyenne de 25 °C. Les racines et les résidus des végétaux contenus dans ces sols ont été éliminés à l’aide d’un tamis à maille grossière (2 mm). Les échantillons secs ont ensuite été pesés à l’aide d’une balance commerciale et repartis dans des seaux en plastique de 10 litre (26,3 × 20,3 cm). Chaque seau a été percé de petits trous à sa base pour permettre une percolation en cas d’excès d’arrosage. 2.3. Traitements Expérimentaux Dans chaque seau, 10 kg de substrat de culture composé de terrils de manganèse et de sol substrat sablo- argileux ont été déposés. Les substrats de culture ont été divisés en 5 groupes constituant les différents traitements comme indiqué dans le tableau 1. Chaque traitement est représenté par un pourcentage correspondant au mélange entre la masse de terrils de manganèse et celle du sol sablo-argileux. Tableau 1: composition des différents traitements manganifères Traitement Composition Sol + Terrils de Mn % en Mn Nombre de seaux sans répétitions T0 (témoin) 10 kg de sol + 0 kg de terrils 0 12 T1 7,5 kg de sol + 2,5 kg de terrils 25 12 T2 5 kg de sol + 5 kg de terrils 50 12 T3 2,5 kg de sol + 7,5 kg de terrils 75 12 T4 0 kg de sol + 100 kg de terrils 100 12
339 Ephrem Nzengué, Alexis Nicaise Lepengué , Antoine Mitte Mbeang Beyeme, Stéphane Mombo, Dhert Souviens Tshi-tshi Ontod, Aurélien Mokéa and et al L’ensemble de l’essai était constitué de 60 seaux en plastique subdivisés en 5 traitements. Chaque traitement était constitué de 12 seaux disposés de manière aléatoire. L’essai a été répété 3 fois : soit un total 180 seaux d’expérimentation. Pour éviter le contact avec le sol, les seaux (perforés) ont été posés sur un double film de polyane noir étalé dans la serre. Le dispositif était abrité par une serre en forme d’arc de 6 m de diamètre et 3 m de hauteur. Celle-ci était recouverte d’un film plastique transparent en polyéthylène de 180 µm d’épaisseur. Les seaux étaient identifiés par des codes à deux nombres qui correspondaient au numéro du traitement (1 à 5) suivi du numéro de l’individu allant de 1 à 36 pour les trois répétitions. 2.4. Pré-germination et Semis Les tests de pré-germination ont été réalisés au laboratoire de physiologie végétale et protection des plantes de l’Université des Sciences et Techniques de Masuku. Les semences ont été stérilisées à l’Hypochlorite de sodium (NaClO) à 1% (par trempage pendant 5 mn) et rincées pendant 30 mn à l’eau distillée. Les pré-germinations ont été réalisées pendant 48 h dans des boîtes de Pétri tapissées de papier absorbant régulièrement humidifié à l’eau distillée (Boucelha et Djebbar, 2015). Les graines germées ont été ensemencées dans les différents seaux à raison de 3 graines par seau, disposées en quinconce, à une profondeur d’enfouissement de 5 cm. Le démariage est intervenu dix (10) jours après la levée, laissant un plant par seau (Chinawej, 2018; Ngoy et al., 2018). L’arrosage était effectué deux (02) fois par semaine avec 1 L d’eau par seau, jusqu’à la fin de l’expérimentation au 120ième jour. 3. Observation des Symptômes de Toxicité Les symptômes de toxicité manganifère ont été observés visuellement sur l’ensemble des organes aériens des plantes (Führs et al., 2008; Fernando et Lynch, 2015). Des observations plus fines ont ensuite été effectuées sur chaque organe à l’aide d’une loupe binoculaire de marque Olympus série CX23 LED du Japon. 4. Paramètres Évalués Les paramètres morphologiques (nombre de feuilles, hauteur de la plante, nombre et diamètre des tiges) ont été mesurés tous les 30 jours pendant 120 jours. 4.1. Détermination de la Hauteur et du Diamètre des Tiges La hauteur des tiges a été déterminée à l’aide d’un ruban-mètre. Elle part du sol à la dernière fourche foliaire pour les tiges principales et du point d’insertion sur la tige principale à la dernière paire de feuilles pour les tiges secondaires (Ontod et al., 2015; Alla et al., 2018). La mesure du diamètre a été effectuée à l’aide d’un pied à coulisse numérique série Mitutoyo ABSOLUTE 500 (Japon) avec une précision de 0.02 mm. Le diamètre est mesuré au niveau du collet pour les tiges principales, et à 2 cm du point de rattachement pour les tiges secondaires (Alla et al., 2018; Wifaya et al., 2018). 4.2. Nombre de Feuilles et de Tiges Apparues par Plante Pour le nombre de feuilles et de tiges apparues par plante, les mesures ont été faites au sein de chaque traitement, par dénombrement des feuilles et des tiges émises sur les différents individus de chaque traitement (Ontod et al., 2015; Alla et al., 2018; Wifaya et al., 2018) . La moyenne de feuilles apparues ࡺࢇ par plante (Nf) a été obtenue à partir de la formule suivante : ࡺࢌ = ࡺ
Effets des Terrils de Manganèse de la Mine de Moanda (Gabon) sur Quelques Caractères Morphométriques de l’Arachide (Arachis hypogea L) 340 Avec Na la somme du nombre de feuilles apparues sur les plantes échantillonnées dans le traitement et Np le nombre total des plantes échantillonnées (Scherrer, 1984). De même, la moyenne ࡺ࢈ de tiges apparues par plante (Nt) a été obtenue par la formule : ࡺ࢚ = ࡺ Avec Nb la somme des tiges apparues sur les plantes échantillonnées dans le traitement et Np le nombre total des tiges échantillonnées. 5. Analyses Statistiques Le dispositif expérimental était en blocs aléatoires complets, comportant 05 traitements contenant chacun 12 seaux. L’expérience a été soumise à 3 répétitions et les traitements statistiques ont été réalisés sur Ri386 version 3.4.0. Les données ont été soumises au test de normalité graphique. Pour la comparaison des différents traitements, une analyse de variance (ANOVA) à un critère d’évaluation a été effectuée sur chaque paramètre, suivi du test de comparaisons multiples de Tukey lorsque l’hypothèse nulle était rejetée au seuil 0,05. Pour connaitre l’effet des traitements sur la morphologie de l’arachide, une analyse des niveaux de ressemblance morphologique entre les plantes d’arachide des différents traitements a été effectuée. Ces analyses ont porté uniquement sur les paramètres morphométriques collectés le 90ième et le 120ième jour qui correspondent à la fin du cycle cultural de l’arachide (Schilling, 2001). Ces paramètres décrivent des plantes d’arachide au stade adulte où l’appréciation de la toxicité du manganèse sur le développement des plantes est meilleure. Les données ont été soumises à une classification ascendante hiérarchique réalisée sur le résultat d’une analyse en composantes principales (Lê, Josse, et Husson, 2008; Husson et al.2010). 6. Résultats 6.1. Symptômes de Toxicité Le suivi des plants d’arachide après la levée des semis a permis d’observer deux types de symptômes au niveau foliaire. La nécrose des folioles et le jaunissement des feuilles. Les manifestations de ces symptômes ont été observées en fonction de la nature du traitement (teneur en Mn). En effet, ces signes ont apparu entre le 5ième et 15ième jour après semis sur environ 80% des jeunes pousses cultivées sur les substrats de teneur 75% et 100% de Mn. Les feuilles les plus âgées des plantes issues de ces substrats présentaient des brûlures sur les bords et/ou des taches brunes rougeâtres. Leurs limbes s’enroulaient à partir des bords (involution). Sur les plantes des substrats 25% et 50% de Mn, ces symptômes ont affecté en moyenne 1 plante sur 10. Aucun symptôme n’a cependant été observé dans le traitement témoin. Entre le 15ième et 30ième jour, les symptômes disparaissaient sur les plantes des substrats 25%, 50% et 75% de Mn. Toutefois, les feuilles les plus anciennes semblaient subir un jaunissement précoce lié à leur vieillissement comparativement au traitement témoin. La floraison est apparue sur l’ensemble des substrats entre le 15ième et le 20ième jour après semis. À partir du 25ième jour après semis, tous les individus étaient en fleurs, excepté ceux des substrats à 100% de Mn dont seulement la moitié avait fleuri. Chez ces derniers, la floraison était complète entre le 30ième et le 35ième jour après semis et on observait une chute des feuilles nécrosées. Par ailleurs, les surfaces foliaires (SF) des plantes étaient décroissantes en fonction de l’augmentation de la teneur en terrils de manganèse dans les substrats (traitements). Les plantes issues du traitement témoin présentaient des feuilles plus larges que celles issues des autres traitements. Leurs surfaces foliaires étaient visuellement classées dans un ordre décroissant (SF100%Mn < SF75%Mn < SF50%Mn < SF25%Mn < SF0%Mn). Au stade adulte, les limbes des plantes du substrat à 100% de Mn étaient jaunâtres avec quelques nécroses brun-gris sur les bouts des feuilles.
341 Ephrem Nzengué, Alexis Nicaise Lepengué , Antoine Mitte Mbeang Beyeme, Stéphane Mombo, Dhert Souviens Tshi-tshi Ontod, Aurélien Mokéa and et al 6.2. Effet du Manganèse sur la Croissance Longitudinale de L’arachide L’effet des terrils de manganèse sur la croissance longitudinale des plantes d’arachide est présenté à la figure 1. Ces courbes révèlent que les plantes cultivées sur les substrats de teneur 25% et 50% de Mn présentent une croissance en hauteur plus importante que celles du substrat témoin. Les hauteurs moyennes ont atteint des valeurs respectives de 23,31 cm (pour les témoins) ; 24,05 cm (pour le traitement 25% de Mn) et 25,21 cm (pour le traitement 50% de Mn). Cependant, les croissances moyennes les plus faibles ont été observées, respectivement, chez les plantes cultivées sur les substrats 75% de Mn (20,79 cm) et 100% de Mn (14,53 cm). L’Anova au seuil 5 % a indiqué que seules les plantes cultivées sur les substrats 100% de Mn présentaient une croissance longitudinale significativement plus faible que celle des témoins. Figure 1: Croissance longitudinale des tiges d’arachide cultivée en serre en fonction des traitements 40 0% Mn (Temoin) 30 Hauteurs moyennes (cm) 25% Mn 50% Mn 20 75% Mn 100% Mn 10 0 0 30 60 90 120 Jours Test Anova: Pr (>F) = 1.79e-14: 0%Mn ; 25%Mn ; 50%Mnc; 75%Mnb; 100%Mna. bc bc 6.3. Effet du Manganèse sur la Biomasse des Feuilles D’arachide Les résultats de l’effet des terrils de manganèse sur la biomasse foliaire des plantes d’arachide sont présentés dans la figure 3. L’allure de ces courbes a montré qu’au stade juvénile (0-30 jours après semis), les individus ont produit en moyenne 15 à 18 feuilles par plante dans les différents substrats de culture. Dans l’intervalle 30 à 90 jours, les quantités de feuilles produites ont augmenté pour atteindre des moyennes maximales spécifiques à chaque substrat. Les substrats à 25%, 50%, 75% et 100% de Mn comportaient respectivement en moyenne 72, 47, 34 et 18 feuilles par plante. Dans l’intervalle 90 à 120 jours, les productions moyennes de biomasse foliaire pour les différents traitements (25%, 50%, 75% et 100% de Mn) variaient très peu pour atteindre respectivement 72, 53, 33 et 23 feuilles par plante. Toutes ces variations de production de biomasse foliaire à l’exception de celles observées sur les substrats à 25% de Mn se sont révélées significatives au seuil de 5% par rapport à celle des plantes témoins (79 feuilles/plantes).
Effets des Terrils de Manganèse de la Mine de Moanda (Gabon) sur Quelques Caractères Morphométriques de l’Arachide (Arachis (Arachis hypogea L) L 342 Figure 2: 2 Biomasse des feuilles d’arachide cultivée en serre serre en fonction des traitements 90 75 0% Mn (Temoin) 25% Mn 60 Abondance de feuilles 50% Mn 45 75% Mn 30 100% Mn 15 0 0 30 60 90 120 Jours 2e 16: 0%Mnd; 25%Mnd; 50%Mnc; 75%Mnb; 100%Mna. Test Anova: Pr (>F) = 2e-16: 6.4. .4. Effet du Manganèse sur la Ramification de L’arachide Les courbes présentées à la figure 2 traduisent l’effet des terrils de manganèse sur la ramification des plantes d’arachide. La productivité augmente en fonction du temps. En effet, au stade juvénile (0-30 (0 jours après), les individus individus ont eu en moyenne 03 tiges par plante dans les différents substrats de culture. Dans l’intervalle 30 à 120 jours, les moyennes de tiges augmentaient en fonction des traitements en terrils de manganèse. Les substrats à 25% de Mn ont présenté une très forte productivité des tiges (08 à 10 tiges/plante). Les plantes cultivées sur les substrats à 50% de Mn ont donné une productivité de tiges moyenne à forte (5 à 7 tiges/plante). Les productions moyennes de tiges les plus faibles ont été enregistrées sur les les plantes cultivées sur les traitements à 75% et 100% de Mn (4 tiges/plante). Toutes ces baisses de productions moyennes de tiges, à l’exception de celles observées sur les substrats à 25% de Mn, se sont révélées significatives, au seuil de 5%, par rapport rapport à celle des témoins (11 à 10 tiges/plante). Figure 3: Productivité des tiges d’arachide cultivée cultivée en fonction des traitements 15 0% Mn (Temoin) 25% Mn 12 50% Mn Productivité des tiges 9 75% Mn 100% Mn 6 3 0 0 30 60 90 120 Jours Test Anova: Pr (>F) = 9.02e-14: 14: 0%Mnb; 25%Mnb; 50%Mna; 75%Mna; 100%Mna
343 Ephrem Nzengué, Alexis Nicaise Lepengué , Antoine Mitte Mbeang Beyeme, Stéphane Mombo, Dhert Souviens Tshi-tshi Ontod, Aurélien Mokéa and et al 6.5. Effet du Manganèse sur la Croissance Radiale des Tiges D’arachide Les résultats de l’effet du manganèse sur la croissance radiale des plantes d’arachide sont présentés à la figure 4. Cette figure a permis de distinguer trois classes de diamètre des tiges. La classe 1 est constituée des plantes témoins dont le diamètre moyen est le plus important avec une valeur de 2.67 cm. Elle est suivie par la classe 2 dont le diamètre moyen varie de 2.29 cm à 2.39 cm. Cette classe est représentée par les plantes cultivées sur les substrats à 25%, 50% et 75% de Mn. Les diamètres les plus faibles sont représentés par la classe 3 avec une moyenne de 1.96 cm. Cette dernière abrite les individus qui poussent sur les fortes teneurs en manganèse (traitements à 100% de Mn). Figure 4: Diamètres moyens des tiges d’arachide cultivée en fonction des traitements 6.6. Influence du Manganèse sur les Caractères Morphométriques de L’arachide L’analyse en composantes principales (ACP) a été effectuée sur les caractères morphométriques des plantes d’arachide afin d’apprécier l’effet des traitements sur la croissance de l’arachide (figure 5). Le plan factoriel formé par les deux premières composantes principales permet de récupérer 82,83% de la variabilité totale des données, dont 65,65% de l’information totale expliquée par le premier axe, et 17,16% par le second. L’analyse des résultats montre que les variables sont bien représentées sur le premier axe (CP1). Cet axe révèle l’existence d’une corrélation négative entre l’enrichissement des substrats en terril minier et les caractères morphométriques de l’arachide. L’augmentation du pourcentage massique des terrils de manganèse dans les substrats est suivie d’une diminution desdits caractères. Aussi, il existe une corrélation positive forte entre la hauteur et le diamètre moyen des tiges (Dbh). De même, la corrélation positive entre l’abondance des feuilles et le nombre de tiges est forte. Ces paramètres évoluent de façon concomitante. Cependant, la hauteur et le diamètre des tiges sont faiblement corrélés à l’abondance des feuilles et le nombre de tiges.
Effets des Terrils de Manganèse de la Mine de Moanda (Gabon) sur Quelques Caractères Morphométriques de l’Arachide (Arachis hypogea L) 344 Figure 5: Corrélation entre caractères morphométriques des plants d’arachide et traitement en terrils de manganèse des substrats de culture Légende: Mn: terrils de manganèse, Dbh : Diamètre des tiges, Hauteur : hauteur des tiges, Feuil : nombre de feuilles/plante, tige : nombre de tiges/plante. La classification des résultats de l’ACP a permis de différencier morphologiquement les plantes d’arachide en trois classes (figure 6). La classe 1 regroupe les plantes d’arachide de taille normale (moyenne) avec des grands diamètres et une abondance de tiges et des feuilles. Cette classe abrite les individus cultivés sur les substrats à 25% de Mn et les témoins (0% de Mn). La classe 2 regroupe les plantes d’arachide de très grandes tailles avec une abondance moyenne de feuille et des diamètres moyens. Le nombre de tige est moyen à faible. Cette classe regroupe majoritairement les plantes qui poussent sur les substrats à 50% et 75% de Mn. La classe 3 abrite les plantes d’arachide cultivées sur le substrat à 100% de Mn et une partie de celles cultivées sur le substrat à 75% de Mn. Les plantes de cette classe sont de petite taille et de très faible diamètre. Le nombre de tiges et de feuilles est également faible.
345 Ephrem Nzengué, Alexis Nicaise Lepengué , Antoine Mitte Mbeang Beyeme, Stéphane Mombo, Dhert Souviens Tshi-tshi Ontod, Aurélien Mokéa and et al Figure 6: Classification hiérarchique des paramètres morphométriques des plantes d’arachide traitées 7. Discussion L’objectif de cette étude était d’analyser les effets des terrils du manganèse sur les caractères morphométriques de l’arachide (Arachis hypogea L). L’approche méthodologique adoptée utilise les caractères morphométriques comme indicateur biométrique de la variation des phénomènes biologiques qui s'y attachent sous l’action d’un facteur de causalité, à savoir le pourcentage massique de terrils de manganèse dans les substrats de culture. Les analyses biométriques qui en découlent permettent de faire une bonne quantification du niveau d’influence de ces terrils de Mn sur la croissance et la bonne santé de l’arachide. Les paramètres biologiques étudiés concernent les symptômes, la biomasse foliaire, la taille des plantes, l’abondance et le diamètre des tiges. Les résultats relatifs à la symptomatologie des plants d’arachide cultivés sur 05 substrats suivant un gradient d’enrichissement en terrils de manganèse indiquent la présence de signes de toxicité par rapport au témoin (T0). Quinze (15) jours après semis, les plantules d’arachide cultivées sur les substrats 50%, 75% et 100% de Mn ont présenté des symptômes de chlorose et de nécrose manganifère. Les feuilles issues de ces traitements étaient nettement plus petites que celles des plantes témoins (T0). Ces symptômes pourraient provenir directement de la toxicité des fortes concentrations en manganèse dans les substrats de culture, ou indirectement des carences en fer, en magnésium et en calcium provoquées par les effets antagonistes entre le Mn et les oligoéléments cités (Fernando et Lynch, 2015; Mombo et al., 2017). En effet, en tant que oligoélément, de faibles quantités d’oins Mn2+ sont indispensables à la croissance et au bon développement de l’arachide. Toutefois, lorsqu'ils sont en excès dans la solution du sol, ils peuvent devenir très toxiques pour les cellules végétales (Millaleo et al., 2010). Une étude sur la toxicité du sélénium sur le maïs a montré que les concentrations bénéfiques pour la bonne croissance du maïs étaient très proches des concentrations toxiques comme observé sur l’arachide (Mombo et al., 2016). L'effet toxique du Mn cause des dommages dont les manifestations sont proportionnelles à leur concentration dans la solution du sol (Horiguchi, 1988; Millaleo et al., 2010). Parmi les signes manifestes, les taches brunes nécrotiques et les feuilles chlorotiques sont des indicateurs fiables de la sévérité de la toxicité du Mn chez les plantes (Horst, 1988; Wissemeier et Horst, 1992). Les résultats de cette étude confirment l’idée selon laquelle, les feuilles seraient le siège
Effets des Terrils de Manganèse de la Mine de Moanda (Gabon) sur Quelques Caractères Morphométriques de l’Arachide (Arachis hypogea L) 346 préférentiel des symptômes manifestes d’un excès de manganèse (El‐Jaoual et Cox, 1998; Marchal et Foure, 1983). Pour cause, elles représentent les plus grands réservoirs de stockage dans le gradient d’accumulation des minéraux (Yang et al., 2008). En pratique, les feuilles accumulent plus de manganèse que les tiges et les racines (Lidon, 2001; Loneragan, 2011; Schäfer, 2004). Dans la présente étude, les chloroses et les nécroses apparues au bout du 30ième jour après repiquage, persistent durant tout le cycle de développement des plantes cultivées sur les traitements à 100% de Mn. Par contre, les plantes qui se développent sur les traitements a 25%, 50% et 75% de Mn, présentent au stade adulte, une diminution de la surface foliaire due à la toxicité du manganèse sans l'apparition de symptômes visuels sur les feuilles (Miner et Sims, 1983). La persistance de ces symptômes sur les pieds d’arachide cultivés sur les substrats constitués uniquement de terrils de manganèse est en accord avec les travaux d’Ontod et al. (2013). En effet, la sensibilité des plantules d’arachide serait due à leur système radiculaire très peu développé. Leur enracinement dans le substrat de culture est confiné à l'horizon superficiel où la concentration en manganèse échangeable de l’humus est forte (Rousseau, 1960; Vallée, 1967). L’action de la microfaune tellurique et l'alternance de périodes sèches et humides provoquent dans cet horizon une dismutation du manganèse en sa forme bio-dispensable (Mn2+), assimilable par les plantes (Rousseau, 1960 ; Vallée, 1967). Ainsi, dans cette étude, les traitements à 25%, 50% et 75% de Mn auraient une forte concentration en ions Mn2+ en surface. Dans les horizons de profondeur, la forme assimilable par les plantes est moins disponible et/ou très peu accessible (Goix et al., 2015; Mombo et al., 2018). Ces plantes échappent par évitement à la forte nutrition en Mn2+ des horizons superficiels (Millaleo et al., 2010). Par contre, les plantes cultivées sur les substrats à 100% de Mn, du fait de la forte teneur en manganèse dans le traitement, ont un système racinaire très peu développé. L’essentiel de la masse racinaire était limitée à l’horizon de surface, très toxique pour les plantes durant leur cycle de développement. Bien que non significatif, les résultats relatifs à l’effet des terrils de manganèse sur la croissance longitudinale des plantes d’arachide indiquent qu’il existe un seuil de tolérance de la teneur en Mn assimilable dans la solution du sol. Pour les peuplements d’arachide qui se développent sur les substrats enrichis à 25% et 50% de Mn, la vitesse de croissance longitudinale des tiges est plus importante que celles des témoins. Lorsque le pourcentage massique de terrils de manganèse est de moitié, les ions Mn2+ ont un effet positif sur la croissance longitudinale. Les peuplements d’arachide ont des hauteurs moyennes plus grandes que celle du témoin. Le manganèse est un oligoélément, et sa concentration dans les traitements à 25% et 50% de Mn stimulerait la croissance en hauteur des tiges d’arachide. En effet, l’utilisation de la fumure organique (écume de canne à sucre) comme engrais de fertilisation de l’arachide à Moanda a montré des effets identiques sur la croissance en hauteur des tiges d’arachide (Gatarasi et Mavoungou, 2018). Par contre, lorsque les substrats sont enrichis à 75% et 100% de Mn, la croissance longitudinale subit un ralentissement. Les peuplements d’arachide ont des hauteurs moyennes significativement inférieures à celles des témoins. Le manganèse a donc des rôles antagonistes en fonction de sa teneur dans le sol. Ces résultats corroborent ceux d’Alam (1985), de Horiguchi (2012), de Ontod et al. (2013) et de Ontod et al. (2015) qui ont montré que les enrichissements des substrats en ions Mn2+ ont progressivement un effet stimulateur et inhibiteur sur les croissances respectives de Oryza sativa, Hibiscus sabdariffa L. var. sabdariffa et Manihot esculenta crantz. La compréhension des raisons physiologiques de l’inhibition et de la stimulation de la croissance due à l’apport élevé en Mn est encore assez limitée. Les données essentielles de quantification minérale fournies par la littérature restent à ce jour sans explication spécifique sur les réponses physiologiques mises en place par la plante ; ce qui rend difficile la formulation d’une hypothèse (Ontod et al., 2015). Toutefois, en se référant aux travaux effectués sur d’autres espèces telles que le riz (Oryza sativa), la fève (Vicia faba L.), la rosselle (Hibiscus sabdariffa L. var. sabdariffa), le Jatropha (Jatropha curcas), le leucaena (Leucaena leucocephala) et le soja (Glycine max), les variations de croissance longitudinale obtenues dans la présente étude pourraient être attribuées à un seuil de tolérance lié à la capacité de l’espèce à accumuler de faibles concentrations de Mn dans les tiges (Alam, 1985; Shashi et Roy, 2011; Horiguchi, 2012; Ontod et al., 2013; Darmawan
347 Ephrem Nzengué, Alexis Nicaise Lepengué , Antoine Mitte Mbeang Beyeme, Stéphane Mombo, Dhert Souviens Tshi-tshi Ontod, Aurélien Mokéa and et al et al., 2017). Au-delà d’une valeur seuil, cette accumulation semble avoir un effet négatif sur la croissance. Les résultats de cette étude ont également révélé que les terrils de manganèse ont un effet inhibiteur sur l’abondance foliaire, la production et la croissance des tiges. L’évolution de ces indices est inversement proportionnelle à l’augmentation de la teneur en terrils de manganèse dans les substrats de culture. Bien que les chloroses et les nécroses soient manifestement les symptômes caractéristiques d’une toxicité manganifère au niveau foliaire (Fernando et Lynch, 2015; Millaleo et al., 2010), quelques auteurs y associent également la réduction des indices de surface et de biomasse foliaire (Ontod et al., 2013; Zhou et al., 2013; Ontod et al., 2015). En effet, les résultats de ce travail montrent qu’un apport massique de 25% de Mn dans le substrat de culture n’a pas d’effet significatif sur la variation d’abondance foliaire. Par contre, un apport de 50%, 75% et 100% de Mn entraine une réduction de l’abondance moyenne des feuilles et aussi celle de la surface foliaire. Ces résultats sont en accord avec l’hypothèse selon laquelle, il existe un seuil de tolérance de la teneur en Mn assimilable dans la solution du sol. Selon El-jaoual et Cox (1998), la toxicité du manganèse présente un seuil d’action au-delà duquel s’active un mécanisme qui entraine la réduction du poids sec des plantes. Cette réduction se fait à travers la chute des feuilles touchées par l’excès de manganèse, entrainant ainsi une réduction de l’abondance moyenne des feuilles. Les résultats de cette étude corroborent ceux de Ontod et al. (2015) qui a montré que l’augmentation du gradient de concentration en terrils de manganèse dans les substrats de culture entrainait une réduction des surfaces foliaires et des abondances moyennes des feuilles de bouture de Manioc cultivées sous serre. Aussi, les travaux de Ollagnier et Prevot (1955) et Ontod et al. (2013), ont respectivement montré que la teneur en manganèse dans les substrats de culture avait également une influence sur la ramification de la tige principale des cultures de l’arachide et la croissance radiale de la roselle. Cette étude sur la roselle (Hibiscus sabdariffa) a révélé un ralentissement de la croissance du diamètre des tiges des plantes cultivées sur des substrats constitués de 75% de Mn comparativement aux témoins. Ces résultats sont similaires à ceux obtenus par cette étude qui ont montré que l’augmentation de la concentration de manganèse dans les substrats de culture entrainait un ralentissement progressif du diamètre des tiges d’arachide. Au sujet de la productivité des tiges, très peu d’études de référence permettent de discuter des résultats obtenus. Cet indice bien important, est très peu utilisé dans les études sur la phytotoxicité liée aux métaux lourds. Pourtant il serait de nature à justifier l’augmentation de la production de biomasse aérienne des plantes. De façon générale, les terrils de manganèse ont un effet négatif sur les paramètres morphométriques de l’arachide. L’Analyse en Composante Principale révèle que l’augmentation de la teneur des substrats en terrils de manganèse entraine une réduction des paramètres de croissance et de bonne santé de l’arachide. Par ailleurs, l’analyse des corrélations entre les différentes variables révèle que les tailles des diamètres des tiges influencent fortement la hauteur des plantes d’arachide. Les individus ayant les plus grandes tailles sont ceux qui possèdent les plus grands diamètres. De même, le taux de ramification de la tige principale influence positivement l’abondance de feuilles d’arachide. Les moyennes de feuilles les plus élevées sont enregistrées sur les pieds d’arachide les plus ramifiés. La classification ascendante hiérarchique, basée sur des indices morphométriques, distingue clairement trois classes d’arachide. La première classe représente les plantes qui se développent sur les substrats à 0% et 25% de Mn. Leur concentration en manganèse n’a pas d’effet significatif sur la croissance et la santé de l’arachide. De telles concentrations de manganèse dans le milieu naturel ne semblent présenter aucun risque pour la culture de l’arachide. Au-delà d’un apport terrigène de 25% de Mn (50%, 75% et 100% de Mn) les individus sont morphologiquement différents des témoins. Les plantes d’arachide qui poussent dans ces substrats présentent des modifications morphologiques liées à un excès de manganèse dans les substrats. L’approche méthodologique utilisée dans cette étude est basée sur la discrimination morphologique des plantes d’arachide à partir du nombre de tige par plante, de la biomasse foliaire, du diamètre et de la hauteur des tiges. Ces indices, facilement observables et mesurables sur le terrain, peuvent permettre aisément aux agriculteurs locaux de reconnaitre et d’identifier les sols
Effets des Terrils de Manganèse de la Mine de Moanda (Gabon) sur Quelques Caractères Morphométriques de l’Arachide (Arachis hypogea L) 348 potentiellement à risques et susceptibles de contaminer les cultures. Toutefois, ces résultats ne permettent pas d’évaluer la bioaccessibilité humaine liée à la consommation des cultures issues de ces conditions expérimentales. Des travaux supplémentaires sont en cours pour évaluer la concentration en Mn et en d’autres métaux lourds dans le sol d’une part et les différents organes de l’arachide (graines, racines, tiges et feuilles) afin d’identifier les organes d’accumulation préférentielle de Mn, et évaluer le niveau exact de risque sur la santé lié à la consommation par les populations locales. 8. Conclusion L’objectif de cette étude était de quantifier en serre les effets du manganèse sur les paramètres morphométriques de l’arachide (Arachis Hypogea L) dans la région de Moanda au sud-Est du Gabon. Les résultats ont montré que le manganèse peut avoir des rôles antagonistes sur la croissance de l’arachide. Il provoque une augmentation à (25% et 50% de Mn), et une réduction à (75% et 100% de Mn) de la croissance longitudinale au sein des différents traitements comparativement au témoin (T0). Les signes visuels de chlorose, accompagnés d’un ralentissement de croissance, de la taille des racines, de la surface foliaire et de la biomasse sont exacerbés dans le traitement à 100% de Mn. Dans les autres traitements (25%, 50% et 75% de Mn), on observe des réductions morphologiques de croissance en rapport avec la surface foliaire, le nombre de tiges secondaires, l’abondance foliaire apparue par plante et le diamètre des tiges. Les paramètres de croissance des plantes utilisés dans cette étude, constituent de bons indicateurs de terrain susceptibles de permettre aux agriculteurs d’identifier les signes de toxicité manganique dans cette région du Gabon. De tels indicateurs facilement observables peuvent servir d’outils d’aide à la décision pour la prévention et la gestion des risques sanitaires liés à l’ingestion des cultures vivrières absorbant des concentrations anormalement élevées de manganèse. En ce sens, des études supplémentaires sont en cours pour évaluer la concentration en métaux lourds dans les différents organes de l’arachide. Remerciements Nous exprimons nos remerciements à la COMILOG et au Dr Christian BOUPASSIA pour avoir facilité l’acquisition des terrils de manganèse auprès de la compagnie. Nous remercions également Mlle Josiane Worah pour la relecture de ce document. References [1] Alam, S. M. (1985). Effects of iron and manganese on the growth of rice and on the contents of these elements in rice plants. Agronomie, 5, 487–490. [2] Alla, T. K., Bomisso, L. E., Ouattara, G., & Dick, E. A. (2018). Effets de la fertilisation à base des sous-produits de la pelure de banane plantain sur les paramètres agromorphologiques de la variété d’Aubergine F1 kalenda (Solanum melongena) dans la localité de Bingerville en Côte d’Ivoire. Journal of Animal & Plant Sciences, 38(3), 6292–6306. [3] Annerose, D. J. M. (1990). Recherches sur les mécanismes physiologiques d’adaptation à la séchereresse. Application au cas de l’arachide (arachis hypogaea L.) cultivée au Sénégal. These de Doctorat En Sciences Naturelles, Spécialité : Biologie et Physiologie Végétales. Université de Paris VII, 282. [4] Bénac, R. (1976). Action de la concentration en manganèse de la solution nutritive sur le comportement de l’arachide ( Arachis hypogaea L .). Oléagineux, 31(12), 539–543. [5] Boucelha, L., & Djebbar, R. (2015). Influence de différents traitements de prégermination des graines de Vigna unguiculata (L.) Walp. sur les performances germinatives et la toléranceg au
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